person:hafez el-assad

  • Historicoblog (3) : Mourir pour Assad 7/La Garde Nationaliste Arabe
    http://historicoblog3.blogspot.com/2016/10/mourir-pour-assad-7la-garde.html

    Mourir pour Assad 7/La Garde Nationaliste Arabe
    La Garde Nationaliste Arabe fait partie de l’éventail de milices pro-régime syrien composées de combattants étrangers apparues à partir de 2013 pour soutenir les forces de Bachar el-Assad à bout de souffle, et notamment à courts d’effectifs. Reposant sur une idéologie arabe nationaliste, antisioniste et pro-Palestine, cette formation a mis en ligne 4 bataillons qui sont intervenus depuis 3 ans sur la plupart des fronts importants pour le régime syrien. La milice se démarque par ce discours idéologique, une proximité avec le régime, et des recrues qui viennent pour l’essentiel du Proche et Moyen-Orient.

    Historique

    La Garde Nationaliste Arabe (GNA), milice créée pour soutenir le régime syrien, est constituée de personnes adhérant encore à une certaine idée du nationalisme arabe au Moyen-Orient et au Maghreb1. Dans l’article qu’Aymenn Jawad al-Tamimi avait consacré à GNA en janvier 2014, un militant égyptien explique que cette milice a été formée en avril 2013 (mai selon d’autres sources2) par des membres de la Jeunesse Nationaliste Arabe de plusieurs pays, et que 4 bataillons ont été constitués, portant les noms de « martyrs » : Wadih Haddad, Haydar al-Amali, Mohamed Brahmi, et Jules Jammal. Mohamed Brahmi est un politicien tunisien laïc qui a fondé le Mouvement Populaire après la chute de Ben Ali. Il a été assassiné en juillet 2013. Wadih Haddad, Palestinien chrétien, a milité au Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP), connu pour ses détournements d’avions dans les années 1960-1970. Jules Jammal était un chrétien de la marine syrienne qui aurait coulé un navire français durant les combats de la guerre de Suez en 1956. Haydar al-Amali était un penseur nationaliste libanais décédé en 2007 après ses blessures reçues dans la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël. GNA aurait été formée par Abu A’ed, un nationaliste arabe libanais du sud du pays, à Jabal Amal, après les frappes israëliennes en Syrie3. C’est un vétéran du combat contre les Américains en Irak après 2003. Le Camp de la Jeunesse Nationaliste Arabe dont est tirée GNA est lui-même issu du Mouvement Nationaliste Arabe fondé par George Habache, un intellectuel palestinien marxiste : le mouvement est panarabe et antisioniste.

    L’idéologie du groupe, en plus du nationalisme arabe, reprend la rhétorique du régime syrien d’agression impérialiste contre Assad, et rajoute en plus comme objectif la libération de la Palestine. La propagande du groupe aime utiliser les grandes figures du nationalisme arabe : Nasser, mais aussi Saddam Hussein, en plus du Hezbollah et de Bachar el-Assad. La Jeunesse Nationaliste Arabe fournit des recrues venant de Sidon, au Liban, de Gaza, et de l’Egypte. GNA, qui comprend des recrues venant d’Egypte mais aussi d’Irak, opère sur une bonne partie du territoire syrien : Damas, Alep, Homs et Deraa. Elle se concentre surtout à Damas en 2013-2014, participant notamment à l’offensive dans le Qalamoun. Comme souvent, les martyrs sont mis à l’honneur dans la propagande, comme Aamer Eid Abdullah - "Abu Nasir", tué en novembre 2013. GNA comprend aussi, d’après le journal libanais al-Akhbar, des recrues libanaises. Les camps d’entraînement de GNA auraient été installés dès mai 2013 sur le mont Qasioun, à Damas : les miliciens sont encadrés par l’armée syrienne. Le recrutement de Palestiniens et d’Egyptiens se serait accru après la menace de frappes aériennes américaines en août 2013 contre le régime syrien, qui venait d’utiliser des armes chimiques dans la Ghouta à Damas. GNA comprend, en plus des autres nationalités déjà mentionnées, des Tunisiens, des Yéménites, et des Syriens, aussi. En mai 2014, al-Akhbar lui donne un effectif d’un millier d’hommes, qui aurait déjà perdu près de 50 combattants tués. Les recrues sont jeunes, entre 18 et 30 ans, avec quelques-unes de 16-17 ans, encadrées par des hommes plus âgés passés par les armées égyptienne ou irakienne. On trouve par exemple un ex-officier de l’armée égyptienne âgé de 36 ans. La GNA a combattu aux côtés du Hezbollah ou du Parti Social-Nationaliste Syrien. La GNA dispose d’une branche féminine : 70 recrues en mai 2014, âgées de 19 à 35 ans, assurant notamment des tâches de sécurité à l’arrière (contrôle des checkpoints, etc). A la mi-mai 2014, la Garde Nationaliste Arabe est engagée sur le front de Mleha, dans l’est de la Ghouta. Comme la milice irakienne Liwa Assad Allah al-Ghaleb à la même époque, elle utilise des roquettes Volcano4.

    Miliciennes de GNA, octobre 2014, Damas.

    Je n’ai pas retracé tout le parcours de la formation depuis début 2014, date où je l’avais déjà évoquée sur mon blog, aussi je me suis concentré sur l’année 2016 pour donner une idée de l’engagement militaire de GNA en Syrie. En mai 2016, GNA combat à Darayya, au sud de Damas, où l’unité perd un de ses commandants5. En juin, elle a des combattants à la fois sur le front de Palmyre, à Darayya et à Ithriya où elle subit manifestement des pertes lors de la contre-attaque de l’EI pour bloquer la poussée du régime sur Raqqa6. Un bataillon est aussi présent dans la Ghouta orientale. En juillet, le bataillon Brahmi combat à Alep. En août, GNA combat toujours dans la Ghouta occidentale. Le bataillon Mohamed Brahmi lui est engagé contre l’EI à l’est d’Alep. Début septembre, une unité au moins de GNA est présente dans les combats à Alep. Le 6 octobre 2016, une vidéo du groupe indique qu’une partie au moins de GNA combat à l’est d’Alep avec le régime syrien. Le 14 octobre, des photos montrent que le bataillon Haydar opère de concert avec la 4ème division blindée du régime (42ème brigade) à Aldarkbbia. Une vidéo du 18 octobre 2016 indique qu’un bataillon au moins de GNA, Haydar al-Amali, opère dans la Ghouta occidentale à Damas, toujours à Aldarkbia.

