person:michel lussault

  • Derrière la privatisation d’Aéroports de Paris, le contrôle d’un patrimoine immobilier qui vaut de l’or
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2019/03/19/derriere-la-privatisation-d-adp-le-controle-d-un-pactole-immobilier_5438180_

    C’est l’un des points sensibles de la privatisation du Groupe #ADP : l’acquéreur des 50,63 % de l’Etat dans les plates-formes de Roissy, d’Orly et du Bourget prendra aussi le contrôle d’un des plus beaux patrimoines fonciers d’Ile-de-France. Le groupe possède près de 6 700 hectares autour de Paris. Des terrains consacrés à l’activité aéroportuaire pour l’essentiel, mais pas tous : pas moins de 1 242 hectares, autant que les 18e et 19e arrondissements de Paris réunis, sont réservés à des opérations immobilières. Des emplacements qui valent de l’or, à proximité immédiate des aéroports et dans un Grand Paris engagé dans une croissance à marche forcée.

    « Ce portefeuille foncier est un aspect qui différencie ADP des autres groupes aéroportuaires », souligne Yan Derocles, spécialiste de l’entreprise chez l’analyste financier Oddo. En cas de privatisation, l’Etat récupérera, au terme d’une concession de soixante-dix ans, « l’intégralité du foncier » et de ce qui aura été bâti dessus, assure le ministre de l’économie, Bruno Le Maire. Sans apaiser une double inquiétude : que la sous-valorisation de ce patrimoine offre un magnifique cadeau de bienvenue aux acheteurs, et que la puissance publique perde toute possibilité d’orienter le développement de ces territoires stratégiquement situés.

    « Alors que la métropole du Grand Paris est confrontée à des défis d’aménagement pour lesquels la maîtrise foncière est un élément-clé, alors que la question des mobilités non polluantes va être essentielle dans les décennies qui viennent, l’Etat se prive d’un levier d’action direct sur l’usage des sols », regrette le géographe Michel Lussault, directeur de l’Ecole urbaine de Lyon et théoricien de ces « hyper-lieux » de la mondialisation dont font partie les aéroports. Lors de la privatisation des aéroports de Lyon et de Nice, l’Etat avait d’ailleurs conservé la propriété du foncier.

    A proximité immédiate des emprises d’ADP, des collectivités et l’Etat mènent leurs propres projets de développement – dont le controversé complexe de commerces et de loisirs Europacity –, projetant parcs d’affaires et zone…

    #paywall

    • sur le site du Groupe ADP

      Immobilier hors terminaux
      https://www.parisaeroport.fr/entreprises/immobilier/immobilier-hors-terminaux/presentation

      Le domaine foncier utilisable pour l’activité immobilière
      Le Groupe ADP est propriétaire de l’ensemble de son domaine foncier qui s’étend sur 6 686 hectares, dont 4 601 hectares réservés pour les activités aéronautiques, 775 hectares de surfaces non exploitables et 1 310 hectares dédiés aux activités immobilières.

      Sur les 381 hectares de réserve foncière disponible, 181 hectares sont situés à Paris-Charles de Gaulle, 136 hectares à Paris-Orly, 64 hectares à Paris-Le Bourget et sur les aérodromes d’aviation générale.

    • Le groupe possède près de 6700 hectares dans des territoires stratégiquement situés autour de Paris, un des plus beaux capitaux fonciers d’Ile-de-France.

      C’est l’un des points sensibles de la privatisation du Groupe ADP : l’acquéreur des 50,63 % de l’Etat dans les plates-formes de Roissy, d’Orly et du Bourget prendra aussi le contrôle d’un des plus beaux patrimoines fonciers d’Ile-de-France. Le groupe possède près de 6 700 hectares autour de Paris. Des terrains consacrés à l’activité aéroportuaire pour l’essentiel, mais pas tous : pas moins de 1 242 hectares, autant que les 18e et 19e arrondissements de Paris réunis, sont réservés à des opérations immobilières. Des emplacements qui valent de l’or, à proximité immédiate des aéroports et dans un Grand Paris engagé dans une croissance à marche forcée.

      Lire l’éditorial : Groupe ADP : une privatisation contestable
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/19/groupe-adp-une-privatisation-contestable_5438217_3232.html
      « Ce portefeuille foncier est un aspect qui différencie ADP des autres groupes aéroportuaires », souligne Yan Derocles, spécialiste de l’entreprise chez l’analyste financier Oddo. En cas de privatisation, l’Etat récupérera, au terme d’une concession de soixante-dix ans, « l’intégralité du foncier » et de ce qui aura été bâti dessus, assure le ministre de l’économie, Bruno Le Maire. Sans apaiser une double inquiétude : que la sous-valorisation de ce patrimoine offre un magnifique cadeau de bienvenue aux acheteurs, et que la puissance publique perde toute possibilité d’orienter le développement de ces territoires stratégiquement situés.

