• C’était 2007, et #François_Gemenne, alors doctorant, a écrit ce texte...

    Carte blanche François Gemenne Doctorant au Centre d’études de l’ethnicité et des migrations (Cedem) de l’Université de Liège Client nº 338 983 492 de #Brussels_Airlines : La courageuse #révolte des personnels navigants face aux #déportations par #avion

    En novembre dernier, j’ai pris un vol de Brussels Airlines (qui, à l’époque, s’appelait encore SN Brussels Airlines) à destination de Nairobi. À l’arrière de l’avion se trouvait une dame d’une cinquantaine d’années, que deux policiers ramenaient de force dans son pays. Peu avant le décollage, la dame a commencé à crier et à pleurer, suscitant une gêne évidente chez les autres passagers. J’ai beau savoir que ces déportations de demandeurs d’asile déboutés sont régulièrement organisées sur les vols réguliers des compagnies commerciales, c’était la première fois que j’en étais le témoin direct.

    Cette déportation n’a donné lieu à aucun incident particulier : il y a eu des cris, des larmes, des supplications et des menottes, mais, pour autant que je m’en sois rendu compte, pas de coups. Il n’en va pas toujours ainsi, et l’exemple de Semira Adamu sera toujours là pour nous le rappeler.

    J’ai passé le plus clair du vol à m’en vouloir de ne pas avoir protesté davantage, de ne pas être descendu de l’appareil, et de m’être finalement rendu complice de cette expulsion. Je me souviens en avoir beaucoup voulu au personnel de cabine pour sa professionnelle indifférence, qui m’apparaissait comme une caution tacite des méthodes employées. À mon retour, j’avais écrit à la direction de la compagnie, pour me désoler que celle-ci se rende complice de cette politique de déportations. On avait poliment accusé réception de ma protestation, sans plus. Et depuis, je m’étais étonné que les compagnies aériennes, les pilotes, les hôtesses et les stewards, acceptent que l’État utilise ainsi leurs avions pour ramener de force chez eux ceux qui n’avaient commis d’autre crime que celui de vouloir habiter chez nous.

    Voici pourtant que les pilotes et les personnels navigants d’Air France font maintenant savoir à leur direction qu’ils en ont marre, et que leur métier est de faire voyager les gens, pas de les déporter contre leur gré. Leur révolte est courageuse, et leur dégoût salutaire.

    On apprend aussi que les pilotes d’Air Canada ont émis la même revendication il y a quelque temps, et que la compagnie canadienne a depuis cessé de transporter les demandeurs d’asile déboutés. On apprend même que c’est tout le groupe Star Alliance, la première alliance aérienne mondiale, qui comprend notamment la Lufthansa et Air Canada, qui envisage d’arrêter les déportations.

    Dans ce concert, les pilotes de Brussels Airlines restent étrangement muets. Sans vouloir souffler des idées à leurs syndicats, il me semble qu’ils sont actuellement en position de force par rapport à leur direction, et que ce serait le moment où jamais de mettre cette revendication sur la table. Si la direction de Brussels Airlines tient vraiment à garder ses pilotes, elle aurait ainsi l’occasion de prouver sa bonne volonté.

    La démarche des pilotes d’Air France est louable, mais elle n’est pourtant pas totalement étrangère à des motivations commerciales. Car c’est également l’image de marque de la compagnie qui est en jeu. Quand j’ai émis une timide protestation auprès d’une hôtesse du vol de Nairobi, en novembre dernier, c’est bien ce souci qu’elle avait à l’esprit quand elle m’a placidement répondu de ne pas m’en faire, et que les cris cesseraient rapidement après le décollage. Tant d’argent investi dans le confort des sièges, la réduction des files d’attente aux comptoirs d’enregistrement, le design des uniformes et des fuselages, tout cela réduit à néant par des cris, des pleurs et des échauffourées à l’arrière de l’appareil ? Quand des déportés menottés meurent à l’arrière des Airbus tricolores, le ciel cesse rapidement d’être le plus bel endroit de la terre.

    Les déportations à bord d’appareils commerciaux ont pourtant un mérite : elles assurent la publicité de cette politique. Que se passerait-il si, demain, Brussels Airlines ou Air France refusaient de se rendre encore complices de cette politique ? On peut difficilement imaginer que l’État organise les déportations sur RyanAir. Plus vraisemblablement, on affréterait alors des trains spéciaux et des vols charter. Ça coûterait plus cher, beaucoup plus cher. Pour autant, on doute fort que nos gouvernements réalisent qu’il serait infiniment plus économique, et même rentable, de laisser simplement ces gens s’installer chez nous.

    Par contre, nous ne saurions plus rien des expulsions qui ont lieu jour après jour. Aurions-nous vraiment été mis au courant de la mort de Semira Adamu, si elle avait été tuée dans un avion militaire ? Des passagers pourraient-ils encore s’indigner, se révolter quand des déportés sont violentés par les policiers ?

    Notre Constitution et nos lois prévoient et organisent la publicité des débats parlementaires et judiciaires. L’État, par souci d’économie, a organisé de facto la publicité des déportations. Chaque vol commercial qui s’envole avec un passager menotté à bord nous rappelle que, collectivement, nous avons un problème. Et que tous les passagers, dans leur indifférence, à commencer par la mienne, en portent une part de responsabilité.

    Récemment, comme tous les clients de Brussels Airlines, j’ai reçu un courrier me demandant s’il était important pour moi de recevoir un journal à bord, ou qu’un repas me soit servi en vol. On ne m’a pas demandé, par contre, s’il était important pour moi que tous les passagers aient librement consenti à leur présence dans l’avion. C’est pourtant une question à laquelle j’aurais volontiers répondu.

    https://www.lesoir.be/art/la-courageuse-revolte-des-personnels-navigants-face-aux_t-20070713-00CCQG.htm
    #résistance #pilotes #asile #migrations #expulsions #renvois

    Ajouté à cette métaliste sur la #résistance de #passagers (mais aussi de #pilotes) aux #renvois_forcés :
    https://seenthis.net/messages/725457

  • Le #Bangladesh veut-il noyer ses #réfugiés_rohingyas ?

    Confronté à la présence sur son territoire d’un million de réfugiés musulmans chassés de Birmanie par les crimes massifs de l’armée et des milices bouddhistes, Dacca envisage d’en transférer 100 000 sur une île prison, dans le golfe du Bengale, menacée d’inondation par la mousson. Ce projet vient relancer les interrogations sur le rôle controversé de l’Organisation des Nations unies en #Birmanie.
    Dans les semaines qui viennent, le gouvernement du Bangladesh pourrait transférer plusieurs milliers de réfugiés rohingyas, chassés de Birmanie entre 2012 et 2017, dans une #île du #golfe_du_Bengale menacée de submersion et tenue pour « inhabitable » par les ONG locales. Préparé depuis des mois par le ministère de la gestion des catastrophes et des secours et par la Commission d’aide et de rapatriement des réfugiés, ce #transfert, qui devrait dans un premier temps concerner 350 familles – soit près de 1 500 personnes – puis s’étendre à 7 000 personnes, devrait par la suite être imposé à près de 100 000 réfugiés.

    Selon les agences des Nations unies – Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) et Organisation internationale pour les migrations (OIM) –, plus de 950 000 s’entassent aujourd’hui au Bangladesh dans plusieurs camps de la région de #Cox’s_Bazar, près de la frontière birmane. Près de 710 000 membres de cette minorité musulmane de Birmanie, ostracisée par le gouvernement de #Naypidaw, sont arrivés depuis août 2017, victimes du #nettoyage_ethnique déclenché par l’armée avec l’appui des milices villageoises bouddhistes.

    Les #baraquements sur #pilotis déjà construits par le gouvernement bangladais sur l’#île de #Bhasan_Char, à une heure de bateau de la terre ferme la plus proche, dans le #delta_du_Meghna, sont destinés à héberger plus de 92 000 personnes. En principe, les réfugiés désignés pour ce premier transfert doivent être volontaires.

    C’est en tout cas ce que les autorités du Bangladesh ont indiqué aux agences des Nations unies en charge des réfugiés rohingyas. Mais l’ONG régionale Fortify Rights, qui a interrogé, dans trois camps de réfugiés différents, quatorze personnes dont les noms figurent sur la liste des premiers transférables, a constaté qu’en réalité, aucune d’entre elles n’avait été consultée.

    « Dans notre camp, a déclaré aux enquêteurs de Fortify Rights l’un des délégués non élus des réfugiés chargé des relations avec l’administration locale, aucune famille n’accepte d’être transférée dans cette île. Les gens ont peur d’aller vivre là-bas. Ils disent que c’est une île flottante. » « Île qui flotte », c’est d’ailleurs ce que signifie Bhasan Char dans la langue locale.

    Les réfractaires n’ont pas tort. Apparue seulement depuis une vingtaine d’années, cette île, constituée d’alluvions du #Meghna, qui réunit les eaux du Gange et du Brahmapoutre, émerge à peine des eaux. Partiellement couverte de forêt, elle est restée inhabitée depuis son apparition en raison de sa vulnérabilité à la mousson et aux cyclones, fréquents dans cette région de la mi-avril à début novembre. Cyclones d’autant plus redoutés et destructeurs que l’altitude moyenne du Bangladesh ne dépasse pas 12 mètres. Selon les travaux des hydrologues locaux, la moitié du pays serait d’ailleurs submergée si le niveau des eaux montait seulement d’un mètre.

