person:jean-christophe angaut

  • #Jean-Christophe_Angaut «Le statut de la philosophie chez le dernier Bakounine»
    http://atelierdecreationlibertaire.com/blogs/bakounine/le-statut-de-la-philosophie-chez-le-dernier-bakounine-6

    Pour tenter, tout d’abord, de proposer une définition de la #philosophie chez le dernier Bakounine, on dispose d’un élément important avec un texte dans lequel le révolutionnaire russe présente ses conceptions philosophiques. Le titre même des Considérations philosophiques sur le fantôme divin, le monde réel et l’homme, rédigées au cours de l’hiver 1870-1871, indique que Bakounine a tenté d’y présenter au moins une partie de ce qu’il rassemble sous le nom de philosophie. Toutefois, le texte des Considérations reprend des passages entiers de textes antérieurs, qui doivent donc, à leur tour, être considérés comme philosophiques : d’abord des passages de cet ensemble de manuscrits de 1865 que les éditeurs de l’Institut International d’Histoire Sociale ont intitulé « Fragments sur la franc-maçonnerie », passages qui avaient également été repris dans la dernière partie de Fédéralisme, socialisme et antithéologisme (1867-68), où les conceptions philosophiques de Bakounine sont désormais résumées en un « antithéologisme » ; et les développements que contiennent les Considérations seront prolongés dans l’ensemble de manuscrits qui constituent la polémique avec le patriote italien Mazzini (1871-72) et qu’on connaît souvent comme La Théologie politique de Mazzini. Avec cet ensemble de textes, on a le corpus philosophique du Bakounine de la maturité, à condition d’y ajouter un texte de 1868, écrit en russe et destiné à la Russie, La science et le peuple, qui est cependant d’un usage difficile pour un non russophone en raison des errements de la traduction française.

    #anarchisme #Michel_Bakounine #matérialisme

  • Les actes du colloque Philosophie de l’anarchie vont partir à l’imprimerie début janvier. 464 pages de textes divers et il est toujours possible d’envoyer 20 euros pour la souscription (http://www.atelierdecreationlibertaire.com/Colloque-Philosophie-de-l-anarchie,705.html).
    En avant-première la présentation par Jean-Christophe Angaut, Daniel Colson et Mimmo Pucciarelli

    Les textes qui composent ce volume sont issus du colloque « Philosophie de l’anarchie : théories libertaires, pratiques quotidiennes et ontologie », qui s’est tenu à Lyon du 12 au 15 mai 2011. Pour nous qui l’avons organisé, il s’agissait de proposer un espace de rencontre, d’expression et de problématisation à même de rendre compte de la réaffirmation, au niveau international, de la pensée anarchiste et des pratiques qui s’en réclament ou peuvent y être rattachées.

    Cette réaffirmation s’est traduite par deux phénomènes. En premier lieu, une multiplication de travaux universitaires traitant aussi bien de l’histoire du mouvement libertaire que des contributions théoriques d’auteur.e.s anarchistes, et manifestant une prise en compte tardive de l’importance historique et théorique de l’anarchisme, après des décennies d’ignorance et de mépris. Mais surtout, dans un contexte marqué par un regain de la contestation anticapitaliste et par la faillite du prétendu socialisme réel, nombre de mouvements et de pratiques sociales et quotidiennes se réclament de l’anarchie ou ont un air de famille très prononcé avec elle. Si d’une part l’anarchie a longtemps été associée à des images d’Épinal (celle des poseurs.euses de bombes et des bandits de la Belle-Époque) ou réduite unilatéralement à telle ou telle de ses dimensions (l’athéisme, le syndicalisme), si d’autre part son premier moment d’affirmation a partie liée avec le mouvement ouvrier, il n’est plus possible aujourd’hui de ne pas tenir compte des transformations de l’idée anarchiste depuis 1968, les luttes écologistes et féministes des années soixante-dix, le renouveau récent du féminisme radical, le mouvement altermondialiste ou encore les pratiques d’auto-organisation que mettent en œuvre, dans le monde entier, les mouvements qui mettent en cause telle ou telle forme de la domination. Or ces deux dimensions, que l’on pourra dire théorique et pratique, d’une réaffirmation de l’anarchisme aujourd’hui, sont évidemment liées entre elles. C’est un même contexte historique et social qui a ouvert à l’anarchisme un espace dans le monde académique et lui a redonné une place dans l’imaginaire politique et social. Et les pratiques se réclamant de l’anarchie ou pouvant s’y rapporter ne cessent de produire leurs propres théorisations, alors que dans le même temps les théories anarchistes font signe vers des pratiques politiques et sociales. Par rapport à tout autre courant politique ou idéologique, l’anarchisme a en effet pour particularité de ne pas se réduire à un corps de doctrine auquel des militant.e.s seraient censés adhérer sans se soucier plus avant de sa réalisation ici et maintenant, et qui proposerait une conception d’un monde futur (celui des lendemains de la révolution) débarrassé de la domination, conception qui serait hétérogène avec les moyens de sa mise en œuvre.

