person:gerardo ceballos

  • « La destruction de l’environnement est-elle une condition de la croissance ? »

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/09/16/la-destruction-de-l-environnement-est-elle-une-condition-de-la-croissance_51

    Des études alarmantes sur la dégradation de la biodiversité ne suscitent aucune réaction à la hauteur des enjeux. Peut-être parce que cette destruction de la nature pourrait doper la croissance, estime dans sa chronique Stéphane Foucart, journaliste au « Monde ».

    Ce fut l’étude-choc de l’été. Mi-juillet, dans la revue de l’Académie des sciences américaine, Gerardo Ceballos (Université nationale autonome du Mexique) et ses coauteurs donnaient une idée de ce qu’il reste de vivant – sans compter les sept milliards d’humains et la cohorte immense de leurs animaux domestiques – à la surface de la Terre. Au total, concluaient les chercheurs, sur les quelque 180 espèces de mammifères étudiées, presque toutes ont perdu plus de 30 % de leur aire de répartition depuis le début du XXe siècle et 40 % en ont abandonné plus de 80 %… Depuis 1970, ce sont au moins 50 % des animaux qui ont disparu.

    Ces chiffres suscitent bien sûr l’effroi, comme avant eux une litanie de travaux alarmants sur l’érosion de la vie à la surface de la Terre. Et pourtant, rien ne change. Comment mobiliser les responsables politiques, les capitaines d’industrie, les médias ? Comment convaincre de cette évidence qu’il ne faut pas laisser le vivant s’étioler ?

    Rien de ce qui n’a pas un intérêt économique immédiatement chiffrable ne semble pouvoir être sauvé. Alors, depuis la fin des années 1970 et singulièrement depuis une quinzaine d’années, économistes et écologues ont développé la notion de « services écosystémiques » : il s’agit de chiffrer les services rendus gratuitement par la nature. La pollinisation (service rendu par les abeilles, certains insectes, oiseaux, etc.) « pèse » ainsi plusieurs centaines de milliards de dollars annuels ; les bénéfices d’un kilomètre de mangrove (absorption de carbone, protection des zones côtières, etc.) sont généralement évalués à plusieurs centaines de milliers de dollars par an ; ceux des récifs coralliens de Guadeloupe s’élèvent, chaque année, à une centaine de millions d’euros, etc. Chaque écosystème pourrait, à l’extrême, avoir une valeur chiffrée et être ainsi intégré au fonctionnement des économies. Afin, bien sûr, de le protéger.

    Un terrible malentendu

    Mais il y a peut-être là, hélas, un terrible malentendu. Un malentendu qui pourrait rendre vaine toute volonté de protéger la nature en évaluant la valeur des services qu’elle nous rend gratuitement. Et si la destruction de l’environnement n’était pas seulement une conséquence fortuite de la croissance économique, mais aussi et surtout l’un de ses carburants ? Et si l’érosion des services écosystémiques était, quelle que soit leur valeur, l’une des conditions déterminantes de l’accroissement du produit intérieur brut ? Et si, en un mot, la destruction de la nature était nécessaire à la croissance ?

    C’est l’idée, assez radicale mais aussi stimulante, soutenue en 2002 par deux économistes italiens dans un article publié par la revue Ecological Economics. Voici comment Stefano Bartolini (université de Sienne, Italie) et Luigi Bonatti (université de Trente, Italie) résument l’affaire dans leur jargon : « Nous présentons dans cet article une vision de la croissance différente du paradigme dominant, expliquent-ils, avec un sens aigu de la litote. Nous modélisons la croissance comme un processus dirigé par les réactions de défense des individus face aux externalités négatives générées par le processus de production. »

    Schématiquement, les deux économistes proposent donc une vision dans laquelle l’activité économique dégrade le tissu social et environnemental. Conséquence de cette dégradation, les services que rendent gratuitement l’environnement social (garder vos enfants, aller vous chercher du pain à la boulangerie, réparer votre système d’exploitation Windows, etc.) ou naturel (polliniser vos cultures, maintenir la fertilité des terres agricoles, etc.) s’érodent. Pour pallier la disparition de ces services gratuits, les agents économiques ont recours à des services marchands. Mais pour y avoir recours, ils doivent disposer de moyens financiers plus importants et doivent donc accroître leur activité économique. Et, ainsi, contribuer à nouveau, un peu plus, à la dégradation du tissu social et environnemental, etc. La boucle est bouclée.

    Une sorte de « grand remplacement »

    Si cette vision de la croissance est juste, alors toute politique dont le but ultime est l’augmentation du produit intérieur brut est vouée à détruire l’environnement. Rien ne pourrait être sauvé, car l’objectif ultime à atteindre serait une sorte de « grand remplacement » des services gratuits (offerts par la nature ou les structures sociales) par des services commerciaux qui, eux, dopent le PIB. D’où ce paradoxe : plus un écosystème est précieux, plus il peut être rentable, pour maximiser la croissance, de le détruire.

