person:marc trévidic

  • La défense torpille les certitudes de l’accusation et plaide la relaxe envers l’« indic » Claude Hermant
    http://www.lavoixdunord.fr/219140/article/2017-09-16/la-defense-torpille-les-certitudes-de-l-accusation-et-plaide-la-relaxe-

    Pour l’avocat de Claude Hermant, un « indic » des douanes puis des gendarmes poursuivi pour trafic d’armes en bande organisée, dont six ont servi à Amedy Coulibaly dans l’attentat de l’Hyper Cacher, a plaidé samedi à Lille la relaxe de son client. Le jugement a logiquement été mis en délibéré. Décision dans trois semaines.

    Claude Hermant, 54 ans, figure de l’extrême droite identitaire lilloise, en détention provisoire depuis janvier 2015, est le principal mis en cause dans cette méandreuse affaire comptant dix prévenus et portant sur quelque 500 armes , jugée en correctionnelle après deux ans et demi d’instruction.

    Sept heures de plaidoirie sans pause déjeuner : le dernier jour du procès de Claude Hermant et de ses présumés complices a connu un épilogue étonnant. Ce n’est pas la seule raison pour laquelle les conseils de la défense ont avoué être restés sur leur faim. Non.

    « C’était le bal des faux culs »

    C’est plutôt sur la qualité des débats et, notamment, de la déposition des gendarmes entendus à huis clos. « C’était le bal des faux culs, ils nous ont pris pour des truffes » , a ainsi résumé en termes colorés Me Maxime Moulin, l’avocat de Claude Hermant, lequel a toujours affirmé avoir travaillé pour la gendarmerie à infiltrer le milieu. « Quand on ment sous serment, ça s’appelle un parjure », a grondé Me Chérifa Benmouffok, avocat de Samir Ladjali, accusé d’être le maillon entre Hermant et Coulibaly, l’auteur de l’attentat de l’Hyper Casher.

    Me Muriel Cuadrado pouvait bien sourire. « C’est la première fois dans ma carrière, qui est pourtant longue, que je vois la police téléphoner à un présumé gros trafiquant d’armes de guerre pour qu’il se présente le lendemain de lui-même dans leur service ! En fait, il s’agissait surtout de prévenir Claude Hermant pour qu’il s’enfuit le plus loin possible. Au Congo, par exemple. C’est clair qu’on a voulu protéger l’institution après la tuerie. »

    « Qu’on m’apporte une preuve »
    Sinon, l’accusation en a pris pour son grade dans des proportions aussi larges que celles des épaules de Claude Hermant. « Cette affaire, a torpillé Me Benmouffok, est une insulte à notre démocratie, à notre constitution, à notre code et à nos valeurs. » C’était dit. Dès l’heure du petit-déjeuner, Me Pascal Leroy avait planté le décor : « Qu’on m’apporte une preuve, une seule preuve, il n’y a rien, que des estimations. » Ce à quoi Chérifa Benmouffok ajoutait : « je n’ai vu et entendu que des sous-entendus, c’était truffé de contradictions, absurbe et ubuesque. » Conseil d’Aurore Joly, la compagne d’Hermant, Me Guillaume Ghestem s’interrogeait lui-aussi : « j’aurais aimé qu’on me démontre où se trouve l’association de malfaiteur ? »

    Premier avocat à être entré dans ce dossier il y a près de trois ans et dernier à plaider ce samedi, Maxime Moulin a, comme ses confrères, entraîné le tribunal sur le terrain du doute. Et principalement sur celui des armes de son client qu’il qualifiait « d’objets juridiques non identifiés. »

    Ce très long plongeon dans les abysses du droit communautaire aura-t-il été efficace ? Marc Trévidic et ses assesseurs le diront lundi 9 octobre à 14 h.
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    Dix ans de prison requis contre Claude Hermant
    http://www.lavoixdunord.fr/218486/article/2017-09-15/dix-ans-de-prison-requis-contre-claude-hermant

    « Manipulation, immense escroquerie, mensonges… » Il s’agit d’un procès pour trafic d’armes. Claude Hermant, ancien animateur du lieu de vie identitaire la Maison Flamande, est soupçonné d’en avoir importé au moins 250 armes entre 2013 et 2015.
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    Le Lillois a, dit-il, été un indicateur de la gendarmerie. Fort de ce statut, le prévenu a fourni des armes à des membres de la pègre afin de mieux infiltrer celle-ci. « Il y aurait donc déni de la collaboration de Claude Hermant à l’œuvre de justice », ironise le magistrat.
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    près de soixante vidéos de rencontres avec des enquêteurs auraient été réalisées. « Au final, il n’y en a qu’une » , rappelle le procureur. Celle-ci représente un douanier filmé à son insu, également poursuivi pour avoir acquis une arme à « titre personnel », ayant utilisé Hermant comme informateur.
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    « Hermant a été aviseur des douanes de 2010 à 2012, rappelle Jean-Philippe Navarre. Pour combien d’affaires ? Zéro. »
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    il a été indicateur très actif de la gendarmerie, laquelle l’aura finalement lâché par peur des ricochets des attentats de Paris de janvier 2015. Au moins cinq armes passées par le système nordiste ont, estiment les enquêteurs, atterri dans les mains d’Amedy Coulibaly.
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    Selon Hermant, les gendarmes lui ont donné un accord pour « travailler sur Samir L. », également dans le box. « Dans les rapports de contact (rédigés par les militaires), dans les mails (échangés par les enquêteurs et leur indicateur), le nom de Samir L. n’est pas cité une seule fois »
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    Hermant, un infiltré ? « De la poudre de perlimpinpin !
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    dix ans de prison demandées contre Claude Hermant.
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    Claude Hermant, au fil des audiences
    http://www.lavoixdunord.fr/218720/article/2017-09-15/claude-hermant-au-fil-des-audiences
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    À 54 ans, Claude Hermant présente un CV aussi impressionnant que sa carrure d’Hercule. Le patron de la Frite rit, rue Solférino, assure avoir été mercenaire. Pour avoir guerroyé en Croatie dans les années 1990 ou encore au Zaïre (actuel République démocratique du Congo). Le Lillois se présente également comme un ancien du DPS, le service d’ordre du Front national. Enfin, cet ancien animateur du lieu de vie identitaire la Maison Flamande est fiché S
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    Incarcéré depuis début 2015, cet étrange prévenu au casier judiciaire vierge assure avoir été lâché par la section de recherche de la gendarmerie. Hermant jure avoir travaillé avec ses enquêteurs. Mission : faire venir de Slovaquie des armes de guerre démilitarisées pour les revendre à des truands.
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    Une partie de cet arsenal atterrira entre les mains d’Amedy Coulibaly. Et là, grosse panique chez les gendarmes qui lâchent Hermant. Voilà la version hurlée par ce dernier depuis son interpellation.

    Quand il prend enfin la parole face à un enquêteur ayant été son officier traitant, c’est (surprise !) pour défendre un douanier (également poursuivi) qu’il aura filmé (à son insu) manipulant une arme de guerre. « À une époque, je me méfiais de lui, lance le prévenu aux juges. Ce n’est plus le cas. Je m’aperçois qu’il était malmené par sa hiérarchie. » Douanier ou gendarmes, ses ex-agents traitants sortent secoués de leur interrogatoire.
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    « Je suis un spécialiste de l’infiltration », insiste Hermant. Et de donner l’exemple d’un trafic d’armes qu’il aurait aidé à démanteler il y a quinze ans. D’extrême droite, Hermant ? « J’ai infiltré des réseaux nazis pour les casser, assure le Lillois. L’idéologie nazie, je la vomis. L’idéologie d’extrême droite, je la vomis. L’idéologie d’extrême gauche, je la vomis ! » On passe de la nébuleuse au brouillard.

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    #claude_hermant #extréme_droite #armes #Amedy_Coulibaly #Hyper_Cacher #attentats #police #douane #indicateurs #balance #ultradroite_lilloise #Trevidic #identitaires #Lille #troisième_voie #Hervé_Rybarczyk #Ashtones #gendarmes #douaniers #La_citadelle #collusion #etat_d’urgence #charlie_hebdo #Facholand

  • Procés claude hermant à Lille, 13 & 14 Septembre.

    Un colonel de gendarmerie décrypte la gestion des « indics » devant le tribunal de Lille 13 Septembre
    http://www.lavoixdunord.fr/217326/article/2017-09-13/un-colonel-de-gendarmerie-decrypte-la-gestion-des-indics-devant-le-trib

    Soupçonné d’avoir importé des centaines d’armes de guerre, Claude Hermant, ancien animateur du lieu de vie identitaire La Maison flamande, face à ses juges depuis lundi, assure avoir agi en tant qu’informateur de la gendarmerie. Celle-ci jure que non. Devant le tribunal, un colonel de la section de recherche de Lille s’est acharné, ce mercredi matin, à dynamiter sa version.

    L’homme est raide dans son costume gris. Le cheveu coupé en brosse et le ton martial, le colonel X. rappelle l’histoire des indics. Soulignant que Vidocq, grand flic originaire du Nord, en était friand. Puis la loi, toute la loi, rien que la loi. La loi Perben II du 13 mars 2004 autorise et encadre l’utilisation des « aviseurs » par les services d’enquête. Sur le plan plus local, le colonel X. est formel. La section de recherche (SR) du Nord-Pas-de-Calais, qu’il dirige depuis 2014, a toujours respecté ce cadre, y compris les circulaires affinant son application. Interpellé pour avoir importé des armes de Slovaquie, soupçonné d’en avoir fourni de grandes quantités à un Roubaisien censé alimenter des réseaux de gangsters, Claude Hermant, 54 ans, assure avoir agi en concertation avec des gendarmes de la SR de Lille.

    Le chef de ce service est, lui, formel. Les directives gendarmerie interdisent de nombreuses actions. Comme l’infiltration, la provocation à la commission d’infractions ou la non-dénonciation de délits et de crimes. « La SR de Lille applique scrupuleusement les directives de la direction centrale, martèle le colonel X. J’ai déjà personnellement lancé des procédures judiciaires contre des sources, y compris de mes propres services, car elles avaient commis des infractions. »

    Le cas spécifique Claude Hermant ? L’officier admet que la figure de l’ultradroite lilloise a été recrutée par son service en mars 2013. Le patron du snack lillois la Frite Rit sera finalement définitivement radié le 3 avril 2015. « J’ai fait le choix de le désinscrire de la liste des sources et de le blacklister, complète le colonel X. J’ai également personnellement appuyé la demande de déclassification des rapports concernant Hermant. » Et d’insister sur le cadre réglementaire : chaque rencontre avec un « indic » est suivie d’un rapport. « M. Hermant a fait l’objet de douze échanges, suivis de douze compte rendus, martèle l’officier. Ils ont tous été déclassifiés. » Si Claude Hermant, fiché S, a trafiqué des armes, ce n’est pas avec l’aval, y compris occulte, de gendarmes espérant ainsi faire tomber des groupes mafieux. Certainement pas.

    Deux bémols cependant soulevés par le président Marc Trevidic. Les rapports déclassifiés comportent souvent des parties largement noircies avant livraison aux juges d’instruction. Il existe visiblement un fichier national des sources blacklistées. Et ce afin d’éviter qu’un service d’enquête récupère un aviseur considéré comme peu fiable par un autre. Selon les débats, la douane est censée avoir blacklisté Claude Hermant en 2012. Cela n’a pas empêché la gendarmerie de le recruter un an plus tard. Emmanuel Riglaire, avocat d’un douanier poursuivi dans ce dossier, rappelle que Claude Hermant n’a pas été blacklisté par la douane.

    Trois enquêteurs de la SR de Lille doivent être entendus ce mercredi par le tribunal. À huis clos.

    Des gendarmes sérieusement malmenés à l’audience 13 Septembre
    http://www.lavoixdunord.fr/217675/article/2017-09-13/des-gendarmes-serieusement-malmenes-l-audience

    En ce troisième jour du procès Hermant, trois gendarmes étaient invités à témoigner. Les enquêteurs ont été les agents traitants de la figure de l’ultra-droite régionale recrutée comme indicateur. Au même moment, Hermant importait des d’armes de guerre. Un très mauvais moment face aux juges…

    Ancien animateur du lieu de vie identitaire La Maison flamande, Claude Hermant assure avoir importé des armes de guerre démilitarisées entre 2013 et 2015. L’arsenal provient des stocks d’AFG, une société slovaque. Depuis son interpellation, en janvier 2015, Hermant revendique une couverture offerte par la gendarmerie. Mis en cause dès l’arrestation d’Hermant, les gendarmes jurent n’avoir jamais autorisé une telle activité à « Claude », comme l’appelle l’un des trois militaires convoqués à la barre.

    Hermant a été recruté comme indicateur de gendarmerie en 2013. En 2014, la section de recherche démantèle un trafic d’armes. Nom de code du dossier : « Armes 62 ». Le patron du snack lillois la Frite rit les aide également à faire tomber un trafic de cannabis indoor.

    Une bonne recrue, Hermant ? Fait troublant, à la barre, deux militaires se souviennent avoir entendu le suspect citer le nom d’AFG en février 2014. Le colosse leur expliquera également que des « gens des quartiers cherchent comment s’approvisionner en armes ». Enfin, les militaires rapportent un épisode où Hermant leur a exhibé une arme présentée comme « démilitarisée », mais facile à remettre en état. Pour le premier militaire, il s’agit d’un « pistolet ». Pour l’autre, d’un « petit pistolet-mitrailleur ». Tout ça un an avant que n’éclate l’affaire Hermant.

    Les avocats de la défense peuvent se mettre à hurler. « Et à ce moment-là, vous ne vous dites pas, au moins, qu’Hermant peut être l’organisateur ? », s’emporte Cherifa Benmouffok. « Nous travaillons alors sur le dossier Armes 62 », riposte l’enquêteur. Hasard du calendrier, dans cette affaire, quatre personnes ont été condamnées mardi à Lille.

    Défenseur de Claude Hermant, Maxime Moulin pose, lui aussi, le doigt partout où ça fait mal. Les contradictions, les oublis, les erreurs, les mélanges de détails, les incohérences. Et, avec ces trois militaires, il y en a beaucoup. Dans le box, Hermant peut ricaner. Lui qui assure avoir été lâché après les attentats de Paris en 2015.

    L’un des trois gendarmes a connu Hermant par l’intermédiaire d’un douanier. Poursuivi lui aussi, ce fonctionnaire est assis juste derrière le militaire. Ce dernier lance un œil dans le prétoire et annonce : « Je ne vois pas, ici, l’homme qui m’a présenté Hermant. » L’arme que le principal suspect a un jour montré aux enquêteurs ? « Je pensais qu’Hermant voulait la recycler pour le paintball », explique le témoin. Stupeur dans la salle… Et quelques beaux moments de malaise.

    Après les gendarmes « fusillés », le douanier « crucifié » 14 Septembre
    http://www.lavoixdunord.fr/218153/article/2017-09-14/apres-les-gendarmes-fusilles-le-douanier-crucifie

    Ce mercredi, trois gendarmes venus témoigner au procès Hermant sont repartis secoués. Leur gestion d’une « source » nommée Hermant, a été décriée par plus d’un avocat. Ce jeudi, le douanier ayant présenté le leader de l’ultra-droite aux militaires a subi un sort analogue. Le peloton d’exécution étant fourni par le parquet.