    C’est cette ambition de prise en compte du caractère pratique des théories anarchistes et de la manière dont les théories libertaires continuent aujourd’hui d’accompagner des pratiques concrètes nous a poussés à nous concentrer sur l’anarchie plus que sur l’anarchisme, et sur la philosophie comme savoir pratique engagé dans la vie des personnes qui le mettent en œuvre plus que comme système doctrinal. La capacité qu’a l’anarchisme de resurgir tient à l’ampleur et à la radicalité du projet libertaire, mais cette radicalité et cette ampleur conduisent aussi l’anarchisme à affronter des questions philosophiques fondamentales, et cela non dans la tour d’ivoire des professionnel.le.s du concept, mais bel et bien dans les réflexions et les débats que fait surgir toute pratique anti-autoritaire. Les textes rassemblés dans ce volume ne présentent pas un point de vue unique sur ce que serait la philosophie de l’anarchie, ni sur l’existence même d’une telle philosophie. Certains d’entre eux se contredisent, et on ne trouvera pas deux textes qui concordent sur ces deux questions. Cette diversité nous semble correspondre à cette autre particularité du mouvement libertaire, qui ne s’est jamais référé à quelque dogme officiel ou à quelque maître penseur que ce soit, et a toujours préféré la contradiction à l’uniformité.

    Mais en voulant fournir un espace d’expression aux théories et aux pratiques les plus contemporaines, nous ne pouvions prétendre connaître a priori ce que chercheurs-euses et militant.e.s avaient pu produire sur les questions qui nous intéressaient. C’est pourquoi nous avons organisé, dans les mois qui ont précédé le colloque, un séminaire préparatoire au cours duquel plusieurs intervenant.e.s ont pu apporter leurs contributions à notre réflexion, contributions qu’il nous a paru important de faire figurer dans ce volume. C’est aussi pour cette raison que, lorsque la question de l’élaboration du programme s’est posée à nous, nous avons décidé de ne pas nous cantonner à ce que nous connaissions mais d’appeler, aussi largement que possible, à des propositions de contributions, et nous n’avons pas été déçus, puisque nous avons vu surgir tout un continent de recherches précises et actuelles qui nous étaient inconnues.

    Enfin, ce colloque a été l’occasion de créer des liens entre des générations différentes, entre militant.e.s et chercheurs.euses, entre institutions et lieux alternatifs (l’ENS de Lyon, le CEDRATS et le Salon des éditions libertaires). Ce fut, avec la fraîcheur des propos et des échanges dont il a été l’occasion, l’une des sources du plaisir que nous avons eu à l’organiser. La publication de ce volume ne poursuit pas d’autre but que de continuer à créer de tels liens au sein du mouvement libertaire et plus largement avec toutes les personnes qui continuent à chercher des formes d’actions et des idées pouvant nous rapprocher toujours plus d’une société émancipée…