• A #Tataouine, ville des #candidats_à_l’exil : « Toute la #Tunisie souffre, mais ici, c’est pire »

    L’#exode des #jeunes de Tataouine, ce sont les parents qui en parlent le mieux. Le père de Wajdi porte beau, mais son costume élimé raconte aussi bien l’usure du tissu que celle de son propriétaire : « Tout nous est interdit. Les places dans les entreprises publiques et les compagnies pétrolières sont toujours pour les autres. Même commercer avec la Libye est devenu compliqué. Mon fils est parti l’an dernier pour la France. Je lui souhaite d’être heureux, car ici, c’est difficile. »

    Installé à la terrasse du café Ennour, donnant sur le principal rond-point de la ville, à 540 km au sud de Tunis, l’homme de 56 ans, qui refuse de donner son nom, résume en cinq minutes des décennies de marginalisation. A l’horizon, les collines rocailleuses entourant la ville accentuent le sentiment d’oppression. Tataouine est connue pour avoir donné son nom à la planète Tatooine dans la saga Star Wars. Dans la réalité, la région bascule du côté obscur de la Force. Quelque 12 000 jeunes, soit 8% du gouvernorat (équivalent d’une préfecture), sont partis en 2022 pour l’Europe, selon le sociologue du cru Mohamed Nejib Boutaleb, ancien professeur de l’Université de Tunis.

    Les Tataouinois ne sont pas les seuls à s’exiler. Selon le ministère italien de l’Intérieur, l’arrivée de clandestins tunisiens a augmenté de 55% depuis le début de l’année. En 2023, la Tunisie est même devenue le principal pays de départ des migrants souhaitant traverser la Méditerranée, devant la Libye voisine. Une hausse qui inquiète les Européens, en particulier l’Italie, qui redoute qu’un effondrement économique de la Tunisie, très endettée (80% du PIB), amplifie ce phénomène.

    La crise est telle qu’elle a conduit la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, accompagnée de la cheffe du gouvernement italien et du Premier ministre néerlandais, à se rendre à Tunis le week-end dernier. L’objectif : proposer une aide financière de plus d’1 milliard d’euros à long terme, dont 100 millions d’euros pour le « contrôle » de ses frontières. Un outil supplémentaire qui permet à l’Union européenne d’externaliser ses frontières, en déléguant la gestion des flux migratoires à des pays tiers, souvent peu réputés pour le respect des droits humains.
    De solides réseaux

    Pour éviter la dangereuse traversée de la Méditerranée et ses contrôles renforcés, Tataouine a donc cherché une autre route, celle des Balkans. Jusqu’au 20 novembre, les Tunisiens n’avaient pas besoin de visa pour se rendre en Serbie. Ils arrivaient donc à Belgrade en avion avant de franchir illégalement la frontière avec la Hongrie. Dans ses travaux, Mohamed Nejib Boutaleb a ainsi recensé, en 2022, 11 200 demandes d’autorisation parentale de voyage émanant du gouvernorat. Pour juguler le départ de combattants jihadistes dans les zones de combat, les autorités ont rendu ce document obligatoire pour les citoyens de moins de 35 ans.

    Une place dans un bateau pour traverser la Méditerranée coûte pourtant bien moins cher : 1 000 dinars (300 euros) contre environ 25 000 dinars (7 500 euros) pour le trajet de l’aéroport de Tunis à la France, via les Balkans. D’autant que la région méridionale est l’une des plus pauvres du pays, avec un chômage autour de 30%, deux fois supérieur au niveau national. Mais ses habitants s’appuient sur la solidarité régionale. Le père de Wajdi précise qu’il a contracté un prêt à la consommation de 3 500 dinars pour le départ de son fils. Un de ses amis, venu le rejoindre au café, embraye : « Moi, j’ai vendu 35 000 dinars un terrain de 400 m² pour payer le trajet à mon fils. C’est beaucoup plus sûr que de prendre la mer. » Et si les parents ne peuvent pas, la diaspora prend le relais.

    Depuis les années 60 et la première vague d’émigration, lancée par la France désireuse de main-d’œuvre bon marché, les Tataouinois ont eu le temps de construire de solides réseaux. Des entrepreneurs dans le secteur du bâtiment et de la boulangerie-pâtisserie acceptent de payer une partie des frais de leurs futurs employés. Rafik sort du coiffeur après avoir rafraîchi sa coupe, car il s’apprête à travailler dans un hôtel de Djerba pour la saison touristique. Sa famille a préféré miser sur son petit frère pour le grand départ : « Son patron lui a avancé de l’argent. Moi, je lui ai filé 4 000 dinars. Il bosse maintenant dans une boulangerie en région parisienne. »

    L’exode se ressent visuellement dans la ville. Les personnes âgées y sont plus visibles, bien que le gouvernorat possède le taux de fécondité le plus élevé du pays – 4,6 enfants par femme contre 3,4 au niveau national. Ce jour-là, les rues sont animées. L’équipe de football locale rencontre le Club africain, une des deux équipes phares de la capitale, Tunis. Une occasion rare d’échapper au quotidien. Au stade, dans la tribune des locaux, des supporteurs célèbrent aussi les buts des adversaires. Ils sont fiers d’être d’ici, mais au football comme dans la vie, ils aiment aller droit au but : l’US Tataouine peut difficilement prétendre au titre, tout comme les jeunes du coin à une vie meilleure. Sedki, un supporteur du Club africain qui a fait le déplacement, confirme à sa manière : « C’est mort cette ville. Même à Médenine, Gafsa ou Ben Guerdane [des villes marginalisées du sud, ndlr], tu peux faire du shopping. »

    Chaque été, quand les Tataouinois de France débarquent, les locaux ressentent plus profondément la déréliction dans laquelle ils vivent le reste de l’année : « Cette coutume de la diaspora de revenir avec une belle voiture, des vêtements à la mode et les accessoires faussement indispensables exacerbe la frustration des jeunes », avance l’anthropologue Mohamed Bettaieb. Vêtu d’un maillot de l’Espérance sportive de Tunis, l’autre grand club de la capitale, Amir Maiez a déjà tenté deux fois de se rendre en Europe. « Toute la Tunisie souffre, mais à Tataouine, c’est pire. On n’a rien alors qu’on devrait être riche ! » Pour l’athlète aux larges épaules, comme pour la majorité des jeunes rencontrés, la source de l’hémorragie se nomme « el-Kamour », du nom de la région pétrolière à proximité.

    « Kaïs Saïed n’est jamais venu écouter les doléances de notre jeunesse »

    Contrairement à ses voisins algériens et libyens, la Tunisie n’est pas une grande productrice de pétrole, mais, à l’échelle du pays, c’est une manne précieuse : le déficit de la balance commerciale énergétique pèse lourd (6,8% du PIB en 2022). Et environ la moitié du pétrole produit vient de Tataouine. Au printemps 2017, les jeunes ont organisé à el-Kamour un sit-in et ont fermé les vannes des oléoducs pour exiger que les revenus de l’or noir bénéficient directement au reste de la région. Plusieurs accords ont été signés, dont le dernier en novembre 2020. Il prévoyait notamment la création de deux fonds de développement et d’investissement régionaux pour l’équivalent de 48 millions d’euros, le recrutement de 125 locaux dans les compagnies pétrolières ou encore une enveloppe de 2,2 millions de dinars pour financer les projets entrepreneuriaux des jeunes. Les résultats se font encore attendre.

    Mardi 13 juin, le personnel de l’hôpital s’est mis en grève pour dénoncer le manque de moyens : « Il n’y a pas de réanimateur, les cardiologues viennent de Sfax [à 290 km au nord, ndlr] seulement quelques jours par semaine et il n’y a pas assez de gynécologues à la maternité », énumère un médecin. « Les jeunes ont acté l’échec du projet socio-économique du gouvernement qui n’a pas réussi à les inclure, analyse Mohamed Nejib Boutaleb, qui a intitulé son étude “D’el-Kamour à l’Europe, via les Balkans”. Ils ont vieilli aussi. Ils pensent à leur vie personnelle. »

    « Si je veux partir, c’est parce que je veux me marier. Et il faut de l’argent [il est de tradition pour l’homme de payer une dot]. Je me fais 600 dinars [180 euros] par mois comme livreur, ce n’est pas assez », explique Malik, pour qui la migration est une étape de la vie. Le jeune homme a déjà atteint deux fois l’Europe par les Balkans, en 2021 et 2022, avant d’être expulsé. A chacun de ses retours à l’aéroport de Tunis, les policiers l’ont laissé repartir chez lui sans formalité.

    Une mansuétude surprenante dans un pays qui aime ficher ses jeunes, mais que Mosbah Chnib, membre du bureau politique du parti d’opposition al-Joumhouri (centre) et Tataouinois, explique : « Il est manifeste que les autorités favorisent le départ des jeunes de la région pour éviter une nouvelle contestation d’envergure. Malgré les promesses, Kaïs Saïed n’est jamais venu pour écouter les doléances de notre jeunesse. » Malik partira une troisième fois. La route des Balkans s’est fermée avec l’instauration de visas, mais d’autres voies s’ouvrent, comme celle du Royaume-Uni.

    Chedly (1) est l’un des premiers à l’avoir empruntée, avec une facilité déconcertante et moyennant 7 000 euros. Un contact lui a promis un visa de six mois pour l’Angleterre, puis de s’occuper de sa traversée de la Manche par camion. « Après une semaine, on me dit de venir à Tunis, à côté de TLS [une société internationale qui gère les demandes de visas pour de nombreux pays]. Un homme masqué me remet des documents. Je les dépose directement et, un mois après, j’ai mon visa. Un vrai, j’insiste. » Après dix jours à attendre outre-Manche que le camion se remplisse de dix migrants, il arrive en France, « sans un contrôle ».
    Mutation de la population

    La société tunisienne dépérit d’« anémie sociale », selon Mohamed Nejib Boutaleb. L’émigration a appauvri les familles et l’heure du retour sur investissement – l’envoi d’euros – tarde. Notamment à cause des difficultés des émigrés à se faire une place dans une Europe de plus en plus fermée. Une difficulté économique qui s’ajoute à l’inflation (9,6 % en mai) et à la difficulté accrue de recourir au marché informel. Historiquement, les familles de la région avaient l’habitude d’arrondir les fins de mois en ramenant de Libye climatiseurs, écrans plats, bidons d’essence, etc. Mais, depuis l’édification en 2016 d’obstacles (fossés et murs de sable) à la frontière, seuls les 4x4 des gros trafiquants peuvent circuler.

    Les colons français ont développé la ville pour fixer la population nomade et enfermer civils et militaires récalcitrants dans le célèbre bagne, à l’origine de l’expression « partir à Tataouine » (partir dans un lieu hostile). Les citadins d’aujourd’hui veulent « partir de Tataouine ». La population a irrémédiablement mué. Les jeunes qui « font » la ville viennent dorénavant des régions limitrophes (Gafsa, Médenine), des villages reculés, voire de pays subsahariens pour pallier le déficit de main-d’œuvre.

