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  • Affaire Baupin : le procès des plaignantes et de la presse - Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/010219/affaire-baupin-le-proces-des-plaignantes-et-de-la-presse

    Douze personnes, dont des journalistes de Mediapart et de France Inter, vont être jugées à partir de lundi pour diffamation à la suite d’une plainte de Denis Baupin. Dans une enquête publiée par les deux médias en 2016, plus d’une dizaine de femmes témoignaient des violences sexuelles qu’elles avaient subies de la part de l’ancien député. Mediapart a pu consulter le rapport d’enquête préliminaire, dans lequel de nouveaux témoignages apparaissent, dont celui de Cécile Duflot.

    La loi sur la prescription est vraiment bien faite pour garantir l’impunité des agresseurs. Comment ces femmes peuvent-elles prouvé qu’elle ne diffament pas si la precription interdit à la justice de faire la part des choses. Les défenseurs de la prescription prétendent que les victimes seraient très peu nombreuses à obtenir justice, mais ca permettrais aux victimes d’être protégé du harcelement judiciaire comme c’est le cas ici. Le minimum serait qu’en cas de préscription les procès en diffamation qui les accompagnent soient eux aussi prescrits de fait.

    #patriarcat #injustice #prescription #domination_masculine

    • Le procès intenté par Denis Baupin se retourne contre lui
      https://www.mediapart.fr/journal/france/060219/le-proces-intente-par-denis-baupin-se-retourne-contre-lui

      Mardi après-midi et jusque tard dans la soirée, les dépositions poignantes se succèdent. Laurence Mermet, qui a longtemps milité et exercé des responsabilités de communicante dans la galaxie écologiste, explique à la barre pourquoi elle a fini par tout plaquer. « En mai 2016, j’écoute France Inter, et j’entends des femmes témoigner sur les agissements de Denis Baupin. Je deviens blême. Les choses remontent. J’entends parler des femmes que je ne connais pas, sauf une ; je suis stupéfaite, et en même temps je ne suis pas surprise. Je réfléchis, et je décide de contacter volontairement Mediapart. »

      Laurence Mermet poursuit. « Jusque-là, mon histoire me semblait dérisoire. J’avais classé ça comme un geste déplacé. » Un jour, alors qu’elle travaillait à la mairie de Paris (après avoir été l’attachée de presse de Dominique Voynet au ministère de l’environnement), elle a eu la surprise de subir une caresse dans la nuque de la part de Denis Baupin. Geste « d’une grande douceur et d’une grande violence », car non consenti, explique-t-elle.

      « La nuque est un lieu de mon corps extrêmement intime. Je me suis raidie, puis j’ai eu les jambes flageolantes. Denis Baupin était quelqu’un que j’admirais et que je respectais, il était mon supérieur hiérarchique. Je me suis dit : tu es pas dans la merde… Je n’étais pas à l’aise à mon poste à la mairie de Paris, et ça a participé à achever de me déstabiliser. J’ai fini par quitter ce monde-là au bout de quelques mois. C’était une énorme déception. J’ai quitté Paris et j’ai changé de vie. »

      Sandrine Rousseau est maintenant à la barre. Cette universitaire a exercé d’importantes responsabilités politiques (porte-parole d’EELV et vice-présidente de conseil régional), avant de tout envoyer balader elle aussi. Lors d’une réunion de son parti, Denis Baupin l’a subitement plaquée contre un mur, lui a empoigné les seins et a essayé de l’embrasser, explique-t-elle. « Je l’ai repoussé, j’étais flageolante. J’animais une réunion ce jour-là, et rien ne m’avait préparée à ça », raconte Sandrine Rousseau. Elle a confié cette scène à plusieurs responsables de EELV, en vain. Quand un micro s’est tendu, elle a parlé à visage découvert.

      « Ça a bouleversé ma vie. J’ai quitté la politique. Je l’ai vécu de façon très violente. Surtout qu’au congrès qui a suivi l’article de Mediapart et de France Inter, tous les postes régaliens du parti ont été confiés à des hommes », poursuit Sandrine Rousseau. Elle subit maintenant un feu nourri de questions hostiles de la part d’Emmanuel Pierrat. Il lui faut se justifier sur tout, expliquer pourquoi elle a poursuivi un temps des activités politiques aux côtés de son agresseur, pourquoi elle a répondu à ses SMS par des smileys, pourquoi elle n’a pas porté plainte.

      « On est en 2011. À l’époque, les cadres du parti me renvoient l’idée que ça existe, et que d’en parler pourrait me nuire. Quel était l’intérêt de me mettre en danger avec une plainte ? Je n’avais aucune chance. Et je n’avais pas l’idée à l’époque que c’était une agression sexuelle. On met du temps à comprendre ce qui s’est passé, on ne met pas les bons mots dessus, même si j’ai toujours su que c’était inadmissible. »

      En larmes, Sandrine Rousseau explique que cette affaire lui a fait quitter la politique et a aussi provoqué son divorce. « On ne touche pas impunément le corps des femmes sans qu’il y ait des conséquences. On est ramenée à l’état d’objet, ça laisse des traces, des cicatrices. Ce n’est pas des gestes anodins. Plusieurs femmes ont quitté la politique à cause de comportements comme celui-là. C’est un scandale. »

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      Affaire Baupin : le procès des plaignantes et de la presse Par Lénaïg Bredoux et Michel Deléan
      Usul. Affaire Baupin : l’invraisemblable procès Par Morgane Jacob, Rémi Liechti et Usul
      Notre dossier : l’affaire Baupin Par La Rédaction De Mediapart

      Au tour d’Elen Debost d’être interrogée. Entrée en politique chez les Verts notamment pour leur « obligation de féminisme », elle est aujourd’hui élue écologiste au Mans. Quand elle commence à s’impliquer dans la vie interne de son parti, elle connaît à peine Denis Baupin mais ils échangent dans le cadre des échéances à venir d’EELV.

      De sympathiques, les messages deviennent vite insistants et de plus en plus gênants. Elen Debost a en effet envoyé par erreur un SMS à caractère privé à Denis Baupin. Excuses et explications n’y changent rien. Elle devient victime de harcèlement. « Il m’envoie des messages très embarrassants. Je lui répète que je ne suis pas intéressée, il est le compagnon d’Emmanuelle Cosse, mais les messages à caractère sexuel continuent. Je suis sidérée. J’ai déjà dit non dix fois, et il continue. Les hommes violents, je sais ce que c’est, les signaux d’alerte arrivent. Je parle des messages à deux personnes, qui me disent : “Il a recommencé”… À l’époque, personne ne me conseille de porter plainte. »

      Une tribune de femmes dénonçant le sexisme en politique, puis une campagne médiatique contre les violences faites aux femmes décident Elen Debost à parler. « Quand j’ai vu la photo de Denis Baupin avec du rouge à lèvres, j’ai vomi. J’ai réfléchi, et j’ai fait un post [un billet – ndlr] Facebook. Les commentaires montrent que les gens savaient, dans le parti. Cyril Graziani, de France Inter, m’a contactée, et j’ai parlé. »

      Avec le recul, Elen Debost est amère. « On était de petites figurines, avec le même profil psychologique un peu fragile. Notre silence a fait que des femmes ont subi ça pendant plus de quinze ans. L’enquête des deux journalistes de France Inter et Mediapart a été magistrale. Ils nous ont aidées à casser l’impunité de cet homme qui osait se présenter en défenseur des femmes. Il faut que cette omerta cesse. »

      Après cette déposition, Me Pierrat lance des questions agressives à Elen Debost, lui jetant à la figure des SMS sortis de leur contexte, comme si elle avait participé à un jeu de séduction, alors qu’elle répète inlassablement qu’elle tentait de contenir les avances insistantes de Denis Baupin en jouant sur tous les registres. Malaise.

