person:hayat el kaaouachi

  • Caméra perdue en territoire de la République
    http://contre-attaques.org/magazine/article/camera-perdue

    Jeudi 22 octobre a été diffusé sur France 3 un documentaire intitulé “Profs en territoire perdus de la République ?”. Celui-ci, dans le contexte post-Charlie, réactive l’approche contestable qui était au fondement de l’ouvrage Les territoires perdus de la République paru en 2002. Dix enseignants des #Quartiers_populaires lui répondent et offrent un autre regard : Vincent Capdepuy, Vincent Casanova, Laurence De Cock, Eric Fournier, Hayat El Kaaouachi, Samuel Kuhn, Fanny Layani, Servane Marzin, (...)

    #Magazine

    / #carousel, #Analyses, #Éducation, Quartiers populaires

  • Adresse aux intellectuels, journalistes, romanciers et à toutes celles et tous ceux qui croient connaître les jeunes des quartiers populaires
    http://aggiornamento.hypotheses.org/2588
    Ceci est un texte collectif qui émane du collectif Aggiornamento. La mouture initiale est de Hayat el Kaaouachi. Il a été ensuite soumis à signatures de façon plus large

    Contact : hypotheses.aggio(at)gmail.com

    Mesdames, Messieurs,

    Ceci est une invitation. Une proposition des plus honnêtes.

    Entre vous et nous, les désaccords peuvent être nombreux, radicalement ancrés dans des conceptions bien différentes de la France et de la République. Ce qui vous inquiète et vous hérisse nous interroge parfois sans nous faire douter de la légitimité de notre travail, de nos combats, de la #société dans laquelle nous vivons. Nous n’avons pas votre rapport pathologique à la #jeunesse de France. Nous refusons d’en faire avec vous un portrait caricatural qui rassure vos postures sociales. Votre vue vacillante et triste de notre pays, nous la refusons, préférant œuvrer au quotidien à l’#éducation de tous pour des lendemains qui chantent.

    Entre vous et nous, les mots s’écharpent tant le fossé peut être profond. Mais nous défendons tous la parole libre et le débat. Nous sommes attachés, vous comme nous, à la confrontation des idées, aussi rude soit-elle. Les joutes verbales à l’écrit comme à l’oral avec la portée incandescente du #numérique et des #réseaux_sociaux nourrissent les gnoses et les polémiques sans fin appréciées par la médiasphère. Pourtant, derrière les éclats de voix et les échanges de mots, les réalités nombreuses, plurielles et complexes ne sont pas toujours restituées fidèlement. Aux nombreux cas particuliers brandis ici ou là par des chroniqueurs, intervenants divers de la scène intellectuelle et médiatique, nous gardons, ne vous en déplaise, l’avantage du nombre, du terrain et du quotidien qui seuls, selon les méthodes des #sciences_sociales, peuvent avec précision et rigueur fonder la véracité des propos pour rendre compte d’une vérité sociale et politique mouvante.

    Nous vous proposons de partager cette expérience. Par souci d’honnêteté intellectuelle.

    Loin de nous l’idée de vous faire la leçon ou de vous convertir. Voyez plutôt cela comme une rare opportunité de palper cet objet fantasmé qui vous fait tant peur et que vous croyez connaître. Venez dans nos établissements des #quartiers_populaires, venez dans nos classes sur les bancs de nos élèves. Voyez comme ils écoutent et parlent, voyez comme ils pensent. Il ne s’agira pas pour vous d’une visite au zoo, il ne s’agira pas pour eux de vous séduire. Nous vous proposons une rencontre, un échange d’au moins une journée. Prenez le temps de vous asseoir face à eux et de leur dire directement ce que vous pensez d’eux. Comme ils vous déroutent, comme ils vous inquiètent, comme ils vous sont étrangers. Ayez le courage de leur faire face, de répondre à l’indignation, à la colère, au désintérêt de ces enfants et adolescents de la France des marges. Vous pourrez leur demander directement pourquoi ils sont si peu reconnaissants envers la #République. Vous les verrez vous rendre vos sourires gênés et vos piques verbales, votre profond mépris.

    Mais vous serez dans la vraie vie. Celle du #chômage, des #discriminations, de la rue, du délabrement urbain, de la débrouille, et de toutes ces réussites joyeuses que bien souvent vous négligez. Vous dépasserez ainsi les dénonciations stériles, les débats caricaturaux de l’entre-soi.

