person:michel beaugas

  • Controverse autour des chômeurs qui gagneraient plus qu’en travaillant, Bertrand Bissuel
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/02/controverse-autour-des-chomeurs-qui-gagneraient-plus-qu-en-travaillant_54305

    Edouard Philippe et Muriel Pénicaud ont affirmé qu’un chômeur sur cinq reçoit une allocation supérieure à ses rémunérations antérieures.

    Colère des syndicalistes et perplexité de plusieurs économistes. L’exécutif a déclenché une vive controverse, mardi 26 février, en dévoilant quelques-unes de ses pistes pour transformer le système d’indemnisation des demandeurs d’emploi. « Il faut que le travail paye toujours plus que le chômage », a lancé Edouard Philippe. Or ce n’est pas forcément le cas, a poursuivi le chef du gouvernement, lors d’une conférence de presse à Matignon. Présente à ses côtés, Muriel Pénicaud, la ministre du travail, a précisé qu’un chômeur indemnisé sur cinq touche une allocation supérieure à la moyenne de ses rémunérations mensuelles perçues antérieurement. Un tel « dysfonctionnement » résulte de règles qu’il faut modifier, a-t-elle affirmé.

    Pour défendre une réforme politiquement sensible, l’exécutif s’est donc prévalu d’arguments chocs, qui ont scandalisé les leaders des confédérations de salariés. La statistique mentionnée par Mme Pénicaud est « caricaturale » et permet au pouvoir en place « de dire que les chômeurs profitent du système », s’est indigné Laurent Berger, numéro un de la CFDT. Les autres centrales ont réagi sur le même ton.

    Qu’en disent les économistes, qui connaissent bien les rouages de l’Unédic – l’association paritaire chargée de piloter l’assurance-chômage ? « Je ne vois pas bien comment le gouvernement parvient au ratio évoqué. Mais je ne dis pas que c’est radicalement impossible », confie Bertrand Martinot, ancien responsable de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle. Chercheuse au Centre d’études de l’emploi et travail (CEET), Claire Vivés s’interroge : « Cette statistique correspond sans doute à quelque chose, mais comment a-t-elle été construite ? »

    Travail continu ou fractionné

    « Par Pôle emploi », répond l’entourage de Mme Pénicaud, en indiquant que des compléments d’information seront apportés dans les prochains jours. Le point mis en exergue par la ministre tient aux modalités de calcul de la prestation, qui sont épouvantablement complexes. Au cœur du problème, il y a en particulier le salaire journalier de référence (SJR), sur lequel est basé le montant final de l’allocation. D’après le ministère du travail, le SJR peut, dans certaines situations, conduire à l’octroi d’une indemnisation plus importante que le salaire mensuel moyen de la personne quand elle exerçait une activité. Un peu plus de 600 000 inscrits à Pôle emploi se trouveraient dans ce cas de figure.

    « Je pense que l’ordre de grandeur avancé par le gouvernement est juste. Il illustre une thématique que j’avais déjà abordée dans un livre en 2013 », raconte Bruno Coquet, de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Dans cet ouvrage (L’Assurance chômage, L’Harmattan), le chercheur compare la situation de deux personnes ayant travaillé six mois dans l’année pour un salaire mensuel identique. La seule différence entre elles réside dans le fait que l’une a travaillé de manière continue, tandis que l’autre a été employée de façon fractionnée. « Avec les règles de calcul applicables, on parvenait à la conclusion que l’allocation de la deuxième personne correspondait à près de 160 % de son revenu mensuel moyen, soit un pourcentage deux fois plus élevé que celui de la première. Les dispositions en vigueur aboutissent donc à des inégalités, qu’il convient de corriger », explique M. Coquet.

    Chercheur associé à l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES), Jacques Freyssinet considère que la question « est connue de longue date, mais elle n’est devenue problématique qu’avec la prolifération des CDD très courts, observée depuis une quinzaine d’années ». Sous-entendu : le phénomène dénoncé par le gouvernement a attiré l’attention car il concerne un nombre grandissant d’individus.

    « Si les paramètres de l’Unédic changent, ce sont des personnes en situation précaire qui vont en faire les frais », insiste Mme Vivés.
    Il ne faut pas perdre de vue une autre dimension importante ; derrière le chiffre brandi par Mme Pénicaud, il y a des « demandeurs d’emploi dont l’indemnisation porte sur des petits montants », insiste Mme Vivés : « Si les paramètres de l’Unédic changent, ce sont des personnes en situation précaire qui vont en faire les frais. »
    Tout en partageant certains des constats dressés par l’exécutif, M. Coquet souhaite que le gouvernement agisse de façon mesurée, en mettant sur la table tous les éléments : « Il faut un diagnostic précis et partagé – ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle – afin de bien informer le débat public, plaide-t-il. Les changements à venir peuvent être de grande ampleur, pour des populations à petits revenus, ce qui peut justifier des réformes graduelles. » M. Freyssinet, lui, se montre circonspect sur la suite : si le sujet a été placé sur le devant de la scène « pour justifier la lutte contre les CDD très courts, on peut le comprendre », remarque-t-il. En revanche, « s’il s’agit de préparer une réduction des droits des plus précaires, l’appréciation est différente ».
    Le gouvernement a conscience de tous ces enjeux, assure une source proche du dossier. Celle-ci ajoute que la réforme ne se limitera pas à une nouvelle formule pour calculer l’allocation des chômeurs et que tout sera fait pour améliorer l’accompagnement des plus fragiles.

    #chômeurs #précaires #droit_au_chômage #droits_sociaux

    • Chômage [ 20 % des chômeurs ont une allocation supérieure à leur salaire ? ] : quand l’Unédic corrige le gouvernement, Bertrand Bissuel

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/03/28/chomage-quand-l-unedic-corrige-le-gouvernement_5442574_823448.html

      Pour la ministre du travail, Muriel Pénicaud, 20 % des chômeurs ont une allocation supérieure à leur salaire. L’Unédic avance un chiffre plus faible.

      Le débat sur la réforme de l’assurance-chômage vient de connaître un rebondissement très intrigant. A l’origine de ce nouvel épisode, une note de quatre pages rendue publique, mercredi 27 mars, par l’Unédic, l’association paritaire qui pilote le dispositif d’indemnisation des demandeurs d’emploi. Ce document remet en cause l’un des arguments-clés de l’exécutif pour transformer le régime : il s’agit de l’idée selon laquelle 20 % des chômeurs bénéficieraient d’une allocation supérieure à leur salaire mensuel moyen, perçu avant de s’inscrire à Pôle emploi.

      Ce chiffre avait été lancé, fin février, par la ministre du travail, Muriel Pénicaud, lors d’une conférence de presse à laquelle participait le chef du gouvernement, Edouard Philippe. Tout deux avaient estimé que le « système » repose sur des règles susceptibles d’engendrer des situations où le travail s’avère moins rémunérateur que l’indemnisation-chômage. Un discours qui avait plongé dans une colère noire plusieurs leaders syndicaux : Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, avait crié à la caricature et reproché au pouvoir en place de vouloir faire passer les demandeurs d’emploi pour des profiteurs.

      Ecarts significatifs

      Dans ce contexte très polémique, la note de l’Unédic, publiée mercredi, fournit une contribution très utile. Elle se penche sur le sort des allocataires, « avant et après le début » de leur prise en charge par l’assurance-chômage, en exploitant des données relatives à novembre et décembre 2017. D’après ce document, ce sont surtout les personnes ayant travaillé « moins de 25 % de l’année précédant leur ouverture de droit » qui ont touché une prestation supérieure à leur salaire antérieur. Or, elles sont peu nombreuses : 4 %, au total, soit un pourcentage très éloigné de celui évoqué par Mme Pénicaud. Précision importante : le cas de figure d’un demandeur d’emploi gagnant mieux sa vie au chômage peut se retrouver dans les catégories qui ont travaillé plus que 25 % des douze mois écoulés, mais « c’est rare », indique l’Unédic, en réponse à une question du Monde.

      Ces résultats ne vont pas vraiment dans le sens des statistiques mises en avant, il y a un mois, par l’exécutif. Le ministère du travail avait alors indiqué qu’il appuyait ses dires sur des recherches effectuées par Pôle emploi. L’opérateur public a, par la suite, apporté des explications orales à plusieurs journalistes, désireux d’en savoir plus, ainsi qu’à des responsables syndicaux. Mais à ce jour, aucun écrit n’a été diffusé – à la presse, tout au moins – pour exposer l’analyse de Pôle emploi.

      Une telle méthode a alimenté les doutes. La présidente (CFDT) de l’Unédic, Patricia Ferrand, a, d’ailleurs, exprimé son scepticisme, mardi, lors d’une conférence de presse consacrée aux projections financières du régime. Interrogée sur les 20 % de chômeurs dont l’allocation excéderait leurs revenus d’activité mensuels moyens, elle a répondu : « On ne sait pas du tout comment ça a été (...) calculé. » Eric Le Jaouen, le vice-président (Medef) de l’association paritaire, a fait chorus : « On aurait besoin d’un appui technique sur ce chiffre [de 20 %] parce que ce n’est pas ce que l’on constate (...) dans notre position de gestion de l’assurance-chômage. » Mme Ferrand a, par ailleurs, rappelé que les dispositions applicables posent comme principe que le demandeur d’emploi ne peut pas gagner plus que le salaire sur la base duquel sa prestation est déterminée.

      Les écarts significatifs qui existent entre la note de l’Unédic et les constats de Pôle emploi ont de quoi laisser perplexe. Comment parvenir à un diagnostic partagé sur l’assurance-chômage, comme le souhaite le gouvernement, si des chiffrages disparates circulent ? Sollicité, jeudi matin, par Le Monde, le ministère du travail n’a pas donné suite.
      Les syndicats, de leur côté, considèrent être confortés dans leurs positions : « Les chiffres du gouvernement tenaient de la communication politique, dans l’optique de faire baisser les droits de l’ensemble des demandeurs d’emploi. Nous avons dit depuis le début qu’ils étaient faux et l’étude de l’Unédic en fait la démonstration », confie Michel Beaugas (Force ouvrière). Eric Courpotin, lui, (CFTC) s’interroge : l’exécutif a-t-il voulu « faire un effet d’annonce » ? Ce qui est sûr, à ses yeux, c’est que les données de l’Unédic peuvent être vérifiées, alors qu’« on ne sait pas d’où sortent » celles de Mme Pénicaud.

