person:robinson crusoé

  • Soi-même comme un cannibale
    https://www.franceculture.fr/emissions/le-journal-de-la-philo/le-journal-de-la-philo-du-lundi-23-avril-2018


    C’est un livre dont vous avez peut-être déjà entendu parler, ici ou ailleurs, il est paru aux PUF : c’est le livre de l’anthropologue Mondher Kilani, Du goût de l’autre, fragments d’un discours cannibale.

    Le cannibalisme, le phénomène n’échappe pas aux philosophes, c’est pourquoi j’en parle… Mais j’en parle aussi et tout simplement parce que je suis comme tout le monde : le cannibalisme, ça me fascine. Mais pourquoi ? La question philosophique part bien de là : que recouvre cette fascination entre attraction et répulsion ?

    Voici le genre de récits qu’on imagine quand on prononce le mot de “cannibalisme” : des cérémonies venues d’ailleurs, avec de la faim, du sang… Pourtant, à bien y regarder, le cannibalisme dépasse largement ce genre de récits, exotiques, érigés au rang de faits. Il dépasse même largement les époques, les frontières, les peuples auxquels on l’a associé, des Scythes et Assyriens, aux Jivaros d’Amazonie et aux Dayaks de Bornéo…

    Si vous regardez bien, le #cannibalisme est partout. Son sens plastique le permet : il renvoie tout à la fois aux conquêtes coloniales de Christophe Colomb (c’est la 1ère fois que le mot apparaît) qu’à la manducation de la chair humaine, à l’autre monstrueux ou à la dévoration des siens (même de ses parents).

    Et si vous regardez encore mieux, le cannibalisme traverse la culture : Moby-Dick, Robinson Crusoé, le film récent de Julia Ducournau, Grave, le Petit Chaperon Rouge, Sade... Voici donc le cannibalisme : renvoyé à un ailleurs, il ne cesse pourtant de hanter notre culture la plus proche.

    Loin d’être une question de nature, un donné, un fait, on l’entend avec Lévi-Strauss qui rappelle le mythe narrant son apparition, le cannibalisme est bien plutôt une question de culture. Il trouve dans la fiction et la narration, les mots et les images, les contes et les constructions fantasmatiques, sa raison d’être.

    D’où ce paradoxe du cannibalisme : cette altérité, cette étrangeté, ce sont les nôtres, celles que l’on cultive dans nos imaginaires, celle sur laquelle Montaigne, Diderot, Bataille, Baudrillard, Barthes ont réfléchi...

    Et c’est la thèse de Mondher Kilani, dans son livre, à la fois réflexion sur l’anthropophagie et sur la méthode anthropologique (pas si éloignées dans les termes), il souligne ce rapport toujours construit à l’autre, façonné et médiatisé par nos discours. Mais pourquoi le cannibalisme en particulier ? Pourquoi le cannibale serait-il cet autre privilégié ?

    Et si le cannibalisme ne faisait pas que hanter nos esprits mais nos gestes, même les plus amoureux ? Et si nous étions, nous tous, des cannibales ? Quand on mange de la viande, quand on épie les autres, qu’on aimerait bouffer le monde, qu’on dévore des livres, ou avec son amant…

    Il y a quelque chose de foncièrement déconcertant avec le cannibale : cet autre ne mange pas quelqu’un d’autre, mais de la chair humaine, il mange quelqu’un qui lui ressemble et il le fait encore plus sien, il l’ingère, le digère, l’incorpore.

    Voilà donc l’étrangeté, la vraie : le cannibale est vu comme un autre, alors qu’il reste dans le même, à manger les siens... Et il y a ici comme un aveu : c’est comme si un rapport à l’autre restait impossible, même pas pour partager un repas.