    Entouré d’hibiscus en fleurs et dégustant un café avec sa fiancée sous un kiosque, Lotfi (1) savoure cet instant précieux. Originaire du très conservateur village de Remada, 80 km plus au sud, il apprécie les avantages liés à la ville : « Ici, on peut s’installer dans un parc sans que personne ne vérifie ce que tu fais, ni avec qui. » Ce même jardin public est moqué par les locaux qui pointent, eux, les jeux d’enfants cassés, les installations vieillottes et l’ennui. Malgré tout, la ville n’est pas exempte de distractions. La piscine est très utilisée, et pas seulement par l’association militaire. « Récemment une quarantaine de jeunes m’ont demandé de leur apprendre à nager », raconte Farouk Haddad, un des maîtres-nageurs. Ils s’apprêtent à traverser la Méditerranée.

    (1) Le prénom a été changé.

    https://www.liberation.fr/international/afrique/a-tataouine-ville-des-candidats-a-lexil-toute-la-tunisie-souffre-mais-ici

    #migrations #émigration #marginalisation #oppression #facteurs_push #facteurs-push #push-factors #route_des_Balkans #visa #Serbie #autorisation_parentale #pauvreté #chômage #prêt #prix #coût #frustration #pétrole #industrie_pétrolière #anémie_sociale

  • Plastique : le recyclage n’est pas synonyme d’économie circulaire, prévient un rapport parlementaire
    https://www.actu-environnement.com/ae/news/rapport-opecst-recyclage-plastique-42112.php4#ntrack=cXVvdGlkaWV

    « l’économie du plastique reste (…) très linéaire, contrairement au discours ambiant faisant croire à sa circularité grâce au recyclage »

    Bien sûr, des efforts ont été entrepris pour écoconcevoir les produits, collecter et trier les déchets ou encore incorporer des polymères recyclés. Mais « le recyclage progresse moins vite que la production de plastique et ne permet par d’endiguer la production de déchets », constate Philippe Bolo. Concrètement, l’OCDE explique que la production mondiale de déchets plastique va tripler entre 2019 et 2060. Et la progression du recyclage n’empêchera pas un doublement des fuites de déchets plastique dans l’océan et un triplement de leur accumulation dans les milieux aquatiques.

    Quant au recyclage chimique (l’Europe compte 44 projets dans 13 pays, dont 13 en France), il n’aura qu’une efficacité « limitée sans une action forte sur les deux autres leviers d’amélioration du taux de recyclage que sont la recyclabilité et le tri des déchets ». D’autant que ces technologies « soulèvent de nombreuses interrogations » en matière d’impact environnemental, d’élimination des substances toxiques ou encore de traçabilité des résines qui en sont issues. Sans compter que son développement pourrait se faire au détriment du recyclage mécanique, explique la note.

    #pétrochimie #greenwashing #plastique #recyclage

  • Perenco au Gabon : révélations sur les pollutions cachées du numéro 2 du pétrole en France
    https://disclose.ngo/fr/article/perenco-au-gabon-revelations-sur-les-pollutions-cachees-du-numero-2-du-pet

    Photos et documents confidentiels à l’appui, Disclose et Investigate Europe révèlent l’existence de 17 pollutions au pétrole causées par le groupe Perenco au Gabon, entre 2019 et aujourd’hui. Plusieurs centaines de kilomètres carrés ont été souillés, dont des forêts primaires, des cours d’eau et des fonds marins. Lire l’article

  • Un véritable “cimetière dans la Mer de Nord” : des milliers d’installations de gaz et de pétole à l’abandon

    Près d’une plateforme de gaz ou de pétrole dans la Mer du Nord sur dix n’est plus en opération. Ces infrastructures devraient être démantelées mais les sociétés qui les exploitent bénéficient de dérogations.

    Des milliers d’installations de gaz et de pétole sont laissées à l’abandon dans la Mer du Nord, ce qui engendre de la pollution et peut occasionner d’autres dangers. Il est question de plus de 23.000 puits, environ 8.500 km de pipeline et 62 plateformes pétrolières, rapporte De Tijd samedi.

    Le journal s’est associé avec l’organisation néerlandaise Follow The Money et le média norvégien NRK pour dresser une cartographie du “cimetière dans la Mer de Nord”.

    Il ressort de cette enquête que près d’une plateforme de gaz ou de pétrole dans la Mer du Nord sur dix n’est plus en opération. Il est question que des centaines de ces infrastructures ne soient plus utilisées dans les prochaines années. En outre, 20 % de tous les pipelines qui sont construits ne sont plus d’usage, de même que 85 % des puits. Ces installations appartiennent à de grandes entreprises comme BP, Shell, Equinor et TotalEnergies.

    Pourtant, il existe une obligation internationale pour que ces plateformes à l’abandon soient démantelées. Mais il s’agit souvent de projets si onéreux et complexes que les propriétaires bénéficient de dérogations par les pays concernés. Le coût est estimé à 30 milliards d’euros entre 2020 et 2030, tant pour les entreprises que les pays où les installations demeurent en mer.

    #épaves #pollution #mer #Mer_du_Nord #pétrole #gaz #cimetière
    Source : https://www.lavenir.net/actu/belgique/2023/05/20/un-veritable-cimetiere-dans-la-mer-de-nord-des-milliers-dinstallations-de-g

  • #renault sort un nouveau #SUV baptisé Rafale
    http://carfree.fr/index.php/2023/05/17/renault-sort-un-nouveau-suv-baptise-rafale

    Les dernières données pour 2022 montrent que le #climat européen est toujours plus chaud, sec et ensoleillé. C’est pourquoi, le constructeur Renault annonce en fanfare la sortie d’un nouveau SUV Lire la suite...

    #Destruction_de_la_planète #Fin_de_l'automobile #Réchauffement_climatique #4x4 #avions

    • Rappelons que le journaliste américain James Howard Kunstler prédisait dès 2008 que les gens de la classe moyenne conservatrice, celle des lotissements périurbains et de la multimotorisation, seraient prêts à élire des psychopathes au pouvoir si le pétrole venait à manquer ou devenait trop cher. On pourrait étendre l’analyse aux inquiétudes concernant le réchauffement climatique dont cette classe sociale littéralement accro au pétrole ne veut probablement rien savoir.

      Depuis quelques années, force est de constater que le réchauffement climatique est accompagné par des mouvements autoritaires qui dénient ce phénomène et nourrissent de puissants élans racistes et misogynes. Plutôt que de considérer de manière séparée chacun de ces trois types de ressentiments différents, Cara Daggett propose d‘approcher leurs combinaisons à travers le concept de #pétro-masculinité

      Une variante du concept de beauf, je suppose.

      Il y a quelques années, un autre concept était apparu, mais que j’ai malheureusement complètement oublié, et qui désignait ces sales types qui non seulement polluaient sans modération et se comportaient en vrais connards alpha, mais revendiquaient leur droit de le faire avec fierté — sans complexe. Vous vous rappelez ? C’était un terme tiré d’un autre, celui-ci positif en revanche (je crois)…

  • Le #plastique, la nouvelle bombe climatique de #TotalEnergies

    Fabriqué à partir de #pétrole, le plastique est en train de devenir la nouvelle façon d’engranger des #profits pour les #industries_fossiles. TotalEnergies vient de s’associer avec #Saudi_Aramco, le plus gros pétrolier du monde, pour ériger un #complexe_pétrochimique géant en #Arabie_saoudite. Leur but : nous inonder de plastique, au détriment du climat.

    L’information est passée complètement inaperçue. Pour cause, elle a été communiquée juste avant Noël dernier, dans la torpeur des vacances de fin d’année.

    TotalEnergies et Saudi Aramco, le plus gros groupe pétrolier mondial, ont annoncé conjointement la construction d’un « complexe pétrochimique géant en Arabie saoudite ».

    Baptisé « #Amiral », ce site de « taille mondiale » représente un investissement colossal de plus de 10 milliards d’euros, pour un démarrage prévu en 2027. L’objectif de cette méga-usine : fabriquer à partir de pétrole des matières plastiques.

    Le plastique est en effet issu à 99 % de composés fossiles. Il est notamment fabriqué à partir de #naphta, un liquide issu de la distillation du pétrole. Pour produire du plastique, le secteur #pétrochimique utilise donc du pétrole à la fois comme matière première et comme énergie – ce qui le classe au rang des industries les plus énergivores du monde.

    Pourquoi les pétroliers misent-ils si gros sur le plastique ? Les ressources en énergies fossiles s’épuisant, et voulant anticiper la fin progressive des moteurs à essence dans les pays du Nord, les multinationales de l’or noir cherchent de nouveaux gisements de croissance pour valoriser leurs barils de brut.

    Et utiliser le pétrole pour produire les matériaux plastiques utilisés dans les emballages, les ordinateurs, les smartphones, les détergents ou les vêtements s’avère particulièrement juteux car la demande explose.

    Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la consommation de plastique a quadruplé en 30 ans sous l’effet des marchés émergents. Les perspectives de profits s’annoncent mirifiques : alors qu’en Amérique du Nord, la consommation de plastique par habitant dépasse les 200 kilogrammes par an, elle est de l’ordre de 45 kilogrammes en Chine, à peine une dizaine en Inde.

    « Ce sera l’un des projets les plus profitables de notre portefeuille », s’est réjoui Patrick Pouyanné, le patron de TotalEnergies, en 2018, lorsque les deux rois du pétrole ont annoncé un premier accord pour le complexe Amiral. Amin Nasser, le PDG de la compagnie saoudienne Saudi Aramco, a pour sa part déclaré : « Le secteur de la pétrochimie a connu une croissance significative au niveau mondial, il constitue l’un des futurs moteurs de la croissance. »

    La pétrochimie mondiale dévore déjà 15 % de la production totale de pétrole et incarne « la principale source de croissance de l’utilisation du pétrole », selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Au rythme actuel de production, le pétrole sera à terme plus utilisé pour fabriquer du plastique que comme carburant pour les voitures.
    Boom climaticide

    Aujourd’hui, une tonne de plastique finit dans l’océan toutes les trois secondes. Selon le programme de l’ONU pour l’environnement, les plastiques représentent « au moins 85 % du total des déchets marins » et constituent l’une des principales menaces pour la préservation de notre planète.

    1,4 million d’oiseaux et 14 000 mammifères marins meurent tous les ans à cause de l’ingestion de plastique. Par ailleurs, les micro-plastiques sont désormais omniprésents dans la chaîne alimentaire humaine.

    Ce matériau constitue également une menace grandissante pour le climat. L’industrie du plastique est la source de gaz à effet de serre industriel qui connaît la croissance la plus rapide au monde. Rien qu’en 2019, la production et l’incinération du plastique avaient rejeté plus de 850 millions de tonnes de gaz à effet de serre dans l’atmosphère – soit presque autant que ce qu’a émis l’Allemagne durant cette même année.

