person:salim benghalem

  • Hollande donne à l’armée et au renseignement le « feu vert pour tuer »
    http://www.wsws.org/fr/articles/2017/jan2017/holl-j13.shtml

    Nouzille écrit : « Depuis son élection en mai 2012, François Hollande entend incarner une politique plus martiale que ses prédécesseurs, quitte à en payer le prix et à sortir du strict cadre de la légalité. Ainsi, il a décidé de riposter de manière systématique aux prises d’otages et aux attentats qui touchent des Français dans le monde ».
    Hollande a donné un feu vert à l’armée et à l’agence de renseignement externe, la Direction Générale de la Sécurité Extérieure (DGSE), pour tuer des individus identifiés comme HVT (High Value Targets – Cibles de grande valeur) ou High Value Individuals (HVI – Individus de grande valeur).
    Le quotidien français Le Monde a écrit : « Entouré de conseillers militaires plutôt enclins à l’action, dont son chef d’état-major particulier, le général Benoît Puga, et les membres du cabinet de Jean-Yves Le Drian, François Hollande a donc donné des consignes claires aux états-majors militaires et à la DGSE sur le sujet : ils ont son feu vert pour tuer à l’étranger, y compris clandestinement, des “chefs terroristes” et d’autres ennemis présumés de la France. »
    Dans Les Tueurs de la République, Nouzille expose le programme d’assassinats des gouvernements français successifs. Il a révélé l’existence d’une cellule clandestine dans la DGSE dont les combattants sont formés pour mener des opérations « Homo [c’est-à-dire homicides] ».
    Hollande lui-même a avoué qu’il avait ordonné des assassinats ciblés. En parlant aux journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme dans leur livre Un président ne devrait pas dire ça, publié en octobre dernier, il a dit : « L’armée, la DGSE, ont une liste de gens dont on peut penser qu’ils ont été responsables de prises d’otages ou d’actes contre nos intérêts. On m’a interrogé. J’ai dit : “si vous les appréhendez, bien sûr…” » a dit Hollande. Il a approuvé au moins quatre assassinats ciblés d’islamistes à l’étranger.
    Nouzille déclare toutefois que l’ampleur du programme a été minimisée : « au moins une quarantaine de HVT ont été exécutées à l’étranger entre 2013 et 2016, soit par les armées, soit par la DGSE, soit encore, plus indirectement, par des pays alliés sur la base de renseignements fournis par la France. Cela représente environ une opération par mois – un rythme jamais vu depuis la fin des années 1950, à l’époque de la guerre d’Algérie ».

    • L’armée française a délibérément ciblé et assassiné extrajudiciairement un Français, Salim Benghalem, près de Raqqa, en Syrie, dans la nuit du 8 au 9 octobre 2015, lors du bombardement d’un camp d’entraînement de l’État islamique (ÉI).

      Qu’est ce qu’il faisait au milieu d’un camps d’entraînement d’un «  proto-État  » en guerre, de facto, contre la France ? Si la DGSE tue en dehors des zones de conflit alors qu’une arrestation est possible, cela poserait problème, mais là, ce n’est que la mort d’un mercenaire. Après tout, «  on  » n’aurait rien dit s’il avait été tué dans un bombardement turque, russe, syrien, etc. Non ?

  • Suivi des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly : chronique d’un rendez-vous manqué

    http://www.lemonde.fr/enquetes/article/2016/01/04/suivi-des-freres-kouachi-et-d-amedy-coulibaly-chronique-d-un-rendez-vous-man

    Défaillances ou mauvais coups du hasard ? Un an après les attentats de janvier, les juges d’instruction chargés de l’enquête pourront en tout cas se forger un avis sur le suivi dont ont fait l’objet les frères Kouachi et Amedy Coulibaly avant l’attaque de Charlie Hebdo. Au total, une quarantaine de notes de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), dont Le Monde a pris connaissance, ont été déclassifiées mi-novembre à la demande des magistrats. Des documents minutieusement choisis qui, mis bout à bout, racontent ce que sont souvent les attentats aboutis : un enchaînement de rendez-vous manqués.

    La chronique malheureuse du suivi des futurs tueurs de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher a sans doute démarré en mars 2010, quelque part au pied des monts du Cantal, à Murat (2 000 habitants). A cette époque, Djamel Beghal, figure du djihadisme francophone, est assigné à résidence. Il vient de purger dix ans de prison pour des projets d’attentat contre des intérêts américains en Europe. Il reçoit régulièrement la visite de Chérif Kouachi et d’Amedy Coulibaly. Les faits sont connus, mais ils sont fondateurs pour la suite.

    Indice-clé

    Les documents déclassifiés montrent en effet qu’à cette époque Djamel Beghal est à la fois sur écoute de la DCRI (future DGSI) et ciblé par une enquête de la Direction centrale de la police judiciaire (DCPJ). Les deux services communiquent. Mais aucune conséquence opérationnelle n’en est tirée. En clair : un jeune braqueur de l’Essonne, en l’occurrence Amedy Coulibaly, fréquente ce que le djihadisme compte de plus dur, sans que cela ne suscite autre chose que de l’indifférence.

