La #Turquie officielle n’est prête à aucune avancée dans la reconnaissance de la vérité historique même si elle l’a été un bref moment, au début des années 1990 ou au milieu des années 2000. Le fait nouveau est que la propagande publique de négation du #génocide #arménien est combattue en Turquie même par de nombreux historiens et chercheurs - dont l’œuvre est relayée par les groupes actifs d’intellectuels démocrates qui ne cessent de se mobiliser pour les libertés de pensée et d’expression. Ce travail éminemment courageux et admirable, qui contribue décisivement à la compréhension du génocide et de ses conséquences, ne pourra que souffrir du vote de la proposition de loi en France : ses auteurs seront aussitôt assimilés à un lobby anti-turc et empêchés de travailler pour la connaissance historique.
Cette initiative est dangereuse aussi pour les groupes, associations et parlementaires qui la portent. Alors que le génocide arménien relève de la vérité historique, une telle loi pénalisant sa négation va la faire basculer, de l’autorité de l’histoire à la vérité d’Etat. La généralisation de la dimension historique de cette connaissance en souffrira. Il faut être clair : si la recherche a besoin de la loi pour se valider et exister, alors elle court les plus grands périls. Et les vérités que le législateur souhaite protéger également. C’est bien dans et par l’histoire que les faits incommensurables comme les génocides peuvent s’imposer à la conscience publique internationale.
S’il y a aujourd’hui cette demande de lutte contre le négationnisme de la part des héritiers des Arméniens exterminés, c’est dans la conviction que l’histoire du génocide arménien est de plus en plus fragile et sans cesse soumise aux offensives du négationnisme turc. Ils ont raison. Mais la meilleure solution ne consiste pas à faire une loi finalement très dangereuse pour la recherche elle-même ; elle exige au contraire d’intensifier cette dernière, d’instituer des chaires, de créer des laboratoires, de soutenir la publication et la diffusion de la connaissance, de mobiliser des moyens vers la sauvegarde des archives, d’établir l’état-civil et la vie de chaque victime,... Voilà une tâche noble pour la puissance publique d’un pays démocratique.