    Si le plastique se développe comme prévu actuellement, d’ici à 2030, ses émissions pourraient atteindre 1,34 gigatonne par an, l’équivalent des émissions rejetées par près de 300 centrales à charbon.

    « Nos économies sont fortement dépendantes des produits pétrochimiques, mais le secteur fait l’objet de beaucoup moins d’attention qu’il ne le devrait, alertait, dès 2018, Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE. La pétrochimie est l’un des principaux angles morts du débat mondial sur l’énergie. »
    Capitalisme plastique

    À l’heure actuelle, les géants pétro-gaziers investissent massivement dans le plastique, notamment sur le continent asiatique où se situent 80 % des complexes pétrochimiques que le secteur fossile compte construire d’ici à 2025.

    Le top départ vers cette nouvelle manne de pétro-profits a été sifflé par Saudi Aramco, le premier exportateur mondial de pétrole qui a engrangé en mars dernier des bénéfices record gigantesques de 161 milliards de dollars. En novembre 2018, son patron Amin Nasser a en effet annoncé que sa firme investirait 100 milliards de dollars dans la pétrochimie au cours de la prochaine décennie. « L’énorme croissance de la demande de produits chimiques nous offre une fantastique fenêtre d’opportunité, s’est-il targué. Mais de telles fenêtres, par leur nature même, n’offrent un maximum de bénéfices qu’à ceux qui agissent rapidement. »

    Pour tisser à toute vitesse son maillage d’usines de plastique à travers l’Asie, Saudi Aramco n’hésite pas à s’allier avec d’autres industriels comme l’américain #ExxonMobil, le malaisien #Petronas ou la compagnie tricolore TotalEnergies.

    Pour leur pôle pétrochimique pharaonique Amiral, la multinationale saoudienne et TotalEnergies ont prévu de s’installer à #Al-Jubail, sur la côte est de l’Arabie saoudite, où les deux firmes exploitent déjà depuis 2014 une raffinerie géante, considérée comme l’une des plus rentables au monde.

    Contactée par Mediapart (voir notre Boîte noire), TotalEnergies explique que le complexe produira, à destination « du marché domestique et asiatique essentiellement », un million de tonnes de polyéthylène par an, la matière plastique la plus commune qui entre dans le processus de fabrication de nombreux produits de notre vie quotidienne – emballages, bouteilles, sacs plastiques, câbles, etc.

    Interrogé sur l’impact climatique d’Amiral, TotalEnergies a répondu que « ce projet s’inscrit pleinement dans l’objectif de la compagnie d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050 et dans [leur] ambition de promouvoir une économie circulaire des plastiques en Arabie saoudite ».

    Et d’ajouter : « Le pétrole sera au service de la fabrication de plastiques, notamment issus du recyclage, et qui contribuent à l’amélioration de l’efficacité énergétique de nombreuses applications finales. »

    Les 15 et 16 avril derniers, le G7 a réuni au Japon les ministres du climat, de l’environnement et de l’énergie. Dans leur déclaration finale, les sept grandes puissances économiques mondiales se sont engagées à « mettre fin à la pollution plastique, avec l’ambition de réduire à zéro toute pollution plastique supplémentaire d’ici à 2040 », avec pour optique la mise en place d’un traité juridiquement contraignant.

    Des engagements qui apparaissent bien faibles au vu des investissements monstres et des futurs profits sur l’industrie du plastique de TotalEnergies et Saudi Aramco.

    En 2018, le groupe saoudien en partenariat avec la compagnie française avait invité la presse à visiter ses installations pétrochimiques à Al-Jubail. En vantant le mégaprojet Amiral, Patrick Pouyanné s’était alors félicité devant un parterre de journalistes que, grâce au plastique, « l’industrie pétrolière a encore de beaux jours devant elle ».

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/210423/le-plastique-la-nouvelle-bombe-climatique-de-totalenergies
    #industrie_du_plastique

  • Iraq senz’acqua: il costo del petrolio che arriva fino in Italia
    https://irpimedia.irpi.eu/iraq-petrolio-eni-mancanza-acqua

    In Iraq i giacimenti di petrolio estraggono il greggio utilizzando l’acqua dirottata dai fiumi. Dallo scoppio della guerra in Ucraina, i loro profitti si sono moltiplicati. Ma a Basra mancano acqua e elettricità Clicca per leggere l’articolo Iraq senz’acqua: il costo del petrolio che arriva fino in Italia pubblicato su IrpiMedia.

  • ★ L’IDÉE DES SOVIETS N’EST PAS UNE NOTION BOLCHEVIQUE - Socialisme libertaire

    La théorie des soviets n’a rien de commun avec le système de gouvernement soviétique, comme le croient la plupart des gens. Au contraire, nous sommes en droit de soutenir l’inver­se, à savoir que l’idée des soviets, l’idée d’une organisation de la vie sociale dans le sens d’un système nouveau, libre et com­muniste, avec la régulation de la production et de la distribu­tion des biens dans la future société par l’intermédiaire de ren­contres, de réunions de travail entre les délégués directs, tou­jours remplaçables et dépourvus de tout pouvoir, des organi­sations professionnelles et des centres de distribution ; cette idée n’a rien de commun avec le caractère propre aux bolche­viques, leur tendance étatique et leur système dictatorial dans la réglementation de la vie sociale (...)

    #histoire #Révolution #Russie #URSS #dictature #autoritarisme #étatisme #parlementarisme #communisme #marxisme #dictature_du_prolétariat #Marx #Engels #Lénine #Trotski #Soviet #Petrograd #Kronstadt #bolchevisme #anarchisme...

    ⏩ Lire le texte complet…

    ▶️ https://www.socialisme-libertaire.fr/2023/03/l-idee-des-soviets-n-est-pas-une-notion-bolchevique.html

  • Mars 1921 : un tournant pour le mouvement révolutionnaire. Focus sur Cronstadt.

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    La vérité sur Cronstadt, par Joseph Vanzler alias Wright
    https://www.paperblog.fr/2349148/la-verite-sur-cronstadt-par-joseph-vanzler-alias-wright

    Des membres du Forum des amis de LO ont traduit ce texte. L’original en anglais se trouve ici, sur le site marxists.org : https://www.marxists.org/history/etol/writers/wright/1938/02/kronstadt.htm (John G. Wright, The Truth about Kronstadt, February 1938)

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    Beaucoup de tapage autour de Cronstadt
    (Léon Trotsky, 15 janvier 1938)
    https://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1938/01/lt19380115.htm

    – Un « front populaire » d’accusateurs
    – Les groupements sociaux et politiques à Cronstadt
    – Les modifications intervenues pendant les années de la guerre civile
    – Les causes sociales du soulèvement
    – Le caractère contre-révolutionnaire de la rébellion de Cronstadt
    – La Nep et l’insurrection de Cronstadt
    – Les « insurgés de Cronstadt » sans forteresse

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    Encore sur la #répression de Cronstadt
    (Léon Trotsky, 6 juillet 1938)
    https://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1938/07/lt19380706.htm

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    L’insurrection de Cronstadt

    – Mars 1921 en Allemagne
    – La NEP : une retraite indispensable
    – Adresse à #Max_Hoeltz

    #archiveLO (23 mars 1871)

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    Cronstadt, de Jean-Jacques Marie (494 p.)

    – 1917 : Cronstadt la rouge
    – L’agonie du communisme de guerre
    – Les premières lueurs de l’incendie
    – Les premiers signes de l’orage
    – Chronique d’une #révolte annoncée
    – Un cocktail explosif
    – Au bord du Rubicon
    – Les « privilèges des commissaires »
    – Le passage du Rubicon
    – Les balbutiements de l’insurrection
    – Les ouvriers de Petrograd et l’insurrection
    – Qui sont les insurgés ?
    – L’attente
    – Le comité révolutionnaire provisoire
    – Premier branle-bas de combat
    – L’assaut manqué
    – Cronstadt et l’#émigration
    #Lénine, #Cronstadt et le Xe congrès du parti communiste
    – Une « troisième révolution » ?
    – Vers l’assaut final
    – Le comité révolutionnaire en action
    – L’assaut final
    – Les raisons de l’échec
    – La répression
    – Reprise en main et réorganisation
    – L’exil finlandais
    – Nouvelles alliances
    – Le commencement de la fin
    – Derniers soubresauts
    – Fin de partie
    – Interprétations

    [...] Avec la #NEP, l’#insurrection_de_Cronstadt sort du domaine de la politique pour entrer dans celui de l’histoire. Les #SR_de_droite et de gauche qui l’appuyaient disparaissent. Seuls les #anarchistes revendiquent son héritage ; ils se contentent en général de paraphraser les proclamations, déclarations et appels, pris au pied de la lettre, sans analyser la réalité sociale du mouvement, comme si l’on pouvait étudier l’activité d’un groupe d’hommes en prenant ce qu’ils disent d’eux-mêmes comme critère de vérité. L’impact international de la révolution russe, son influence, le choc en son sein entre le socialisme (national) dans un seul pays de Staline et la révolution internationale incarnée par Trotsky, le plan quinquennal, la collectivisation, tout cela éclipse Cronstadt, qui sombre dans l’oubli, comme #Makhno, mort de tuberculose et d’épuisement dans un hôpital parisien en 1934. La Révolution inconnue de l’anarchiste russe #Voline, consacrée pour un bon quart à Cronstadt, ne sera publiée qu’en 1947, deux ans après sa mort.

    Trotsky a longtemps accordé peu d’attention à l’insurrection. Dans un discours du 28 juillet 1924 sur la situation mondiale Trotsky évoque Cronstadt comme exemple d’explosion sociale « Rationner un pays affamé, écrit-il, est chose difficile, nous le savons par expérience [...]. Nous avons pu constater que le régime de la ration de famine était lié à des troubles croissants qui ont amené en fin de compte l’insurrection de Cronstadt 7 », ainsi présentée comme une conséquence des rigueurs du communisme de guerre. Dans Ma Vie, publiée en 1929, il n’y consacre qu’une demi-ligne. Dans #La_Révolution_trahie, rédigée et publiée en 1936, Trotsky évoque tout aussi brièvement cette révolte, « qui entraîna pas mal de bolcheviks ».