  • Droit au chômage : « On décidera par décret » - Assurance-chômage : le gouvernement va devoir assumer une réforme minée, Bertrand Bissuel, Le Monde
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/02/21/unedic-l-executif-va-devoir-assumer-sa-reforme-de-l-assurance-chomage_542623

    En désaccord sur la question des contrats courts, les partenaires sociaux ont mis fin à leurs négociations.

    Le miracle n’a pas eu lieu. Réunis, mercredi 20 février, pour une dixième séance de négociation sur l’assurance-chômage, les partenaires sociaux ont confirmé leur incapacité à parvenir à un compromis. Plus que prévisible, cette issue est la résultante de profonds désaccords entre les parties en présence pour combattre le recours abusif aux contrats courts. Les syndicats militaient pour un système de bonus-malus, qui augmente les cotisations des entreprises où la main-d’œuvre tourne fréquemment et diminue celles des employeurs dont les effectifs sont stables. Le patronat, hostile jusqu’au bout à un tel mécanisme, suggérait d’autres pistes – jugées insuffisantes par le camp adverse. Chaque protagoniste restant arc-bouté sur ses positions, les discussions ne pouvaient que capoter.

    L’exécutif va, du même coup, reprendre en main un dossier qui s’avère éminemment sensible, puisque l’un des principaux objectifs du processus en cours est de réaliser des économies sur les dépenses d’allocation en faveur des demandeurs d’emploi. Cet épisode risque fort d’accélérer le déclin du paritarisme à l’échelon interprofessionnel.

    Les organisations d’employeurs et de salariés n’ont mis qu’une heure, mercredi, pour sceller le divorce. Pour cette rencontre de la dernière chance, les représentants du Medef, de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) et de l’Union des entreprises de proximité (U2P) étaient venus avec une nouvelle proposition : la création d’un fonds pour financer des formations et une indemnisation en faveur des salariés alternant contrats courts et périodes d’inactivité.

    L’idée de ce « pot commun » (alimenté par une contribution spécifique des entreprises sur les #CDD_d’usage) ayant circulé avant les échanges de mercredi, plusieurs responsables syndicaux avaient clairement dit qu’elle n’était pas à la hauteur des enjeux. Dès lors, les conclusions ont vite été tirées : « Nous faisons le constat aujourd’hui que nous ne pouvons trouver suffisamment de points de convergence », a déclaré Hubert Mongon, le chef de file du Medef, à l’issue de la réunion.

    Responsabilité de l’échec

    Comme souvent dans ce type de situation, les acteurs en présence se sont mutuellement renvoyé la responsabilité de l’échec. « Le patronat n’a jamais voulu discuter des moyens de lutter contre la #précarité et d’un système de modulation des #cotisations [s’apparentant au #bonus-malus] », a dénoncé Denis Gravouil (CGT). « Je ne vois pas à quoi ça rime, ce simulacre de négociation », a enchaîné Eric Courpotin (CFTC). L’attitude des organisations de salariés relève du « non-sens », a rétorqué la CPME, dans un communiqué, en soulignant la nécessité de « réagir » face à la #dette « de plus de 30 milliards d’euros » accumulée par l’Unédic, l’association paritaire qui pilote l’assurance-chômage.

    En réalité, la probabilité d’un « deal » était mince, dès le départ, car le gouvernement a placé la barre très haut. Dans la feuille de route transmise fin septembre 2018 aux partenaires sociaux pour cadrer leur réflexion, Matignon a tracé des orientations de nature à mécontenter tout le monde : d’un côté, il y a les économies, de 3 à 3,9 milliards d’euros en trois ans, qui indisposent les syndicats ; de l’autre, la volonté de forger de « nouvelles règles », pour réduire le nombre de précaires constamment réembauchés en CDD ne peut que faire froncer les sourcils des leaders patronaux. Sur ce deuxième volet, le mot « bonus-malus » n’est, certes, pas cité dans le document de cadrage du premier ministre, mais Emmanuel Macron a, lui-même, récemment rappelé qu’il comptait toujours mettre en œuvre cette mesure, inscrite dans son programme de campagne – contribuant, ainsi, à tendre « les positions des uns et des autres », d’après Michel Beaugas (FO).

    Mercredi soir, devant quelques journalistes, la ministre du travail, Muriel Pénicaud, a regretté l’absence d’accord, en précisant que « le gouvernement prendra ses responsabilités ». Autrement dit, c’est lui qui changera les conditions d’accès à l’assurance-chômage et les modalités d’indemnisation des demandeurs d’emploi. Un événement rarissime depuis la fondation de l’Unédic, au tout début de la Ve République. Il y a trois ans, les négociations s’étaient soldées par un échec – en buttant, déjà à l’époque, sur la question des contrats courts, mais l’exécutif s’était alors contenté de prolonger, par décret, les dispositions en vigueur. En 1982, en revanche, le #gouvernement_Mauroy avait pris des mesures d’une tout autre ampleur, après les discussions infructueuses entre le patronat et les confédérations de salariés : un #décret avait été publié, qui modifiait significativement le « fonctionnement du régime ».

    « On décidera par décret »

    Le pouvoir en place aujourd’hui va-t-il procéder de la même manière ? Les propos de Mme Pénicaud, mercredi, ne laissent guère de place au doute : « On décidera par décret », a-t-elle martelé sur BFM-TV, mais les organisations d’employeurs et de salariés seront consultées au préalable, a-t-elle précisé. Le calendrier de la concertation n’est pas connu, à ce stade.

    Les syndicats craignent que les transformations à venir ne pénalisent durement les demandeurs d’emploi, en particulier ceux qui occupent une activité réduite, avec la possibilité de cumuler leur salaire et une prestation de l’Unédic. L’hypothèse d’un abaissement de l’indemnité maximale plane aussi. Une telle option, si elle était retenue, toucherait fortement les cadres, puisque l’allocation dépend du montant de la rémunération, a mis en garde Jean-François Foucard (CFE-CGC) : « On sera en [position] défensi[ve] pour essayer de limiter les dégâts. » La CGT, pour sa part, a indiqué qu’elle sera attentive au sort des personnes ayant plusieurs employeurs (les #assistantes_maternelles, notamment), puisque les règles applicables à elles sont susceptibles d’être durcies.

    Le patronat fait également grise mine, face à la perspective du bonus-malus. « Le système, tel qu’il est aujourd’hui envisagé, n’a aucun sens pour l’emploi », a répété M. Mongon, mercredi.

    S’il va au bout de ses intentions, l’exécutif se mettra donc à dos l’ensemble des partenaires sociaux et accréditera la thèse selon laquelle il ne tient pas compte des corps intermédiaires, tout en donnant l’impression de s’attaquer aux plus faibles.

    Pas idéal dans le contexte actuel d’ébullition sociale.

    « Une nouvelle ère » est en train de s’ouvrir, a lancé Marylise Léon (CFDT), mercredi. Celle du « paritarisme d’Etat », a complété M. Beaugas. « On implose de l’intérieur », a renchéri Patrick Liébus (U2P). Des formules-chocs pour signifier que les prérogatives dévolues aux organisations de salariés et d’employeurs se réduisent comme peau de chagrin dans la gouvernance de grands dispositifs de protection sociale, les pouvoirs publics exerçant une emprise de plus en plus grande. La fin d’une époque ?

    « Je ne vois pas l’Etat décider seul et signer ainsi l’acte de décès du #paritarisme, nuance Raymond Soubie, président de la société de conseils Alixio et spécialiste du social. Il a intérêt à s’appuyer sur le patronat et les syndicats, surtout dans la période mouvementée que le pays traverse. Mais on entre incontestablement dans une phase de régression des négociations interprofessionnelles. »

    #chômeurs #droit_au_chômage

  • Les syndicats critiquent le nouveau barème de sanctions contre les chômeurs, Bertrand Bissuel
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/31/les-syndicats-critiquent-le-nouveau-bareme-de-sanctions-contre-les-chomeurs_

    Les syndicats critiquent le nouveau barème de #sanctions contre les #chômeurs
    Le dispositif s’inscrit dans la volonté du gouvernement de renforcer le #contrôle des demandeurs d’emploi.

    Il faut toujours garder un œil sur le Journal officiel : à défaut d’être exaltante, la lecture de cette publication peut s’avérer instructive, en particulier entre Noël et le Jour de l’an. Démonstration vient d’en être faite avec l’édition du dimanche 30 décembre, qui contient près de 20 #décrets_d’application de la loi « avenir professionnel » – une réforme votée l’été dernier sous la houlette de la ministre du travail, Muriel Pénicaud. L’un des décrets parus dimanche a trait « aux droits et aux obligations » des chômeurs, ainsi qu’au « suivi de la recherche d’emploi ». Le contenu de ce texte, éminemment sensible, est grosso modo en ligne avec les intentions affichées initialement par le gouvernement. A une réserve près, qui n’est pas anodine : elle porte sur les sanctions prononcées contre un inscrit à Pôle emploi qui contrevient à ses devoirs.

    Dès le départ, l’exécutif avait manifesté le souhait de revoir le barème des « peines » applicables. Le 20 mars, des pistes très précises avaient été dévoilées à la presse par le ministère du travail. Il avait alors été indiqué qu’un chômeur qui ne se présente pas à un rendez-vous avec son conseiller chez #Pôle_emploi serait radié des listes durant deux semaines et non plus pendant deux mois. « On diminue par quatre [la durée de] la sanction, qui était complètement disproportionnée sur ce sujet-là », avait expliqué l’entourage de Mme Pénicaud. Finalement, la « punition » sera un peu plus lourde qu’annoncée : un mois de #radiation (au lieu de quinze jours, donc), ce qui la place tout de même à un niveau inférieur à celui en vigueur avant la réforme ; durant cette période, la prestation cesse momentanément d’être versée.

    Un autre changement s’est produit par rapport à la communication gouvernementale. Il concerne une option, également évoquée le 20 mars, pour l’ensemble des « manquements » du demandeur d’emploi (à l’exception du rendez-vous manqué avec son conseiller, sans motif valable). L’idée présentée à l’époque consistait à dire que, à la première incartade (par exemple, le fait de ne pas rechercher activement un poste), l’#allocation serait suspendue pendant un mois – les droits restant acquis et pouvant être utilisés plus tard, en cas de besoin. Si le chômeur commet un deuxième écart, le ministère avait précisé que la prestation serait supprimée durant deux mois – ce qui signifiait, cette fois-ci, une amputation des droits d’une durée équivalente. A la troisième « infraction », le coup de bâton serait de quatre mois.