      Isabelle Attard s’avance à la barre. Élue députée EELV en 2012, elle a, elle aussi, reçu des messages de Denis Baupin – dès son premier jour à l’Assemblée nationale. Messages qui se multiplient et prennent rapidement un caractère sexuel. Elle n’avait jamais été confrontée au harcèlement sexuel auparavant. « J’en parle à mon équipe, je suis mal à l’aise, c’est un collègue de travail sur lequel je veux compter, notamment sur les questions nucléaires. Du coup, je passe un temps fou à réfléchir à comment lui répondre, pour ne pas me brouiller avec quelqu’un que j’estime et continuer à avoir des relations de travail normales. J’essaye de rester polie en exprimant mon non-consentement. Je deviens de plus en plus gênée. Je mets en place des méthodes pour ne jamais me retrouver seule avec lui. »

      Isabelle Attard apprend qu’elle n’est pas la seule. D’autres députées, et de jeunes collaboratrices ayant un lien de subordination, reçoivent des SMS identiques de Denis Baupin, devenu entretemps vice-président de l’Assemblée nationale. Certaines s’enferment à clé dans leur bureau. Isabelle Attard évoque cela lors d’un déjeuner avec Edwy Plenel, directeur de la publication de Mediapart. Notre collègue Lénaïg Bredoux commence son enquête, et recueille quantité de témoignages sur les agissements de Denis Baupin.

      Isabelle Attard se tient bien droite face au tribunal, et lance ceci : « Je voudrais remercier Denis Baupin. Ce procès nous permet de dire ici tout ce que nous avons vécu. On a pu parler publiquement, et on va pouvoir passer à une autre étape de notre vie. J’espère aussi que ça éclairera certains hommes sur ce qu’est le consentement. »

      L’avocat du plaignant tente encore de la déstabiliser, en lisant des SMS qui ne montreraient aucun harcèlement. Isabelle Attard tient bon. Un incident d’audience éclate lorsqu’il apparaît qu’Emmanuel Pierrat fait du “live tweet” (microblogging en direct) pendant les débats, et rend publics des SMS envoyés par certaines des prévenues à Denis Baupin. Le président et la procureure sont stupéfaits, les avocats de la défense scandalisés. Il est tard, et le tribunal interroge encore Annie Lahmer, Geneviève Zdrojewski, Frédric Toutain et Jean-Claude Biau.

      Lundi, les journalistes prévenus ont expliqué comment ils avaient travaillé sur l’affaire Baupin. Lénaïg Bredoux a raconté ses enquêtes sur le sexisme en politique, avant Weinstein et #MeToo, et celle sur l’élu écologiste, d’abord menée en solo puis avec Cyril Graziani, de France Inter. Celui-ci avait notamment appris que Denis Baupin n’était pas devenu ministre « à cause de ses casseroles ». Edwy Plenel a rappelé pour sa part que « la presse est là pour révéler les affaires cachées ». Éreintants, les débats doivent s’achever vendredi soir.

      Il semble que le backlash lui revienne un peu à la figure.

  • La #vidéosurveillance ne sert presque à rien - LDH49
    http://ldh49.over-blog.org/2018/05/la-videosurveillance-ne-sert-presque-a-rien.html

    Le sociologue Laurent Mucchielli, directeur de recherche au CNRS et enseignant à l’université d’Aix-Marseille, vient de publier une étude qui ramène l’efficacité de la vidéosurveillance à des proportions très modestes (Vous êtes filmés ! Enquête sur le bluff de la vidéosurveillance, Armand Colin). L’apport de cette technologie dans les enquêtes judiciaires ne serait en effet que de 1 % à 3 %, démontre l’auteur, chiffres à l’appui. Jusqu’ici, pourtant, seules les chambres régionales des comptes ont épinglé le coût excessif de ces équipements (à Saint-Étienne, Lyon et Nice notamment).

  • « Un magistrat politique »
    http://survie.org/billets-d-afrique/2017/264-janvier-2017/article/un-magistrat-politique-5212

    A force de cynisme, certains finissent par ne plus vivre dans le même monde. Jean-Claude Marin, nommé procureur gé­néral près la Cour de cassation par Sarkozy en 2011 est « un magistrat politique », pour reprendre le titre d’une enquête qui lui a été consacrée en 2015 par Michel Deléan (éditions Pygmalion), très sensible à la rai­son d’État et dont on ne compte plus les services rendus aux puissants. Dernièrement, n’a-­t­-il pas plaidé la relaxe pour Christine Lagarde, jugée (coupable, mais dispensée de (...)

    #264_-_janvier_2017

    / #Gabon, #Justice, #Brèves_d'Afrique_et_d'ailleurs, #Ali_Bongo

  • L’hystérisation infernale des faits divers

    Hommes politiques et médias ont une lourde responsabilité dans l’exploitation et l’instrumentalisation des faits divers, comme le montre à nouveau la pauvre affaire de la rixe de Sisco, en Corse.

    Chauffer à blanc ce qu’il est convenu d’appeler « l’opinion publique », lorsque survient un « fait divers », est un art dans lequel certains excellent. La violente rixe survenue samedi 13 août sur la plage de Sisco (Haute-Corse) permet ainsi à l’extrême droite de dénoncer avec jubilation une prétendue « racaille islamiste » (concept fumeux et ramasse-tout), tandis que des élus nationalistes corses légitiment les rassemblements identitaires aux cris de « On est chez nous », et que le maire (PS) de la commune croit utile de prendre, après d’autres élus, un arrêté anti-burkini. Toute séance tenante, le premier ministre Manuel Valls déclare qu’il approuve ces arrêtés de la plus haute importance…

    Or on sait maintenant qu’il n’y avait ni burkini, ni machette, ni slogan ou insulte à caractère religieux sur la plage de Sisco, comme cela avait pourtant été dit et répété, lors de cette bagarre certes violente, mais somme toute assez banale. Le procureur de Bastia s’est employé à l’expliquer, lors d’une conférence de presse mercredi 17 août au soir (lire nos articles ici et là).

    Mais le temps que l’enquête judiciaire avance et que le procureur prenne la parole, le traitement médiatique de l’affaire de Sisco a tourné au grand délire, comme cela arrive régulièrement. Témoignages non recoupés, informations non vérifiées, conditionnels, hypothèses et sensationnalisme ont envahi les ondes dans une période où l’actualité était étale.

    L’affaire de Sisco rejoint ainsi la longue liste des faits divers ayant donné lieu à des fautes journalistiques et ayant été instrumentalisés pour des motifs politiciens. Une litanie de désastres, parmi lesquels on peut retenir l’affaire du notaire de Bruay-en-Artois, celle du « petit Grégory », le psychodrame « Papy Voise », la fausse agression du RER D, ou encore l’affaire d’Outreau et l’affaire Dominique Baudis.

    Les mécanismes qui provoquent ces emballements et leur récupération partisane sont connus. Premier facteur, la course à l’échalote entre des médias avides de sensationnel et oublieux de leur déontologie, qui a contribué à fabriquer les feuilletons de la Vologne et de Bruay-en-Artois, douloureux pour les populations concernées. Qui se souvient qu’un photographe (il travaillait au Parisien et à Paris Match) avait alors acheté des jouets pour les disposer lui-même sur la tombe du petit Grégory, et faire une photo « exclusive » ? Le sordide peut payer, dans une course au scoop de bas étage.

    Le même type de phénomène racoleur est encore accentué lorsque les institutions défaillent : c’est l’aveuglement inouï de l’ensemble de la chaîne judiciaire qui a provoqué le désastre médiatique de l’affaire d’Outreau. L’accélération technologique de l’information, comme la montée en puissance des chaînes d’info en continu (qui ont une antenne à remplir) n’arrangent rien à ces questions de concurrence et d’exclusivité.

    Sur le fond, les logiques internes à chaque corporation entretiennent la mise en scène omniprésente des faits divers. Pour les grands médias, il s’agit d’un spectacle sans cesse renouvelé, vendeur, et qui ne mange pas de pain (il est plus compliqué de traiter l’économie, le social, l’international ou la corruption). Le fait divers est censé faire vibrer, choquer, émouvoir, d’autant plus s’il rencontre les peurs, les fantasmes, les croyances et les préjugés du public visé. À ce jeu dangereux, ce sont les minorités qui perdent le plus souvent.

