BALLAST | Michaël Ferrier : « Fukushima, c’est une situation de #guerre »
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« Éléments, animaux, humains, tout est en guerre », écrivait déjà Voltaire dans son poème sur le séisme de Lisbonne. Oui, un grand séisme, a fortiori quand il est suivi d’un tsunami et d’une catastrophe nucléaire, c’est une situation de guerre : je rappelle que dans toute la région ont été déployés plus de 100 000 hommes, 90 hélicoptères, 541 avions et 50 navires… Dès le 13 mars, 100 000 réservistes des Forces japonaises d’autodéfense (l’équivalent de l’armée japonaise) ont d’ailleurs été rappelés en urgence. Les familles des troupes d’auto-défense japonaises qui mouraient pendant les « opérations » — terme militaire — pouvaient recevoir 90 millions de yens : ce sont les montants attribués aux soldats envoyés en Irak ou à ceux qui patrouillent au large de la Somalie dans les zones infestées de pirates. Et quand la contamination radioactive s’en mêle, alors là, c’est encore pire : c’est encore une guerre, mais plus sournoise et autrement délétère. Le vocabulaire utilisé dans les journaux japonais est d’ailleurs assez éloquent : on parle de la nécessaire « reconquête » des réacteurs endommagés, qui se fera au terme d’une « guerre de tranchées »… On utilise des drones et des robots, dont la plupart ont déjà été testés dans les zones de conflits internationaux, en Irak et en Afghanistan notamment. Je rappelle aussi que le 2 avril, pour la première fois de son histoire, 15 des 145 membres de la Chemical Biological Incident Response Force ont été déployés hors du territoire américain, dans l’est du Japon. C’est un corps des Marines spécialement entraîné pour les situations d’urgence biologique, chimique ou nucléaire : trente-deux véhicules, des tonnes de matériel transportées dans pas moins de sept avions, un laboratoire mobile spécialisé dans la détection des substances toxiques et la décontamination… Les paysages, la faune, la flore, les êtres humains… tout est menacé. L’incinération, l’enfouissement, le stockage : tout pose problème. Plusieurs endroits sur Terre sont d’ores et déjà condamnés, et à la lettre, inhabitables : voyez sur ce point le magnifique texte de François Bizet intitulé « L’inhabitat2 ». On ne se débarrasse pas ainsi d’éléments invisibles qui ont entre des dizaines et des milliers d’années de nocivité. Je le dis calmement à ceux, nombreux, qui sous-estiment le danger nucléaire : c’est une guerre à laquelle ils nous condamnent, tôt ou tard, et qui fera des victimes. Et en premier lieu sur cette terre de France, qu’ils disent tant chérir.
#énergie_nucléaire #Fukushima (Penser avec) #résilience (assignation à)