    Contacts avec AQPA

    L’indice-clé, a posteriori, des projets terroristes que pouvaient avoir les frères Kouachi va, lui, être mis au jour en décembre 2011. A l’approche des fêtes de Noël, l’ex-DCRI va constater que Chérif Kouachi est en contact par e-mail avec un certain Peter Cherif. Un ancien du « dossier des Buttes-Chaumont », qui occupe depuis un poste élevé au sein d’Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA). Or c’est justement au nom d’AQPA que les frères Kouachi vont revendiquer l’attaque de Charlie Hebdo. Justement avec ce combattant expérimenté qu’ils vont avoir une relation suivie entre 2011 et 2013. À partir de janvier 2012, les contacts avec Peter Cherif se font par téléphone. Des échanges que Saïd Kouachi prend soin de dissimuler en utilisant plusieurs puces et boîtiers téléphoniques. C’est de là que Saïd entre à son tour dans le viseur de la DGSI. En particulier, à la suite d’un renseignement de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) qui fait état d’un possible séjour au Yémen, datant de l’été 2011.

    À partir d’avril 2012, les frères Kouachi sont considérés comme tellement dangereux, qu’ils font l’objet d’investigations communes entre DCRI et DGSE. Un mois plus tôt, Chérif a même été placé sur la liste des « objectifs prioritaires » de la DCRI. Les enquêteurs s’inquiètent notamment de sa méfiance et de sa rencontre avec des ex-membres du « groupe de Francfort ». Ces anciens combattants d’Afghanistan ont été condamnés pour un projet d’attentat contre le marché de Noël de Strasbourg en 2000. Saïd Kouachi, de son côté, reprend discrètement contact avec Farid Benyettou, tête pensante de la filière des « Buttes-Chaumont ». Les flux Internet des Kouachi sont interceptés et montrent leur intérêt constant pour AQPA et le Yémen.

    L’année 2013, un tournant

    Mais voilà que très vite, dès ce même printemps 2012, les contacts entre les Kouachi et Peter Cherif vont se distendre. Plusieurs hypothèses sont émises par la DCRI : Peter Cherif a-t-il rejoint une zone difficile d’accès au Yémen ? Redoute-t-il d’être localisé ? En janvier 2013, les services remarquent que Chérif Kouachi a encore effectué des recherches Internet pour trouver un appartement à partager dans une province yéménite où Peter Cherif a été localisé quelques semaines plus tôt. La DCRI va dès lors concentrer ses recherches sur les Kouachi et un petit groupe de Français restant en lien avec ce mentor en exil.

    En retraçant l’histoire à l’envers, les notes de la DGSI pointent que c’est à peu près à cette époque, en mai 2012, qu’Amedy Coulibaly, incarcéré à la prison de Villepinte (Seine-Saint-Denis), commence à prendre soin de ne pas attirer l’attention. Le futur tueur de l’Hyper Cacher est en détention depuis 2010 pour son implication dans le projet d’évasion de Smaïn Aït Ali Belkacem, autre personnage important du terrorisme, condamné à perpétuité pour l’attentat à la station RER Musée d’Orsay en 1995, à Paris. Chérif Kouachi a également été mis en cause dans ce dossier mais sera finalement relaxé. Le souci de discrétion d’Amedy Coulibaly est une nouvelle fois repéré dans une note en date de février 2013.

    Or l’année 2013 marque un tournant. En juin, pour la première fois, sont établis des contacts directs entre les Kouachi et Amedy Coulibaly. Ils passent par Chérif, libre sous contrôle judiciaire. En principe, les deux hommes n’ont pas le droit de se parler. Mais ils contournent l’interdit en utilisant une ligne téléphonique attribuée à Hayat Boumedienne, l’épouse d’Amedy. En 2010, celle-ci a fait l’objet d’une rapide enquête de la DGSI, mais rien de très poussé. Chérif Kouachi, lui, ne respecte pas non plus son obligation de pointage au commissariat. L’information, transmise au magistrat instructeur, restera sans suite.

    L’année 2014 est celle de l’émergence de l’organisation Etat islamique (EI). L’environnement des Kouachi et d’Amedy Coulibaly bascule. En mars, un départ pour la Syrie est ainsi particulièrement remarqué : celui de Salim Benghalem. Un homme dont les services de renseignement établissent alors qu’il a été l’accompagnateur de Saïd Kouachi au Yémen en 2011 et qu’il a intégré, en même temps que lui, un camp d’AQPA... Avec Peter Cherif, Salim Benghalem fait partie des individus aujourd’hui soupçonnés d’avoir eu un rôle de commanditaire ou de coordinateur des attentats de janvier. Il a gravi les échelons au sein de l’organisation EI et s’est réjoui des tueries dans une vidéo de propagande.