    La scène est un classique des séries TV américaines. Le FBI planque une caméra pour confondre des gangsters récupérant des matières illégales. Dans la vraie vie, ici : la cible du piège est un douanier. Le cinéaste amateur ? Un « aviseur ». En clair, un indic nommé Claude Hermant. En 2013, cet ex-animateur du lieu de vie identitaire Maison flamande invite l’officier de renseignement. « Je m’en méfiais, assure aujourd’hui Hermant. Il me demandait de prendre de plus en plus de risques. »

    Le leader de l’ultra-droite lilloise planque alors une caméra dans une boîte estampillée Dora l’exploratrice et, à l’arrivée de S. L., 42 ans aujourd’hui, pose une Kalachnikov sur la table. La vidéo dépeint le douanier manipulant largement le joujou.

    Aujourd’hui, S. L. est poursuivi pour avoir acquis une Kalachnikov « à titre personnel ». Il s’est même rendu chez les enquêteurs de la PJ de Lille pour l’admettre. Au président Marc Trevidic, cet homme, maintenant en arrêt maladie pour « burn-out », explique n’avoir jamais acheté d’armes, mais avoir subi des pressions de la part de sa hiérarchie pour passer aux aveux. Pas le choix, la PJ aurait en main une vidéo présentant cet achat.

    Dorénavant, et sans image crédible au dossier, rétropédalage à la barre. Comme le glissait lundi l’avocate Cherifa Benmouffok, un parfum de barbouzerie flotte sur le prétoire. En 2012, la douane écarte Claude Hermant de sa liste d’aviseurs. S. L. le présente alors à la gendarmerie. Tout en continuant de travailler avec lui. Hermant, « source » chez les militaires, « correspondant » pour un douanier désormais défendu par Emmanuel Riglaire.

    Sur leur perchoir, les procureurs Cyndra Celino et Jean-Philippe Navarre remontent leurs manches. S’ils ont été compréhensifs avec les gendarmes, ces deux-là seront sans pitié avec S. L. Il veut se reconvertir dans la formation de douaniers ? Les magistrats l’interrogent sur… la déontologie. Seuls les douaniers professionnels sont autorisés à pratiquer des infiltrations.

    Et, à la barre, S. L. décrit comment il a noyauté un trafic de tabac à chicha à Anvers. Dans le rôle du cheval de Troie : Claude Hermant, maintenant soupçonné d’avoir importé des armes par centaines. Le président Trevidic part alors dans une longue mise en garde sur les dérapages, s’attardant lourdement sur les récentes affaires de douaniers ripoux. Malaise… Sauf pour un acteur majeur. Claude Hermant semble le seul à tenir debout sur cette toile d’araignée où plus d’un paraît s’engluer.

    Christophe, l’homme parti lui-même acheter ses armes de guerre 14 Septembre
    http://www.lavoixdunord.fr/218188/article/2017-09-14/christophe-l-homme-parti-lui-meme-acheter-ses-armes-de-guerre

    Christophe D. a, un temps, travaillé à la Frite rit de Claude Hermant. Finalement en froid avec la grande gueule de l’ultra-droite régionale, cette armoire à glace a pris sa voiture pour, lui-même, acheter des armes de guerre en Slovaquie. Quelques semaines à peine après les attentats contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher.

    Quand il croise les mains dans le dos, le public peut se poser une question très simple. Comment la police parvient-elle à menotter ce prévenu dans le dos ? Entre des bras ultra-musculeux et des trapèzes hypertrophiés, la manœuvre semble impossible. Avec Claude Hermant, cinquante-quatre ans, et Samir L., un Roubaisien de trente-deux ans, Christophe D. est le troisième prévenu du dossier Hermant à être en détention provisoire. Sept autres comparaissent libres. Cet ancien videur de cinquante et un ans a été interpellé le 10 juin 2016 à sa descente d’avion. Le Lillois arrivait de République Tchèque, où il venait de passer quatorze mois… en prison.

    Comme d’autres acteurs de ce dossier tentaculaire, Christophe D. a, un temps, travaillé à la Frite rit, rue Solferino. Ce snack où Claude Hermant est soupçonné d’avoir stocké des armes de guerre venues d’Europe de l’Est. L’ancien responsable du lieu de vie identitaire la Maison flamande est suspecté d’avoir inondé la pègre sous un arsenal allant de 150 à 250 armes. Christophe D., crâne rasé à la barre, fricote avec une tête de l’extrême droite qu’il accusera finalement de l’avoir « exploité ». Dans le prétoire, il donne le sentiment d’avoir été le parfait « go between » entre les marchands lillois de pistolets mitrailleurs et quelques caïds du boulevard de Metz. Pas vraiment la même couleur (politique). « Mon client a connu des personnes de ce quartier par le biais de son métier de videur », élude Faustine Broulin, l’avocate du suspect. Christophe D. serait donc un (très solide) pilier de la vie nocturne lilloise. La légende veut qu’il a empêché le kidnapping d’un patron de boîte de nuit, l’arrachant du coffre de voiture où ce commerçant avait été jeté.

    « Avez-vous mis Claude Hermant en relation avec Samir L. ? », interroge le président Trevidic. La question n’est pas anodine. Le trafic reproché au patron de la Frite rit est censé « exploser » avec l’arrivée du Roubaisien dans le circuit. Certaines de ces armes atterrissant, semble-t-il, entre les mains d’Amedy Coulibaly, le tueur de l’Hyper Cacher, à Paris, en janvier 2015. Pataud, confus, Christophe D. répond par des bougonnements. On peut prendre cela pour des dénégations. À la barre, le prévenu consacre du temps à se plaindre de Claude Hermant.

    Sous le regard noir de son ex-employeur, Christophe D. évoque également la police à plusieurs reprises, chez qui il va largement s’épancher. Au point d’agacer le président. « Bon, votre commissaire-psychiatre P… », le mouche le magistrat.

    Reste ce voyage en Slovaquie. En 2015, Christophe D. déboule chez AFG, l’entreprise qui, un temps, envoyait des armes par colis en France. Elle s’y refuse désormais. Le Lillois débarque en Slovaquie. À la frontière tchèque, contrôle. « Ils n’ont pas cru que j’étais français », s’offusque le contrevenant. L’homme part en prison. Selon la police tchèque, Christophe D. a reconnu vouloir revendre ses emplettes une fois rentré. Face aux juges lillois, il proteste et soulève « une erreur de traduction ». « C’était pour moi », martèle dorénavant le prévenu.

    Au tour de Murielle Cuadrado de se lever. « Vous avez expliqué avoir une technique, relève l’avocate. Vous dites : « Je me fais passer pour un babache »… » Son vis-à-vis approuve. « Ici aussi, vous jouez au babache ? », assène l’une des défenseures de Samir L.

    #claude_hermant #extréme_droite #armes #Amedy_Coulibaly #Hyper_Cacher #attentats #police #douane #indicateurs #ultradroite_lilloise #Trevidic

  • Claude Hermant, « indic » ou trafiquant d’armes utilisées par Amedy Coulibaly ?
    Modifié le 11/09/2017 à 21:25
    http://www.ouest-france.fr/hauts-de-france/lille-59000/claude-hermant-indic-ou-trafiquant-d-armes-utilisees-par-amedy-coulibal

    Le procès de dix personnes pour trafic d’armes en bande organisée s’ouvrait ce lundi devant le tribunal correctionnel de Lille. Parmi les prévenus : Claude Hermant, jugé pour trafic d’armes, dont six ont servi à Amedy Coulibaly dans l’attentat de l’Hyper Cacher et le meurtre d’une policière à Montrouge en 2015.

    Claude Hermant, soupçonné d’être au cœur d’un trafic d’armes dont six ont servi à Amedy Coulibaly dans l’attentat de l’Hyper Cacher et le meurtre d’une policière à Montrouge en 2015, a tenté de convaincre qu’il était un « indic », lundi au premier jour du procès devant le tribunal correctionnel de Lille.

    Crâne rasé, carrure solide et vêtu de noir, Claude Hermant a répondu souvent approximativement aux questions du président du tribunal Marc Trevidic concernant des messages ou des courriels envoyés aux « services ».

    « Je ne sais pas… », « je ne suis pas directeur d’enquête », a-t-il souvent répondu aux questions du président. « Mais qui sont ces clients ? » acheteurs des armes, s’est emporté le procureur Jean-Philippe Navarre. Hermant refuse de répondre précisément.

    Un peu plus tard, il répond sèchement au parquet : « Qu’on me condamne parce que les situations étaient + borderline + je comprends, mais pas au-delà. Je ne suis pas un voyou », dit-il, ajoutant que les attentats de 2015 « ont pollué cette enquête ».

    #Claude_Hermant

    • Mardi 12 Septembre 2017

      Avocate d’un jeune Roubaisien soupçonné de trafic d’armes et de stupéfiants, Muriel Cuadrado dévoile un courriel de cet ancien collaborateur de la Frite Rit, le snack lillois d’Hermant. Anthony D. s’y décrit en « gros facho passant son temps à se battre » . Et Me Cuadrado d’insister sur les fréquentations d’un homme qui finira par débarquer dans les locaux de la police judiciaire pour dénoncer un trafic d’armes orchestré par son ancien mentor : Claude Hermant. « Vos amis sont skinheads, ou membres de Troisième Voie ou de la Jeunesse nationaliste révolutionnaire, non ? », insiste Cuadrado, désireuse de « visiter Facholand » et évoquant des mouvements réputés d’extrême droite.

      Défenseure de Samir L., jeune Roubaisien censé s’être largement approvisionné chez Hermant, Cherifa Benmouffok prend le relais. « Hermant a visiblement une réputation de trafiquant e longue date. Pourquoi ne dénonce-t-il pas ses autres clients ? » « Ce sont ses amis » , explique Anthony D. Samir L. ? « Lui, c’est le bon client », reprend le prévenu. « Parce qu’il est arabe et de Roubaix ? », insiste Me Benmouffok. « C’est un peu ça, oui »,

      http://www.lavoixdunord.fr/217161/article/2017-09-12/au-deuxieme-jour-du-proces-hermant-petite-escapade-facholand

  • Affaire Hermant : Trafic d’armes, un procès sous très haute surveillance à Lille 11 septembre 2017 - Lakhdar Belaïd
    http://www.lavoixdunord.fr/216128/article/2017-09-11/trafic-d-armes-un-proces-sous-tres-haute-surveillance-lille

    À partir de ce lundi, et toute la semaine, le tribunal correctionnel de Lille se penche sur l’affaire Hermant. Cette figure de l’ultra-droite identitaire est soupçonnée d’avoir alimenté le marché parallèle en armes de guerre. Lui assure avoir travaillé pour des services de sécurité qui l’auraient finalement « lâché ». Dans un dossier où plane le fantôme d’Amedy Coulibaly, Hermant annonce des révélations fracassantes à l’audience. Info ou intox ?

    Claude Hermant passe difficilement inaperçu. Géant au crâne rasé, cet ancien militaire est également doté d’une voix qui porte. Avec Maxime Moulin et Guillaume Ghestem, ses avocats, Hermant, 53 ans, a fait convoquer cinq gendarmes, dont un colonel, pour une explication publique face au président Marc Trévidic. Quelques policiers devaient visiblement également faire partie de la liste. Ils ont finalement été écartés.

    Déclarations « évolutives »
    Le 20 janvier 2015, la douane interpelle une jeune femme. Elle a réceptionné un colis expédié de Slovaquie et contenant des pistolets-mitrailleurs CZ neutralisés. L’affaire Hermant débute. Avec sa femme, ce responsable d’une friterie rue Solférino à Lille, la Frite rit, s’occupe également de la société Seth Outdoors. Celle-ci est en lien avec une compagnie slovaque, AFG, spécialisée dans le négoce d’armes de guerre d’Europe de l’Est démilitarisées.

    Claude Hermant est soupçonné d’en avoir importé pour ensuite les remettre en état avant de les proposer sur un marché occulte, celui des truands. Entre son interpellation et son procès, Hermant, qui rappelle volontiers avoir été membre du DPS, le service d’ordre du Front national, évolue dans ses déclarations. Selon nos informations, quand le suspect admet des remilitarisations, avant de se rétracter, c’est, dit-il, pour aider les autorités à infiltrer le milieu.

    Un ajournement ?
    Assurée par la police judiciaire de Lille, l’enquête est d’autant plus sensible que le fantôme d’Amedy Coulibaly planera sur le prétoire lillois. Cinq armes passées par le Nord ont été retrouvées auprès du tueur de l’Hyper Cacher à Paris (9 janvier 2015). C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les avocats de Claude Hermant entendent réclamer un ajournement du procès.

    Deux enquêtes en cours, dont l’une implique deux femmes interpellées à Roubaix, creusent la piste des fournitures au terroriste parisien. Mes Moulin et Ghestem ne comprennent pas pourquoi le cas de leur client est traité à part.

    À compter de ce lundi, le palais de justice de Lille sera bunkerisé, avec double portique, etc. Le contenu des débats sera, lui aussi, scruté à la loupe.

    Où sont donc passées les armes ?
    En décembre 2013, la Sûreté urbaine de Lille investit un appartement de la rue Jules-Guesde, dans le quartier lillois de Wazemmes. Les policiers récupéreront des stupéfiants, un pistolet-mitrailleur Skorpio et deux chargeurs. Selon nos informations, l’ADN de Claude Hermant aurait été trouvé sur l’arme.

    En décembre 2014, la police judiciaire intercepte un véhicule sur le parking du supermarché Match de Tourcoing et met la main sur quatre fusils-mitrailleurs et des munitions. Selon nos informations, le numéro de téléphone d’Hermant aurait été trouvé dans le répertoire de l’un des interpellés et les armes auraient été commandées en novembre 2014 par Seth Outdoor.

    L’une des questions du procès sera : jusqu’où les armes importées se sont-elles propagées ? Soupçonné d’avoir notamment préparé l’attaque d’un centre fort (qui détient des espèces), Samir L., défendu par Cherifa Benmouffok, rétorquerait avoir simplement envisagé le rachat de la Frite rit, snack désormais célèbre de la rue Solférino.

    #Claude Hermant #Amedy_Coulibaly #attentats #Lille #ultra-droite #extrême-droite #identitaire #gendarmes #douaniers #La_citadelle #collusion #etat_d’urgence #charlie_hebdo

    • Agents de l’ombre ou ombre sur les agents ? de police 10 Septembre 2017
      http://www.lavoixdunord.fr/216124/article/2017-09-10/agents-de-l-ombre-ou-ombre-sur-les-agents

      Les échanges dans la grande salle du palais de justice devraient tourner sur le trafic d’au moins 150 armes, peut-être 250, du pistolet au fusil d’assaut. Un tel négoce clandestin (entamé en décembre 2013) a-t-il été couvert par les services de sécurité ?

      Des échanges de mails démontreraient que Claude Hermant a bien travaillé pour des enquêteurs de la gendarmerie, étant même enregistré comme tel en 2013. L’un de ses anciens correspondants aurait farouchement nié avoir donné l’ordre à Hermant d’acheter des armes et très fermement certifié n’avoir jamais été informé de ces opérations. L’ex-responsable du lieu de vie identitaire la Maison flamande (aujourd’hui fermé) assurerait, lui, le contraire. Cette semaine, il sera question des relations entre Hermant et Samir L. Ce Roubaisien de 32 ans est soupçonné d’avoir livré des armes à Amedy Coulibaly. Hermant a-t-il « traité » Samir L. pour le compte des gendarmes ? Sur cette question, le face-à-face gendarmes-prévenu risque d’être animé.