    Ce schéma-là a été corrigé : à l’avenir, l’allocation sera supprimée (et non pas suspendue) un mois dès le premier manquement, sauf pour le chômeur qui omet de se rendre à une convocation par Pôle emploi ; dans cette dernière situation, la prestation ne sera supprimée qu’à partir du deuxième « loupé » et ce, pour deux mois (quatre mois, au troisième « loupé »). Une source au sein de l’exécutif justifie ces ajustements par la volonté d’être « plus simple et plus cohérent ».

    La teneur du décret ne constitue pas une surprise pour les syndicats. Ils avaient été consultés sur ce dispositif, notamment lors d’une réunion, le 4 décembre, du Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelles (Cnefop). Plusieurs centrales avaient, alors, exprimé leur désapprobation mais ces prises de position, en pleine crise des « gilets jaunes », étaient passées relativement inaperçues.

    « Chasse aux chômeurs »

    Aujourd’hui, leur analyse reste la même. Les mesures finalement retenues vont « globalement dans le sens du durcissement », déplore Marylise Léon (CFDT). « Nous avons pris connaissance du projet de décret, lors de son examen par le Cnefop, sans concertation préalable, renchérit Michel Beaugas (FO). Sous prétexte de simplification et d’équité, le texte durcit les dispositions existantes. Ce sont ces “petites découvertes” qui causent, parfois, l’exaspération des organisations de salariés. » « Depuis sa soi-disant contrition du 10 décembre [le jour des annonces faites en réponse aux doléances des « gilets jaunes »], Macron n’a pas changé dans sa volonté de faire la “chasse” aux chômeurs, en continuant à mélanger allègrement les 0,4 % de fraude et l’immense majorité des chômeurs qui cherchent à travailler dignement », confie Denis Gravouil (CGT).

    Par ailleurs, le décret transfère, comme prévu, de l’Etat vers Pôle emploi certains pouvoirs de sanction (notamment la suppression de l’allocation). Une innovation qui déplaît à Marylise Léon car elle risque, selon elle, de nuire à la « relation de confiance » qui doit prévaloir entre le chômeur et le service public de l’emploi.

    #contrôle_des_chômeurs

    • « M. Macron rêve d’une flexibilité à l’allemande » - Denis Gravouil, membre de la commission exécutive confédérale de la CGT, en charge du dossier #emploi/chômage.
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/01/22/denis-gravouil-cgt-m-macron-reve-d-une-flexibilite-a-l-allemande_5412529_323

      Le président demande un durcissement des #sanctions et des baisses d’#allocations-chômage aux partenaires sociaux. Des exigences inacceptables, estime le négociateur de la CGT dans une tribune au « Monde ».

      Tribune. Un décret pris le 30 décembre 2018 en application de la loi du 5 septembre 2018 « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » a attiré l’attention sur le durcissement des sanctions contre les #chômeurs. Il ne s’agit pas simplement de suspendre, et même de supprimer, les allocations pour de prétendus manquements : une redéfinition de « l’#offre_raisonnable_d’emploi » permet d’obliger une personne inscrite à Pôle emploi à accepter à peu près n’importe quel emploi sans référence au #salaire antérieurement perçu, voire sans référence à sa qualification.

      Au-delà de ces sanctions qui font l’amalgame entre l’immense majorité des chômeurs et les 0,4 % de fraudes, la nouvelle loi permet au gouvernement de faire rouvrir la négociation de la convention assurance chômage entre patronat et syndicats, un an avant l’échéance. Ainsi, le gouvernement peut désormais décider de faire modifier une convention Unédic en cours, ce qu’il s’est empressé de faire par sa lettre de cadrage du 25 septembre 2018 aux organisations siégeant à l’Unédic. Il entend ainsi imposer 3,9 milliards d’euros d’économies en trois ans, soit 1,3 milliard par an sur 37 milliards d’indemnités versées. Cela signifierait une perte moyenne considérable de 3,5 % sur les allocations, pour des personnes dont le revenu moyen est de 1 200 euros par mois.

      Mais cette lettre de cadrage vise particulièrement les travailleurs précaires, celles et ceux dits « en activité réduite », c’est-à-dire 800 000 personnes parmi les 2,2 millions inscrites dans les catégories B et C des chiffres mensuels du chômage. Elle exige de revoir à la baisse le calcul des allocations lorsqu’il y a « cumul » – en fait, alternance – de périodes de travail, généralement en CDD courts, et de chômage indemnisé, de revoir la durée de ce cumul, ou encore sa possibilité même ; par exemple lorsqu’une assistante maternelle, qui peut garder jusqu’à trois enfants, n’en garde plus qu’un ou deux (généralement parce que la famille inscrit son enfant à l’école maternelle).

      Destruction des droits
      Déjà touchés par des baisses de droits dues aux conventions 2014 et 2017, nombre de personnes pourraient ainsi perdre 10 % à 30 % de leur allocation, soit 100 à 200 euros par mois, voire ne plus percevoir d’allocations du tout. Ce sont des intérimaires, des extras de l’hôtellerie, des assistantes maternelles, souvent des jeunes ou des personnes poussées vers la sortie avant l’âge de la retraite : une armée de réserve aux contrats de plus en plus courts ou à temps partiel, un volant de précarité à laquelle sont « accros » bon nombre d’employeurs, petits et gros.

      La nouvelle sortie d’Emmanuel Macron sur « les Français qui ont perdu le sens de l’effort » est symptomatique : le président croit fermement que couper les vivres aux chômeurs, totalement ou partiellement, les obligera à accepter toutes sortes de contrats de travail que les employeurs s’empresseront de créer. Après tout, les Britanniques ont bien leur contrat zéro heure (par lequel un salarié est lié à un employeur, qui le fait travailler s’il le veut bien de 1 à 40 heures par semaine, et ne le paye qu’à ce moment-là) ; les Allemands ont les mini-jobs, mis en place en même temps que les lois Hartz IV, qui ont instauré de fortes sanctions pécuniaires, touchant chaque année un chômeur sur trois.

      Poursuivant la destruction des droits ouverte par la loi #travail et les ordonnances, M. Macron rêve de la même flexibilité : et tant pis si le nombre de #travailleurs_pauvres en Allemagne est proportionnellement cinq fois plus élevé qu’en France. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : plus de 6 millions de personnes sont inscrites à Pôle emploi, seulement 2,4 millions sont indemnisées, 11 millions de personnes sont dans le « halo du chômage » si on compte toutes celles qui ne sont pas inscrites, généralement par découragement.

      Fraude marginale
      Toutes les études de grande ampleur auprès des demandeurs d’emploi montrent qu’ils passent leur temps à chercher un emploi stable et digne, que la fraude, selon Pôle emploi même, n’est que de 0,4 %, malgré les amalgames développés à longueur de petites phrases par le président et sa majorité pour justifier une réforme purement financière.

      La fable des 300 000 emplois non pourvus ressort régulièrement, alors que les études de la direction générale de l’emploi et de la formation professionnelle elle-même montrent que 150 000 offres d’emplois qualifiés ne trouvent pas preneur facilement (faute de disponibilité de la qualification exigée) et que 150 000 autres offres sont retirées par des entreprises, généralement de petite taille et sans service de recrutement, bien qu’elles aient reçu des candidatures.

      Face aux millions de salariés privés d’emploi, en plein mouvement des « gilets jaunes », il est temps de proposer autre chose que les stages sans fin, les CDD à répétition, les huit ans en moyenne que mettent les jeunes à trouver un CDI, les temps partiels de quelques heures.

      Il faut cesser de détruire des emplois publics pour répondre aux besoins citoyens. Il faut répondre aux délocalisations par des investissements dans un développement durable de l’industrie et des services. Il faut faire reculer la précarité en décourageant les employeurs qui fractionnent les contrats au détriment des salariés comme de leurs concurrents. Il faut cesser de transformer la protection sociale en « filet de sécurité » minimal troué de toute part. Il faut instaurer une véritable sécurité sociale professionnelle assurant un revenu de remplacement à toutes celles et ceux qui sont privés du droit au travail, pourtant inscrit dans la Constitution.

      #chômeurs_en_activité_à_temps_réduit #précaires

    • La visite de Macron chez les teutons est de mauvais augure pour les chômeurs. On entend souvent et depuis longtemps :
      « les allemands y arrivent bien, pourquoi pas nous ? »
      LaREM finira par imposer une loi du style Hartz IV et la conclusion de l’article de Denis Gravouil sur le style " Y’a qu’à, faut qu’on " ni changera pas grand chose si les chômeur·e·s ne se syndique pas en masse ou n’investissent pas les associations de chômeurs. Je dis ça alors que je ne suis plus syndiqué et que la politique individualiste ultra-libérale de Macron fait rage. Je compte que sur moi-même et encore de moins en moins.

  • Diagnostic de l’Unédic sur l’essor des contrats courts, LE MONDE ECONOMIE | 07.11.2018, Anne Rodier
    https://www.lemonde.fr/emploi/article/2018/11/07/diagnostic-de-l-unedic-sur-l-essor-des-contrats-courts_5380227_1698637.html

    Etat des lieux avant l’ouverture, vendredi 9 novembre, des négociations sur l’assurance-chômage et l’encadrement des contrats courts. Six secteurs s’avèrent plus demandeurs pour ce type de contrats.

    Afin de faciliter les négociations de l’assurance-chômage qui s’ouvrent, vendredi 9 novembre, l’Unédic a publié en septembre un état des lieux du marché du travail. Le diagnostic relevait notamment une forte augmentation des contrats courts, dont l’encadrement devrait être discuté avec les partenaires sociaux, et surtout la concentration de ces contrats de travail de moins d’un mois sur quelques secteurs : hébergement-restauration, services administratifs, réparation automobile, transports, activités médico-sociales, arts et spectacles.

    Un phénomène qui rappelle que l’essor des contrats courts répond à des logiques sectorielles, comme l’activité saisonnière pour l’hôtellerie-restauration ou le besoin d’une continuité de services dans les activités médico-sociales, mais pas seulement.