  • J – 126 : Je suis allé voir, coup sur coup, deux films de science-fiction de la grande production hollywoodienne, Premier contact de Denis Villeneuve et Passengers de Morten Tyldum, les deux films s’attaquant chacun à un des grands thèmes de la science-fiction, Premier contact , la rencontre avec une espèce venue d’ailleurs, Passengers , les voyages au long cours avec hibernation et autres complexes temporels dus aux voyages à une vitesse proche de celle de la lumière. C’est la période de la trêve, de la commémoration du massacre des innocents, les enfants et moi n’aimons rien tant que d’enchaîner les visites de musée et les séances de cinéma. À vrai dire je ne pense pas que j’aurais normalement tenu la moindre chronique du film Passengers , grosse production hollywoodienne, moyens de décor et de trucages pléthoriques et spectaculaires, et psychologie de bulots pour les trois personnages de ce film. Et je ne m’attendais pas non plus à trouver des qualités inespérées à Premier contact , le seul film que j’ai vu du même Denis Villeneuve étant Enemy que j’avais trouvé fort poussif.

    Dans Passengers un vaisseau intersidéral, intersidérant dans ses dimensions et son fonctionnement, emmène à son bord 5000 passagers tous en hibernation pour un voyage d’un siècle en direction d’une planète à coloniser, tout fonctionne automatiquement dans ce vaisseau qui traverse un champ de météorites dont l’une, plus grosse que les autres, endommage, superficiellement, croit-on d’abord, le vaisseau, causant une avarie inopinée, un des sarcophages d’hibernation réveille le passager qu’il contient, alors que le vaisseau est encore à 90 années de voyage de sa destination finale. Le type se retrouve tout seul dans un vaisseau qui doit avoir la superficie d’une ville comme Fontenay-sous-Bois dans le Val de Marne et personne avec qui partager ses états d’âme hormis un droïde qui fait office de barman et qui est le sosie de Tony Blair, Michael Sheen, et naturellement aucun moyen de joindre la Terre ou de réactiver l’hibernation. Après un an d’une errance fortement alcoolisée, ce Robinson Crusoé du voyage à la quasi-vitesse de la lumière manque cruellement de compagnie, un droïde barman c’est pas non plus un copain de rugby, fût-il un sosie de Tony Blair, on peut pas toujours compter sur lui pour vous donner le petit coup d’épaule quand ça va pas bien, et donc, il commence à caresser l’idée que peut-être, il pourrait réveiller un autre passager, histoire d’avoir un peu de compagnie, préférablement une passagère, blonde de préférence, et si possible avec une jolie poitrine, on en déduit habilement, c’est finement suggéré, que le type est hétérosexuel, lui-même n’est évidemment pas mal de sa personne, carrure de troisième ligne, mâchoire carrée, apparemment de nationalité américaine, seulement voilà, ce serait quand même lui faire un sale tour à cette jolie blonde, elle aussi se retrouverait prisonnière d’une ville de la taille de Fontenay-sous-Bois dans le Val-de-Marne avec, pour seule compagnie, un Américain à la mâchoire carrée et au physique d’universitaire jouant dans l’équipe de football américain — je passe un peu sur le conflit intérieur de notre homme qui échange pas mal sur le sujet avec Tony Blair —, ça tombe bien, elle est elle-même américaine et, insupportable suspens, elle est également hétérosexuelle, ils se plaisent beaucoup, il faut dire mâchoire carrée avait lu toutes les archives du blog de jolie blonde, lui ne pouvait pas douter qu’ils étaient faits l’un pour l’autre, elle, de toute façon, une blonde à belle poitrine, pensez si on a beaucoup développé sa psychologie de personnage d’écrivaine — lui est une sorte de réparateur agréé de tout ce qui se connecte, un type bien je vous dis, elle, un métier féminin, journaliste, écrivaine, intelligente donc, ne vous fiez pas aux apparences, parce que oui, blonde et belle mais intelligente, et drôle, vous n’avez pas idée — quant au consentement c’est redevenu un truc sacrément has been au XXIVème siècle. Tout ne se passe donc pas si mal sur l’ USS-Fontenay .