    GNA à Alep, septembre 2016.

    En protection du régime à Suweyda, chez les Druzes syriens.

    Octobre 2016, dans la Ghouta occidentale. Le bataillon de GNA a le renfort d’un char du régime que l’on distingue à l’arrière-plan.

    Propagande

    GNA dispose de sa propre page Facebook7, régulièrement mise à jour et proposant une abondante iconographie qui confirme l’idéologie de la formation récapitulée ci-dessus. En juin 2016, Bachar el-Assad est photographié en visite auprès de GNA dans la Ghouta orientale. La cause de la Palestine est souvent évoquée (15 août). Les portraits et les discours de Nasser apparaissent souvent sur le mur de GNA, comme le 20 août 2016. La Jeunesse Nationaliste Arabe défile, avec drapeaux et bras tendus, à Qardaha, fief natal d’Assad, le 1er septembre 2016. Le 10 septembre, des miliciens de GNA accompagnent des représentants du régime chez les Druzes de la province de Suweida. Le portrait de Bachar el-Assad apparaît souvent en fond es photos ou autres montages, comme sur ce cliché du 16 septembre. Le 17 septembre, GNA reçoit à Alep le sheikh Akraam al-Kaabi, le chef de la milice irakienne chiite Harakat Hezbollah al-Nujaba qui combat aussi dans le secteur pour le régime syrien. Le 21 septembre, un poster honore Mahmoud Kassem, « martyr » tombé dans les combats en Syrie. Le 23 septembre, un convoi funéraire rassemble de nombreux véhicules et militants de la formation. Les cercueils sont salués par un bras droit tendu. 2 autres « martyrs » sont honorés le 14 octobre. Une photo du 15 octobre montre l’enterrement de 2 « martyrs » de GNA. Parmi eux, sans doute ce mort au combat qui a droit à son poster de propagande le même jour.

    Lors du jour al-Quds, GNA déplace avec elle à Damas une maquette de la mosquée de Jérusalem.

    La Jeunesse Nationaliste Arabe à Qardaha (septembre 2016).

    On remarque Nasser sur la poitrine du combattant de ce montage.

    Assad visite un blessé.

    Hafez el-Assad est aussi célébré par la propagande de GNA.

    Objectif : libérer la Palestine.

    Le portrait d’Assad, omniprésent.

    A droite, Akram al-Kaabi, chef de Harakat Hezbollah al-Nujaba, accueilli à Alep par GNA.

    Nasser, encore et toujours.

    Effectifs, équipement, tactiques

    GNA ne communique pas énormément sur ses opérations militaires, ou en tout cas ne les montre pas dans le détail, visuellement parlant. D’après ses publications de propagande, on déduit que GNA est essentiellement une force d’infanterie, avec AK-47, mitrailleuses PK et RPG-7 surtout. Les véhicules blindés sont fournis, en appui, par le régime syrien, comme ce char visible sur une vidéo d’octobre 2016. Le 1er octobre, une photo montre cependant un combattant de GNA à côté d’un lance-missiles antichars Kornet. Une photo du 13 octobre 2016 laisse penser que GNA dispose peut-être de fusils anti-sniping Sayyad 2/AM 50 de 12,7 mm iraniens. Les effectifs, sans être très fournis, permettent visiblement d’alimenter les 4 bataillons qui composent la formation et qui sont déployés sur différents fronts.

    RPG-7 avec charge tandem.
    Missile antichar Kornet.

    Fusil de sniping lourd AM 50 de 12,7 mm.

  • cibler les barrages turcs du haut Euphrate ?
    http://magazine.com.lb/index.php/fr/confidences/confidences-liban-?issue_id=222

    Les plans secrets Nouh I et II
    Palabre dans les milieux politiques à Beyrouth sur les plans Nouh I et Nouh II. Un expert militaire signale que des diplomates occidentaux portent un grand intérêt aux détails de ces plans militaires, qui projettent de cibler la destruction des barrages turcs du Haut-Euphrate en cas de confrontation globale entre Damas et Ankara. Les particularités de ces deux plans ne sont pas toutes connues, mais ce que l’on sait c’est qu’ils ont été établis du temps du président Hafez el-Assad, puis remis au goût du jour par l’actuel commandement syrien. Des missiles stratégiques syriens, qui étaient restés loin de la surveillance satellite jusqu’à présent, ont en partie été déployés pour la première fois depuis le début de la guerre syrienne sur les rampes de lancement, en prévision d’une éventuelle aventure militaire menée par la Turquie et les pays du Golfe. L’expert confirme, par ailleurs, les déclarations faites par une source russe faisant état d’un pont aérien entre l’Iran et la Syrie, qui fonctionne à plein régime, pour transporter des batteries de missiles sophistiquées et des unités militaires d’élite à la frontière nord. Pour cet expert, l’information sur la mise sur pied d’unités spéciales nées d’une coopération entre les services secrets de Damas, Téhéran et Moscou - en plus du Hezbollah - chargées de liquider les chefs des groupes terroristes, est avérée.

  • Nicolas Dessaux : Qu’est-ce que l’Etat islamique ? Éléments d’analyse marxiste
    http://www.mondialisme.org/spip.php?article2385

    Extrait du site http://communisme-ouvrier.info/?Qu-est-ce-que-l-Etat-islamique * 20 novembre 2015 On lit souvent que l’État islamique est une création de l’Occident. Qu’en penses-tu ? Nicolas Dessaux : La genèse de l’État islamique, ou Daesh, en 2006, dans le contexte de la guerre civile en Irak, (...) — 52 (décembre 2015) Premiers questionnements sur les massacres du 13 novembre 2015 et leurs origines, http://communisme-ouvrier.info/?Qu-est-ce-que-l-Etat-islamique

    • Considérer l’État islamique comme une pure création occidentale, c’est considérer #Daesh comme une simple marionnette en se contentant de chercher qui tire les ficelles. La version atténuée de ce mode de pensée consiste à y voir le simple produit des circonstances, en pointant du doigt les puissances impérialistes ou des considérations géostratégiques selon les présupposés politiques de l’auteur. Ce qui est gênant dans ces analyses, même si elles peuvent signaler des déterminants intéressants de la situation, c’est qu’elles esquivent l’analyse de Daesh comme acteur autonome, comme sujet politique. Au fond, c’est une pensée teintée de colonialisme qui voit le Moyen-Orient comme le réceptacle passif des tensions impérialistes, seuls véritables sujets agissants. C’est un travers fréquent de sortir du cadre de l’analyse de classe pour s’en tenir à l’analyse géopolitique dès que l’on touche au Moyen-Orient.

