person:john moore

  • «Il-n’y-aura-pas-de-programme-spécial»... par Daniel Schneidermann | Arrêt sur images
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    "IL-N’Y-AURA-PAS-DE-PROGRAMME-SPÉCIAL"...
    pour réunir les familles séparées.

    Cette histoire d’enfants confisqués à leurs parents, à la frontière mexicaine des Etats-Unis. Je vous en parlais hier. Et au début de la semaine. Et ce n’est apparemment pas fini. Donald Trump, apprend-on ce matin, vient d’apposer sa signature au feutre épais en bas d’un texte qui, parait-il, stipule que les enfants ne seront plus séparés de leurs parents, mais incarcérés avec eux (comme en France), pour une durée indéterminée. Soupir de soulagement général. « Des gens vont être heureux aujourd’hui », a déclaré Trump, en montrant aux caméras sa signature au feutre épais.

    Tout finit donc par s’arranger, se dit-on machinalement. La monstrueuse parenthèse est refermée. Mauvais rêve. Allégresse générale. Quant aux quelque 2000 enfants confisqués avant la signature, ils ne vont pas tarder à retrouver leurs parents. Admis ou refoulés des Etats-Unis, les familles se retrouveront. Tout finira le moins mal possible. Voilà ce que se dit, tout seul, le cerveau.

    Sauf que non. Ce matin par exemple on lit, noir sur blanc (en moins gros titres, néanmoins, que la nouvelle de la signature de Trump), qu’il « n’y aura pas de programme spécial pour réunir les familles séparées ». Je demande votre attention. Relisez cette phrase : il-n’y-aura-pas-de-programme-spécial-pour réunir-les-familles-séparées. Vous la voulez encore une fois ? Il-n’y-aura-pas-de-programme-spécial-pour-réunir-les-familles-séparées.

    De ce que l’on comprend, lors de la séparation des familles, quand elles sont interceptées à la frontière, parents et enfants sont pris en charge par deux administrations américaines distinctes, qui ne communiquent pas entre elles. Dans le meilleur des cas, les parents se voient remettre un formulaire, avec le mail et le numéro de téléphone d’une administration à contacter. Dans un de ces cas au moins, le numéro de téléphone était erroné. Ensuite, les parents sont internés quelque part. Ou expulsés. Avec leur formulaire, s’ils ne l’ont pas perdu.

    Les policiers qui, devant les tribunaux américains, viennent résumer le dossier des illégaux poursuivis, ne savent pas si ces personnes ont été arrêtées avec leurs enfants. Cette information ne figure pas au dossier judiciaire des poursuivis. C’est un avocat d’El Paso (Texas), Erik Hanshew, qui le raconte, dans un témoignage au Washington Post, que je vous recommande de lire jusqu’au bout. Il arrive que les procureurs s’opposent à ce que la question soit posée, à l’audience, aux policiers. « Si l’on vous prend votre portefeuille, en prison, on vous donne un reçu. Là, on vous prend vos enfants, et on ne vous donne pas une feuille de papier ? » a demandé un juge, stupéfait.

    Le cabinet d’Erik Hanshew, à El Paso, a mis en place une cellule spéciale, chargée de contacter les administrations susceptibles de donner des nouvelles des enfants. On peut imaginer la tâche, de chercher sur tout le territoire des Etats-Unis une fillette de cinq ans, qui ne sait pas épeler son prénom, ni son nom. A qui aucune administration n’a seulement passé un bracelet ou un collier avec ces informations, comme en portent, dans les pays civilisés, les animaux de compagnie. Un bracelet. Ou un collier.

    Je dis « sur tout le territoire », parce qu’on apprend également ce matin que 239 (au moins) de ces enfants confisqués ont été retrouvés à New York, à quelques milliers de kilomètres d’El Paso. Le maire, Bill de Blasio, n’était pas au courant. La chaîne MSNBC a retrouvé et filmé une poignée de ces enfants, dans une rue de New York. Pour acheminer les enfants, un policier avait assuré au stewart d’une compagnie aérienne qu’il s’agissait d’une équipe de foot. Trois compagnies aériennes ont décidé de cesser d’embarquer des enfants de migrants. Je m’arrête là pour aujourd’hui ?

