person:jacques follorou

  • « Gilets jaunes » : l’inexpérience du gouvernement en matière d’usage de la force fait craindre de nouveaux dérapages
    https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2019/01/20/gilets-jaunes-l-inexperience-du-gouvernement-en-matiere-d-usage-de-la-force-


    Des policiers [en civils,…] équipés de LBD40, le 15 décembre à Paris.
    VALERY HACHE / AFP

    Championne autoproclamée du maintien de l’ordre, la France est régulièrement confrontée au phénomène des violences policières, qui interroge sur sa doctrine de l’usage de la force publique.

    Qu’est donc devenue cette France championne du maintien de l’ordre, qui exportait son savoir-faire et ses matériels aux autres démocraties et aux pays totalitaires soucieux de mater des contestations naissantes ? Il y a encore quelques années, le fabricant français de grenade lacrymogène, Alsetex, qui fournit la police française, déclarait au Monde : « Notre molécule lacrymogène est la plus pure au monde, elle permet d’amener les gars devant le juge en bon état, notre grenade est estampillée démocratie française. »

    Mais la France a pris l’habitude de voir, chaque samedi, des visages et des corps abîmés au terme d’affrontements entre forces de l’ordre et « gilets jaunes ». Les exactions de ces derniers ont conduit des policiers et des gendarmes à l’hôpital. Mais la multiplication des violences imputables aux forces de sécurité conduit aussi à s’interroger sur la capacité de l’Etat à totalement maîtriser l’usage d’une force démocratique, dont les règles semblent fluctuer. Depuis le début de la crise, les pouvoirs publics ont, en effet, fait montre d’une culture toute relative en matière de doctrine sur l’usage de la force publique.

    #paywall

    • D’autant plus que la deuxième partie de l’article frise le blasphème…

      Interrogé ensuite sur l’affaire Benalla, le porte-parole du gouvernement a reconnu des « dysfonctionnements », notamment à l’Elysée. A la veille d’une nouvelle audition de l’ex-collaborateur d’Emmanuel Macron par une commission d’enquête du Sénat, Benjamin Griveaux a estimé qu’il fallait régler rapidement ces anomalies, car elles sont « insupportables et incompréhensibles pour les Français ».

      Des #dysfonctionnements !? à l’Olympe !

      B. Griveaux (ex-strauss-kahnien) commencerait-il à sentir le vent et à préparer ses arrières ?

  • Assassinat d’un pilier du programme chimique et balistique syrien
    Le Monde | 07.08.2018 à 10h32 • Mis à jour le 07.08.2018 à 15h20 | Par Jacques Follorou et Laure Stephan (Beyrouth, correspondance)
    Un groupe islamiste a revendiqué l’attentat, mais Aziz Asber était aussi une cible du Mossad.
    https://www.lemonde.fr/syrie/article/2018/08/07/assassinat-d-un-pilier-du-programme-chimique-et-balistique-syrien_5340040_16

    Le visage d’Aziz Asber était inconnu du grand public jusqu’à l’annonce, dimanche 5 août, par un journal proche du régime, de sa mort dans un attentat contre son véhicule près de la ville de Masyaf, dans le centre de la Syrie. Pourtant, ce personnage paraît avoir été un pilier de l’arsenal chimique et militaire syrien. Tué avec son chauffeur, samedi soir, probablement par l’explosion d’un engin positionné sur la route qu’il empruntait, peu après avoir quitté son domicile, ce physicien de formation était une figure importante du Centre d’études et de recherches scientifiques (CERS), l’entité chargée du développement et de la production d’armes non conventionnelles, dont les armes chimiques et les missiles vecteurs. (...)

  • Armes chimiques : comment les espions français et israéliens ont manipulé un ingénieur syrien
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2017/03/25/le-mossad-les-services-secrets-francais-et-l-informateur-syrien_5100770_3224

    Comment la France et Israël ont manipulé une source pour qu’elle livre des secrets sur les armes chimiques dans le cadre de l’opération « Ratafia ».