      Lire aussi Les enjeux de la privatisation d’Aéroports de Paris en 6 questions
      https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/03/13/loi-pacte-les-enjeux-de-la-privatisation-d-aeroports-de-paris-en-six-questio
      « Villes aéroportuaires »
      « Alors que la métropole du Grand Paris est confrontée à des défis d’aménagement pour lesquels la maîtrise foncière est un élément-clé, alors que la question des mobilités non polluantes va être essentielle dans les décennies qui viennent, l’Etat se prive d’un levier d’action direct sur l’usage des sols », regrette le géographe Michel Lussault, directeur de l’Ecole urbaine de Lyon et théoricien de ces « hyper-lieux » de la mondialisation dont font partie les aéroports. Lors de la privatisation des aéroports de Lyon et de Nice, l’Etat avait d’ailleurs conservé la propriété du foncier.

      A proximité immédiate des emprises d’ADP, des collectivités et l’Etat mènent leurs propres projets de développement – dont le controversé complexe de commerces et de loisirs Europacity –, projetant parcs d’affaires et zones commerciales. Des plans qu’un nouvel actionnaire d’ADP pourrait venir perturber en développant une offre concurrente.

      « Le nouvel opérateur va forcément accélérer le développement immobilier, qui n’a pas été très rapide ces dernières années : ADP a optimisé son patrimoine, l’a dépoussiéré, mais a finalement peu construit », estime M. Derocles.

      Le groupe a pourtant fait du développement de véritables « villes aéroportuaires » autour de ses plates-formes un de ses axes de croissance. Des campus de bureaux et des hôtels autour des terminaux sont ainsi bâtis sur des terrains ADP, moyennant un loyer, mais aussi le centre commercial Aéroville d’Unibail-Rodamco-Westfield, à côté de Roissy.

      Du centre d’affaires de Roissypole au quartier tertiaire de Cœur d’Orly, non seulement ADP aménage les terrains, mais joue de plus en plus le rôle d’investisseur et de développeur, restant propriétaire des immeubles qu’il loue à leurs utilisateurs. Le groupe commercialise ainsi 500 000 mètres carrés de bâtiments sans rapport direct avec le transport aérien. Au total, l’immobilier a généré pour ADP un chiffre d’affaires de 265 millions d’euros en 2018, en hausse de 6 %. Cette activité représente 5,9 % de ses recettes et 7,5 % de son excédent brut d’exploitation.

      « Machine à cash »

      Mais les réserves foncières d’ADP seront, pour le futur acquéreur, l’un des actifs les plus faciles à transformer en « machine à cash » pour rentabiliser son investissement. Un gros quart de ces terrains à vocation immobilière sont encore vierges de toute construction : 20 hectares pour des activités liées aux aéroports (entrepôts de fret…) et 335 hectares – deux fois la superficie du quartier d’affaires de la Défense – qui n’attendent que des projets de bureaux, d’hôtels, de commerces pour transformer ces prairies à lapins en lucratifs placements immobiliers et rentes locatives.

      L’arrivée, entre 2024 et 2030, du CDG Express et du Grand Paris Express devrait accélérer l’urbanisation des terrains et faire exploser leur valeur
      Dans ses objectifs stratégiques pour la période 2014-2020, ADP prévoyait une croissance de ses loyers immobiliers comprise entre 10 % et 15 %. Nul doute que les perspectives pour la période suivante, qui seront détaillées aux investisseurs le 5 avril, comprendront un important volet immobilier. L’arrivée, entre 2024 et 2030, du CDG Express, un train direct reliant Roissy au centre de Paris, et du Grand Paris Express, dont quatre gares desserviront les terrains d’ADP, devrait accélérer leur urbanisation et faire exploser leur valeur.
      « Pour l’instant, le manque de transports limitait la demande en bureaux, mais un nouvel opérateur va devoir aller vite pour maximiser sa rentabilité avant d’être dépossédé dans soixante-dix ans », observe l’analyste de Oddo. Comment donner une valeur à ces champs de pissenlits dans l’opération de privatisation ? « C’est très compliqué : nous sommes arrivés à un chiffre de 1,4 milliard d’euros, mais cela dépend énormément de ce qu’on y construit et à quel rythme, on peut facilement multiplier cette estimation par quatre », reconnaît Yan Derocles. Chez les candidats au rachat des parts de l’Etat, évaluées entre 8 et 10 milliards d’euros, les calculettes chauffent.

      La cession d’Aéroports de Paris, une bonne affaire pour l’Etat ?, Philippe Jacqué et Guy Dutheil
      Le gouvernement a tenté de désamorcer les critiques sur la cession d’Aéroports de Paris, débattue jeudi à l’Assemblée nationale.

      C’est la question à 10 milliards d’euros. Si l’Etat cède ses 50,6 % dans Aéroports de Paris (ADP), transformée en concession de soixante-dix ans, fera-t-il une bonne affaire en récupérant de 8 à 10 milliards d’euros, la valorisation de cette participation en Bourse ces derniers mois ?

      Pour le gouvernement, c’est tout vu. « Si l’actif est aujourd’hui relativement rentable, confirme Martin Vial, le commissaire aux participations de l’Etat, son taux de rendement en termes de dividendes a toujours été faible du fait de l’augmentation du prix de l’action. Sur dix ans, son rendement moyen a toujours été plus faible que le reste du portefeuille. »

      Autrement dit, le dividende que rapporte ADP à l’Etat (130 millions d’euros en 2017, plus de 173 millions en 2018), reste trop faible par rapport à l’importance de l’actif dans le portefeuille de l’Etat. Il vaudrait donc mieux le céder et toucher aujourd’hui 8 à 10 milliards d’euros. Cette somme réduira le déficit 2019 et permettra également de limiter la dérive de la dette. De quoi la contenir sous la barre des 100 % de PIB, l’un des objectifs de Bercy.