    Nous serons là aussi. Enseignants de collèges et de lycées ZEP, REP ou sensibles. Nous vous montrerons cet indéniable dynamisme démographique, sportif, culturel, artistique des quartiers. Pour ceux qui y travaillent les yeux bien ouverts et sans y faire œuvre de missionnaire, il y a cette évidence folle et parfois brusque d’une énergie à voir et à entendre, à accompagner. Cet optimisme que nous avons, vous préférez toujours y voir du déni, voire de l’angélisme. Mais nous ne nions pas certaines difficultés. Nous les voyons et avons longtemps été les premiers à en appeler aux politiques et intellectuels pour défendre l’#Ecole pour tous avec force et moyens. Nos mots (maux) ont rarement suscité autant d’intérêt qu’aujourd’hui où l’Ecole sert de paravent aux politiques de gauche comme de droite, et nos revendications de terrain ont la plupart du temps été résumées à « plus de moyens » pour des gens « souvent en vacances ».

    Or, jour après jour, nous sommes témoins de ces plaies, de ces failles qui aspirent certains, de ces absences et démissions nombreuses d’une République plus centrale que périphérique. Nous enseignons la liberté, l’égalité en précisant aux élèves qu’il s’agit de valeurs à défendre en continu alors même que par endroits elles restent à créer. Nous répondons à leurs critiques légitimes, à leur scepticisme, à leur amertume qui isolent et altèrent irrémédiablement le corps social. Et nous gérons notre schizophrénie, celle de ceux qui transmettent un message que la rue contredit.

    Toutes ces tensions qui chez vous n’appellent que la condamnation, la sentence bien-pensante, nous les inscrivons dans la réalité, une #histoire nationale chargée pas toujours assumée et une complexité du monde. Nous entendons les cris stridents d’une petite minorité de jeunes mais nous voyons aussi la générosité, l’envie, l’humour et la curiosité du plus grand nombre. A chaque heure de cours, malgré la fatigue et les aléas. Malgré les intrusions de messages médiatiques et politiques qui dénigrent notre #travail ou renvoient une image terne ou dégradée de nos élèves. Car ce que nous construisons sur la durée, sur des mois et des années, vous pouvez le salir, l’ébranler en quelques minutes, à coup de mots maladroits ou volontairement blessants. En cela, vous avez votre part de responsabilité dans le fossé qui se creuse entre la République et une partie de sa jeunesse.

    Mesdames, Messieurs, les jeunes des quartiers populaires méritent mieux que vos discours lointains, ils méritent qu’on leur parle en face. Nous les voyons évoluer, nous suivons ces esprits jeunes qui, quoiqu’on en dise, dans la contestation, le silence, l’engagement ou même la colère, sont ici bien chez eux et ne se voient vivre nulle part ailleurs.

    Votre République, notre République, c’est la leur. Et au vu de nos âges respectifs, reconnaissons qu’ils en sont davantage l’avenir que nous, quelle que puisse être notre postérité. Ainsi, comme tous les habitants de ce pays, ils peuvent aimer ou non la République, la croire sur parole ou lui rappeler ses tromperies, ce n’est pas un délit. C’est le début d’une vie commune. Venez donc vivre cette vie. Entendez, voyez, dialoguez, répondez, partagez vos lumières. Rendez concret ce vivre ensemble que vous croyez voir faillir dans les quartiers populaires, alors que plus que n’importe où ailleurs en France, s’y côtoient, s’y mélangent, s’y nourrissent, s’y moquent et s’y entraident des histoires venues de tous les continents.

    Les signataires de cette invitation enseignent toutes et tous dans les quartiers populaires. À l’image d’une grande part des élites intellectuelles et médiatiques que vous représentez, ils ou elles travaillent en majorité près de Paris. Nous espérons que vous n’en trouverez que plus de facilités à honorer l’invitation qui vous est ici faite en choisissant dans la liste suivante celui de leurs établissements qui vous conviendra le mieux [1], au gré de vos résidences et de vos déplacements

    #périphéries

    • ce commentaire sur twitter :

      dites, concernant l’appel des profs d’histoire de zep, là : ce sont des profs qui se mouillent, hein.
      je vous en veux pas mais le ministère cautionnera pas leurs actes et ils risquent au moins des points de carrière négatifs, ces gens.
      alors voyez, ce serait légèrement GRAVE si par malheur leur appel trouvait réponse du mauvais côté de la barrière politique en premier.
      ce serait grave aussi si on laissait passer la seule initiative d’éduc pop par ouverture de l’institution qu’il m’ait été donné de voir.
      je vous signale qu’en temps normal même un parent d’élève n’a PAS accès à une classe ouverte comme ça en mode débat ouvert.
      l’école est un de ces lieux fermés où on ne peut que croire la parole de ceux qui en ressortent à 17h concernant ce qui s’y passe.
      si on ne relaie pas si personne n’y va, ce sera la preuve qu’on est des connards finis qui ne font que du bruit avec leurs bouches/claviers.
      (et ne me dis pas qu’on s’en fout parce que politiquement si on montre qu’en france on est ça, on ouvre un boulevard aux salauds)
      donc j’insiste. nos enfants et leurs profs, certains, peu, nous demandent de venir voir, parler, entendre, témoigner.
      la démarche est complexe pour eux et eux non plus n’ont pas que ça à foutre. c’est juste que c’est important alors ils s’investissent.
      ces « jeunes des banlieues », ces « zones sensibles » sur qui on projette toutes les peurs, font le premier pas. c’est pas à eux de le faire.
      il s’agit d’une mise de confiance. un coup de poker. si c’est pas suivi d’effet, la porte se refermera en claquant fort.
      (non mais vraiment je crois que les gens réalisent pas du tout le potentiel de cette proposition ça me ferait mal que ça passe à la trappe)
      (j’aime toujours pas l’école c’est pas le sujet, dépassez le cadre institutionnel, hein, on fait ce qu’on peut avec les moyens qu’on a)
      (je sais c’est lourd mais si t’es pas lourd tout se perd dans le flux, c’est comme ça)
      et alors si t’es étudiant. genre histoire ou sciences sociales, tvoa, c’est légèrement une ouverture à ne pas rater pour toi aussi.
      si t’es sociologue ou prof à plus forte raison tu dois ramasser tes organes et y aller. surtout si t’es sociologue.