    C’est une guerre secrète réservée aux espions. Ses batailles unissent, au sein d’alliances, des agences nationales de renseignement qui s’affrontent bloc contre bloc au nom d’une cause jugée vitale : la lutte contre la prolifération et l’utilisation des armes chimiques. Chose rare, Le Monde a eu accès aux détails d’une opération hautement confidentielle, baptisée « Ratafia » et menée, en France, par les services secrets français et leurs homologues israéliens du Mossad, contre le programme secret d’armes chimiques développé par le régime de Bachar Al-Assad. Elle a permis, avant et pendant la guerre civile en Syrie, qui a débuté en 2011, d’obtenir des informations précises sur l’arsenal syrien. Un travail de longue haleine consistant à identifier une source syrienne et à la manipuler.

    Les éléments dont Le Monde a eu connaissance auprès de sources judiciaires et issues de la communauté du renseignement et diplomatique permettent de lever le voile sur le degré de connaissance réel dont bénéficiaient, à cette date, les puissances occidentales sur le programme d’armes chimiques de Damas, trois ans avant qu’elles ne le dénoncent après des massacres perpétrés en 2013. La coopération entre proches alliés permettait, semble-t-il, dès 2011, de sensibiliser la communauté internationale sur la menace que constituait le régime syrien et de tenter de faire pression pour le démanteler.

    #ratafia #Damas #Syrie #Armes_chimiques

    • C’est une guerre secrète réservée aux espions. Ses batailles unissent, au sein d’alliances, des agences nationales de renseignement qui s’affrontent bloc contre bloc au nom d’une cause jugée vitale : la lutte contre la prolifération et l’utilisation des armes chimiques. Chose rare, Le Monde a eu accès aux détails d’une opération hautement confidentielle, baptisée « Ratafia » et menée, en France, par les services secrets français et leurs homologues israéliens du Mossad, contre le programme secret d’armes chimiques développé par le régime de Bachar Al-Assad. Elle a permis, avant et pendant la guerre civile en Syrie, qui a débuté en 2011, d’obtenir des informations précises sur l’arsenal syrien. Un travail de longue haleine consistant à identifier une source syrienne et à la manipuler.

      Les éléments dont Le Monde a eu connaissance auprès de sources judiciaires et issues de la communauté du renseignement et diplomatique permettent de lever le voile sur le degré de connaissance réel dont bénéficiaient, à cette date, les puissances occidentales sur le programme d’armes chimique de Damas, trois ans avant qu’elles ne le dénoncent après des massacres perpétrés en 2013. La coopération entre proches alliés permettait, semble-t-il, dès 2011, de sensibiliser la communauté internationale sur la menace que constituait le régime syrien et de tenter de faire pression pour le démanteler. Pour ne pas mettre en péril inutilement la sécurité d’agents de terrain ou d’opérations toujours en cours, Le Monde a sciemment choisi de ne pas évoquer certains aspects de cette mission.

      D’après les informations transmises, en 2010, par le Mossad à la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenue DGSI en 2014) et à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), l’opération a démarré deux ans plus tôt, à Damas, par une longue approche d’un Syrien travaillant pour le programme de développement, de production et de stockage des armes chimiques et des missiles vecteurs. La surveillance de la Syrie est depuis longtemps une priorité pour l’Etat juif et ce programme, qui concerne alors près de 10 000 salariés, selon les chiffres échangés entre les principales chancelleries occidentales, est un objectif prioritaire pour le Mossad.
      Selon un diplomate français, les forts soupçons qui pesaient sur la responsabilité du renseignement israélien dans le grave accident survenu, en 2007, sur le site d’Al-Safir, lors de l’assemblage de missiles vecteurs de VX, le gaz le plus toxique des agents de guerre chimique connus, ont conduit Damas à renforcer le secret et les mesures de sécurité. De quoi inquiéter Israël. En 2010, le chef du bureau de lutte contre le terrorisme, Nitzan Nuriel, lors du 10e sommet sur le contre-terrorisme, accuse Damas de fournir des armes non conventionnelles au Hamas et au Hezbollah.