      Garde-fous
      « D’un point de vue financier, la cession de ses actions n’a d’intérêt pour l’Etat que si le produit de cette cession est supérieur à la somme actualisée des dividendes qu’il pourrait toucher » pendant soixante-dix ans, indique pour sa part François Ecalle, de l’association Fipeco. Aujourd’hui, la capitalisation boursière d’Aéroports de Paris (16,5 milliards d’euros pour l’ensemble) intègre en grande partie le rendement attendu par les actionnaires d’ADP, qu’il s’agisse des dividendes ou des bénéfices à venir. Le futur acquéreur devra donc proposer mieux que la valorisation actuelle de la Bourse s’il acquiert la totalité des parts de l’Etat.

      « A court terme, c’est une bonne affaire pour l’Etat de céder sa participation car il obtient de l’argent immédiatement », indique Estelle Malavolti, professeure à l’ENAC à Toulouse, chercheuse associée à la Toulouse School of Economics. En revanche, il s’agirait selon elle d’une « stratégie court-termiste » pour une société actuellement bien gérée.

      « A moyen terme, assure-t-elle, les perspectives de croissance des investissements déjà financés par l’Etat, comme l’extension de Roissy ou les travaux d’agrandissement et de modernisation à Orly, devraient encore accroître la rentabilité d’ADP. Si l’Etat vend, ces investissements bénéficieront au prochain propriétaire. »

      Article réservé à nos abonnés Lire aussi « La privatisation d’ADP introduit un nouvel acteur qui sera opposé à toute évolution des politiques environnementales »
      Au-delà du prix, tout le monde garde en tête le fiasco de la concession des autoroutes. Les 15 milliards d’euros touchés par l’Etat en 2006 lors de leur cession sont apparus trop faibles au fil des ans par rapport au rendement obtenu ensuite par les sociétés privées d’autoroutes avec la hausse des péages.
      Pour éviter ces dérapages, le gouvernement prévoit cette fois-ci des garde-fous. Bercy assure ainsi que « tous les 5 ans, l’Etat et la société qui gérera ADP fixeront ensemble l’évolution des tarifs en fonction des investissements et de la rémunération du capital ».
      D’autres outils existent pour éviter que le privé lèse l’Etat en reprenant ADP. Eric Woerth, le président (LR) de la commission des finances, défend dans un amendement la mise en place dans le cahier des charges d’une « clause de complément de prix » en cas de « gains liés à une surperformance d’ADP » ces prochaines années.

      Il est également possible d’inscrire des clauses de partage des bénéfices, au-delà d’un certain niveau de profit annuel. « Tout peut se faire, confirme Stéphane Saussier, économiste spécialisé sur les partenariats public-privé, mais si un partage des bénéfices est prévu, cela fera baisser pour l’Etat le prix de la cession de l’aéroport. Rien n’est gratuit ! »

      Enfin, « tout le monde pense qu’ADP connaîtra un avenir radieux et que ses revenus ne feront qu’augmenter, ajoute M. Saussier. Mais soixante-dix ans, c’est long. La fiscalisation du kérosène des avions peut intervenir, tout comme l’irruption rapide de modes alternatifs de transport, et ainsi toucher le secteur. Il existe donc une part de risque. »

      « La privatisation d’ADP introduit un nouvel acteur qui sera opposé à toute évolution des politiques environnementales », Bruno Deffains, Professeur d’éco à l’université Panthéon-Assas,
      Thomas Perroud, Professeur de droit public à l’université Panthéon-Assas, 26 février 2019

      Dans une tribune au « Monde », l’économiste Bruno Deffains et le juriste Thomas Perroud expliquent que la situation de monopole d’Aéroports de Paris devrait suffire à stopper le projet de privatisation.

      « Il n’est même plus possible aujourd’hui de mettre en œuvre la gratuité des péages pour les transports d’intérêt général comme le SAMU ! Est-ce cela que l’on veut pour Aéroports de Paris ? »
      Tribune. L’ingénieur Paul-Adrien Hyppolite, dans Le Monde du 8 février, avance des arguments en faveur de la privatisation d’Aéroports de Paris. Cette tribune marque, en un sens, le ralliement des grands corps techniques de l’Etat à la privatisation d’un service public… alors même que ces corps ont jadis constitué le secteur public et son succès.

      C’est désormais du passé. En même temps, un article du Monde du 16 février affirme que, malgré de très bons résultats financiers, ADP ne baissera pas les redevances pour les usagers. Quel meilleur indice de l’avenir qui se profilera : des aéroports qui ne travaillent plus pour les usagers, la privatisation devant servir les intérêts des nouveaux managers et des actionnaires.