      Claude Hermant aurait aussi été indic des douanes. Dix personnes sont convoquées devant les magistrats. Parmi elles, la femme de Claude Hermant. Ou encore un douanier, défendu par Emmanuel Riglaire. Le fonctionnaire serait un adepte du survivalisme, pratique chère à Claude Hermant. Durant les débats, le douanier rétorquera visiblement avoir rejoint cette doctrine pour… infiltrer le cercle d’un Hermant jugé au final peu fiable, par ses services, en tant que « collaborateur ». L’agent poursuivi se retrouve aujourd’hui soupçonné d’acquisition et de détention d’armes de guerre. Enfin, au moins un autre prévenu dans ce dossier aurait été informateur de la police avant d’être radié. Pour sa part, Claude Hermant assurerait avoir réalisé des vidéos de ses rencontres. Ces films auraient aujourd’hui disparu.

    • Lille : Les identitaires  : Le « beau bar » de Génération identitaire La Brique

      Chaque vendredi soir, à partir de 19 h, les client.es-membres du bar La Citadelle sirotent des bières dans un décor rustique : feuilles de houblon suspendues au-dessus du comptoir, drapeaux flamands, tables en bois et statue de Jeanne d’Arc. Sept mois après l’ouverture officielle de ce local affilié extrême droite, petit retour sur quelques uns des agissements sur lesquels le bar construit son réseau via la figure centrale de son boss, Aurélien Verhassel.
       

      Officiellement, le patron du 8 rue des Arts, Aurélien Verhassel, prétend qu’il est consultant en com’ politique pour « des élus à l’aile droite des Républicains » et qu’il fait copain-copain avec des « jeunes UMP ».
      . . . . . . .

      http://labrique.net/index.php/thematiques/droit-a-la-ville/894-le-beau-bar-de-generation-identitaire

    • Premier jour du procès Claude Hermant Par Lakhdar Belaïd - 11/09/2017

      http://www.lavoixdunord.fr/216369/article/2017-09-11/premier-jour-du-proces-claude-hermant-sous-un-feu-roulant

      Le procès s’annonçait riche en surprises. Certaines ont vraiment pris les observateurs… par surprise. Claude Hermant, ancien animateur du lieu de vie identitaire La Maison Flamande, homme qui se présente volontiers comme ex-membre du DPS, service d’ordre du FN, comparait pour la vente de (au minimum) 246 armes de guerre entre 2013 et 2015.

      Depuis plus de deux ans, ce colosse de cinquante-quatre ans assure avoir travaillé en tant qu’agent infiltré au profit de la gendarmerie, avant d’être lâché. Visiblement, jure Hermant, après que les attentats de Paris ont provoqué une panique générale parmi les services de sécurité.

      Tout le miel des échanges est là
      Voici donc un Claude Hermant et ses avocats faisant convoquer des gendarmes (présentés comme d’ex-officiers traitants). À la barre, le colonel des mêmes militaires réclame une audition à huis clos pour ses hommes. Question de « sécurité ». Et, au lieu de protester, de tempêter, Guillaume Ghestem, l’un des défenseurs d’un suspect jurant pourtant vouloir confondre ces ex-contacts, se lève et annonce, laconique : « Nous ne nous y opposons pas… » Finalement, le tribunal présidé par Marc Trevidic, optera pour un huis clos partiel. Seule la presse sera admise lors de ces interrogatoires. La « vérité » annoncée par Hermant aura quelques témoins sans robe noire.
      . . . . . .
      La deuxième défend Samir L., un Roubaisien à qui le leader de l’ultradroite est censé avoir fourni des armes par colis entiers. « C’est la première fois que vous évoquez une fourniture d’explosifs à mon client », relève Me Benmouffok face aux juges, sourire sarcastique aux lèvres. Fureur de son adversaire.
      . . . . .
      Avec son client privilégié, le Roubaisien Samir L., Hermant était censé prendre des rendez-vous sur le parking du Decathlon Campus de Villeneuve-d’Ascq.

      « Les gendarmes m’ont dit qu’ils s’étaient mis d’accord avec la sécurité du magasin pour récupérer les bandes de la vidéosurveillance  », annonce le patron de la Frite rit, rue Solferino à Lille. Stupeur du président Marc Trevidic, ex-juge antiterroriste. « Ça paraît léger, grimace le magistrat. On parle de 146 armes. » On imagine mal des enquêteurs sous-traiter ce genre de dispositif.

      Au moment de l’enquête, Claude Hermant a assuré avoir visité un atelier de remilitarisation d’armes à la Madeleine. À la barre, il explique finalement avoir repris à son compte le récit de l’un de ses proches. Motif : protéger ce « témoin » . Les deux procureurs de l’audience n’hésitent pas non plus à titiller le principal prévenu sur un point crucial. Pourquoi, au moment des attentats de Paris de 2015, a-t-il spontanément soupçonné Samir L. d’avoir apporté des armes à Amedy Coulibaly ? Là, le ton monte. Suite des débats ce mardi.

      #Decathlon #Marc_Trevidic

    • Mardi 12 Septembre 2017

      Avocate d’un jeune Roubaisien soupçonné de trafic d’armes et de stupéfiants, Muriel Cuadrado dévoile un courriel de cet ancien collaborateur de la Frite Rit, le snack lillois d’Hermant. Anthony D. s’y décrit en « gros facho passant son temps à se battre » . Et Me Cuadrado d’insister sur les fréquentations d’un homme qui finira par débarquer dans les locaux de la police judiciaire pour dénoncer un trafic d’armes orchestré par son ancien mentor : Claude Hermant. « Vos amis sont skinheads, ou membres de Troisième Voie ou de la Jeunesse nationaliste révolutionnaire, non ? », insiste Cuadrado, désireuse de « visiter Facholand » et évoquant des mouvements réputés d’extrême droite.

      Défenseure de Samir L., jeune Roubaisien censé s’être largement approvisionné chez Hermant, Cherifa Benmouffok prend le relais. « Hermant a visiblement une réputation de trafiquant e longue date. Pourquoi ne dénonce-t-il pas ses autres clients ? » « Ce sont ses amis » , explique Anthony D. Samir L. ? « Lui, c’est le bon client », reprend le prévenu. « Parce qu’il est arabe et de Roubaix ? », insiste Me Benmouffok. « C’est un peu ça, oui »,

      http://www.lavoixdunord.fr/217161/article/2017-09-12/au-deuxieme-jour-du-proces-hermant-petite-escapade-facholand

      #Facholand #balance #lacunes dans l’enquête, il manque les clients amis

  • Le management de la terreur (J.-Yves Jézéquel)
    https://www.crashdebug.fr/international/13884-le-management-de-la-terreur-j-yves-jezequel

    Mention spéciale au député Georges Fenech, ex-président de la commission d’enquête parlementaire sur les attentats de Paris, qui propose la création d’un « FBI à l’européenne ». Comme il l’avait fait en juin, après l’attentat de Londres. Un comble, surtout quand on se souvient que le FBI avait été accusé très sérieusement d’organiser lui-même de faux attentats “islamistes”… OD

    Dans mon livre « Le djihad et le management de la terreur » paru aux éditions Vérone en 2017, 445 pages, je renvoyais mon lecteur, notamment aux publications de l’ancien patron du Pôle anti terroriste français, Le juge Marc Trévidic qui avait démissionné avec fracas de son poste, après avoir refusé de tenir le discours convenu « officiel » concernant le terrorisme, sur les plateaux de télévisions où il était invité…

    Pour information, il est (...)

  • #Terrorisme – Trévidic : « L’anniversaire de notre échec à tous »
    http://vilistia.org/archives/12564

    TERRORISME – Trévidic : « L’anniversaire de notre échec à tous » Marc Trévidic, ex-magistrat antiterroriste. Archives AFP Marc Trévidic, spécialiste de l’antiterrorisme pendant quinze ans, estime que Daech va profiter de la présidentielle pour commettre des attentats en France. Le 13 … Lire la suite →

  • Antiterrorisme : la destruction du renseignement

    "La DGSI, et même le renseignement extérieur, semblent sourds et aveugles à ce qui se trame au Moyen-Orient en général – et en Syrie en particulier. Et même impuissants à exploiter les informations transmises par d’autres centrales. Les services français avaient pourtant bénéficié, avant les attentats du vendredi 13 décembre 2015, d’« informations que plusieurs services de renseignement arabes ont transmises à leurs homologues occidentaux », et selon lesquelles « six capitales ont été ciblées en priorité par l’État islamique : Paris, Londres, Moscou, Le Caire, Riyad et Beyrouth ». Selon ces renseignements, plusieurs « émirs » étaient chargés de superviser des opérations dans chaque zone visée et disposaient d’une large autonomie opérationnelle. Ils ne répondaient qu’à Abou Ali al-Anbari, le chef du Conseil de sécurité et de renseignement de l’État islamique.

    Selon les mêmes informateurs, Abdelhamid Abaaoud était chargé d’organiser des attentats terroristes en France, en Espagne et en Italie. Un autre « émir » terroriste, d’origine pakistanaise, serait chargé de la Grande-Bretagne. Cette stratégie de la terreur aurait été décidée lors d’une réunion tenue autour d’Abou Bakr al-Baghdadi, fin juin 2015, à Mossoul. Dès lors, les opérations terroristes en Europe devaient être menées par des djihadistes aguerris en Irak ou en Syrie, placés directement sous les ordres de cadres du Conseil de sécurité et de renseignement de l’État islamique et non plus par des groupes spontanés ou autres « loups solitaires », comme jusqu’en janvier 2015.

    De même, le lundi 16 novembre 2015, un responsable gouvernemental turc affirmait, on l’a dit, que la police de son pays avait alerté la police française par deux fois, en décembre 2014 et en juin 2015, à propos d’Ismaël Mostefaï, l’un des terroristes kamikazes du Bataclan, mais qu’elle n’avait reçu aucun retour. Pourtant, son cas était particulièrement inquiétant : « Les services secrets savaient dès 2009 qu’Ismaël Mostefaï, l’un des kamikazes du Bataclan, s’était radicalisé à Chartres, dans un groupe dirigé par un vétéran du djihad, cerveau d’un attentat au Maroc en 1994. Au printemps 2014, la DGSI a perdu la trace de Mostefaï après l’avoir repéré à Chartres, quelques mois après son probable retour de Syrie. Il avait franchi la frontière turque le même jour qu’un autre kamikaze du Bataclan, Samy Amimour. »

    Les services français auraient également reçu des signalements du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), le service algérien, à propos d’Ismaël Mostefaï. Le DRS aurait repéré le futur tueur du Bataclan et l’aurait surveillé fin 2014. Le service algérien avait en effet découvert qu’il était membre d’une cellule de recrutement de djihadistes pour la Syrie, au nom de laquelle il aurait été chargé de transporter des messages, de l’argent et des faux documents. Par ailleurs, le site d’information Mondafrique évoquait, en novembre 2015, un signalement du DRS à la DGSE, en octobre. Mais, une fois encore, ces informations n’auraient pas été sérieusement exploitées.

    Enfin, la communication entre les différents services français de renseignement et de police semble avoir été catastrophique jusqu’au bout. À l’automne 2015, plusieurs responsables de la lutte antiterroriste se plaignaient ainsi de la rétention d’informations pratiquée par la DGSI, laquelle avait visiblement le plus grand mal à partager ses fiches « S » (atteinte à la sûreté de l’État). La DRPP, la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire, mais aussi la DNRED et Tracfin s’en plaignaient clairement, surtout depuis les attentats de janvier 2015. Même la DGSE semblait souffrir de cette rétention d’informations, alors qu’une cellule de liaison entre ce service de renseignement extérieur et le renseignement intérieur était logée au siège de la DGSI, à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine).

    Et pourtant…

    « J’ai acquis la conviction que les hommes de Daech ont l’ambition et les moyens de nous atteindre beaucoup plus durement en organisant des actions d’ampleur, incomparables à celles menées jusqu’ici. Je le dis en tant que technicien : les jours les plus sombres sont devant nous », prévenait le juge d’instruction Marc Trévidic, le 30 septembre 2015, dans Paris Match, alors qu’il quittait le pôle judiciaire antiterroriste, après dix ans d’enquêtes. Le vendredi 13 novembre 2015, son avertissement devint prédiction.

    Et pourtant, surtout depuis les tueries de Mohamed Merah, en mars 2012, les gouvernements ont multiplié les réformes du dispositif judiciaire antiterroriste. Pas moins de quatre lois ont été votées en quatre ans, et les décrets d’application de la plus récente, la loi sur le renseignement promulguée le 24 juillet 2015, ont été publiés à peine plus d’un mois avant les attentats de novembre 2015. En réponse à la tentative de fusillade du 21 août 2015 dans le Thalys Amsterdam-Paris, l’Assemblée nationale devait même commencer, mardi 17 novembre 2015, l’examen d’un nouveau projet de loi élargissant les pouvoirs de fouille des agents SNCF, RATP et des policiers dans les transports. Vendredi 13 novembre, Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, présentait un plan de lutte contre les filières d’armement du banditisme et du terrorisme, à la préfecture des Hauts-de-Seine.

    Et pourtant, encore, la loi relative au renseignement promulguée le 24 juillet 2015 avait considérablement étendu les pouvoirs des services de renseignement, en légalisant des techniques de surveillance très intrusives, comme la sonorisation de locaux et de domiciles, les IMSI-catchers, ces valises qui imitent le fonctionnement d’une antenne-relais sur laquelle se connectent donc les téléphones mobiles proches et qui permettent l’interception de conversations…

    Les moyens financiers et en effectifs des services du renseignement avaient également été renforcés. Transformée en DGSI, en juin 2014, et placée directement sous la tutelle du ministre de l’Intérieur, la DCRI s’était vu promettre 432 postes supplémentaires ainsi qu’un budget supplémentaire de fonctionnement de 12 millions d’euros par an. Le plan antiterroriste annoncé par le Premier ministre Manuel Valls, en janvier 2015, y ajoutait un renfort de 1 400 policiers et gendarmes supplémentaires sur trois ans, dont 1 100 pour le renseignement intérieur…

    Et pourtant, enfin, en juillet, le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve avait créé et placé sous son contrôle direct un état-major opérationnel de prévention du terrorisme (EMOPT) censé coordonner les différents services et éviter que de nouveaux djihadistes ne passent entre les mailles du filet du renseignement. L’EMOPT « est chargé de piloter la totalité du dispositif de détection et de suivi des individus radicalisés susceptibles de commettre un acte terroriste », soulignait Bernard Cazeneuve, le 29 octobre 2015, à l’Assemblée nationale.

    « Sponsors » de l’État islamique

    Dans son entretien avec Frédéric Helbert, le juge d’instruction antiterroriste Marc Trévidic insistait : « La menace est à un niveau maximal, jamais atteint jusqu’alors. D’abord, nous sommes devenus pour l’État islamique l’ennemi numéro un. La France est la cible principale d’une armée de terroristes aux moyens illimités. » Or, la question des « moyens illimités » du terrorisme islamiste est le tabou par excellence de la communication politique. Un tabou que les vrais experts du renseignement n’ont parfois plus le cœur de respecter.