      Comment, justement, analyser l’État islamique en termes de classe sociale ?

      Nicolas Dessaux : Daesh représente donc les intérêts d’une classe bien déterminée, la fraction évincée de deux États où la #bureaucratie et l’#armée jouaient un rôle essentiel, en l’absence d’une véritable bourgeoisie, d’une classe capitaliste au sens propre. Son insistance à se présenter comme un véritable Etat, comme l’État islamique, et à s’entourer de tous les attributs de la souveraineté, ne sont pas anecdotiques, mais expriment sa véritable nature de classe. Cela ne l’empêche pas d’entrer en relation avec le marché international, que ce soit pour vendre du pétrole, acheter des armes ou réaliser des opérations financières, comme d’autres bureaucraties avant elle, mais assimiler Daesh à « la bourgeoisie » de manière générique, comme on le lit parfois, est aussi trivial que d’en faire des « fous de dieu » sans base sociale. Au contraire, la place que l’État islamique a prise comme acteur régional est liée à sa situation de classe.

      L’État islamique est installé à cheval sur la frontière syro-irakienne. Ce sont deux pays dans lesquels l’économie est organisée par l’État. La classe bureaucratique qui domine l’État tire ses revenus de l’impôt, mais aussi du capital dont elle dispose à titre collectif, et enfin de la corruption, quasiment institutionnalisée. Les régimes baasistes de Saddam Hussein et d’Hafez El-Assad avaient nationalisé l’essentiel de la production pétrolière, minière et industrielle. Ils avaient imposé le monopole de l’État sur le commerce extérieur. Le secteur privé pesait moins de 10% de l’activité économique et concernait surtout les petites entreprises. La Bourse syrienne n’existe que depuis 2009, par exemple. Dans les années 1990, au cours de la vague néolibérale, la Syrie a privatisé une faible partie de son économie, mais les privatisations ont surtout profité aux enfants de bureaucrates. C’est la disposition de charges publiques qui permet d’accéder au capital et non le contraire. Cette nouvelle bourgeoisie est entièrement dépendante de l’Etat, c’est-à-dire de la bureaucratie et de l’armée. Son influence politique est donc très faible.

      Au Kurdistan d’Irak, une #classe de nouveaux riches, d’entrepreneurs privés, est apparue après la répression du soulèvement des conseils ouvriers en 1991. Elle est en grande partie formée par d’anciens émigrés aux Etats-Unis ou d’autres pays occidentaux, qui ont fait fortune là-bas et sont revenus investir dans leur région natale à la faveur de l’autonomie de fait qu’elle a connue pendant douze ans, entre les deux guerres du Golfe. Mais elle reste très liée à l’appareil des partis nationalistes qui se partagent le pouvoir, l’UPK et le PDK.

      Dans le reste de l’Irak, cette nouvelle bourgeoisie n’a commencé à se développer qu’avec l’occupation, à partir de 2003. Mais le rythme des privatisations est très lent. La guerre civile est un frein aux investissements, les infrastructures sont obsolètes et déliquescentes, la main-d’œuvre la plus qualifiée a quitte le pays. Si bien que l’État reste gestionnaire d’une grande partie de l’économie. Quand on parle de bourgeoisie dans ces pays, il faut donc être très prudent car c’est l’État qui est le principal détenteur de capitaux et le principal propriétaire foncier.

      Dans ces deux pays, la classe qui tient les rênes de l’État, la bureaucratie et l’armée, a éclaté. En Irak, dès les premières années de l’occupation les Américains ont mis en place la débaasisation de l’administration et de l’armée. Ils ont évincé systématiquement les membres du parti Baas, y compris dans la gestion des entreprises. Mais, dans ce régime totalitaire, la carte du parti était quasiment obligatoire pour obtenir une place dans l’appareil d’État ou dans l’économie, à quelque niveau que ce soit. La purge a profité à la clientèle des partis installés au pouvoir par les forces d’occupation, c’est-à-dire pour l’essentiel les partis islamistes chiites.

      Or, le #baasisme avait fini, surtout entre les deux dernières guerres du Golfe, par se muer en #islamo-nationalisme. Contrairement à une légende soigneusement entretenue en France, le baasisme n’as jamais été véritablement laïque, mais il s’est rapproché de la religion quand le socialisme a cessé d’être une référence mobilisatrice, après 1991. Le sunnisme était devenu sa base idéologique, d’autant plus que les chiites étaient considérés, depuis la guerre Iran-Irak, comme des ennemis de l’intérieur, une sorte de cinquième colonne toujours prête à trahir au profit de l’Iran chiite. L’armée américaine a simplement retourné le processus, en plaçant les partis islamistes chiites au pouvoir et les sunnites en suspicion, comme s’ils étaient forcement des partisans de Saddam Hussein. C’est sur la base de cet essentialisme ethnico-religieux que la guerre s’est développée.

      Pour les officiers et les administrateurs évincés du pouvoir, la lutte armée contre l’occupation et les attentats aveugles contre les chiites faisaient partie du même processus de reconquête de leur pouvoir perdu. Elle était préparée de longue date par le régime de Saddam Hussein. Après tout, ce dernier avait fait ses premières classes dans la lutte armée pour la prise du pouvoir par le parti Baas, dès la fin des années 1950. Dans la guerre civile, les groupes armés sunnites représentaient les intérêts de cette fraction évincée de l’armée et de l’administration.