      Les arguments avancés en faveur de la privatisation nous semblent dans ces conditions mériter une discussion plus approfondie. La rentabilité de l’entreprise qui sera cédée est-elle de 7 % ou de 1,6 % ? Cette querelle oppose deux façons d’évaluer la rentabilité d’une entreprise, la rentabilité financière, qui intéresse le propriétaire, et la rentabilité économique qui mesure la performance de la mise en œuvre des capitaux, indépendamment de leur mode de financement.
      Autrement dit, la rentabilité économique d’une entreprise a pour fonction de mesurer sa capacité à être rentable dans l’exploitation de ses affaires en dehors de toute considération de dettes et de charges financières. On comprend que les propriétaires ou les actionnaires s’intéressent surtout à la rentabilité financière, car c’est la rentabilité des capitaux qu’ils ont placés dans l’entreprise.

      Comment évaluer la valeur d’un aéroport ?

      Maintenant, si l’on considère l’intérêt de la collectivité et pas uniquement des actionnaires, ce point de vue se discute fortement. Non seulement l’intérêt financier de l’Etat à l’opération à moyen et long terme est plus que douteux, mais en outre l’intérêt de la collectivité se trouve posé au regard de la rentabilité économique d’ADP. Or, c’est d’une approche globale de l’intérêt de l’opération dont nous avons besoin.
      Non seulement l’intérêt financier de l’Etat à l’opération à moyen et long terme est plus que douteux, mais en outre l’intérêt de la collectivité se trouve posé au regard de la rentabilité économique d’ADP

      Justement, l’évaluation de l’intérêt de la vente pour la société est loin d’être simple. Car comment évaluer la valeur d’un aéroport ? On n’évoque généralement qu’une seule méthode, celle de la somme des flux futurs actualisés, utilisée couramment lorsque l’on souhaite vendre une entreprise du secteur commercial. Or, cette méthode n’est pas la seule, elle est fortement dépendante des prévisions économiques et elle présente également une certaine part d’arbitraire. Pour que l’opinion publique puisse juger de la valeur d’ADP, il faudrait une évaluation reposant sur l’ensemble des méthodes disponibles. Or, ces chiffres n’ont pas été fournis.

      La méthode des flux futurs actualisés a déjà été utilisée pour l’évaluation des autoroutes. On en mesure aujourd’hui le succès. Désormais, les compagnies privées ont fini de rembourser ce qu’elles avaient payé. Les automobilistes sont captifs et l’Etat se prive tous les ans d’un argent qu’il aurait pu investir dans la construction d’autres infrastructures.
      De surcroît, l’Etat perd la main sur un élément essentiel de la politique de transport. Comment peut-on croire une seconde que le cahier des charges qui sera signé pourra prévoir sur 70 ans les politiques à mener ? Faudra-t-il indemniser l’opérateur à chaque fois qu’il sera souhaitable de réformer le transport aérien ?

      Exemples à l’étranger

      La privatisation des autoroutes et d’ADP introduit un nouvel acteur dans le jeu politique qui sera farouchement opposé à toute évolution des politiques environnementales qui pourraient réduire sa rentabilité, alors même que la politique des transports doit être en harmonie avec ces politiques. Il n’est même plus possible aujourd’hui de mettre en œuvre la gratuité des péages pour les transports d’intérêt général comme le SAMU ! Est-ce cela que l’on veut pour Aéroports de Paris ?

      Il est tout aussi pertinent de s’interroger sur l’indemnité préalable qui sera versée à ADP en avance de son hypothétique renationalisation. Là encore, le contribuable risque fort de faire une mauvaise affaire. Lorsque la loi de 2005 a donné la propriété des biens à ADP, les actionnaires ont acheté des parts d’une société qui détient des biens à perpétuité. La loi actuelle ramène cette durée à soixante-dix ans. Il faudrait donc logiquement indemniser la différence entre la perpétuité et soixante-dix ans…

      Est-il bien sérieux d’imaginer qu’un investisseur privé fasse une différence réelle entre les deux ? Les investisseurs privés ont structurellement un biais pour le court terme comme le suggèrent la plupart des analyses en économie comportementale. Les signes d’un court-termisme grandissant sont visibles partout. Dès lors, le préjudice allégué a tout l’air d’un préjudice fantôme, complètement abstrait pour la plupart des investisseurs.

      Peut-on prendre exemple des privatisations à l’étranger ? Il y a en effet, sur le papier, des privatisations réussies, si l’on prend comme indice le flux de passagers. Par exemple, Heathrow, le principal aéroport de Londres a été privatisé, mais il ne faut pas passer sous silence les problèmes de concurrence que cette privatisation a générés.

      Caractère idéologique du projet

      La Commission de la concurrence britannique a en effet, en 2009, estimé que l’opérateur privé gérant l’ensemble des aéroports de Londres devait vendre Stansted et Gatwick, car l’opérateur était en monopole ! N’est-ce pas la situation dans laquelle va se trouver l’opérateur qui achètera ADP ? C’est d’ailleurs Vinci qui a bénéficié de la vente de Gatwick et qui est en passe d’acquérir un monopole de ce côté-ci de la Manche. Aucune évaluation sérieuse de l’impact concurrentiel n’a été établie avant la mise en vente d’ADP, ce qui prouve bien le caractère plutôt idéologique de ce projet.

