Il est aujourd’hui difficile de considérer la gauche européenne autrement que comme un amas de débris. C’est vrai dans toute l’Europe (emblématique le cas de l’Allemagne, où un écroulement sans précédents du SPD -qui selon les derniers sondages ne recueille-rait que 16% des voix- s’accompagne d’une Linke incapable de bénéficier de cette situa-tion, en restant autour des 10%, tandis que l’AfD serait carrément devenu le second par-ti). Mais c’est surtout dans notre pays que la destruction de la gauche a atteint des ni-veaux tout simplement inimaginables il y a quelques années seulement- sans parler du temps où l’Italie se trouvait en présence du plus grand parti communiste d’Occident.
Nombreux sont ceux qui se sont interrogés sur la genèse de cette situation, qui évidem-ment a plus d’une cause. Et pas, cependant, celle si chère à une vulgate désormais en vogue depuis des décennies : selon laquelle les problèmes de la gauche italienne naî-traient d’une présumée “incapacité à se réformer”, c’est-à-dire -concrètement- du refus de s’approprier de mots d’ordre modérés et d’adopter des politiques de simple gestion de l’existant, en abandonnant toute velléité de transformation sociale.
Cette théorie s’avère de façon flagrante démentie par les faits : jamais la gauche ita-lienne, dans ses composantes numériquement les plus significatives, n’a été plus “com-patible” et complaisante à l’ordre constitué -et jamais elle n’a été plus proche d’une dé-bâcle électorale de portée historique. On serait tenté d’être plus drastique, et de dire que jamais la gauche n’a été plus distante de la réalité de ce qui arrive aujourd’hui. Cepen-dant c’est une distance qui ne naît pas d’une rigueur obstinée envers sa propre tradition et sa propre culture, mais justement de l’attitude opposée : de l’abandon total et incondi-tionnel aux mots d’ordre de l’adversaire (on aurait autrefois ajouté “de classe”), de l’assimilation de l’idéologie de celui-ci, et -en conséquence- de la poursuite de ses inté-rêts, au lieu des intérêts de ses propres classes de référence.
Voilà à quoi nous avons affaire quand nous écoutons des “experts” ou politiciens “de gauche” affirmer que les problèmes de compétitivité des entreprises italiennes peuvent se résoudre en démantelant les tutelles prévues par l’article 18 du Statut des travailleurs [1] ; quand nous les entendons se vanter de ce qu’ils sont arrivés à privatiser et se promettre de faire encore plus et mieux à ce sujet, ou quand nous les voyons voter au Parlement le recul de l’âge de la retraite ou le renversement de l’article 81 de la Constitution [2] sur pro-position du “gouvernement des techniciens” (un gouvernement -il faut le rappeler- qui, né pour réduire la dette publique, s’est révélé tellement compétent qu’il nous laisse 13% de dette en plus).
Mais qu’y a-t-il de commun entre ces très concrets (et très erronés) choix politiques ? Le fait qu’ils ont été prescrits par les autorités européennes comme cures pour résoudre les problèmes de notre pays. Avec le résultat évident de les aggraver, et en particulier de dé-truire une capacité productive, de doubler le nombre de chômeurs et d’appauvrir ceux qui ont encore un travail. Mais il ne suffit pas de renvoyer à Schäuble et à la Troika, ni au succédané de cette dernière en Italie, Mario Monti, pour comprendre l’origine de ces choix politiques. Ils sont en effet parfaitement cohérents avec les Traités européens -de marque totalement libérale au moins depuis l’Acte Unique Européen de 1986-, et plus encore avec l’appartenance de notre pays à une monnaie unique : monnaie dans la-quelle, grâce à l’élimination d’un mécanisme automatique de ré-équilibrage entre les dif-férentiels de compétitivité comme celui représenté par les réajustements du change, est devenue parcours obligé la voie de la déflation salariale (dans un suivisme impossible du pays hégémonique de la zone, qui depuis des décennies a pris comme drapeau un mer-cantilisme monétaire fondé sur la “modération” salariale).