    En dehors des catastrophes et des attentats, le fait divers médiatique fonctionne encore mieux si les protagonistes font figure de stéréotype : le jeune de cité, le pauvre, l’illettré, l’étranger, le Rom, l’Arabe, le Noir, le musulman (comme le juif hier), le réfugié, ou encore le déviant, le drogué, le pervers, voire le notable (le notaire de Bruay-en-Artois, stigmatisé par le journal maoïste La Cause du peuple, ou plus tard le maire de Toulouse, laminé par La Dépêche du Midi).

    Si les grands médias et leur public se repaissent ensemble de faits divers, d’autres participants entretiennent le spectacle. Des syndicats de policiers s’improvisent ainsi en sources d’informations plus ou moins fiables pour les médias « chauds », profitant du silence relatif ou de la prudence des autorités pour légitimer au passage leurs revendications corporatistes et sécuritaires (davantage de personnel, d’armes, de voitures, de lois…). Des syndicats de gardiens de prison jouent le même rôle à chaque évasion ou mutinerie, pour des motivations très proches (personnel, mesures de sécurité…).

    Plus modérés, les syndicats de magistrats parlent plus volontiers législation, technique judiciaire et moyens humains. Ils constatent que l’omniprésence des faits divers s’accompagne d’un glissement sécuritaire : ce précipité provoque un durcissement constant des lois depuis trois décennies, et amène globalement des condamnations de plus en plus lourdes. Quant aux institutions judiciaires, préfectorales et policières, elles s’efforcent parfois de communiquer, mais avec plus ou moins d’envie et de célérité, et de façon plus ou moins exhaustive (voir les demi-mensonges des affaires Rémi Fraisse ou Adama Traoré, par exemple).

    Les hommes politiques, si prompts à dénigrer la justice et les médias, sont souvent eux-mêmes partie prenante de ces bavures médiatiques et du barnum sécuritaire. C’est un communiqué du président de la République Jacques Chirac, diffusé un samedi soir, qui a ouvert en grand les vannes de l’affaire de la prétendue agression antisémite du RER D, en juillet 2004, après la simple plainte déposée par une jeune femme mythomane. C’est un adjoint au maire (UMP) d’Orléans qui a informé (ou intoxiqué) copieusement les journalistes au sujet de l’agression de Papy Voise, déclinée ad nauseam sur les chaînes de télévision juste avant l’élection présidentielle de 2002, au vif plaisir de la droite, et qui se terminera finalement par un non-lieu. Dans l’affaire Dominique Baudis, enfin, adversaires et amis politiques de feu le maire de Toulouse ont également joué un rôle non négligeable, dans le flot de calomnies et de rumeurs déversées sur son compte dans les médias.

    La pauvre affaire de Sisco, dans une période de tensions dues aussi bien à la crise économique qu’au terrorisme, est elle aussi exploitée sans vergogne par certains hommes politiques. Difficulté supplémentaire, l’émergence des réseaux sociaux comme accélérateurs d’informations, mais aussi comme propagateurs de rumeurs et relais de propagande, devrait inciter les médias à encore plus de prudence.

    [ Michel Deléan Mediapart ]

  • Aux Arts et métiers, une enquête ouverte pour des faits de #bizutage
    https://www.mediapart.fr/journal/france/080716/aux-arts-et-metiers-une-enquete-ouverte-pour-des-faits-de-bizutage

    L’école Arts et métiers ParisTech (ex-Ensam), régulièrement épinglée pour sa pratique de l’usinage, apparenté au bizutage, fait l’objet d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris, à la suite du signalement du ministère de l’éducation nationale.

    #France #Ecole_nationale_des_Arts_et_métiers #ENSAM #enseignement_supérieur #usinage

    • Pas une fois le mot #sadisme dans cet (excellent au demeurant) article, et c’est dommage, parce qu’il s’agit en fait de tout un système basé sur des pratiques sadiques et complètement rétrogrades.

      Un article qui montre bien le côté bien pourrave du truc avec comme explication à la poursuite dette grosse merde, comme toujours, le cocktail « garder le pouvoir et argent ».

      Je me suis toujours demandé pourquoi les directeurs d’établissements étaient incapables de faire cesser ou au mieux évoluer ces pratiques sadiques. La réponse est dans le papier, à lire absolument.

    • spécialement pour @mad_meg et exceptionnellement, je poste l’article complet, il me semble être juste et une bonne base pour un débat sur la question. et si vous avez envie de voir ou revoir wei or die c’est là http://wei-or-die.nouvelles-ecritures.francetv.fr

      Juste pour voir ce que nos élites soutiennent.

      –---

      enseignement supérieur Enquête

      Aux Arts et métiers, une enquête ouverte pour des faits de bizutage
      8 juillet 2016 | Par Faïza Zerouala

      L’école Arts et métiers ParisTech (ex-Ensam), régulièrement épinglée pour sa pratique de l’usinage, apparenté au bizutage, fait l’objet d’une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris, à la suite du signalement du ministère de l’éducation nationale.

      Le geste est fort et en dit long sur la gravité de dérives persistantes. Le 24 février 2016, le ministère de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur a dénoncé auprès du procureur de la République de Paris des pratiques assimilées au bizutage ayant cours à l’école Arts et métiers ParisTech (ex-Ensam). Des actes humiliants ou dégradants seraient imposés aux nouvelles recrues lors de manifestations liées au milieu scolaire, selon une source proche de l’enquête. Le parquet de Paris a ouvert, dans la foulée, une enquête préliminaire confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP).

      Ce signalement du ministère est fait en vertu de l’article 40.1 du code pénal, qui stipule que : « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »

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      Harcèlement moral : quatre plaintes visent l’école des avocats Par Michel Deléan

      En parallèle, selon nos informations, une enquête administrative a été lancée au sein de l’école au début du mois de juin par Laurent Carraro, le directeur général, après qu’il a été avisé de l’existence de trafics de drogue sur les campus, organisés par des étudiants qui en discutent dans des courriers électroniques. Certains élèves seraient initiés aux drogues dures par leurs pairs. En fonction des résultats de l’enquête, le directeur pourrait à son tour signaler ces faits au parquet, qui jugera des suites à donner à l’affaire.

      Interrogé par Mediapart, Laurent Carraro s’inquiète également de conduites addictives des étudiants, qui consomment alcool et drogues en grande quantité. « C’est un vrai problème dans toutes les grandes écoles, explique-t-il. Ici, vu la vie collective très riche, le terreau est fertile. Je m’inquiète pour la santé de mes étudiants. »

      L’école des Arts et métiers © DR L’école des Arts et métiers © DR
      La vie mondaine aux Arts et métiers est en effet foisonnante. L’école se targue même de cette attention portée à la perpétuation des traditions. Et glorifie des valeurs a priori positives comme l’entraide, la solidarité ou la fraternité. La tradition au sein de l’Ensam et l’esprit d’appartenance sont très forts, dans la lignée de ce qui existe dans toutes les grandes écoles. Un établissement prestigieux, plutôt bien classé en 2016. Il pointe à la quatorzième place du classement des écoles d’ingénieurs réalisé par L’Usine nouvelle.

      À l’école des Arts et métiers, passer le concours pour intégrer l’établissement n’est pas le seul préalable : un autre rite de passage officieux consacre le nouvel étudiant comme étant membre à part entière de la communauté estudiantine. Ceci se pratique durant six à huit semaines, au cours desquelles les valeurs propres à l’école sont perpétuées lors de la « période de transmission des valeurs », indispensable à l’intégration. Ce moment a longtemps porté le vocable d’« usinage ».

      En l’occurrence, il s’agit de transformer le néo-étudiant en « Gadzart », c’est-à-dire en « gars des Arts », comme se surnomment avec fierté les élèves de l’école fondée en 1780. Ils l’inscrivent ainsi dans une histoire prestigieuse, constituée de codes avec un lexique quasiment indéchiffrable pour les béotiens, et l’intègrent à une famille. Certains jeunes gens considèrent l’obtention de ce titre comme un aboutissement, presque plus précieux que leur diplôme. Mais le terme historique n’est guère plus usité car trop associé au délit de bizutage, y compris par sa rime.