      La Constitution s’oppose-t-elle à la privatisation ? Les partisans de la privatisation d’ADP prennent argument de l’avis que le Conseil d’Etat vient de rendre sur la privatisation. Dans cet avis le Conseil réitère un critère qu’il avait lui-même dégagé dans l’affaire Bayrou, en 2006, dans laquelle il avait validé la privatisation des autoroutes ! Il prend prétexte de ce que ADP est… régional.

      Absurde quand on sait que ADP est la porte d’entrée de notre pays pour 80 % des dizaines de millions de visiteurs étrangers – 95 % de non Européens – qui arrivent dans notre pays par avion. Autrement dit, l’interprétation du Conseil d’Etat repose en réalité sur une interprétation erronée de la situation d’ADP eu égard aux obligations constitutionnelles qui découlent du préambule.

      Tout montre qu’ADP est bien en position de monopole, comme l’entreprise qui détenait les aéroports londoniens… En somme, et contrairement aux arguments mis en avant, la défense de la privatisation est basée sur des considérations qui ne sont ni précises ni justes.

      Bruno Deffains et Thomas Perroud sont les auteurs de « La privatisation d’Aéroports de Paris et l’alinéa 9 du préambule de la Constitution de 1946 : Aéroports de Paris est un monopole de fait ! »

  • Lutte des classes, lutte des places
    https://www.franceculture.fr/emissions/les-nouvelles-de-leco/les-nouvelles-de-leco-du-mardi-08-mai-2018

    Le géographe Michel Lussault développe une analyse des "places", considérées non seulement dans leur dimension spatiale, mais aussi sociale et qui permettent de comprendre les nouvelles luttes politiques et économiques à l’oeuvre dans la mondialisation.


    Illustration du Capital par Hugo Gellert• Crédits : VITALIY KARPOV / RIA NOVOSTI / SPUTNIK - AFP - AFP

    Le géographe Michel #Lussault développe une analyse des "places", qui renvoie à une conception de l’#espace, non comme un simple contenant, un cadre extérieur dans lequel se déroulerait la vie économique, mais bien un objet particulier à considérer en soi. Par “place”, il ne faut donc pas entendre de simples localisations géographiques, ni même une situation dans un espace social, mais une tentative de conciliation entre les deux.

    Cette analyse originale est intéressante, car elle permet d’avoir un regard neuf sur les relations de pouvoir et de cohabitation entre les populations populaires et ce que Lussault appelle l’élite “#cinétique” ou circulante, du fait de son usage et de sa voracité de lieux. Au paroxysme de la #mondialisation, qui achève de réduire les distances, cette élite internationale jouit d’une puissance et d’une liberté spatiale sans précédent.

    Dans un article du journal l’Humanité, le philosophe Grégoire Chamayou explique que le système capitaliste, pétri de contradiction, parvient à retarder ses crises grâce à des “ruses géographiques”.

    Reprenant l’analyse du géographe David #Harvey, il explique que c’est grâce à son incroyable plasticité, sa capacité de transformation et d’adaptation, que le capitalisme parvient à se perdurer. Pour David Harvey, il faut également considérer l’#espace comme un objet d’étude à part entière et non pas un simple environnement où se déploient des réalités économiques.

  • BnF - Enseigner le territoire : comment enseigner la #géographie de la #France à l’école aujourd’hui, quels sont les nouveaux enjeux ?

    http://www.bnf.fr/fr/evenements_et_culture/anx_conferences_2017/a.c_171207_paysages_reghezza-ritt_lussault.html

    Enseigner le territoire : comment enseigner la géographie de la France à l’école aujourd’hui, quels sont les nouveaux enjeux ?

    Magali Reghezza-Zitt, Michel Lussault
    animé par Sylvain Kahn
    Tableaux de la France : géographie – Territoires et paysages : quelles France ?

    Conférence du 7 décembre 2017

    apparemment aussi #journalisme because une forte critique des médias

  • EuropaCity : du capitalisme de l’usine à celui de la métropole.

    http://paris-luttes.info/home/chroot_ml/ml-paris/ml-paris/public_html/local/cache-vignettes/L1067xH600/arton7823-1f8f2.jpg?1490796989
    http://paris-luttes.info/europacity-du-capitalisme-de-l-7823?lang=fr

    Un camarade du collectif de contributeurs de Paris-lutte.info s’est penché sur le cas du projet EuropaCity. A partir de cet exemple, il propose quelques pistes de réflexion sur le capitalisme d’aujourd’hui.

    @rezo @nddl @karacole @val_k @bastamag

  • Mondialisation : du non-lieu à l’hyper-lieu
    https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-2eme-partie/mondialisation-du-non-lieu-lhyper-lieu

    Pas écouté encore

    Michel Lussault, géographe et professeur à l’Ecole normale supérieure de Lyon, analyse les nouvelles géographies de la mondialisation dans « #Hyper-lieux : les nouvelles #géographies de la #mondialisation ».

    http://media.radiofrance-podcast.net/podcast09/12360-01.02.2017-ITEMA_21215421-1.mp3

  • Hyper-lieux, Michel Lussault, Sciences humaines - Seuil | Editions Seuil
    http://www.seuil.com/ouvrage/hyper-lieux-michel-lussault/9782021322507

    Et si l’on regardait le Monde autrement ? C’est à cela que ce livre s’attache. Il part du constat que bien des analyses de l’évolution du Monde contemporain insistent sur son uniformisation irrémédiable. La standardisation des paysages, des objets et des pratiques, imposée par la globalisation du capitalisme financiarisé, installerait un espace lisse et « plat », où les distances disparaissent, où chaque position vaut une autre, où les différences culturelles s’estompent, où l’individu est aliéné et sa sociabilité appauvrie.

