person:maria mies

  • Capitalocène, racisme environnemental et écoféminisme – Agitations
    https://agitationautonome.com/2019/04/07/capitalocene-racisme-environnemental-et-ecofeminisme

    « En dehors du fait que les méthodes d’exploitation ne correspondent pas au niveau de développement social, mais aux conditions accidentelles et fort inégales dans lesquelles les producteurs sont individuellement placés, nous assistons dans ces deux formes [petite et grande culture] à une exploitation gaspilleuse des ressources du sol au lieu d’une culture consciencieuse et rationnelle de la terre, propriété commune et éternelle, condition inaliénable de l’existence et de la reproduction de générations humaines qui se relaient ».
    Karl Marx, Le Capital, Volume II

    « Quand il pleut, quand il y a de faux nuages sur Paris, n’oubliez jamais que c’est la faute du gouvernement. La production industrielle aliénée fait la pluie. La révolution fait le beau temps ».
    Guy Debord, La Planète Malade

    Introduction

    Indéniablement, le désastre est en cours. Les îles Marshall sont progressivement inondées, certaines ont déjà disparu. Les réfugiés climatiques se multiplient, et sont des milliers à demander l’asile climatique : ils seront plusieurs centaines de millions d’ici 30 ans (à noter qu’à ce jour, le statut de « réfugié climatique » n’est pas reconnu juridiquement par les institutions supranationales). Les catastrophes naturelles s’intensifient, l’augmentation de la salinité des eaux menace nombre de terres agricoles, les feux de forêts paraissent dans certaines régions inarrêtables. Des métropoles et mégalopoles phares du capitalisme mondialisé sont menacées d’être invivables d’ici quelques décennies, notamment Miami, New-York, Rotterdam, Tokyo, Singapour ou encore Amsterdam.

    Il serait fastidieux de recenser tous les dégâts du réchauffement climatique, et là n’est pas notre sujet. Nombre de travaux ont déjà été réalisés1 sur ce qui apparaît aujourd’hui comme une menace monstrueuse et imminente : l’effondrement de toute civilisation humaine. Les théories catastrophistes ont désormais le vent en poupe, tout comme les thèses, articles et ouvrages de collapsologie. Le survivalisme devient progressivement un thème sociétal en vogue, surfant au gré des pseudo-solutions individualistes et techno-utopistes prônées par les tenants du capitalisme vert ou par les lobbys assurantiels du risque climatique. Le changement climatique est un marché lucratif.

    Depuis des décennies, l’ampleur du danger est étudiée par des institutions et chercheurs, pour la plupart occidentaux et régulièrement subventionnés par de grands groupes capitalistes. Les plus grandes fortunes mondiales se transforment en philanthropes sauveurs de l’humanité. En 2016, Bill Gates, à travers sa fondation et le fonds Breakthrough Energy Ventures, levait un milliard de dollars afin de développer des technologies de géo-ingénierie illuminées nécessitant l’exploitation de millions de prolétaires pour des résultats plus qu’incertains. Mark Zuckerberg (Facebook), Jeff Bezos (Amazon) ou Richard Branson (Virgin) furent parmi les principaux donateurs. D’autres multi-milliardaires explorent en hélicoptère les savanes africaines et indonésiennes afin de redorer leur image en comptant le nombre d’éléphants disparus chaque année : une façon comme une autre de faire campagne sans nécessité de serrer des mains.

    Les capitalistes profitent de la déqualification du prolétariat à l’ère du Toyotisme2 pour s’arroger toutes les compétences techniques et toutes les solutions au changement climatique : les travailleurs, aliénés, sont dépossédés de toute capacité d’intervention sur la production, entrainant la promotion d’une attitude individualiste et morale sur la crise en cours. Ainsi, les capitalistes font de la crise environnementale un problème « civilisationnel », un « enjeu nouveau pour nos démocraties », se pressent pour parler de « consensus » quant au danger qui nous guette. L’idéologie citoyenniste du « tous-ensemble » ou celle pseudo-radicale de l’éco-populisme sont incapables de mettre fin aux ambitions d’exploitation des ressources naturelles propres au système actuel, précisément parce que ce dernier ne peut fonctionner qu’en accumulant toujours plus de richesses. Ces idéologies s’indignent de l’inaction de l’État, incapable de remettre l’humanité sur de bons rails. Dès lors, l’ État est le nouvel interlocuteur privilégié des acteurs des Marches pour le Climat, marches très majoritairement métropolitaines, blanches et bourgeoises. De son côté, l’économie apparaît pour ces marcheurs, dans un système mondialisé, comme lointaine, sinon secondaire : elle est un « interlocuteur » absent.

    L’indignation citoyenniste est d’un moralisme exacerbé, si bien qu’on entend parler à longueur de temps d’alternatives institutionnelles. C’est l’homme qui est visé dans son individualité, abstraitement, et ce principalement à travers son mode de consommation. La production marchande passe à la trappe au profit du « consom’acteur », le genre humain est aussi bien le fauteur de trouble que le bouc-émissaire, l’universalisme bourgeois hors-sol des Lumières reprend ses droits. Une vision fictionnelle du système-monde l’emporte à l’heure où les sols sont presque partout déjà morts.