    Ça se corse un peu quand même, le droide barman ne sait pas tenir sa langue et finit par lâcher à jolie blonde écrivaine que mâchoire carrée l’a réveillée pour avoir un peu de compagnie. Crise du couple alors que, jusqu’à maintenant, c’était fusionnel avec accouplement dans la grande salle du réfectoire, déserte, forcément. C’est pas hyper bien développé parce que voilà on n’a pas trop le temps, il y a d’autres priorités, le réacteur principal bat de l’aile, menacerait même de tout faire exploser et de rayer de la carte Fontenay-sous-Bois, donc à défaut de se rabibocher sur l’oreiller, on fait équipe dans la salle des machines, bien obligés, et naturellement en se sauvant mutuellement la vie, on se rapproche, on se pardonne et on repart comme en 14, 2314. L’US S-Fontenay est remis sur pied, il fonctionne à nouveau au quart de tour et maintenant que le couple est également réparé, mâchoire carrée sait tout réparer, et donc, on risquerait de s’emmerder un peu, ellipse de 90 années, l’ USS-Fontenay arrive à bon port, on réveille l’équipage qui découvre qu’il s’en est passé de belles pendant leur sommeil.

    C’est con parce que dans cette ellipse, il y avait un film. Un vrai. Avec deux personnages. Une femme. Un homme. Une femme et un homme. Un début d’humanité. Un début de civilisation peut-être même. Et puis la lente évolution des personnages, de leur relation, avec le vieillissement de l’un et de l’autre, le trépas de l’un, le deuil de l’autre, une vie, deux vies, toutes les vies. Mais pensez si avec une distribution pareille on a beaucoup songé à étoffer un peu les personnages. Bref.

    Premier contact de Denis Villeneuve, alors là c’est pas du tout la même farine. Que c’en est même déconcertant. Au point que si Denis Villeneuve avait dû faire Passengers , il te vous aurait, vite fait mal fait, expédié les problèmes du réacteur principal, en revanche la crise du couple aurait été un moment bergmanien du futur, parfaitement développé.

    Premier contact , une douzaine d’ovules de la taille de Saint-Mandé, toujours dans le Val-de-Marne, arrivent sur Terre pour nous payer une petite visite de courtoisie, ce qui crée un peu d’agitation tout de même. Gouvernements, services secrets et armées armées jusqu’aux dents sont sur les dents et aimeraient bien savoir ce que ces douze ovules réparties aléatoirement sur la planète bleue sont venues faire. Et, c’est très embêtant, les premiers signes d’échange entre les ovules et les militaires sont des sons dont on se demande bien dans quelle langue ils sont produits. Si Morten Tyldum avait fait Premier contact, inutile de vous dire qu’on ne se serait pas beaucoup posé la question de savoir dans quelle langue les ovules et leurs occupants s’expriment, on leur aurait envoyé un ultimatum en anglais pas très shakespearien et direct, ensuite, atome et napalm sont les deux mamelles de l’armée américaine du monde. Forcément les ovules auraient un peu résisté, surtout qu’eux auraient disposé de technologies nettement plus avancées que l’armée américaine du monde mais pensez si la bravitude de ces gars-là auraient été prise en défaut, quelques soldats noirs auraient été sacrifiés pour que la race blanche mondiale survive, on aurait vite été tirés d’affaire et infiniment redevables de l’armée américaine mondiale, sans laquelle en cas d’invasion ovulaire du troisième type on serait cuits et puis ce serait tout, plus d’humanité sans l’armée américaine.

    Denis Villeneuve ne vit pas dans le monde réel, il n’est pas nécessairement convaincu que l’armée américaine internationale peut tout, du coup il se demande si des fois on ne pourrait pas essayer de discuter avec les types des ovules et que pour ça, vu qu’ils sont partis de chez eux en oubliant leur méthode assimil, va falloir trouver des moyens d’échanger, il y a un colonel noir, Forest Whitaker — l’un des acteurs américains les plus sous employés, je n’insinue rien — qui se demande s’il ne devrait pas prendre dans son équipe de fiers à bras tout de même, un ou deux cerveaux, et pourquoi pas, une linguiste.

    Madame la linguiste, votre mission c’est de faire en sorte que les ovules nous révèlent ce qu’elles viennent faire ici. En gros, vous devez leur poser la question What do you want ?