    La guerre civile espagnole qui éclate en juillet 1936 et les procès de Moscou, dont le premier est organisé en août 1936, replacent Cronstadt sous la lumière de l’actualité. En Catalogne et en Aragon, où les anarchistes de la Confederacion National del Trabajo (la #CNT) sont très puissants, les ouvriers et les paysans, qui à peu près seul sont mis en échec le putsch franquiste, créent des comités, collectivisent les fabriques et la terre, forment des milices et constituent un Comité central de milices antifascistes qui rassemblent ouvriers et paysans en armes. Les partisans de l’ordre existant, le PC stalinisé en tête, exigent la dissolution de ces organismes populaires autonomes. La CNT l’avalise et envoie trois ministres au gouvernement, qui proclame l’intangibilité de la propriété privée des moyens de production et de la terre. Un anarchiste, Garcia Oliver, se retrouve ainsi ministre de la Justice, à la tête de l’appareil qui a longtemps persécuté les militants de son #organisation. Pour répondre aux critiques, les dirigeants anarchistes accompagnent leur collaboration gouvernementale avec le PC espagnol d’articles exaltant l’insurrection anti bolchevik de Cronstadt, dont ils se proclament les héritiers. Il est plus aisé d’exalter Makhno et Cronstadt àBarcelone que d’y combattre la politique de Staline. En décembre 1937, Trotsky leur répond : face à Cronstadt et à Makhno « nous avions défendu la révolution prolétarienne contre la #contre-révolution paysanne. Les anarchistes espagnols ont défendu et défendent encore la contre-révolution bourgeoise contre la révolution prolétarienne ».

    Les procès de Moscou d’août 1936, janvier 1937 et mars 1938 dénoncent en Trotsky un terroriste à la solde des nazis. Réfugié au Mexique, Trotsky tente de mettre sur pied une commission d’enquête sur les procès de Moscou. Un ancien député communiste allemand, #Wendelin_Thomas, réfugié aux États-Unis, membre dela sous-commission américaine, l’interpelle publiquement sur Cronstadt et #Makhno, en suggérant que l’attitude des bolcheviks dans ces deux cas annonce Staline et le #stalinisme.

    Trotsky lui répond par une brève lettre où il souligne que les marins de 1917 s’étant disséminés sur les divers fronts, restait à Cronstadt « la masse grise avec de grandes prétentions, mais sans éducation politique et pas prête aux sacrifices révolutionnaires. Le pays était affamé. Ceux de Cronstadt exigeaient des privilèges. L’insurrection fut dictée par le désir de recevoir une ration de privilégié ». Après ce raccourci saisissant, Trotsky affirme : la victoire des insurgés aurait débouché sur celle de la contre-révolution, « indépendamment des idées qui pouvaient être dans la tête des marins », qu’il juge, par ailleurs, « profondément réactionnaires : elles reflétaient l’hostilité de la paysannerie arriérée à l’ouvrier, l’#arrogance du soldat ou du marin pour Pétersbourg “civil”,la haine du #petit-bourgeois pour la #discipline_révolutionnaire ». Une fois maîtres de la forteresse, les insurgés ne pouvaient être réduits que par les armes.

    Un mois plus tard, il écrit dans une lettre à Erwin Wolf : « Ma réponse est beaucoup trop courte, insuffisante. » En septembre 1937, Victor Serge publie un article très critique sur l’attitude des bolcheviks face à Cronstadt. Informé, Trotsky écrit le 15 octobre un bref mot au trotskiste américain Wasserman des éditions Pionners Publishers. Il y affirme nécessaire de clarifier l’histoire de Cronstadt afin de pouvoir discuter avec les anarchistes, mais ajoute : « Cependant pour beaucoup de raisons, je ne puis écrire un article sur cette question » et affirme qu’il a proposé à son fils, Léon Sedov, d’écrire un travail détaillé et documenté qu’il préfacerait. #Wasserman insiste. Trotsky lui répond le 14 novembre qu’il comprend son insistance, mais il n’a en ce moment, répond-il, ni « les matériaux nécessaires ni le temps d’un article [...] absolument exhaustif ». Si Léon Sedov peut faire ce travail, Trotsky l’utilisera pour un article. Cinq jours plus tard, il écrit à son fils : « Il est absolument nécessaire d’écrire sur Cronstadt. » Il insiste sur un point : « Les matelots paysans, guidés par les éléments les plus anti prolétariens, n’auraient rien pu faire du pouvoir, même si on le leur avait abandonné. Leur pouvoir n’aurait été qu’un pont, et un pont bien court, vers le pouvoir bourgeois. » Soulignant néanmoins que « le mécontentement était très grand », il conclut : « les #matelots en rébellion représentaient le #Thermidor_paysan », ce qui n’est pas la même chose que la réduction de la révolte à la volonté d’obtenir des privilèges. #Léon_Sedov se met au travail.

    Trotsky y revient le 16 décembre dans une lettre au trotskyste américain Wright qui vient de terminer un article sur la révolte. Il prend la question sous un angle un peu différent. Il récuse l’idée que les soldats et les marins se soient insurgés pour le mot d’ordre politique des soviets libres. « Le reste de la #garnison de Cronstadt, affirme-t-il, était composé d’hommes arriérés et passifs qui ne pouvaient être utilisés dans la guerre civile. Ces gens ne pouvaient être entraînés dans une insurrection que par de profonds besoins et intérêts économiques. [...] ceux des pères et frères de ces marins et soldats, c’est-à-dire des paysans, marchands de produits alimentaires et de matières premières. En d’autres termes, la mutinerie était l’expression de la réaction de la petite bourgeoisie contre les difficultés et privations imposées par la révolution prolétarienne. »

    Confronté à une campagne sur Cronstadt qui entrave sa bataille difficile contre les falsifications des #procès_de_Moscou, il précise enfin son analyse dans deux articles : Beaucoup de bruit autour de Cronstadt (15 janvier 1938) et Encore une fois à propos de la répression de Cronstadt (6 juillet 1938). L’insurrection, précise-t-il d’abord, exprime la révolte des paysans contre la réquisition de leur production. Les marins, en grande majorité d’origine paysanne, furent les porte-parole « de la réaction armée de la petite bourgeoisie [la paysannerie] contre les difficultés de la révolution socialiste et la rigueur de la dictature prolétarienne. C’est précisément ce que signifiait le mot d’ordre de Cronstadt “Les soviets sans communistes” ».Il affirme ensuite n’avoir personnellement pris aucune part à l’écrasement de l’insurrection, ni à la répression qui suivit, ce qui n’a à ses yeux aucune signification politique, puisque, membre du gouvernement, il a jugé nécessaire la liquidation de la révolte, a participé à la décision d’y procéder si les négociations et l’ultimatum lancé restaient sans résultat et en assume donc la responsabilité politique.

    Il y revient une dernière fois dans son Staline inachevé écrit en 1939-1940, où il range Cronstadt parmi les « #légendes reposant sur l’#ignorance et le #sentimentalisme [...]. Ce que le gouvernement soviétique fit à contrecœur à Cronstadt fut une nécessité tragique ; évidemment le gouvernement révolutionnaire ne pouvait pas “faire cadeau” aux #marins insurgés de la forteresse qui protégeait #Petrograd, simplement parce que quelques anarchistes et #socialistes-révolutionnaires douteux patronnaient une poignée de paysans réactionnaires et de soldats mutinés ». À quelques nuances près, Trotsky, de 1921 à sa mort, maintint donc la même analyse de l’insurrection.

    Tout au long des soixante-dix ans d’#Union_soviétique (#URSS) l’insurrection de Cronstadt fut (à la rare exception des discours de Lénine au Xe congrès du parti communiste) présentée comme une simple émeute contre-révolutionnaire. Le Précis d’histoire du parti communiste publié en1938, revu et corrigé personnellement par Staline, consacre plus d’une page à cet épisode. Tout en reconnaissant le mécontentement de la paysannerie à l’égard des réquisitions, il voit dans « l’émeute contre-révolutionnaire de Cronstadt un exemple patent de la nouvelle tactique de l’ennemi de classe qui se camoufla en empruntant les couleurs soviétiques ; au lieu du vieux mot d’ordre avorté “À bas les soviets !”, il lança un mot d’ordre nouveau : « Pour les soviets, mais sans les communistes” ». Qui s’était soulevé, qui étaient les émeutiers, le lecteur de ce Précis très imprécis ne pouvait pas le savoir. Ses auteurs plaçaient les « gardes blancs, les SR et les mencheviks »à la tête d’une émeute aux insurgés sans visage et sans identité. Le tome 23 de la Grande Encyclopédie soviétique publié en 1953, l’année même où mourut #Staline, reprend l’antienne en y ajoutant les manœuvres des « traîtres trotsko-zinoviévistes » vrais responsables de l’insurrection, oubliés par Staline lui-même en 1938. […]

    #Kronstadt #anarchisme #mythologie

  • Au Congo-Brazzaville, un champ de pétrole exploité par Perenco au cœur d’une enquête pour corruption
    https://disclose.ngo/fr/article/congo-brazzaville-un-champ-de-petrole-exploite-par-perenco-au-coeur-dune-e

    Le 15 décembre 2021, les enquêteurs de l’agence anticorruption de Norvège perquisitionnent le siège du groupe pétrolier Petronor E & P, à Oslo. Au même moment, le directeur général de la société, Knut Søvold, et son directeur du développement, Gerhard Ludvigsen, sont arrêtés et placés en garde à vue. Dans un communiqué, la police annonce qu’ils sont entendus dans le cadre d’une enquête « liée à des projets en Afrique ». Sans autres précisions. Il s’agit en réalité d’une enquête sur des soupçons de corruption au Congo-Brazzaville, à plus de 7 300 kilomètres de la capitale norvégienne. Ici, au large des côtes congolaises, Petronor, détient, via une filiale appelée Hemla, des intérêts dans un vaste champ pétrolifère baptisé Pointe-Noire Grand Fond (PNGF) du Sud. À ses côtés, on retrouve le groupe franco-britannique Perenco. Les enquêteurs de la police norvégienne se penchent justement sur les conditions d’obtention, en janvier 2017, de la licence d’exploration du gisement PNGF Sud. À l’époque, Hemla avait obtenu 20 % des parts de cette licence jusque-là détenue par TotalEnergie et la compagnie italienne ENI. Quant à Perenco, elle en avait récupéré 40 %, devenant ainsi l’actionnaire majoritaire ainsi que l’opérateur de ce puits qui produit 20 000 barils par jour.

    #Afrique #Norvège #Perenco #Corruption #Pétrole #Congo

  • Projets Tilenga et EACOP de Total : le tribunal judiciaire de Paris botte en touche | Les Amis de la Terre
    https://www.amisdelaterre.org/projets-tilenga-eacop-total-tribunal-judiciaire-paris-botte-touche

    Plus de trois ans après son lancement et suite à une longue bataille procédurale, les juges ont considéré que le dossier était irrecevable en raison d’un nouveau point de procédure controversé. Les associations requérantes déplorent fortement cette décision et se réservent sur les suites à donner, en consultation avec les communautés affectées.

    #Afrique #TotalEnergie #Ouganda #Tanzanie #Pétrole

  • Le parasitisme de la grande bourgeoisie a atteint des niveaux record dans le monde en 2022

    Nouvelle année record pour les versements de dividendes. En 2022, ils ont continué à croître fortement au niveau mondial, pour s’établir à 1.560 milliards de dollars, selon le dernier rapport publié par la société de gestion Janus Henderson […].