      Durant cette « période de transmission de valeurs » (PTV), organisée par les étudiants de deuxième année, les jeunes gens sont invités à boire lors de jeux d’alcool, se font hurler dessus tous les soirs au cours de cérémonies secrètes, doivent rester debout ou être accroupis pendant des heures, longer les murs en chantant des chansons paillardes. Les jeunes étudiants sont tenus d’apprendre les chants des Gadzarts ou de porter sans discontinuer la blouse grise. En 1982, un article du Monde en deux volets (ici et là) épinglait ces pratiques.

      Le 31 août 2015, par exemple, un étudiant fait sa rentrée comme tous ses camarades avant de démissionner, relate l’Inspection générale. Ses parents, persuadés que la « période de transmission des valeurs » est fautive dans cet abandon prématuré de sa scolarité, dénoncent, par exemple, les convocations quotidiennes pour des séances de chants et de défilés par les étudiants des années supérieures. Les élèves de première année sont censés être sans cesse disponibles pour participer à des manifestations dont ils ignorent la teneur, y compris les week-ends. En cas de refus, certains organisateurs de ces rites n’hésiteraient pas à faire du chantage ou à menacer de représailles les jeunes réticents.

      Une source judiciaire rapporte que d’autres élèves ont été victimes de crises de nerfs ou d’épilepsie à l’occasion de ces rites initiatiques. Selon l’enquête interne initiée par l’école en avril 2016, dont Mediapart a pu prendre connaissance, certains ont dû cheminer à travers un parcours guidé de fers à repasser allumés, yeux bandés, leur occasionnant des brûlures à l’occasion de la rentrée 2015. Tous ont été victimes d’alcoolisation forcée. En prévention des conséquences physiologiques consécutives à une absorption massive d’alcool, les étudiants de deuxième année avaient même préparé de larges poubelles, permettant à ceux de première année d’y vomir. Certains étudiants ont été désignés pour nettoyer les dégâts. Les jeunes gens ont aussi été confinés dans des pièces exiguës, provoquant des malaises. Toutes les semaines, ils doivent aussi changer de chambre, histoire de bouleverser leurs repères. Ces faits, jugés « dégradants et humiliants » et dénoncés, ont été confirmés par l’enquête interne. À l’automne 2015, plusieurs parents d’élèves ont saisi des avocats pour les représenter et demander à la direction de faire cesser ces pratiques.

      L’école est dans le viseur de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR), qui a diligenté deux enquêtes, rendues publiques en 2015 et 2016 (à lire en PDF respectivement ici et là) et recensant ces faits, qui relèvent potentiellement du bizutage tel que la loi du 17 juin 1998 le qualifie : « Le bizutage est le fait d’amener une personne à subir ou à commettre des actes humiliants ou dégradants, que ce soit contré son gré ou non. Le bizutage concerne généralement les étudiants mais aussi parfois les élèves d’autres établissements. C’est un délit, puni de 6 mois d’emprisonnement et de 7 500 € d’amende, et ce, que la victime soit consentante ou non. »
      Des pratiques difficiles à faire évoluer

      Mais les autorités ont toutes les peines du monde à changer ces pratiques. D’abord parce que les témoignages sont rares, par peur des représailles et d’être ostracisé par le reste de la promotion et de l’école. Quelques élèves opposent une résistance et refusent de participer, une fois passés dans la classe supérieure, à l’usinage des petits nouveaux. D’autres demandent à être transférés dans d’autres campus afin de se soustraire à la pression de leurs camarades.

      Michel Maya, enseignant en mécanique depuis 1982 à l’école des Arts et métiers, rapporte que les élèves « hors usinage » sont très rares : « Si l’un veut sortir du groupe, les anciens s’en occupent. Ils mettent la pression à ses camarades en leur disant : “Il torpille votre groupe. Vous ne ferez pas de bons Gadzarts, s’il n’y a pas de cohésion.” » Ne pas souscrire à ces rites, c’est se placer à part et, croient-ils, compromettre leur avenir professionnel. En effet, à une époque, les étudiants « hors usinage » n’avaient pas le droit d’apparaître sur l’annuaire des Anciens. Une menace de les priver de ce réseau, l’un des atouts mis en avant dans la formation.

      Par ailleurs, il est parfois difficile de qualifier juridiquement ces pratiques, consenties par certains élèves, comme le note l’Inspection générale, et qui se situent souvent sur la ligne de crête. L’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche considère cependant clairement, dans le deuxième rapport daté de janvier 2016, que « la période de transmission des valeurs » (PTV), qui marque l’entrée à l’Ensam, « est génératrice de dérives − potentielles et avérées − assimilables à des actions de bizutage ». Elle rappelle qu’un élève est décédé lors d’une bagarre en 2013, qu’un autre a été gravement blessé en 2014 en tombant d’une fenêtre. Les deux incidents n’ont pas été à proprement parler causés par la PTV, mais se sont produits en marge de fêtes fortement alcoolisées.

      « Si ce nouveau rapport fait le constat que la direction générale de l’école s’est fortement mobilisée, non sans tensions avec l’association des anciens élèves, pour aboutir à la signature d’une charte et à la rédaction d’un nouveau règlement intérieur, il alerte surtout sur la persistance de dérives graves », écrit l’Inspection.

      À l’intérieur même de l’école, cette PTV ne fait pas l’unanimité. Michel Maya, enseignant de mécanique à l’Ensam, fait partie des contempteurs. Lui-même interdit dans sa salle de classe le port de la blouse grise, imposée en permanence aux étudiants de première année par leurs pairs pour leur inculquer l’humilité et gommer les différences sociales. Ils doivent aussi apprendre par cœur le nom d’autres élèves des promotions ou des chants propres aux Gadzarts. L’hymne célébrant les traditions, « les trad’s », s’achève par : « Les trad’s mourront quand mourront les Gadz’Arts. »

      Il fut un temps, se rappelle aussi Michel Maya, où les élèves avaient à répondre à une série de questions. En cas d’échec, ils devaient réaliser une série de pompes. « Cela a toujours eu des conséquences directes sur le travail que l’étudiant doit fournir. Il y a 15 à 20 heures par semaine consacrées à la PTV. Il faut bien les prendre quelque part, donc forcément cela a des retombées pédagogiques », explique-t-il.

      Le directeur général Laurent Carraro n’entend pas supprimer ce rituel. « Cela ne me choque pas, je n’ai rien contre sur le principe, toute la question porte sur la méthode », dit-il à Mediapart. Toutes les écoles organisent des week-ends d’intégration, dont l’objet est « de se soûler durant 48 heures », rappelle-t-il. La période de transmission des valeurs a même, selon lui, des vertus « indéniables en terme de solidarité ». « Il y a des effets positifs à cette période qui peut se passer normalement. » Mais, pour le directeur, la PTV doit évoluer et surtout être porteuse de sens.

      Il imagine par exemple qu’elle pourrait inciter les étudiants à réaliser des travaux d’intérêt général comme rafraîchir les peintures dans des EPHAD, les établissements accueillant des personnes âgées, ou débroussailler les mauvaises herbes de la commune. Des actions consensuelles en somme. Et bien plus honorables pour l’école, dont l’image a été bien abîmée par les dénonciations récurrentes de dérives lors de la PTV.