    Il n’y a rien à reprocher aux medias américains. Ils font magnifiquement le travail. Il n’y a rien à vous reprocher à vous, qui avez lu cette chronique jusqu’au bout. Tous ensemble, nous allons maintenant tenter d’intégrer ce que nous avons lu. Comme l’avait dit le juge Frankfurter à Jan Karski en 1943, « je ne vous crois pas. Je ne dis pas que vous mentez, mais mon cerveau se refuse à vous croire ». Il va falloir reformater nos cerveaux.

  • « Monsanto papers », les agences sous l’influence de la firme

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/10/05/monsanto-papers-les-agences-sous-l-influence-de-la-firme_5196332_3244.html

    Pour contrer le soupçon qui entoure le glyphosate, son produit-phare classé « cancérogène probable », la firme américaine interfère auprès des organismes de réglementation.

    En quatre décennies, la version officielle n’a jamais changé : le glyphosate n’est pas cancérogène. C’est ce que concluent avec constance les expertises des plus grandes agences réglementaires, chargées d’évaluer la dangerosité d’un produit avant et après sa mise sur le marché : l’Agence de protection de l’environnement (EPA) américaine et, sur le Vieux Continent, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA).

    Il a fallu attendre mars 2015 pour qu’une autre organisation, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) des Nations unies (ONU), parvienne à la conclusion inverse. Pour cette institution de référence, l’herbicide – produit-phare de Monsanto et pesticide le plus utilisé au monde – est génotoxique, cancérogène pour l’animal et « cancérogène probable » pour l’homme.

    Comment expliquer cette spectaculaire divergence ? La plupart des observateurs invoquent une raison majeure : pour rendre leurs conclusions, les agences se sont largement fondées sur des données confidentielles fournies par… Monsanto, alors que le CIRC, lui, n’a pas eu accès à ces données. En d’autres termes, la décision favorable au glyphosate est essentiellement basée sur les conclusions de l’entreprise qui le fabrique.

    Une expertise « scientifiquement erronée »

    Un toxicologue de renom va bientôt dénoncer cette situation : Christopher Portier, ancien directeur de diverses institutions fédérales de recherche américaines et associé, en 2015, aux travaux du CIRC. Grâce à des eurodéputés écologistes et une ONG qui en ont exigé copie auprès des autorités européennes, il est le seul scientifique indépendant à avoir pu ausculter les fameuses données ultra-secrètes.

    Il s’est alors aperçu que celles-ci recelaient des problèmes passés inaperçus. Le 28 mai 2017, il jette un pavé dans la mare en écrivant à Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne : pour lui, pas de doute, l’expertise des agences européennes, menée essentiellement sur la base des éléments transmis par Monsanto, est « scientifiquement erronée ». Ces dernières, assure-t-il, seraient passées à côté de huit cas d’augmentation d’incidence de certaines tumeurs, associés au glyphosate. Les agences ont beau réfuter en bloc, la polémique est lancée.

    Qui croire ? Pour tenter de répondre à cette question-clé, Le Monde s’est plongé dans les « Monsanto papers », ces dizaines de milliers de pages de documents internes que la firme a dû rendre publics dans le cadre d’une action collective menée aux Etats-Unis par près de 3 500 plaignants.

    La lecture de ces documents apporte de troublants éléments de réponse. Elle jette une lumière crue sur la manière dont les agences réglementaires tiennent compte des études secrètes – et parfois suspectes – de l’industrie. Elle conduit surtout à s’interroger sur l’intégrité et l’indépendance des expertises officielles sur le glyphosate.

    Une étude « indûment écartée »

    A Bruxelles, certains élus prennent la question au sérieux. En mai 2017, l’eurodéputé tchèque Pavel Poc (Socialistes et Démocrates) organise une réunion publique sur le sujet, sous les ors du Parlement européen.