    La croissance des dividendes sur un an s’élève à 8,4 %. […] La quasi-totalité (88 %) des entreprises cotées prises en compte dans l’étude a augmenté ou maintenu leurs dividendes. Mais certaines beaucoup plus que les autres. A eux seuls, les producteurs de #pétrole et de #gaz et les sociétés financières expliquent la moitié de la croissance mondiale des dividendes de 2022. […]

    Douze pays ont enregistré des distributions record en dollars, dont les #Etats-Unis (574,2 milliards de dollars), le #Brésil (33,8 milliards) ou la #Chine (49,7 milliards). Les marchés émergents, l’Asie-Pacifique hors #Japon et l’#Europe ont observé une hausse des #dividendes d’environ 20 %. […]

    D’autres pays ont battu des records dans leur monnaie locale, notamment la France, où les versements « ont atteint un nouveau record de 59,8 milliards d’euros, surpassant de 4,6 % le record de 2019 », note Charles-Henri Herrmann, directeur du développement France de Janus Henderson. « La #croissance du total français est notamment due aux hausses impressionnantes enregistrées par les entreprises du secteur du #luxe et de l’#automobile. »

    Les #entreprises françaises sont celles ayant le plus contribué à la croissance des dividendes européens : elles représentent près d’un tiers de l’augmentation annuelle. […]

    (Les Échos)

    #profits #classe_capitaliste #grande_bourgeoisie #capitalisme #parasitisme #actionnaires #vampires

  • Deux articles synthétiques de François Jarrige sur deux matières centrales de notre époque : le charbon, et le pétrole. Dans le « Vocabulaire critique & spéculatif des transitions ».

    Charbon. Généalogie d’une obsession
    https://vocabulairedestransitions.fr/article-4
    https://sniadecki.wordpress.com/2023/02/16/jarrige-charbon

    Pétrole. L’or noir entre nuisances, dégâts et transitions
    https://vocabulairedestransitions.fr/article-5
    https://sniadecki.wordpress.com/2023/02/18/jarrige-petrole

    #François_Jarrige #charbon #pétrole #énergie #transition #histoire #critique_techno

  • Jamais les énergies fossiles n’ont été autant subventionnées | Le Devoir
    https://www.ledevoir.com/economie/782107/energie-jamais-les-energies-fossiles-n-ont-ete-autant-subventionnees

    « Plus de mille milliards de dollars » : contraints de répondre dans l’urgence à la flambée des tarifs de l’énergie, les États n’ont jamais autant subventionné la consommation d’énergies fossiles qu’en 2022, alors que la crise climatique exigerait l’inverse, a déploré jeudi l’Agence internationale de l’énergie (AIE).

  • Line in the Sand | Kate Wagner
    https://thebaffler.com/latest/line-in-the-sand-wagner

    The twelve architecture firms that have been revealed as participating in this stupid, brutal, and improbable vanity project are in no way marginal players. They include some of the biggest in the field, including the I.M.-Pei-less ghost of Pei Cobb Freed & Partners; 2000s darlings Coop Himmelb(l)au; stark, high-style Tom Wiscombe Architecture; Thom Mayne’s showy and often disappointing firm Morphosis; the designer of the acclaimed Smithsonian National Museum of African American History and Culture (NMAAHC), Adjaye Associates; and Peter Cook’s speculative firm CHAP, among others. (...)

    Participation in The Line—an indoor, climate controlled mall only conceivable in a state absolutely drunk off oil money that will almost certainly never get built and, if it does get built, will come at the cost of massive human suffering—is not just an embarrassment; it should be nullify the progressive reputations of all firms involved. For a very long time, architecture firms have talked out of both sides of their mouths, espousing reverence for resiliency, egalitarianism, and environmentalism all while working for some of the most despotic regimes on the planet.

    #architecture #arabie_saoudite

  • Les négociants en matières premières ne connaissent pas la crise
    https://www.publiceye.ch/fr/thematiques/negoce-agricole/les-negociants-en-matieres-premieres-ne-connaissent-pas-la-crise

    Alors que la sécurité alimentaire et énergétique de millions de personnes est gravement menacée en raison de l’augmentation des prix de la nourriture et des matières premières, les négociants enregistrent des bénéfices records. Les perturbations causées sur les marchés par la pandémie et l’invasion russe de l’Ukraine leur ont permis de multiplier leurs profits. Cela se reflète également dans leur poids dans l’économie suisse : désormais 8 % du PIB, soit presque autant que la place financière. La Suisse renonce à réglementer efficacement ce secteur à haut risque et à imposer ses bénéfices de guerre.

    #Pétrole #gaz #Négoce #agriculture

  • Ils ont du #pétrole et une seule idée : enrichir leurs #actionnaires
    En 2022, les cinq premiers #groupes_pétroliers occidentaux ont totalisé 180,5 milliards de dollars de #profits. Un record historique. Plutôt que d’investir dans les #énergies #renouvelables et de préparer l’avenir, ils préfèrent reverser l’essentiel à leurs actionnaires. Cette position de rente ne peut que relancer le débat sur le rôle des #majors_pétrolières.

    Martine Orange
    8 février 2023 à 19h01

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/080223/ils-ont-du-petrole-et-une-seule-idee-enrichir-leurs-actionnaires

    EnEn temps normal, les cinq premiers grands groupes pétroliers mondiaux (#ExxonMobil, #Chevron, #Shell, #BP et #Total) auraient sans doute plastronné. Au vu des circonstances, ils ont préféré faire #profil_bas. En ces temps de #crise_énergétique qui malmène #finances_publiques, entreprises et ménages, leurs profits ne peuvent que relancer le débat sur leur conduite : en 2022, ces cinq premiers groupes ont totalisé ensemble 180,5 milliards de dollars, soit 100 milliards de dollars de plus qu’en 2021, année déjà considérée comme #exceptionnelle.

    Et ces profits auraient été encore plus élevés si des opérations comptables n’étaient venues lisser les comptes. Total ainsi a enregistré un bénéfice comptable net ajusté de 36,2 milliards de dollars. Après la prise en compte de ses désinvestissements en Russie (15 milliards de dollars), son bénéfice est ramené à 20,5 milliards de dollars.

    Jamais dans leur histoire récente, les majors du Big Oil n’avaient enregistré des résultats aussi colossaux. En 2011, année où le prix du baril avait dépassé les 120 dollars, leurs profits s’élevaient à 140 milliards. Shell d’ailleurs le reconnaît : le groupe a enregistré un résultat historique (39,8 milliards de dollars), le plus élevé en 115 ans !

    À eux seuls, ces chiffres résument la folie du moment. La crise énergétique, les tensions géopolitiques, la guerre en Ukraine sur fond de crise climatique se traduisent par des déplacements financiers colossaux et une accumulation encore plus gigantesque de capitaux entre quelques mains qui mettent à profit leur position de rente, sans qu’aucun facteur redistributif ne vienne les contrarier. Un pognon de dingue, pour reprendre l’expression désormais consacrée, est accaparé au détriment de tous à court et long terme.

    Si le ministre des finances français Bruno Le Maire ne sait toujours pas ce que veut dire des superprofits, la Maison Blanche le sait, qui en a tout de suite perçu le caractère politiquement explosif. « Il est scandaleux qu’Exxon réalise un nouveau record des profits pour les compagnies pétrolières occidentales, après que les Américains ont été forcés de payer des prix si élevés à la pompe au milieu de l’invasion de Poutine », a réagi un porte-parole de la Maison Blanche dans un mail, tout de suite après la publication des résultats d’ExxonMobil annonçant 55 milliards de dollars de profits.

    Une économie mondiale toujours plus dépendante des énergies fossiles
    Derrière ces chiffres effarants se cache déjà un premier constat accablant : en dépit des grands discours et des beaux engagements, l’économie mondiale est plus carbonée que jamais. Alors que 2022 a été marquée par nombre d’événements (tempêtes, inondations, vagues de chaleur, sécheresses) prouvant la réalité des dérèglements climatiques et l’urgence de la situation, rien n’a été fait pour tenter d’endiguer le recours aux énergies fossiles. Au contraire. La demande mondiale en pétrole, gaz, hydrocarbures continue d’augmenter : elle a dépassé désormais les 100 millions de barils par jour et devrait continuer à progresser cette année, selon l’Agence internationale de l’énergie.

    Mais face à ce rebond de la consommation, l’offre n’a pas suivi. Depuis plusieurs années, les groupes pétroliers et les pays producteurs ont opté pour une stratégie de la rareté, laquelle leur semble beaucoup plus rémunératrice et sûre que de pousser à la surproduction. L’effacement des approvisionnements pétroliers et gaziers russes, à la suite des sanctions adoptées par l’Occident en réponse à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, a achevé de bouleverser les équilibres existants du secteur.

    L’Europe, la poule aux œufs d’or des pétroliers
    L’impréparation et la façon brouillonne dont les pays européens ont mis en œuvre ces sanctions contre Moscou, jusqu’alors l’un des premiers, voire le premier, fournisseurs de certains pays européens, a conduit à une surenchère entre ces derniers, ainsi qu’à une spéculation effrénée. Dans leurs présentations, les grands groupes mondiaux ne manquent pas de consacrer des mentions spéciales au continent européen : « le siphonnage massif de la prospérité en dehors de l’Europe », dénoncé par le premier ministre belge à l’automne, se retrouve en partie dans les comptes de résultats de ces cinq majors.

    L’Europe a été leur poule aux œufs d’or. Les profits exceptionnels de Shell sont tirés en grande partie de ces ventes de gaz naturel liquéfié à l’Europe, tout comme BP. ExxonMobil a multiplié par deux ses profits en Europe en un an. Plus grave : l’Union européenne, qui se veut le fer de lance de la transition écologique, a tourné le dos à ses propres engagements, a relancé dans la panique ses centrales à gaz, ses centrales à charbon, et construit à toute vitesse des terminaux pour importer du gaz naturel liquéfié (GNL) et ainsi faire face aux ruptures provoquées par les sanctions à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Sans discuter les prix.

    La mise entre parenthèses des impératifs climatiques
    Cette volte-face n’a pas échappé aux majors pétrolières. Tous ces grands groupes ont tout de suite compris que le fameux signal-prix, censé être la corde de rappel économique pour contraindre la demande, n’existait pas dans un monde qui a soif d’énergie, et qui n’a d’autre solution que de se raccrocher aux énergies fossiles, faute d’alternatives.

    Dans leur présentation stratégique, les cinq majors prennent toutes note de ce revirement pour s’en réjouir. Ces dernières années, elles se posaient des questions existentielles, se demandant où était leur futur : elles avaient arrêté nombre de projets d’investissements dans l’exploration et la production, les jugeant trop risqués et pas assez rentables ; elles s’inquiétaient d’être bannies par les investisseurs et les marchés de capitaux pour non-conformité aux critères sociaux et environnementaux. Toutes ces craintes se sont volatilisées : les grands groupes pétroliers occidentaux affichent aujourd’hui une sérénité rarement vue depuis 2011, leur dernière grande année de réussite.