    Gaël Giraud, économiste en chef de l’Agence française de développement (AFD), réserve son opinion sur les conclusions de MM. Bartolini et Bonatti, mais confirme l’existence de situations dans lesquelles produire une externalité négative (avoir un accident de voiture, polluer une rivière…) peut augmenter le PIB. « La disparition des abeilles n’est d’ailleurs pas une si mauvaise nouvelle pour certains économistes, puisqu’elle pourrait conduire au développement et à la commercialisation de solutions techniques de pollinisation », déplore-t-il. Au reste, ce mouvement est en marche : de plus en plus, pour pallier l’absence des pollinisateurs sauvages, qui disparaissent plus vite encore que les abeilles, des apiculteurs développent des services commerciaux de location de leurs ruches, afin de polliniser les plantations d’amandiers, de pommiers, etc. C’est déjà, en Amérique du Nord, une industrie…

    Il faut donc espérer que nos deux économistes italiens se trompent. Car, s’ils ont raison, le fait de se diriger vers un monde devenant progressivement invivable pourrait ne jamais être signalé à nos responsables politiques par une chute de la croissance. Leur unique boussole les amènerait ainsi, et nous avec, droit sur l’orage.

  • La sixième extinction de masse des animaux s’accélère
    https://www.crashdebug.fr/sciencess/13757-la-sixieme-extinction-de-masse-des-animaux-s-accelere

    Dans une étude très alarmante, des chercheurs concluent que les espèces de vertébrés reculent de manière massive sur Terre, à la fois en nombre d’animaux et en étendue.

    Il ne reste plus que 7000 guépards dans le monde. JOHN WESSELS / AFP

    C’est ce qu’ils nomment « un anéantissement biologique ». Dans une étude très alarmante, publiée lundi 10 juillet dans les Proceedings of the National Academy of #Sciences (PNAS), des chercheurs américains et mexicain concluent que les espèces de vertébrés reculent de manière massive sur Terre, à la fois en nombre d’animaux et en étendue. Une « défaunation » aux conséquences « catastrophiques » pour les écosystèmes et aux impacts écologiques, économiques et sociaux majeurs.

    Les trois auteurs, Gerardo Ceballos (Université nationale autonome du Mexique), Paul Ehrlich et Rodolfo Dirzo (...)

    #En_vedette #Actualités_scientifique

  • La sixième #extinction de masse des #animaux s’accélère
    http://www.lemonde.fr/biodiversite/article/2017/07/10/la-sixieme-extinction-de-masse-des-animaux-s-accelere-de-maniere-dramatique_

    C’est ce qu’ils nomment « un anéantissement biologique ». Dans une étude très alarmante, publiée lundi 10 juillet dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), des chercheurs américains et mexicains concluent que les espèces de #vertébrés reculent de manière massive sur Terre, à la fois en nombre d’animaux et en étendue. Une « #défaunation » aux conséquences potentiellement « catastrophiques » pour les #écosystèmes et aux sérieux impacts écologiques, économiques et sociaux.

    Les deux principaux auteurs, Gerardo Ceballos (université nationale autonome du Mexique) et Paul Ehrlich (Stanford), n’en sont pas à leur coup d’essai sur le thème de l’érosion de la biodiversité. En juin 2015, ils avaient déjà publié une autre étude dans la revue Science Advances, qui montrait que la faune de la Terre était d’ores et déjà en train de subir sa sixième extinction de masse. Ils avaient calculé que les disparitions d’espèces ont été multipliées par 100 depuis 1900, soit un rythme sans équivalent depuis l’extinction des dinosaures il y a 66 millions d’années.

    Cette fois, les chercheurs ont cherché à quantifier le déclin non plus du nombre d’espèces mais des populations, c’est-à-dire des groupes d’animaux sur un territoire. « L’accent mis sur l’extinction des espèces peut donner l’impression que la biodiversité terrestre n’est pas dramatiquement et immédiatement menacée, mais qu’elle entre juste lentement dans un épisode d’érosion majeur, que l’on pourra combattre plus tard », expliquent les auteurs.

    Cette approche présente plusieurs défauts à leurs yeux : l’opinion publique peine à mesurer la gravité du phénomène à l’œuvre (deux espèces disparaissent chaque année, ce qui paraît faible, surtout quand ces dernières sont peu connues ou peu répandues). Et elle ne permet pas de correctement évaluer le problème en cours. Les espèces les plus communes enregistrent en effet des reculs massifs de leurs effectifs, sans pour autant être d’ores et déjà menacées. « Or, la disparition des populations est un prélude à celle des espèces, préviennent les scientifiques. Une analyse détaillée du déclin des effectifs d’animaux rend le problème bien plus clair et inquiétant. »

    • By #2080, without dramatic reductions in emissions, southern Europe will be in permanent extreme drought, much worse than the American dust bowl ever was.

      (...)