    Cette même année, en juillet, une liste de numéros de « djihadistes » est retrouvée dans la cellule d’un certain Teddy Valcy. Ce Guadeloupéen est incarcéré lui aussi pour l’évasion ratée de Smaïn Aït Ali Belkacem. Cette liste est censée réunir des noms de personnes parties sur différents fronts, mais on y découvre au passage ceux des Kouachi et de Coulibaly. En plein mois d’août 2014, survient aussi cette tentative avortée de départ pour la Syrie du beau-frère de Chérif Kouachi, Mourad. On est seulement cinq mois avant la mise à exécution des attaques de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher.

    Rendez-vous manqué

    Quelles erreurs reprocher à la DGSI, dans ce vaste faisceau de signaux divers et variés ? Les notes déclassifiées résument les périodes où les Kouachi ont fait l’objet d’interceptions de sécurité. Pour Saïd, on compte huit mois d’écoutes en 2012, deux mois en 2013 (stoppées sur avis négatif de l’instance de contrôle), puis une reprise durant cinq mois en 2014, de février à juin. Pour Chérif, le suivi s’est fait sur deux ans complets : de décembre 2011 à décembre 2013. Mais aucune surveillance technique ou physique n’a permis de matérialiser la moindre préparation d’une action violente, concluent les documents.

    La béance concerne plutôt le suivi d’Amedy Coulibaly, dont une des hypothèses est qu’il a fourni lui- même les armes aux Kouachi pour la tuerie de « Charlie ». Elle apparaît dans les toutes dernières notes de la DGSI, datées des 7, 8 et 9 janvier. Malgré son passage à Murat, en 2010, Amedy Coulibaly n’a jamais été considéré, par la DGSI, comme un membre de la mouvance islamiste radicale. Il n’a donc jamais été un objectif, même après sa sortie de prison en mars 2014, sous bracelet électronique, pour son implication dans le dossier Smaïn Aït Ali Belkacem. Jusqu’au bout, il a été considéré comme un second couteau et a gardé son étiquette de délinquant de droit commun. Ainsi a été ratée la chance d’établir la connexion entre ses préparatifs et les projets des Kouachi qui étaient, eux, relativement identifiés.

  • La France a aboli la peine de mort mais tue des Français en Syrie, dans des exécutions extra-judiciaires. La version des autorités remise en cause par l’enquête du Monde, concernant le Français Salim Benghalem, cible des frappes françaises à Rakka http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/10/17/syrie-salim-benghalem-la-cible-des-frappes-francaises-a-rakka_4791547_3224.h

    Une semaine après l’annonce par le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, du bombardement, dans la nuit du 8 au 9 octobre, d’un camp de l’Etat islamique près de Rakka, en Syrie, la version officielle livrée par les autorités françaises résiste de moins en moins à l’examen de certains faits nouveaux.
    (...)
    Lundi 12 octobre, le ministère de la défense assurait n’avoir « aucun élément précis relatif à ce bombardement ». Vendredi soir, aucune source n’avait permis de connaître le sort de Salim Benghalem et de ses deux proches visés dans cette frappe. Pourtant, les autorités disposeraient, selon nos informations, d’une connaissance beaucoup plus précise qu’elles ne l’admettent des résultats de cette frappe, tant pour le nombre de morts que pour l’identité des victimes.
    Cette affaire crée un précédent dans le droit français. La France savait qui elle allait tuer dans cette frappe. Salim Benghalem, mis en cause dans plusieurs procédures judiciaires à Paris, et faisant l’objet d’un mandat d’arrêt international, pourrait, si sa mort est confirmée, avoir été victime, selon certaines ONG comme Human Rights Watch, d’une forme d’« exécution extrajudiciaire ».

    La France a justifié son intervention par la « légitime défense collective » prévue à l’article 51 de la Charte des Nations unies. L’assistance demandée à Paris émane des seules autorités irakiennes pour combattre l’Etat islamique. Il y a un an, le ministre français des affaires étrangères, Laurent Fabius, s’opposait, avec succès, à l’extension des frappes en Syrie souhaitée par le ministère de la défense, estimant qu’elles « n’avaient pas de bases légales ». Les conditions auraient-elles désormais changé ?
    (...)
    La France, elle, s’est contentée d’indiquer que les personnes visées étaient entraînées pour frapper le sol français et européen, sans plus de précision. Pour alléguer d’une « légitime défense individuelle », elle devrait fournir la preuve d’une agression imminente, ce qu’elle n’a pas fait. Salim Benghalem accueillait et formait les nouveaux venus francophones. Constituaient-ils une « menace imminente » ?

    Sur la « légitime défense », c’est aussi l’argument de Français qui s’engagent dans l’Etat islamique, évoquant « la légitime défense face à l’attaque de pays occidentaux contre des pays musulmans - ou les attaques de Bachar Al Assad contre sa population »

    Sur la peine de mort : la France appelle à un « moratoire » dans les pays où elle est pratiquée et défend l’abolition.