    Bien sûr, elles disent avoir encore des projets pour accompagner la transition écologique et développer d’autres énergies propres. ExxonMobil ne jure que par les techniques de production de l’hydrogène et la capture du carbone, entraînant tous ses concurrents sur ce chemin. Shell, qui n’a installé dans le monde que 2,2 GW d’énergies renouvelables, promet d’accentuer ses efforts dans ce domaine. Mais à côté, il y a les autres projets, ceux qui leur importent vraiment : les cinq projettent d’investir des dizaines de milliards de dollars dans les prochaines années pour relancer l’exploration et la production de gaz et de pétrole.

    Le revirement le plus spectaculaire est sans doute celui de BP. Depuis des années, les études du groupe britannique servent de référence pour l’ensemble du monde pétrolier. Il est le premier à avoir tiré la sonnette d’alarme sur la nécessaire transition écologique, le premier aussi à s’être montré le plus ambitieux dans ses objectifs de décarbonation. Tout s’est évanoui.

    Alors que BP s’était engagé auparavant à diminuer de 40 % ses productions pétrolières et gazières d’ici à 2030 afin de diminuer ses émissions et de s’engager dans une stratégie bas carbone, le président de BP, Bernard Looney, a annoncé le 6 février que tout était révisé. Au lieu de 40 % de baisse de ses émissions en 2030, il ne prévoit qu’une diminution de 25 % à cette date, l’objectif initial étant repoussé à 2050. Et même si le groupe promet d’augmenter de 8 milliards de dollars ses investissements dans les énergies renouvelables, il a décidé aussi d’investir fortement dans la production des énergies fossiles, en dépit des recommandations de l’Agence internationale de l’énergie d’arrêter les investissements dans ces énergies.

    Une taxation bien légère et pourtant contestée
    Car jamais cela n’a été aussi rentable. Un critère, cher aux investisseurs financiers, résume à lui seul la rente sur laquelle ils prospèrent : le retour sur les capitaux investis. Ce ratio a atteint des niveaux jamais vus dans une industrie lourde : 25 % pour Exxon, 20,7 % pour Chevron, 16,7 % pour Shell, 30,5 % pour BP, 28,2 % pour Total. Tous sont assis sur des montagnes de cash dépassant les 30 à 40 milliards de dollars. Une situation qui selon eux est appelée à durer au moins jusqu’en 2025. Car tous pensent que la situation sur les marchés pétroliers est appelée à rester durablement tendue, que la Russie ne reviendra pas, ou seulement par des subterfuges, sur les marchés mondiaux.

    Leurs superprofits ont donc toutes les chances de perdurer. Cela ne les empêche pas de se plaindre des « mauvaises manières » qui, selon ces cinq grands groupes, leur sont faites en Europe. Tous insistent sur « l’effort considérable » qu’ils font en raison des taxes et prélèvements qui leur ont été imposés par certains gouvernements européens et britannique, sans parler de la taxe instituée au niveau européen, sur leurs superprofits.

    ExxonMobil prétend que ces impositions lui ont coûté 1,8 milliard de dollars cette année ; Shell cite le chiffre de 2,2 milliards de dollars ; TotalEnergies de 1,7 milliard de dollars. Au nom de tous, ExxonMobil a engagé un procès pour contester la contribution décidée par la Commission européenne sur les superprofits. Compte tenu du flou juridique qui entoure cette décision, le groupe pétrolier a des chances de l’emporter.

    Attaqués de toutes parts par des forces politiques qui contestent ces profits excessifs au moment où les finances publiques sont mises à mal, les groupes pétroliers ont engagé un lobbying d’enfer et des escouades de juristes et de fiscalistes pour contrer les attaques et dissuader tout gouvernement qui serait tenté d’augmenter la fiscalité, même de façon exceptionnelle, sur leurs profits.

    Le ruissellement vers le haut de la rente pétrolière
    La question, cependant, risque de s’imposer à nouveau très vite dans nombre de pays. D’autant que les grands groupes vont avoir de plus en plus de mal à justifier l’utilisation de ces résultats exorbitants.

    Car que font-ils de ces profits colossaux ? Ils les reversent à leurs actionnaires. ExxonMobil a reversé 30 milliards de dollars à ses actionnaires, Shell 26 milliards, plus que ses dépenses d’investissement. Au total, les cinq grands groupes ont versé plus de 80 milliards de dollars sous forme de dividendes et de rachats d’actions en 2022. Ils se préparent à augmenter encore ces versements en 2023. Afin de s’attirer les bonnes grâces des marchés financiers, Chevron a annoncé un programme mammouth qui a même stupéfait Wall Street : le géant pétrolier s’est engagé à dépenser 75 milliards de dollars dans les prochaines années pour racheter ses propres actions. Ce qui n’est pas donner un grand signe de confiance dans ses activités ni même indiquer une vision d’avenir.

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    Distraire tant d’argent pour le seul bénéfice des actionnaires alors que l’on sait que la transition écologique va requérir des investissements gigantesques dans les prochaines années apparaît juste comme surréaliste. Ces sommes auraient pu être réinvesties dans d’autres projets d’énergie propre. Les dirigeants auraient pu aussi décider d’en conserver une grande partie pour créer des fonds susceptibles, le moment venu, de financer l’arrêt et le démantèlement de leurs actifs échoués. Car il y aura des dizaines de milliards d’actifs échoués dans ce secteur promis à plus ou moins long terme à entrer en voie d’extinction. Il aurait pu au moins essayer d’apporter des remèdes et des réparations aux pollutions et dégâts provoqués par leurs activités d’exploration et de production.

    Habitués depuis leur création à externaliser tous les coûts de leur activité sur la collectivité et à négliger l’intérêt général, ces grands groupes ne voient pas les raisons qu’il y aurait à changer. Ils poussent leur avantage tant que c’est possible, avant de laisser aux autres la charge de payer les ardoises finales. Des ardoises de plus en plus exorbitantes.

    • Relançons plutôt le débat sur le rôle de la classe capitaliste. Elle gagne des milliards en vendant des engins de mort et se frotte les mains à chaque bombe qui explose. D’autres profitent de la guerre pour spéculer sur le prix de l’énergie. Et d’autres encore espèrent que la guerre sera très destructrice pour vendre du béton et des matériaux de construction. C’est le mur du capitalisme qu’il faut abattre, pas seulement une de ses briques. Pour passer d’une société où tout est bon pour les profits d’une minorité infinitésimale de possédants parasites – y ­compris le pillage et le sang – à une société rationalisée par les producteurs eux-mêmes.

  • Lecture de : La guerre des métaux rares. La face cachée de la transition énergétique et numérique, de Guillaume Pitron

    Une perspective nationaliste navrante, mais une somme d’informations capitales.

    Extraits :

    « Le monde a de plus en plus besoin de terres rares, de « #métaux rares », pour son #développement_numérique, et donc pour ttes les #technologies_de_l’information_et_de_la_communication. Les #voitures_électriques et #voitures_hybrides en nécessitent deux fois plus que les voitures à essence, etc. »

    « Nos aïeux du XIXe siècle connaissaient l’importance du #charbon, & l’honnête homme du XXe siècle n’ignorait rien de la nécessité du pétrole. Au XXIe siècle, nous ne savons même pas qu’un monde + durable dépend en très grande partie de substances rocheuses nommées métaux rares. »

    « #Terres_rares, #graphite, #vanadium, #germanium, #platinoïdes, #tungstène, #antimoine, #béryllium, #fluorine, #rhénium, #prométhium… un sous-ensemble cohérent d’une trentaine de #matières_premières dont le point commun est d’être souvent associées ds la nature aux métaux les + abondants »

    « C’est là la clé du « #capitalisme_vert » : [remplacer] des #ressources qui rejettent des millions de milliards de tonnes de #gaz_carbonique par d’autres qui ne brûlent pas – et ne génèrent donc pas le moindre gramme de CO2. »

    « Avec des réserves d’or noir en déclin, les stratèges doivent anticiper la guerre sans #pétrole. […] ne plus dépendre des énergies fossiles d’ici à 2040. […] En recourant notamment aux #énergies_renouvelables & en levant des légions de robots alimentés à l’électricité. »

    « La Grande-Bretagne a dominé le XIXe s. grâce à son hégémonie sur la production mondiale de charbon ; une grande partie des événements du XXe s. peuvent se lire à travers le prisme de l’ascendant pris par les Etats-Unis et l’Arabie saoudite sur la production et la sécurisation des routes du pétrole ; .. au XXIe siècle, un État est en train d’asseoir sa domina routes du pétrole ; au XXIe siècle, un État est en train d’asseoir sa domination sur l’exportation et la consommation des métaux rares. Cet État, c’est la Chine. »

    La Chine « détient le #monopole d’une kyrielle de métaux rares indispensables aux énergies bas carbone & numérique, ces 2 piliers de la transition énergétique. Il est le fournisseur unique du + stratégique : terres rares — sans substitut connu & dont personne ne peut se passer. »

    « Notre quête d’un modèle de #croissance + écologique a plutôt conduit à l’exploitation intensifiée de l’écorce terrestre pr en extraire le principe actif, à savoir les métaux rares, avec des #impacts_environnementaux encore + importants que cx générés par l’#extraction_pétrolière »

    « Soutenir le changement de notre #modèle_énergétique exige déjà un doublement de la production de métaux rares tous les 15 ans environ, et nécessitera au cours des trente prochaines années d’extraire davantage de minerais que ce que l’humanité a prélevé depuis 70 000 ans. » (25)

    « En voulant nous émanciper des #énergies_fossiles, en basculant d’un ordre ancien vers un monde nouveau, nous sombrons en réalité dans une nouvelle dépendance, plus forte encore. #Robotique, #intelligence_artificielle, #hôpital_numérique, #cybersécurité, #biotechnologies_médicale, objets connectés, nanoélectronique, voitures sans chauffeur… Tous les pans les + stratégiques des économies du futur, toutes les technologies qui décupleront nos capacités de calcul et moderniseront notre façon de consommer de l’énergie, le moindre de nos gestes quotidien… et même nos grands choix collectifs vont se révéler totalement tributaires des métaux rares. Ces ressources vont devenir le socle élémentaire, tangible, palpable, du XXIe siècle. » (26)

    #Metaux_Rares Derrière l’#extraction et le « #raffinage », une immense #catastrophe_écologique : « D’un bout à l’autre de la chaîne de production de métaux rares, quasiment rien en #Chine n’a été fait selon les standards écologiques & sanitaires les plus élémentaires. En même temps qu’ils devenaient omniprésents ds les technologies vertes & numériques les + enthousiasmantes qui soient, les métaux rares ont imprégné de leurs scories hautement toxiques l’eau, la terre, l’atmosphère & jusqu’aux flammes des hauts-fourneaux – les 4 éléments nécessaires à la vie »

    « C’est ici que bat le cœur de la transition énergétique & numérique. Sidérés, ns restons une bonne h à observer immensités lunaires & paysages désagrégés. Mais il vaut mieux déguerpir avant que la maréchaussée alertée par les caméras ne débarque »

    « Nous avons effectué des tests, et notre village a été surnommé “le village du cancer”. Nous savons que nous respirons un air toxique et que nous n’en avons plus pour longtemps à vivre. »

    « La seule production d’un #panneau_solaire, compte tenu en particulier du silicium qu’il contient, génère, avance-t-il, plus de 70 kilos de CO2. Or, avec un nombre de panneaux photovoltaïques qui va augmenter de 23 % par an dans les années à venir, cela signifie que les installations solaires produiront chaque année dix gigawatts d’électricité supplémentaires. Cela représente 2,7 milliards de tonnes de carbone rejetées dans l’atmosphère, soit l’équivalent de la #pollution générée pendant un an par l’activité de près de 600 000 automobiles.