      Lorsqu’ils ont compris où menait leur politique de débaasisation, les Etats-Unis ont infléchi leur politique et cherché à réintégrer les groupes armés sunnites, d’autant plus que cette politique les privait de nombre d’administrateurs compétents. Ils ont utilisé, avec un succès limité, certains de ces groupes comme mercenaires contre Al-Qaeda, en jouant sur l’opposition entre leur islamo-nationalisme et le djihadisme, très hostile au nationalisme. Mais la branche irakienne d’Al-Qaeda s’est spécialisée dans les attentats anti-chiites, contrairement aux habitudes du réseau international plus favorable à une vision plus unitaire de l’Oumma. Elle pouvait donc apparaître comme la seule à poursuivre à la fois le combat contre les Etats-Unis et contre les chiites, la seule à défendre vraiment les intérêts de la fraction évincée de l’État. Lorsque Al-Qaeda a dû se retirer en Syrie à la fin de la guerre civile, elle a conservé leur soutien. Aujourd’hui, l’encadrement militaire de l’État islamique est largement assuré par d’anciens officiers baasistes irakiens, tandis que son contrôle sur les villes s’appuie sur les administrations en place.

      En Syrie, le processus est un peu différent, mais convergent. Lors du printemps arabe du 2011, la machinerie de l’État s’est fractionnée jusqu’au plus haut niveau des ministères, de la diplomatie et de l’armée. Ceux qui dénonçaient Assad après l’avoir servi espéraient retrouver leur place privilégiée après sa chute, qui leur semblait inéluctable. C’était un choix intéressé, mais pas irrationnel. Une partie a rejoint l’Armée syrienne libre ou d’autres groupes d’opposition. Mais, contrairement aux dictatures égyptiennes ou tunisiennes, le régime d’Assad a résisté en n’hésitant pas à massacrer la population. La fraction de l’État qui avait misé sur la chute d’Assad s’est mise alors à chercher la force la plus susceptible de l’emporter. C’est dans ces circonstances qu’une partie s’est tournée vers l’État islamique, pour restaurer leur position dans la machinerie de l’État.

      Ce n’est pas la première fois qu’une classe enrobe dans l’idéologie religieuse sa lutte pour le pouvoir. Certains thèmes déployés par l’État islamique sont un simple décalque religieux du baasisme tardif. La mobilisation des foules par la religion remplace l’idéologie nationaliste dans le même rôle. La lutte contre « les juifs et les croisés » remplace celle contre le sionisme et l’impérialisme. La communauté sunnite remplace la nation arabe. Cela permet, comme le #panarabisme autrefois, de chercher des bases pour réaliser une unité politique dans un espace plus vaste que les Etats nationaux actuels. Cela ne signifie pas que les soldats de l’État islamique ne prennent pas leur propre idéologie très au sérieux, très au premier degré, bien au contraire : une idéologie est la projection mentale d’une forme sociale. On ne peut la réduire à une simple hypocrisie. De plus, le remplacement du nationalisme et de ses accents socialistes ou progressistes, par un discours religieux ouvertement #réactionnaire, n’est pas anodin.

  • Bashar al-Assad travels to Russia to thank Putin for Syria airstrikes | World news | The Guardian

    http://www.theguardian.com/world/2015/oct/21/bashar-al-assad-thanks-russia-vladimir-putin-syria-airstrikes

    L’image du jour... Poutine est sur de « plus en plus de fronts ».

    The Syrian president, Bashar al-Assad, has arrived in Moscow in his first foreign visit since an uprising against his authoritarian rule broke out in 2011.

    The Kremlin made the details of the visit on Tuesday evening public on Wednesday but did not say whether the Syrian leader was still in Moscow or had returned home.

    #syrie #russie

  • Frappes en Syrie : la France finit par adopter le « principe de réalité » – Georges Malbrunot
    http://www.lefigaro.fr/international/2015/09/06/01003-20150906ARTFIG00135-frappes-en-syriela-france-finit-par-adopter-le-pr

    Et de trois. Pour la troisième fois en quelques semaines, la France s’apprête à procéder à un revirement dans sa politique face au drame syrien. Après s’être opposé pendant un an à des frappes contre Daech en Syrie, au prétexte qu’elles renforceraient le régime honni de Bachar el-Assad, François Hollande pourrait annoncer ce lundi le ralliement de Paris à la coalition internationale qui bombarde Daech dans son bastion du Nord et de l’Est syrien.

    Je note, mais c’est en « premium » derrière le paywall ce soir. Ce sera ouvert à la lecture demain ?

    • A toutes fins utiles :

      Le Figaro.fr
      Dimanche 6 septembre 2015
      Frappes en Syrie : la France finit par adopter le « principe de réalité »

      Malbrunot, Georges

      François Hollande, longtemps opposé à bombarder Daech dans son bastion syrien pour ne pas renforcer le régime de Bachar el-Assad, pourrait annoncer ce lundi le ralliement français à la coalition internationale.

      Et de trois. Pour la troisième fois en quelques semaines, la France s’apprête à procéder à un revirement dans sa politique face au drame syrien. Après s’être opposé pendant un an à des frappes contre Daech en Syrie, au prétexte qu’elles renforceraient le régime honni de Bachar el-Assad, François Hollande pourrait annoncer ce lundi le ralliement de Paris à la coalition internationale qui bombarde Daech dans son bastion du Nord et de l’Est syrien.

      Durant l’été déjà, Paris a été contraint d’accepter que l’Iran fasse partie d’« une solution » au conflit syrien. Depuis le début des violences en 2011, la France soutenait pourtant que « Téhéran faisait partie (au contraire) du problème » en appuyant, en hommes et en argent, son allié à Damas. Sans que l’Iran renonce le moins du monde à son appui à Assad, Paris a dû, là encore, rétropédaler, sous le poids des événements. En juillet, Téhéran et les Occidentaux - États-Unis en tête - se mettaient en effet d’accord pour régler diplomatiquement leur différend sur les aspirations nucléaires de Téhéran. Fin août enfin, François Hollande annonçait urbi et orbi qu’el-Assad devait être « neutralisé ». Paris ne campe plus sur son exigence d’un départ du raïs au début d’un processus de transition négociée du pouvoir à Damas.

      Officiellement, l’Élysée justifie son dernier changement de pied par l’émergence de la crise des migrants qui affluent en Europe. Les chiffres - ceux de la Fédération internationale des droits de l’homme, par exemple - disent pourtant tout autre chose. Une très grande majorité des Syriens fuient leur pays en raison de la sanglante répression - à coups de largages de barils d’explosifs souvent - qui leur est infligée par le pouvoir de Damas, plus que par la présence de Daech, là où ils habitent. « Lorsque les djihadistes s’emparent d’un territoire, les habitants ont plutôt tendance à aller se réfugier dans les zones gouvernementales, comme à Lattaquié, sur la côte méditerranéenne, encore relativement épargnée par les violences », relève un diplomate, familier de la crise.