    L’Unédic souligne notamment la différence d’impact sur le nombre de contrats courts entre les entreprises dont la compétitivité se gagne par la réduction des coûts et celles qui optent pour une compétitivité par la qualité de leurs produits ou services. Pour analyser les raisons d’augmentation des embauches en contrats courts, l’Unédic avait missionné le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Crédoc) pour interroger les entreprises sur leurs pratiques.

    De cette enquête, il ressort que les entreprises qui favorisent la compétitivité-coût s’appuient sur une division forte du travail propice aux contrats courts, avec la mise en place de réembauches régulières d’un ou plusieurs mêmes employés par un même employeur. C’est ce qu’on appelle une « relation suivie ». « Les quatre cinquièmes des embauches en CDD d’un mois ou moins se font chez un ancien employeur », précise l’Unédic. Les « relations suivies » concernent quelque 400 000 personnes.

    En revanche, les entreprises qui privilégient la compétitivité par la qualité anticipent davantage et « tentent de circonscrire leurs difficultés de recrutement par un développement de la polyvalence, par le recours à des actions de formation professionnelle de leurs salariés, par des rotations sur poste, etc. Ce type de stratégie limite, de fait, leur recours aux contrats de courte durée. »

    Même si les entreprises interrogées estiment que leurs contrats courts ne sont pas substituables à des CDI, elles ne considèrent le contrat à durée indéterminée comme la norme d’emploi que « pour les postes qualifiés ».

    #chômage #emploi #précarité

    • https://www.humanite.fr/emploi-geoffroy-roux-de-bezieux-sonne-la-charge-contre-le-cdi-663417

      Sous couvert de lutte contre le chômage, le numéro un du #Medef prône un contrat de travail unique qui abolit la différence entre #CDD et #CDI. Après les lois travail, « la question du contrat de travail doit être reposée », plaide le #patron_des_patrons.

      A lors que la négociation sur l’assurance-chômage s’ouvre aujourd’hui (lire page suivante), le Medef avance ses pions pour pousser au moins-disant social. Son président, Geoffroy Roux de Bézieux, a proposé de s’attaquer à une « spécificité française » : le contrat de travail en CDI, dernier rempart des salariés. « Je ne peux pas me résoudre à un marché du travail aussi dual et binaire, la question du contrat de travail doit être reposée de façon apaisée avec un socle de droits communs entre CDD et CDI », a assuré au Journal du dimanche le patron des patrons. La mesure paraît inoffensive, mais ses conséquences sont redoutables : il s’agit de faire disparaître le contrat à durée indéterminée. Gonflé à bloc par un gouvernement pro-business, le Medef remet ainsi en selle son projet de contrat de travail unique. Il pourrait s’inscrire dans les pas du « contrat de projet » porté en 2007 par la commission Attali, sous Nicolas Sarkozy, à laquelle avait participé Geoffroy Roux de Bézieux aux côtés… d’Emmanuel Macron.

      La fonction de protection du CDI est remise en cause depuis des années par la montée en puissance de mesures libérales, inspirées par le Medef. Le pouvoir octroyé aux patrons de licencier facilement et à moindre coût s’est élargi au fil des réformes du droit du travail. L’employeur peut rompre un CDI pendant la période d’essai sans motif particulier et dans le cadre d’un licenciement économique. Les ordonnances Macron ont même consacré le plafonnement et la barémisation des indemnités prud’homales, qui fragilise de facto le CDI. L’employeur peut violer la loi en toute tranquillité : il paiera le minimum, les indemnités sont réduites et planifiables en cas de poursuite devant les prud’hommes pour licenciement abusif. « C’est un gain de rapidité », s’est réjoui Geoffroy Roux de Bézieux.

      Mais cet affaiblissement du CDI ne suffit pas au patron des patrons, qui exerce un chantage à l’emploi : « Avoir un continuum entre CDD et CDI, qui s’adapte aux différents modèles économiques des entreprises, serait pertinent. » En clair, le patronat veut en finir avec un CDI jugé « rigide », qui le dissuade de ce fait d’embaucher. Le contrat de travail unique serait ainsi un remède contre le chômage : en réduisant le risque pour les patrons, on incite ces derniers à créer de l’emploi. Les réformes du droit social ont pourtant injecté une dose de « flexibilisation » sur le marché du travail.Le Medef a un tableau de chasse garni de contrats ultraprécaires, dérivés du CDI. Dernier exemple éloquent : le CDI de chantier, utilisé dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, est étendu à tous les secteurs d’activité sous le doux nom de « CDI d’opération ». C’est une sorte de contrat de louage, comme au XIXe siècle : il peut durer des mois et être rompu à tout moment par le patron. L’employeur ne verse pas de prime de précarité comme pour un CDD.

      De la souplesse, de l’agilité, il y en aura à haute dose dans ce contrat de travail unique. « L’idée, c’est un peu un retour au travail à la tâche », a prévenu Michel Beaugas, secrétaire confédéral FO en charge de l’emploi et de la formation professionnelle. « Les entreprises veulent que le licenciement coûte moins cher, voire rien du tout. Il s’agit de faire des économies supplémentaires », a relevé le responsable syndical.

      La CGT dénonce « un CDD low cost »
      Pour la CGT, Fabrice Angéi dénonce « un CDD low cost qui va précariser les salariés, déjà touchés par la flambée de la précarité sur le marché de l’emploi ». Ces syndicats opposent une fin de non-recevoir à cette proposition du Medef. Le responsable cégétiste, membre du bureau confédéral du syndicat, y voit un « coup de pression » pour contourner le dossier épineux de la taxation des contrats courts. Syndicats et patronat devraient aborder la question de l’instauration d’un système de bonus-malus, visant à pénaliser les entreprises abusant de CDD. Mais le Medef a annoncé ne pas vouloir négocier sur ce point, invoquant la « compétitivité » des entreprises. « La vision centraliste du gouvernement au travers de ce système n’est pas adaptée à l’économie de demain. Si l’État compte l’imposer, ça sera de force », a ajouté Geoffroy Roux de Bézieux. Les pourparlers commencent aujourd’hui au siège parisien de l’Unedic.

      Lola Ruscio

      https://www.humanite.fr/patronat-geoffroy-roux-de-bezieux-un-tueur-au-medef-657748


      https://seenthis.net/messages/369308
      #cqfd #Aurel

  • Chômage : l’Etat pourra changer les règles d’indemnisation, Sarah Belouezzane et Bertrand Bissuel, Le Monde
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2018/04/06/chomage-l-etat-pourra-changer-les-regles-d-indemnisation_5281472_823448.html

    L’arbitrage est tombé, jeudi 5 avril, après plusieurs jours d’incertitudes : les conditions dans lesquelles certains demandeurs d’emploi sont indemnisés pourront être modifiées par #décret. Cette disposition, qui figurait déjà dans une première version de l’avant-projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel » , a été maintenue dans la mouture définitive du texte, mais sous une forme amendée, conséquence de débats nourris au plus haut sommet de l’Etat. Les syndicats y voient une preuve supplémentaire de la reprise en main par les pouvoirs publics de l’#assurance-chômage – avec, comme corollaire possible, un recul des droits au détriment des personnes couvertes par le régime.

    Concrètement, la réforme va conduire les partenaires sociaux à repenser, d’ici à la fin 2018, les règles permettant de cumuler un #salaire et une allocation-chômage. Si les décisions prises par les organisations de salariés et d’employeurs sont jugées insuffisantes, l’exécutif se réserve la faculté de changer les modalités d’indemnisation applicables aux demandeurs d’emploi « en activité réduite » (ceux qui enchaînent des contrats courts et des périodes d’inactivité) ; un décret en Conseil d’Etat pourra alors être pris, « entre le 1er janvier et le 30 juin 2019 », après « concertation » avec le patronat et les centrales syndicales.

    Lire aussi : « “Punir les chomeurs” est surtout un signal politique envoyé par les gouvernements »

    « Devant le fait accompli »

    L’objectif est double, assure une source au sein de l’exécutif : combattre la précarité en incitant les personnes à reprendre un poste et gommer certains effets pervers qui seraient induits par le système actuel (avec cette idée que l’alternance chômage-contrats courts serait, dans certains cas, jugée plus avantageuse qu’un CDD de plusieurs mois ou même qu’un CDI).

    #chômeurs_en_activité-à_temps_réduit

    • cette idée que l’alternance chômage-contrats courts serait, dans certains cas, jugée plus avantageuse qu’un CDD de plusieurs mois ou même qu’un CDI.

      les intérimaires, entre autres précaires apprécieront.
      La source au sein de l’exécutif qui pense que cela va combattre la #précarité devrait aller s’inscrire dans les boîtes d’intérim. La majorité des chômeur·e·s indemnisé·e·s touchent autour de 1 000 €.

    • L’Etat met les partenaires sociaux au chômage, Dan Israël, Mediapart, 6 Avril 2018

      La ministre du travail a présenté vendredi 6 avril la réforme de l’assurance chômage, qui arrivera en juin au Parlement. Les représentants des salariés et du patronat voient leurs marges de manœuvre fortement réduites. Le risque existe que l’État décide seul de réduire les montants accordés aux chômeurs.

      Un texte qui « apporte de nouveaux droits pour tous les actifs ». Et qui permet à l’État de prendre largement les rênes de l’assurance chômage, comme jamais depuis sa mise en place dans sa forme actuelle, en 1958. La ministre du travail Muriel Pénicaud a présenté ce vendredi 6 avril le projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », qui remodèle en profondeur les règles régissant l’assurance chômage, mais aussi la formation professionnelle (lire notre article à ce sujet). Il devrait être présenté en conseil des ministres le 27 avril, puis examiné au Parlement à partir de juin.

      L’une des promesses phares de campagne d’Emmanuel Macron ne sera pas tenue : on reste très loin de la mise en place d’une assurance chômage « universelle ». Le nouveau dispositif devrait permettre à moins de 30 000 indépendants de bénéficier des droits au chômage (sur 2,8 millions d’indépendants, dont 400 000 micro-entrepreneurs). Il devrait aussi s’ouvrir à 20 000 ou 30 000 démissionnaires au maximum (pour 400 000 salariés claquant la porte de leur entreprise tous les ans, et alors que 50 000 d’entre eux sont déjà indemnisés, car ils le font pour des motifs jugés légitimes). Le projet de loi lui-même assume ce recul, puisque le chapitre concerné ne parle dès son titre que d’« une indemnisation du chômage plus universelle ».