    Ce jour-là, à la tribune, Peter Clausing, un toxicologue allemand associé à l’ONG Pesticide Action Network (PAN), lâche une bombe : d’après lui, une étude soumise par les industriels, qui montrait une augmentation d’incidences de lymphomes malins chez les souris les plus exposées au glyphosate, a été indûment écartée par l’EFSA, l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Considérant que cette étude n’était pas fiable, l’agence n’a pas pris en compte ses résultats, pourtant susceptibles de l’alerter sur les dangers de ce produit.

    Dans son rapport d’expertise de novembre 2015, l’EFSA justifiait ainsi ce choix : « Au cours de la seconde téléconférence d’experts (TC 117), l’étude a été considérée comme non acceptable en raison d’infections virales qui ont pu influencer la survie [des animaux] ainsi que les incidences de tumeurs – en particulier les lymphomes. »

    Certains virus dits « oncogènes » peuvent en effet provoquer des tumeurs chez les animaux de laboratoire. Les souris utilisées pour cette étude dénommée « Kumar, 2001 » auraient contracté un virus de ce type (sans lien avec le glyphosate), brouillant ainsi les résultats.

    « Le gros problème est qu’aucun document ne mentionne le fait qu’une infection de ce genre a effectivement touché les animaux, assure le toxicologue Peter Clausing. Ce qu’on trouve dans les rapports préliminaires d’évaluation du glyphosate, c’est que ce type d’infection est possible, mais pas qu’elle s’est produite. Ce qui est d’abord décrit comme une possibilité devient, à l’issue de la “téléconférence 117”, un fait avéré. »

    Que s’est-il passé lors de cette « téléconférence 117 » ? Le 29 septembre 2015, à quelques semaines de la finalisation de l’expertise européenne, ce grand rendez-vous téléphonique réunit les experts de plusieurs agences. L’objectif est, d’une certaine manière, d’accorder les violons. Parmi les participants, figure un représentant de l’Agence américaine de protection de l’environnement, l’EPA, Jess Rowland. C’est lui qui supervise la réévaluation du glyphosate aux Etats-Unis. Et c’est lui, assure Peter Clausing, qui, au cours de la discussion, fait état d’une infection virale qui invaliderait l’étude « Kumar, 2001 ». Interrogée par Le Monde, l’EFSA confirme. Mais elle assure que « l’information présentée par l’EPA au cours de cette téléconférence a été vérifiée de manière indépendante » par ses propres experts.

    Un article sponsorisé par Monsanto

    Ni une ni deux, l’ONG bruxelloise Corporate Europe Observatory dépose, courant mai, une demande d’accès aux documents internes de l’EFSA pour le vérifier. La réponse tombe le 21 juin : il n’existe aucune trace, dans les archives de l’agence, d’une quelconque vérification des affirmations de Jess Rowland.

    Plus embarrassant, l’Agence européenne des produits chimiques, l’ECHA, écrit dans son propre rapport sur le glyphosate que l’étude « Kumar, 2001 » ne signale « aucune suspicion d’infection virale » des souris et que « le fondement réel de la décision de l’EPA n’est donc pas connu ». Dans une lettre au vitriol adressée le 22 mai à l’agence européenne, Peter Clausing fait un constat plus perturbant encore. « La première spéculation sur une infection virale en lien avec l’étude “Kumar, 2001” provient d’un article de 2015 sponsorisé par Monsanto et signé de Greim et collaborateurs. »

    Reste à savoir si les interventions d’un expert de l’agence américaine ont pu influencer l’expertise européenne. Les « Monsanto papers » montrent en tout cas que la firme est informée presque en temps réel, le lendemain même de la TC 117. « J’ai parlé du gly[phosate] avec l’EPA, écrit l’un de ses cadres dans un texto, à 14 h 38. Ils ont le sentiment d’avoir aligné l’EFSA pendant le coup de fil. »