Maintenant, quand on essaie d’observer tout cela, on se trouve à gauche devant un mur. Et pas seulement avec la dite “gauche modérée” (définition en vérité désormais périlleu-sement proche de celle de “feu mouillé”), mais aussi avec de nombreux représentants de la dite “gauche radicale”. Lesquels, bien que partageant en paroles la critique envers les politiques de ces dernières années, s’arrêtent juste avant d’affronter le problème à la ra-cine : c’est-à-dire la mise en question de la monnaie unique européenne et l’Union eu-ropéenne. Nombre d’entre eux aussi, en effet, au lieu de prendre acte que l’Union euro-péenne est irréformable (et elle l’est littéralement, étant donné que les Traités ne peuvent être changés qu’à l’unanimité), et que la monnaie unique est de toute évidence pour le moins une partie significative des problèmes auxquels nous faisons face, préfèrent s’échapper d’une part dans le rêve radieux d’une “autre Europe” (sans jamais arriver à en définir ni les contours ni une voie concrètement praticable pour y arriver), d’autre part dans une métaphysique obscure. Métaphysique de l’impossibilité (“sortir [de l’Ue] est im-possible”), de l’angoisse (“sortir serait une catastrophe”) et de la régression (“sortir serait historiquement une régression”).
Démonter les trois piliers de cette métaphysique est une priorité absolue pour quiconque aujourd’hui veut faire un peu de clarification à gauche. Un livre de Domenico Moro La gabbia dell’euro. Perchè uscirne è internazionalista e di sinistra vient à peine d’être publié ; il a le grand mérite d’affronter avec de solides arguments notamment la métaphysique de la régression. Qui dans le texte est synthétisée ainsi : “la sortie de l’euro” serait “politi-quement et historiquement régressive, parce qu’elle représenterait le retour à la nation” (concept, pour sa part, observe justement l’auteur, “identifié à celui du nationalisme”). À cette position Moro répond de façon très articulée et convaincante, sans dédaigner no-tamment d’opérer une lecture critique du “Manifesto di Ventotene” (un des textes les plus cités et les moins lus du XXème siècle), ou de parcourir l’histoire de l’idée de nation depuis le XVIIIème siècle.
Sur l’européisme, sa thèse de fond est celle-ci : “l’idéologie européiste est une articulation directe, en Europe, de l’idéologie cosmopolite, qu’on ne doit absolument pas confondre avec l’internationalisme”. Donc, comme cette fausse identification est une part importante de l’équivoque par lequel l’européisme serait “progressiste” et “de gauche”, il conviendra maintenant de citer in extenso les affirmations de l’auteur à ce sujet :
“L’internationalisme, comme partie de la pensée socialiste des XIXème et XXème siècles, ne fait pas abstraction de l’existence des nations et des Etats et a un caractère collectif et de classe. En fait, il se propose de dépasser les différences et les rivalités nationales et éta-tiques par la construction d’une solidarité et d’une unité d’objectifs économiques et poli-tiques entre classes subalternes et travailleurs salariés appartenant à des nationalités dif-férentes, face au capital. L’internationalisme tient compte de l’existence des nationalités et soutient le principe de l’autodétermination des peuples, c’est-à-dire le droit à la séparation, comme instrument de lutte contre l’oppression de l’impérialisme et des régimes autori-taires et arriérés. Mais il cadre toute la question nationale à l’intérieur de la défense des in-térêts généraux du travail salarié et des classes subalternes, et lutte contre tout ce qui di-vise et met en concurrence les travailleurs, y compris les différences nationales.