    Alain Chouet a été le chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE, de 2000 à 2002, après avoir été en poste à Beyrouth, Damas, Rabat, etc. Au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, il affirmait ne pas avoir été surpris par ceux-ci : « Cela fait au moins un an que les spécialistes du renseignement agitent le drapeau pour prévenir du risque imminent d’attentat. Il faut bien comprendre que l’État islamique ayant une vraie stratégie pour se développer sur le terrain en tant qu’État, et commençant à perdre pied quand ses ressources se tarissent, opère une transition vers le terrorisme international, comme Al-Qaïda à son époque. Il s’agit pour l’État islamique de garder sa crédibilité, ses sponsors et ses soutiens. »

    À propos de ces « sponsors » et « soutiens » du terrorisme projeté par l’État islamique, Alain Chouet ne mâchait pas ses mots : « Oui, il y a les sponsors idéologiques et financiers du terrorisme. Les pétromonarchies du Golfe, qui essayent par tous les moyens – et en particulier par la diffusion de l’idéologie salafiste – d’empêcher la constitution d’un axe chiite du Liban jusqu’à l’Iran, qui ont un problème de légitimité musulmane, et qui veulent empêcher toute dérive démocratique. L’Arabie saoudite, par exemple, s’emploie depuis trente ans à distiller le message salafiste et wahhabite en Europe, à travers des écoles et des fondations, et le résultat est là aujourd’hui. » Le propos est on ne peut plus clair et net. J’y reviendrai précisément un peu plus loin.

    Comme pratiquement toutes mes autres sources au sein du renseignement, l’ex-chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE dénonçait aussi vigoureusement la bureaucratisation du métier : « À la DGSE, aujourd’hui, il doit y avoir 4 500 à 5 000 personnes, dont 1 000 qui font de l’administratif. Le problème n’est pas tant les effectifs que la qualité et l’utilisation des effectifs, comme à la DGSI. J’ajoute qu’à la gendarmerie, il y a 80 000 personnes qui, à une époque, quadrillaient le territoire et parlaient à tout le monde. On les a reconvertis en percepteurs d’impôts et pères fouettards sur le bord des routes, au lieu de créer un corps spécifique, une police des routes. Du coup, le maillage territorial du renseignement et la défense opérationnelle du territoire ont été affaiblis. »

    Destruction du renseignement financier

    Mais ce qui a sans doute été le plus affaibli, pour ne pas dire tout simplement brisé, c’est le renseignement financier. Le jeudi 26 novembre 2015, Aleph me le dit, une nouvelle fois, crûment : « Lorsque les RG travaillaient sur le financement du terrorisme, ses enquêteurs tombaient aussi souvent sur d’autres malversations : évasion fiscale, financement politique illégal, corruption… Je suis convaincu que le démembrement et l’absorption des RG par la DST, lors de la création de la DCRI, en 2008, ont été voulus par Nicolas Sarkozy et ses généreux amis qui avaient beaucoup à craindre du renseignement financier. » Résultat : les arcanes du financement d’un terrorisme toujours très coûteux sont plus obscurs et impénétrables que jamais pour le renseignement français.

    Aleph confirme ainsi les analyses contenues dans un document confidentiel d’une rare sévérité, rédigé par un collectif d’officiers de la DCRI, ce « FBI à la française ». Rédigé sur 14 pages, en style parfois télégraphique, ce véritable audit du service de renseignement, mais aussi de nombreuses autres directions de la police nationale compétentes en matière de délinquance financière, a été remis le 16 février 2013 aux parlementaires du groupe de travail sur les exilés fiscaux, constitué un mois et demi plus tôt. « Avant la réforme de 2008, les renseignements généraux disposaient d’un réseau territorial de remontées d’informations économiques et financières. Ses services centraux disposaient d’un accès aux déclarations Tracfin et apportaient des éléments de travail à Tracfin. Les RG avaient mis en place un maillage au sein des employés des établissements bancaires pour faire remonter de l’information financière en amont de Tracfin et recueillir des informations non filtrées. Lors de la réforme des services de renseignement survenue en 2008, la recherche du renseignement financier a été centralisée au sein de la sous-direction en charge de la protection du patrimoine économique et financier de la DCRI… » Et dès lors, les informations recueillies sont tombées dans les oubliettes du « secret défense ».

    Aussi, la note très précise des officiers de police encourageait les élus à interroger, si possible dans le cadre d’une commission d’enquête parlementaire, les anciens et actuels patrons ou responsables de la DCRI (dont Bernard Squarcini, Gilles Gray, Éric Bellemin-Comte…), notamment celles et ceux qui étaient et sont encore chargés du renseignement économique et financier. Les auteurs du document suggéraient même aux parlementaires des questions lourdes de sens, révélant, d’une part, la surveillance étroite opérée par la DCRI sur l’organisation de la fraude fiscale internationale et dénonçant, d’autre part, la non-transmission à la justice des informations considérables recueillies lors de cette surveillance.

    Bernard Squarcini, Gilles Gray, Éric Bellemin-Comte… Dans le cadre d’une esquisse d’enquête sur la destruction du renseignement français, quelques questions sur leurs itinéraires professionnels se posent tout naturellement."

    https://blogs.mediapart.fr/antoine-peillon/blog/230316/antiterrorisme-la-destruction-du-renseignement

  • Dans l’engrenage de la terreur. Perdre en liberté sans gagner en sécurité, par Patrick Baudoin
    http://www.monde-diplomatique.fr/2015/12/BAUDOIN/54366
    " Les attentats ne trouvent pas leur source dans une insuffisance de lois."

    Alors que la facilité avec laquelle circulent les djihadistes souligne l’insuffisance des moyens mis au service de la justice, le gouvernement répond par un déni de justice supplémentaire, avec la prolongation de l’état d’urgence.

    Dès 1986, après une vague d’attentats attribués à Action directe, un régime d’exception avait été instauré, jetant les bases de la législation antiterroriste française : infractions et règles procédurales spécifiques, durée de garde à vue allongée, pouvoirs policiers renforcés, corps de magistrats spécialisés, cour d’assises spéciale. Depuis lors, plus d’une quinzaine de textes visant chaque fois à renforcer le système d’exception se sont empilés. Le 22 juillet 1996 a ainsi été adoptée une loi qui introduisait en tant qu’infraction autonome la notion très souple d’association de malfaiteurs « en relation avec une entreprise terroriste ». Une disposition que le juge d’instruction Marc Trévidic qualifie d’« outil terriblement efficace, mais également potentiellement dangereux pour les libertés individuelles ».

    Dans le contexte de l’après-11-Septembre, une loi ciblant la menace islamiste et présentée comme temporaire, votée le 15 novembre 2001, a été pérennisée par une loi du 18 mars 2003. Elle comporte des dispositions facilitant les perquisitions domiciliaires ou les contrôles des zones aéroportuaires et portuaires, et fait obligation aux opérateurs de conserver et de communiquer leurs données en matière de communications. Ces moyens de surveillance et de contrôle ont été complétés et renforcés par la loi du 9 mars 2004, dite « Perben II », de lutte contre le terrorisme et la grande criminalité, puis par une loi du 23 janvier 2006, consécutive aux attentats de Londres en juillet 2005. Cette dernière autorise par exemple le développement intensif de la vidéosurveillance et l’accès aux fichiers administratifs, et prolonge la durée de la garde à vue de quatre à six jours en cas de « risque de l’imminence d’une action terroriste en France ou à l’étranger ».

    Plus récemment, une loi du 13 novembre 2014, censée répondre aux craintes suscitées par les « loups solitaires » après l’attentat commis six mois plus tôt au Musée juif de Bruxelles, a créé le délit d’entreprise terroriste individuelle. Une nouvelle dynamique apparaît avec ce texte : des pouvoirs accrus sont accordés à l’administration et à l’exécutif, avec l’introduction d’une interdiction administrative temporaire de sortie du territoire sur décision du ministre de l’intérieur, ou d’une interdiction administrative d’entrée sur le territoire français, en cas de menace, à l’encontre de tout ressortissant étranger ne résidant pas habituellement en France.

    Les attentats des 7 et 9 janvier 2015 à Paris ont quant à eux été suivis du vote de la loi sur le renseignement, dont l’objectif affiché était de renforcer les moyens des services secrets en légalisant des procédés particulièrement intrusifs pratiqués de longue date. Ce texte, arguait le gouvernement, permettrait de mieux encadrer les activités des services. Or l’étendue de son champ d’application, dénoncée par les défenseurs des droits humains, leur laisse au contraire les mains libres pour exercer sans contrôle judiciaire une surveillance à grande échelle qui peut concerner non seulement les individus ciblés, mais aussi leur entourage.

    #Patrick_Baudoin #libertés_publiques #surveillance #lois_scélérates #lois_liberticides #lois-dites-antiterroristes #loi_sur_le_renseignement
    #loi_Perben_II #loi_du_13_novembre_2014 #loi_du_22_juillet_1996 #loi_du_15_novembre_2001 #loi_du_23_janvier_2006

    • Que pensez-vous de la prolongation de l’état d’urgence ?

      Marc Trévidic : C’est la même logique : se passer du judiciaire. Où ira-t-on demain ? On autorisera les services à agir sans preuve ? L’état d’urgence est un instrument très dangereux, qui peut facilement être retourné contre des opposants politiques. Si vous lisez la loi, vous verrez qu’il n’est pas question de « terrorisme », mais d’un « péril imminent ». Un terme à l’acception très large, qui permet d’assigner des militants écologistes à résidence. Et qu’on ne me parle pas des juges administratifs ! Ils travaillent a posteriori, ce n’est pas du tout le même rôle que celui du juge judiciaire, qui contrôle a priori. Je le répète, l’état d’urgence est une arme dangereuse si elle est mise entre de mauvaises mains. Une fois dans la Constitution, cette loi permettra au pouvoir exécutif de faire ce qu’il veut. La démocratie est un système de contre-pouvoirs. Tout ce qui permet de mettre de côté le juge judiciaire, garant de nos libertés individuelles, est dangereux. Nous nous imaginons que la France sera une démocratie jusqu’à la fin des temps. Soyons sérieux et regardons le monde autour de nous... J’ai rencontré beaucoup de victimes d’attentats, j’en ai surtout vu beaucoup dont on ne s’occupait plus du dossier. Un attentat est passé de mode très vite. Je refuse l’idée qu’on aille saloper la Constitution au nom des victimes. On ne fera pas revivre ceux qui sont morts. Les terroristes nous menacent encore, il y aura d’autres attentats. La seule question est : « Jusqu’où irons-nous ? » Pas en Irak ou en Syrie, mais ici, sur le territoire français. Est-ce qu’au prochain attentat lourd, on créera un extra-état d’urgence ?

  • #Marc_Trévidic : « Défendre le statut des femmes est un enjeu majeur dans la lutte contre l’#islam_radical »

    On ne l’attendait pas sur le terrain de la fiction, lui dont les trois précédents ouvrages nous avaient plongés dans les arcanes tristement réels du terrorisme islamiste… et pourtant, avec « #Ahlam », qui paraît aux éditions Jean-Claude Lattès, Marc Trévidic, juge antiterroriste de 2006 à 2015, aujourd’hui premier vice-président du Tribunal de grande instance de Lille (où il s’occupe des Affaires Familiales), livre un récit aux personnages attachants et à la trame originale. Dans cette histoire, l’art va défier le fanatisme religieux dans une #Tunisie gangrénée par l’islam radical. Au fil des pages, la rencontre d’un artiste peintre français et de deux enfants – Issam et sa sœur Ahlam, prénom arabe qui signifie « rêves » – vibre aussi comme un hommage au combat de toutes les femmes qui se lèvent contre l’obscurantisme. Interview.


    http://www.elle.fr/Societe/Interviews/Marc-Trevidic-Defendre-le-statut-des-femmes-est-un-enjeu-majeur-dans-la-lutte-c
    #femmes #genre #religion #livre

  • Déchéance de nationalité : « On n’exporte pas un terroriste », estime Trévidic
    https://www.crashdebug.fr/actualites-france/11082-decheance-de-nationalite-on-n-exporte-pas-un-terroriste-estime-trev

    TERRORISME Pour l’ancien juge antiterroriste, une telle mesure, « très certainement inapplicable, ne peut pas avoir de caractère dissuasif »...

    L’ancien juge antiterroriste Marc Trevidic, le 2 juillet 2015 au palais de justice de Paris. - AFP / M. BUREAU

    L’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic a jugé que déchoir de leur nationalité française les binationaux condamnés pour terrorisme serait inopérant car « on n’exporte pas un terroriste », dans une interview à La Voix du Nord publiée ce jeudi.

    « On n’exporte pas un terroriste ! Que se passera-t-il si l’Algérie, les Etats-Unis nous adressent des déchus ? Allons-nous les accepter ? (…) En réalité, c’est faire beaucoup de bruit pour rien et risquer, vraiment, de fabriquer des apatrides », a affirmé Marc Trévidic au quotidien régional. Pour lui, une (...)

    #En_vedette #Liberté,_Égalité,_Fraternité... #Actualités_France

  • Déchéance de nationalité - Marc Trevidic : « Sommes-nous prêts à recevoir les terroristes des autres ? » - La Voix du Nord
    http://www.lavoixdunord.fr/region/decheance-de-nationalite-marc-trevidic-sommes-nous-ia0b0n3238306

    « Il y a déjà des questions pratiques. Comment expulser un individu qui a toujours vécu en France ? Une autre nation a-t-elle à gérer quelqu’un né chez nous ? Imaginons qu’un autre pays, par exemple le Maroc, vote un texte similaire. Une personne y aura passé toute sa vie et, d’un seul coup, le Maroc nous l’envoie car également français. On n’exporte pas un terroriste ! Que se passera t’il si l’Algérie, les Etats-Unis nous adressent des déchus ? Allons-nous les accepter ? Le Royaume-Uni est en train de réfléchir à une réforme analogue. Que va-t-il advenir des franco-britanniques dans cette situation ? En réalité, c’est faire beaucoup de bruit pour rien et risquer, vraiment, de fabriquer des apatrides.

  • Déchéance de nationalité : « On n’exporte pas un terroriste », estime Trévidic
    http://www.crashdebug.fr/actualites-france/11082-decheance-de-nationalite-on-n-exporte-pas-un-terroriste-estime-trev

    TERRORISME Pour l’ancien juge antiterroriste, une telle mesure, « très certainement inapplicable, ne peut pas avoir de caractère dissuasif »...

    L’ancien juge antiterroriste Marc Trevidic, le 2 juillet 2015 au palais de justice de Paris. - AFP / M. BUREAU

    L’ancien juge antiterroriste Marc Trévidic a jugé que déchoir de leur nationalité française les binationaux condamnés pour terrorisme serait inopérant car « on n’exporte pas un terroriste », dans une interview à La Voix du Nord publiée ce jeudi.

    « On n’exporte pas un terroriste ! Que se passera-t-il si l’Algérie, les Etats-Unis nous adressent des déchus ? Allons-nous les accepter ? (…) En réalité, c’est faire beaucoup de bruit pour rien et risquer, vraiment, de fabriquer des apatrides », a affirmé Marc Trévidic au quotidien régional. Pour lui, une (...)