    Ce n’est pas tout. Au siège de Monsanto, Jess Rowland n’est pas un inconnu : son nom surgit régulièrement dans les « Monsanto papers », en particulier en avril 2015, bien avant la fameuse réunion téléphonique. Alors que le glyphosate vient d’être classé « cancérogène probable » par l’agence de l’ONU (CIRC), et que sa réévaluation est en cours à l’EPA, une autre organisation fédérale américaine, l’Agence des substances toxiques et de l’enregistrement des maladies (ATSDR), vient à son tour d’annoncer avoir enclenché sa propre expertise.

    Le 28 avril 2015, deux cadres de Monsanto échangent des courriels. Le premier raconte avoir reçu un appel inopiné de Jess Rowland au sujet des velléités investigatrices de l’ATSDR. Le cadre le cite en ces termes : « Si je peux dézinguer ça, je mérite une médaille », aurait plastronné M. Rowland au bout du fil. « Mais il ne faut pas trop y compter, poursuit le responsable de la firme à l’adresse de son interlocuteur, je doute que l’EPA et Jess [Rowland] puissent dézinguer ça, mais c’est bon de savoir qu’ils essaient de se coordonner à la suite de notre insistance, et qu’ils partagent notre inquiétude de voir l’ATSDR parvenir aux mêmes conclusions que l’EPA. » « Wow ! C’est très encourageant », réagit son correspondant.

    Promiscuité

    Incidemment, l’échange montre que les employés de la firme sont déjà au courant des conclusions du panel d’experts présidé par Jess Rowland. Celui-ci ne finalisera pourtant son travail que… cinq mois plus tard.

    Les efforts promis par M. Rowland ont-ils payé ? L’évaluation du glyphosate par l’ATSDR a-t-elle été « dézinguée » ? Des informations de la presse américaine l’ont récemment donnée pour morte. Cependant, interrogée par Le Monde, l’agence assure que son évaluation est en cours, mais n’est pas achevée : « Nous prévoyons la finalisation d’un premier jet, soumis aux commentaires du public, d’ici à la fin de l’année. »

    Les « Monsanto papers » prouvent sans ambiguïté que Jess Rowland est considéré par la firme agrochimique comme un atout stratégique au sein de l’EPA. « Jess se mettra en retraite de l’EPA dans cinq à six mois, écrit un employé dans un mémo interne du 3 septembre 2015. Et il pourrait encore nous être utile dans la défense en cours du glyphosate. »

    M. Rowland partira en effet à la retraite début 2016. Une retraite loin d’être oisive. Dans l’action collective en cours aux Etats-Unis, les avocats des plaignants ont bataillé ferme pour obtenir cette information : Jess Rowland exerce désormais une activité de consultant pour l’industrie chimique. Ils n’ont, pour l’heure, pas réussi à connaître les noms de ses employeurs, les conditions de son embauche, la nature de son travail ni le montant de ses émoluments. L’inspecteur général de l’EPA a lancé, fin mai 2017, une enquête interne afin d’éclaircir l’affaire. Sollicité par l’intermédiaire de son avocat, M. Rowland n’a pas donné suite à nos demandes.

    Cette promiscuité entre l’agence américaine et Monsanto remonte à bien plus loin, au début des années 1980. C’est l’Américaine Carey Gillam, ancienne journaliste à l’agence Reuters et désormais directrice de recherche pour l’association U.S. Right to Know, qui a, la première, épluché la correspondance de l’époque entre l’agence et la firme. Elle en a extrait une chronologie plus que significative, qu’elle retrace dans un livre intitulé Whitewash (« Blanchiment »), à paraître en octobre aux Etats-Unis.

    Un expert payé par Monsanto

    De premiers soupçons à l’égard du glyphosate se font jour en 1983. Cette année-là, Monsanto soumet à l’EPA les données d’une étude de toxicité qu’un laboratoire externe a menée pour la firme pendant deux ans sur plus de 400 souris.