      Failles psychologiques

      L’objectif n’est donc pas d’éliminer des responsables du programme mais de trouver une source syrienne en matière d’armes chimiques, de connaître les liens, dans ce domaine, avec les alliés iranien, russe ou nord-coréen et d’identifier les filières d’approvisionnement. Pendant deux ans, le Mossad, par l’intermédiaire d’un contact local à Damas, entre en contact avec la cible, de quoi réunir suffisamment d’éléments pour créer de toutes pièces une histoire pouvant le convaincre de sortir de Syrie pour que le Mossad puisse l’approcher.
      Habitant à Damas, il intéresse d’autant plus les services qu’il jouit d’une grande proximité avec la fille d’un haut dignitaire du régime. Ayant analysé les failles psychologiques du personnage, rêveur et romantique, et senti qu’il souhaitait s’affranchir de l’administration syrienne, son interlocuteur à Damas parvient à le convaincre qu’un autre destin l’attend et qu’il pourrait monter ses propres affaires tout en continuant à servir son pays.

      Se dessine alors le scénario de voyages à l’étranger, notamment en France, un pays ami de la Syrie, en théorie sans risque pour lui, pour y faire fonctionner sa future société d’import-export. Mais l’homme n’est pas totalement libre. Pour des raisons de sécurité, son passeport est entre les mains du régime et ses voyages en France sont soumis à autorisation de sa hiérarchie. C’est là qu’entrent en jeu les services secrets français. Ils facilitent l’obtention de visas et ouvrent des portes sans que l’intéressé y voie malice. Lors de ses passages en France, une équipe de la DCRI et des agents de la DGSE sont intégrés dans le dispositif du Mossad. L’opération est intitulée « Ratafia ». Elle durera plusieurs années. La CIA et son homologue allemand, le BND, sont aussi dans la boucle.

      Train de vie

      Lorsqu’il atterrit à Paris, un homme le conduit dans un hôtel du 13e arrondissement. Le Mossad, au fait des habitudes de leurs homologues syriens dans la capitale française, assure qu’il n’y a pas à craindre de filature de l’ambassade de Syrie à Paris. La cible est désormais « traitée » par un faux homme d’affaires au nom italien devenu son confident et son mentor, qui le conseille et lui présente des contacts. Une grande part de ces interlocuteurs, des hommes d’affaires, des chauffeurs ou des intermédiaires, sont en réalité des agents du Mossad. La DCRI, elle, agit en protection et assure une partie de la logistique de surveillance technique, notamment les sonorisations de véhicules, de chambre d’hôtel ou les fouilles d’ordinateurs.
      Le premier rendez-vous a lieu dans un hôtel de luxe, le George-V, à Paris. La prise en main psychologique de la cible fonctionne à merveille dès le début, d’autant que son ami-mentor la fait profiter de sa voiture avec chauffeur et de son train de vie. Euphorique, impatient, presque nerveux, elle a été circonvenue par le Mossad parvenu à lui faire croire cette fable qu’elle pense être un tournant crucial de sa vie personnelle et professionnelle. Le Mossad confie à ses partenaires français que la cible ne se perçoit pas comme un traître et ne donne pas de renseignements facilement.

      Sérieux, même s’il montre d’un certain sens de l’humour, l’homme ne goûte guère le projet de ses hôtes de le conduire au Crazy Horse. Ces derniers ne réussiront à le traîner qu’à une représentation du spectacle musical Mamma Mia, qui sera déjà, dira-t-il, peu en accord avec son idée du divertissement. Ses accompagnateurs ont plus de succès lorsqu’ils lui apportent une chicha dans sa chambre d’hôtel. Parmi la dizaine d’agents du Mossad mobilisés pour la partie française de l’opération, les psychologues comptent autant, sinon plus, que les techniciens ou les anciens des forces spéciales.

      Le piège se referme

      Lors de ses séjours en France, les amis de son mentor au nom italien proposent de lui vendre du matériel ou de le mettre en contact avec des fournisseurs. En sachant ce qu’il cherche, le Mossad enrichit sa connaissance des programmes chimiques syriens. Dans la foulée, le Mossad, la DCRI et la DGSE découvrent les sous-traitants, intermédiaires et fabricants français et européens qui tentent de tirer profit de cette économie de la prolifération. La manipulation progresse.
      Il prend l’habitude de recevoir de l’argent en espèces et des cadeaux. Même si on lui recommande la discrétion à l’égard de son entourage, l’homme se prend au jeu et commence peu à peu à donner des informations tout en ayant le sentiment de rester loyal à Damas. L’emprise psychologique est telle qu’il reprend à son compte l’idée suggérée par les psychologues du Mossad d’aider la fille du dignitaire syrien à réaliser des projets personnels.