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  • Un Etat sans garde-fous, comme le rêve le FN

    http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/12/14/un-etat-sans-garde-fous-comme-le-reve-le-fn_4831275_823448.html

    La grande progression électorale du Front national et son émergence en tant que force d’alternance jette une lumière particulière sur l’utilisation que pourrait faire l’extrême droite d’un Etat qui s’arroge, au nom de la lutte antiterroriste, des pouvoirs discrétionnaires de plus en plus importants. Au printemps, Hervé Morin, ex-ministre de la défense et député (Nouveau Centre) de l’Eure, avait exprimé cette inquiétude. Devant une Assemblée indifférente et convaincue que la future loi sur le renseignement, alors débattue, permettrait de prévenir la menace terroriste, il évoquait ses craintes. « Ce que je ne veux pas, disait-il, c’est qu’en France, un jour, en 2017 ou en 2022, un régime arbitraire utilise ces outils de surveillance sans aucun contrôle. Le pouvoir est toujours associé à un phénomène de cour servile, et je douterai toujours de la capacité d’un directeur d’administration centrale à résister à la pression d’un chef de l’Etat. »

    Rien ne permet, à ce jour, de présumer ce que Marine Le Pen pourrait faire des pouvoirs exorbitants dont ne cesse de se doter la puissance administrative. Mais le risque est réel. Par un mécanisme insidieux mais tout à fait visible, les pouvoirs publics, faute de pouvoir détecter la menace terroriste avant qu’elle ne frappe, répondent à l’émotion de l’opinion en bouleversant, sous nos yeux, les équilibres fondamentaux qui garantissent nos libertés.

    Face à la puissance croissante de l’Etat, l’autorité judiciaire ne cesse de reculer, alors qu’elle est garante d’un droit fondamental d’une démocratie,

    ( ... )

    L’idée centrale des projets du gouvernement est de fournir à l’Etat les moyens et la charge de traquer la menace, se réservant même la tâche de définir le champ infractionnel. Le juge judiciaire ou les organes de contrôle en matière d’interceptions administratives sont perçus comme des dangers en ce qui concerne le secret et la protection des témoins pour les premiers et de frein à l’efficacité pour les seconds. Pour les citoyens, le changement de régime est majeur, car la décision de l’Etat de restreindre les libertés se fonde essentiellement sur la base de renseignements classifiés. Ce qui signifie que ni les personnes visées, ni leurs avocats, ne peuvent en avoir connaissance. Les juges administratifs, habilités au secret, n’ont à leur disposition qu’un résumé fourni par les services eux-mêmes.

    « On se fait hara-kiri »

    Malgré deux lois antiterroristes déjà votées depuis 2012, le gouvernement en prépare une nouvelle. Les policiers vont bénéficier d’une très large panoplie de moyens de surveillance, d’accès aux fichiers et aux interceptions de communications. Mais plus de moyens ne signifie pas plus de contrôle, au contraire. Le parquet de Paris, qui centralise les poursuites antiterroristes, voit ses prérogatives reculer, et cela passe mal. Son suivi des actes policiers dans les enquêtes préliminaires ne se fera plus qu’a posteriori, comme c’est déjà le cas dans les enquêtes de flagrance. « On se fait hara-kiri alors que nous disposons déjà de tous les outils nécessaires, déplore un magistrat, la loi de 1986 a créé la justice antiterroriste, celle de 1995 le délit d’association de malfaiteur en relation avec une entreprise terroriste, et celle de 2001 permet de travailler sur le financement du terrorisme, le reste est accessoire. »

    Pour justifier ses choix, le gouvernement, comme pour la déchéance de nationalité, s’abrite derrière le Conseil d’Etat. Mais s’agit-il d’une question juridique ou philosophique ? Si des Français peuvent être menacés par le terrorisme, la nation, elle, n’est pas en danger. Pérenniser, comme entend le faire le président de la République, dans la Constitution, une forme d’état d’urgence, et donc la très large prééminence de l’Etat sur tous les autres pouvoirs qui structurent notre démocratie, peut mettre la nation en danger, car elle ouvre la voie aux abus de droit.

    La vigilance du Parlement, qui a soutenu très largement tous les renforcements des pouvoirs de l’Etat, à son détriment, a vite montré ses limites lors de l’assignation à résidence de militants écologistes dans le cadre de l’état d’urgence. Quant à l’existence de mécanismes de sortie progressive de ce dispositif exceptionnel, il y a fort à parier, comme l’a prouvé l’usage du plan Vigipirate, qu’à la différence de la Grande-Bretagne, la France se maintiendra, sans discontinuer, à un très haut niveau d’alerte.

    En 2014, la commission des libertés civiles, de la justice et des affaires intérieures du Parlement européen, a, dans un rapport, décrit ce type de dérive. Selon elle, il s’agit surtout d’un « mélange d’activités de répression et de renseignement avec des garanties juridiques floues et affaiblies allant bien souvent à l’encontre des freins et contrepoids démocratiques [qui] se substitue à la loi ». Les Etats arguent, quant à eux, qu’ils défendent la sécurité de leurs citoyens.

    Face à cette évolution, Marc Trévidic, ex-juge antiterroriste, rappelle que « les Constitutions dans les démocraties visent à protéger les citoyens contre les abus de l’Etat ». Début 2016, l’ensemble des textes en préparation seront très probablement adoptés et la Constitution effectivement amendée, actant ainsi l’installation dans la durée d’une société française ultra-préventive où l’Etat disposera d’un pouvoir inédit dont le ou la prochain(e) président(e) pourra user ou abuser à sa guise en toute légalité.

  • Marc Trévidic : « Après les attentats, la seule action qui m’était permise, c’était de parler »
    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/11/29/marc-trevidic-lors-des-attentats-j-avais-besoin-d-action-et-la-seule-qui-m-e

    Et puis je suis libre. Donc quand on m’interroge, je dis ce que je pense. Et je me fous de la politique ou des sondages clamant que 90 % des Français veulent ça et ça, l’état d’urgence et des bracelets à toutes les fiches S. Est-ce qu’ils savent seulement ce que c’est qu’un fiché S ? Quelle autorité le décide ? Et sur quel indice ? Il faut expliquer posément les faits et les enjeux.

  • Marc Trévidic : « Après les attentats, la seule action qui m’était permise, c’était de parler »
    Le Monde | 29.11.2015 | Par Annick Cojean (Propos recueillis par)
    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/11/29/marc-trevidic-lors-des-attentats-j-avais-besoin-d-action-et-la-seule-qui-m-e

    (...) L’antiterrorisme ne fut donc pas un choix ?

    Non. Mais quand on m’a appelé au parquet antiterroriste en 2000, et que l’on m’a confié l’islam radical parce que les autres magistrats n’étaient pas intéressés et préféraient faire du corse ou du basque, eh bien cela m’a passionné. La matière, l’univers, les pays concernés, les aspects géopolitiques, historiques, religieux… Cela ouvrait sur bien d’autres horizons que le droit. J’ai plongé dans le sujet, je me suis documenté, j’ai lu comme un fou.

    Le Coran ?

    Bien sûr le Coran, cela n’a rien d’extraordinaire, j’ai aussi lu la Bible ! Mais je me suis surtout lancé dans toute la littérature radicale pour savoir ce que les gens qu’on avait en face de nous lisaient. Et c’est très riche d’enseignements. Ça permet de voir les méthodes de recrutement, les profils psychologiques, les arguments avancés par ceux qui prônent le djihad international et dans lesquels, d’ailleurs, il y a du vrai. Car il ne faut pas penser que l’Occident est tout blanc et qu’on n’a pas une part de responsabilité dans ce qui s’est passé en Afghanistan, en Bosnie ou en Irak. Cela m’a donc permis aussi de prendre de la hauteur sur le sujet.(...)

  • Marc Trevidic : « On ne traite que la moitié des dossiers des gens qui reviennent de Syrie » - La Voix du Nord - Publié le 17/11/2015 - Chantal DAVID
    http://www.lavoixdunord.fr/france-monde/marc-trevidic-on-ne-traite-que-la-moitie-des-dossiers-ia0b0n3165668

    (...)Le pôle antiterrorisme.« Il y a neuf juges d’instruction, un juge supplémentaire a été nommé en septembre. Il y a neuf procureurs au parquet anti terroriste. Mais depuis deux ans, on assiste à une explosion des affaires. C’est de l’ordre d’un nouveau dossier par semaine à l’instruction. En gros, chaque juge gère quarante dossiers en même temps. En parallèle, il y a quatre cents enquêtes préliminaires ouvertes par le parquet. On a laissé la situation se dégrader. Le manque de moyens frôle l’indigence. Tout comme on manque d’enquêteurs de police judiciaire, il n’y a pas suffisamment de magistrats instructeurs pour anticiper, agir en amont. Pour neutraliser un terroriste, il faut recueillir des preuves, éventuellement remonter une filière de recrutement… Par exemple, on ne traite que la moitié des dossiers des gens qui reviennent de Syrie. »

    On manque d’enquêteurs. « Actuellement, c’est le renseignement qui gagne, pas le judiciaire. La récente loi sur le renseignement indique qu’il y a une tendance très forte à aller vers les enquêtes administratives, hors contrôle judiciaire. Mais établir une fiche S ne permet pas d’arrêter quelqu’un. Du moins jusqu’à présent. On est dans un État de droit. En France, ce sont les magistrats qui décident d’arrêter ou non quelqu’un, de le mettre en garde à vue ou de le placer en détention. J’espère qu’on va gérer les attentats avec des moyens qui restent fidèles à nos principes. Des méthodes extrajudiciaires, arbitraires comme l’ont fait les Américains à Guantánamo pourraient nourrir les sentiments anti-occident et anti-français. »

  • Hollande a conduit une politique aventureuse au Proche-Orient

    Le porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle et son groupe aéronaval quitteront leur base de Toulon mercredi 18 novembre pour la Méditerranée orientale où ils arriveront à la mi-décembre pour participer aux opérations contre Daech (acronyme de l’État islamique en Irak et au Levant, autoproclamé) et ses groupes affiliés. Annoncé il y a une quinzaine de jours par un communiqué de l’Élysée, cet appareillage est sans rapport avec les attentats de vendredi dernier à Paris. Il répond en revanche à la volonté de renforcer à la fois le potentiel de frappe français dans la région et la visibilité de l’implication militaire de Paris, au moment où l’engagement russe sur le terrain bouleverse les rapports de force et les données diplomatiques.

    Les 12 Rafale, les 9 Super-Étendard et l’avion de surveillance Hawkeye, embarqués à bord du Charles-de-Gaulle, s’ajouteront aux 6 Rafale basés aux Émirats arabes unis et aux 6 Mirage 2000 déployés en Jordanie, pour porter à 33 le nombre d’appareils de combat à la disposition de l’Élysée aux frontières de l’Irak et de la Syrie. C’est modeste, comparé à l’énorme armada (près de 500 appareils) déployée par les États-Unis dans la région. Suffisant, pour donner à Paris une voix dans le débat diplomatique et stratégique. Insuffisant pour disposer de l’autorité que revendiquent les dirigeants français.

    Engagée depuis septembre 2014 au sein de la coalition d’une soixantaine de pays réunie par les États-Unis, la France participe – modestement – aux opérations destinées à endiguer l’expansion de l’État islamique. Selon les statistiques de la coalition, la part de l’aviation française dans les frappes lancées depuis un an est d’environ 5 % ; l’armée de l’air américaine, forte de ses bases dans la région et de ses porte-avions, assumant la majorité (67 %) des bombardements contre les installations et les troupes de l’État islamique.

    Dans un premier temps, ainsi que l’avait précisé François Hollande en annonçant qu’il avait décidé de répondre à la demande d’appui aérien du gouvernement de Bagdad, les frappes françaises ont été concentrées sur des cibles irakiennes. « Nous ne pouvons pas intervenir [en Syrie], affirmait le chef de l’État en février 2015, car nous ne voulons pas courir le risque que notre intervention puisse aider Assad ou Daech. » Les Rafale et les Mirage limitent alors leur horizon au ciel irakien. Selon l’état-major français, plus de 450 objectifs de l’EI en Irak auraient été atteints et détruits en un an.

    Mais le 8 septembre dernier, changement de stratégie. Deux Rafale, basés aux Émirats arabes unis, entreprennent un premier « vol de reconnaissance » au-dessus de la Syrie pour identifier des cibles éventuelles. « L’Élysée et la Défense, expliquait alors à Mediapart une source informée, ont décidé de constituer et de tenir à jour une liste d’objectifs qui pourraient être frappés en représailles après un attentat de Daech contre la France, ou qui peuvent être frappés préventivement, pour empêcher des attentats en préparation ou pour désorganiser l’infrastructure politico-militaire de Daech, conformément au principe de légitime défense mentionné dans la charte des Nations unies.

    « L’une des difficultés majeures est que les installations de Daech sont dispersées sur un vaste territoire et souvent au sein de la population civile, ce qui implique une préparation et une exécution minutieuse des frappes. En plus d’être moralement difficiles à défendre, des dégâts collatéraux seraient exploités par l’appareil de propagande de l’État islamique et seraient totalement contre-productifs. »

    Moins de trois semaines plus tard, 6 appareils français dont 5 Rafale frappent un camp d’entraînement de Daech près de Deir Ez-Zor, à l’est de la Syrie. Avant les frappes de représailles déclenchées dans la nuit du 15 au 16 novembre sur Raqqa, moins d’une demi-douzaine d’autres raids avaient été lancés, notamment contre des installations pétrolières exploitées par Daech. Comment s’explique cette volte-face de François Hollande ? Officiellement, pour Paris, les enjeux ont changé sur le terrain : Daech est devenu l’ennemi principal, devant Assad. « C’est Daech qui fait fuir, par les massacres qu’il commet, des milliers de familles », avance François Hollande lors de sa conférence de presse du 7 septembre. « Notre ennemi, c’est Daech, Bachar al-Assad, c’est l’ennemi de son peuple », précise même le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian lors d’une interview à France Inter, le 16 septembre.

    Il est clair que l’État islamique, par sa pratique quotidienne de la terreur dans les zones qu’il contrôle, et par la mise en scène constante, sur les réseaux sociaux, de sa propre violence, incite à la fois les Syriens à fuir en masse et propage, à l’extérieur, l’image d’une barbarie de nature à nourrir un exode. De là à négliger la sauvagerie du régime d’Assad, le largage de barils d’explosifs sur les zones civiles, le recours permanent à la terreur et à la torture, il y a un pas. Que François Hollande et Laurent Fabius, pourtant ardents partisans du « dégagement » de Bachar, ont franchi.

    La pression du ministère de la défense

    Pourquoi, avant même le carnage organisé par Daech à Paris, François Hollande et son ministre des affaires étrangères ont-ils tout à coup changé d’avis ? Parce que depuis un an au moins, l’état-major et le ministère de la défense, qui disposaient de renseignements précis, demandaient, parfois contre l’avis du Quai d’Orsay, l’autorisation de mener des frappes sur la Syrie. Là se trouvent, expliquaient-ils, la tête, le gros de l’infrastructure et les camps d’entraînement de l’EI qui nous menace. Mais aussi parce que trois événements, de nature différente, mais tous liés à la perception que le public, en France, peut avoir de la crise du Proche-Orient, se sont succédé en moins de deux semaines. Et ont convaincu le président français – et ses conseillers en communication – de changer de ligne sur la Syrie.