    Le toxicologue de l’agence qui les examine en conclut que le glyphosate est « oncogène » : des souris exposées ont développé des adénomes tubuleux aux reins, une forme de tumeurs rarissime. Monsanto conteste énergiquement, avance qu’il s’agit de « faux positifs ». Mais les toxicologues de l’EPA sont catégoriques : « L’argumentation de Monsanto est inacceptable, consignent-ils dans un mémo de février 1985. Le glyphosate est suspect. » Ils décident donc de classifier l’herbicide « oncogène de catégorie C », soit « cancérigène possible pour l’homme ».

    Monsanto décide alors de fournir des données supplémentaires à l’EPA en faisant réexaminer les lames où sont conservés les « carpaccios » de reins de ces 400 souris. Mais cette fois par un expert de son choix, payé par ses soins. « Le Dr Marvin Kuschner passera en revue les sections de rein et présentera son évaluation à l’EPA dans le but de convaincre l’agence que les tumeurs observées n’ont pas de rapport avec le glyphosate », écrit un responsable de la compagnie en interne. A l’en croire, le résultat de cette analyse semble couru d’avance.

    Quelques jours tard, le Dr Marvin Kuschner reçoit les 422 rondelles de petits reins par colis. Et en octobre 1985, il consigne dans son rapport avoir découvert une tumeur, jusqu’ici passée inaperçue, dans le rein de l’une des souris contrôle – non exposée au glyphosate. Armée de cette conclusion, Monsanto bâtit auprès de l’EPA un argumentaire autour d’une « maladie chronique spontanée des reins » qui serait répandue chez les souris de laboratoire et fait basculer les conclusions. Autrement dit, si tumeur il y a, elle n’a rien à voir avec le glyphosate. Exactement comme pour l’étude « Kumar, 2001 », deux décennies plus tard.

    En 1991, le glyphosate disparait du radar

    Si cette seule et unique tumeur est bien réelle, pourquoi n’a-t-elle pas été remarquée auparavant ? Couvertes par le secret commercial, les lames n’ont jamais pu être examinées par des experts indépendants.

    En 2017, les avocats des plaignants réclament que cela soit fait. En attendant, ils relèvent que l’EPA a par la suite fait marche arrière toute, en faisant preuve d’une souplesse de plus en plus flagrante à l’égard du glyphosate.

    Les toxicologues « maison » ne sont pas en cause ; ils étaient unanimes à trouver le produit « suspect ». C’est en fait un panel constitué à la fois d’agents de l’EPA et d’autres agences fédérales qui, en février 1986, rétrograde le glyphosate dans le groupe D – « inclassable quant à sa cancérogénicité pour l’homme ». En 1989, l’agence cesse même de demander de nouvelles données à Monsanto. En 1991, le glyphosate est encore rétrogradé, dans le groupe E cette fois – « preuves de non-cancérogénicité ». Bref, il disparaît du radar.

    Qui sont ces fonctionnaires du panel de l’EPA qui ont initié son déclassement en 1986 ? Leurs parcours révèlent de singuliers points communs, et un talent indéniable pour utiliser leur carnet d’adresses dans le secteur commercial, notamment chez Monsanto.

    Ainsi, trois ans après le revirement de l’agence, le chef du panel, John Moore, prend la présidence d’un « institut pour l’évaluation des risques pour la santé » financé par l’industrie pétrolière, les banques et la grande distribution. Sa successeure, Linda Fischer, deviendra pour sa part l’une des vice-présidentes de Monsanto, dès son départ de l’EPA en 1993. Son adjoint, James Lamb part, lui, en 1988 rejoindre un cabinet d’avocats qui compte Monsanto parmi ses clients. Une demi-douzaine de fonctionnaires fédéraux quitteront également l’EPA pour ce cabinet. Quant à leur chef, le directeur du bureau des programmes pesticides, Steven Schatzow, il sera lui aussi recruté par un cabinet d’avocats pour y représenter des fabricants de… pesticides. David Gaylor, enfin, membre du panel en tant que représentant du Centre national pour la recherche en toxicologie, quittera la fonction publique pour être consultant privé. Lui aussi aura Monsanto comme client.

