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    Anniversaire des attentats
    BONNE ANNÉE EN FORME DE BRAS D’HONNEUR À LA LÉGION D’HONNEUR

    Le lundi 4 janvier 2016, par Daniel Mermet

    La Légion d’honneur vient d’être attribuée par le gouvernement à plusieurs victimes des attentats de Charlie. Quinze d’entre eux figurent sur la promotion du 1er janvier 2016. Wolinski et Bernard Maris l’avait déjà reçue. Mais les autres, auraient-ils tous été d’accord pour accepter ce genre d’honneur qui fut refusé par Daumier, Aimé Césaire, Sartre, Catherine Deneuve, Tardi et beaucoup d’autres ? Est-il légitime d’imposer une telle distinction sans le consentement de celui qui la reçoit ? Sans doute faut-il obtenir que les ayants droit ne fassent pas opposition. Mais Charb, par exemple. Vous êtes bien sûr que Charb aurait accepté ? Et Cabu ? Vous en êtes certain ? Car attention, il se pourrait alors que le génial (et modeste) Cabu se fasse virer du Canard enchaîné à titre posthume ! Voici pourquoi.

    (dessin : Charb) {JPEG}
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    C’est un principe au Canard depuis toujours, surtout pas de Légion d’honneur. Les collaborateurs doivent la refuser sous peine de prendre la porte. En 1933, Pierre Scize fut viré pour avoir accepté « ce ruban malheureux et rouge comme la honte », comme dit Léo Ferré. C’est pourtant pour avoir perdu son bras gauche arraché dans les tranchées que Pierre Scize avait reçu cette distinction.

    Il est vrai que ceux qui l’ont refusée forment un superbe cortège à travers l’Histoire, Daumier, Littré, Courbet, George Sand, Maupassant, Pierre et Marie Curie, Sartre, Simone de Beauvoir, Albert Camus, Antoine Pinay, André Gide, Jacques Prévert, Aimé Césaire, Bourvil, Philippe Séguin, Catherine Deneuve, sans parler de Berlioz ou de Tardi, on peut dire que ceux-là sont légion et qu’ils ont le sens de l’honneur. La plupart de ceux de Charlie auraient naturellement choisi la compagnie de ces réfractaires mais l’État n’a pas hésité à contourner leur mémoire et à les faire rentrer symboliquement dans l’ordre.

    Erik Satie disait : « la refuser c’est bien, mais encore aurait-il fallu ne rien faire pour la mériter ». Le bras d’honneur à la Légion d’honneur, c’est une riche histoire. Au président de la République Vincent Auriol qui lui propose le fatal insigne, l’écrivain Marcel Aymé répond : « Votre Légion d’honneur, monsieur le Président, sauf votre respect, vous pouvez vous la carrer dans le train. » Marcel Aymé n’était pas vraiment un type de gauche mais vous imaginez Charb répondant la même chose à Manuel Valls ? Avec le dessin correspondant ? Au journal de 20 heures ? On peut rêver. Ça console. Un peu. Car ils sont morts pour de vrai, les amis, morts assassinés. Le respect s’impose devant ces copains déchiquetés, ces bouts de copain. Mais les communicants élyséens s’en foutent, ils peuvent utiliser tout ça à leur guise selon leur stratégie et leurs échéances, la propagande en somme.
    Car sinon, face à face de leur vivant, l’un de ces décorés de force n’aurait pas manqué d’en rajouter une petite couche en citant Jean Yanne : « La Légion d’honneur, c’est comme les hémorroïdes, n’importe quel trou du cul peut l’avoir. »

    Un autre n’aurait pas manqué d’évoquer un illustre récalcitrant, le peintre Gustave Courbet (1819-1877), l’ami de Proudhon et de Bakounine, l’élu de la Commune de Paris accusé d’avoir fait renverser la colonne Vendôme, symbole de l’impérialisme napoléonien. Mais en 1869, deux années avant la Commune de Paris, Napoléon III propose la Légion d’honneur à un Gustave Courbet en plein succès. On le voit, Hollande et Valls n’ont rien inventé. Discréditer des opposants avec des hochets, les déshonorer en les honorant, c’est une vieille ficelle usée par tous les pouvoirs, c’est la corruption symbolique, voyez avec un petit bout de ferraille en forme de croix et un ruban rouge, pas besoin d’argent pour avoir à sa botte qui l’on veut.