      Malaria, for instance, thrives in hotter regions not just because the mosquitoes that carry it do, too, but because for every degree increase in temperature, the parasite reproduces ten times faster. Which is one reason that the World Bank estimates that by #2050, 5.2 billion people will be reckoning with it.

      on peut l’ajouter aux compilations :
      https://seenthis.net/messages/524060
      https://seenthis.net/messages/499739

      #effondrement #collapsologie #catastrophe #fin_du_monde #it_has_begun #Anthropocène #capitalocène

    • The Power and Peril of “Climate Disaster Porn” | New Republic
      https://newrepublic.com/article/143788/power-peril-climate-disaster-porn

      The article has generated significant controversy, and not just from the usual denier crowd. “I am not a fan of this sort of doomist framing,” Michael Mann, a climate scientist who often warns of the potentially devastating impacts of global warming, wrote in a lengthy Facebook post. “It is important to be up front about the risks of unmitigated climate change, and I frequently criticize those who understate the risks. But there is also a danger in overstating the science in a way that presents the problem as unsolvable, and feeds a sense of doom, inevitability and hopelessness.” In a Medium post, Daniel Aldana Cohen, an assistant sociology professor at the University of Pennsylvania who works on climate politics, called the piece “climate disaster porn.”

    • Scientists explain what New York Magazine article on “The Uninhabitable Earth” gets wrong
      https://climatefeedback.org/evaluation/scientists-explain-what-new-york-magazine-article-on-the-uninhabita

      I am sympathetic to the author’s efforts to raise awareness about such [high-end] scenarios, including impacts that are not always well discussed, and agree that we [scientists] tend to focus too much on median outcomes. Nevertheless, I think the article would have gained from a more explicit acknowledgement that this particular focus is the goal of the article, as well as a from an explicit discussion (even if only qualitative) of the probabilities associated with these scenarios. Absent that, I am afraid the article, as such, feels misleading, or at least confusing for the general public.

    • Réchauffement climatique : attention, planète en danger !
      https://www.franceculture.fr/emissions/revue-de-presse-internationale/rechauffement-climatique-attention-planete-en-danger

      Malheureusement, l’enquête du NEW YORK MAGAZINE n’est pas la seule à pointer le danger qui menace aujourd’hui notre planète. Selon une analyse publiée, cette fois-ci, dans la revue NATURE, et intitulée « 2020 : le point de bascule », l’humanité n’aurait plus que trois ans pour sauvegarder le climat terrestre. Si les émissions de gaz à effet de serre continuent à augmenter après 2020, ou même à rester stables, alors les objectifs de température fixés à Paris seront inaccessibles.

      Et comme si tout cela ne suffisait pas, une autre étude fait, elle aussi, la Une de très nombreux quotidiens depuis quelques jours. Là encore, l’avertissement résonne de manière effrayante : Il y est écrit que nous sommes entrés dans l’ère de « l’anéantissement biologique ». Publiée lundi dans la revue scientifique PROCEEDINGS OF THE NATIONAL ACADEMY OF SCIENCES, cette étude réalisée par des chercheurs mexicains et américains dresse un constat sans appel : selon elle, la disparition des espèces vertébrées dans les dernières décennies est telle, qu’elle s’apparente à une extinction de masse, un « anéantissement biologique ». Evidemment, « ce terme serait alarmiste si nous n’avions pas les données », se justifie aussitôt l’un des chercheurs dans les colonnes de THE ATLANTIC. L’étude montre, en particulier, que l’ensemble des 177 espèces de mammifères étudiées ont perdu au moins 30 % de leur territoire entre 1900 et 2015 et que plus de 40 % d’entre elles ont connu une forte baisse de population. Mais surtout, elle met l’accent sur le fait que des espèces qui ne sont pas considérées comme en danger voient, elles aussi, leur population diminuer.

    • La revue de presse de Thomas Cluzel sur France Culture cite d’autres papiers déjà cités ici :

      Three years to safeguard our climate
      Christiana Figueres, Hans Joachim Schellnhuber, Gail Whiteman, Johan Rockström, Anthony Hobley& Stefan Rahmstorf
      Nature 546:593–595, le 29 juin 2017

      et

      Biological annihilation via the ongoing sixth mass extinction signaled by vertebrate population losses and declines
      Gerardo Ceballosa, Paul R. Ehrlich and Rodolfo Dirzo
      PNAS, le 5 juillet 2017

      et le papier original de David Wallace-Wells dans le New York Magazine a aussi donné lieu à cet autre article en français en juillet dernier :

      Changement climatique : les 8 apocalypses à venir
      Vincent Lucchese, Usbek & Rica, Juillet 2017
      https://seenthis.net/messages/624916

      1. La grande submersion, la grande extinction
      2. Une chaleur mortelle
      3. La famine mondiale
      4. Les pestes climatiques
      5. L’air irrespirable
      6. La guerre perpétuelle
      7. L’effondrement économique permanent
      8. Les océans empoisonnés