    Et c’est la très heureuse surprise de ce film, la linguiste en question, on a beau l’habiller en treillis et l’accompagner de types aux mâchoires carrées, la linguiste elle fout son souk sur la base, elle fait sa révolution et elle trouve le moyen, très lent certes, mais néanmoins prometteur, de discuter aimablement avec les habitants des ovules qui sont en fait de très très très grands heptapodes, des pieuvres surdimensionnées de la taille de l’étang de Saint-Mandé, du coup ils ne doivent pas avoir beaucoup de place dans leur ovule, et qui parlent en écrivant des signes de prime abord indéchiffrables, mais avec une linguiste pareille, on va finir par se comprendre, restera la question des accents régionaux, mais nous n’en sommes pas encore là, lesquels signes sont produits à l’aide d’une encre dont on fera les livres électroniques du XXIIIème siècle. Quand elle ne planche pas sur les derniers caractères des heptapodes notre linguiste tout terrain donne des cours de sémantique au colonel en lui expliquant, par exemple, que what do you want c’est pas hyperfacile à dire en heptapode et que cela engage tout un tas de considérations linguistiques, que l’on risque, à tout moment, de faire des contresens, qu’en hectopode il y a une gutturalité qui est compliquée à produire avec un larynx humain, et qu’il va falloir être patient mon colonel.

    Les scènes de dialogues, d’apprentissage de la langue et de considérations linguistiques doivent occuper une bonne moitié du film, elles sont très bien filmées dans un éclairage magnifique, le récit est admirablement monté avec une révélation étonnante à la fin, les flashbacks n’étaient pas des flashbacks mais des flashforwards , on n’a pas échangé un seul coup de feu ou de bombe atomique avec les ovules — une petite explosion malgré tout mais c’est le fait isolé de quelques personnages qui se sont trompés de film, bref avec des méthodes pareilles Denis Villeneuve n’est pas prêt de faire carrière à Hollywood, on ne peut pas mobiliser, comme cela, pour de bêtes problèmes de linguistique, l’armée américaine du monde et ne pas exiger d’elle un minimum de coups de feu, il y a des choses qui ne se font pas. Et sans doute la pépite de ce film est à trouver dans cette scène remarquable de la potentielle erreur de traduction entre arme et outil entre les heptapodes, pour les heptapodes le langage est une arme. Du coup l’armée américaine du monde est désarmée. Par la langage. En tant qu’arme.

    Exercice #62 de Henry Carroll : Composez une photographie dans l’intention de l’afficher à l’envers

    #qui_ca

  • « Harry Potter est un bâtard »
    http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20130920.OBS7871/harry-potter-est-un-batard.html
    Je trouve aussi que ce #livre est une grande œuvre qui a l’intéressante propriété de grandir avec ses lecteurs.

    Le problème est que personne n’a osé se dire, tout simplement, que ce livre pourrait égaler, dans son genre, des ouvrages comme « Robinson Crusoé », « David Copperfield » ou « le Livre de la jungle », c’est-à-dire des livres qui ont d’abord passionné les enfants, mais qui ont aussi très rapidement rencontré un public d’adultes. Si Kipling reçoit le Prix Nobel de Littérature en 1907, à l’âge de 42 ans, c’est bien qu’il n’y a pas eu que les enfants pour le lire ! « Harry Potter » peut aussi être lu comme une œuvre littéraire, comme une œuvre savante, subtile et magnifiquement agencée. Un travail de critique littéraire peut être fait sur ce livre. Pourquoi à Sciences Po ? Parce que le texte contient des enjeux politiques que je voudrais analyser avec mes élèves.

  • Petit cours d’autodéfense en économie. L’abc du capitalisme -

    Ne faites jamais confiance à un économiste

    La plupart des gens considèrent l’économie comme un domaine hautement technique, hermétique, voire mystérieux, qu’il vaut mieux laisser aux experts en la matière, à savoir les économistes.