    Le premier a été l’attentat avorté, grâce à l’intervention de passagers courageux, à bord du train Thalys, le 21 août 2015, dans le nord de la France. Le terroriste, Ayoub el-Khazzani, un citoyen marocain, qui était armé d’une kalachnikov, d’un pistolet automatique et de neuf chargeurs, n’était à première vue pas lié au conflit syrien mais membre de la mouvance islamiste radicale et incarnait la menace du djihadisme international sur la vie quotidienne, la liberté de mouvement, la sécurité des Européens et en particulier des Français. Il a ravivé, dans le public, la conviction que le terrorisme était, aussi, à nos portes.

    Le deuxième événement a été la découverte, le 2 septembre, sur une plage de Bodrum en Turquie, du cadavre du petit Aylan, mort noyé, comme son frère et sa mère, après le naufrage de l’embarcation qui devait leur permettre de rejoindre l’île grecque de Kos. Alors que l’Europe entière était confrontée à l’exode des Syriens fuyant la terreur et à un constat cruel sur les limites de sa compassion et de son hospitalité, la photo du petit cadavre, diffusée en quelques heures dans le monde entier par les réseaux sociaux, est aussi apparue comme une interrogation sur la responsabilité et l’indifférence des Européens face à la tragédie qui broie leurs voisins du Sud.

    Le troisième événement a été la destruction, le 31 août 2015, du temple de Bêl à Palmyre, rasé au bulldozer par les combattants de l’État islamique, suivi quelques jours plus tard par le dynamitage des tours funéraires sur le même site. Revendiqué avec une jubilation tapageuse par les djihadistes, ce crime contre l’héritage culturel mondial inestimable que représentait Palmyre illustrait jusqu’à la caricature l’intolérance fanatique des dirigeants de Daech et leur volonté aveugle de détruire tout ce qui a précédé l’islam tel qu’ils le conçoivent et d’interdire toute autre célébration que celle de leur Dieu.

    Aux yeux des communicants de l’Élysée et du Quai d’Orsay, il y avait là une convergence de facteurs qui ne pouvait être négligée et qui incitait à décider un changement d’attitude face à la Syrie. L’émotion, l’inquiétude et l’indignation permettaient de le « vendre » à l’opinion publique française, faute de le rendre lisible à nos alliés et cohérent aux yeux des observateurs avertis. Est-ce ainsi, en faisant converger l’actualité et la communication, qu’on définit et met en œuvre une politique étrangère ? Beaucoup en doutent parmi les diplomates, en fonction ou mués en experts et consultants par la retraite.

    Invité début octobre à tirer les conclusions d’un colloque intitulé « La France a-t-elle encore une politique au Moyen-Orient ? », l’ancien ministre des affaires étrangères Hubert Védrine a pris la parole en prévenant : « J’espère ne désespérer personne », avant d’admettre qu’il « y a bien une politique étrangère française de facto », mais qu’elle se résume au Proche-Orient à des « morceaux de politique française juxtaposés ». « La France n’a pas de véritable vision », déplorent des personnalités aussi différentes que Bertrand Badie, professeur de relations internationales à Sciences Po, Yves Aubin de La Messuzière, ancien diplomate, excellent connaisseur du monde arabe, ou Marc Trévidic, ancien juge d’instruction au pôle antiterroriste de Paris.

    Pourquoi ? D’abord, peut-être parce que la définition de la politique française, en particulier dans cette partie du monde est partagée, voire parfois disputée, entre l’Élysée et le Quai d’Orsay, avec dans le dossier syro-irakien, une forte présence de la Défense. Ensuite parce que les équations personnelles des principaux responsables, l’influence de leurs principaux conseillers, le poids et l’héritage des différentes administrations n’aident pas à construire une cohérence. Ensuite parce que, comme le relève un diplomate « notre politique actuelle au Proche-Orient est plutôt de réaction que d’action. Elle manque cruellement de réflexion sur la longue durée ».

    Si au Maghreb, la politique de la France, selon Hubert Védrine, consiste à « s’entendre le moins mal possible simultanément avec l’Algérie et le Maroc », au Machrek, elle est peu cohérente, déséquilibrée, au point de faire redouter à certains diplomates de ne plus correspondre aux intérêts fondamentaux, à long terme, de notre pays.

    L’exemple des relations entre la France et l’Arabie saoudite illustre parfaitement ce travers. Sur quoi sont-elles fondées ? Sur l’examen pragmatique des forces et faiblesses de ce pays ? Sur son respect des valeurs auxquelles la France est, en principe, attachée ? Sur son influence positive et stabilisatrice dans la région ? Sur l’évaluation à long terme de nos intérêts respectifs ? On peut en douter.

    En choisissant de faire de cette monarchie absolue wahhabite, qui a déjà exécuté 146 condamnés depuis le début de l’année, notre partenaire privilégié au Moyen-Orient, François Hollande et Laurent Fabius, efficacement aidés par le précieux Jean-Yves Le Drian, ont donné la priorité à leur chère « diplomatie économique », sacrifié quelques principes et dilapidé quelques cartes diplomatiques de valeur.

    L’alliance privilégiée avec le camp sunnite

    Le régime saoudien nous a acheté des hélicoptères de combat, des navires de patrouille, des systèmes de surveillance. Des centrales nucléaires EPR et une vingtaine d’autres projets sont en discussion. L’Arabie saoudite nous a aussi commandé 3 milliards de dollars d’armement destinés à l’armée libanaise et a réglé la facture des deux navires Mistral, vendus à l’Égypte. Les princes saoudiens ont-ils été guidés dans ces choix par leur seule confiance dans la technologie française ? Non.

    Les faveurs faites depuis quelques années à Paris sont surtout pour Riyad une manière de manifester sa mauvaise humeur à Washington et de rétribuer la France pour son zèle. Les princes reprochent à Obama d’avoir renié son engagement en refusant de frapper Damas à l’automne 2013, lorsque le régime syrien a utilisé des gaz chimiques contre son propre peuple, alors que les avions français étaient prêts à décoller pour participer à des représailles internationales. Ils lui reprochent aussi le rôle majeur joué par Washington dans la négociation de l’accord sur le nucléaire iranien, qui a rouvert à Téhéran les portes du concert des nations. Là encore, ils opposent l’attitude de Washington, jugée exagérément complaisante à l’égard des mollahs, à celle de Paris, longtemps réticent à la normalisation des relations avec l’Iran.

    En demeurant silencieux sur le caractère médiéval du régime saoudien, sur le statut quasi esclavagiste de la femme, sur les violations innombrables des droits de l’homme, en oubliant que la doctrine religieuse du royaume, le wahhabisme, a servi de terreau à tous les djihadistes ou que de nombreux princes ou personnalités ont été – ou demeurent ? – de généreux mécènes pour les mouvements islamistes radicaux, à commencer par celui d’Oussama Ben Laden, Paris ne manque pas seulement à ses devoirs moraux – la diplomatie a pris l’habitude de s’en affranchir – mais apparaît, aux yeux de toute la région, comme l’allié privilégié des régimes sunnites. D’autant que ces bonnes dispositions à l’égard du royaume saoudien s’étendent aussi aux monarchies du Golfe, wahhabites également, à commencer par le richissime Qatar, qui a commandé 24 Rafale.

    Témoignage suprême des bonnes dispositions des émirs à son égard, François Hollande a été invité en mai dernier, hommage exceptionnel, à participer à une réunion du Conseil de coopération du Golfe, qui réunit autour de l’Arabie saoudite, le Qatar, le Koweït, Bahreïn, les Émirats arabes unis et Oman. Difficile après cela, pour les diplomates français, de critiquer l’écrasement des revendications démocratiques à Bahreïn ou de reprocher à l’aviation saoudienne, engagée aux côtés du régime dans la guerre civile du Yémen, de bombarder sans scrupule, en plus des populations civiles, les trésors du patrimoine architectural. Difficile aussi de dénoncer le rôle de certaines familles ou institutions wahhabites du Golfe dans le financement des groupes djihadistes…

    Discutable sur le plan diplomatique, ce choix de l’alliance privilégiée avec le camp sunnite est aussi contestable sur le plan stratégique, notamment au regard du rôle que Paris entend jouer dans la lutte contre Daech et la résolution de la crise syrienne. Surtout au moment où l’Iran, de retour sur la scène diplomatique internationale après la conclusion de l’accord sur le nucléaire et sur le point de disposer de nouveau des revenus de ses hydrocarbures, entend retrouver son rang et disputer à Riyad le rôle de première puissance de la région.

    « En s’enfermant dans le rôle de “bad cop”, pendant les négociations sur le nucléaire iranien, la France s’est trompée, estime François Nicoulaud, ancien ambassadeur en Iran. Son choix était d’autant moins judicieux qu’elle a assez peu pesé dans la négociation, écrasée par le rouleau compresseur américain. »

    En Irak, il est clair aujourd’hui qu’aucune solution ne peut être trouvée, pour la stabilisation du régime comme pour la lutte contre Daech, sans la contribution de l’Iran, majeure à ce jour, et de la Russie. Paris semble en avoir pris son parti en poursuivant sa modeste contribution à la coalition militaire internationale. En Syrie, où Moscou et Téhéran participent à la défense du régime de Bachar al-Assad contre son opposition et dans une moindre mesure contre l’État islamique, Paris, après avoir cru à la chute de Bachar puis soutenu, sans grand succès, les composantes non djihadistes de l’opposition qui combattaient le régime, est en train d’évoluer, sous la pression des faits, c’est-à-dire du rapport de force sur le terrain.

    Alors qu’il proclamait, depuis le début de la crise, comme son ministre des affaires étrangères, que « Bachar ne fait pas partie de la solution » à la crise syrienne, François Hollande admettait, début septembre, que le départ du dictateur syrien sera « à un moment ou à un autre posé dans la transition ». L’entrée en scène, sur le plan militaire, de la Russie aux côtés du régime syrien, l’admission à la mi-septembre par le secrétaire d’État américain John Kerry que « le départ [d’Assad] ne doit pas forcément avoir lieu le premier jour du premier mois de la transition », ont dilué, de fait, le poids de la position française dans les discussions sur la recherche d’une sortie de crise. Au point qu’à l’assemblée générale de l’ONU, fin septembre, Ban Ki-moon n’a même pas mentionné la France parmi les pays (États-Unis, Russie, Arabie saoudite, Iran, Turquie) qui pouvaient jouer un rôle dans la résolution du conflit syrien.

    L’offensive terroriste internationale de Daech – attentats meurtriers en Turquie, explosion en vol revendiquée de l’avion russe qui survolait le Sinaï, carnage de la semaine dernière à Paris – semble avoir provoqué un consensus au moins provisoire contre l’EI. Au cours de la conférence internationale qui réunissait samedi dernier à Vienne les représentants de 17 pays – dont la Russie, les États-Unis, la France, l’Iran, la Turquie, les pays arabes –, des divergences persistaient sur le destin de Bachar al-Assad et sur la liste des groupes syriens qui doivent être acceptés comme mouvements d’opposition ou sont rejetés comme terroristes.

    Mais selon Laurent Fabius, l’accord était presque total sur la nécessité de « coordonner la lutte internationale contre le terrorisme » et une feuille de route définissant un calendrier de transition politique en Syrie a été adoptée. « Au cours des discussions, a constaté un diplomate étranger, il était clair que la France, l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie partageaient des positions communes, ou très voisines, sur les groupes rebelles syriens qui doivent participer à la transition. »

    Le tropisme pro-israélien mal maîtrisé de Hollande

    La priorité donnée à la « diplomatie économique », c’est-à-dire aux contrats spectaculaires, est si décisive qu’elle assourdit les jugements, voire les mises en garde des diplomates sur le terrain. La vente des navires Mistral à l’Égypte, payée par l’Arabie saoudite, a ainsi été décidée en tenant compte du poids majeur de Riyad dans l’économie égyptienne – qui permet au Caire d’affirmer à l’étranger sa légitimité – mais en négligeant les faiblesses de l’alliance égypto-saoudienne, pourtant relevées dans une note à diffusion restreinte de l’ambassadeur de France, André Parant, du 9 juillet dernier.

    « Il est […] clair, notait le diplomate, que la volonté affichée des nouvelles autorités saoudiennes de donner en politique étrangère la priorité au rassemblement du camp sunnite pour faire face à l’Iran nourrit certaines inquiétudes au Caire. […] La solidité de cette alliance […] n’exclut pas une forme de rivalité traditionnelle entre ces deux poids lourds du monde arabe ni des divergences parfois significatives sur le fond. »

    Cette politique aventureuse, dictée par les gros contrats, les coups de cœur et les coups de sang plutôt que par les visions stratégiques à long terme, caractérise de larges pans de l’action diplomatique française au Proche-Orient. Ils ne suffisent pas à expliquer les choix de l’Élysée et du Quai d’Orsay dans un autre dossier régional majeur, celui du conflit israélo-palestinien.

    Sans doute la France reste-t-elle fidèle à sa position traditionnelle en faveur de la création d’un État palestinien viable et indépendant, aux côtés de l’État d’Israël. Sans doute, Laurent Fabius a-t-il multiplié récemment, sans grand succès il est vrai, les initiatives, notamment au sein du Conseil de sécurité, pour faire adopter des résolutions condamnant l’occupation et la colonisation israéliennes. Mais l’Élysée, depuis l’arrivée au pouvoir de François Hollande, n’a cessé d’être en retrait sur ce dossier, voire d’adopter des positions pro-israéliennes qui constituent un véritable virage par rapport à la politique française traditionnelle.

    « J’ai découvert ce penchant de Hollande, confie un diplomate, pendant son premier voyage officiel en Israël, en novembre 2013, lorsqu’il est apparu que dans la version originelle de son discours devant la Knesset, il avait oublié de mentionner l’attachement de la France à la création d’un État palestinien. L’oubli a été réparé, mais c’était un signe. »

    Signe confirmé par les témoignages d’amitié prodigués, au-delà du protocole, par le président de la République à son hôte, lors du dîner officiel offert par Benjamin Netanyahou. Après avoir entendu le récital d’une chanteuse israélienne, François Hollande, se tournant, visiblement ému, vers le premier ministre israélien, a déclaré : « Je voudrais avoir la voix de cette chanteuse pour dire tout l’amour que je porte à Israël et à ses dirigeants. »

    Cet amour va parfois jusqu’à rendre le président de la République amnésique. Répondant, le 14 juillet dernier, aux questions des journalistes sur l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, François Hollande a avancé cette explication – selon le texte disponible sur le site de l’Élysée : « Qu’est-ce qu’était ma préoccupation ? Éviter la prolifération nucléaire. Cela veut dire quoi, la prolifération nucléaire ? Cela voulait dire que l’Iran puisse accéder à l’arme nucléaire. Si l’Iran accédait à l’arme nucléaire, l’Arabie saoudite, Israël, d’autres pays voudraient également accéder à l’arme nucléaire. Ce serait un risque pour la planète tout entière. » Comment pouvait-il avoir oublié qu’Israël dispose depuis près de 50 ans – en partie grâce à la France – de l’arme nucléaire, au point de détenir aujourd’hui au moins 80 ogives, qui peuvent équiper des bombes, des missiles air-sol, des missiles balistiques sol-sol ou des missiles mer-sol, embarqués à bord de ses sous-marins ?