    Or, une observation attentive confronte immédiatement à des situations bien plus complexes. En effet, il est frappant de constater que le Monde se différencie de plus en plus en lieux qui s’affirment comme des « prises » sur la mondialisation, des attracteurs et des ancrages de la vie sociale. Ce sont des endroits où la co-habitation des individus se concrétise, se réalise et s’éprouve dans toute sa richesse, sa créativité et son intensité d’expérience vécue. Les « #hyper-lieux », où convergent les humains et les réalités matérielles et immatérielles, en sont l’emblème : bon gré mal gré, des sociétés s’y composent et même des formes politiques nouvelles s’y ébauchent.

    Ainsi le Monde est à la fois toujours plus globalisé et homogène et de plus en plus localisé et hétérogène : cette tension est constitutive des nouvelles géographies de la #mondialisation.

    https://www.franceculture.fr/emissions/culturesmonde/la-marche-24-mobilites-et-inegalites-la-nouvelle-lutte-des-places


    #livre

  • Les contradictions de l’urbanisation globale du monde

    http://www.demainlaville.com/les-contradictions-de-lurbanisation-globale-du-monde-selon-michel-lus

    J’ai un faible pour l’approche de Michel Lussault :) (j’adore)

    Le mardi, place Saint-Germain-des-Prés, se tient un rendez vous secret. Les Mardis de la Philo organise des conférences philosophiques afin « de mettre une pensée philosophique à la portée de non philosophes ». Au programme, « Albert Camus, vivre sans appel », « Le principe solidarité », « S’instruire et rêver avec Bachelard », « Philosophie de l’identité »… mais aussi, « Le Devenir urbain du monde » et « La Ville dans la pensée contemporaine ». Ce sont ces deux derniers thèmes, animés par le duo explosif Thierry Paquot – philosophe – et Michel Lussault – géographe – qui nous ont évidemment intéressés.

    #urban_matter #géographie

  • Frontières / 4. Autour de #Laetitia_Tura

    Depuis une dizaine d’années, la photographe Laetitia Tura mène un projet photographique et audiovisuel autour de la mise en scène des frontières, l’invisibilité et la mémoire des parcours migratoires.

    En présence de l’artiste et de Michel Lussault.

    Projection-débat avec #Michel_Lussault, géographe, président du Conseil supérieur des programmes, directeur de l’Institut français de l’éducation (Lyon), professeur des universités à l’École Normale Supérieure de Lyon et #Chowra_Makaremi, docteure en anthropologie, chargée de recherche au CNRS.

    Laetitia Tura présente notamment trois séries de photographies

    « Linewatch », consacré au dispositif frontalier entre le Mexique et les États-Unis (2004-2006), où elle s’interroge sur la mise en scène de la frontière.
    « Je ne suis pas mort, je suis là », travail consacré à la frontière Maroc / Melilla, où elle s’intéresse à la mise à l’écart et la disparition de migrants (2007-2012).
    « Ils me laissent l’exil », série réalisée autour de la Retirada des Républicains Espagnols en 1939, où elle pose la question de la mémoire de cet exode.

    Laetitia Tura appartient au collectif photographique « Le bar Floréal ».

    http://www.dailymotion.com/video/x2v2gnn

    #spectacle #mise_en_scène #visibilité #invisibilité #lumière #ombre #photographie #murs #barrières_frontalières #frontières #San_Diego #Tijuana #Mexique #USA #Etats-Unis #dispositif_frontalier #traces #Maroc #Melilla #Espagne #blocage #zone_de_transit #disparition #mourir_aux_frontières #mise_à_l'écart #campement #tranquilo #mort #corps #fosse_commune #Tunisie #tombe #cimetière #dueil #Mauritanie #déshumanisation #monument #migrations #asile #réfugiés
    #guerre_d'Espagne #guerre_civile_espagnole #camp_d'internement #franquisme #Retirada #mémoire #loi_de_mémoire_historique #Espagne #déni

    Quelques extraits qui me semblent particulièrement intéressants dans ce débat fort passionnant....

    Michel Lussault : « Autant la frontière se voit, autant le passage se masque. La #traque en revanche se documente, se montre. (...) Le mur est partout, le passage nulle part » (minute 31’00)

    Michel Lussault : « Le spectacle de la puissance que la frontière montre est toujours hanté par le spectre de l’impuissance. Et ce fantôme est le migrant »

    Chowra Makaremi : Il faut parler de « drames du contrôle migratoire » et non pas de « drames de la migration »

    Chowra Makaremi : « L’humanitaire est devenu une façon de regarder le monde, donc la mort est devenue une limite : la mort est devenue une limite : on ne peut pas supporter que des gens meurent, c’est publiquement insupportable. Et le sécuritaire aussi est devenu une façon de regarder le monde : on ne peut pas accepter que nos frontières s’ouvrent. On ne peut ni supporter de les voir mourir, ni supporter qu’ils circulent. Les frontières sont une ligne de #front politique, parce qu’il y a le risque de mourir, mais ’on le prend quand même’. L’enjeu est donc entre la vie et la mort, ce qui ramène à un enjeu révolutionnaire : risquer sa vie pour avoir une vie meilleure. C’est éminemment politique. C’est très rare que dans nos démocraties qu’on arrive sur des lignes de front pareil. La migration est une ligne de front de ce genre-là ».