    Comprendre l’économie ne devrait pourtant pas être si difficile. Après tout, la science économique s’intéresse tout simplement à la manière dont on travaille, à ce qu’on produit, à la façon dont on en assure la distribution et, au bout du compte, à l’usage qu’on en fait. Elle cherche à savoir qui fait quoi, qui obtient quoi, et ce qui est fait de ce qui est obtenu.

    Si l’on s’en tient à ces notions les plus élémentaires de la vie de tous les jours, on peut affirmer que tout le monde possède un minimum de connaissances en matière d’économie. Ainsi, tout le monde devrait avoir son mot à dire sur la question.

    De plus, étant un domaine où les gens interagissent, coopèrent ou entrent en conflit, l’économie constitue un phénomène social (même Robinson Crusoé ne travaillait pas seul : Vendredi n’était jamais bien loin). Elle ne peut être réduite à des forces matérielles comme la technologie ou la productivité : elle est aussi le fruit des rapports entre les gens dans la société.

    Il n’est donc pas nécessaire d’être un économiste pour en savoir long sur le sujet. Tout le monde en fait l’expérience, y contribue d’une manière ou d’une autre, y porte attention. Comment fonctionne-t-elle ? Comment se porte-t-elle ? Les intérêts de qui sert-elle ? Chacun a une bonne idée de la place qu’il occupe dans le portrait d’ensemble de l’économie (par rapport à celle des autres, au passé ou à ses attentes). Voilà ce à quoi la science économique devrait s’intéresser.

    Selon moi, hélas, la plupart des économistes ne partagent pas cette conception fondamentale, enracinée dans le sens commun, de l’économie. Ils ont plutôt tendance, du haut de leur savoir, à faire preuve de condescendance envers les masses ignorantes. Leurs exposés sont empreints d’un jargon inintelligible qui, en général, n’ajoute rien à leurs raisonnements. Exégètes autoproclamés d’une science mystérieuse et inaccessible, ils ont la prétention de savoir ce qui est bon pour les gens – et de le savoir mieux que quiconque –, et prennent plaisir à échafauder des théories abracadabrantes et incompréhensibles pour le commun des mortels. L’importance qu’ils se donnent à eux-mêmes, et qu’on leur reconnaît, est à l’image de la démesure de leur objet d’étude, qui se mesure en milliards, voire en billions.

    Cela explique pourquoi des économistes interviennent chaque soir dans les journaux télévisés. Les bulletins de nouvelles ne présentent presque jamais d’anthropologues, de biologistes, de travailleurs sociaux, de nutritionnistes ou d’architectes. Ces spécialistes mériteraient sans doute d’être entendus davantage (et les économistes un peu moins), car leurs conseils pourraient s’avérer plus judicieux pour le bien-être économique à long terme de la population.

    Rien n’offre meilleur exemple de cette attitude « je-sais-tout » que les débats entourant le libre-échange. Les économistes orthodoxes considèrent comme un fait avéré la thèse selon laquelle le libre-échange entre deux pays profite toujours aux deux parties. Quiconque met en cause ou conteste cette vérité (qu’il s’agisse de syndicats, de militants pour les droits sociaux ou de nationalistes) fait preuve d’ignorance ou défend des intérêts contraires au bien commun. Il faut donc soit mieux informer ces trouble-fête (pour un économiste, rien n’égale la joie d’exposer cette merveilleuse théorie de l’avantage comparatif), soit se contenter de les ignorer. Voilà exactement ce que font la plupart des gouvernements. (Ironiquement, même des économistes orthodoxes reconnaissent aujourd’hui que la théorie classique de l’avantage comparatif est fausse, et ce, pour maintes raisons, dont nous traiterons dans la quatrième partie de cet ouvrage. Néanmoins, cette critique n’a nullement ébranlé leur attachement quasi religieux à la doctrine du libre-échange.)

    Et ce n’est pas tout, car ces experts savent monnayer leur arrogance. Hors du monde universitaire, la grande majorité d’entre eux sont au service d’organisations ayant tout intérêt à perpétuer le statu quo : banques, firmes de courtage, grandes entreprises, associations patronales et gouvernements.

    http://divergences.be/spip.php?article3043