    « Ce projet est inhumain, a confié aux journalistes du Bangla Tribune, un officier de la marine du Bangladesh stationné dans l’île, dont l’accès est interdit par l’armée. Même la marée haute submerge aujourd’hui une partie de l’île. En novembre1970, le cyclone Bhola n’a fait aucun survivant sur l’île voisine de Nijhum Dwip. Et Bhasan Char est encore plus bas sur l’eau que Nijhum Dwip. » « Un grand nombre de questions demeurent sans réponses, observait, après une visite sur place en janvier dernier, la psychologue coréenne Yanghee Lee, rapporteure spéciale de l’ONU pour la situation des droits de l’homme en Birmanie. Mais la question principale demeure de savoir si cette île est véritablement habitable. »

    « Chaque année, pendant la mousson, ont confié aux enquêteurs de Human Rights Watch les habitants de l’île voisine de Hatiya, une partie de Bhasan Char est érodée par l’eau. Nous n’osons même pas y mettre les pieds. Comment des milliers de Rohingyas pourraient-ils y vivre ? » Par ailleurs, la navigation dans les parages de l’île est jugée si dangereuse, par temps incertain, que les pêcheurs du delta hésitent à s’y aventurer. Les reporters d’un journal local ont dû attendre six jours avant que la météo devienne favorable et qu’un volontaire accepte de les embarquer.

    À toutes ces objections des ONG, d’une partie de la presse locale et de plusieurs agences des Nations unies, le gouvernement bangladais répond que rien n’a été négligé. Une digue, haute de près de trois mètres et longue de 13 km, a été érigée autour de l’enclave de 6,7 km² affectée à l’hébergement des Rohingyas. Chacune des 120 unités de logement du complexe comprend douze bâtiments sur pilotis, une mare et un abri en béton destiné à héberger 23 familles en cas de cyclone et à recevoir les réserves de produits alimentaires. Conçus, selon les architectes, pour résister à des vents de 260 km/h, les abris pourront aussi être utilisés comme salles de classe, centres communautaires et dispensaires.

    Construit en parpaings, chaque bâtiment d’habitation contient, sous un toit de tôle métallique, seize chambres de 3,5 m sur 4 m, huit W.-C., deux douches et deux cuisines collectives. Destinées à héberger des familles de quatre personnes, les chambres s’ouvrent sur une coursive par une porte et une fenêtre à barreaux. Un réseau de collecte de l’eau de pluie, des panneaux solaires et des générateurs de biogaz sont également prévus. Des postes de police assureront la sécurité et 120 caméras de surveillance seront installées par la marine.

    Compte tenu des conditions de navigation très difficiles dans l’estuaire de la Meghna et du statut militarisé de l’île, la liberté de mouvement des réfugiés comme leur aptitude à assurer leur subsistance seront réduites à néant. « Bhasan Char sera l’équivalent d’une prison », estimait en mars dernier Brad Adams, directeur pour l’Asie de Human Rights Watch.
    Aung San Suu Kyi n’a pas soulevé un sourcil

    Aucun hôpital n’est prévu sur l’île. En cas d’urgence, les malades ou les blessés devront être transférés vers l’hôpital de l’île de Hatiya, à une heure de bateau lorsque le temps le permet. Faute de production locale, la quasi-totalité de l’alimentation devra être acheminée depuis le continent. La densité de population de ce complexe dont les blocs, disposés sur un plan orthogonal, sont séparés par d’étroites allées rectilignes, dépassera, lorsqu’il sera totalement occupé, 65 000 habitants au kilomètre carré, soit six fois celle du cœur de New York.

    On le voit, ce « paradis pour les Rohingyas », selon le principal architecte du projet, Ahmed Mukta, qui partage son activité entre Dacca et Londres, tient davantage du cauchemar concentrationnaire submersible que du tremplin vers une nouvelle vie pour les réfugiés birmans du Bangladesh. Ce n’est pourtant pas faute de temps et de réflexion sur la nature et la gestion du complexe. L’idée de transférer les réfugiés birmans sur Bhasan Char circulait depuis 2015 parmi les responsables birmans. À ce moment, leur nombre ne dépassait pas 250 000.

    Alimentés depuis 1990 par un chapelet de flambées de haine anti-musulmanes que le pouvoir birman tolérait quand il ne les allumait pas lui-même, plusieurs camps s’étaient créés dans la région de Cox’s Bazar pour accueillir les réfugiés chassés par la terreur ou contraints à l’exil par leur statut spécial. Musulmans dans un pays en écrasante majorité bouddhiste, les Rohingyas se sentent depuis toujours, selon l’ONU, « privés de leurs droits politiques, marginalisés économiquement et discriminés au motif de leur origine ethnique ».

    Le projet s’était apparemment endormi au fond d’un tiroir lorsqu’en août 2017, après la véritable campagne de nettoyage ethnique déclenchée par Tatmadaw (l’armée birmane) et ses milices, près de 740 000 Rohingyas ont fui précipitamment l’État de Rakhine, (autrefois appelé Arakan) où ils vivaient pour se réfugier de l’autre côté de la frontière, au Bangladesh, auprès de leurs frères, exilés parfois depuis plus de vingt-cinq ans. En quelques jours, le nombre de Rohingyas dans le district de Cox’s Bazar a atteint un million de personnes et le camp de réfugiés de Kutupalong est devenu le plus peuplé de la planète.

    Nourrie par divers trafics, par le prosélytisme des émissaires islamistes, par la présence de gangs criminels et par l’activisme des agents de l’Arakan Rohingya Salvation Army (ARSA) à la recherche de recrues pour combattre l’armée birmane, une insécurité, rapidement jugée incontrôlable par les autorités locales, s’est installée dans la région. Insécurité qui a contribué à aggraver les tensions entre les réfugiés et la population locale qui reproche aux Rohingyas de voler les petits boulots – employés de restaurant, livreurs, conducteurs de pousse-pousse – en soudoyant les policiers et en acceptant des salaires inférieurs, alors qu’ils ne sont officiellement pas autorisés à travailler.

    Cette situation est d’autant plus inacceptable pour le gouvernement de Dacca que Cox’s Bazar et sa plage de 120 km constituent l’une des rares attractions touristiques du pays.

    Pour mettre un terme à ce chaos, le gouvernement de Dacca a d’abord compté sur une campagne de retours volontaires et ordonnés des Rohingyas en Birmanie. Il y a un an, 2 200 d’entre eux avaient ainsi été placés sur une liste de rapatriement. Tentative vaine : faute d’obtenir des garanties de sécurité et de liberté du gouvernement birman, aucun réfugié n’a accepté de rentrer. Le même refus a été opposé aux autorités en août dernier lorsqu’une deuxième liste de 3 500 réfugiés a été proposée. Selon les chiffres fournis par le gouvernement birman lui-même, 31 réfugiés seulement sont rentrés du Bangladesh entre mai 2018 et mai 2019.

    Les conditions, le plus souvent atroces, dans lesquelles les Rohingyas ont été contraints de fuir en août 2017 et ce qu’ils soupçonnent de ce qui les attendrait au retour expliquent largement ces refus. Selon le rapport de la Mission d’établissement des faits de l’ONU remis au Conseil des droits de l’homme le 8 août 2019 [on peut le lire ici], les Rohingyas ont été victimes, un an plus tôt, de multiples « crimes de droit international, y compris des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre ».

    Selon ce document, « la responsabilité de l’État [birman – ndlr] est engagée au regard de l’interdiction des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité, ainsi que d’autres violations du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire ».

    Le rapport précise que « la mission a établi une liste confidentielle de personnes soupçonnées d’avoir participé à des crimes de droit international, y compris des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre, dans les États de Rakhine, kachin et shan depuis 2011. Cette liste […] contient plus d’une centaine de noms, parmi lesquels ceux de membres et de commandants de la Tatmadaw, de la police, de la police des frontières et des autres forces de sécurité, y compris de fonctionnaires de l’administration pénitentiaire, ainsi que les noms de représentants des autorités civiles, au niveau des districts, des États et du pays, de personnes privées et de membres de groupes armés non étatiques. […] La liste mentionne aussi un grand nombre d’entités avec lesquelles les auteurs présumés de violations étaient liés, notamment certaines unités des forces de sécurité, des groupes armés non étatiques et des entreprises ».

    On comprend dans ces conditions que, rien n’ayant changé depuis cet été sanglant en Birmanie où Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix 1991, n’a pas levé un sourcil devant ces crimes, les Rohingyas préfèrent l’incertain chaos de leur statut de réfugiés à la certitude d’un retour à la terreur. Et refusent le rapatriement. Ce qui a conduit, début 2018, la première ministre bangladaise Sheikh Hasina à sortir de son tiroir le projet de transfert, en sommeil depuis 2015, pour le mettre en œuvre « en priorité ».

    Près de 300 millions de dollars ont été investis par Dacca dans ce projet, destiné dans un premier temps à réduire la population des camps où la situation est la plus tendue. Selon le représentant du gouvernement à Cox’s Bazar, Kamal Hossain, les opérations de transfert pourraient commencer « fin novembre ou début décembre ».