      En revanche, un deuxième axe porté pendant la campagne présidentielle sera bien tenu : on assiste à un profond changement de philosophie sur le sujet. Désormais, les syndicats et le patronat ne géreront plus de façon indépendante l’assurance chômage ; c’est l’État qui prend la main sur ses règles et sa gestion. Et il se ménage un champ très large de possibilités d’intervention, que ce soit sur le budget accordé à Pôle emploi chaque année, sur le montant des allocations versées aux demandeurs d’emploi ou sur le profil même des Français qui y auront droit.

      Premier étage de ce chamboulement historique : comme Mediapart l’a déjà détaillé, le gouvernement a engagé une baisse des cotisations sociales payées par les salariés, qui sera compensée par une hausse d’un impôt, la CSG. C’est la fin de ce qu’on nomme le modèle assurantiel : aujourd’hui, quand un salarié touche son salaire, une partie de l’argent versé par l’entreprise est déduit au nom des cotisations chômage. Et c’est à ce titre qu’il pourra toucher des droits au chômage s’il perd son emploi (à condition qu’il ait cotisé au moins quatre mois). En fait, les salariés placent une partie de leur rémunération dans une assurance, qui leur garantit des revenus en cas de chômage. Ces revenus varient en fonction du montant et de la durée des salaires perçus.

      Les cotisations chômage sont donc généralement considérées, par les syndicats mais aussi par les comptables ou même la justice, comme un « salaire différé ». En taillant dans les cotisations salariales et en faisant monter en puissance l’impôt, payé par tous, dont les retraités qui ne bénéficieront jamais du chômage par définition, Emmanuel Macron met un terme à ce système.

      Conséquence logique de cette transformation, et deuxième coup de boutoir porté contre le système actuel, le gouvernement s’invite à la table des négociations, entre les représentants des salariés et du patronat. Jusque-là, les partenaires sociaux négociaient jusque-là entre eux, et uniquement entre eux, les règles d’indemnisation des chômeurs et les conditions y donnant accès. C’est ce qu’on appelle le paritarisme.

      Le gouvernement n’a jamais fait mystère de sa volonté de mettre à bas ce mode de gouvernance, et a longtemps laissé planer le doute sur ses intentions, qui auraient pu aller jusqu’à une disparition totale du paritarisme. La logique est simple. Demain, ce sera l’impôt des citoyens qui financera les allocations chômage, et non plus les allocations des salariés. Il est donc légitime que l’État, qui lève l’impôt et redistribue les sommes récoltées, ait un droit de regard sur les règles de l’assurance chômage. Dit plus brutalement, comme l’a glissé un membre de l’exécutif au Monde, « l’État entre au capital de l’Unédic », l’organisme qui gère les sommes allouées aux chômeurs.
      Devant la levée de boucliers des syndicats, mais aussi du patronat, l’exécutif a finalement adouci son projet. Le texte de loi confirme les partenaires sociaux dans leur rôle, mais les place en quelque sorte sous tutelle : lors de leur négociation annuelle, ils devront respecter une lettre de cadrage leur dictant les sommes qu’ils auront le droit de dépenser, mais aussi, « le cas échéant, les objectifs d’évolution des règles du régime ».

      Interrogée lors de la conférence de presse de ce vendredi sur ce point qu’elle s’était bien gardée de mettre en avant, Muriel Pénicaud a confirmé : « Nous avons finalement choisi de ne pas nationaliser l’AC, mais bien que l’État puisse avoir un rôle de régulateur, ce qui est le cas dans quasiment tous les pays européens », a-t-elle déclaré, estimant « logique qu’il y ait un certain encadrement » des négociations.

      Les partenaires sociaux sont quant à eux loin d’être ravis. « Nous pensons qu’il faut des corps intermédiaires sur tout un tas de sujet. L’assurance chômage est un cas d’école, jugeait il y a quelques jours François Asselin, le dirigeant de la CPME, qui représente les petites entreprises. L’État s’immisce dans des prérogatives qui ne sont pas les siennes, et il le fait déjà sur le dos des partenaires sociaux. » La CPME ne cache pas son irritation, et menace de quitter la table de l’Unédic.

      « Si notre rôle, c’est d’appliquer des consignes et d’être des faire-valoir, à quoi bon rester à la table des négociations ? L’État prend la main, qu’il assume », lâche François Asselin, qui assure arriver « à un point de rupture ». Le Medef, qui représente les plus grandes entreprises, est sur la même ligne, mais la ministre du travail a refusé de répondre aux questions sur ce point, bottant en touche au prétexte que l’équipe dirigeante du Medef arrive en fin de mandat cet été.

      L’inquiétude est partagée par les syndicats. Denis Gravouil, le chef de file de la CGT pendant les négociations, dénonce lui aussi « une mise sous tutelle, qui était déjà actée de fait avec la suppression des cotisations des salariés ». Mais il signale que la situation est au moins clarifiée. « La laisse est courte, mais en un sens, cela a un côté moins hypocrite, juge-t-il. Cela fait longtemps que le gouvernement a un œil sur les négociations, et il est déjà fréquent que les partenaires sociaux discutent avec lui en amont de la signature de leurs accords. »

      Mais ce n’est pas tout, l’État s’est ménagé d’autres possibilités de contrôler les règles de l’assurance chômage. Si en cours d’année après la négociation des partenaires sociaux, les paramètres retenus coûtent trop cher, ou « si la trajectoire financière décidée par le législateur dans le cadre des lois financières évolue significativement », le premier ministre pourra demander aux syndicats et au patronat de revoir leur copie, pour rentrer dans les clous. À notre connaissance, cette possibilité n’avait jamais été mentionnée avant la diffusion de ce texte.

      Et si l’Etat réduisait le montant des allocations chômage ?

      Une autre possibilité de changer les règles par décret crée une très grande méfiance de la part des syndicats. Elle concerne les modifications possibles, par décret, des conditions dans lesquelles certains demandeurs d’emploi sont indemnisés. Cette nouvelle mesure, apparue le 27 mars dans l’avant-projet de loi, s’inscrit dans les débats autour du « bonus-malus », qui pourrait être appliqué aux entreprises en fonction de leur propension à recourir à des contrats courts à répétition, plutôt qu’à des contrats stables.

      Le sujet est majeur : le nombre d’embauches en CDD de moins d’un mois a presque triplé depuis le début des années 2000, et les trois quarts de ces contrats sont des embauches régulières d’un même salarié chez son employeur (notamment dans la restauration et le bâtiment).

      Le gouvernement est resté très mesuré face aux employeurs, qui freinent des quatre fers devant toute régulation potentielle de cette pratique. Les branches professionnelles ont jusqu’à décembre 2018 pour réfléchir à une manière de réduire l’utilisation des contrats courts. Si les résultats obtenus sont jugés insuffisants, le gouvernement annonce alors qu’il pourra utiliser une mesure de rétorsion, en augmentant les cotisations sociales payées par les entreprises qui en abusent.

      Mais en complément, l’exécutif se réserve donc la possibilité de modifier le mode d’indemnisation des demandeurs d’emploi cumulant chômage et revenus du travail, et ce « entre le 1er janvier 2019 et le 30 juin 2019 ». Ces demandeurs d’emploi fournissent une partie des bataillons des catégories B et C, qui oscillent entre salariat et Pôle emploi. D’après nos informations, la Cour des comptes travaille d’ailleurs, officiellement de sa propre initiative, sur un rapport consacré à ces travailleurs, et à leur coût pour l’Unédic.

      Officiellement, ce décret qui arriverait avant la mi-2019, est censé « combattre la précarité », mais aussi supprimer certains « effets pervers » du système actuel, où dans certain cas très limités, alterner chômage et contrats courts rapporte un tout petit peu plus qu’un contrat de plusieurs mois.

      Cette idée était déjà présente dans le programme de campagne d’Emmanuel Macron, détaillé ici. Elle révolte les syndicats, y compris ceux qui analysent avec le plus d’indulgence les réformes impulsées par le président. « Si une branche négocie un accord sur la taxation des contrats courts, elle pourra aussi décider de diminuer les indemnités pour les “permittents” [qui enchaînent les CDD, ndlr]…, anticipe Michel Beaugas, le négociateur en chef de FO. Une forme de contrepartie aux “bonus malus” sur les CDD, c’est en tout cas qui s’amorce. »

      La numéro deux de la CFDT, Véronique Descacq, ne cache pas non plus son mécontentement, dans un article publié sur le site du syndicat. « Vouloir diminuer les droits des demandeurs d’emploi en tapant sur les plus précaires est inacceptable. Ce n’est ni ce que l’on avait négocié ni ce sur quoi le gouvernement s’était engagé », cingle-t-elle. Selon la CFDT, les chômeurs cumulant une partie de leurs allocations avec leur revenu d’activité sont aujourd’hui 854 000 personnes. Des discussions sur ce point ont eu lieu jusqu’au dernier moment entre le ministère du travail, Bercy et l’Élysée, mais la mesure a été maintenue.

      La crainte des représentants des salariés est simple : en se laissant la possibilité de réduire l’indemnisation des demandeurs d’emploi qui travaillent un peu durant le mois, l’État cherche tout simplement à contenir l’enveloppe des dépenses, au moment où des démissionnaires et des indépendants pourront entrer dans le système.

      Au-delà de ce simple cas, certains observateurs craignent de toute façon que l’État, qui aura désormais les mains presque libres, décide dans les mois ou années à venir de réduire les montants offerts aux demandeurs d’emploi. Puisqu’ils n’auront plus cotisé pour avoir le droit au chômage, il devient moins compliqué d’assimiler les allocations qui leur sont versées à un filet de sécurité minimal. Filet qui pourrait être égal pour tous, quelles que soient les conditions d’emploi précédentes. Et qui pourrait surtout être ajusté à la baisse, en cas de difficultés budgétaires. La CGT rappelle qu’« en Allemagne, la définition légale de l’allocation chômage est une “garantie du minimum vital pour ceux qui n’ont aucune autre ressource”, c’est-à-dire aucune épargne ».