      Dès lors, comment expliquer ce revirement ? Sur le dossier des frappes anti-Daech, Paris a fini par se retrouver seul ou presque, après l’engagement turc de bombarder les djihadistes et la révision de Londres, après l’attentat antibritannique de juin en Tunisie. « Et puis, renchérit un expert militaire, le Pentagone nous fait payer notre refus de frapper en Syrie en ne partageant aucun renseignement opérationnel avec nous. »

      Un débat a également fini par agiter les milieux sécuritaires français. Si la DGSE -les services de renseignements extérieurs - reste arc-boutée sur un départ le plus tôt possible d’el-Assad, la DGSI, elle, se concentre sur la menace djihadiste sur le territoire français. « Pour des questions de sécurité intérieure », la France pourrait ne plus s’interdire d’intervenir militairement en Syrie, expliquaient d’ailleurs à l’AFP au cours du week-end des responsables sous couvert d’anonymat. Comme si les thèses de la DGSI - en gros, la menace djihadiste prime sur un départ d’el-Assad - l’avaient emporté.

      « C’est enfin le principe de réalité qui prévaut, se félicite le diplomate précité. Notre discours n’était plus crédible. Au fur et à mesure que le temps passe, nous perdions de notre superbe et surtout de notre influence. » Est-ce à dire pour autant que c’est la fin du « ni-ni » (ni Daech, ni el-Assad) ? Probablement pas. D’abord parce que, comme en Irak, d’éventuelles frappes françaises contre Daech resteraient marginales par rapport à celles que mène Washington. D’autre part, Paris continuera de camper sur sa priorité, trouver une alternative politique crédible au régime syrien, là où les États-Unis, la Russie et d’autres ont fait de la lutte anti-Daech leur objectif à court terme. En conséquence, tout contact avec el-Assad ou ses services de renseignements - option là encore souhaitée par la DGSI - restera banni.

      Après avoir longtemps pratiqué une politique jugée « courageuse » en paroles mais « irréaliste » dans la pratique, Paris est contraint de bouger. Car en coulisses, d’autres s’activent. Cet été, le chef des services de renseignements syriens, Ali Mamlouk, loin d’avoir été écarté comme la presse l’avait précipitamment annoncé, s’est rendu chez son ennemi juré saoudien pour rencontrer le fils du roi Salman. La Russie et l’Iran - deux pays que la France avait là encore écartés hâtivement d’un règlement du dossier - sont également à la manouvre. Certes, toutes ces initiatives sont loin d’avoir abouti. Mais à Paris, on a finalement saisi que l’incantation ne suffisait pas à faire une politique en Syrie. « Le risque, c’est que les positions longtemps irréalistes de la France la privent de relais lorsqu’une vraie négociation s’ouvrira », redoute l’expert militaire.

      Un islamiste serait à l’origine des attentats chez les druzes du Sud syrien

      Un insurgé islamiste arrêté en Syrie a reconnu être responsable des deux attentats à la voiture piégée qui ont fait 37 morts vendredi à Soueida, ville peuplée majoritairement de Druzes dans le sud du pays. Le suspect appartiendrait au Front al-Nosra, la branche locale d’al-Qaida. L’un des attentats a coûté la vie à un important dirigeant druze, le cheikh Walid al-Balous, hostile à la fois au gouvernement de Damas et aux rebelles islamistes qui le combattent. Soueida est un fief de la communauté druze syrienne, traditionnellement fidèle au régime. Mais à la suite des explosions, des manifestants ont détruit le portrait d’Hafez el-Assad, le père de l’actuel président. (AFP)

    • (modif : j’allais poster la suite de l’article mais @unabrow m’a devancé)

      Je ne vois pas trop en quoi ça rendrait notre politique « plus lisible »... à moins que ce ne soit le prélude à d’autres inflexions. Il faudra surveiller comment évolue dans les prochaines semaines ce nouveau et curieux élément de langage : « neutraliser Assad »...

    • EN DIRECT - François Hollande annonce des vols de reconnaissance en Syrie
      http://www.lefigaro.fr/politique/2015/09/07/01002-20150907LIVWWW00040-en-direct-suivez-la-sixieme-conference-de-presse-

      "Bachar el-Assad, c’est lui qui est responsable de la situation en Syrie, c’est lui qui a tiré sur son peuple, c’est lui qui a bombardé des civils, c’est lui qui a utilisé des armes chimiques. Depuis trois ans, cette question sur ce qu’il peut faire est posée, nous l’avons toujours dit, le maintien de Bachar el-Assad n’est pas possible. C’est la position que nous voulons faire partager avec la Russie et l’Iran. La solution ne passe pas par Bachar el-Assad, à terme il doit partir "

      "Quand j’entends certains dire que « c’est le moins pire »... C’est toujours la même histoire avec les dictateurs. Comment voulez-vous qu’un Syrien qui a vu sa famille massacrée puisse revenir à la table des négociations avec Bachar el-Assad" .

      "La Russie est un allié du régime syrien. Cela ne veut pas dire que la Russie est un allié indéfectible de Bachar el-Assad. La Russie veut elle aussi trouver une solution. Ce qui se produit en Syrie a des conséquences majeures au Liban. Lors de l’Assemblée générale des Nations unies, il y aura une conférence internationale de soutien pour le Liban. J’irai au Liban pour aller dans un camp de réfugiés pour voir comment aider les autorités."