    Une fraude mortifère

    Reste une question cardinale : pourquoi Monsanto a-t-elle donc entrepris de réaliser cette étude et de la soumettre à l’EPA en 1983 alors que le glyphosate était autorisé sur le marché américain depuis déjà près de dix ans ? Un courrier de Monsanto de 1985 l’explique : cette étude fait partie d’un « programme de remplacement des études de toxicologie d’IBT ».

    IBT ? Pour ceux qui le reconnaissent, ce sigle évoque des visions à vous glacer le sang. L’histoire est connue : aux Etats-Unis, les plus grandes firmes confiaient autrefois les études de toxicologie de leurs produits à Industrial Bio-Test, ou IBT.

    En 1976, des inspecteurs sanitaires fédéraux avaient découvert que le succès de ce prestataire extérieur était fondé sur une fraude mortifère. Ce n’est qu’équipés de masques qu’ils avaient pu explorer le hangar, surnommé le « marais ». Là, des milliers d’animaux de laboratoire infusaient dans une puanteur et une touffeur insoutenables. Des conditions incompatibles avec des études de toxicité.

    Dans les carnets des techniciens, une abréviation récurrente, « TBD », signifiait « Too Badly Decomposed » (« Trop méchamment décomposés ») pour qu’on puisse en tirer quelque donnée que ce soit. Les tests d’IBT parvenaient rarement à des conclusions négatives : elles étaient souvent inventées.

    Des centaines de produits chimiques, dont pas moins de deux cents pesticides, ainsi que l’Aroclor, un PCB redoutablement toxique mis au point par Monsanto, avaient été homologués en Amérique du Nord sur la base des tests « effectués » par IBT. Roundup compris ? Questionnée, Monsanto se contente aujourd’hui de répondre qu’« aucune donnée générée par IBT n’est utilisée pour soutenir une homologation du glyphosate ».

    Le pesticide le plus utilisé dans le monde provoque-t-il le cancer ? L’agence de l’ONU, le CIRC, a-t-elle vu en 2015 ce que l’EPA américaine aurait dû voir il y a quarante ans ? Certains mémos internes de Monsanto suggèrent que ses toxicologues eux-mêmes craignaient de longue date une expertise indépendante de leur best-seller. Comme ce courriel d’une scientifique de la firme qui écrit, en septembre 2014, à un collègue : « Ce que nous redoutions depuis longtemps s’est produit. Le glyphosate doit être évalué par le CIRC en mars 2015. »

    Le 23 octobre, les Etats membres décideront en qui l’Union européenne doit placer sa confiance.

  • La liberté de s’exprimer sur Israël en butte à des attaques dans les universités britanniques
    The Guardian, le 27 février 2017
    http://www.aurdip.fr/la-liberte-de-s-exprimer-sur.html