    « Ces mêmes énergies – [dites] « renouvelables » – se fondent sur l’exploitation de matières premières qui, elles, ne sont pas renouvelables. »

    « Ces énergies – [dites] « vertes » ou « décarbonées » – reposent en réalité sur des activités génératrices de #gaz_à_effet_de_serre . »

    « N’y a-t-il pas une ironie tragique à ce que la pollution qui n’est plus émise dans les agglomérations grâce aux voitures électriques soit simplement déplacée dans les zones minières où l’on extrait les ressources indispensables à la fabrication de ces dernières ?

    .. En ce sens, la transition énergétique et numérique est une transition pour les classes les plus aisées : elle dépollue les centres-villes, plus huppés, pour mieux lester de ses impacts réels les zones plus miséreuses et éloignées des regards. »

    « Certaines technologies vertes sur lesquelles se fonde notre idéal de sobriété énergétique nécessitent en réalité, pour leur fabrication, davantage de matières premières que des technologies plus anciennes. »

    .. « Un futur fondé sur les technologies vertes suppose la consommation de beaucoup de matières, et, faute d’une gestion adéquate, celui-ci pourrait ruiner […] les objectifs de développement durable. » (The World Bank Group, juin 2017.)

    « Le #recyclage dont dépend notre monde + vert n’est pas aussi écologique qu’on le dit. Son bilan environnemental risque même de s’alourdir à mesure que nos sociétés produiront des alliages + variés, composés d’un nombre + élevé de matières, ds des proportions tjrs + importantes »

    « Dans le monde des matières premières, ces observations relèvent le + souvent de l’évidence ; pr l’immense majorité d’entre nous, en revanche, elles sont tellement contre-intuitives qu’il va certainement nous falloir de longues années avant de bien les appréhender & faire admettre. Peut-être [dans 30 ans] nous dirons-nous aussi que les énergies nucléaires sont finalement moins néfastes que les technologies que nous avons voulu leur substituer et qu’il est difficile d’en faire l’économie dans nos mix énergétiques. »

    « Devenue productrice prépondérante de certains métaux rares, la Chine [a] désormais l’opportunité inédite d’en refuser l’exportation vers les États qui en [ont] le plus besoin. […] Pékin produit 44 % de l’#indium consommé dans le monde, 55 % du vanadium, près de 65 % du #spath_fluor et du #graphite naturel, 71 % du germanium et 77 % de l’antimoine. La Commission européenne tient sa propre liste et abonde dans le même sens : la Chine produit 61 % du silicium et 67 % du germanium. Les taux atteignent 84 % pour le tungstène et 95 % pour les terres rares. Sobre conclusion de Bruxelles : « La Chine est le pays le plus influent en ce qui concerne l’approvisionnement mondial en maintes matières premières critiques ». »

    « La République démocratique du Congo produit ainsi 64 % du #cobalt, l’Afrique du Sud fournit 83 % du platine, de l’iridium et du #ruthénium, et le Brésil exploite 90 % du #niobium. L’Europe est également dépendante des États-Unis, qui produisent plus de 90 % du #béryllium . »

    « Les 14 pays membres de l’OPEP, capables depuis des décennies d’influencer fortement les cours du baril, ne totalisent « que » 41 % de la prod. mondiale d’or noir… La Chine, elle, s’arroge jusqu’à 99 % de la prod. mondiale de terres rares, le + convoité des métaux rares ! »

    Aimants — « Alors qu’à la fin de la décennie 1990 le Japon, les États-Unis et l’Europe concentraient 90 % du marché des aimants, la Chine contrôle désormais les 3/4 de la production mondiale ! Bref, par le jeu du chantage « technologies contre ressources », le monopole chinois de la production des minerais s’est transposé à l’échelon de leur transformation. La Chine n’a pas trusté une, mais deux étapes de la chaîne industrielle. C’est ce que confirme la Chinoise Vivian Wu : « Je pense même que, dans un avenir proche, la Chine se sera dotée d’une industrie de terres rares totalement intégrée d’un bout à l’autre de la chaîne de valeur. » Vœu déjà en partie réalisé. Il a surtout pris racine dans la ville de #Baotou, en #Mongolie-Intérieure . »

    « Baotou produit chaque année 30 000 tonnes d’aimants de terres rares, soit le tiers de la production mondiale. »

    « Nos besoins en métaux rares se diversifient et s’accroissent de façon exponentielle. […] D’ici à 2040, nous devrons extraire trois fois plus de terres rares, cinq fois plus de tellure, douze fois plus de cobalt et seize fois plus de #lithium qu’aujourd’hui. […] la croissance de ce marché va exiger, d’ici à 2050, « 3 200 millions de tonnes d’acier, 310 millions de tonnes d’aluminium et 40 millions de tonnes de #cuivre 5 », car les éoliennes engloutissent davantage de matières premières que les technologies antérieures.

    .. « À capacité [de production électrique] équivalente, les infrastructures […] éoliennes nécessitent jusqu’à quinze fois davantage de #béton, quatre-vingt-dix fois plus d’aluminium et cinquante fois plus de fer, de cuivre et de verre » que les installations utilisant des #combustibles traditionnels, indique M. Vidal. Selon la Banque mondiale, qui a conduit sa propre étude en 2017, cela vaut également pour le solaire et pour l’hydrogène. […] La conclusion d’ensemble est aberrante : puisque la consommation mondiale de métaux croît à un rythme de 3 à 5 % par an, « pour satisfaire les besoins mondiaux d’ici à 2050, nous devrons extraire du sous-sol plus de métaux que l’humanité n’en a extrait depuis son origine ».

    .. Que le lecteur nous pardonne d’insister : nous allons consommer davantage de #minerais durant la prochaine génération qu’au cours des 70 000 dernières années, c’est-à-dire des cinq cents générations qui nous ont précédés. Nos 7,5 milliards de contemporains vont absorber plus de #ressources_minérales que les 108 milliards d’humains que la Terre a portés jusqu’à ce jour. » (211-214)

    Sans parler des « immenses quantités d’eau consommées par l’industrie minière, [des] rejets de gaz carbonique causés par le transport, [du] #stockage et [de] l’utilisation de l’énergie, [de] l’impact, encore mal connu, du recyclage des technologies vertes [de] toutes les autres formes de pollution des #écosystèmes générées par l’ensemble de ces activités [et] des multiples incidences sur la biodiversité. » (215)

    « D’un côté, les avocats de la transition énergétique nous ont promis que nous pourrions puiser à l’infini aux intarissables sources d’énergie que constituent les marées, les vents et les rayons solaires pour faire fonctionner nos technologies vertes. Mais, de l’autre, les chasseurs de métaux rares nous préviennent que nous allons bientôt manquer d’un nombre considérable de matières premières. Nous avions déjà des listes d’espèces animales et végétales menacées ; nous établirons bientôt des listes rouges de métaux en voie de disparition. » (216)

    « Au rythme actuel de production, les #réserves rentables d’une quinzaine de métaux de base et de métaux rares seront épuisées en moins de cinquante ans ; pour cinq métaux supplémentaires (y compris le fer, pourtant très abondant), ce sera avant la fin de ce siècle. Nous nous dirigeons aussi, à court ou moyen terme, vers une pénurie de vanadium, de #dysprosium, de #terbium, d’#europium & de #néodyme. Le #titane et l’indium sont également en tension, de même que le cobalt. « La prochaine pénurie va concerner ce métal, Personne n’a vu le problème venir. »

    « La #révolution_verte, plus lente qu’espéré, sera emmenée par la Chine, l’un des rares pays à s’être dotés d’une stratégie d’approvisionnement adéquate. Et Pékin ne va pas accroître exagérément sa production de métaux rares pour étancher la soif du reste du monde. Non seulement parce que sa politique commerciale lui permet d’asphyxier les États occidentaux, mais parce qu’il craint à son tour que ses ressources ne s’amenuisent trop rapidement. Le marché noir des terres rares, qui représente un tiers de la demande officielle, accélère l’appauvrissement des mines, et, à ce rythme, certaines réserves pourraient être épuisées dès 2027. »

    De la question « du #taux_de_retour_énergétique (#TRE), c’est-à-dire le ratio entre l’énergie nécessaire à la production des métaux et celle que leur utilisation va générer. […] C’est une fuite en avant dont nous pressentons l’absurdité. Notre modèle de production sera-t-il encore sensé le jour où un baril permettra tt juste de remplir un autre baril ? […] Les limites de notre système productiviste se dessinent aujourd’hui plus nettement : elles seront atteintes le jour où il nous faudra dépenser davantage d’énergie que nous ne pourrons en produire. »

    « Plusieurs vagues de #nationalisme minier ont déjà placé les États importateurs à la merci de pays fournisseurs prtant bien moins puissants qu’eux. En fait de mines, le client ne sera donc plus (toujours) roi. La géopolitique des métaux rares pourrait faire émerger de nouveaux acteurs prépondérants, souvent issus du monde en développement : le #Chili, le #Pérou et la #Bolivie, grâce à leurs fabuleuses réserves de lithium et de cuivre ; l’#Inde, riche de son titane, de son #acier et de son #fer ; la #Guinée et l’#Afrique_australe, dont les sous-sols regorgent de bauxite, de chrome, de manganèse et de platine ; le Brésil, où le bauxite et le fer abondent ; la Nouvelle-Calédonie, grâce à ses prodigieux gisements de #nickel. » (226-227)

    « En engageant l’humanité ds la quête de métaux rares, la transition énergétique & numérique va assurément aggraver dissensions & discordes. Loin de mettre un terme à la géopol. de l’énergie, elle va au contraire l’exacerber. Et la Chine entend façonner ce nouveau monde à sa main. »

    « Les #ONG écologistes font la preuve d’une certaine incohérence, puisqu’elles dénoncent les effets du nouveau monde plus durable qu’elles ont elles-mêmes appelé de leurs vœux. Elles n’admettent pas que la transition énergétique et numérique est aussi une transition des champs de pétrole vers les gisements de métaux rares, et que la lutte contre le réchauffement climatique appelle une réponse minière qu’il faut bien assumer. » (234-235)