  • Joumblatt le druze a parlé !
    C’en est fini pour les conspirationnistes et les soutiens en France du Hezbollah et d’Assad.
    "Avec un calme surprenant, le député du Chouf a passé en revue l’historique de sa relation avec le régime syrien qui remonte au lendemain de l’assassinat de son père, en 1977. Convaincu dès les premiers instants que le régime syrien était derrière l’assassinat de Kamal Joumblatt, qui s’était opposé à l’entrée des troupes syriennes au Liban, il cite les propos prononcés par son père devant l’ancien président syrien Hafez el-Assad : « Il lui avait dit : je n’entrerai pas dans ta prison », a raconté le chef du PSP.
    Le témoin a relaté alors sa première rencontre avec Bachar el-Assad, en 1999 à Anjar, où il devait le rencontrer à un déjeuner en présence de Ghazi Kanaan, l’ancien chef des SR syriens au Liban à cette époque. « C’était un échange à caractère général. Il ( Bachar) m’a posé des questions sur la localisation des druzes à la manière d’un orientaliste. Des questions superficielles. »
    « Lorsqu’ il est parti, Ghazi Kanaan m’a dit : « j’aimerais que tu saches qui sont les Assad ». » Une phrase qui ne devait avoir d’échos chez le témoin que plusieurs années plus tard, lorsque l’officier syrien a été acculé à orchestrer son propre suicide, a-t-il dit. Le député a enchaîné sur la tenue d’une seconde rencontre avec Bachar, quelque temps après, à Jabal Kassioun. « Un malaise régnait au cours de la rencontre. Les questions étaient orientées sur Rafic Hariri, son rôle, ses projets et sur Solidere. On pouvait déjà percevoir l’adversité qu’il lui portait. »

    http://www.radioorient.com/joumblatt-au-tsl-tous-les-responsables-syriens-qui-ont-ete-elimines-son

  • Des firmes allemandes ont aidé Damas à se constituer un arsenal chimique - L’Orient-Le Jour
    http://www.lorientlejour.com/article/907682/des-firmes-allemandes-ont-aide-damas-a-se-constituer-un-arsenal-chimi

    Des informations rapportées par Der Spiegel qui cite « des documents secrets du ministère allemand des Affaires étrangères ».
    OLJ/AFP - 23/01/2015

    Plusieurs entreprises allemandes, dont le laboratoire pharmaceutique Merck, ont aidé le régime syrien de Hafez el-Assad, puis de son fils et successeur Bachar, à se constituer un arsenal chimique, écrit l’hebdomadaire allemand Der Spiegel dans son édition de samedi.

    Der Spiegel cite « des documents secrets du ministère allemand des Affaires étrangères » datant de 1984 et récemment déclassifiés. Selon le magazine, l’un des documents évoque des produits chimiques qui ont été utilisés dans la fabrication de gaz sarin. En août 2013, le régime syrien avait été accusé d’avoir utilisé ce gaz dans une attaque qui avait fait plusieurs centaines de morts près de Damas.

    Outre Merck, le fabriquant de verre Schott, le spécialiste de matériel de laboratoire Kolb et le groupe Heraeus (technologies) sont également mentionnés par le magazine. Der Spiegel évoque aussi Riedel-de Haën (chimie) ou encore l’entreprise Gerrit van Delden.
    Interrogées par l’hebdomadaire, Riedel-de Haën, Schott et Heraeus ont indiqué ne disposer d’"aucun document" sur des opérations commerciales qui remontent à plusieurs dizaines d’années.
    De son côté, Merck a assuré qu’il n’avait pas aidé à « fabriquer des équipements » et n’avait pas non plus procédé à « des livraisons de matériel pour la construction de sites (de fabrication de produits) chimiques ».

  • Espion du Mossad, c’est un métier chouette :

    Lors des obsèques du roi Hussein à Amman en février 1999, les services secrets jordaniens et le Mossad israélien sont parvenus à récupérer les urines d’Hafez el-Assad…

    Je pense que c’est un épisode qui manque beaucoup dans Delta Force et Munich. Eric Bana et Chuck Norris en train de renifler le pot de chambre d’Assad, ça aurait été quand même top glamour.

    J’en suis donc au chapitre : #les_chemins_de_damas, « La lune de miel »

    • Le chapitre décrit le rapprochement entre le jeune Bachar Assad, que Chirac prendrait sous son aile, tout en étant très proche de Rafic Hariri. Pas passionnant si on est déjà un peu au courant, mais nécessaire je suppose pour la vulgarisation.

    • Toujours les anecdotes vieille France de l’Ambassadeur. Celle-ci, vraiment, on s’en cogne :

      Bassel était un excellent cavalier, se souvient Daniel Contenay. Les week-ends, mon numéro deux, Bernard Bajolet, aujourd’hui à la tête de la DGSE, montait à cheval avec le fils aîné du président. Quand il partait, je lui disais simplement en plaisantant : “Bernard, n’allez pas trop vite !” Il savait très bien ce qu’il fallait faire pour ne pas vexer Bassel... »

    • Si la structure clanique de la corruption syrienne est décrite (et intéressante), la nature discutable des affaires de Hariri et ses liens avec Chirac est plus suggérée.

      le raïs syrien contrôle le Liban de sa main de fer au travers d’un quatuor : Abdel Halim Khaddam, son vice-président, Hekmat Chehabi, le chef d’état-major de l’armée syrienne, Ghazi Kanaan, le proconsul au Liban, et Rafic Hariri. Or, la « bande des quatre » voit d’un mauvais œil l’arrivée du jeune Bachar dans leur chasse gardée libanaise où ils font de juteuses affaires entre eux.

      et, sur la première rencontre entre Hariri et Chirac :

      Un « fund raising » est organisé aux États-Unis par le baron Olivier de Chillaz pour le compte du candidat Chirac. Le plus gros chèque est signé d’un entrepreneur libanais du BTP, un certain Rafic Hariri. « C’est lors d’un cocktail organisé à Washington pour remercier les donateurs que Chirac et Hariri font connaissance »

      puis la retraite du vieux raïs français :

      Un ex-président logé gracieusement pour ses vieux jours par une personnalité politique étrangère, c’est un fait sans précédent sous la Ve République !

      Malheureusement c’est à peu près tout, et on retombe dans les assez habituelles descriptions psychologisantes des relations personnelles amicales entre la famille Hariri et la famille Chirac, et la relation paternaliste de Chirac envers Bachar.

    • Aucune mention sur l’influence saoudienne au Liban, en dehors de cette note :

      Rafic Hariri possédait la nationalité saoudienne, ainsi que ses fils, notamment Saad, qui prendra sa succession après son assassinat en 2005. Les Saoudiens lui avaient permis de conserver sa nationalité libanaise. Une faveur, la double nationalité n’étant pas autorisée dans le royaume.

      Cette remarque :

      Ainsi, entre la France et la Syrie, il y a Rafic Hariri qui conseille en permanence Jacques Chirac sur tous les dossiers. Et forcément qui l’influence... Or Rafic Hariri n’est pas neutre. Porte-drapeau du « sunnisme politique », il doit sa fortune et son influence à l’Arabie saoudite.