Le cosmopolitisme, au contraire, fait abstraction des nations et a un caractère individua-liste. L’individu se sent citoyen du monde, au lieu d’être lié à une communauté territoriale déterminée. Sur le plan économique, le cosmopolitisme exprime l’aspect de la mobilité, une des caractéristiques vitales du capital, qui requiert à la fois l’existence de l’Etat territo-rial, pour les garanties et les règles que celui-ci peut offrir, et une ample liberté de mouve-ment au-dessus et à travers les frontières étatiques. Le cosmopolitisme comme idéologie naît dans la période des Lumières ; il est l’oeuvre de la maçonnerie, organisation secrète qui naît dans une vision universaliste, et en général des élites capitalistes liées aux inté-rêts mondiaux et à des réseaux de relations supranationaux, plutôt que seulement à de spécifiques relations territoriales […] Le caractère cosmopolite va être accentué dans des moments historiques particuliers, par exemple dans la période actuelle, quand s’affirme la tendance à l’internationalisation des capitaux. Les élites transnationales contemporaines ont un caractère cosmopolite marqué : elles étudient dans les mêmes universités de pres-tige mondial, fréquentent les mêmes cercles et les mêmes think tank internationaux (la Commission Trilatérale, le Groupe Bilderberg, l’Aspen Institute), ont des résidences dans les plus grandes métropoles européennes et étasuniennes, mais surtout se rencontrent dans les conseils d’administration d’entreprises et de banques transnationales. Le cosmo-politisme est alimenté par des mécanismes spécifiques d’intégration des élites : les inter-locking directorates, qui prévoient la participation simultanée à des conseils d’administration de différentes entreprises, et le mécanisme des “chaises tournantes” qui se fonde sur l’alternance de charges dans des entreprises et des banques, dans l’administration étatique, dans les organismes supra-nationaux et dans les institutions uni-versitaires”.
Comment situer l’Ue et l’Union européenne dans ce contexte ? Selon Moro “l’union eu-ropéenne (Ue) et l’Union économique et monétaire (Uem) sont la manifestation d’une phase du capitalisme dans laquelle l’élément cosmopolite a un plus grand poids à la fois en regard de la phase classique de l’impérialisme territorial des années allant de 1870 à 1945, et en regard de la phase de décolonisation et de pré-mondialisation allant de 1950 à 1989, année où, avec la dissolution de l’URSS, on fait débuter la dite mondialisation, qui n’est d’ailleurs rien d’autre que l’élargissement au niveau mondial du marché capitaliste, au moyen de l’abattement ou de la restriction des barrières étatiques en faveur de la libre circulation de capitaux et marchandises. L’Uem, en effet, en favorisant et accentuant la fuite des mécanismes de l’accumulation au-delà du périmètre de contrôle de l’Etat, donne libre cours au déplacement du barycentre de l’accumulation d’un niveau national à un ni-veau international”.
C’est dans cette grille de lecture que Moro présente le lien entre l’union monétaire et la théorie (et la pratique) de la “contrainte externe”, qui a accompagné les différentes phases de l’intégration européenne de l’Italie depuis les années Quatre-vingt : “L’euro a été le principal instrument de réorganisation de l’accumulation dans la phase capitaliste mondiale, dans les spécifiques et particulières conditions économiques et politiques de l’Europe occidentale… En Europe continentale (par rapport aux îles britanniques), surtout en Italie, France et Espagne, à cause des rapports de force économiques et politiques par-ticuliers existant entre les classes sociales, il a fallu avoir recours au levier de la contrainte externe européenne. Ce levier a permis de contourner parlements et systèmes électoraux qui, exprimant des intérêts diversifiés, ne permettaient pas la gouvernabilité si souhaitée, c’est-à-dire la capacité des gouvernements à mettre en pratique les contre-réformes de l’Etat-providence et des marchés des capitaux, des marchandises et du travail, voulues par le capital et imposées pour son compte par la Bce et par la Commission européenne”. Et c’est pour ces raisons, conclut Moro, que “l’idéologie dominante, c’est-à-dire l’idéologie des cercles économiques hégémoniques, n’est pas aujourd’hui celle du nationalisme, mais bien celle du cosmopolitisme”. En effet, l’idéologie nationaliste “ne représente pas, dans cette phase historique, les intérêts de fond du grand capital européen”. On peut com-prendre cela, observe Moro, en considérant que “le concept de nation et ceux de patrie et de peuple qui lui sont liés, ont changé au cours du processus historique et, dans chaque période, ont pris des significations diverses en fonction du point de vue, c’est-à-dire de l’orientation, politique et de classe”.