    Au cours d’une récente réunion à Dacca entre des représentants du ministère des affaires étrangères du Bangladesh et des responsables des Nations unies, les officiels bangladais auraient « conseillé » à leurs interlocuteurs d’inclure Bhasan Char dans le plan de financement de l’ONU pour 2020, sans quoi le gouvernement de Dacca pourrait ne pas approuver ce plan. Les responsables des Nations unies à Dacca ont refusé de confirmer ou démentir, mais plusieurs d’entre eux, s’exprimant officieusement, ont indiqué qu’ils étaient soumis « à une forte pression pour endosser le projet de Bhasan Char ».

    Interrogé sur la possibilité d’organiser le transfert des réfugiés sans l’aval des Nations unies, le ministre bangladais des affaires étrangères Abul Kalam Abdul Momen a répondu : « Oui, c’est possible, nous pouvons le faire. » La première ministre, de son côté, a été plus prudente. En octobre, elle se contentait de répéter que son administration ne prendrait sa décision qu’après avoir consulté les Nations unies et les autres partenaires internationaux du Bangladesh.

    L’un de ces partenaires, dont l’aide en matière d’assistance humanitaire est précieuse pour Dacca, vient de donner son avis. Lors d’une intervention fin octobre à la Chambre des représentants, Alice G. Wells, secrétaire adjointe du bureau de l’Asie du Sud et du Centre au Département d’État, a demandé au gouvernement du Bangladesh d’ajourner tout transfert de réfugiés vers Bhasan Char jusqu’à ce qu’un groupe d’experts indépendants détermine si c’est un lieu approprié. Washington ayant versé depuis août 2017 669 millions de dollars d’aide à Dacca, on peut imaginer que cette suggestion sera entendue.
    Les « défaillances systémiques » de l’ONU

    Les Nations unies sont pour l’instant discrètes sur ce dossier. On sait seulement qu’une délégation doit se rendre sur l’île les jours prochains. Il est vrai que face à ce qui s’est passé ces dernières années en Birmanie, et surtout face à la question des Rohingyas, la position de l’ONU n’a pas toujours été claire et son action a longtemps manqué de lucidité et d’efficacité. C’est le moins qu’on puisse dire.

    Certes l’actuel secrétaire général, António Guterres, a réagi rapidement et vigoureusement au sanglant nettoyage ethnique qui venait de commencer en Birmanie en adressant dès le 2 septembre 2017 une lettre au Conseil de sécurité dans laquelle il demandait un « effort concerté » pour empêcher l’escalade de la crise dans l’État de Rakhine, d’où 400 000 Rohingyas avaient déjà fui pour échapper aux atrocités.

    Mais il n’a pu obtenir de réaction rapide et efficace du Conseil. Il a fallu discuter deux semaines pour obtenir une réunion et 38 jours de plus pour obtenir une déclaration officielle de pure forme. Quant à obtenir l’envoi sur place d’une équipe d’observateurs de l’ONU en mesure de constater et dénoncer l’usage de la violence, il en était moins question que jamais : la Birmanie s’y opposait et son allié et protecteur chinois, membre du Conseil et détenteur du droit de veto, soutenait la position du gouvernement birman. Et personne, pour des raisons diverses, ne voulait s’en prendre à Pékin sur ce terrain.

    En l’occurrence, l’indifférence des États membres, peu mobilisés par le massacre de Rohingyas, venait s’ajouter aux divisions et différences de vues qui caractérisaient la bureaucratie de l’ONU dans cette affaire. Divergences qui expliquaient largement l’indifférence et la passivité de l’organisation depuis la campagne anti-Rohingyas de 2012 jusqu’au nettoyage ethnique sanglant de 2017.

    Incarnation de cette indifférence et de cette passivité, c’est-à-dire de la priorité que le système des Nations unies en Birmanie accordait aux considérations politiques et économiques sur la sécurité et les besoins humanitaires des Rohingyas, Renata Lok-Dessallien, la représentante de l’ONU en Birmanie depuis 2014, a quitté ses fonctions en octobre 2017, discrètement appelée par New York à d’autres fonctions, en dépit des réticences du gouvernement birman. Mais il était clair, à l’intérieur de l’organisation, qu’elle n’était pas la seule responsable de cette dérive désastreuse.

    Dans un rapport de 36 pages, commandé début 2018 par le secrétaire général et remis en mai dernier, l’économiste et diplomate guatémaltèque Gert Rosenthal, chargé de réaliser un diagnostic de l’action de l’ONU en Birmanie entre 2010 et 2018, constate qu’en effet, l’organisation n’a pas été à son meilleur pendant les années qui ont précédé le nettoyage ethnique d’août 2017 au cours duquel 7 000 Rohingyas au moins ont été tués, plus de 700 000 contraints à l’exil, des centaines de milliers d’autres chassés de leurs villages incendiés et enfermés dans des camps, le tout dans un climat de violence et de haine extrême [le rapport – en anglais – peut être lu ici].

    Selon Gert Rosenthal, qui constate des « défaillances systémiques » au sein de l’ONU, nombre d’agents des Nations unies ont été influencés ou déroutés par l’attitude de Aung San Suu Kyi, icône du combat pour la démocratie devenue, après les élections de 2015, l’alliée, l’otage et la caution des militaires et du clergé bouddhiste. C’est-à-dire la complice, par son silence, des crimes commis en 2017. Mais l’auteur du rapport pointe surtout la difficulté, pour les agences de l’ONU sur place, à choisir entre deux stratégies.

    L’une est la « diplomatie tranquille » qui vise à préserver dans la durée la présence et l’action, même limitée, de l’organisation au prix d’une certaine discrétion sur les obligations humanitaires et les droits de l’homme. L’autre est le « plaidoyer sans concession » qui entend faire respecter les obligations internationales par le pays hôte et implique éventuellement l’usage de mesures « intrusives », telles que des sanctions ou la menace de fermer l’accès du pays aux marchés internationaux, aux investissements et au tourisme.

    À première vue, entre ces deux options, le secrétaire général de l’ONU a fait son choix. Après une visite à Cox’s Bazar, en juillet 2018, il affirmait qu’à ses yeux, « les Rohingyas ont toujours été l’un des peuples, sinon le peuple le plus discriminé du monde, sans la moindre reconnaissance de ses droits les plus élémentaires, à commencer par le droit à la citoyenneté dans son propre pays, le Myanmar [la Birmanie] ».

    Il reste à vérifier aujourd’hui si, face à la menace brandie par Dacca de transférer jusqu’à 100 000 réfugiés rohingyas sur une île concentrationnaire et submersible, les Nations unies, c’est-à-dire le système onusien, mais aussi les États membres, choisiront le « plaidoyer sans concession » ou la « diplomatie tranquille ».

    https://www.mediapart.fr/journal/international/131119/le-bangladesh-veut-il-noyer-ses-refugies-rohingyas?onglet=full

    #réfugiés #asile #migrations #rohingyas #Bangladesh #camps_de_réfugiés

    ping @reka

    • Bangladesh Turning Refugee Camps into Open-Air Prisons

      Bangladesh Army Chief Gen. Aziz Ahmed said this week that a plan to surround the Rohingya refugee camps in #Cox’s_Bazar with barbed wire fences and guard towers was “in full swing.” The plan is the latest in a series of policies effectively cutting off more than 900,000 Rohingya refugees from the outside world. The refugees have been living under an internet blackout for more than 75 days.

      Bangladesh is struggling to manage the massive refugee influx and the challenges of handling grievances from the local community, yet there is no end in sight because Myanmar has refused to create conditions for the refugees’ safe and voluntary return. But fencing in refugees in what will essentially be open-air prisons and cutting off communication services are neither necessary nor proportional measures to maintain camp security and are contrary to international human rights law.

      Humanitarian aid workers reported the internet shutdown has seriously hampered their ability to provide assistance, particularly in responding to emergencies. The fencing will place refugees at further risk should they urgently need to evacuate or obtain medical and other humanitarian services.

      Refugees told Human Rights Watch the fencing will hinder their ability to contact relatives spread throughout the camps and brings back memories of restrictions on movement and the abuses they fled in Myanmar.

      The internet shutdown has already hampered refugees’ efforts to communicate with relatives and friends still in Myanmar, which is critical for gaining reliable information about conditions in Rakhine State to determine whether it is safe to return home.

      The Bangladesh government should immediately stop its plans to curtail refugees’ basic rights or risk squandering the international goodwill it earned when it opened its borders to a desperate people fleeing the Myanmar military’s brutal campaign of ethnic cleansing.

      https://www.hrw.org/news/2019/11/26/bangladesh-turning-refugee-camps-open-air-prisons
      #internet #barbelés #liberté_de_mouvement

    • Le Bangladesh invoque le Covid-19 pour interner des réfugiés rohingyas sur une île inondable

      La protection des camps de réfugiés birmans contre la pandémie a servi de prétexte au gouvernement de Dacca pour mettre en quarantaine plus de 300 Rohingyas sur une île prison du golfe du Bengale menacée de submersion par la mousson et où il veut transférer 100 000 exilés.