      La technique consiste à l’impliquer dans les discussions et les décisions prises, des plus anodines aux achats et recherches de matériels, de sorte qu’il saura par lui-même, affirment les psychologues du Mossad, qu’il aura franchi la ligne jaune. Le piège se referme. Il donne davantage d’informations, notamment sur l’arsenal d’armes chimiques dont dispose la Syrie, des tonnes d’ypérite et de VX. Plus inquiétant encore, le Mossad apprend l’existence d’un projet d’acquisition de camions lance-missiles, qui avortera sans que l’on sache aujourd’hui si le Mossad y est pour quelque chose.

      Une dangereuse source de prolifération

      En 2011, l’euphorie semble néanmoins retombée et la cible fait état, à haute voix, de doutes sur la réalité de l’identité de son protecteur au nom italien. Mais il est trop tard. L’argent reçu lui interdit toute reculade. Le Mossad, de son côté, a acquis des informations de premier choix lui permettant d’étayer son dossier contre la Syrie auprès des Américains, qui rechignent à s’engager de nouveau au Proche et Moyen-Orient.

      Les éléments transmis par les Israéliens aux Français et aux Allemands conduiront en 2011 au gel des avoirs du Centre syrien d’étude et de recherche scientifique (CERS), pilier du programme chimique syrien, par l’Union européenne au motif qu’il fournit à l’armée syrienne des moyens pour surveiller et réprimer de simples manifestants. Des mesures identiques seront prises, fin 2011, contre des sociétés-écrans utilisées par le CERS pour acheter du matériel sensible à l’étranger, tels que Syronics, l’Organization for Engineering Industries, Industrial Solutions ou encore Mechanical Construction Factory.
      En 2005, le président américain George W. Bush avait déjà désigné le CERS comme une dangereuse source de prolifération. En 2012, le président Barack Obama annonce, à son tour, que toute utilisation ou transfert des armes chimiques par le régime de Bachar Al-Assad reviendrait à franchir « la ligne rouge ». Les attaques chimiques du printemps et de l’été 2013 contraignent la communauté internationale à réagir. La France et les Etats-Unis, alimentés par le renseignement israélien, préparent une opération qui sera stoppée au tout dernier moment, fin août 2013, par M. Obama. Le 2 septembre 2013, la France rend publics ses propres renseignements sur le recours aux armes chimiques par Bachar Al-Assad, pointant le rôle central joué par le CERS dans leur production.

    • Associés dans l’opération « Ratafia », les espions français et israéliens se sont-ils espionnés entre eux ?

      Le Mossad aurait tenté d’infiltrer le service de contre-espionnage français dans le cadre de l’opération visant à lutter contre le programme d’armes chimiques syrien, à partir de 2010.

      LE MONDE | 25.03.2017 à 11h26 | Par Jacques Follorou
      http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2017/03/25/associes-dans-l-operation-ratafia-les-espions-francais-et-israeliens-se-sont

      Dans le monde de l’espionnage, si des services décident d’unir leurs efforts, cela n’en fait pas pour autant des amis. Rien ne les empêchera de s’espionner. Jamais. La preuve lors d’une opération qui a réuni, à partir de 2010, la sécurité intérieure française et le service secret israélien du Mossad pour lutter contre le programme d’armes chimiques développé par le régime syrien de Bachar Al-Assad.

      L’enquête de sécurité interne diligentée par la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenue Direction générale de la sécurité intérieure en 2014) sur la tentative du Mossad d’infiltrer, à cette occasion, le service de contre-espionnage français illustre ces pratiques. Lorsque l’opération ayant pour nom de code « Ratafia » débute, en 2010, c’est encore l’union sacrée pour prendre au piège un Syrien qui doit effectuer des séjours en France. Il s’agit de l’amener à livrer des secrets sur le programme d’armes chimiques syrien auquel il appartient.