  • Adresse aux intellectuels, journalistes, romanciers et à toutes celles et tous ceux qui croient connaître les jeunes des quartiers populaires
    http://blogs.mediapart.fr/edition/aggiornamento-histoire-geo/article/110215/adresse-aux-intellectuels-journalistes-romanciers-et-toutes-celles-e

    Ceci est un texte collectif qui émane du collectif Aggiornamento. La mouture initiale est de Hayat el Kaaouachi. Il a été ensuite soumis à signatures de façon plus large.

    Contact : hypotheses.aggio(at)gmail.com

    Mesdames, Messieurs,

    Ceci est une invitation. Une proposition des plus honnêtes.

    Entre vous et nous, les désaccords peuvent être nombreux, radicalement ancrés dans des conceptions bien différentes de la France et de la #République. Ce qui vous inquiète et vous hérisse nous interroge parfois sans nous faire douter de la légitimité de notre #travail, de nos combats, de la société dans laquelle nous vivons. Nous n’avons pas votre rapport pathologique à la #jeunesse de France. Nous refusons d’en faire avec vous un portrait caricatural qui rassure vos postures sociales. Votre vue vacillante et triste de notre pays, nous la refusons, préférant œuvrer au quotidien à l’éducation de tous pour des lendemains qui chantent.

    Entre vous et nous, les mots s’écharpent tant le fossé peut être profond. Mais nous défendons tous la parole libre et le débat. Nous sommes attachés, vous comme nous, à la confrontation des idées, aussi rude soit-elle. Les joutes verbales à l’écrit comme à l’oral avec la portée incandescente du numérique et des réseaux sociaux nourrissent les gnoses et les polémiques sans fin appréciées par la médiasphère. Pourtant, derrière les éclats de voix et les échanges de mots, les réalités nombreuses, plurielles et complexes ne sont pas toujours restituées fidèlement. Aux nombreux cas particuliers brandis ici ou là par des chroniqueurs, intervenants divers de la scène intellectuelle et médiatique, nous gardons, ne vous en déplaise, l’avantage du nombre, du #terrain et du #quotidien qui seuls, selon les méthodes des sciences sociales, peuvent avec précision et rigueur fonder la véracité des propos pour rendre compte d’une vérité sociale et #politique mouvante.

    Nous vous proposons de partager cette #expérience. Par souci d’honnêteté intellectuelle.

    Loin de nous l’idée de vous faire la leçon ou de vous convertir. Voyez plutôt cela comme une rare opportunité de palper cet objet fantasmé qui vous fait tant peur et que vous croyez connaître. Venez dans nos #établissements des #quartiers_populaires, venez dans nos classes sur les bancs de nos élèves. Voyez comme ils écoutent et parlent, voyez comme ils pensent. Il ne s’agira pas pour vous d’une visite au zoo, il ne s’agira pas pour eux de vous séduire. Nous vous proposons une #rencontre, un échange d’au moins une journée. Prenez le temps de vous asseoir face à eux et de leur dire directement ce que vous pensez d’eux. Comme ils vous déroutent, comme ils vous inquiètent, comme ils vous sont étrangers. Ayez le courage de leur faire face, de répondre à l’indignation, à la colère, au désintérêt de ces enfants et adolescents de la France des #marges. Vous pourrez leur demander directement pourquoi ils sont si peu reconnaissants envers la République. Vous les verrez vous rendre vos sourires gênés et vos piques verbales, votre profond mépris.

    Mais vous serez dans la vraie vie. Celle du #chômage, des #discriminations, de la rue, du délabrement urbain, de la #débrouille, et de toutes ces réussites joyeuses que bien souvent vous négligez. Vous dépasserez ainsi les dénonciations stériles, les débats caricaturaux de l’entre-soi.

    Relevé via @rezo