      La lutte contre le coronavirus peut-elle être invoquée par un État pour justifier l’internement de réfugiés sur une île submersible, à la veille du début de la mousson ? Oui. Le gouvernement du Bangladesh vient de le prouver. Le dimanche 3 mai, puis le jeudi 7 mai, deux groupes de 29 puis 280 réfugiés rohingyas dont les embarcations erraient depuis des semaines en mer d’Andaman ont été transférés de force par les garde-côtes sur l’île de #Bhasan_Char – « l’île qui flotte » en bengali, à trois heures de bateau de la côte la plus proche, dans le golfe du Bengale.

      Selon les autorités bangladaises, les réfugiés internés à Bhasan Char avaient fui la Birmanie pour rejoindre la Malaisie, qui les avait refoulés et le chalutier à bord duquel ils se trouvaient était en difficulté dans les eaux du Bangladesh où les garde-côtes locaux les avaient secourus. Mais Human Rights Watch a une autre version. Après avoir visité plusieurs camps de réfugiés rohingyas de la région, les enquêteurs de HRW ont découvert que sept au moins des réfugiés transférés à Bhasan Char avaient déjà été enregistrés comme réfugiés au Bangladesh.

      Ce qui signifie qu’ils ne cherchaient pas à entrer dans le pays, mais à en sortir. Sans doute pour éviter un rapatriement en Birmanie, dont ils ne voulaient à aucun prix, comme l’écrasante majorité des Rohingyas, poussés à l’exil par les persécutions dont ils étaient victimes dans leur pays d’origine. Deux semaines plus tôt, un autre chalutier à bord duquel se trouvaient près de 400 Rohingyas, fuyant la Birmanie, avait été secouru par les garde-côtes après une longue dérive en mer au cours de laquelle une centaine de passagers avaient trouvé la mort.

      Le camp de réfugiés de Kutupalong à Ukhia, au Bangladesh, le 15 mai 2020. © Suzauddin Rubel/AFP

      Sans s’attarder sur ces détails tragiques, le ministre des affaires étrangères du Bangladesh, Abul Kalam Abdul Momen, a avancé une explication strictement sanitaire à la décision de son gouvernement. « Nous avons décidé d’envoyer les rescapés rohingyas sur Bhasan Char pour des raisons de sécurité, a-t-il affirmé le 2 mai. Nous ne savions pas s’ils étaient positifs ou non au Covid-19. S’ils étaient entrés dans le camp de réfugiés de Kutupalong, la totalité de la population aurait été mise en danger. »

      Kutupalong, où s’entassent aujourd’hui, selon le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), 602 000 Rohingyas, est le plus vaste des 12 principaux camps de réfugiés de la région de Cox Bazar. C’est aussi, actuellement, le camp de réfugiés le plus peuplé de la planète. Depuis les années 1990, cette région frontalière a recueilli la majorité des membres de la minorité ethnique musulmane de Birmanie, historiquement ostracisée et contrainte à l’exil dans le pays voisin par la majorité bouddhiste et le pouvoir birman. Elle en abrite aujourd’hui plus d’un million.

      Aux yeux du gouvernement de Dacca, cette population de réfugiés concentrés sur son sol dans une misère et une promiscuité explosives constitue une véritable bombe à retardement sanitaire. Surtout si on accepte les données officielles – très discutées par les experts en santé publique – selon lesquelles le Bangladesh qui compte 165 millions d’habitants recenserait seulement près de 21 000 cas de Covid-19 et 300 morts, après deux mois de confinement. Jeudi dernier, les deux premiers cas de coronavirus dans les camps de réfugiés de la région de Cox Bazar ont été confirmés. Selon le HCR, l’un est un réfugié, l’autre un citoyen bangladais. Le lendemain, deux autres réfugiés contaminés étaient identifiés. D’après l’un des responsables communautaires des réfugiés près de 5 000 personnes qui auraient été en contact avec les malades testés positifs dans le camp no 5, auraient été mises en quarantaine.

      Mais ces informations n’étaient pas connues du gouvernement de Dacca lorsqu’il a décidé de placer les 309 rescapés en isolement à Bhasan Char. Et, de toutes façons, l’argument sanitaire avancé par les autorités locales n’avait pas été jugé recevable par les responsables locaux du HCR. « Nous disposons à Cox Bazar des installations nécessaires pour assurer la mise en quarantaine éventuelle de ces réfugiés, avait expliqué aux représentants du gouvernement Louise Donovan, au nom de l’agence de l’ONU. Des procédures rigoureuses sont en place. Elles prévoient notamment, pendant la période requise de 14 jours, un examen médical complet dans chacun de nos centres de quarantaine. Nous avons tout l’espace nécessaire et nous pouvons offrir toute l’assistance dont ils ont besoin, dans ces centres où ils bénéficient en plus du soutien de leurs familles et des réseaux communautaires indispensables à leur rétablissement après l’expérience traumatisante qu’ils viennent de vivre. »

      En d’autres termes, pourquoi ajouter au traumatisme de l’exil et d’une traversée maritime dangereuse, à la merci de passeurs cupides, l’isolement sur un îlot perdu, menacé de submersion par gros temps ? À cette question la réponse est cruellement simple : parce que le gouvernement du Bangladesh a trouvé dans cet argument sanitaire un prétexte inespéré pour commencer enfin à mettre en œuvre, sans bruit, un vieux projet contesté du premier ministre Sheikh Hasina qui a déjà investi 276 millions de dollars dans cette opération.

      Projet qui prévoyait le transfert de 100 000 réfugiés – un sur dix – sur Bhasan Char et qui avait été rejeté, jusque-là, par les principaux intéressés – les réfugiés rohingyas – mais aussi par la majorité des ONG actives dans les camps. Avant de faire l’objet de réserves très explicites de plusieurs agences des Nations unies. Au point que trois dates arrêtées pour le début du transfert des réfugiés – mars 2019, octobre 2019 et novembre 2019 – n’ont pas été respectées. Et qu’avant l’arrivée, il y a deux semaines, du premier groupe de 29 rescapés, seuls des militaires de la marine du Bangladesh, qui contrôle l’île, étaient présents sur les lieux.

      Et pour cause. Apparue seulement depuis une vingtaine d’années, cette île, constituée d’alluvions du Meghna qui réunit les eaux du Gange et du Brahmapoutre, émerge à peine des eaux. Partiellement couverte de forêt, elle est restée inhabitée depuis son apparition en raison de sa vulnérabilité à la mousson et aux cyclones, fréquents dans cette région, de la mi-avril à début novembre. Cyclones d’autant plus redoutés et destructeurs que même par beau temps l’île n’offre aucune résistance aux flots. Entre la marée basse et la marée haute, la superficie de Bhasan Char passe de 6 000 hectares à 4 000 hectares.
      « Bhasan Char sera l’équivalent d’une prison »

      « Ce projet est inhumain, a confié aux journalistes du Bangla Tribune un officier de la marine du Bangladesh stationné dans l’île, dont l’accès est interdit par l’armée. En novembre 1970, le cyclone de Bhola n’a fait aucun survivant sur l’île voisine de Nijhum Dwip. Et Bhasan Char est encore plus basse sur l’eau que Nijhum Dwip. » « Un grand nombre de questions demeurent sans réponses, observait après une visite sur place en janvier 2019 la psychologue coréenne Yanghee Lee, rapporteure spéciale de l’ONU pour la situation des droits de l’homme en Birmanie. Mais la question principale demeure de savoir si cette île est véritablement habitable. »

      « Chaque année, pendant la mousson, ont déclaré aux enquêteurs de Human Rights Watch les habitants de l’île voisine de Hatiya, une partie de Bhasan Char est érodée par l’eau. Nous n’osons même pas y mettre les pieds. Comment des milliers de Rohingyas pourraient-ils y vivre ? » Par ailleurs, la navigation dans les parages de l’île est jugée si dangereuse, par temps incertain, que les pêcheurs du delta hésitent à s’y aventurer. Les reporters d’un journal local ont dû attendre six jours avant que la météo devienne favorable et qu’un volontaire accepte de les embarquer.

      À toutes ces objections des ONG, d’une partie de la presse locale, et de plusieurs agences des Nations unies, le gouvernement bangladais répond que rien n’a été négligé. Une digue, haute de près de trois mètres et longue de 13 km a été érigée autour de l’enclave affectée à l’hébergement des Rohingyas. Chacune des 120 unités de logement du complexe comprend 12 bâtiments sur pilotis, une mare, et un abri en béton destiné à héberger 23 familles en cas de cyclone et à recevoir les réserves de produits alimentaires. Conçus, selon les architectes pour résister à des vents de 260 km/h, les abris pourront aussi être utilisés comme salles de classes, centres communautaires et dispensaires.

      Compte tenu des conditions de navigation très difficiles dans l’estuaire du Meghna et du statut militarisé de l’île, la liberté de mouvement des réfugiés, comme leur aptitude à assurer leur subsistance, seront réduites à néant. « Bhasan Char sera l’équivalent d’une prison », estimait, il y a un an Brad Adams, directeur pour l’Asie de Human Rights Watch. Aucun hôpital n’est prévu sur l’île. En cas d’urgence, les malades ou les blessés devront être transférés vers l’hôpital de l’île de Hatiya, à une heure de bateau – lorsque le temps le permet.