      Le syndicat trouve un allié inattendu sur ce point, à Pôle emploi. Un de ses hauts responsables avoue une certaine inquiétude, dans une période où le nombre des chômeurs de catégorie A pourrait diminuer de façon conséquente. « Avec le système actuel, ces nouveaux salariés auraient payé des cotisations qui auraient alimenté les caisses de l’Unédic, et permis de constituer des réserves. Désormais, c’est l’État qui encaissera plus de CSG, et rien ne l’obligera à redistribuer ensuite cet argent vers le système du chômage », alerte ce spécialiste.

      Des craintes qu’Aurélien Taché, le député qui sera le rapporteur du projet de loi sur l’assurance chômage à l’Assemblée, ne cherche guère à dissiper. Dans un entretien à Mediapart le 28 mars, le parlementaire assumait que dans le nouveau système, « le niveau de protection est fixé chaque année dans le projet de loi de finances » et que ce sont les députés « qui fixeront le niveau » de l’enveloppe dédiée à l’assurance chômage (comme ils le font pour les dépenses de santé).

      Et en cas de crise financière, lorsque l’État aura besoin de ressources et sera tenté de couper dans la protection sociale pour équilibrer son budget, comment garantir cette enveloppe ? Ce sera impossible. « Si une crise a lieu, il y a une majorité en responsabilité et qui devra faire des choix », répond Aurélien Taché. Ouvrant du même coup la porte à des inquiétudes sans fin pour les demandeurs d’emploi et ceux qui les défendent.

      #crevures

    • Chômage : les « permittents » dans le viseur de l’exécutif, Amandine Cailhol
      https://www.liberation.fr/france/2018/09/19/chomage-les-permittents-dans-le-viseur-de-l-executif_1679896

      Pour diminuer le déficit de l’Unédic, le gouvernement veut revoir les règles d’indemnisation des personnes en « activité réduite », cumulant emploi et allocation. Il a invité syndicats et patrons, ce vendredi au ministère du Travail, pour cadrer les futures négociations.

      C’est la nouvelle bête noire de ceux qui veulent faire fondre la dette de l’Unédic. Après les intermittents du spectacle, longtemps accusés de plomber le budget de l’assurance chômage, place aux « #permittents », nouvelle étiquette pour pointer une autre catégorie de #chômeurs : ceux qui sont à la fois en emploi et au Pôle Emploi. Les mêmes que l’on retrouve dans les catégories B (demandeurs d’emploi ayant travaillé moins de 78 heures dans le mois) et C (plus de 78 heures) des chiffres, désormais trimestriels, du Pôle Emploi.

      Ils sont au total 1,7 million dans cette situation, en « activité réduite », selon le jargon de l’agence. Dans le lot, 865 000 bénéficient de l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE), tout en percevant un salaire. Parmi eux, 280 000 sont en contrat de moins d’un mois. Des nantis ? Pas vraiment. En moyenne, leur rémunération, une fois l’addition faite, atteint 1 320 euros. Mais le gouvernement a demandé aux partenaires sociaux de revoir les règles de calcul de leur d’indemnisation. Objectif : « Faire en sorte que l’accès à l’emploi durable soit toujours plus intéressant pour tous. » Et bien sûr, « réduire substantiellement l’endettement du régime ». Invités, vendredi, à une réunion au ministère du Travail, syndicats et organisations patronales vont, dans la foulée, se voir remettre une lettre de cadrage, afin de borner leur négociation.

      Qu’est-ce que l’activité réduite ?

      D’abord mis en place de manière dérogatoire en 1962, avant d’être généralisé dans les années 80, le dispositif de l’activité réduite autorise les demandeurs d’emploi à reprendre une activité salariée tout en bénéficiant d’une partie de leurs allocations, et en reportant les droits non consommés dans le temps. L’idée est de permettre aux chômeurs de garder un pied dans le monde du travail, en les incitant à reprendre une activité même si celle-ci est moins bien rémunérée que la précédente. De quoi faire, aussi, baisser la courbe du chômage, du moins celle, très commentée, de la catégorie A, celle des chômeurs sans aucune activité. Concrètement, quel que soit le nouveau contrat qu’il signe (CDD, CDI…), un chômeur continue de percevoir une partie de son allocation, déterminée par un calcul spécifique.

      Seule condition, le cumul ne doit pas dépasser sa rémunération passée. C’est le cas de Laurence, dont la situation est détaillée sur le site de l’Unédic. Avant d’être au chômage, elle percevait tous les mois un salaire brut de 2 100 euros. Elle a donc droit à une allocation mensuelle de 1 135 euros. Quand elle reprend une activité, quelques jours par semaine, pour un salaire de 950 euros brut par mois, le Pôle Emploi fait ses petits calculs et ne lui verse plus que 469 euros. Elle perçoit donc 1 403 euros au total. En parallèle, elle reporte 18 jours de droits au chômage, soit la part non versée de son allocation mensuelle.

      Qui sont les « permittents » ?

      Entre 2012 et 2017, le nombre des chômeurs en activité réduite a augmenté de 60 %. En 2017, l’institut statistique du ministère du Travail, la Dares, s’est intéressé à eux. Selon Pauline Gonthier et Klara Vinceneux, les deux auteures de cette étude, ils sont 8 % à s’inscrire durablement dans une activité réduite. Parmi eux : surtout des femmes en couple, avec enfants, qui perçoivent une faible rémunération. Ou encore des seniors. Selon l’Unédic, en 2014, ces allocataires indemnisés et relevant du régime général (hors intermittents du spectacle, donc) étaient en grande partie issus du secteur des services à la personne et à la collectivité, du commerce, de la vente et de la grande distribution, et en troisième place, des métiers de service aux entreprises. Et étaient, pour 75 % d’entre eux environ, titulaires d’un bac ou d’un niveau de formation inférieur.

      Quel est l’effet de l’activité réduite sur l’emploi ?

      Le bilan est mitigé, notent Pauline Gonthier et Klara Vinceneux. Les deux auteures de la Dares évoquent des « effets ambigus de l’activité réduite sur le retour à l’emploi ». Explication : « Si la pratique d’une activité réduite paraît améliorer en moyenne la vitesse de retour à l’emploi, elle enfermerait également certains individus dans des activités précaires ou sous qualifiées. » Il y a donc pour certains un risque d’« installation dans l’activité réduite qui semble plus subie que choisie ». Et de rappeler les résultats d’une enquête de l’Unédic réalisée en 2012 : 51,4 % des allocataires en activité réduite depuis huit mois déclaraient alors vouloir changer de situation.

      Pourquoi a-t-elle explosé ?

      C’est un peu le serpent qui se mord la queue. Certes, l’activité réduite est un dispositif créé pour répondre à une transformation du marché du travail et au développement des contrats courts. Mais pour certaines économistes, à l’instar de Pierre Cahuc et Corinne Prost, la multiplication de ces contrats précaires a pu, aussi, être favorisée par les règles de l’assurance chômage sur la « permittence ». En 2015, les deux auteurs ont tiré la sonnette d’alarme dans une note du Conseil d’analyse économique. Ils y pointent l’explosion de l’emploi de courte durée. Ainsi, notent-ils, entre 1980 et 2011, la durée moyenne d’un CDD a été divisée par trois pour atteindre cinq semaines. « Il s’agit d’une transformation profonde, les CDD longs étant remplacés par de multiples CDD courts », poursuivent-ils. Plus grave encore : « En 2011, plus de 70 % des embauches en CDD sont des réembauches chez un ancien employeur. » Parmi les facteurs ayant pu favoriser ce développement : la création, en 1990, des CDD d’usage, des contrats reconductibles autorisés dans plus d’une vingtaine de secteurs et représentant 60 % des contrats courts. Depuis, les choses ont empiré : en 2017, 30 % des CDD ne durent qu’une seule journée.

      L’étude de la Dares pointe les mêmes mécanismes, tout en restant prudente : « Il est possible que certaines entreprises utilisent l’activité réduite de façon stratégique comme une subvention publique aux emplois de très courte durée ou comme une forme de chômage partiel intégralement financé par l’assurance chômage. » Pour d’autres, les règles d’indemnisation de l’activité réduite feraient la joie de quelques chômeurs suspectés d’adopter des comportements opportunistes. En résumé, ces derniers pourraient gérer leur droit à être indemnisé comme un stock qu’il s’agirait d’optimiser. « Les demandeurs d’emploi en activité réduite ne sont pas des profiteurs de la permittence. Ce sont les employeurs qui abusent des contrats courts », tranche Denis Gravouil, de la CGT. « Difficile de mettre l’opprobre sur ces chômeurs, alors qu’on ne leur offre que cela », note aussi Jean-François Foucard, du syndicat CGC, même s’il n’est pas opposé à une réflexion sur le sujet. « Beaucoup de gens préfèrent garder leurs CDD et refusent de signer un CDI », assure, côté patronal, Jean-Michel Pottier, de la CPME. Et de nuancer : « Parfois, c’est un intérêt partagé entre salarié et employeur. » Deux lectures que l’on retrouve dans le double discours de l’exécutif, tapant à la fois sur les doigts des entreprises et des salariés.

      Combien coûte-t-elle ?

      Les masses financières en jeu pour indemniser les personnes en activité réduite sont « modérées », selon l’Unédic, soit 5,4 milliards d’euros. C’est-à-dire 15 % de l’ensemble des dépenses annuelles d’allocation de l’assurance chômage (36 milliards d’euros). Ces dépenses devraient diminuer en 2018, puisque les règles de calcul de l’allocation qui, selon la Dares, favorisaient les chômeurs réalisant des contrats courts, ont déjà été modifiées en 2017 afin de remettre de l’équité.

      Quelles sont les évolutions possibles ?

      La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, l’a promis : « Personne n’imagine supprimer » le cumul salaire et chômage. Mais les règles de calcul vont à nouveau être revues. La locataire de la rue de Grenelle a d’ailleurs fait ajouter cette possibilité dans son projet de loi parcours professionnel, se réservant le droit de « modifier les mesures d’application relatives […] à l’activité réduite » par décret, si jamais les propositions des partenaires sociaux lui apparaissaient décevantes. Une disposition que la CFDT avait essayé, sans succès, de faire sauter, jugeant les règles de l’activité réduite « indispensables » alors que « la reprise de l’activité ne se traduit pas encore en emplois de qualité ».