    La question du #monument aux morts aux frontières... 1’’19’00
    Laetitia Tura fait un parallèle entre un éventuel monument aux morts aux frontières et l’Arc de Triomphe pour le #soldat_inconnu et elle dit : « On en est pas là, puisque la guerre, cette guerre qui n’est pas dite, a encore lieu. Personne, à part quelques rares individus dans des endroits donnés, par leur propre initiative, n’est en mesure de porter et de faire cet acte symbolique du monument »

    La question de la guerre d’Espagne débute à 1’’22’00 —> « Ils me laissent l’exil »

    (merci à @odilon de m’avoir signalé la vidéo)

    @albertocampiphoto @marty @daphne : je vous conseille de le voir...

  • « L’idée de vouloir faire de l’histoire un ″roman national″ est dérangeante »
    http://www.lemonde.fr/education/article/2015/05/13/l-idee-de-vouloir-faire-de-l-histoire-un-roman-national-est-derangeante_4632

    Le géographe Michel Lussault préside le Conseil supérieur des programmes (CSP), à l’origine des projets de programmes scolaires qui nourrissent depuis quelques semaines un vif débat. C’est d’abord leur conception, leur écriture, le fait qu’ils rompent avec la conception annuelle des programmes pour fixer des objectifs sur trois ans, qui ont pris de court la communauté éducative. Puis les critiques se sont concentrées sur les contenus, en histoire notamment, où certains thèmes apparaissent comme obligatoires quand d’autres sont laissés au choix des professeurs. Alors que les enseignants sont invités, depuis le 11 mai, à donner leur avis sur ces projets, le président du CSP s’explique sur ces polémiques.

    Parmi les projets de programmes, ce sont ceux d’histoire qui soulèvent les polémiques les plus virulentes. Etes-vous surpris par leur ampleur ?
    Pas vraiment. Nous n’avons pas d’exemple d’annonces de programmes, dans l’histoire de l’école, qui n’ait pas donné lieu à des contestations. Nous avons conservé un rapport non pacifié à notre histoire. A chaque fois, c’est la même chose : la polémique apparaît à propos de ce qui est supposé être enlevé – ou ajouté – à une hypothétique belle et bonne histoire de France, un programme idéal qui n’existe pas. La réalité est autre : chaque programme est le fruit de compromis, d’arbitrages, et ceux que nous avons adoptés, indépendamment du ministère de l’éducation nationale, ne font pas exception.

    La question de l’enseignement de l’islam, inscrit dans les thématiques obligatoires en classe de 5e, a enflammé – et politisé – le débat. Accordez-vous réellement une place plus importante à cette religion ?
    Nous faisons le choix de proposer aux professeurs plusieurs entrées (des « sous-thèmes ») pour chaque thème trimestriel. L’enseignement de l’islam est obligatoire, en effet. Mais c’est déjà le cas aujourd’hui ! Certains prétendent que la chrétienté, elle, ne sera plus forcément enseignée. Par incompréhension ? Par malhonnêteté ? Peut-être me suis-je mal expliqué. En tout cas, la chrétienté n’est pas facultative.
    Je prends un exemple. « Société, Eglise et pouvoir politique dans l’Occident chrétien du XIe siècle au XVe siècle » est un des thèmes à traiter en 5e. Un seul sous-thème est obligatoire : la monarchie française. On ne peut pas étudier ce sujet sans aborder la chrétienté. L’enseignant doit ensuite choisir entre deux autres points, qui relèvent de l’histoire sociale, mais qui tous deux reviennent à étudier une société marquée par l’Eglise. Mais nous aurions dû l’écrire plus clairement.
    […]
    François Hollande lui-même parle de récit national !
    J’invite François Hollande et Najat Vallaud-Belkacem à ne pas forcer le trait sur ce point car on finirait par « désespérer Billancourt » : les professeurs ne sont pas pour le roman national. N’en rajoutons pas.

