Guerre contre le terrorisme, gouvernance par le chaos, surveillance de masse, attentats sous faux drapeau… bienvenue dans le monde de L’effet papillon !
Pourquoi un troisième livre ?
Quand j’ai proposé mon premier manuscrit (Apocalypse orange) aux éditeurs, le reproche m’a été fait de ne pas faire suffisamment jouer l’uchronie dans mon récit, de n’en faire qu’une toile de fond. Au lieu de réécrire le texte, ce qui aurait été un exercice un peu fastidieux, j’ai préféré en produire une version alternative. Dans L’effet papillon, on retrouve le même cadre (la France soviétique de 1980), les mêmes personnages et parfois les mêmes situations. Seule la trame de l’histoire est différente.
D’où l’idée de l’effet papillon ?
Marie, qui est hors champ dans le premier livre, fait son apparition dans le troisième car elle prend alors une autre décision. Son irruption dans le récit bouleverse le cours de l’histoire par effet de réaction en chaîne, selon le principe de l’effet papillon dont parle Konrad Lorenz (le battement d’ailes d’un papillon au Brésil peut provoquer une tornade au Texas). François s’engage alors dans les rangs adverses, ceux de la résistance anticommuniste, car sa rencontre avec Natacha tourne court.
Tout bascule lors de la fête chez Nathalie ?
Oui, précisément quand François atterrit dans une chambre qui sert de vestiaire improvisé. La même scène est présente dans les deux livres (page 52 dans Apocalypse orange et page 20 dans L’effet papillon) mais dans le premier cas François se trouve seul et va retrouver Olga tandis que dans le second Marie entre dans la pièce…
Quel lien traces-tu entre l’uchronie et l’effet papillon ?
Le principe est identique : une décision fait tout basculer. Seule l’échelle change : dans le premier cas, il s’agit de la Grande Histoire, dans le second de la petite. Dans le roman, j’ai essayé de les faire se rejoindre tout en évoquant la fragilité des convictions politiques. François s’engage pour le Parti dans le premier livre, dans les rangs terroristes dans le second… Finalement, son choix lourd de conséquences ne tient qu’à très peu de choses et apparaît après-coup comme totalement réversible. Une idée que j’emprunte au Lacombe Lucien de Modiano.
Dans ton livre, les frontières entre les deux camps apparaissent très floues….
Oui, du fait des manœuvres d’infiltrations auxquelles se livre l’appareil du Parti. Elles peuvent conduire à des attentats sous faux drapeaux bien utiles au pouvoir pour serrer ensuite la vis sécuritaire… Toute ressemblance avec la politique des pays occidentaux serait bien entendu fortuite !
La tonalité du roman est différente de celle du premier. Il est plus court, plus resserré, plus nerveux aussi…
J’ai voulu éviter les scènes périphériques, nombreuses dans Apocalypse orange, pour me centrer davantage sur la trame du récit et surtout sur le cadre u-chronique que j’ai davantage travaillé. Certains lecteurs m’avaient d’ailleurs dit qu’on se perdait un peu dans des passages anecdotiques sans grand intérêt pour l’ensemble de l’histoire.
La résistance est présentée de manière plus complexe que dans le 1, moins monolithique…
C’est à mon avis le cas de tous les mouvements de résistance contre un pouvoir central. Il y a des rebelles « modérés » et « radicaux » ! Il y a ceux qui veulent négocier pour assouplir le régime en en conservant les bases et ceux qui veulent tout mettre à bas. Il y a aussi (et surtout) ceux qui agissent secrètement pour le compte de l’État… Je crois en fait assez peu aux révolutions spontanées, l’Histoire en offre très peu d’exemples.
Eric Michel, romancier humaniste et engagé, est l’auteur de deux romans qui ont rencontré un vif succès critique : Algérie ! Algérie ! et Pacifique.