      Le flou demeure toutefois sur les modalités privilégiées par l’exécutif. Les paramètres de calcul pourraient par exemple être changés pour réduire le montant de l’indemnité. « Mais rien n’est fait. En 2017, on a changé les règles pour que cela soit équitable. Si on va plus loin, on va créer une pénalité sur la permittence », pointe le représentant de la CPME, qui s’étonne qu’un nouveau paramétrage soit sur la table, alors « que l’on manque encore de recul » sur les dernières modifications. Autre option : comme ce fut le cas par le passé, le cumul pourrait être limité dans le temps. De quoi inquiéter les syndicats, soucieux de ne pas voir certains chômeurs tomber plus encore dans la précarité. D’autres redoutent qu’en rendant moins incitatif le cumul, des chômeurs préfèrent ne pas travailler et refusent les « petits boulots ». Quant au bonus-malus, c’est-à-dire la modulation des cotisations patronales évoquée par le gouvernement afin de pénaliser les entreprises qui abusent des contrats courts, il a la faveur des syndicats. Mais pas du patronat, qui menace de ne pas négocier si le sujet n’est pas écarté.

      #emploi_précaire #revenu

  • Contrôle des chômeurs : ce que le gouvernement prévoit - L’Express L’Entreprise
    https://lentreprise.lexpress.fr/rh-management/formation/chomage-le-gouvernement-allie-fausse-souplesse-et-vraies-sancti

    L’Express se permet des intertitres bien impertinents…

    Un journal de bord pour mieux fliquer ?
    Le gouvernement assure que l’un de ses objectifs est de « renforcer l’accompagnement » des chômeurs. Il met ainsi en avant la création d’un « journal de bord » obligatoire expérimenté dès juin 2019 dans deux régions choisies par Pôle emploi. Ce carnet permettra au demandeur d’emploi de « gagner en efficacité » et de piloter lui même ses recherches. « Sous couvert d’accompagnement et de souplesse, il y a une vraie dimension d’auto-contrôle », estime le négociateur FO, Michel Beaugas. Un avis partagé par son homologue de la CGT, Denis Gravouil. « En rendant cette nouvelle étape obligatoire, on va demander aux chômeurs de donner les détails pour mieux les fliquer et les évaluer en permanence », estime-t-il. Faudra-t-il renseigner les rendez-vous, les envois de CV, les offres auxquelles il a postulé ? 

    Pour le moment, le gouvernement n’a pas précisé ce qu’il faudra recenser exactement. Jusqu’à présent, les personnes inscrites à Pôle emploi pouvaient remplir les étapes de leur recherche d’emploi sur le site La bonne boite. Mais cela relevait du simple volontariat. Désormais, ce sera obligatoire. « Quid des gens qui retrouvent du travail hors Pôle emploi - et ils sont nombreux -, s’interroge Denis Gravouil. Va-t-on juger qu’ils n’ont pas donné assez d’éléments précis dans leur carnet de bord ? Ils vont devoir faire très attention à la façon dont ils remplissent ce carnet. Sans parler, bien entendu, de la fracture numérique, qui créera des files d’attente dans certaines agences autour des rares ordinateurs. » Côté ministère du Travail, on insiste sur le fait que ce journal ne sera pas un instrument de contrôle. « Ce sont deux choses totalement différentes, martèle la rue de Grenelle. On assume l’idée de plus contrôler mais le carnet ne sera pas utilisé pour ça. Il va servir à observer le comportement et les méthodes de recherche des demandeurs d’emploi pour les aider. Peut-être que ça n’est pas le Graal pour tous les profils inscrits à Pôle emploi mais nous évoluerons aussi en fonction des résultats de l’expérimentation. »

    • juste compliquer les démarches pour faire décrocher ceux qui lisent mal
      Vu l’autre jour les obligations et formulaires à remplir pour avoir une aide pour payer une complémentaire santé (c’est même pas la CMU c’est juste une aide), c’est parfaitement incompréhensible. D’autant que la plupart des assurances mutuelles proposées sont rattachées à des banques. Si si, attends je te retrouve ça
      Comment faire compliqué
      https://www.ameli.fr/assure/droits-demarches/difficultes-financieres/complementaire-sante/aide-paiement-complementaire-sante

      Ne crois pas que ce soit définitif …

      L’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS) est accordée pour 1 an et son renouvellement n’est pas automatique.

      Entre 2 et 4 mois avant la fin de vos droits, adressez à votre caisse d’Assurance Maladie une nouvelle demande d’ACS, accompagnée des pièces justificatives, selon les mêmes modalités que pour votre première demande.

      Tu comprends qu’ensuite le personnel de la sécu s’arrache les cheveux parce qu’il y a carrément des gens qui renoncent à se soigner mais qui à un moment se retrouvent bien obligés d’en passer par là. Là, le chômage et l’ANPE c’est une façon d’exclure encore pire.

      #soumission
      #guerre_aux_pauvres
      #bac_plus_5
      #cynisme_administratif

  • Assurance-chômage : une nouvelle échelle de sanctions annoncée
    http://www.lemonde.fr/politique/article/2018/03/19/assurance-chomage-une-nouvelle-echelle-de-sanctions-annoncee_5273359_823448.

    L’équipe de la ministre du travail a présenté aux syndicats les changements des procédures d’accompagnement des personnes sans emploi.

    Lors d’une réunion avec les huit organisations syndicales et patronales représentatives, le directeur de cabinet de la ministre du travail a présenté, lundi 19 mars, les principaux points de la réforme de l’assurance-chômage.

    Une nouvelle échelle de sanctions. Selon plusieurs sources syndicales, une nouvelle échelle de sanctions contre les demandeurs d’emploi qui ne respectent pas leurs obligations, allant jusqu’à quatre mois de suppression d’allocations, est prévue. Certaines ont disparu – comme celles pour refus d’une formation –, d’autres ont été allégées – quinze jours au lieu de deux mois en cas d’absence à un entretien.

    Pour les autres manquements, comme le fait de ne pas chercher activement un emploi ou de refuser une « offre raisonnable d’emploi », les sanctions seront plus échelonnées : allocations suspendues pendant un mois au premier manquement, pendant deux mois au deuxième manquement et pendant quatre mois au troisième manquement. Par ailleurs, au deuxième et troisième manquement, l’allocataire se verra aussi définitivement amputé d’une partie de ses droits.

    Il s’agit d’un « renforcement » de l’échelle des sanctions, ont réagi Michel Beaugas (FO) et Yvan Ricordeau (CFDT). Quant à Denis Gravouil (CGT), il a déploré un « blanc-seing donné à Pôle emploi pour accélérer les radiations ». Au contraire, Eric Courpotin (CFTC) et Jean-François Foucard (CFE-CGC) ont, eux, mis l’accent sur le fait que certaines sanctions étaient allégées ou supprimées.

    Le transfert des pouvoirs de répression du préfet. Confirmant les informations du Monde, il ressort de la réunion avec les services de Mme Pénicaud que Pôle emploi pourra décider lui-même une suppression de droits, alors que c’était jusque-là de la compétence du préfet.

    L’« offre raisonnable d’emploi » revue. Concernant l’« offre raisonnable d’emploi », qui est aujourd’hui très précisément définie dans le code du travail, elle sera plus souple à l’avenir, selon les sources syndicales. Plus aucune règle ne serait définie dans le code du travail et l’offre « raisonnable » serait déterminée en concertation entre le demandeur d’emploi et son conseiller, ont-elles déclaré.

    Objectif fixé par Muriel Pénicaud : rendre « pleinement applicable » une loi, adoptée en 2008, mais qui n’avait quasiment pas été suivie d’effets (77 chômeurs radiés en 2013 pour ce motif, soit 0,01 % des 544 000 radiations totales).

    La CGT a dénoncé une « logique de coercition », qui contraindra les chômeurs à « accepter des boulots dégradés ». La CFDT a estimé « qu’entre accompagnement et contrôle l’accent est quand même mis sur le contrôle ».

    Un carnet de bord expérimenté. Le ministère du travail prévoit qu’à partir de mi-2019 Pôle emploi expérimentera pendant un an dans deux régions, déterminées dans un deuxième temps, un « carnet de bord » numérique, où les demandeurs d’emploi devront renseigner tous les mois leurs actes de recherche d’emploi.

    Aujourd’hui, les inscrits à Pôle emploi doivent actualiser leur situation tous les mois, en déclarant qu’ils cherchent toujours un travail mais n’ont pas d’obligation de détailler leur recherche d’emploi.

    Cadrage financier de l’Unédic en amont. Enfin, concernant la gouvernance de l’assurance-chômage, les partenaires sociaux continueront d’en définir les règles mais dans un cadre plus contraint, selon les sources syndicales. Le gouvernement leur enverra en amont des négociations une « lettre de cadrage », notamment financier.

    Assurance-chômage : les modalités du contrôle se précisent
    A l’avenir, les manquements à une première convocation à Pôle emploi seront moins sanctionnés que la recherche peu active d’un travail. LE MONDE | 16.03.2018, Sarah Belouezzane et Bertrand Bissuel

    Muriel Pénicaud n’a pas tout dit sur la réforme de l’assurance-chômage. Lorsqu’elle s’est exprimée à ce sujet, le 2 mars, la ministre du travail n’a dévoilé ses intentions que dans trois domaines : l’indemnisation des travailleurs indépendants, celle des salariés démissionnaires et la lutte contre la précarité. Avec des arbitrages qui reprennent l’accord national interprofessionnel (ANI), finalisé le 22 février par les partenaires sociaux. Mais l’inconnue restait entière sur deux autres chapitres, que les organisations patronales et syndicales n’avaient pas véritablement traités dans leur ANI : le contrôle des demandeurs d’emploi et la gouvernance de l’Unédic – l’association paritaire qui gère le régime. On y voit désormais un tout petit peu plus clair sur ces deux volets.
    S’agissant des procédures qui visent à accompagner le chômeur et à vérifier qu’il cherche bien un poste, le projet de l’exécutif est clair : « Nous voulons rendre plus rationnel et plus cohérent le tableau des sanctions applicables, explique-t-on à Matignon. A l’heure actuelle, une personne qui ne donne pas suite à une convocation de son conseiller emploi est plus sévèrement sanctionnée que si elle fait peu ou aucun effort pour trouver du travail. Cette logique-là sera inversée. »
    En clair, la « punition » sera moins lourde pour un premier rendez-vous manqué : la personne concernée serait, selon nos informations, radiée des listes durant deux semaines (contre deux mois aujourd’hui). A l’inverse, celui qui traîne des pieds, sans raison valable, pour reprendre une activité verrait son nom disparaître des listings de Pôle emploi pendant plus longtemps (deux mois alors que c’est généralement deux semaines, à l’heure actuelle, quand il s’agit du premier manquement). En cas de récidive, les « coups de bâton » seraient de plus en plus vigoureux.