      Faute de production locale, la quasi-totalité de l’alimentation devra être acheminée depuis le continent. La densité de population de ce complexe dont les blocs, disposés sur un plan orthogonal, sont séparés par d’étroites allées rectilignes dépassera, lorsqu’il sera totalement occupé, 65 000 habitants au km² : soit six fois celle du cœur de New York. On le voit, ce « paradis pour les Rohingyas » selon le principal architecte du projet, Ahmed Mukta, tient davantage du cauchemar concentrationnaire submersible que du tremplin vers une nouvelle vie pour les réfugiés birmans du Bangladesh.

      Formulée pour la première fois, sans suite, en 2015 par les responsables bangladais, alors que le nombre de réfugiés birmans dans la région de Cox Bazar ne dépassait pas 250 000, l’idée de les transférer sur Bhasan Char est revenue en discussion deux ans plus tard, en août 2017, lorsque la campagne de nettoyage ethnique déclenchée par l’armée birmane et ses milices a chassé près de 740 000 Rohingyas de leurs villages dans l’État de Rakhine et les a contraints à se réfugier de l’autre côté de la frontière, au Bangladesh, auprès de leurs frères, exilés parfois depuis plus de 25 ans.

      Nourrie par divers trafics, par le prosélytisme des émissaires islamistes, par la présence de gangs criminels et par l’activisme des agents de l’Arakan Rohingya Salvation Army (ARSA), à la recherche de recrues pour combattre l’armée birmane, une insécurité, rapidement jugée incontrôlable par les autorités locales, s’est installée dans la région. Insécurité qui a contribué à aggraver les tensions entre les réfugiés et la population locale qui reproche aux Rohingyas de voler les petits boulots – employés de restaurants, livreurs, conducteurs de pousse-pousse – en soudoyant les policiers et en acceptant des salaires inférieurs, alors qu’ils ne sont officiellement pas autorisés à travailler. Cette situation est d’autant plus inacceptable pour le gouvernement de Dacca que Cox Bazar et sa plage de 120 km constituent l’une des rares attractions touristiques du pays.

      Pour mettre un terme à cette tension, le gouvernement de Dacca a d’abord compté sur une campagne de retours volontaires des Rohingyas en Birmanie. En vain. Faute d’obtenir des garanties de sécurité et de liberté du gouvernement birman, aucun réfugié n’a accepté de rentrer. Le même refus a été opposé aux autorités d’année en année chaque fois qu’une liste de volontaires pour le rapatriement a été proposée. Selon les chiffres fournis par le gouvernement birman lui-même, 31 réfugiés seulement sont rentrés du Bangladesh entre mai 2018 et mai 2019.

      Les conditions, le plus souvent atroces, dans lesquelles les Rohingyas ont été contraints de fuir en août 2017 et ce qu’ils soupçonnent de ce qui les attendrait au retour expliquent largement ces refus. Les ONG humanitaires estiment que depuis 2017, 24 000 Rohingyas ont été tués par l’armée birmane et ses milices, et 18 000 femmes et jeunes filles violées. En outre, 115 000 maisons auraient été brûlées et 113 000 autres vandalisées. Selon le rapport de la « Mission d’établissement des faits » de l’ONU remis au Conseil des droits de l’homme en août 2019, les Rohingyas ont été victimes de multiples « crimes de droit international, y compris des crimes de génocide, des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre ».
      On comprend dans ces conditions que, rien n’ayant changé depuis cet été sanglant en Birmanie où Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix 1991, n’a pas soulevé un sourcil devant ces crimes, les Rohingyas se résignent à un destin de réfugiés plutôt que de risquer un retour à la terreur. Mais ils ne sont pas disposés pour autant à risquer leur vie dès le premier cyclone dans un centre de rétention insulaire coupé de tout où ils n’auront aucune chance d’espérer un autre avenir. Les responsables du HCR l’ont compris et, sans affronter ouvertement les autorités locales, ne cessent de répéter depuis un an, comme ils viennent de le faire encore la semaine dernière, qu’il n’est pas possible de transférer qui que ce soit sur Bhasan Char sans procéder à une « évaluation complète et détaillée » de la situation.

      Depuis deux ans, les « plans stratégiques conjoints » proposés par le HCR et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) pour résoudre la « crise humanitaire » des Rohingyas estiment que sur les trois scénarios possibles – rapatriement, réinstallation et présence de longue durée – le dernier est le plus réaliste. À condition d’être accompagné d’une certaine « décongestion » des camps et d’une plus grande liberté de mouvements accordée aux réfugiés. L’aménagement de Bhasan Char et la volonté obstinée d’y transférer une partie des Rohingyas montrent que le gouvernement de Dacca a une conception particulière de la « décongestion ».

      Sans doute compte-t-il sur le temps – et le soutien de ses alliés étrangers – pour l’imposer aux agences de l’ONU. « Le Bangladesh affronte le double défi de devoir porter assistance aux Rohingyas tout en combattant la propagation du Covid-19, constatait la semaine dernière Brad Adams de Human Rights Watch. Mais envoyer les réfugiés sur une île dangereusement inondable, sans soins médicaux, n’est certainement pas la solution. »

      https://www.mediapart.fr/journal/international/160520/le-bangladesh-invoque-le-covid-19-pour-interner-des-refugies-rohingyas-sur

  • Der fleißige Herr Spahn - Mit Vollgas gegen den Datenschutz | Telepolis
    https://www.heise.de/tp/features/Der-fleissige-Herr-Spahn-Mit-Vollgas-gegen-den-Datenschutz-4556149.html

    Wie man Datenschutzabbau im Gesundheitswesen als Sicherheitsmaßnahme framet

    Medienwirksam stellt sich der Bundesgesundheitsminister als Hüter des Datenschutzes dar. In Wirklichkeit hat er gerade unbemerkt von der Öffentlichkeit einen bedeutenden Eingriff in die Grundrechte des Bürgers durchs Parlament gebracht.

    Wie man Datenschutzabbau als Versorgungsinnovation framet | Telepolis
    https://www.heise.de/tp/features/Wie-man-Datenschutzabbau-als-Versorgungsinnovation-framet-4571885.html

    Der fleißige Herr Spahn: Mit Vollgas gegen den Datenschutz - Teil 2

    Unbemerkt von der Öffentlichkeit geht der Datenschutzabbau in die nächste Runde. Spahns Digitale-Versorgung-Gesetz, bekannt als „App auf Rezept“, plant digitale „Innovationen“ auf Kosten des informationellen Selbstbestimmungsrechts der Bürger

    „Terminservice- und Versorgungsgesetz“: Wie man Datenschutzabbau als Qualitätssicherung framet | Telepolis
    https://www.heise.de/tp/features/Terminservice-und-Versorgungsgesetz-Wie-man-Datenschutzabbau-als-Qualitaetssic

    Der fleißige Herr Spahn - Mit Vollgas gegen den Datenschutz: Teil 3

    Unbemerkt von der Öffentlichkeit hat Gesundheitsminister Spahn mit seinem „Terminservice- und Versorgungsgesetz“ einen weiteren Abbau von Datenschutzrechten der Bürger durchs Parlament gebracht.

    #Allemagne #vie_privée #santé #pilitique #maladie

  • Vers une histoire de la violence , Le Courrier Suisse, 3 novembre 2019, par Francois Cusset
    https://lecourrier.ch/2019/11/03/vers-une-histoire-de-la-violence

    Vers une histoire de la violence
    La violence parle le langage du pouvoir. Le terme a toujours été le pivot d’un « tour de magie ancestral », selon ­l’historien François Cusset, qui consiste à agiter le « fantasme d’une violence imminente » pour justifier une violence « présente, dûment rationalisée ». L’histoire de la violence ? « Une histoire de la stigmatisation et de l’asservissement des populations. »
    dimanche 3 novembre 2019 François Cusset
    Vers une histoire de la violence
    Déploiement de la police montée lors des manifestations du 1er mai 2019 à Paris. FLICKR/CC/JEANNE MENJOULET
    Analyse

    Quand l’oligarchie athénienne qualifie de « barbare », il y a 2500 ans, l’immense majorité de la population extérieure à l’oligarchie – femmes, non-propriétaires, esclaves, étrangers, ennemis –, ce mot suffit à justifier par avance la violence d’Etat qui pourra être exercée contre eux. Et l’opération est plus explicite encore quand le conseiller à la sécurité nationale du président George W. Bush déclare en 2002 : « Un Etat voyou est n’importe quel Etat que les Etats-Unis déclarent tel ». Au-delà de la paranoïa belliqueuse post-11 septembre, l’arbitraire revendiqué de la formule sert à soumettre la justice à la puissance, ancestral coup de force rhétorique qui rappelle que si, comme le posait jadis (Blaise) Pascal le janséniste, « la justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est tyrannique », l’équilibre de ces deux pôles reste une vue de l’esprit, et l’usage officiel de la force sera toujours le meilleur moyen de s’arroger les vertus de la justice.

    Les exemples ne se comptent plus de cette vieille prestidigitation des pouvoirs, consistant à agiter le fantasme d’une violence imminente, et archaïque, pour justifier une violence présente, dûment rationalisée. Les migrants qu’on rafle et qu’on expulse pour le danger supposé de certains d’entre eux ou juste, à mots de moins en moins couverts, pour les emplois et les allocations qu’on ne peut pas distribuer sans limites, ni faire violence à ceux qui y auraient vraiment droit. Le missile israélien qui déchiquette quelques familles dans les territoires palestiniens pour l’attentat terroriste qu’ils seraient là-bas, d’après les services secrets, en train de fomenter dans l’ombre.