      Mais cette tradition est si fortement ancrée que la remettre en cause provoque de très vives tensions au sein de l’école, où couve une véritable crise de gouvernance. En cause : la toute-puissance de la « Soce », la société des ingénieurs Arts et métiers, qui regroupe 33 000 ingénieurs diplômés de l’Ensam. Ces anciens jouent un rôle classique : ils financent via leurs dons des résidences à destination des étudiants, et constituent un réseau pour dénicher stages et premier emploi. Mais ils vont bien au-delà.
      L’influence excessive des anciens élèves

      La « Soce » est directement investie dans la gestion opérationnelle de l’école. C’est elle qui est détentrice de la marque. Propriétaire d’un siège luxueux situé sur la très chic avenue d’Iéna, elle bénéficie d’un véritable trésor de guerre. En 2015, son budget s’élevait à 3,5 millions d’euros, et elle emploie 25 salariés. Elle est également la propriétaire des résidences dans lesquelles sont logés les étudiants. Elle s’occupe de les construire et de les rénover le cas échéant : elle va ainsi financer, à hauteur de 4,1 millions d’euros, une partie du projet de réhabilitation de la résidence étudiante de l’école au sein de la Cité internationale universitaire de Paris. La « Soce » consacre chaque année 1 million d’euros aux bourses d’études délivrées aux élèves les plus modestes, et elle finance en partie l’Union des élèves de l’école, dont le budget total s’élève quant à lui à 5,8 millions d’euros !

      Mais selon l’Inspection, c’est aussi elle qui empêche, par son influence excessive, la direction générale de s’engager dans une politique volontariste pour lutter contre ces dérives de la PTV et pour moderniser l’établissement. Dans ses rapports, l’Inspection avait donc préconisé de couper le cordon. Un décret, signé par le ministère de l’éducation nationale, et dont la publication est imminente, va modifier la composition du conseil d’administration de l’école. Huit personnalités qualifiées extérieures, non diplômées de l’Ensam et non impliquées dans sa gestion opérationnelle, vont l’intégrer. En clair, la « Soce » est boutée hors du conseil d’administration et perd ainsi voix au chapitre.

      Depuis, les anciens se sont lancés dans une vaste contre-offensive, médiatique et politique. En cause, selon son président Jacques Paccard, qui explique n’avoir eu aucun contact avec la ministre de l’éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem : le « manque de concertation » dans la mise en œuvre de cette réforme.

      Le 14 juin, les anciens sont parvenus à publier une lettre ouverte à François Hollande dans deux grands quotidiens, Le Figaro et Les Échos, assortie d’une pétition en ligne sur le site Change.org sobrement baptisée Sauvons Arts et métiers, signée par plus de 20 000 personnes. Dans la lettre ouverte, Jacques Paccard considère que cette réforme « aboutirait à une gouvernance hors sol, centralisée et isolée, coupée de tout lien avec les ingénieurs diplômés et les implantations territoriales ». Il explique qu’il s’agit à son sens « d’une mauvaise solution à un problème ».

      La « Soce » fait également jouer ses relais politiques. Les députés LR Bernard Accoyer, Gérard Menuel ou le sénateur UDI de la Marne Yves Detraigne se sont ainsi fendus d’un courrier à la ministre Najat Vallaud-Belkacem pour obtenir une réponse. Interrogé sur sa démarche, Yves Detraigne explique simplement l’avoir fait sur demande d’un administré, sans même connaître les détails du dossier… Il n’a jamais obtenu de réponse de la ministre. Gérard Menuel, député de l’Aube, alerté par de nombreux anciens, trouve cette mise à l’écart « dommageable ». Dans sa circonscription, les Gadzarts évoluent dans les nombreuses PME et font « un travail essentiel », explique-t-il.

      Le 24 mai, une question écrite a été posée par le député LR des Bouches-du-Rhône, Jean-Pierre Maggi, avec les mêmes arguments que ceux de l’association des anciens. « À l’heure où la réindustrialisation de notre pays est la priorité absolue du gouvernement pour relancer l’emploi et la création de richesses, il semble peu judicieux de se priver des retours d’expérience, financements, débouchés professionnels et avancées en matière de recherche scientifique que prodiguent les anciens de cette école connue pour ses formations d’excellence en matière d’ingénierie. »

      En interne, le président de la « Soce » a par ailleurs annoncé la suspension de la convention, signée entre l’association et l’établissement en septembre 2015, qui permet aux anciens d’aider l’école, à hauteur de 150 000 euros en 2015, pour améliorer la vie interne à l’école grâce à ses 2 000 bénévoles (tutorat, recherche de stages pour les étudiants, lien avec le tissu industriel local…).

      Selon un document confidentiel interne consulté par Mediapart, daté du 24 mars 2016, la « Soce » précise que « les projets et l’appui financier, pour tout ce qui concerne les PGs [les petits Gadz’arts – ndlr] continuent. Ils ne sont pas touchés par la suspension de la convention École/Soce. 
En l’espèce, par exemple, les bourses aux élèves continuent à être attribuées, l’organisation du processus d’attribution pouvant être ajusté ». Les actions de tutorat ou d’accompagnement professionnel réalisées par les bénévoles pourraient cesser, en guise de représailles. 
En revanche, la suspension de la convention entraîne l’arrêt de toute communication conjointe.

      Le geste vise clairement à mettre le directeur de l’école sous pression, et à menacer indirectement, malgré les dénégations de Jacques Paccard, de couper les cordons de la bourse. Les relations entre le directeur général et le président de l’association sont exécrables.

      Le conflit entre les deux parties se déroule, presque publiquement, à coups de correspondances assassines. Dans le dernier développement de ce feuilleton à rebondissements, Laurent Carraro, excédé par les déclarations de Jacques Paccard, lui a adressé le 7 juillet une lettre diffusée auprès de tout le personnel de l’école d’ingénieurs, que Mediapart a pu consulter. Il lui demande de cesser sa « large campagne de désinformation tant auprès de [ses] sociétaires que de différents responsables publics et privés en énonçant de multiples contre-vérités ». Dans ce document, plusieurs épisodes récents sont évoqués par l’actuel directeur.
      « Des délits imaginaires »

      Par exemple, l’initiative personnelle de Jacques Paccard d’écrire mi-juin au cabinet d’Emmanuel Macron pour placer l’école sous tutelle du ministère de l’économie et de l’industrie est vécue comme un affront supplémentaire. Enfin, la lettre « spontanée » (à découvrir ici) envoyée au président de la République par Jérôme Gavois, ancien Gadzart, au nom des enseignants des Arts et métiers pour soutenir la « Soce » creuse un peu plus le fossé entre les deux hommes. Non seulement le courrier met en cause la gestion de Laurent Carraro, mais sa rédaction serait selon ce dernier, toujours dans cette lettre interne, téléguidée par Jacques Paccard lui-même : « Je viens d’apprendre que le courrier “spontané” d’un enseignant de l’école au Président de la République s’opposant à l’évolution de nos statuts, abondamment relayé par l’association que vous présidez, implique vos collaborateurs les plus proches. J’ajoute que le message en question provient de 7 personnels de l’établissement pour un effectif avoisinant les 1 100 ! »

      Le président de la « Soce » reconnaît, dans un lapsus, que son association est « puissante », avant de se reprendre en disant « présente ». « Nous sommes présents pour prodiguer des conseils, aider à trouver des stages, le premier emploi, justifie Jacques Paccard. On est sensibles à la qualité de la formation. Tout ça dans un souci de bien-être chez les étudiants. C’est évident, on ne se désintéresse pas de la vie de l’école. On le fait bénévolement, ça nous coûte du temps, de l’énergie et de l’argent pour les bénévoles. »

      Après la publication des rapports de l’Inspection générale, il avait pris la plume à deux reprises, en 2015 et 2016, et écrit à la ministre de l’éducation nationale pour réfuter point par point, ou presque, les conclusions de ces enquêtes. Elles comprennent « des extrapolations psychologiques, des jugements moraux et un vocabulaire stigmatisant », écrit Paccard. Il est notamment furieux que l’Inspection considère que certains élèves sont en proie à un syndrome de Stockholm, ce phénomène psychologique observé chez d’anciens otages qui développent une empathie avec leurs bourreaux.