    Signatures (plus de 200 profs britanniques): Prof Jonathan Rosenhead, Prof Conor Gearty, Prof Malcolm Levitt, Tom Hickey, Prof Dorothy Griffiths, Prof Moshé Machover, Sir Iain Chalmers, Prof Steven Rose, Prof Gilbert Achcar, Prof Penny Green, Prof Bill Bowring, Mike Cushman, Jim Zacune, Dr Jethro Butler, Dr Rashmi Varma, Dr John Moore, Dr Nour Ali, Prof Richard Hudson, Dr Tony Whelan, Dr Dina Matar, Prof Marian Hobson, Prof Tony Sudbery, Prof John Weeks, Prof Graham Dunn, Dr Toni Wright, Dr Rinella Cere, Prof Ian Parker, Dr Marina Carter, Dr Shirin M Rai, Andy Wynne, Prof David Pegg, Prof Erica Burman, Dr Nicola Pratt, Prof Joanna Bornat, Prof Richard Seaford, Dr Linda Milbourne, Dr Julian Saurin, Dr Nadia Naser-Najjab, Prof Elizabeth Dore, Prof Colin Eden, Dr Neil Davidson, Jaime Peschiera, Catherine Cobham, Prof Haim Bresheeth, Dr Uriel Orlow, Dr Saladin Meckled-Garcia, Dr Abdul B Shaikh, Dr Mark Leopold, Prof Michael Donmall, Prof Hamish Cunningham, Prof David Johnson, Dr Reem Abou-El-Fadl, Dr Luke Cooper, Prof Peter Gurney, Dr Adi Kuntsman, Prof Matthew Beaumont, Dr Teodora Todorova, Prof Natalie Fenton, Prof Richard Bornat, Dr Jeremy Landor, Dr John Chalcraft, Milly Williamson, David Mabb, Dr Judit Druks, Dr Charlie McGuire, Dr Gholam Khiabany, Glynn Kirkham, Dr Deirdre O’Neill, Dr Gavin Williams, Prof Marsha Rosengarten, Dr Debra Benita Shaw, Dr João Florêncio, Prof Stephen Keen, Dr Anandi Ramamurthy, Dr Thomas Mills, Dr Don Crewe, Prof Robert Wintemute, Andy Gossett, Prof Mark Boylan, Angela Mansi, Dr Paul Taylor, Tim Martin, Keith Hammond, Karolin Hijazi, Dr Kevin Hearty, Prof Daniel Katz, Dr Richard Pitt, Prof Ray Bush, Prof Glenn Bowman, Prof Craig Brandist, Prof Virinder S Kalra, Dr Yasmeen Narayan, Prof Michael Edwards, John Gilmore-Kavanagh, Prof Nadje Al-Ali, Prof Mick Dumper, Graham Topley, Dr Shuruq Naguib, Prof David Whyte, Peter Collins, Dr Andrew Chitty, Prof David Mond, Prof Leon Tikly, Dr Subir Sinha, Dr Mark Berry, Dr Gajendra Singh, Prof Elizabeth Cowie, Dr Richard Lane, Prof Martin Parker, Dr Aboobaker Dangor, Dr Siân Adiseshiah, Prof Dennis Leech, Dr Owen Clayton, Dr John Cowley, Prof Mona Baker, Dr Navtej Purewal, Prof Mica Nava, Prof Joy Townsend, Dr Alex Bellem, Dr Nat Queen, Gareth Dale, Prof Yosefa Loshitzky, Dr Rudi Lutz, Dr Oliver Smith, Tim Kelly, Prof Laleh Khalili, Prof Aneez Esmail, Fazila Bhimji, Prof Hilary Rose, Dr Brian Tweedale, Prof Julian Petley, Prof Richard Hyman, Dr Paul Watt, Nisha Kapoor, Prof Julian Townshend, Prof Roy Maartens, Dr Anna Bernard, Prof Martha Mundy, Prof Martin Atkinson, Dr Claude Baesens, Dr Marijn Nieuwenhuis, Dr Emma Heywood, Dr Matthew Malek, Prof Anthony Milton, Dr Paul O’Connell, Prof Malcolm Povey, Dr Jason Hickel, Dr Jo Littler, Prof Rosalind Galt, Prof Suleiman Shark, Dr Paula James, Dr Linda Pickard, Pat Devine, Dr Jennifer Fortune, Prof Chris Roberts, Dr Les Levidow, Dr Carlo Morelli, Prof David Byrne, Dr Nicholas Cimini, Prof John Smith, Prof Arshin Adib-Moghaddam, Dr Peter J King, Prof Bill Brewer, Prof Patrick Williams, Prof Daphne Hampson, Dr Wolfgang Deckers, Cliff Jones, Prof Luis Pérez-González, Prof Patrick Ainley, Dr Paul Kelemen, Prof Dee Reynolds, Dr Enam Al-Wer, Prof Hugh Starkey, Dr Anna Fisk, Prof Linda Clarke, Prof Klim McPherson, Cathy Malone, Prof Graham Dawson, Prof Colin Green, Prof Clément Mouhot, Prof S Sayyid, Prof William Raban, Prof Peter Hallward, Prof Chris Rust, Prof Benita Parry, Prof Andrew Spencer, Prof Philip Marfleet, Prof Frank Land, Dr Peter E Jones, Dr Nicholas Thoburn, Tom Webster, Dr Khursheed Wadia, Dr Philip Gilligan, Dr Lucy Michael, Prof Steve Hall, Prof Steve Keen, Dr David S Moon, Prof Ken Jones, Dr Karen F Evans, Dr Jim Crowther, Prof Alison Phipps, Dr Uri Horesh, Dr Clair Doloriert, Giles Bailey, Prof Murray Fraser, Prof Stephen Huggett, Dr Gabriela Saldanha, Prof Cahal McLaughlin, Ian Pace, Prof Philip Wadler, Dr Hanem El-Farahaty, Dr Anne Alexander, Dr Robert Boyce, Dr Patricia McManus, Prof Mathias Urban, Dr Naomi Woodspring, Prof David Wield, Prof Moin A Saleem, Dr Phil Edwards, Dr Jason Hart, Dr Sharon Kivland, Dr Rahul Rao, Prof Ailsa Land, Dr Lee Grieveson, Dr Paul Bagguley, Dr Rosalind Temple, Dr Karima Laachir, Dr Youcef Djerbib, Dr Sarah Perrigo, Bernard Sufrin, Prof James Dickins, John Burnett, Prof Des Freedman, Dr David Seddon, Prof Steve Tombs, Prof Louisa Sadler, Dr Leon Sealey-Huggins, Dr Rashné Limki, Dr Guy Standing, Dr Arianne Shahvisi, Prof Neil Smith, Myriam Salama-Carr, Dr Graham Smith, Dr Peter Fletcher