    Ou encore, moins spectaculaire, le militant écologiste qu’on jette en prison pour avoir arraché des plants de maïs, comme si les pesticides et les OGM n’exerçaient pas la plus grande des violences sur les corps et les biotopes. Et le jeune punk délogé avec brutalité de sous une porte cochère parce que sa forme de vie ou ses atours sont associés par la bien-pensance publique au parasitisme, au vandalisme ou à l’égoïsme anti-social. On n’est jamais très loin de l’autre bout du spectre, où la jeune femme venue déposer plainte pour agression sexuelle et le citadin gay pour insulte homophobe se voient reprocher plus ou moins implicitement un accoutrement ou des choix d’existence qui feraient violence à la bienséance voire à l’ordre public. Par cette inscription, cette façon de légitimer les arbitraires d’Etat, par les méfiances et les rancœurs qui relient les uns et les autres, la violence, bien plus que la déflagration d’un instant, est une chaîne de conséquences, une émotion circulatoire, le piège d’un circuit sans fin.

    C’est le premier problème que posent le mot et le concept de violence, qui rend difficile le travail nécessaire, mais délicat pour historiciser ces questions. Faire une histoire de la violence, pour en comprendre les formes d’aujourd’hui et l’usage tactique dans les luttes de résistance, est donc hautement problématique. Car si la violence légitime est exercée au nom d’une violence antérieure, pour « pacifier » les sociétés comme on le dit depuis la Seconde Guerre mondiale, alors tout dans une telle histoire risque bel et bien d’être à double lecture. Et de fait, le grand tournant historique ici, autour des conquêtes coloniales et de la naissance de l’Etat moderne, sur une longue période qui va du XVIe au XIXe siècles, nous a toujours été présenté comme celui d’une atténuation et d’un encadrement juridique et politique (voire « civilisationnel ») de la violence – alors que l’historiographie récente a pu enfin démentir cette approche et démontrer que les violences d’Etat et les violences coloniales ont été bien pires, par leur bilan quantitatif comme leur ordre normatif, que la conflictualité ordinaire, celle de la vie sociale traditionnelle ou des luttes intercommunautaires, qu’elles étaient censées réduire.

    A l’insécurité résiduelle, avant le Code pénal et l’éclairage nocturne, de nos villes et nos villages, où en effet on pouvait impunément détrousser le visiteur ou occire le manant, l’Etat moderne a substitué ses cadres coercitifs, normalisateurs et centralisateurs, et sa passion punitive légale, à mesure que se creusait le fossé entre le danger objectif et la sanction pénale : entre les années 1980 et aujourd’hui, par exemple, pendant que chutaient en France les taux d’homicides, mais aussi de délits pénaux moindres, la population carcérale a été multipliée par 2,3, « inutilement » en somme.

    Pour compléter ces deux axes majeurs de l’histoire politique moderne – conquête coloniale et formation de l’Etat – on peut ajouter que celle-là s’est prolongée, une fois acquises les indépendances nationales sur les continents concernés (de 1802 pour Haïti à 1962 pour l’Algérie), sous la forme d’un endocolonialisme1 du cru, entretenu par la tutelle économique et morale des anciennes métropoles, ou des nouvelles puissances. Quant à celle-ci (la formation de l’Etat), elle est ce qui a permis aux guerres entre nations voisines, qui avaient toujours existé, d’acquérir une forme rationnelle et systématique et une échelle absolument inédite, qui culminèrent avec les deux guerres mondiales et leur mobilisation totale des corps et des esprits – pas besoin d’être un naïf anarchiste pour y voir une conséquence directe de l’inflation de la forme-Etat, d’un Etat « paroxystique ». Plus simplement dit : Napoléon fait édicter les codes civil et pénal, mais il ravage l’Europe ; les papes de la Renaissance sauvent les âmes des autochtones, mais en en faisant massacrer les corps ; la France apporte en Afrique du Nord l’éducation publique et quelques infrastructures, mais aussi la torture et le racisme d’Etat ; et si lois et normes se sont imposées peu à peu dans les foyers et les rues, d’Occident d’abord, y limitant les risques de désordres imprévus, ce fut avant tout sur les cadavres, innombrables, des insurgés de 1848, des communards de 1871, des mineurs de 1947 ou des refuzniks les plus têtus des années 1970 – ou encore, pour que nous vivions en paix à l’ère du « zéro mort » policier, sur les cadavres de Malik Oussékine, Carlo Giuliani ou Rémi Fraisse. Ou juste les 3000 blessures graves infligées par les policiers français en 30 samedis de « gilets jaunes ».

    En plus de la colonisation qui aurait sorti les peuples primitifs de l’arriération guerrière, et de l’Etat moderne qui aurait pénalisé les arbitraires locaux et les violences interindividuelles (jusqu’aux duels, dont la pratique disparaît enfin au début du XXe siècle), le troisième pilier de cette histoire de la modernité comme pacification sociale et restriction de la violence est à trouver du côté de la civilité. A partir du XVIIe siècle, la civilité est diffusée par les manuels de savoir-vivre et les nouvelles règles descendantes, prônées par l’aristocratie puis la bourgeoisie, ces règles neuves qui recommandent de ne pas se moucher dans la nappe, de discuter au lieu de frapper, d’être pudique et mesuré en toutes occasions.

    C’est la grande thèse du sociologue Norbert Elias sur le « processus de civilisation » comme intériorisation des normes et autorépression de la violence. Sauf qu’elle a été mal comprise, et que même Elias, plus subtil que ses exégètes, en énumérait les limites : la violence des barrières sociales qu’instaurent ces normes ; le mal-être et les complexes imputables à cette privatisation de l’existence ; et surtout les exceptions de taille que sont, au fil de ce processus de trois siècles, les mouvements sociaux qu’on massacre, l’Etat qui punit injustement, les peuples colonisés qui n’ont pas droit à un traitement aussi civil, les guerres de plus en plus longues et sanglantes qui dérogent à tout cela. Difficile, en un mot, de tracer ici le fil continu d’une histoire unidirectionnelle, qui verrait quand même, grosso modo, dans l’ensemble, réduite la violence collective et pacifiées les mœurs communes.

    La pire violence est rationnelle

    Une histoire de la violence à l’ère moderne doit donc être surtout une histoire de la stigmatisation et de l’asservissement des populations sous le prétexte, multiforme et récurrent, d’en prévenir, d’en punir, d’en empêcher ou d’en « civiliser » la violence première – autrement dit, la violence instinctuelle, barbare, inéduquée, infantile, subjective, incontrôlable, là où la violence punitive, parce que légitime, et ne s’appelant donc plus violence, serait rationnelle, légale, élaborée, légitime, adulte, objective, mesurée.

    Certitude intemporelle : le pouvoir n’existe que pour pointer et endiguer une violence qu’il dit originelle. Et que celle-ci soit ou non un mythe, son discours infini sur elle et ses actes officiels contre elle finissent par la faire exister, au moins dans nos esprits rompus à l’idée qu’à l’origine est la violence (du Big Bang, de l’accouchement, ou du sauvage que personne encore n’a sauvé de lui-même) et qu’au terme d’une évolution digne, se trouverait l’apaisement (par les lois, l’éducation, l’ordre, la culture, les institutions, sans même parler du commerce).

    C’est précisément ce postulat profondément ancré, ce postulat d’une violence chaotique des origines à endiguer et à prohiber, qu’une véritable contre-histoire de la violence, ou une histoire des usages de la catégorie de violence, doit avoir à cœur de démonter – de mettre à nu. C’est aussi capital, et moralement faisable, que de démonter, sous l’occupation, le mensonge des affiches de propagande nazie qui présentaient la résistance comme violence sauvage et terrorisme meurtrier. Car ce récit des origines nous voile les vérités de l’histoire, à l’instar des fictions sur « l’état de nature », bien sûr introuvable dans l’histoire réelle, qui sous-tendent les simplismes de droite, avec leur méchant Léviathan venu encadrer le chaos effrayant où « l’homme est un loup pour l’homme », aussi bien que les angélismes de gauche, avec leur bon sauvage rousseauiste et leur civilisation venue corrompre l’humain pacifique. Il n’y a pas de bon sauvage ni de loup-pour-l’homme qui tiennent : loin de ces mythes, il y a les dialectiques de l’histoire, qui ont fait de l’Etat moderne comme de la civilité partout promue des forces à double effet, émancipatrices et répressives, autorisant une rupture avec la tradition aussi bien qu’une re-normalisation coercitive.

    Pendant ce temps, les violences insurrectionnelles décriées et brutalement réprimées, au présent de leur irruption, par les classes dirigeantes, furent la seule communauté réelle d’un peuple que tout divisait par ailleurs et, bien souvent, le seul moyen d’obtenir des avancées effectives sur le terrain du droit, des conditions de vie et de travail, de l’égalité sociale et des libertés civiles – au fil de trois siècles d’émeutes et d’insurrections noyées dans le sang, mais sans lesquelles les quelques progrès de l’histoire moderne n’eurent jamais été obtenus.