      Plus largement, le patron de la « Soce » nie en bloc les accusations de bizutage, qualifiées de « délits imaginaires ». Il n’y a jamais eu de condamnations pénales ni de conseil de discipline, insiste Paccard auprès de Mediapart, avant de renvoyer la responsabilité sur les directeurs des centres, garants du bon déroulement des pratiques internes. « Ce ne sont pas nos prérogatives », juge-t-il. Pourtant, il y a un an et demi, une charte tripartite entre la direction, l’union des élèves et la Soce avait été signée pour réglementer la PTV. « L’école complote avec le ministère pour détruire les Gadz et leurs traditions », a lancé Charles Duplaa, un autre ancien, chargé à l’école de réfléchir à l’évolution de la PTV, dans un mail interne que nous avons consulté.

      L’Union des élèves des Arts et métiers n’a pas souhaité répondre à Mediapart, en raison de « la situation et des tensions présentes », selon son responsable communication. Cependant, plus disert en interne, il a envoyé un message de dix-sept pages aux élèves afin de les éclairer sur les derniers rebondissements. Son analyse est nettement plus nuancée que celle de la « Soce » : « Que le ministère nous ait dans le collimateur, c’est une certitude. Et ce n’est pas nouveau : cela fait au moins 15 ans que c’est le cas. Mais dire que les deux rapports IGAENR qui nous sont tombés dessus sont faux, et basés sur du vent n’est pas crédible. À nous de trouver le moyen de transformer nos traditions de manière à ce qu’elles deviennent acceptables par tous, tant par les conscrits que par les personnes lambda, sans sacrifier à notre folklore et notre Histoire et surtout en faisant en sorte d’assurer la transmission de nos valeurs. De nombreux PGs s’interrogent actuellement là-dessus, je ne vous apprends donc rien. Et si on peut communiquer intelligemment dessus et redorer notre blason tant mieux ! » Le signe, peut-être, d’un renouvellement profond des traditions.

    • Merci @reka pour l’article gentilement offert :)
      Je comprend maintenant cette pression de la « Soce » sur la direction de l’école. La direction semble vouloir vraiment en finir avec ce bizutage mais elle à un adversaire plutot imposant. L’idée des travaux d’intérêt généraux à la place du parcours à l’aveugle dans les fer à repasser allumé est séduisante mais je me pose des questions sur l’intérêt de ces rituels d’intégration d’une manière général. Il y a aussi la question de l’alcoolisme promu par les associations étudiantes.
      Et je me demande comment ca se passe pour les étudiantes et les étudiant·e·s racisé·e·s dans un tel contexte.

    • Merci beaucoup pour l’article de Mediapart.
      Quelques commentaires, en vrac, d’un gadzarts (promo 1997-2000) :
      – Je suis très dubitatif quant à certains faits rapportés, l’histoire des fers à repasser notamment ; si c’est avéré, ça relève du pénal et les crétins qui ont organisé ou permis ça doivent être poursuivis et condamnés ; mais ce ne serait pas la première fois que des accusations très graves seraient formulées et pourtant basées sur du vent. Je parle d’expérience, ma promo ayant eu le plaisir d’étrenner la ligne SOS Bizuthage mise en place par Royal en 97. Concernant mon centre, une dizaine de signalements ont été faits, qui allaient du défilé forcé en caleçon jaune dans la ville à l’imposition d’attouchement sexuels, tous faux. Vrais ou faux, qu’importe, ministère et police partent du principe qu’il n’y a pas de fumée sans feu, nous avons eu droit à des fermetures, des exclusions temporaires des supposés « meneurs », même des gardes à vue (six mois après les faits présumés, sans suite bien sûr, le but étant d’intimider la promo suivante qui préparait la suite).
      – De mon expérience toujours, qui n’a pas prétention universelle, ceux qui refusent l’usinage ou ultérieurement toute participation aux activités de l’association des élèves, ne sont pas osctracisés. Je ne nie pas que la majorité, au moins dans un premier temps, suit et subit sans trop se poser de question, sans avoir le couteau sous la gorge non plus : il faut relativiser le poids qu’on prête à la Soce pour faire carrière une fois diplômé et en première année, pour la plupart, c’est encore un concept très abstrait. A titre d’exemple, sur ma promo, 120 élèves : 5 n’ont pas suivi l’usinage jusqu’au « baptême » ; parmi ceux-ci, que nous fréquentions tous les jours en cours, dans l’asso sportive indépendante, lors des repas, dans la résidence universitaire, 3 ont finalement demandé à intégrer l’association des élèves dans les deux ans qui ont suivi ; les 3 ont été admis comme membres de plein droit - et il est difficile de les accuser de carriérisme vu que deux ont enchaîné avec l’ENS pour devenir profs, l’influence de la Soce sur l’admission au concours étant nulle évidemment. À l’inverse, 3 autres se sont déclarés « hors promotion » en deuxième année car ils ne voulaient pas participer à l’usinage, sans conséquence sur leur scolarité ni leur empoyabilité à priori ; il y a cinq ou six ans l’un d’entre eux a souhaité adhérer à la Soce, son « retour » s’est fait sans problème.
      – Il y a bien un problème culturel d’alcoolisme, il n’est malheureusement pas spécifique aux Arts&Métiers ni lié à l’usinage mais généralisé dans toutes les strates étudiantes que j’ai pu fréquenter.
      – Concernant le supposé laisser-faire de la direction, historiquement la perpétuation des traditions s’est toujours faite contre l’administration, certes plus ou moins active mais toujours hostile. L’avantage de ce conflit latent, c’est qu’il évite de se poser des questions sur le cursus pédagogique, sur lequel il y aurait pourtant beaucoup à dire...
      – Concernant les étudiants racisés, je n’ai jamais eu l’occasion de constater de problème, ça ne veut pas dire qu’il n’y en pas mais je pense que parmi les bons côtés de l’usinage, il y a un véritable apprentissage de la tolérance et de l’ouverture d’esprit. Ceci étant dit, deux mois d’usinage ne peuvent pas venir à bout de vingt ans de préjugés.
      – J’ai volontairement parlé ci-dessus d’étudiants et pas d’étudiantes car du fait du déséquilibre (moins de 10 % de femmes !) des formes de sexisme se développent inévitablement, ne serait-ce qu’un paternalisme lourdingue : « on a peu de filles, alors on les choie... »
      – J’ai participé activement à l’usinage des deux promotions qui ont suivi, j’essaie de prendre et de garder le contact chaque année avec mes nouveaux-elles filleul-les et je n’ai pas l’impression d’être un sadique, pour reprendre le mot de Reka. Encore une fois mon expérience n’est pas universelle, il faut cependant comprendre que l’usinage n’est pas un calvaire de deux mois pendant lequel les deuxièmes années se défouleraient sur les premières, c’est un jeu de rôles grandeur nature auquel sont invités à participer les nouveaux, qui demande plusieurs mois de préparation, pendant lequel les 2e année se réunissent matin et soir pour se briefer et débriefer, et qui est beaucoup plus éprouvant, physiquement et mentalement, quand on usine que quand on est usiné car on est responsable de tout ce qui peut arriver.

      J’ai déjà écrit un long pavé, je vais m’arrêter là mais n’hésitez pas à me poser des questions plus précises si vous le souhaitez.

    • Merci beaucoup @iyhel pour le témoignage, toujours très utile de lire, d’échanger et d’écouter, de rechercher, de garder les canaux de dialogues ouverts, et de réfléchir et essayer de comprendre les liens de ce « système social » complexe.

      Je peux bien comprendre et admettre ton vécu, j’imagine que la biodiversité des élèves et étudiant(e)s « bizutables » fraîchement arrivé(e)s du lycée est très variée et que chacun doit s’accommoder de cette « épreuve » un peu comme il/elle peut (accepter de mauvais gré, trouver que c’est rigolo quand c’est pas sadique, y aller en se bouchant le nez en espérant que le mauvais moment passe vite, penser que c’est un formidable moyen de s’intégrer à une communauté/groupe", perdre ses repères en acceptant d’être soumis et/ou humilié).

      Je n’ai pas de bons souvenir de ms propres « baptêmes du feu », et j’ai entendu d’autres témoignages beaucoup plus inquiétants que le tien :) Ça fait longtemps que cette question me turlupine, de même que le « mobbing » à l’école pour mes enfants, si difficile à prévenir et pourtant si présent (oui, même en Norvège...).