    #Palestine #Grande-Bretagne #Liberté_d'expression #Liberté_académique #Universités #Semaine_contre_l'apartheid_israélien #Israeli_Apartheid_Week #BDS #Boycott_universitaire

  • Ebola au-delà des clichés

    http://www.lemonde.fr/culture/article/2014/11/27/ebola-au-dela-des-cliches_4530380_3246.html

    « Nous photographions les manifestations visibles d’un virus invisible », énonce Pete Muller, photographe qui a travaillé en Sierra Leone. « De nombreux ­aspects de cette tragédie sont malheureusement très visuels », poursuit son confrère John Moore, de Getty Images, qui a ­séjourné deux fois au Liberia. Lors de son premier voyage, en août, il se rend dans le quartier déshérité de West Point, à Monrovia, à l’intérieur d’un centre d’isolement installé dans une école fermée depuis le ­début de l’épidémie. Des corps gisent aux côtés de malades. Lorsque le personnel ­médical demande à ces derniers de passer dans une autre pièce, un homme se lève, ­fébrilement. Il s’appelle Ibrahim. Devant la porte, il trébuche. Sa tête heurte le sol en ­béton. C’est lui, sur l’une des photos, que l’on voit étendu. Umu Fambulle, sa femme, ne peut rien faire : elle ne doit pas le toucher. Le lendemain, le photographe apprenait la mort d’Ibrahim.

    #ebola #photographie

  • Skrillex: Happy Holidays! Pirate My Music, I’ll Still Love You | TorrentFreak

    Today, on a Christmas morning with giving, kindness and sharing on our minds, we thank Sonny John Moore for his contribution to the holiday spirit.

    These days Moore is better known as Skrillex, and since taking his current form in 2008 he’s been going from strength to strength. Last year he released his debut EP, My Name is Skrillex, as a free download and he hasn’t looked back.

    https://torrentfreak.com/skrillex-happy-holidays-pirate-my-music-ill-still-love-you-111225