      Lorsque le Mossad obtient le soutien de plusieurs groupes de la DCRI et d’agents de la DGSE, tous ses membres agissent sous de faux noms et une dizaine d’entre eux sont des clandestins à l’exception de D.K., chef de poste du Mossad à Paris. Selon les accusations de la DCRI, auxquelles Le Monde a eu accès, le Mossad aurait profité du contact quotidien avec ces agents français lors des séjours de la cible syrienne pour nouer des liens jugés suspects.

      L’un des agents français a ainsi été vu fêtant le shabbat avec le chef de poste du Mossad à Paris, il est également parti faire du tir à Dubaï puis a rejoint, en famille, ses camarades du Mossad à Jérusalem. Une proximité revenant, selon la DCRI, à franchir la ligne jaune. Des soupçons portent également sur le versement de sommes d’argent en espèces et l’existence de cadeaux contraire aux règles internes. Résultat, plusieurs agents français intégrés dans l’équipe conjointe avec le Mossad se verront retirer leur habilitation secret défense et seront mutés dans des services subalternes.

      L’enquête interne de la DGSI se garde cependant de rappeler qu’un autre groupe de la DCRI, chargé de contre-espionnage, s’est arrangé pour prendre en photo, à leur insu, les agents du Mossad qui travaillaient avec les Français. Un audit sera, enfin, déclenché sur l’utilisation des fonds de l’opération « Ratafia » après la découverte de demandes de remboursement de frais douteux.
      Compromission

      Cette enquête interne a été évoquée...

  • Le renseignement britannique surveille aussi Israël de près
    LE MONDE | 07.12.2016 | Par Jacques Follorou
    http://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/12/07/le-renseignement-britannique-surveille-aussi-israel-de-pres_5044882_4408996.

    On ne se méfie jamais assez de ses amis, surtout les plus proches. Officiellement, Israël et les deux agences de surveillance anglo-saxonnes les plus puissantes, l’Agence nationale de sécurité (NSA) américaine et son homologue britannique, le GCHQ (Government Communications Headquarters), sont unis par une sacro-sainte alliance. Intense du fait des enjeux de survie pour Israël, confiante au regard de l’excellence reconnue aux Israéliens en matière d’espionnage, et en forte croissance depuis dix ans, cette coopération unique a pourtant une face plus obscure.

    De nouvelles pièces, extraites par Le Monde, en collaboration avec le site The Intercept, des archives de l’ex-consultant de la NSA Edward Snowden confiées à Glenn Greenwald et Laura Poitras, dévoilent en effet l’ampleur de la surveillance des intérêts israéliens par le GCHQ. Les Britanniques ont espionné la diplomatie israélienne, aussi bien à Jérusalem qu’à l’étranger. Ils visaient aussi des sociétés privées du secteur de la défense, des organismes d’Etat chargés de la coopération internationale ou encore des centres universitaires connus pour leur très haut niveau scientifique. Ces cibles apparaissent sous forme d’adresses électroniques ou de numéros de téléphone dans des rapports d’interception des techniciens du GCHQ, heureux de montrer qu’ils étaient parvenus à les identifier dans les flux de communications satellitaires entre le continent africain et le reste du monde. Au bas de chaque compte rendu, il est mentionné que la collecte peut désormais devenir automatique.

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    Espionnage d’Air France, d’Israël et de l’Autorité palestinienne : nouvelles révélations Snowden
    LE MONDE | 07.12.2016 | Par Martin Untersinger et Jacques Follorou
    http://www.lemonde.fr/pixels/article/2016/12/07/espionnage-d-air-france-d-israel-et-de-l-autorite-palestinienne-ce-qu-apport

    Les documents consultés par Le Monde montrent que les Britanniques ont espionné la diplomatie israélienne, aussi bien à Jérusalem qu’à l’étranger. Ils visaient aussi des sociétés privées du secteur de la défense, des organismes d’Etat chargés de la coopération internationale ou encore des centres universitaires connus pour leur très haut niveau scientifique.