      Et, dans le chapitre précédent :

      Ancien ministre à Beyrouth, Élie Firzli se rappelle, lui, une affirmation de Hariri qui « m’a souvent dit : tout ce qu’Hafez el-Assad me demande pour lui ou pour sa famille, je le fais sans hésiter. Sauf une seule chose : s’il y a un conflit avec l’Arabie saoudite, je choisirais les Saoudiens car ils sont à l’origine de ma fortune ».

      On pourra dire que les choses sont ainsi suggérées sans être explicitées, mais si la description de la corruption syrienne est explicitement décrite (et c’est très bien), son pendant du côté de Hariri et des Séoudiens au Liban est plutôt effleuré.

      D’autant que, avec les romanesques déclarations de Daniel Contenay, on a l’impression qu’il n’y a que deux acteurs politiques au Liban : le régime syrien et la France. Or, entre Taëf et la mort de Hariri, les deux pays qui contrôlent réellement le Liban, ce sont la Syrie (via la présence militaire) et les Séoudiens (par l’argent). La France n’a en pratique qu’une influence très faible.

      Le protectorat syro-séoudien du Liban, en dehors de toute influence politique française (malgré les prétentions des ambassadeurs), est ainsi suggérée ici :

      Aucune décision importante ou poste clé n’échappe alors à l’œil de Damas, y compris et surtout la décision de placer Rafic Hariri à la tête du gouvernement libanais en 1992, fruit d’un arrangement entre la Syrie et l’Arabie saoudite.

      Quand, dans le livre, on rappelle que la Syrie fait savoir qu’elle n’accepte qu’un rôle culturel de la France au Liban, on feint d’ignorer que c’est de toute façon une réalité : les militaires sont syriens, les milliards sont séoudiens.

    • Amusant understatement :

      Hariri n’avait aucun intérêt pour ce dossier, ce qu’il m’a fait comprendre à la fin de notre conversation. Pour lui, le Liban, paradis des banques et des hommes d’affaires, était plus fait pour accueillir HEC que l’ENA, symbole d’une administration forte et centralisée qui n’existe pas au pays du Cèdre.

      Vraiment, on est dans la suggestion : « …paradis des hommes d’affaires… », et « une administration forte et centralisée qui n’existe pas », que c’est joliment dit. (Puisque que, plus prosaïquement, les Libanais se souviendront que Hariri préférait un paradis des affairistes, protégés par une administration incompétente et corrompue.)

    • Bon, je critique les euphémismes sur la corruption du système Hariri, l’absence de l’influence saoudienne, et les très usuelles élucubrations psychologisantes sur les relations entre Chirac, Hariri et Bachar Assad (auxquelles on n’échappe jamais dans la narrative franco-française), mais ce n’est tout de même pas inintéressant.

    • @reka : j’ai coupé de manière abrupte et malhonnête (parce que : (1) je suis comme ça, (2) je voudrais pas non plus spoiler tout le livre) : le but était de vérifier que Hafez el-Assad était gravement malade.

    • Et puisqu’il est ici question de Mossad, j’annonce sans rien vouloir spoiler qu’une jolie pépite se trouve plus loin, dans le passage consacré à la reconstitution (en France) de l’assassinat de Hariri :-)

    • @niss : oui et avec, selon C. et M., le consentement du ministère de la Défense et de son chef Hervé Morin, et le « quai d’Orsay » et son « lobby anti-syrien ». Or, C. et M., qui ne datent pas précisément l’évènement, dans la 3ème semaine d’octobre comprend-t-on, oublient dans ce cas -hum, hum- de nommer le ministre à la tête du quai d’Orsay, qui quittera d’ailleurs ses fonctions peu après, et qui est souvent associé à un autre lobby que le « lobby antisyrien » : Bernard Kouchner !

    • Tout à fait, et pas uniquement dans ce chapitre d’ailleurs : dans toute la partie « contemporaine » du livre, les révélations intéressantes ne sont souvent mentionnées qu’en passant, et en évitant à chaque fois d’en tirer les conséquences. Une demie-page à peine pour nous annoncer que les journalistes du Monde qui avaient ramené les échantillons de gaz sarin n’avaient fait que servir de mules à la DGSE... mais sans prendre la peine de s’interroger, du coup, sur l’authenticité de ces échantillons.

      A peine plus, je crois, pour la confirmation que des mercenaires français étaient bel et bien à Homs en même temps qu’Edith Bouvier (pour rappel, le Daily Star* mais aussi Stratfor parlaient à l’époque de « 13 officiers français » ; en France, seuls des sites « hum-hum » type Réseau Voltaire avaient je crois repris l’information). Là encore on ne nous précise pas pour qui ils travaillaient, s’ils se sont fait pincer ou non par l’armée syrienne, et comment ils ont été exfiltrés...

      * http://www.dailystar.com.lb/News/Middle-East/2012/Mar-05/165514-13-french-officers-being-held-in-syria.ashx

      Pour revenir à notre histoire de survol israélien, les auteurs auraient aussi pu préciser que la reconstitution n’en est ainsi que plus réaliste : si l’on en croit Nasrallah en effet, des drones israéliens avait survolé la scène du crime quelques heures avant l’attentat ;-)

      https://www.youtube.com/watch?v=6atfivav15U

  • Les aspects positifs de la colonisation :
    #Les_Chemins_de_Damas

    En outre, ce qu’il y avait de pénible quand j’allais chez Hafez el-Assad, poursuit l’ancien ambassadeur, c’était la présence dans son bureau, en face du visiteur, d’un très beau tableau qui représentait la bataille de Hattin, que Saladin livra aux croisés pour s’ouvrir la porte de Jérusalem.

    Si Hafez el-Assad, parce que ça l’arrangeait, aimait à rappeler le passé colonial de la France, souligne Daniel Contenay, il savait très bien que notre pays avait eu un rôle civilisateur vis-à-vis des alaouites qui n’étaient pas très bien traités par la Turquie ottomane.

    Toujours cette narrative franco-française…

  • Premier chapitre de #Les_Chemins_de_Damas de Malbrunot et Chesnot :

    Après le meurtre de l’ambassadeur de France à Beyrouth Louis Delamarre (attribué ici sur le ton de l’évidence au régime syrien, au motif que c’est Bachir Gémayel qui l’a dit), François Mitterand ordonne « le plasticage » du siège Baas à Damas :

    Deux mois et demi plus tard, le 29 novembre, des supplétifs recrutés localement par les services secrets français commirent un attentat à la voiture piégée qui détruisit le siège du Baas dans le quartier d’Ezbekieh à Damas. Il y eut 175 tués.