      Pour revenir au bizutage, j’ai entendu des amis forts, d’autres plus vulnérables (tout le monde n’est pas forcément armé pour affronter ce genre de trucs et peuvent être profondément déstabilisé, et je trouve ça vraiment sadique parce que comme êtres sociaux, nous devrions plutôt faire attention et protéger les personnes vulnérables, pour moi c’est juste la base du respect humain) et sensibles en parler, et décrire cette expérience comme au mieux « désagréable » et au pire une vraie torture morale (et physique quand il s’agissait d’épreuves dites « sportives » - sic).

      Je n’arrive toujours pas à m’expliquer pourquoi les étudiants travaillent si dur (comme tu as l’air de le dire) pour perpétuer une tradition aussi destructive et inutile (comme si on avait le temps). Pourquoi faudrait-il que les assoss d’élèves et/où d’étudiants cherchent à tout prix à asservir les nouveaux, à les soumettre à leur ordre et leurs « traditions » ? Pourquoi, depuis toutes ces décennies, on a pas penser à transformer ce truc en quelque chose de plus constructif, culturel, festif ? ou alors ce qui se fait dans les bizutages, c’est le reflet de ce qu’est notre société, alors mieux vaut y être préparé le plus tôt possible ? :) Quand j’étais étudiant à Paris, ça ma vraiment fait chier d’entendre « allez les mecs, on va jouer à la guerre sur le terrain de paint ball, ça va être cool et on va vraiment se marrer ». Mais je n’ai jamais entendu « allez, rendez vous au tas de sable avec vos instruments et on se fait le mouvement lent du quintet de Schubert » (ou sans instrument, répèt de choeur). Pour moi ça aurait eu plus d’allure, mais je dois être très vieux-jeu.

      Ce qui est intéressant dans ton témoignage, c’est que c’est pour moi la première fois que j’en lis un aussi positif qui semble dire que ces pratiques sont finalement bonnes pour la tolérance et l’ouverture, et ça c’est assez nouveaux. Mais comme toi, mon expérience est loin d’être universelle et je n’ai peut-être pas eu tous les sons de cloches. Mais les expériences de mes copines victimes de sexisme et de harcèlement, j’ai entendu. Et ça m’a effrayé. Je ne fais pas vraiment confiance à des étudiant(e)s de deuxième année qui « usinent » les petits nouveaux sans aucuns contrôle (et au nom d quoi ont-ils ce pouvoir d’ailleurs ? de l’imposer aux autres ?).

      Bref, c’est en vrac, mais je mets ça au débat aussi (et comme je ne suis pas un ancien gadzart, sur cette école en particulier, je ne peux pas en dire plus bien entendu, ne connaissant pas l’école de l’intérieur, mais seulement quelques amis qui en sont sorti - et qui ont détesté ce bordel, raison pour laquelle cet article m’a interpellé :)

    • Concernant mon centre, une dizaine de signalements ont été faits, qui allaient du défilé forcé en caleçon jaune dans la ville à l’imposition d’attouchement sexuels, tous faux. Vrais ou faux, qu’importe, ministère et police partent du principe qu’il n’y a pas de fumée sans feu, nous avons eu droit à des fermetures, des exclusions temporaires des supposés « meneurs », même des gardes à vue (six mois après les faits présumés, sans suite bien sûr, le but étant d’intimider la promo suivante qui préparait la suite).

      Merci pour tes explications @iyhel mais je me demande comment tu peu affirmer avec autant de certitude que les agressions sexuelles étaient fausses. A part si c’est toi qui avait fait ces fausses déclarations ca me semble pas possible d’être aussi affirmatif.

      Pour le sexisme tu dit qu’il y a seulement du paternalisme. Mais comment ca se passe un défilé forcé en caleçon jaune en ville pour les étudiantes ?

      Je sais d’expérience que les hommes sont aveugle au sexisme et à la misogynie. Il n’y a qu’a les écouté faire les ahuris quant on aborde le sujet du harcèlement de rue.

      Mon ex beau père avait fait l’école Boule. Il me racontais avec nostalgie à quel point il avait aimer son bizutage dans cette école. Le bizutage consistait à mettre nue un étudiant et une étudiante, les peindre entièrement l’un en bleu, l’autre en jaune, les enfermé dans une pièce sans lumière et ne les laisser sortir que lorsqu’ils sont tous les deux entièrement verts. Il faut savoir que mon ex beau père est un agresseur sexuel multirécidiviste. J’ose pas imaginé ce qu’a enduré l’étudiante qui était enfermé avec lui ainsi que les autres étudiantes de cette promo.

      C’était à l’école Boule dans les années 1980 mais c’est juste pour dire que ce bizutage amusait beaucoup les mecs et que la plus part d’entre eux n’y voyaient pas de sexisme, juste un sympathique jeux des couleurs très bon enfant.

      Dans le cadre d’une structure tel que l’usinage, ou les étudiants de seconde année organisent l’humiliation des première année, ca m’étonnerais qu’il n’y ai pas des abus liée a ce déséquilibre de pouvoir.

      Tu dit que les participants sont « invités à un jeu de rôle » mais il est quant même aussi question de « marche forcée en caleçon » ca me semble pas être une invitation. Tu parle de jeu de rôle comme d’un truc inoffensif, mais le jeu de rôle du dominant-dominé peut être dangereux : https://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_de_Stanford

      Si les étudiant·e·s qui ont refusé ces humiliations peuvent être à la « Soce » et profiter des mêmes avantages que celleux qui ont été humilié·e·s pendant 2 mois, je me demande à quoi sert encore cette pratique et pourquoi vouloir la défendre et la conservé ?

    • Mad Meg, j’ai dû mal m’exprimer : aucune des dénonciations faites n’avait de fondement. Ni les défilés en caleçon, ni les agressions sexuelles.
      Concernant celles-ci, je n’ai pas la prétention de savoir tout ce qui a pu se passer 24 h sur 24 pendant deux mois mais il faut bien comprendre qu’on vit les uns sur les autres (le poids de cette promiscuité pendant 3 ans est une autre affaire) et que ce serait très compliqué à dissimuler - et encore plus à justifier devant le reste des élèves.
      Je n’ai connaissance que d’un cas de viol, dans un autre centre, en cours d’année, après une beuverie, d’un élève par un autre ; celui-ci a été immédiatement exclu de l’association, je ne sais pas quelles ont été les suites judiciaires.

      Je n’ai pas dit que le sexisme se manifestait uniquement sous forme de paternalisme, simplement que c’en était l’expression principale. 10 % de filles seulement, comme on l’imagine elles sont très sollicitées, surtout dans les centres comme Châlons ou Cluny où hors des A&M il n’y a pas beaucoup d’autres étudiant-e-s. Elles se retrouvent facilement cataloguées « salope » ou « allumeuse » pour peu qu’elles mettent du temps à « choisir ». Je répète mon commentaire précédent, deux mois d’usinage n’effacent pas vingt ans de préjugés sexistes d’un coup de baguette magique.