  • Café Géographique : « Entre ségrégation et séparation, comment vivre la ville ensemble ? » - #AK42 Association de la Khâgne 42. Fauriel
    @franz42
    https://sites.google.com/site/ak42fauriel/home/cafe-geographique-entre-segregation-et-separation-comment-vivre-la-vil

    L’association de la Khâgne 42, sous l’égide de l’association Les Cafés géographiques ( http://cafe-geo.net) organise le 21 février 2014 à 19h un café géographique autour du thème « Entre ségrégation et séparation, comment vivre la ville ensemble ? », ouvert au public.
    Ce café géographique sera animé par François Arnal, géographe et professeur de Khâgne (Lycée Claude-Fauriel, Saint-Etienne) ; le géographe Michel #Lussault, professeur des Universités en géographie à l’ENS de Lyon est invité pour débattre.
    L’#habiter et l’avènement du #Monde (une nouvelle organisation spatiale des réalités sociales) comptent au nombre des concepts-clés qui retiennent son attention. La question de l’urbain y tient également une place prépondérante, dans la mesure où les notions de distances, de coexistence voire de #coprésence ou d’agrégation dans des villes de plus en plus cosmopolites ("l’urbain mondial") font aujourd’hui face à d’autres dynamiques essentielles : celles du principe séparatif, et dans certains cas, ségrégatif.
    La #séparation n’est pourtant pas la #ségrégation : pour M. Lussault, « le principe ségrégatif travaille en profondeur toutes les situations et constitue une aspiration partagée par une majorité de groupes sociaux », il est un fait social global qui dépasse les catégories du racial ou du spatial. Quant à la séparation, elle est selon lui avant tout une condition de l’habitation humaine, rappelant par là Hannah Arendt pour qui « la politique naît de l’espace qui sépare les hommes ».
    Ces deux notions sont au coeur de la réflexion géographique qui discute les concepts de spatialité, mobilité, coprésence et des jeux des acteurs avec la distance, particulièrement vifs dans le cas des villes d’aujourd’hui.

  • Dictionnaire de la géographie / Revue EspacesTemps.net - Idées - France Culture
    http://www.franceculture.fr/emission-l-essai-et-la-revue-du-jour-dictionnaire-de-la-geographie-rev

    Jacques Lévy et Michel Lussault (ss. dir.) : Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés (Belin) / Revue électronique Espaces Temps
     « L’histoire n’est que la géographie dans le temps, comme la géographie n’est que l’histoire dans l’espace » disait Élisée Reclus, qui a évidemment sa notice dans le considérable état des lieux et des savoirs que constitue ce dictionnaire. Le géographe anarchiste, auteur de L’Homme et la Terre, mais aussi d’Histoire d’un ruisseau, qui a souligné l’influence du milieu sur le développement des sociétés, avance là une définition conjointe de la géographie et de l’histoire qui consonne avec celle de l’entrée Géographie, due à Jacques Lévy : l’objet de cette science de l’homme est l’espace des sociétés et la dimension spatiale du social. Élisée Reclus, qui reconnaissait aussi que « l’homme est la nature prenant conscience d’elle-même » – ce qui en a fait pour beaucoup le précurseur de l’écologie – avait ajouté une dimension littéraire à son écriture de la géographie, voyant le monde en poète et confirmant l’intuition de Hölderlin, savamment commentée par Heidegger – qui a également sa notice grâce à Thierry Paquot –selon laquelle « l’homme habite poétiquement sur cette terre ». C’est aussi pourquoi l’on peut déplorer l’absence de Julien Gracq dans ce dictionnaire, lui qui a consacré tant de sublimes pages à la connaissance du paysage par la géographie. Mais on se consolera à la lecture de l’article sur la nomadologie de Deleuze et Guattari, lesquels voyaient la géographie comme non seulement physique et humaine mais aussi mentale, tout « comme le paysage ». « Elle arrache l’histoire au culte de la nécessité – ajoutaient-ils – pour faire valoir l’irréductibilité de la contingence ». Et surtout, on se reportera à l’article final, « Zut », « interjection proférée – je cite – par les auteurs de dictionnaires lorsqu’ils constatent avec dépit qu’ils ont oublié de consacrer une entrée à un terme fondamental ». Cinq lignes signées, noblesse oblige, Michel Lussault et Jacques Lévy.

    #DGES #Deleuze #Guattari #Gracq

  • L’Avènement du Monde (2013) , Michel Lussault, Sciences humaines - Seuil

    http://www.seuil.com/livre-9782020966641.htm

    En un demi-siècle, le monde est devenu le Monde.

    Avec cette majuscule, il ne s’agit pas de dire que le monde a changé sous l’effet de la mondialisation, mais d’affirmer qu’il est véritablement advenu, subvertissant les ordres anciens (empires, États, villes, etc.) et les catégories intellectuelles qui nous permettaient de les penser. La mondialisation bouleverse tout et construit de nouveaux cadres de vie et d’organisation des sociétés humaines. Les mutations sont de tous ordres et l’on peine encore à stabiliser les analyses, sans doute parce que nos outils conceptuels, forgés aux XIXe et XXe siècles, sont désormais largement inadaptés.

    #biblio #géographie #lussault

  • L’Avènement du Monde

    https://www.facebook.com/events/337226053047521

    Avec Michel Lussault, vous ne pouvez pas vous tromper. Ce qu’il fait est toujours bien, ce qu’il écrit parfois difficile à lire, mais passionnant, ça vaut le coup de faire un effort !

    Café géo : « L’Avènement du Monde », avec Michel Lussault (géographe, professeur d’études urbaines, Université de Lyon / Ecole Normale Supérieure de Lyon, Directeur de l’Institut Français d’Éducation), le mercredi 12 juin 2013, à 18h00 au Café de La Cloche (4 rue de la Charité, Lyon 2e arrondissement, métro Bellecour).

    Toutes les informations :
    http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=2687

    #géographie