    Dès le paragraphe suivant, la narrative franco-française (et la bonne conscience française) surgit : le massacre de 175 personnes dans un attentat à Damas est qualifié de « cycle des représailles », quand les Syriens, eux, pratiquent la « diplomatie terroriste » et « les messages codés lancés par les terroristes ».

    Mais le cycle des représailles ne fait que renforcer la détermination syrienne à pratiquer la « diplomatie terroriste » contre la France…

    Ce qui donne cette très belle affirmation :

    La France ne veut pas se laisser dicter son agenda par les terroristes.

    Ce qui amène très logiquement, en 1984, à l’« absolution » du méchant terroriste par François Mitterand :

    « Dites-moi les yeux dans les yeux que vous ne me prenez pas pour un terroriste », demande Hafez el-Assad au cours de leur surréaliste entretien. « Non, non, je ne vous prends par pour un terroriste », répond François Mitterrand, même s’il lui en a coûté d’absoudre ainsi son interlocuteur.

    (On n’imagine pourtant pas à quel point « il en a coûté » à Hafez el-Assad « d’absoudre ainsi » l’homme qui avait commandité un attentat qui avait tué 175 personnes à Damas…)

  • A l’encontre » Les points de vue de trois Syriens sur la révolution
    http://alencontre.org/moyenorient/syrie/les-points-de-vue-de-trois-syriens-sur-la-revolution.html

    Pourquoi Assad n’est-il pas encore tombé, après vingt mois de soulèvement ?

    Bakr : Permettez-moi de commencer par une autre supposition : supposons que Assad soit déjà tombé d’une manière ou d’une autre. Nous nous rendrions alors compte que le « régime » qui a été soigneusement et délibérément construit durant trois décennies par son père, Hafez el-Assad, n’est pas constitué uniquement par le président et sa famille. C’est un réseau compliqué et opaque d’intérêts et de relations fondé sur des systèmes de loyautés qui s’étendent à l’échelle du pays, mais qui tracent également des divisions verticales [entre communautés] à l’intérieur de la collectivité nationale.

    Pendant l’époque de la Guerre froide, le régime syrien avait été une pierre angulaire de la politique au Moyen-Orient et il a réussi à s’adapter aux nouvelles conditions qui ont émergé au début des années 1990. Ayant été un des vainqueurs dans la deuxième guerre du Golfe (1991), il a été récompensé par un renforcement de sa présence au Liban et par le droit de transmettre la présidence de la république de Hafez à Bachar el-Assad. L’occupation de l’Irak en 2003 a entraîné un changement d’allégeance de la part du régime. Il a opéré un rapprochement marqué avec le régime iranien. Son attitude ultérieure à l’égard de l’occupation de l’Irak a fait que l’armée syrienne a fini par être expulsée du Liban.

    La révolution syrienne a exposé à quel point l’approche sécuritaire prédomine dans la doctrine des dirigeants, laquelle est par ailleurs dépourvue de toute approche politique. C’est ainsi que l’hégémonie institutionnelle, la conspiration, le terrorisme et la propagande sont devenus les piliers du régime. Le premier rang du régime est constitué de quelques familles (Assad, Makhlouf et Shalish) qui sont reliées par des intérêts de type mafieux, tribal et sectaire, en plus des noyaux des secteurs de la sécurité où les décisions politiques sont prises en dernière instance.

    Le processus de prise de décision ayant trait à la Syrie s’est en fait déplacé de Damas à Téhéran au début de la Révolution syrienne. Les hommes du régime comme Mouhamad Makhlouf, Bachar el-Assad et son frère Maher ainsi que quelques officiers de renseignement de haut rang, tel Ali Mamlouk, ne sont en fin de compte que des larbins. Ces personnes n’ont pas les compétences pour prendre des décisions politiques pour le régime en temps normal, et encore moins en temps de révolution. La junte actuellement au pouvoir a hérité de nombreux atouts avec lesquels elle peut prolonger la survie du régime (parmi lesquels on peut mentionner Israël, le Liban, la question kurde, les sectarismes, etc.), mais elle en perd souvent le contrôle.

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    http://alencontre.org/moyenorient/syrie/syrie-levolution-dune-revolution-quelques-veritables-problemes-et-quelqu

    Qui sont les islamistes en Syrie ? Et quel est leur rôle dans la révolution syrienne ?

    Yassin : On ne peut pas parler des islamistes en Syrie comme s’il s’agissait d’une seule entité. Il existe un mouvement salafiste, qui était limité et non organisé avant la révolution, mais qui aujourd’hui semble être le mouvement qui se développe le plus rapidement sur le plan politique et militaire. Il y a également le mouvement des Frères musulmans, dont les dirigeants ont été en exil depuis de décennies : ils dominent le Conseil national syrien et apparemment ils ont des groupes de combattants dans certaines régions au nord de la Syrie et dans le gouvernorat de Hama. En gros on peut dire que le mouvement salafiste représente l’islam politique rural, alors que les Frères musulmans représentent l’islam politique urbain.

    En outre, il y a divers islamistes indépendants qui ne sont pas organisés en une structure spécifique et qui sont en général plus proches des mouvements laïques. Enfin il y a les membres du clergé qui ont servi dans les institutions religieuses du gouvernement et qui ont quitté la Syrie après le début de la révolution. Beaucoup d’entre eux, sinon tous, visent à obtenir un rôle publico-médicatique.

    Tous les islamistes mentionnés ci-dessus partagent une orientation sociale conservatrice, qui posera un défi pour la Syrie après Assad.

    Les islamistes n’ont pas eu de rôle particulier dans le surgissement et dans les étapes premières de la révolution. Leur participation a été tardive, tout comme dans les autres révolutions arabes. Néanmoins, ils disposent d’abondantes ressources matérielles et connexions qui font défaut aux autres groupes de l’opposition. Au cours des vingt mois de guerre imposés par le régime, la psychologie de la population rebelle (composée majoritairement de sunnites musulmans) a commencé à pencher du côté de l’idéologie des islamistes, et en particulier du salafisme. Ce penchant aura des conséquences pour l’avenir. Néanmoins je ne vois pas comment éviter cela dans les conditions de guerre qui ont été imposées aux Syriens.