    The Wall Street Journal et Der Spiegel avaient déjà montré que les services anglais et américains avaient surveillé les communications du premier ministre Benyamin Nétanyahou et celles du bureau du premier ministre Ehoud Olmert. Selon nos informations, les espions ratissent beaucoup plus large. Ils visaient des services de l’Etat, notamment ses diplomates. Parmi ces identifiants figurent ainsi le numéro de téléphone du numéro deux du ministère des affaires étrangères israélien ou encore les e-mails d’ambassadeurs en poste à Nairobi, au Kenya, et à Abuja, au Nigeria. Mais on trouve aussi parmi les cibles de ces agences des employés de sociétés de défense, comme Ophir Optronics, l’un des fleurons de la fibre optique et du laser, deux éléments-clés des armements modernes et des industries de pointe, ou encore des centres de recherche de l’université hébraïque de Jérusalem.

    Au Proche-Orient, la NSA et le GCHQ ne font pas d’exceptions : tout comme Israël, l’Autorité palestinienne a été mise sous surveillance serrée par les agences américaines et britanniques. Là encore, la NSA et son homologue britannique entretiennent pourtant d’étroites relations avec la monarchie jordanienne et l’Autorité palestinienne dans le domaine du renseignement. La NSA et l’EWD, le service de renseignement électronique jordanien, sont même de très proches alliés : « A lui seul, l’EWD fournit une grande part des noms d’individus ciblés par la NSA » dans cette région, reconnaît une note des services américains. Pourtant, dans les longues listes d’interceptions du GCHQ, se trouvent les coordonnées de la cour royale de Jordanie, du chef du protocole du roi et de l’ambassade de Jordanie à Washington.

    L’Autorité palestinienne a également fait l’objet d’une surveillance intensive, loin de se limiter aux hauts responsables. Fin 2008 et en 2009, le GCHQ a ainsi ciblé les communications du cabinet du secrétaire général de l’OLP et celles d’un grand nombre de délégations palestiniennes dans le monde. Notamment en France, en Belgique, au Portugal, au Pakistan, en Afrique du Sud ou en Malaisie. Des figures palestiniennes modérées étaient également espionnées : le Dr Ahmed Tibi, homme politique et député arabe israélien, chef du Mouvement arabe pour le renouveau, ou encore Ahmed Qoreï, premier ministre de l’Autorité entre 2003 et 2006. Autant d’éléments qui rappellent une règle ancienne de l’espionnage : les amis n’existent pas.

  • Ce « Big Brother » dissimulé au cœur du renseignement, par Jacques Follorou (Le Monde, 11/04/2015)
    http://lemonde.fr/societe/article/2015/04/11/ce-big-brother-dissimule-au-c-ur-du-renseignement_4614233_3224.html

    C’est un sigle impersonnel, « #PNCD », mais il cache un secret sur lequel la République a réussi, depuis 2007, à maintenir un silence absolu. Derrière ces quatre lettres se dissimule la Plateforme nationale de cryptage et de décryptement [@stephane s’arrache les cheveux], un système complexe et occulte de recueil massif et de stockage de #données_personnelles étrangères et françaises dans lequel les services de renseignement français puisent à leur guise et sans aucun contrôle autre que leur propre hiérarchie.

    Le Monde avait révélé, en 2013, l’existence de ce dispositif et s’était vu opposer par les autorités un démenti formel. Au terme de deux ans d’enquête, il est désormais possible de décrire dans le détail l’architecture interne de ce véritable « Big Brother » à la française classé « #secret-défense ». Les gouvernements successifs ont validé son fonctionnement et soutenu son développement. Au nom de la raison d’Etat, des parlementaires nient toujours son existence. Le mode de financement de la PNCD est très discrètement dilué au cœur du budget de l’Etat et les fonds alloués à ce programme n’ont cessé de croître.

    La mutualisation de cet outil, présenté comme une pierre angulaire du monde du #renseignement en France, est jugée si essentielle par l’Etat à la bonne marche des services français qu’elle est totalement absente du projet de loi sur le renseignement [#PJLRenseignement] présenté, lundi 13 avril, en séance publique à l’Assemblée nationale, dans le but de donner un cadre légal à l’activité des services. La PNCD semble avoir pris une place exorbitante au sein de l’organisation du renseignement en France et couvre des champs juridiques si différents qu’aucun cadre ne paraît, à lui seul, pouvoir le mettre en conformité avec la loi.