    La violence instinctuelle existe évidemment, mais elle n’est que ponctuelle, là où la violence instituée, rendue invisible par les dispositifs de justification étatico-normatifs, dévaste et tue partout et en continu. « Le plus dangereux, dans la violence, est sa rationalité », concluait Michel Foucault en 1979. Les montages financiers ultra-complexes qui mettent en faillite des pays lointains, les exploits technologico-industriels qui mettent en danger la pérennité de la vie sur Terre, ou les trésors d’intelligence stratégique et de créativité esthétique déployés pour produire à l’excès et vendre n’importe quoi ne cessent, aujourd’hui, d’en apporter la désolante illustration – outre qu’ils rappellent que derrière les guerres et les massacres, les sexismes qui tuent et les racismes qui assassinent, la violence la plus dévastatrice aujourd’hui est sans conteste la violence de l’économie. Et ce, d’abord sur les psychés, exsangues, humiliées, pressurisées, réduites à la haine de soi et à l’horizon bouché des rivalités constantes, dont on ne se libère qu’en sautant par la fenêtre.

    Notes
    1. ↑ Forme de néocolonialisme où, malgré l’indépendance nationale, le pays colonisé reste économiquement et politiquement sous l’emprise du colon.

    L’auteur est historien des idées et professeur à l’Université de Nanterre. Récente publication : Le déchaînement du monde : logique nouvelle de la violence, La Découverte, 2018.

    Article paru (version longue) dans Moins !, journal romand d’écologie politique, dossier : « La violence en question », n°43, oct.-nov. 2019.

  • ‘We don’t need to bleed’: why many women are giving up on periods | Life and style | The Guardian
    https://www.theguardian.com/lifeandstyle/2019/jul/18/women-dont-need-to-bleed-why-many-more-of-us-are-giving-up-periods
    https://i.guim.co.uk/img/media/60e03d1a3e5634a3652466cf1cb59ee7a0c01436/139_0_2559_1536/master/2559.jpg?width=1200&height=630&quality=85&auto=format&fit=crop&overlay-ali

    With recent confirmation that periods have no health benefit, an increasing number of women are using contraception to stop them altogether

    “Having so many periods is a modern phenomenon: historically, women would spend much of their time pregnant or breastfeeding.”
    "So, if women do not want a period, is there a medical reason that they should? The short answer is: no."

    #règles #femmes #santé #pilule

  • #Luxembourg : 62% du personnel soignant est étranger Olivier Loyens - 9 Octobre 2019 - l’essentiel
    http://www.lessentiel.lu/fr/luxembourg/story/62-du-personnel-de-soin-vient-de-l-etranger-31134319

    Près de deux tiers des professionnels de santé au Grand Duché sont étrangers. Cette dépendance pourrait provoquer une crise du système de soins

    Un seuil critique a été dépassé. Le Luxembourg n’étant pas autonome pour faire fonctionner son système de santé, les professionnels de la santé étrangers représentent, aujourd’hui, 62% de l’effectif total des professions médicales et de santé du pays. C’est le principal enseignement de l’étude sur « l’état des lieux des professions médicales et des professions de santé au Luxembourg », dont les résultats ont été présentés ce mardi à Luxembourg.

    « Le pays est extrêmement vulnérable et dépendant des décisions politiques et économiques des pays frontaliers en faveur des soignants », déplore Étienne Schneider, ministre LSAP de la Santé. « Toute initiative en France, en Belgique ou en Allemagne, qui viserait à rehausser les salaires des soignants engendrerait immédiatement une grave crise du système sanitaire luxembourgeois », complète Marie-Lise Lair, auteur de l’étude.

    Un plan d’action « dans les prochains mois »
    De plus, les institutions signalent des difficultés de recrutement de médecins et de certaines professions de santé, avec un allongement du délai de recrutement et un élargissement de la distance géographique pour rechercher des candidats potentiels, jusqu’en Europe de l’Est. Enfin, d’autres facteurs influencent les difficultés de recrutement, comme le coût du logement, l’absence de centre hospitalier universitaire, l’absence de faculté de médecine complète, ou encore l’absence de programme d’intégration d’un jeune médecin.

    « Devant une telle situation de dépendance, il faut revoir en profondeur l’organisation du système de santé », estime Étienne Schneider. D’autant que le pays est censé respecter un engagement pris auprès de l’Organisation mondiale de la Santé, à savoir réduire de moitié le recrutement étranger de professionnels de la santé pleinement formés, d’ici 2030.

    Quelques « mesures profondes »
    L’étude va permettre au ministère et aux autres acteurs de la santé de mettre en place un plan national d’action. En attendant, le ministre avance déjà quelques « mesures profondes » qu’il faudra prendre, comme revaloriser et rendre plus attrayantes les professions médicales (accompagner les jeunes médecins lors de leur installation, améliorer les conditions de l’exercice médical au Luxembourg, investir dans les soins primaires), revaloriser les professions de santé auprès des jeunes et des parents, ou encore renforcer le nombre d’étudiants en médecine et revoir la formation et la fonction des soignants.

    « Le plan d’action sera appliqué dans les prochains mois », promet Étienne Schneider. Les patients, qui sont les premiers à être impactés par cette pénurie de ressources en professionnels de la santé, peuvent espérer que le ministre tiendra parole, car le temps presse...

    #Santé #migrations #migrants le Luxembourg se méfie de l’#union_européenne qu’il ne peut piller totalement #ue #france #belgique #allemagne #oms #paradis_fiscaux #pillage #travail #migrations #inégalités #médecine #sante #santé_publique

    • Les principaux chiffres de l’étude
      17 595 professionnels travaillent aujourd’hui dans le secteur de la santé et des soins, dont 15 062 professions de santé réglementées (dont 6 214 infirmiers et 3 784 aides-soignants) et 2 331 médecins (dont 2 000 environ travaillent à plein temps)

      –51% des médecins sont de nationalité luxembourgeoise.

      –En 2017, les femmes représentaient près de 40% des médecins.

      –26% des médecins n’habitent pas au Luxembourg.

      –Le ratio global du médecins pour 1 000 habitants est passé de 3,13 en 2007 à 3,53 en 2017. Les cantons les moins bien dotés sont Vianden, Clervaux et Mersch.

      –D’ici 2034, 59% (hypothèse 65 ans) à 71% (hypothèse 60 ans) des médecins vont partir à la retraite.

  • Opinion | The Original Evil Corporation - The New York Times
    https://www.nytimes.com/2019/09/04/opinion/east-india-company.html

    A propos de la Compagnie britannique des Indes orientales

    Although it has no exact equivalents, the Company was the ultimate prototype for many of today’s corporations. The most powerful among them these days do not need their own armies: They can rely on governments to protect their interests and bail them out.

    The history of the East India Company shows that Western imperialism and corporate capitalism were born hand in hand, the dragons’ teeth that spawned the modern world. As Baron Thurlow remarked in the late 1700s, when the Company was being criticized for its misdeeds and its governor-general, Warren Hastings, was on trial, “Corporations have neither bodies to be punished, nor souls to be condemned. They therefore do as they like.”

    #impérialisme #capitalisme #pillages #crimes #impunité #multinationales

  • Migranti, stop agli aerei di Sea Watch. “Ennesimo ostacolo al soccorso”

    Enac ha revocato il permesso per l’aeroporto di Lampedusa. La missione di ricognizione aree dei due velivoli #Moonbird e #Colibrì è per ora ferma. Linardi: “Gli occhi della società civile danno fastidio”. Enac: “Previsto dalle regole”.

    Bloccati gli aerei di ricognizione, Moonbird e Colibrì, dell’ong tedesca #Sea_Watch operati insieme all’organizzazione francese #Pilotes_volontaires. Ai due velivoli è stato negato per la prima volta il parcheggio all’aeroporto dell’isola di Lampedusa. L’Enac ha chiesto un permesso per operazioni speciali, un’autorizzazione che in passato non era mai servita per poter utilizzare la pista dell’aeroporto siciliano. Per ora, dunque, in attesa che la situazione si sblocchi, la missione area resta ferma.

    L’Enac contattata da Redattore sociale fa sapere di “non aver concesso l’autorizzazione ai voli Moonbird e Colibrì perché le norme nazionali, così come quelle in vigore negli altri Paesi europei, per questi aeromobili prevedono l’uso solo per le sole attività ricreative e non professionali. Nello specifico, il Colibrì non è un aeromobile certificato secondo standard di sicurezza noti , è in possesso di un permesso di volo speciale che non gode di un riconoscimento su base di reciprocità per condurre operazioni diverse da quelle sopra menzionate, tanto meno condotte in alto mare - sottolinea l’Ente -. Il velivolo, inoltre, è stato inoltre oggetto di modifiche significative di cui non abbiamo tranciabilità”.

    Per Enac le operazioni di Search And Rescue sono “operazioni professionali che nel nostro sistema richiedono un regime autorizzativo non compatibile, peraltro, con gli aeromobili di costruzione amatoriale. Di tutto ciò abbiamo dato informazioni al proprietario esercente del velivolo e all’autorità francese - precisa ancora Enac, specificando che lo stesso vale anche per Moonbird “un aereo svizzero che presenta comunque caratteristiche molto simili a quelle del Colibrì”. “L’attività Enac è finalizzata all’attuazione e al rispetto delle norme di sicurezza che regolano e disciplinano le operazioni di volo” conclude l’Ente.

