Jean-Jacques Pauvert : Oh, le niveau des libraires est bien meilleur aujourd’hui qu’autrefois ! Dans les années 50-60, c’était effrayant. Il y avait beaucoup de vieux libraires qui attendaient le client derrière leur comptoir prêts à le mettre à la porte. Ils ont disparu heureusement. Maintenant il y a plein de libraires tout à fait passionnants qui s’intéressent vraiment au livre, surtout des femmes d’ailleurs. J’en ai rencontré beaucoup parce que quand j’ai publié mes mémoires j’ai fait énormément de signatures, dans toute la France. Mais elles ont leur idée ! Elles ont leur niveau ! Je ne vais pas leur parler de Roussel par exemple !
Je fais une digression, mais Roussel par exemple, c’est une histoire ahurissante. Imaginez que dans le milieu des années 80, on retrouve tout le stock de Roussel, au garde-meuble ! Le dépôt était arrivé au bout des cinquante ans, plus personne ne payait, ils s’apprêtaient donc à le saisir, et là l’employé du garde-meuble découvre tout un tas de manuscrits extrêmement bien reliés : tout le fond Roussel que tout le monde croyait détruit ! Toujours est-il qu’ils m’ont contacté, et aussitôt j’en parle à Antoine Gallimard. Eh bien, ça a traîné, il a hésité, et finalement il ne faisait rien. Du coup je finis par me lasser et je parle de l’affaire à Fayard. Ils me demandent : « Combien ça rapporte ». je leur ai répondu : « Absolument rien, mais il faut le faire sur la gloire ». Eh bien cela s’est conclu en cinq minutes. Eh bien ça c’est un bon éditeur.