    La PNCD est hébergée, pour l’essentiel, dans les locaux du siège de la Direction générale de la sécurité extérieure (#DGSE), à Paris. Equipée des plus puissants calculateurs de France, elle recueille des milliards de données françaises et étrangères interceptées par la DGSE au moyen d’outils satellitaires ou hertziens et surtout par le biais de #câbles_sous-marins par lesquels transite, aujourd’hui, l’essentiel des communications mondiales. Elle stocke une grande partie du flux intercepté et trie les sujets au cœur de ses recherches.

    Sur la base de protocoles bilatéraux, les autres services de renseignement français ont organisé, à partir de 2007, leur accès à cette gigantesque base de données. Il s’agit de Tracfin pour la lutte contre le blanchiment, de la DNRED pour les douanes, de la DPSD pour la sécurité militaire, de la DRM pour la branche satellitaire de l’armée, de la Direction du renseignement de la préfecture de police de Paris et enfin de la Direction générale de la sécurité intérieure (#DGSI).

    Cette consultation se fait sans aucun filtre, ni ceux des ministères de tutelle, ni celui de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (#CNCIS), chargée de veiller à la légalité des interceptions administratives. Pas plus que celui du Groupement interministériel de contrôle, bras armé du premier ministre, tour de contrôle en matière de renseignement. La consultation est tellement intégrée que la DGSI a installé une quinzaine de ses agents dans les locaux de la DGSE pour gérer ses propres recherches. Les douaniers de la DNRED ont également des personnels à demeure.

    Au regard de la circulation mondialisée des données de communication, le flux intercepté et stocké par la PNCD comporte nécessairement des identifiants français. L’Autorité de régulation de communications électroniques et des postes a confirmé publiquement qu’il « était délicat de distinguer l’origine des communications ». Une façon pudique de dire qu’il est en réalité aujourd’hui « techniquement impossible d’assurer ce tri, notamment dans le flux étranger-France », assure un membre de cabinet ministériel.

    C’est le cœur du casse-tête juridique. Comment protéger toutes les données de communications des citoyens français à une époque où la circulation des données personnelles s’affranchit de toute règle territoriale ? Comment articuler un dispositif de recueil massif de données non soumis à la loi française, la PNCD de la DGSE, avec les pratiques d’un monde du renseignement national soumis à cette même loi ?

    Faute de réponse, l’Etat laisse ce puissant système intrusif aux seules mains des services, de quoi inquiéter au regard de la quantité de données auxquelles peut accéder la PNCD. En effet, si elle a constitué sa propre base de données de communications, elle est aussi reliée aux centres de stockage de tous les opérateurs installés en France. Un agent de la direction technique de la DGSE peut, de son ordinateur, faire remonter tous les éléments attachés à la requête des services de renseignement français. Or ces données de connexion, aussi appelées « métadonnées », sont bien plus attentatoires à la vie privée qu’une interception téléphonique.

    La DGSE, qui opère en théorie en dehors du territoire français, n’est pas contrainte par les lois s’y appliquant. Mais elle est prise au piège, selon certains de ses membres, à cause du partage de ses moyens techniques. Le projet de loi sur le renseignement tente de combler les trous béants créés par la PNCD au regard de la loi. Dans le chapitre 4 de l’article 3, qui concerne la DGSE, le gouvernement entend légaliser la #surveillance des communications « émises et reçues à l’étranger », ce qui revient, de façon curieuse, à officialiser l’espionnage du reste du monde, y compris nos alliés européens.

    Le projet ajoute l’obligation de garantir aux identifiants français recueillis lors de cette pêche au chalut les droits fixés par le législateur en matière de traitement des données, tout cela sous le contrôle de la CNCIS, devenue la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement.