    Le tropisme pro-israélien si mal maîtrisé de François Hollande va parfois jusqu’à provoquer des accrochages avec le Quai d’Orsay. Ce fut le cas en juillet 2014, lors du déclenchement de l’opération militaire israélienne contre la bande de Gaza, lorsque le président de la République a affirmé qu’il appartenait à Israël de « prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces », et que « la France était solidaire [d’Israël] face aux tirs de roquettes ». Il fallut 48 heures de bombardements israéliens et de nombreuses victimes palestiniennes pour que François Hollande accepte, sous la pression de Laurent Fabius et de plusieurs dirigeants du PS, d’appeler le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas pour lui dire « son inquiétude sur la situation à Gaza » et déplorer que « les opérations militaires en cours aient déjà fait de nombreuses victimes palestiniennes ».

    Israël-Palestine : « La France pourrait faire beaucoup, elle ne fait pas

    Comment s’explique cette attitude constante de François Hollande ? Le poids, dans son entourage, des admirateurs des « néo-conservateurs » américains, comme son conseiller diplomatique Jacques Audibert, très écouté dans la gestion des négociations sur le nucléaire iranien où il avait dirigé la délégation française pendant 5 ans, n’est pas décisif sur ce point.

    « Pour moi, estime un ancien diplomate, François Hollande est dans une posture de néo-molletisme. Il tient Israël pour un allié naturel et inconditionnel de la France. C’est une des sources de ses conflits avec Fabius, qui relève d’un autre héritage parmi les socialistes. Le résultat, hélas, c’est que la France est très loin de jouer le rôle qui pourrait être le sien dans ce dossier. Lorsque Fabius, manquant de soutien à Paris et d’appuis diplomatiques chez nos partenaires, renonce à présenter à l’ONU sa résolution condamnant la colonisation de la Cisjordanie, parce qu’elle serait confrontée à un veto américain, il manque l’occasion de faire un éclat qui n’aurait pas nui à l’image internationale de la France. »

    Le fantôme de Guy Mollet rôdant au-dessus des contrats de vente d’armes conclus avec des despotes, tandis que le président de la République bombe le torse en jouant au chef de guerre : on pourrait rêver d’une allégorie plus exaltante de la politique extérieure de la France au Moyen-Orient. Il faudra s’en contenter. C’est un ancien collaborateur de François Mitterrand et ministre des affaires étrangères de Lionel Jospin, Hubert Védrine, qui le constate : « L’écart entre l’idée que la France se fait de son rôle, de ses responsabilités et sa capacité d’action réelle est à la fois ridicule et attristant. »

    René Backmann

    http://www.mediapart.fr/journal/international/171115/pourquoi-hollande-conduit-une-politique-aventureuse-au-proche-orient?page_

  • Hollande a conduit une politique aventureuse au Proche-Orient | Mediapart
    http://www.mediapart.fr/journal/international/171115/hollande-conduit-une-politique-aventureuse-au-proche-orient?onglet=full
    article de René Backmann
    « L’écart entre l’idée que la France se fait de son rôle, de ses responsabilités et sa capacité d’action réelle est à la fois ridicule et attristant. »

    Le porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle et son groupe aéronaval quitteront leur base de Toulon mercredi 18 novembre pour la Méditerranée orientale où ils arriveront à la mi-décembre pour participer aux opérations contre #Daech (acronyme de l’État islamique en Irak et au Levant, autoproclamé) et ses groupes affiliés. Annoncé il y a une quinzaine de jours par un communiqué de l’Élysée, cet appareillage est sans rapport avec les #attentats de vendredi dernier à Paris. Il répond en revanche à la volonté de renforcer à la fois le potentiel de frappe français dans la région et la visibilité de l’implication militaire de Paris, au moment où l’engagement russe sur le terrain bouleverse les rapports de force et les données diplomatiques.
    Les 12 Rafale, les 9 Super-Étendard et l’avion de surveillance Hawkeye, embarqués à bord du Charles-de-Gaulle, s’ajouteront aux 6 Rafale basés aux Émirats arabes unis et aux 6 Mirage 2000 déployés en Jordanie, pour porter à 33 le nombre d’appareils de combat à la disposition de l’Élysée aux frontières de l’Irak et de la Syrie. C’est modeste, comparé à l’énorme armada (près de 500 appareils) déployée par les États-Unis dans la région. Suffisant, pour donner à Paris une voix dans le débat diplomatique et stratégique. Insuffisant pour disposer de l’autorité que revendiquent les dirigeants français.

    Engagée depuis septembre 2014 au sein de la coalition d’une soixantaine de pays réunie par les États-Unis, la France participe – modestement – aux opérations destinées à endiguer l’expansion de l’#État_islamique. Selon les statistiques de la coalition, la part de l’aviation française dans les frappes lancées depuis un an est d’environ 5 % ; l’armée de l’air américaine, forte de ses bases dans la région et de ses porte-avions, assumant la majorité (67 %) des bombardements contre les installations et les troupes de l’État islamique.

    Dans un premier temps, ainsi que l’avait précisé François Hollande en annonçant qu’il avait décidé de répondre à la demande d’appui aérien du gouvernement de Bagdad, les frappes françaises ont été concentrées sur des cibles irakiennes. « Nous ne pouvons pas intervenir [en Syrie], affirmait le chef de l’État en février 2015, car nous ne voulons pas courir le risque que notre intervention puisse aider Assad ou Daech. » Les Rafale et les Mirage limitent alors leur horizon au ciel irakien. Selon l’état-major français, plus de 450 objectifs de l’EI en Irak auraient été atteints et détruits en un an.

    Mais le 8 septembre dernier, changement de stratégie. Deux Rafale, basés aux Émirats arabes unis, entreprennent un premier « vol de reconnaissance » au-dessus de la Syrie pour identifier des cibles éventuelles. « L’Élysée et la Défense, expliquait alors à Mediapart une source informée, ont décidé de constituer et de tenir à jour une liste d’objectifs qui pourraient être frappés en représailles après un attentat de Daech contre la France, ou qui peuvent être frappés préventivement, pour empêcher des attentats en préparation ou pour désorganiser l’infrastructure politico-militaire de Daech, conformément au principe de légitime défense mentionné dans la charte des Nations unies.

    « L’une des difficultés majeures est que les installations de Daech sont dispersées sur un vaste territoire et souvent au sein de la population civile, ce qui implique une préparation et une exécution minutieuse des frappes. En plus d’être moralement difficiles à défendre, des dégâts collatéraux seraient exploités par l’appareil de propagande de l’État islamique et seraient totalement contre-productifs. »

    Moins de trois semaines plus tard, 6 appareils français dont 5 Rafale frappent un camp d’entraînement de Daech près de Deir Ez-Zor, à l’est de la Syrie. Avant les frappes de représailles déclenchées dans la nuit du 15 au 16 novembre sur Raqqa, moins d’une demi-douzaine d’autres raids avaient été lancés, notamment contre des installations pétrolières exploitées par Daech. Comment s’explique cette volte-face de François Hollande ? Officiellement, pour Paris, les enjeux ont changé sur le terrain : Daech est devenu l’ennemi principal, devant Assad. « C’est Daech qui fait fuir, par les massacres qu’il commet, des milliers de familles », avance François Hollande lors de sa conférence de presse du 7 septembre. « Notre ennemi, c’est Daech, Bachar al-Assad, c’est l’ennemi de son peuple », précise même le ministre de la défense Jean-Yves Le Drian lors d’une interview à France Inter, le 16 septembre.

    Il est clair que l’État islamique, par sa pratique quotidienne de la terreur dans les zones qu’il contrôle, et par la mise en scène constante, sur les réseaux sociaux, de sa propre violence, incite à la fois les Syriens à fuir en masse et propage, à l’extérieur, l’image d’une barbarie de nature à nourrir un exode. De là à négliger la sauvagerie du régime d’Assad, le largage de barils d’explosifs sur les zones civiles, le recours permanent à la terreur et à la torture, il y a un pas. Que François Hollande et Laurent Fabius, pourtant ardents partisans du « dégagement » de Bachar, ont franchi.

    La pression du ministère de la défense

    Pourquoi, avant même le carnage organisé par Daech à Paris, François Hollande et son ministre des affaires étrangères ont-ils tout à coup changé d’avis ? Parce que depuis un an au moins, l’état-major et le ministère de la défense, qui disposaient de renseignements précis, demandaient, parfois contre l’avis du Quai d’Orsay, l’autorisation de mener des frappes sur la Syrie. Là se trouvent, expliquaient-ils, la tête, le gros de l’infrastructure et les camps d’entraînement de l’EI qui nous menace. Mais aussi parce que trois événements, de nature différente, mais tous liés à la perception que le public, en France, peut avoir de la crise du Proche-Orient, se sont succédé en moins de deux semaines. Et ont convaincu le président français – et ses conseillers en communication – de changer de ligne sur la Syrie.

    Le premier a été l’attentat avorté, grâce à l’intervention de passagers courageux, à bord du train Thalys, le 21 août 2015, dans le nord de la France. Le terroriste, Ayoub el-Khazzani, un citoyen marocain, qui était armé d’une kalachnikov, d’un pistolet automatique et de neuf chargeurs, n’était à première vue pas lié au conflit syrien mais membre de la mouvance islamiste radicale et incarnait la menace du #djihadisme international sur la vie quotidienne, la liberté de mouvement, la sécurité des Européens et en particulier des Français. Il a ravivé, dans le public, la conviction que le terrorisme était, aussi, à nos portes.

    Le deuxième événement a été la découverte, le 2 septembre, sur une plage de Bodrum en Turquie, du cadavre du petit Aylan, mort noyé, comme son frère et sa mère, après le naufrage de l’embarcation qui devait leur permettre de rejoindre l’île grecque de Kos. Alors que l’Europe entière était confrontée à l’exode des Syriens fuyant la terreur et à un constat cruel sur les limites de sa compassion et de son hospitalité, la photo du petit cadavre, diffusée en quelques heures dans le monde entier par les #réseaux_sociaux, est aussi apparue comme une interrogation sur la responsabilité et l’indifférence des Européens face à la tragédie qui broie leurs voisins du Sud.

    Le troisième événement a été la destruction, le 31 août 2015, du temple de Bêl à Palmyre, rasé au bulldozer par les combattants de l’État islamique, suivi quelques jours plus tard par le dynamitage des tours funéraires sur le même site. Revendiqué avec une jubilation tapageuse par les djihadistes, ce crime contre l’héritage culturel mondial inestimable que représentait Palmyre illustrait jusqu’à la caricature l’intolérance fanatique des dirigeants de Daech et leur volonté aveugle de détruire tout ce qui a précédé l’islam tel qu’ils le conçoivent et d’interdire toute autre célébration que celle de leur Dieu.

    Aux yeux des communicants de l’Élysée et du Quai d’Orsay, il y avait là une convergence de facteurs qui ne pouvait être négligée et qui incitait à décider un changement d’attitude face à la Syrie. L’émotion, l’inquiétude et l’indignation permettaient de le « vendre » à l’opinion publique française, faute de le rendre lisible à nos alliés et cohérent aux yeux des observateurs avertis. Est-ce ainsi, en faisant converger l’actualité et la communication, qu’on définit et met en œuvre une politique étrangère ? Beaucoup en doutent parmi les diplomates, en fonction ou mués en experts et consultants par la retraite.

    Invité début octobre à tirer les conclusions d’un colloque intitulé « La France a-t-elle encore une politique au Moyen-Orient ? », l’ancien ministre des affaires étrangères Hubert Védrine a pris la parole en prévenant : « J’espère ne désespérer personne », avant d’admettre qu’il « y a bien une politique étrangère française de facto », mais qu’elle se résume au Proche-Orient à des « morceaux de politique française juxtaposés ». « La France n’a pas de véritable vision », déplorent des personnalités aussi différentes que Bertrand Badie, professeur de relations internationales à Sciences Po, Yves Aubin de La Messuzière, ancien diplomate, excellent connaisseur du monde arabe, ou Marc Trévidic, ancien juge d’instruction au pôle antiterroriste de Paris.

    Pourquoi ? D’abord, peut-être parce que la définition de la politique française, en particulier dans cette partie du monde est partagée, voire parfois disputée, entre l’Élysée et le Quai d’Orsay, avec dans le dossier syro-irakien, une forte présence de la Défense. Ensuite parce que les équations personnelles des principaux responsables, l’influence de leurs principaux conseillers, le poids et l’héritage des différentes administrations n’aident pas à construire une cohérence. Ensuite parce que, comme le relève un diplomate « notre politique actuelle au Proche-Orient est plutôt de réaction que d’action. Elle manque cruellement de réflexion sur la longue durée ».

    Si au Maghreb, la politique de la France, selon Hubert Védrine, consiste à « s’entendre le moins mal possible simultanément avec l’Algérie et le Maroc », au Machrek, elle est peu cohérente, déséquilibrée, au point de faire redouter à certains diplomates de ne plus correspondre aux intérêts fondamentaux, à long terme, de notre pays.

    L’exemple des relations entre la France et l’Arabie saoudite illustre parfaitement ce travers. Sur quoi sont-elles fondées ? Sur l’examen pragmatique des forces et faiblesses de ce pays ? Sur son respect des valeurs auxquelles la France est, en principe, attachée ? Sur son influence positive et stabilisatrice dans la région ? Sur l’évaluation à long terme de nos intérêts respectifs ? On peut en douter.

    En choisissant de faire de cette monarchie absolue wahhabite, qui a déjà exécuté 146 condamnés depuis le début de l’année, notre partenaire privilégié au Moyen-Orient, François Hollande et Laurent Fabius, efficacement aidés par le précieux Jean-Yves Le Drian, ont donné la priorité à leur chère « diplomatie économique », sacrifié quelques principes et dilapidé quelques cartes diplomatiques de valeur.

    L’alliance privilégiée avec le camp sunnite

    Le régime saoudien nous a acheté des hélicoptères de combat, des navires de patrouille, des systèmes de surveillance. Des centrales nucléaires EPR et une vingtaine d’autres projets sont en discussion. L’Arabie saoudite nous a aussi commandé 3 milliards de dollars d’armement destinés à l’armée libanaise et a réglé la facture des deux navires Mistral, vendus à l’Égypte. Les princes saoudiens ont-ils été guidés dans ces choix par leur seule confiance dans la technologie française ? Non.

    Les faveurs faites depuis quelques années à Paris sont surtout pour Riyad une manière de manifester sa mauvaise humeur à Washington et de rétribuer la France pour son zèle. Les princes reprochent à Obama d’avoir renié son engagement en refusant de frapper Damas à l’automne 2013, lorsque le régime syrien a utilisé des gaz chimiques contre son propre peuple, alors que les avions français étaient prêts à décoller pour participer à des représailles internationales. Ils lui reprochent aussi le rôle majeur joué par Washington dans la négociation de l’accord sur le nucléaire iranien, qui a rouvert à Téhéran les portes du concert des nations. Là encore, ils opposent l’attitude de Washington, jugée exagérément complaisante à l’égard des mollahs, à celle de Paris, longtemps réticent à la normalisation des relations avec l’Iran.

    En demeurant silencieux sur le caractère médiéval du régime saoudien, sur le statut quasi esclavagiste de la femme, sur les violations innombrables des droits de l’homme, en oubliant que la doctrine religieuse du royaume, le wahhabisme, a servi de terreau à tous les djihadistes ou que de nombreux princes ou personnalités ont été – ou demeurent ? – de généreux mécènes pour les mouvements islamistes radicaux, à commencer par celui d’Oussama Ben Laden, Paris ne manque pas seulement à ses devoirs moraux – la diplomatie a pris l’habitude de s’en affranchir – mais apparaît, aux yeux de toute la région, comme l’allié privilégié des régimes sunnites. D’autant que ces bonnes dispositions à l’égard du royaume saoudien s’étendent aussi aux monarchies du Golfe, wahhabites également, à commencer par le richissime Qatar, qui a commandé 24 Rafale.