Entre la fin du XIXème siècle et le début du XXème, “les concepts de nation et de patrie de-viennent l’instrument idéologique des puissances européennes nouvelles et anciennes en compétition, en France et en Italie comme en Allemagne, pour la création de consensus autour des politiques impérialistes, et finalement pour la mobilisation des masses dans la guerre mondiale. On passe ainsi de la nation au nationalisme, c’est-à-dire à une concep-tion de supériorité de sa propre nation sur les autres. Dans le même temps, cependant, on assiste au développement du concept de nation dans un sens progressiste, c’est-à-dire comme lutte contre l’oppression impérialiste des peuples, en Europe et surtout dans les colonies”.
En Europe, après la première guerre mondiale, “le concept de nation se trouve dirigé et exacerbé par le fascisme et par le nazisme. L’idée de nation et de patrie se réanime sur-tout à la suite de l’invasion nazi-fasciste des pays européens, et surtout après l’invasion de l’URSS. Où le parti communiste fait appel au peuple entier pour la défense de la patrie dans la lutte contre l’invasion nazie, qui, de fait, sera définie comme Grande guerre patrio-tique. En Occident aussi la Résistance n’est pas seulement lutte contre le fascisme mais en même temps lutte contre l’envahisseur étranger. En conséquence, elle prend, entre autres connotations, celle de guerre patriotique. Les formations partisanes italiennes, in-dépendamment de leur couleur politico-idéologique, choisissent souvent de prendre un nom faisant référence à des patriotes du Risorgimento : Mazzini, Pellico, Menotti, frères Bandiera, etc. Les formations partisanes mêmes du Parti communiste italien, majoritaires dans la Résistance italienne, se réclament fréquemment de la tradition du Risorgimento, en prenant par exemple le nom collectif de Brigades Garibaldi”. Après la guerre, le PCI de Togliatti comme on le sait développera, surtout après 1956, la “voie nationale ou italienne au socialisme”.
Moro observe -à juste titre- que “cela fut la dernière véritable stratégie que les commu-nistes se donnèrent en Italie”.
Revenant à nous, quelle signification peut-on attribuer aujourd’hui à la nation ? Domeni-co Moro répond : “La nation est un fait objectif, c’est-à-dire qu’elle existe jusqu’aujourd’hui en tant qu’individualité historique. Toutefois, elle prend une signification politique et idéo-logique différente selon qui en dirige l’interprétation et selon le contexte socio-économique historique”. Et la situation actuelle est caractérisée par le fait que “l’élite capitaliste a abandonné le concept de nation ou, pour être plus précis, l’a mis au second plan et rendu subalterne à l’autorégulation du marché et aux institutions supranationales. Alors que jusque récemment existaient des intérêts communs, entre l’élite économique et les sec-teurs subalternes, ou du moins la possibilité qu’on puisse établir un pacte social au niveau national, aujourd’hui ce pacte a été déchiré justement par cette élite de plus en plus inter-nationalisée. De sorte que la précédente unité de la communauté nationale, même en ayant toujours exclus une part plus ou moins grande des subalternes, s’est profondément fracturée […] Le capital a déchiré le pacte social keynésien, c’est-à-dire la base matérielle de la Constitution, et aujourd’hui ses intérêts, notamment en Italie et dans les autres pays les plus pénalisés par l’intégration européenne, s’opposent objectivement aux intérêts po-pulaires, ceux de la majorité de la population. Pour la pensée dominante le concept même de peuple est à présent “politiquement incorrect”, au point de déclarer qu’en suivre les inté-rêts revêt une acception négative, et devient populisme”.