    Contre cette lecture caricaturale de la crise en cours, nous effectuerons dans un premier temps une critique radicale du concept d’Anthropocène, en tant qu’il serait cause du réchauffement climatique, et nous lui préférerons le concept de Capitalocène. Dans un second temps, nous verrons comment le système capitaliste produit différentes formes de racisme environnemental. Enfin, nous verrons ce qu’une lecture écoféministe de la crise telle que celle de Maria Mies nous enseigne à propos des liens entre effondrement environnemental et domination masculine, le tout afin de comprendre comment les luttes actuelles (aux prises avec les contradictions du capital, de genre et avec la segmentation raciale du travail comme de l’espace) sont imbriquées et tendent à ralentir la crise.

    #capitalocène #écoféminisme

  • Radio : Émilie Hache, Reclaim écoféminisme ! 2016
    https://sniadecki.wordpress.com/2019/03/04/rmu-ecofeminisme

    Interview réalisée par Jade Lindgaart, journaliste à Médiapart, de Emilie Hache qui a sélectionné et présenté le recueil de textes écoféministes intitulé Reclaim, publié aux édition Cambourakis en 2016. Suivie d’une brève présentation d’autres textes et ouvrages écoféministes.

    https://archive.org/download/RMU051ReclaimEcofeminisme/RMU_051_ReclaimEcofeminisme.mp3

    #radio #audio #Médiapart #Radio_Zinzine #Racine_de_moins_un #écoféminisme #Émilie_Hache

  • Reproduction de la force de travail dans l’économie globale : la révolution féministe inachevée

    http://www.contretemps.eu/lectures/reproduction-force-travail-dans-%C3%A9conomie-globale%E2%80%89-r%C3%A9vo

    « Point zéro : propagation de la révolution » par Silvia Federici

    Salaire ménager, reproduction sociale, combat féministe
    éditions iXe, 2016

    « Ce qui suit est à la fois une lecture politique de la restructuration de la (re)production de la force de travail dans l’économie mondiale, et une critique féministe de Marx, développée sous différentes formes depuis les années 1970. Cette critique a été élaborée par des activistes de la campagne Wages For Housework, en particulier par Mariarosa Dalla Costa, Selma James, Leopoldina Fortunati, puis, plus tard, par Ariel Salleh, en Australie, et par les féministes de l’école de Bielefeld, dont Maria Mies, Claudia Von Werlhof et Veronica Bennholdt-Thomsen. L’argument qui lui a donné corps dit en substance que l’analyse du capitalisme telle que l’a développée Marx pâtit de son incapacité à imaginer, à côté de la production de marchandises, d’autres formes de travail productrices de valeur, et subséquemment de son impuissance à voir que le travail reproductif non rémunéré des femmes occupe une place importante dans le processus d’accumulation capitaliste. Cette tache aveugle l’empêche de saisir pleinement l’ampleur de l’exploitation capitaliste de la main-d’œuvre et la fonction du salaire dans la création de divisions au sein de la classe ouvrière, à commencer par les relations entre hommes et femmes. Si Marx avait vu que le capitalisme doit pouvoir compter sur une somme faramineuse de travail domestique accompli « à titre gracieux » pour la reproduction de la main-d’œuvre, et, parallèlement, sur la dévalorisation de ces activités reproductives pour diminuer le coût de la force de travail, il aurait peut-être été moins tenté de penser que le développement capitaliste est inévitable et progressif. Quant à nous, cent cinquante ans après la publication du Capital nous avons au moins trois bonnes raisons de remettre en cause ce postulat du caractère inexorable et progressif du capitalisme ».

    • « Le travail des femmes et leur force de travail sont enfouis au plus profond des structures sociales et économiques du capitalisme ». (David Staples, No place like home)

      « Le capitalisme a sans aucun doute entraîné la surexploitation des femmes. Ce serait tout simplement affligeant s’il s’était ainsi contenté d’accroître la misère et l’oppression mais, par chance, il a aussi nourri des résistances. Et le capitalisme a compris que s’il s’obstinait à les ignorer ou cherchait à les briser, ces résistances risquaient de se radicaliser toujours plus, jusqu’à finir par former un mouvement pour l’indépendance, voire le noyau d’un nouvel ordre social ». (Robert Biel, The new imperialism)

      « Un nouveau facteur de libération apparaît dans le tiers monde : la force productive non rémunérée des femmes qui ne sont pas encore déconnectées de la vie économique par leur travail. Elles sont au service de la vie, pas de la production de marchandises. Elles sont le socle invisibilisé de l’économie mondiale : on estime à 16 000 milliards de dollars l’équivalent en salaire de ce travail au service de la vie ». (John McMurtry, The cancer state of capitalism)

      « D’avoir trop pilonné, le pilon s’est cassé net. Demain je rentre à la maison. Jusqu’à demain, jusqu’à demain… J’ai pilonné tant et tant que demain je rentre à la maison ». (Chanson de femmes haoussa (Nigeria))