L’Australie gagne son arbitrage ISDS contre le cigarettier Philip Morris
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Cela faisait partie des affaires les plus souvent citées pour illustrer les risques des tribunaux d’arbitrage d’investissement ISDS (Investor-state dispute settlement, des instances où des multinationales peuvent demander des comptes aux Etats dans lequels elles investissent, voir encadré en fin d’article), accusés d’empêcher les Etats de légiférer pour le bien public. Elle s’est finalement dégonflée à la fin de l’année 2015 à la faveur d’une sentence déboutant Philip Morris de son recours contre la décision de l’Australie d’imposer le paquet de cigarettes neutre.
Si cette décision arbitrale retire un épouvantail exemplaire à ceux qui se battent contre l’intégration d’un ISDS au futur traité transatlantique Europe/Etats-Unis, elle n’est pas de nature à les rassurer complètement. En effet, le tribunal ISDS, sis dans l’annexe de la cour permanente d’arbitrage (CPA) à Singapour, n’a pas statué sur le fond.
En effet, dans sa sentence du 17 décembre 2015, le tribunal ISDS s’est contenté de se déclarer incompétent pour prendre en charge le litige. Si la décision intégrale n’a pas encore été publiée, il semblerait que le tribunal ait jugé la requête de Philip Morris illégitime pour des questions de procédure. La firme d’origine américaine se serait en effet restructurée en rattachant sa filiale australienne à une entité à hong-kongaise dans le seul but de pouvoir attaquer l’Australie en vertu d’un traité d’investissement Hong-Kong-Australie datant de 1993.
Une ruse appelée “treaty shopping”, ou “tourisme des traités”, que n’auraient guère appréciée les arbitres – signe, selon un connaisseur du monde de l’arbitrage, que “contrairement à ce qu’on entend souvent, les arbitres ne sont pas systématiquement pro-investisseurs et ne cherchent pas à engranger un maximum de dossiers pour augmenter leurs honoraires”.