A l’égard de tout cela, l’auteur revendique la valeur actuelle et le caractère progressiste d’un “patriotisme constitutionnel, c’est-à-dire de l’appartenance à une communauté natio-nale conditionnée par le respect et la relance de la Constitution. Une Constitution, cepen-dant, non pas détournée par les modifications demandées par l’Europe comme c’est le cas aujourd’hui, mais bien dans son enracinement originel et surtout unie à la critique du capi-talisme. Surtout, ce qui distingue une conception progressiste et actuelle de nation d’une conception réactionnaire et arriérée est la question du pouvoir. La conception progressiste, en effet, se fondant sur le principe de la volonté populaire, doit se poser en perspective la question de la conquête du pouvoir de la part des classes subalternes et, dans l’immédiat, celle de l’action pour la modification des rapports de force entre les classes. Pour ces rai-sons justement, la récupération de la volonté populaire et du patriotisme constitutionnel, dans le contexte fortement cosmopolite et internationalisé, ne peut que se configurer, si nous voulons rester dans le concret et non dans les abstractions théoriques, en termes à la fois nationaux et internationalistes. Mais, seule la récupération de la volonté populaire et l’amélioration des rapports de force à un niveau national, dans les conditions spécifiques de l’intégration européenne, peuvent poser les fondements pour le développement d’une politique internationaliste, qui soit capable donc de construire une collaboration et une uni-té d’intentions entre les salariés et les subalternes d’Europe”.
Mais que signifie concrètement “récupération de la souveraineté démocratique et popu-laire” ? Cela signifie d’abord “le rétablissement d’un contexte de lutte où les subalternes ne soient pas battus au départ, moyennant la réintroduction de mécanismes économico-institutionnels qui permettent de redéfinir des rapports de force plus favorables au travail salarié. Ces mécanismes se concrétisent, avant tout, en replaçant au niveau de l’état le contrôle sur la monnaie, afin de manoeuvrer sur les changes et d’attribuer à la Banque centrale le rôle de prêteur de dernière instance et d’achat des titres d’Etat”. De ce point de vue, observe Moro, “la sortie de l’euro […] est une condition certes non suffisante mais né-cessaire, sur le plan politique, et pas seulement sur le plan économique, pour défendre les intérêts de travail salarié et surtout pour reconstruire une stratégie de changement à un ni-veau européen : c’est-à-dire une stratégie internationaliste. C’est une conditio sine qua non, sans laquelle on ne peut ni promouvoir une politique de budget public expansion-niste, ni un élargissement de l’intervention publique, au moyen de véritables re-nationalisations de banques ou entreprises de caractère stratégique ; ni encore moins dé-fendre efficacement salaires et Etat-providence. À l’intérieur de l’euro on peut et on doit lut-ter pour le travail, le salaire et l’Etat-providence, mais les conditions n’existent pas pour déployer cette lutte jusqu’au bout et avec efficience”.
Voilà pourquoi, pour répondre à la question qui donne son titre au livre, Moro affirme que sortir de la cage de l’euro est “de gauche”. Mais est-ce aussi “internationaliste” ? La ré-ponse de Moro est affirmative. Elle procède d’une analyse de la situation actuelle, dans laquelle “les mécanismes de l’intégration monétaire créent ou creusent les divisions entre les classes ouvrières des différents pays, en les mettant en compétition les unes contre les autres sur le plan du salaire et de la réduction de l’Etat-providence ; en divisant les peuples entre les “cigales” et gaspilleurs, comme les Grecs et les Italiens, et les “fourmis” et probes, comme les Allemands. Rien à voir, donc, avec le développement de solidarités et valeurs communes, rien à voir avec le dépassement du nationalisme et la recomposi-tion de classe grâce à la mondialisation et à l’Europe”. Contre tout cela, “seule une élabo-ration politique qui mette au centre la pratique de l’objectif du dépassement de l’euro et des traités européens, en la reliant à une critique des rapports de production, à la crise du capital et au néolibéralisme, peut permettre de relancer une politique qui soit à la fois effi-cace au niveau national et internationaliste au niveau européen, permettant à la gauche de recréer une force politique qui ne soit pas vue comme résiduelle et désormais destinée au cimetière de l’histoire”.
Il serait certes facile de mesurer la distance qu’il y a entre ces paroles et les positions d’une grande partie des formations de gauche présentes aux élections du 4 mars. Mais il est sans aucun doute plus productif de remettre cette réflexion à l’après élections. La re-prise d’une gauche politique en Italie ne sera ni facile ni rapide. Elle devra repartir d’une réflexion très sérieuse sur sa propre histoire, sur les erreurs accomplies et sur les choses à faire. À cette réflexion pourront difficilement être étrangers les thèmes traités dans le livre de Domenico Moro.