    Témoignage suprême des bonnes dispositions des émirs à son égard, François Hollande a été invité en mai dernier, hommage exceptionnel, à participer à une réunion du Conseil de coopération du Golfe, qui réunit autour de l’Arabie saoudite, le Qatar, le Koweït, Bahreïn, les Émirats arabes unis et Oman. Difficile après cela, pour les diplomates français, de critiquer l’écrasement des revendications démocratiques à Bahreïn ou de reprocher à l’aviation saoudienne, engagée aux côtés du régime dans la guerre civile du Yémen, de bombarder sans scrupule, en plus des populations civiles, les trésors du patrimoine architectural. Difficile aussi de dénoncer le rôle de certaines familles ou institutions wahhabites du Golfe dans le financement des groupes djihadistes…

    Discutable sur le plan diplomatique, ce choix de l’alliance privilégiée avec le camp sunnite est aussi contestable sur le plan stratégique, notamment au regard du rôle que Paris entend jouer dans la lutte contre Daech et la résolution de la crise syrienne. Surtout au moment où l’Iran, de retour sur la scène diplomatique internationale après la conclusion de l’accord sur le nucléaire et sur le point de disposer de nouveau des revenus de ses hydrocarbures, entend retrouver son rang et disputer à Riyad le rôle de première puissance de la région.

    « En s’enfermant dans le rôle de “bad cop”, pendant les négociations sur le nucléaire iranien, la France s’est trompée, estime François Nicoulaud, ancien ambassadeur en Iran. Son choix était d’autant moins judicieux qu’elle a assez peu pesé dans la négociation, écrasée par le rouleau compresseur américain. »

    En Irak, il est clair aujourd’hui qu’aucune solution ne peut être trouvée, pour la stabilisation du régime comme pour la lutte contre Daech, sans la contribution de l’Iran, majeure à ce jour, et de la Russie. Paris semble en avoir pris son parti en poursuivant sa modeste contribution à la coalition militaire internationale. En Syrie, où Moscou et Téhéran participent à la défense du régime de Bachar al-Assad contre son opposition et dans une moindre mesure contre l’État islamique, Paris, après avoir cru à la chute de Bachar puis soutenu, sans grand succès, les composantes non djihadistes de l’opposition qui combattaient le régime, est en train d’évoluer, sous la pression des faits, c’est-à-dire du rapport de force sur le terrain.

    Alors qu’il proclamait, depuis le début de la crise, comme son ministre des affaires étrangères, que « Bachar ne fait pas partie de la solution » à la crise syrienne, François Hollande admettait, début septembre, que le départ du dictateur syrien sera « à un moment ou à un autre posé dans la transition ». L’entrée en scène, sur le plan militaire, de la Russie aux côtés du régime syrien, l’admission à la mi-septembre par le secrétaire d’État américain John Kerry que « le départ [d’Assad] ne doit pas forcément avoir lieu le premier jour du premier mois de la transition », ont dilué, de fait, le poids de la position française dans les discussions sur la recherche d’une sortie de crise. Au point qu’à l’assemblée générale de l’ONU, fin septembre, Ban Ki-moon n’a même pas mentionné la France parmi les pays (États-Unis, Russie, Arabie saoudite, Iran, Turquie) qui pouvaient jouer un rôle dans la résolution du conflit syrien.

    L’offensive terroriste internationale de Daech – attentats meurtriers en Turquie, explosion en vol revendiquée de l’avion russe qui survolait le Sinaï, carnage de la semaine dernière à Paris – semble avoir provoqué un consensus au moins provisoire contre l’EI. Au cours de la conférence internationale qui réunissait samedi dernier à Vienne les représentants de 17 pays – dont la Russie, les États-Unis, la France, l’Iran, la Turquie, les pays arabes –, des divergences persistaient sur le destin de Bachar al-Assad et sur la liste des groupes syriens qui doivent être acceptés comme mouvements d’opposition ou sont rejetés comme terroristes.

    Mais selon Laurent Fabius, l’accord était presque total sur la nécessité de « coordonner la lutte internationale contre le terrorisme » et une feuille de route définissant un calendrier de transition politique en Syrie a été adoptée. « Au cours des discussions, a constaté un diplomate étranger, il était clair que la France, l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie partageaient des positions communes, ou très voisines, sur les groupes rebelles syriens qui doivent participer à la transition. »

    Le tropisme pro-israélien mal maîtrisé de Hollande

    La priorité donnée à la « diplomatie économique », c’est-à-dire aux contrats spectaculaires, est si décisive qu’elle assourdit les jugements, voire les mises en garde des diplomates sur le terrain. La vente des navires Mistral à l’Égypte, payée par l’Arabie saoudite, a ainsi été décidée en tenant compte du poids majeur de Riyad dans l’économie égyptienne – qui permet au Caire d’affirmer à l’étranger sa légitimité – mais en négligeant les faiblesses de l’alliance égypto-saoudienne, pourtant relevées dans une note à diffusion restreinte de l’ambassadeur de France, André Parant, du 9 juillet dernier.

    « Il est […] clair, notait le diplomate, que la volonté affichée des nouvelles autorités saoudiennes de donner en politique étrangère la priorité au rassemblement du camp sunnite pour faire face à l’Iran nourrit certaines inquiétudes au Caire. […] La solidité de cette alliance […] n’exclut pas une forme de rivalité traditionnelle entre ces deux poids lourds du monde arabe ni des divergences parfois significatives sur le fond. »

    Cette politique aventureuse, dictée par les gros contrats, les coups de cœur et les coups de sang plutôt que par les visions stratégiques à long terme, caractérise de larges pans de l’action diplomatique française au Proche-Orient. Ils ne suffisent pas à expliquer les choix de l’Élysée et du Quai d’Orsay dans un autre dossier régional majeur, celui du conflit israélo-palestinien.

    Sans doute la France reste-t-elle fidèle à sa position traditionnelle en faveur de la création d’un État palestinien viable et indépendant, aux côtés de l’État d’Israël. Sans doute, Laurent Fabius a-t-il multiplié récemment, sans grand succès il est vrai, les initiatives, notamment au sein du Conseil de sécurité, pour faire adopter des résolutions condamnant l’occupation et la colonisation israéliennes. Mais l’Élysée, depuis l’arrivée au pouvoir de François Hollande, n’a cessé d’être en retrait sur ce dossier, voire d’adopter des positions pro-israéliennes qui constituent un véritable virage par rapport à la politique française traditionnelle.

    « J’ai découvert ce penchant de Hollande, confie un diplomate, pendant son premier voyage officiel en Israël, en novembre 2013, lorsqu’il est apparu que dans la version originelle de son discours devant la Knesset, il avait oublié de mentionner l’attachement de la France à la création d’un État palestinien. L’oubli a été réparé, mais c’était un signe. »

    Signe confirmé par les témoignages d’amitié prodigués, au-delà du protocole, par le président de la République à son hôte, lors du dîner officiel offert par Benjamin Netanyahou. Après avoir entendu le récital d’une chanteuse israélienne, François Hollande, se tournant, visiblement ému, vers le premier ministre israélien, a déclaré : « Je voudrais avoir la voix de cette chanteuse pour dire tout l’amour que je porte à Israël et à ses dirigeants. »

    Cet amour va parfois jusqu’à rendre le président de la République amnésique. Répondant, le 14 juillet dernier, aux questions des journalistes sur l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien, François Hollande a avancé cette explication – selon le texte disponible sur le site de l’Élysée : « Qu’est-ce qu’était ma préoccupation ? Éviter la prolifération nucléaire. Cela veut dire quoi, la prolifération nucléaire ? Cela voulait dire que l’Iran puisse accéder à l’arme nucléaire. Si l’Iran accédait à l’arme nucléaire, l’Arabie saoudite, Israël, d’autres pays voudraient également accéder à l’arme nucléaire. Ce serait un risque pour la planète tout entière. » Comment pouvait-il avoir oublié qu’Israël dispose depuis près de 50 ans – en partie grâce à la France – de l’arme nucléaire, au point de détenir aujourd’hui au moins 80 ogives, qui peuvent équiper des bombes, des missiles air-sol, des missiles balistiques sol-sol ou des missiles mer-sol, embarqués à bord de ses sous-marins ?

    Le tropisme pro-israélien si mal maîtrisé de François Hollande va parfois jusqu’à provoquer des accrochages avec le Quai d’Orsay. Ce fut le cas en juillet 2014, lors du déclenchement de l’opération militaire israélienne contre la bande de Gaza, lorsque le président de la République a affirmé qu’il appartenait à Israël de « prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces », et que « la France était solidaire [d’Israël] face aux tirs de roquettes ». Il fallut 48 heures de bombardements israéliens et de nombreuses victimes palestiniennes pour que François Hollande accepte, sous la pression de Laurent Fabius et de plusieurs dirigeants du PS, d’appeler le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas pour lui dire « son inquiétude sur la situation à Gaza » et déplorer que « les opérations militaires en cours aient déjà fait de nombreuses victimes palestiniennes ».
    Comment s’explique cette attitude constante de François Hollande ? Le poids, dans son entourage, des admirateurs des « néo-conservateurs » américains, comme son conseiller diplomatique Jacques Audibert, très écouté dans la gestion des négociations sur le nucléaire iranien où il avait dirigé la délégation française pendant 5 ans, n’est pas décisif sur ce point.

    « Pour moi, estime un ancien diplomate, François Hollande est dans une posture de néo-molletisme. Il tient Israël pour un allié naturel et inconditionnel de la France. C’est une des sources de ses conflits avec Fabius, qui relève d’un autre héritage parmi les socialistes. Le résultat, hélas, c’est que la France est très loin de jouer le rôle qui pourrait être le sien dans ce dossier. Lorsque Fabius, manquant de soutien à Paris et d’appuis diplomatiques chez nos partenaires, renonce à présenter à l’ONU sa résolution condamnant la colonisation de la Cisjordanie, parce qu’elle serait confrontée à un veto américain, il manque l’occasion de faire un éclat qui n’aurait pas nui à l’image internationale de la France. »

    Le fantôme de Guy Mollet rôdant au-dessus des contrats de vente d’armes conclus avec des despotes, tandis que le président de la République bombe le torse en jouant au chef de #guerre : on pourrait rêver d’une allégorie plus exaltante de la politique extérieure de la France au Moyen-Orient. Il faudra s’en contenter. C’est un ancien collaborateur de François Mitterrand et ministre des affaires étrangères de Lionel Jospin, Hubert Védrine, qui le constate : « L’écart entre l’idée que la France se fait de son rôle, de ses responsabilités et sa capacité d’action réelle est à la fois ridicule et attristant. »

  • Attentats à Paris : Marc Trevidic dit ses 4 vérités - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=Oz0WKTmmTxs

    C’est la technique depuis Ben Laden, c’est l’idée qu’on va taper sur la communauté musulmane, les Musulmans vont dire : "Voyez, ils nous en veulent, l’Occident nous en veut, donc ils vont se radicaliser encore plus facilement, c’est l’effet boule de neige. Et ça, ç’a été vraiment écrit comme stratégie par Al Qaeda dans le temps, il y a bien longtemps : il faut que les populations musulmanes se soulèvent, et pour ça ils faut qu’on leur tape dessus, il faut que nous [les société occidentales] on leur tape dessus, pour qu’après, elles se soulèvent.

    #paris #attentats

  • Want to know what ISIS is up to ? Instead of speculating, just take it from their official magazine - it is right there, explicit. The strategy is called “The extinction of the gray zone” - it is about polarizing western society by eliciting islamophobia: “Muslims in the crusader countries will find themselves driven to abandon their homes for a place to live in the Khilāfah, as the crusaders increase persecution against Muslims living in Western land. [..] Eventually, the gray zone will become extinct and there will be no place for grayish calls and movements. There will only be the camp of īmān versus the camp of kufr”. So, if you want to counter ISIS influence in our society, you know what to do: love each other... Turning to epidermic identity politics won’t help a bit. Even ISIS remarks that our “response is often violently reactionary instead of forward-thinking” - and that is just the way they want it.

    http://media.clarionproject.org/files/islamic-state/islamic-state-dabiq-magazine-issue-7-from-hypocrisy-to-apostas

  • Attentat de Karachi : le témoignage qui révèle les mensonges de la DST
    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2015/11/13/attentat-de-karachi-le-temoignage-qui-revele-les-dissimulations-de-la-dst_48

    Dans le dossier d’instruction de l’#attentat_de_Karachi, qui a fait quinze morts dont onze employés français de la Direction des constructions navales (DCN) le 8 mai 2002 au Pakistan, il apparaît sous son seul alias : « Verger ». Verger est un ancien agent de la Direction de surveillance du territoire (#DST), l’ancêtre de la DGSI. Il n’avait encore jamais été entendu par la justice. C’est désormais chose faite. A la faveur d’un tour de passe-passe inédit, les magistrats instructeurs sont parvenus à contourner le secret-défense qui leur est opposé depuis le début de cette enquête.

    Le témoignage de Verger, que Le Monde a pu consulter, a été déclassifié par le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, le 23 octobre. Il vient confirmer des informations longtemps tues par les responsables des services de renseignement : la DST, chargée en 2002 de l’enquête sur l’attentat, avait bel et bien travaillé dès les années 1990 sur un certain Ali Ben Moussalem, aujourd’hui considéré comme un personnage clé de l’affaire.

    Depuis 2009, le juge Marc Trévidic – chargé de l’enquête jusqu’à son départ du pôle antiterroriste en août 2015 – cherche à savoir si la DST a enquêté sur cet homme et le lui a caché. En d’autres termes si le #mobile_politico-financier a été volontairement étouffé au profit de la piste islamiste. Les anciens responsables des services qu’il a auditionnés sur ce sujet se sont systématiquement retranchés derrière le secret-défense. Et ses innombrables requêtes en déclassification concernant Ali Ben Moussalem se sont jusqu’ici heurtées à la même réponse : la DGSI, qui a succédé à la DST, ne retrouve aucune trace de ce travail dans ses armoires.
    Ce cheikh saoudien était à la tête d’un réseau d’intermédiaires – dont faisait partie Ziad Takieddine – imposé par le gouvernement Balladur dans plusieurs marchés d’#armement en 1994 : la vente des sous-marins français Agosta au Pakistan et des frégates Sawari II à l’Arabie saoudite. Il est le pivot de la thèse selon laquelle l’attentat serait une mesure de rétorsion après l’interruption des commissions prévues par ces contrats.

  • Marc Trévidic, un ex juge anti-terroriste s’alarme du #PJLrenseignement
    https://reflets.info/marc-trevidic-un-ex-juge-anti-terroriste-salarme-du-pjlrenseignement

    Et oui, c’est étonnant, mais c’est Yves Calvi sur RTL, hier, le 07 avril 2015, qui interview Marc Trévidic, un juge qui ne mâche pas ses mots sur les dangers du projet de loi sur le renseignement — que le gouvernement socialiste veut faire voter. Le juge s’inquiète de l’aspect éminemment politique de la lutte […]