    « La bataille des terres rares (et de la transition énergétique et numérique) est bel et bien en train de gagner le fond des mers. Une nouvelle ruée minière se profile. […] La #France est particulièrement bien positionnée dans cette nouvelle course. Paris a en effet mené avec succès, ces dernières années, une politique d’extension de son territoire maritime. […] L’ensemble du #domaine_maritime français [est] le deuxième plus grand au monde après celui des #États-Unis. […] Résumons : alors que, pendant des milliers d’années, 71 % de la surface du globe n’ont appartenu à personne, au cours des six dernières décennies 40 % de la surface des océans ont été rattachés à un pays, et 10 % supplémentaires font l’objet d’une demande d’extension du plateau continental. À terme, les États pourvus d’une côte exerceront leur juridiction sur 57 % des fonds marins. Attirés, en particulier par le pactole des métaux rares, nous avons mené, en un tps record, la + vaste entreprise d’#appropriation_de_territoires de l’histoire. »

    « Le projet, entonné en chœur par tous les avocats de la #transition_énergétique et numérique, de réduire l’impact de l’homme sur les écosystèmes a en réalité conduit à accroître notre mainmise sur la #biodiversité. » (248)

    « N’est-il pas absurde de conduire une mutation écologique qui pourrait tous nous empoisonner aux métaux lourds avant même que nous l’ayons menée à bien ? Peut-on sérieusement prôner l’harmonie confucéenne par le bien-être matériel si c’est pour engendrer de nouveaux maux sanitaires et un #chaos_écologique – soit son exact contraire ? » (252)

    Métaux rares, transition énergétique et capitalisme vert https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2023/01/23/metaux-rares-transition-energetique-et-capitalisme-vert_4727 (Lutte de classe, 10 janvier 2023)

    #écologie #capitalisme #impérialisme

  • Métaux rares, transition énergétique et capitalisme vert
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org/https:/mensuel.lutte-ouvriere.org/2023/01/23/metaux-rares-transition-energetique-et-capitalisme-vert_4727

    Mais ces formules restent bien creuses. Pour reprendre le titre d’un rapport de plusieurs centaines d’experts publié en juin 2022, «  la #transition_énergétique n’a pas lieu  ». En effet, à ce jour, 80 % des #énergies utilisées dans le monde sont toujours produites à partir de pétrole, de gaz et de charbon. Pire, depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, les États ont relancé les productions d’énergie les plus polluantes  : centrales au charbon, #gaz_de_schiste importé des #États-Unis, car sa production est toujours interdite dans l’#Union_européenne du fait de ses conséquences néfastes sur l’#environnement. Les dirigeants de ce monde n’ont jamais autant parlé d’écologie, mais pas grand-chose ne change en réalité. Dans le système capitaliste, les maîtres de l’économie ne sont prêts à envisager des évolutions que (...)

    – Les #métaux, #pétrole du 21e siècle  ?
    – La lutte des capitalistes et de leurs États pour les #matières_premières
    – La #Chine, premier producteur de métaux rares… pour le plus grand profit des capitalistes occidentaux
    – L’État chinois face à l’#impérialisme
    – La politique des trusts  : satisfaire les actionnaires plutôt que creuser des #mines
    – Il n’y a pas de #capitalisme_vert  ! Le seul avenir, c’est le #communisme  !

  • Total, fruit d’un accord entre la bourgeoisie française et son État, nourri au pillage des colonies
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org//2023/01/23/total-fruit-dun-accord-entre-la-bourgeoisie-francaise-et-son

    La grève dans les #raffineries Fin septembre 2022, les travailleurs de plusieurs raffineries en France, surtout celles de Total, se sont mis en grève pour les salaires. L’initiative en revenait à la #Fédération_de_la_Chimie CGT, qui espérait, à quelques mois du congrès confédéral, renforcer ainsi son image d’aile radicale de la CGT. La confédération a suivi, espérant que cette grève, qui aurait un écho en bloquant la distribution des carburants, lui permettrait d’apparaître comme la confédération la plus combative, peu avant des élections professionnelles importantes dans la fonction publique. Et cela, sans courir le risque d’être débordée, car c’est un secteur que la #CGT contrôle bien. Le mouvement n’a touché qu’une minorité des travailleurs des raffineries, mais il a eu des conséquences importantes, en (...)

    – La #grève dans les raffineries
    – Fusion de #Total et #Elf
    – Elf, ministère français du #pétrole en #Afrique
    – Luttes entre impérialismes rivaux
    – La #guerre_du_Biafra
    – La #guerre civile du #Congo-Brazzaville
    – L’heure des grands regroupements
    – Total reste le ministère du pétrole
    #impérialisme #France

  • Pendant ce temps-là…

    Les « #superprofits » des #pétroliers sont historiques, au point d’avoir, sans guère de doute, dépassé les 200 milliards de dollars en 2022 rien que pour les pétroliers occidentaux. La publication prochaine des résultats annuels d’#ExxonMobil, #Chevron, #TotalEnergies, #BP, #Shell et consorts devrait confirmer le caractère exceptionnel de l’année 2022, qui a vu les prix de l’#énergie s’envoler… et les pétroliers en profiter largement.
    A elles deux, les majors américaines ExxonMobil et Chevron vont frôler les 100 milliards de dollars de #bénéfices sur l’année. Un total que dépasseront aussi allègrement, ensemble, les quatre principales sociétés européennes du secteur, BP, Shell, TotalEnergies et Equinor. Les #profits du Saoudien Aramco et des autres acteurs contrôlés par des Etats seront aussi au sommet.
    Les dividendes en avant
    Ce « trésor de guerre » bénéficie en premier lieu aux #actionnaires. Les montants redistribués ont atteint des records en 2022 et les Européens ont tendance à combler l’écart qui existait dans ce domaine, historiquement, avec les Américains. Là où les actionnaires d’ExxonMobil et Chevron récupéreront près de 60 % des bénéfices de l’an dernier, le taux de redistribution atteindra 48 % en moyenne en Europe, selon AlphaValue. Mais il devrait grimper à 73 % chez Shell, par exemple.
    Les pétroliers européens ont ou vont reverser un total de 122 milliards de dollars à leurs actionnaires pour l’année 2022, via 78 milliards de dollars de dividendes et 44 milliards de rachats d’actions.

  • Titane, pétrole, fer, gaz, manganèse… Le contrôle des ressources fossiles et des minerais enfouis dans le territoire ukrainien est au cœur du conflit.
    Origine de ces informations : Reporterre https://reporterre.net/Un-enjeu-cache-de-la-guerre-en-Ukraine-les-matieres-premieres

    Les médias qui font semblant de nous informer sur ce qui se passe en Ukraine en sont à parler d’affrontements religieux entre la catholicisme et la religion orthodoxe. Une guerre de religion en somme.

    Et pourtant,
    L’accaparement des matières premières enfouies sous le sol ukrainien est à la racine d’un conflit où les voix des puissances nationales et industrielles priment sur celles des Ukrainiens.

    Depuis 2014, le rapprochement des gouvernements ukrainiens avec les puissances occidentales a permis aux États-Unis et à l’Union européenne de planifier l’extraction des matières premières de ce pays richement doté.

    En 2010, d’importants gisements de #gaz_de_schiste ont été découverts en Ukraine. En 2013, les permis ont été attribués aux sociétés étasuniennes #Shell et #Chevron. Sur fond de corruption.

    Le gigantesque projet d’extraction de Yuzivska a déclenché l’opposition des habitants de la région, qui se sont mobilisés contre les pollutions des eaux qui résulteraient de la fracturation hydraulique.

    Au même moment, l’exploitation d’hydrocarbures à l’est de la Crimée visant à produire 3 millions de tonnes de #pétrole par an démarre.
    L’annexion de la Crimée », par la Russie a mis cette exploitation pétroliére en stand by.

    Les conquêtes de 2014 ont permis à la Russie « de contrôler la moitié du pétrole conventionnel de l’Ukraine, 72 % de son #gaz naturel, et l’essentiel de sa production et de ses réserves de charbon ». Ces dernières sont situées dans le Donbass.

    Le sous-sol du pays recèle des gisements considérables estimés par les services de géologie ukrainiens à une valeur de 7 500 milliards de dollars.

    L’Ukraine est classée au cinquième rang mondial pour ses réserves en #fer, en #graphite et en #manganèse — deux éléments critiques pour la production de batteries électriques.

    Elle est aussi sixième productrice mondiale de #titane, métal stratégique pour la production aéronautique, et recèle d’importants gisements de #lithium, de #cuivre, de #cobalt et de #terres_rares.

    Il y a aussi du #zirconium, utilisé aux trois quarts pour le nucléaire ; de #scandium, sous-produit de la métallurgie du titane utilisé dans les piles à combustible et les alliages ultralégers de l’aéronautique ; ou encore de #molybdène, employé dans les superalliages, les écrans et les puces électroniques.

    Pour la fabrication de semi-conducteurs, l’industrie étasunienne est par ailleurs dépendante à 90 % du #néon de qualité ultrapure produit à Odessa à partir du gaz issu des acieries.

    L’Ukraine s’était engagée à privatiser ses mines et son industrie métallurgique, à collaborer avec les services géologiques européen.

    À partir de 2016, le gouvernement ukrainien a commencé à vendre ses permis miniers par le biais d’enchères électroniques.

    Tous ces gisements de minerais sont aussi stratégiques pour les pays de l’Otan qu’ils le sont pour la Russie.

    L’agression russe de l’Ukraine a donc aussi pour toile de fond cet affrontement pour l’approvisionnement en matières critiques, dont la première victime est la population ukrainienne.

    En ce moment, tout le monde promet ou prête de l’argent à l’Ukraine.

    Quelle marge de manœuvre restera-t-il aux dirigeants du pays quand il faudra rembourser les dizaines de milliards d’euros de prêts contractés auprès de la BERD, de la Banque mondiale, des États-Unis et des pays européens qui convoitent ses ressources naturelles ?

    Une fois la guerre terminée, les Ukrainiens n’auront-ils pas la mauvaise surprise de découvrir que pendant qu’ils tentaient de survivre aux assauts et aux bombardements russes, leurs régions ont été vendues aux entreprises minières et gazières ?

    #ukraine #économie #guerre #otan #usa #énergie #ue #géopolitique #matières_premières #Russie #Donbass

  • China to use Shanghai exchange for yuan energy deals with Gulf nations - Xi | Reuters
    https://www.reuters.com/business/energy/chinas-xi-tells-gulf-nations-use-shanghai-exchange-yuan-energy-deals-2022-1

    BEIJING, Dec 9 (Reuters) - China’s President Xi Jinping said in Riyadh on Friday that China and Gulf nations should make full use of the Shanghai Petroleum and National Gas Exchange as a platform to carry out yuan settlement of oil and gas trade.

    #petrodollar #petroyuan