    Règles inutiles
    Autre changement de taille : le transfert des pouvoirs de répression du préfet. Aujourd’hui, celui-ci peut supprimer ou réduire l’allocation-chômage dans plusieurs cas de figure : par exemple si le chômeur n’accomplit aucun « acte positif et répété en vue de retrouver » un travail ou s’il repousse à deux reprises, « sans motif légitime (…), une offre raisonnable d’emploi » (ORE). Mais l’expérience montre que ce dispositif est resté quasiment lettre morte. Les prérogatives des services de l’Etat devraient être confiées à Pôle emploi.
    Une innovation supplémentaire est à l’ordre du jour : demander aux chômeurs de remplir une sorte de carnet de bord qui recenserait leurs démarches afin de décrocher un contrat. L’objectif affiché est d’améliorer l’accompagnement et d’éviter que les intéressés ne se découragent.
    Au passage, l’exécutif envisage de nettoyer les textes en supprimant des règles jugées inutiles, car inappliquées ou inapplicables. Plusieurs motifs de radiation, actuellement prévus dans le code du travail, devraient ainsi disparaître : par exemple quand le chômeur refuse de suivre une formation ou une proposition de contrat aidé. De même, la définition de l’ORE pourrait être modifiée : celle-ci repose sur plusieurs « éléments constitutifs » (tels que le niveau de rémunération ou la distance à parcourir entre le domicile et le lieu de travail), qui sont susceptibles d’être révisés au bout de trois, six ou douze mois ; à l’avenir, ces paramètres seront conservés, mais ils ne devraient plus s’appliquer de façon aussi mécanique.
    Une confirmation : les agents de Pôle emploi, qui s’assurent que le chômeur recherche bien un poste, seront plus nombreux, comme l’avait annoncé Emmanuel Macron dans son programme. De deux cents, leurs effectifs devraient passer à six cents, puis atteindre le millier, à terme.
    Au niveau du pilotage de l’Unédic, le gouvernement a aussi une vision claire de ce qu’il conviendrait de faire. En début de campagne électorale, M. Macron avait émis de gros doutes sur la capacité des partenaires sociaux à prendre les mesures qui s’imposent pour résorber la dette de l’Unédic (estimée à 33,6 milliards d’euros fin 2017). Il avait alors menacé de nationaliser le régime, évinçant au passage le patronat et les syndicats – ou les reléguant au statut de pot de fleurs dans le conseil d’administration. C’est finalement une option bien plus « douce » qui devrait être retenue. « L’une des pistes à l’étude consisterait à instaurer un système assez proche de celui qui prévaut pour le régime des intermittents du spectacle, avec un cadrage financier en amont : si les partenaires sociaux s’en écartent, alors l’Etat reprend la main », précise-t-on à Matignon.

    « Pis-aller »
    Dans ce schéma, les organisations d’employeurs et de salariés ne se borneraient pas à apposer leur paraphe sur un document prérédigé : ils auraient « tout de même de la marge [de manœuvre] », affirme une source au sein de l’exécutif. Et pourraient continuer à peser sur le cours des choses – à condition que leurs décisions soient en phase avec les objectifs financiers tracés par le gouvernement.
    « C’est un pis-aller, estime un haut gradé d’une centrale syndicale. Je préfère ça à une présence accrue de l’Etat. » Véronique Descacq, numéro deux de la CFDT, s’interroge, de son côté : « Si on est de bonne humeur, on peut y voir de la latitude laissée aux partenaires sociaux. Si on est de mauvaise humeur, on peut considérer que le cadrage ne va sûrement pas nous laisser faire grand-chose. » Selon elle, « tout dépendra du détail du cadrage, et ensuite de la pratique » : « Si on nous baisse, par exemple, drastiquement le budget et qu’on nous dit de négocier dans ce cadre, et donc de baisser les prestations, on sera prêts à rendre les clés du camion nous-mêmes. »
    Pour réduire le recours aux contrats courts, le projet de Mme Pénicaud reste inchangé par rapport à ce qu’elle a précisé, le 2 mars : les branches devront négocier et, si elles n’adoptent aucune disposition satisfaisante, un bonus-malus entrera en vigueur pour majorer les cotisations des employeurs qui abusent des CDD et diminuer celles qui pèsent sur les patrons vertueux. Se pose toutefois une difficulté : qu’adviendra-t-il si certaines branches jouent le jeu et d’autres non ? Il n’y a pas de solution de moyen terme : au nom du principe d’égalité, « le bonus-malus concerne tout le monde ou personne », admet un conseiller.
    Pour aborder tous ces points délicats, la ministre du travail organise, lundi 19 mars, une rencontre multilatérale avec les huit organisations syndicales et patronales représentatives. Les débats promettent d’être animés.

    #chômeurs #contrôle_de_la_recherche_d'emploi #offre_raisonnable_d’emploi #sanctions #radiations

    • Contrôle des chômeurs : le gouvernement abat ses cartes
      https://www.lesechos.fr/economie-france/social/0301455816576-controle-des-chomeurs-le-gouvernement-abat-ses-cartes-2162421

      Concrètement, deux cas de radiation vont être supprimés : refus de formation et de visite médicale (qui l’était de fait). Quand un demandeur d’emploi ne se rendra pas à une convocation de son conseiller, la sanction va être réduite de 2 mois à 15 jours de privation d’allocation. Mais pour tous les autres cas, une nouvelle échelle des sanctions se dessine : un mois de radiation (et donc de suspension de l’allocation) pour un premier manquement, 2 mois pour un deuxième manquement (avec diminution d’autant des droits au chômage), 4 mois pour le troisième manquement (idem).

      Ce sera le cas notamment si le demandeur d’emploi n’arrive pas à prouver qu’il cherche activement du travail . Mais aussi s’il refuse une offre raisonnable d’emploi dont la définition actuelle - basée sur la distance entre le domicile et le lieu de travail, le salaire ou encore l’ancienneté au chômage - passe à la trappe. Jugée trop rigide - elle est de fait inappliquée - elle sera personnalisée. Les paramètres seront repris dans un « contrat entre le demandeur d’emploi et son conseiller », a indiqué Michel Beaugas pour FO qui pointe un risque de « rupture d’égalité sur le territoire ».

      Un journal de bord numérique

      « On va clairement vers un durcissement », a abondé Denis Gravouil pour la CGT. Seul Jean-François Foucart pour la CGC a tempéré, ce qui ne l’a pas empêché de critiquer le fait que Pôle emploi allait être juge et partie en concentrant tous les pouvoirs de sanctions.

      Le volet accompagnement présenté durant la séance n’a pas non plus fait bondir de joie les syndicats. Le ministère du Travail veut expérimenter un journal de bord numérique dans lequel chaque chômeur devra inscrira ses démarches tous les mois, ce qui est déjà un peu le cas. Côté pile, son conseiller pourra mieux le guider. Mais côté face, s’il ne l’actualise pas, alors l’échelle des sanctions s’appliquera. Pour Yvan Ricordeau (CFDT) « un carnet de bord c’est très bien [sic], mais il sera très lié à la façon dont seront effectués les contrôles ».

    • l’article (de challenges, je vous rassure je suis pas abonné ! mais le paywall est comme celui de libé, hihi, trop facile) :
      Est-ce que le contrôle des chômeurs est efficace en terme de taux de reprise à l’emploi ?

      Des travaux académiques, notamment en Suisse et aux Pays-Bas, ont montré qu’un système de contrôle crédible avait bien un impact positif sur les sorties du chômage. C’est vrai à la fois pour ceux qui sont sanctionnés et pour l’ensemble de demandeurs d’emploi car la menace d’un contrôle a un effet incitatif.

      Quelles sont les conditions pour que le dispositif puisse être efficace ?

      Dans un système de contrôle crédible et efficace, le taux de sanction est finalement faible. Les critères doivent être bien définis et basés sur des éléments facilement observables. Ainsi le critère de refus d’offre raisonnable est trop flou. Dans certains pays, comme le Danemark, le demandeur d’emploi doit aller chaque semaine sur le site de l’agence pour l’emploi pour chercher des offres, il doit y répondre régulièrement, il doit mettre à jour son CV et doit enregistrer sur internet les offres auxquelles il a postulé, les entretiens qu’il a eu etc. En outre, il ne peut se soustraire aux offres de formations qui lui sont faites.

      Faudrait-il améliorer l’accompagnement des chômeurs en plus de les contrôler ?

      Le contrôle seul n’est pas la panacée car il peut avoir des effets négatifs sur la qualité des emplois retrouvés, notamment sur leur stabilité : la récurrence au chômage peut augmenter. C’est pourquoi il est absolument nécessaire de lier accompagnement et contrôle. Contrôler n’est pas sanctionner, c’est rappeler au demandeur d’emploi ce qu’est une vraie recherche d’emploi, c’est instaurer un certain nombre de points de repères sur ce que l’on attend de lui. Il faut aussi identifier les sources de découragement, donner des conseils sur des métiers différents de ceux auxquels le demandeur d’emploi pourrait spontanément penser et mobiliser les outils adéquats : formations, aides psychologiques voir dispositif d’emplois aidés dans certains cas.

      Est-ce que les agents de Pôle emploi sont prêts à le mettre en œuvre ?

      Séparer contrôle et accompagnement n’est pas la meilleure des choses à faire. Cependant, il faut entendre qu’il est difficile pour les agents de Pole Emploi de se transformer en contrôleurs du jour au lendemain. C’est sans doute pour cela qu’une solution basée sur des agents dédiés au contrôle et d’autres à l’accompagnement a la faveur de l’Etat. Cette solution ne peut être que temporaire, il faut progressivement comprendre le contrôle comme une dimension de l’accompagnement. Le conseiller est le mieux à même de faire les deux car il a une relation directe avec le demandeur d’emploi.