    Mais voici la réponse de celui qui a peint l’Origine du Monde : « Souffrez, Monsieur, que je décline l’honneur que vous avez cru me faire. J’ai cinquante ans et j’ai toujours vécu libre. Laissez-moi terminer mon existence libre ; quand je serai mort, il faudra qu’on dise de moi : celui-là n’a jamais appartenu à aucune école, à aucune église, à aucune institution, à aucune académie, surtout à aucun régime, si ce n’est celui de la liberté ! »

    Ce qui ne donne pas envie d’être mort, c’est que n’importe qui parle à votre place. Avec ceux-là on fait des livres, des films, des émissions spéciales avec des invités en larmes et en promo, et qui vous ignoraient de votre vivant. On fait de l’audience, on fait du fric, bientôt un musée, un parc d’attraction "Charlieland", des produits dérivés, t-shirts, porte-clés, boules neigeuses avec de la neige qui tombe sur les cadavres. Pourquoi pas ? Souvenez-vous, deux jours après les tueries, le 11 janvier 2015, lors du grand rassemblement dans Paris, quatre millions dans les rues, le gouvernement français violait déjà leur mémoire et violait aussi la profonde vague d’émotion populaire, en invitant parmi les chefs d’État en tête de la marche des bienfaiteurs de l’humanité comme Ali Bongo, Viktor Orban ou Benjamin Netanyahou. Le cynisme des communicants est sans limite. C’était il y a un an. Cette année c’est la Légion d’honneur, c’est l’année des hémorroïdes. Bonne année.

    Daniel Mermet

    #Charlie #Charlie #la-bas #légion_d'honneur #Charlie #Daniel_Mermet #Charlie #attentats

  • 1947, INSURRECTION MANQUÉE ? par Anatole Istria
    http://www.cequilfautdetruire.org/spip.php?article1637&var
    Publié dans CQFD n°51, décembre 2007.

    Au sortir de la guerre, le mouvement ouvrier français participe à la reconstruction du pays dans ce que les syndicats appelle la « bataille pour la production ». La CGT est le syndicat majoritaire, fort de 4 millions de membres. Staline, le pépère au peupeuple, ordonne au PCF de lever le pied : l’heure n’est pas à la révolution. Pourtant, en Juin 1947, une première vague de grèves éclate du côté des cheminots, bientôt suivis par les gaziers, puis par les employés de banque et les mineurs, en opposition au plan Marshall. Durant l’été, s’ouvrent d’âpres négociations pour la hausse des salaires. Dans ce contexte pas si pacifié va se déclencher un puissant mouvement social à l’automne/hiver 1947, que le président Vincent Auriol qualifiera « d’insurrection froide ».
    C’est à Marseille que s’amorce un mouvement de grèves initié par la base qui va secouer le consensus de l’après-guerre. Avant et après la Libération, la citée phocéenne a particulièrement souffert des pénuries,mais les prolos tiennent le haut du pavé : quinze entreprises y ont été réquisitionnées où l’on tente d’appliquer la « gestion ouvrière ». Dans les quartiers Nord, des « équipes de choc » d’ouvriers bénévoles prennent en main les travaux de voirie. Le 10 novembre 1947, une délégation contre la hausse du prix du tramway se rend à la mairie. Quatre jeunes métallos, dont un ancien déporté, Joseph Dani, sont arrêtés suite à leur refus de payer le ticket. Le 12 novembre au matin, 5000 manifestants se rendent devant le Palais de justice où doivent être jugés les fraudeurs. À midi, la grève s’étend. Les dockers et les marins se joignent au rassemblement et forcent les portes du tribunal. À 14 heures, le drapeau rouge est brandi aux fenêtres : les juges préfèrent prononcer la relaxe. Pendant ce temps, à la mairie, la séance du conseil municipal est houleuse. Un conseiller gaulliste traite une conseillère coco de « fille publique » : la « fille » le gifle en retour. Le maire RPF Carlini fait appel à des nervis qui bastonnent les conseillers communistes. « Tous à la mairie ! » La foule des manifestants envahit l’Hôtel de ville. Les ouvriers font la distribution de torgnoles, le maire reçoit. Pour calmer la plèbe, l’ancien maire communiste, Jean Cristofol, annonce faussement la démission de Carlini au balcon. « À l’Opéra, à l’Opéra », quelques centaines de jeunes se lancent à l’assaut du quartier de la pègre, alliée objective de la corruption municipale. Vincent Voulant, jeune ouvrier des Aciéries du Nord, tombe sous les balles provenant d’un claque appartenant au clan Guérini. Une polémique s’ensuit dans la presse. On hurle à la menace du « complot communiste ». Les socialistes, Gastounet Deferre en tête, réclament « l’épuration de Marseille de tous les gangsters qui l’empoisonnent et la déshonorent ». Il s’agit ici des manifestants, pas de ses amis les Guérini. Les socialos dénoncent les « éléments troubles, dont de nombreux étrangers (sic), qui se sont livrés au pillage organisé de la mairie » (Le Provençal, 14/11/1947). Le préfet demande l’épuration des compagnies de CRS du Sud-est, accusées de « grande mollesse » et soupçonnées d’infiltration communiste (de nombreux CRS sont issus des milices patriotiques de la Libération).