      J’en reviens à mon expérience personnelle et mes motivations pour accepter de suivre puis faire suivre l’usinage : j’ai fait mon lycée à Versailles, dans un établissement supposé fait partie des meilleurs de France. Je n’y ai pas fait ma prépa et je ne voulais surtout pas l’y faire à cause de l’ambiance qui y régnait et notamment du bizuthage qui s’y pratiquait - une semaine à faire des pompes sous les hurlements des ’spés’, à déambuler dans les rues affublé d’un sac poubelle et que sais-je encore, tout ça pour une ambiance de merde derrière, ça ne m’attirait pas vraiment. J’ai fait ma prépa dans un lycée sans bizuthage ni « période d’intégration », les interactions entrés sups et spés étaient assez limitées. Des rumeurs circulaient évidemment sur la dureté et la violence de l’usinage aux Arts&Métiers, largement alimentées par mes camarades qui étaient en internat à l’école militaire de St-Cyr et avaient eu droit à un programme copieux comme savent faire les (apprentis-)militaires. Vu mon expérience, de loin, du bizuthage en prépa, je n’avais aucune envie ni intention de participer à ça une fois en école d’autant que je cultivais les tendances asociales et ne percevais absolument pas l’attrait de la communauté gadzarts. Pour moi l’affaire était entendue, ils pouvaient bien venir me chercher, je leur expliquerais que leurs gesticulations, ça ne m’intéressait pas et qu’ils se passeraient de moi comme victime de leurs petits jeux defoulatoires.
      Las, une semaine avant mon entrée à l’école, j’ai été invité, comme tous les élèves, à un dîner d’accueil régional organisé par 1ère et 2e années. Et là je suis tombé sur des gars qui ne s’étaient pas vus depuis deux mois car éparpillés en stage dans toute la France, qui ne se connaissaient généralement que depuis un an à peine et entre lesquels je percevais pourtant un lien, très fort, de camaraderie, de complicité, de partage, que je n’avais jamais vu ailleurs.
      Ça a suffisamment éveillé ma curiosité pour que je laisse une chance à l’usinage - et je ne l’ai pas regretté.

      Il y a beaucoup à discuter sur les méthodes employées (j’y reviendrai plus tard), qui évoluent d’ailleurs énormément d’une année sur l’autre, à l’initiative des élèves et pas seulement sous la pression de l’administration qui préférerait qu’on organise un gentil week-end de débauche effrénée, de préférence loin de l’école, comme cela se fait dans beaucoup d’établissements. Mais il faut aussi garder à l’esprit que ces huit semaines ne sont qu’une partie d’un tout, l’amorce d’une vie associative très intense trois ans durant, plus distendue une voie entré-e-s dans la vie active. Supprimer la « période de transmission des traditions » (pardon, des « valeurs », c’est l’élément de langage à la mode) n’éradiquerait pas l’esprit gadzarts - qui est la véritable cible du ministère et ce depuis des décennies.

    • Ok @iyhel, merci pour ces nouvelles précisions. Mais ca consistait en quoi concrètement les épreuves initiatiques auxquel tu as participé ?

      Si la disparition de l’usinage n’éradiquerais pas l’esprit Gadzart alors pourquoi la Soce et les Gadzart veulent conserver cette tradition alors qu’elle n’a pas d’utilité ? L’article de médiapart rapporte qu’il y a de nombreuses plaintes des parents et étudiant·e·s des arts et métiers.

      Je répète mon commentaire précédent, deux mois d’usinage n’effacent pas vingt ans de préjugés sexistes d’un coup de baguette magique.

      L’usinage peut justement causé une aggravation des inégalités de genre et servir d’outil à la perpétuation de discriminations sexistes (et racistes aussi). Et le fait qu’on ne pourrais pas cacher à la collectivité des agressions sexuelles sous prétexte que ca serais difficile à dissimulé me semble vraiment douteux. Il y a 150 000 agressions sexuelles par an en France, un tiers des femmes subissent au moins une agression sexuelle au cours de leur vie en France, une sur cinq avant leur 15 ans et la très grande majorité de ces agressions sont parfaitement dissimulées et cela pendant bien plus que 3 ans et pourtant les femmes vivent cela dans une globale indifférence.

      Je ne dit pas que l’usinage est forcement toujours sexiste ou raciste mais l’usinage me semble un terrain propice a ces agressions parce que l’usinage se produisent dans un contexte patriarcale, raciste et hiérarchique qu’on efface pas d’un coup de baguette magique pour reprendre ton expression. L’usinage comporte ce risque important et rien que pour ca je pense que cette pratique ne devrais pas être conservée.

  • Les « blancos » de Valls amènent un professeur d’université au tribunal
    https://www.mediapart.fr/journal/france/260116/les-blancos-de-valls-amenent-un-professeur-duniversite-au-tribunal

    Un enseignant-chercheur de l’université d’Avignon est cité à comparaître le 27 janvier 2016 pour #incitation_à_la_haine_raciale après qu’il a cité ironiquement les propos de Manuel Valls sur les « Blancs, les white et les blancos » dans une liste de diffusion interne.

    #France #Bernard_Mezzadri #enseignement_supérieur #Liberté_d'expression

  • Terrorisme : un rapport confidentiel-défense condamnait en 2013 le tout-sécuritaire
    11 JANVIER 2016 | PAR FABRICE ARFI ET MATTHIEU SUC
    « Nous sommes aujourd’hui face à un phénomène de fond auquel les dispositifs en place ne répondent qu’imparfaitement car ils ne prennent en compte qu’une partie de la réponse, uniquement sous l’angle de la répression. » Mediapart publie en intégralité un rapport du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), rédigé en octobre 2013. Et toujours d’actualité.
    Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/110116/terrorisme-un-rapport-confidentiel-defense-condamnait-en-2013-le-tout-secu

    Classifié « confidentiel défense », le texte ne semble pas avoir pris une ride deux ans après sa rédaction. Alors que le gouvernement s’est de nouveau engagé depuis les attentats de janvier, puis ceux de novembre 2015, dans une politique exclusivement sécuritaire (et sans contre-pouvoir véritable), Mediapart publie en intégralité un rapport du Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN) sur la « prévention de la radicalisation ». Son contenu, qui tente d’analyser les ressorts de l’embrigadement terroriste et les moyens d’y répondre, tranche singulièrement avec le ton martial de l’époque, véhiculé par le Premier ministre Manuel Valls.

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    Les confidences de l’émir déchu des frères Kouachi
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    Dans un entretien accordé à la chaîne BFM TV, mercredi 6 janvier, Manuel Valls a en effet confirmé le virage tout-sécuritaire du gouvernement dans la lutte contre le terrorisme, en contradiction, par exemple, avec de récentes déclarations de son ministre de l’économie, Emmanuel Macron, pour qui une partie de la réponse doit aussi être sociétale et économique. « La réponse au terrorisme n’est pas économique, elle porte d’abord sur la sécurité. On ne combat pas le terrorisme avec l’économie. Je fais très attention à tout ce qui pourrait donner le sentiment qu’on cherche une excuse », a coupé net Manuel Valls. « Expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser », a répété, samedi 9 janvier, le chef du gouvernement lors d’une cérémonie d’hommage aux victimes de l’HyperCacher, donnant (une nouvelle fois) le sentiment de mélanger la compréhension d’un phénomène avec une forme d’indulgence.

    Daté du 30 octobre 2013 et remis au Premier ministre d’alors, Jean-Marc Ayrault (PS), le rapport du SGDSN permet pourtant d’appréhender la question avec un peu plus de complexité. Bien que rédigé à une époque où la France n’avait pas connu la vague d’attentats de 2015, mais avait dû endurer l’affaire Merah, le rapport fait un état des lieux d’une brûlante actualité et soumet des pistes de réflexion qui jalonnent encore aujourd’hui le débat public. C’est pourquoi Mediapart a décidé de publier en intégralité ce document, bien que classifié, dans la mesure où son contenu ne viole aucun secret susceptible de mettre en péril un quelconque intérêt fondamental.

  • Affaire Bettencourt : « Le comportement abusif de Nicolas Sarkozy » - Page 1 | Mediapart
    http://www.mediapart.fr/journal/france/081013/affaire-bettencourt-le-comportement-abusif-de-nicolas-sarkozy

    Affaire Bettencourt : « Le comportement abusif de Nicolas Sarkozy »
    08 OCTOBRE 2013 | PAR MICHEL DELÉAN

    « Le comportement incriminé de Nicolas Sarkozy, à savoir sa demande d’un soutien financier occulte (...) formulée à Liliane Bettencourt, personne âgée et vulnérable, alors (...) qu’il est candidat déclaré à l’élection présidentielle, est un comportement manifestement abusif ». L’ancien président de la République est sévèrement égratigné dans l’ordonnance des juges de l’affaire Bettencourt, qui lui accorde pourtant un non-lieu. Mediapart a pris connaissance de ce document et en publie de larges extraits.....

    #justice
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    #abus-de-faiblesse