    Cette distinction entre données étrangères et françaises, on l’a vu, est très difficile à garantir. De plus, si la CNCIS a été pleinement associée, dès 2007, à la création de la PNCD, elle n’a, en revanche, aucune connaissance des conditions de sa mutualisation. Par ailleurs, alors que cette structure est chargée de veiller à la stricte application de la loi en matière d’interceptions qui ne peuvent qu’être ciblées, la CNCIS participe elle-même au système de recueil massif de données. Elle délivre à la plupart des services de renseignement français des autorisations d’interceptions à l’échelle d’un pays tout entier sous forme de « fiches-pays » cartonnées qui permettent d’intercepter et de recueillir massivement du contenu sans aucune discrimination.

    Enfin, le projet de loi ne dit rien non plus sur une autre entorse majeure au régime légal du traitement des données personnelles des citoyens français. La DGSE échange, en effet, dans le cadre de trocs avec certains alliés, ce qu’elle appelle des « blocs » de données. L’Agence nationale de sécurité américaine (#NSA), le plus puissant service de renseignement technique au monde, et son homologue britannique, le #GCHQ, s’adressent ainsi régulièrement à la DGSE pour récupérer des « blocs » concernant des régions du monde particulièrement surveillées par la France. La NSA demande ainsi régulièrement plusieurs mois de flux de données de communications venant du Sahel. Ce bloc contient de très nombreux identifiants français, souvent non décryptés, livrés tels quels aux Américains.

    Le Monde n’a retrouvé qu’une mention officielle de la PNCD sous un tableau comptable du budget de l’Etat en 2006. A cette époque, ce n’est pas encore une « plateforme », mais un « programme ». Un an plus tard, le sigle a disparu mais on apprend néanmoins que son financement, inscrit dans les livres du ministère de la défense, bénéficie d’une contribution interministérielle au nom de cette mutualisation. En 2015, le projet de loi de finances soutient toujours le développement de la PNCD sans la nommer : « Conformément aux orientations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 (…), la DGSE poursuit sa montée en puissance de ses dispositifs au bénéfice de l’ensemble de la communauté du renseignement ».

    Sollicités à plusieurs reprises, les services du premier ministre ont refusé de répondre aux questions du Monde. Le caractère « secret-défense » de la PNCD a enfin été opposé par les parlementaires et les services de renseignement contactés.

    #services_secrets

    • @manhack : une fois de plus, j’ai cherché le « Big Brother » du « Monde »… en vain !
      http://www.arretsurimages.net/articles/2015-04-20/Une-fois-de-plus-j-ai-cherche-le-Big-Brother-du-Monde-id7656

      Contrairement à ce qu’affirme Le Monde, qui y consacrait sa "Une", la "Plateforme nationale de cryptage et de décryptement" (PNCD) de la DGSE, qualifiée de "« Big Brother » dissimulé au cœur du renseignement", n’est pas un "secret sur lequel la République a réussi, depuis 2007, à maintenir un silence absolu" : j’en avais parlé, en 2005 ; Loin d’être un "big brother", ce pôle (et non plateforme) ne fait que décrypter les messages chiffrés interceptés par les services de renseignement ; enfin, il est improbable qu’il soit "relié aux centres de stockage de tous les opérateurs installés en France", et donc qu’il serve à faire de la "surveillance de masse" des internautes français. Retour sur un débat encore obscurci par l’intervention télévisée de François Hollande sur Canal+.

      Précédente passe d’armes avec @jacfollorou sur la question de la collaboration Orange/DGSE ici : http://seenthis.net/messages/270095

  • Espionnage : comment #Orange et les #services_secrets coopèrent | Le Monde, 20/03/2014 Par Jacques Follorou
    http://www.lemonde.fr/international/article/2014/03/20/dgse-orange-des-liaisons-incestueuses_4386264_3210.html

    « Le rapport entre France Télécom et la #DGSE n’est pas de même nature que celui révélé dans le programme Prism de la NSA, qui a des liens contractuels avec les géants d’Internet, explique un ancien chef de service de renseignement français. En France, c’est consubstantiel. » Il n’existe pas de formalisation de cette coopération entre la DGSE et France Télécom-#Orange. Elle est portée par des personnes habilitées secret-défense, au sein de l’entreprise, et pérennisée, depuis au moins trente ans, par des ingénieurs, qui font la navette entre les deux institutions.

    #surveillance #snowden