  • FoulExpress » Le combat des réfugiés de la Tour Balzac
    http://www.foulexpress.com/2011/11/le-combat-des-refugies-de-la-tour-balzac

    Ça se passe en bas de chez toi. Tous les jours. Toutes les nuits. Ça touche des êtres humains : des hommes, des femmes et des enfants. Ça s’appelle la « crise du logement », mais en vérité nul besoin de trouver un nom savant à une misère qui ne l’est pas : je te parle de souffrance au quotidien, de l’indignité moderne, de l’histoire d’hommes et femmes qui vivent dans la rue pendant que tu reprends du dessert en dissertant de la crise, les joues rougies d’être repu.

    Ces gens qui dorment dehors, ils ont un prénom comme toi. Un cœur, comme toi. Des larmes, comme toi, mais pas de toit. Pas d’eau chaude. Pas de toilettes. Pas de chauffage ni de baignoire. Pas de lit ni de fer à repasser. Pas d’évier. Pas de droits. Mais ils ont des devoirs. En premier lieu, celui de partir …loin de nos yeux, puisqu’ils sont déjà si loin de nos cœurs.

    Au fil du temps, on se dédouane de la misère des autres. L’indifférence prend le pas sur l’indignation superficielle que convoquent les images symboles avec lesquelles on a été éduqués : le Somalien atteint de famine aux yeux exorbités, l’ivrogne de la Gare du Nord qui cache sa bouteille dans du papier avec l’illusion de tromper son monde, le sans-papiers qui vit dans des conditions insalubres et qui part en fumée sur le boulevard Vincent Auriol un soir d’avant-campagne.

  • Le blog de Jean-Pierre Martin, un petit cadre dans une grosse boiboite : Madagascar 2
    http://onsefechier-anatic6.blogspot.com/2009/02/madagascar-2.html

    Pour les plus jeunes d’entre nous qui n’ont pas connu cet âge d’or du cinéma français, le premier volet de Madagascar, sorti en 1947, narrait la répression sanglante par l’armée française d’une insurrection malgache indépendantiste. Et le réalisateur avait vu grand pour cette flamboyante fresque historique : 30 000 soldats français, guerre psychologique, torture, incendies de villages, des dialogues d’anthologie (« Il y a eu évidemment des sévices et on a pris des sanctions. Il y a eu également des excès dans la répression. On a fusillé un peu à tort et à travers » par Vincent Auriol, « l’avenir de Madagascar est indéfectiblement lié à la république française" par François Mitterrand)...et surtout près de 100 000 morts du côté des indigènes. Par ailleurs, la noirceur du film écartait tout angélisme puisqu’au bout du compte, la mission civilisatrice des "gentils " européens finissait par échouer devant l’abnégation aveugle des sauvages.

    #histoire