    Il progetto di ricognizione civile nasce nell’aprile del 2017, per monitorare il Mediterraneo centrale e offrire supporto alle operazioni di salvataggio in mare. L’iniziativa ha il sostegno della Chiesa evangelica tedesca. Negli ultimi anni gli aeroplani delle ong, oltre a segnalare le imbarcazioni in difficoltà, hanno denunciato anche alcuni casi di naufragio. Come il 23 maggio scorso quando da un video realizzato proprio a bordo di Moonbird si vede un uomo sparire tra le onde vicine a un gommone in distress.

    Per Sea Watch il blocco dei velivoli per “complicazioni burocratiche” è l’ennesimo tentativo di ostacolare l’attività di soccorso in mare delle ong. “Le nostre operazioni aeree sono attenzionate perché gli occhi della società civile danno fastidio, sia in cielo che in mare”, sottolinea la portavoce Giorgia Linardi.

    Intanto, secondo quanto rivelato dal quotidiano britannico The Guardian a inizio agosto, proprio il controllo aereo delle frontiere marittime sta diventando uno dei tasselli fondamentali della presente e futura strategia messa in campo dall’Europa per il controllo dei flussi migratori. L’agenzia europea di sorveglianza delle frontiere esterne Frontex oltre a gestire le politiche di rimpatrio degli stati membri dell’Ue è parte anche di un investimento da 103 miliardi di euro in aeromobili a pilotaggio remoto. Droni, telecamere aeree sul Mediterraneo, per controllare i confini e in teoria anche i naufragi che lì avvengono. Tuttavia alla richiesta di inviare copia delle istruzioni che gli operatori dei droni dovrebbero seguire qualora “intercettassero” un’imbarcazione in stato di pericolo, Frontex ha risposto di non poter inviare quei materiali.

    https://www.redattoresociale.it/article/notiziario/migranti_stop_agli_aerei_di_sea_watch_ennesimo_ostacolo_al_soccorso
    #avions #sauvetage #mer #Méditerranée #ONG #asile #migrations #réfugiés

    Ici plus d’info sur la mission Moonbird initiée par des pilotes suisse et #Colibri initiée par des pilotes français:
    https://seenthis.net/messages/485880

    #the_end #la_fin #fin

  • « J’ai vingt ans et je n’aurai jamais d’enfants ». Elles ont moins de trente ans et choisissent de se faire opérer pour éviter d’enfanter.

    « Je n’ai jamais été intéressée par les enfants, la #parentalité ou le fait de transmettre mes gènes. J’ai une vie bien remplie qui me convient et assez de responsabilités à mon goût. » Charlotte a 25 ans et a choisi la #stérilisation_volontaire il y a moins d’un an. L’opération qu’elle a dû subir, elle l’assimile à un bon souvenir. Elle renchérit : « Il y avait cette idée de le faire une bonne fois pour toutes, de ne pas avoir à penser à ma #contraception, ni prendre des rendez-vous pour la renouveler tous les ans. Le risque de tomber enceinte était un stress continu pour moi. »

    Ce témoignage étonnant n’est pourtant pas isolé. De nombreuses jeunes femmes font aujourd’hui le choix de la stérilisation. Selon une gynécologue des Hôpitaux universitaires de Genève (#HUG), le phénomène risque de prendre de l’ampleur. Cinq Genevoises de 19 à 27 ans ont accepté de témoigner pour la « Tribune de Genève ».

    Un choix drastique

    Margot, Loredana et Laure (identités connues de la rédaction) ont moins de 22 ans et envisagent toutes les trois la stérilisation. Si leurs raisons varient, elles ont un point commun : aucune d’entre elles ne veut d’enfant. Laure ajoute même avec conviction : « Si un jour je veux un enfant, je préfère l’adopter. » Elle évoque également sa vision pessimiste de l’avenir de l’humanité. Un point sur lequel la rejoint Margot : « Je trouve égoïste de mettre au monde quelqu’un dans une situation aussi catastrophique sur le plan climatique et politique. Si je change d’avis, l’adoption existe et je trouve bien plus éthique de donner une chance à un enfant en foyer plutôt que d’en faire un moi même. »

    Le manque de choix dans les techniques de contraception est également un thème récurrent. Margot s’inquiète des conséquences que les #hormones pourraient avoir à long terme sur son #corps. Prendre la #pilule tous les jours ne la met pas en confiance. Laure ne supporte tout simplement pas les effets secondaires de la pilule et le #stérilet en cuivre lui impose des règles douloureuses.

    Si elles sont toutes sûres de leur choix, elles diffèrent sur le moment de l’opération. Laure et Loredana aimeraient la faire dès que possible mais se heurtent aux refus des gynécologues. La première soutient : « Si je pouvais commencer les démarches demain, je le ferais. » Margot est plus modérée et voit cela dans un futur lointain : « J’imagine que je me déciderai à trente ou trente-cinq ans, si je n’ai pas changé d’avis d’ici là. Ce qui voudra dire que je suis certaine de mon choix. »

    Il existe plusieurs techniques de stérilisations qui ont le même but : rendre les trompes de Fallope inutilisables afin d’empêcher les spermatozoïdes de rencontrer l’ovule. Les plus courantes consistent à ligaturer ou sectionner directement les trompes, dans ce cas l’opération est irréversible. Il est également possible de pincer les trompes avec des clips ou anneaux. Ici, l’opération pour revenir en arrière est possible avec de faibles chances de réussite et des risques non négligeables de grossesses extra-utérines. Selon le site médical Sexual health info, peu importe la technique utilisée, il faut considérer la stérilisation comme définitive.

    N’importe quelle personne majeure et capable de discernement peut demander une stérilisation. Les conditions sont les mêmes que pour toute opération : il faut le consentement libre et éclairé de la patiente et quarante-huit heures de réflexion.

    Selon notre interlocutrice des HUG, une gynécologue qui souhaite rester anonyme, la plupart du temps les stérilisations sont discutées durant la grossesse. Il est plus simple de stériliser une femme lors d’une césarienne. Ce sont des patientes qui ont généralement la quarantaine. À ce moment, la fertilité a de toute façon déjà diminué et la stérilisation permet d’en finir.

    Le principal obstacle à la stérilisation est l’opposition du médecin. Mélanie, 27 ans, est stérilisée depuis maintenant un an. Elle a dû consulter plusieurs gynécologues avant d’en trouver un qui accepte de l’opérer. « La première femme que j’ai vue m’a fait un sermon durant toute la séance. Elle me disait que je ne me rendais pas compte de ce que cela représentait, que j’allais changer d’avis ou rencontrer l’homme de ma vie et que c’était de toute façon hors de question de le faire pour elle. »

    La doctoresse des HUG explique : « Tout ce qu’un chirurgien fait, il doit le faire dans l’intérêt de sa patiente, c’est une grosse #responsabilité d’ouvrir le ventre d’une femme pour lui enlever la capacité de faire des enfants. À mon sens, on doit avoir le droit de refuser si on estime que ce qu’on fait n’est pas juste, sauf s’il y a un risque vital. À l’hôpital, la décision de stérilisation est discutée d’abord par le médecin qui rencontre la femme, puis avec le chef de clinique. Si le cas est compliqué, typiquement lorsque la femme est jeune, la discussion est reprise avec l’équipe au complet. »

    Le #refus_médical

    Notre interlocutrice explique ensuite les raisons qui poussent un médecin à refuser cette opération : « La question du #consentement_librement_éclairé ou non se pose. Est-ce qu’à vingt ans on a vraiment assez d’informations sur soi ? »

    Ces refus médicaux répétés ont poussé Charlotte et Mélanie à se rendre en #France pour y être opérées, dans des cliniques connues pour accepter les stérilisations sur des jeunes femmes. Toutes deux disent n’avoir aucune peur de regretter leur choix.

    « Je comprends pleinement les femmes qui se sentent frustrées après un refus, poursuit la médecin, je comprends également le sentiment d’#injustice à ne pas pouvoir disposer de son corps comme on le voudrait. Néanmoins, il y a un nombre non négligeable de femmes qui regrettent ensuite ce choix et qui veulent revenir en arrière. Plus la femme est jeune et plus elle a de chances de changer d’avis. » La spécialiste prévient que les opérations pour enlever les clips fonctionnent mal et que des techniques comme la PMA (Procréation médicalement assistée) sont longues, coûteuses et difficiles psychologiquement.

    « Pour finir, une stérilisation n’est pas une opération anodine, souligne-t-elle. Il s’agit d’une anesthésie générale et d’ouvertures dans le ventre. Si les complications sont rares, elles sont néanmoins réelles. Un bon chirurgien n’est pas uniquement un médecin qui opère bien, mais qui arrive aussi à mesurer toutes les implications de son travail. »

    Le droit à l’erreur

    La bioéthicienne Samia Hurst, professeure à l’Université de Genève, fait le point sur la situation : « La question du corps est importante en médecine et le #consentement du patient demeure fondamental. Dire non à un acte médical est un droit en or massif. Par contre, il y a une différence entre refuser un acte sur son corps et en exiger un. Si je refuse qu’on pratique un geste sur moi, un médecin doit aussi pouvoir refuser de le pratiquer. Demander d’agir n’est pas la même chose que de demander ne pas agir. »

    Elle questionne ensuite les raisons courantes d’un refus : « L’argument qui motive le plus souvent un refus est que les femmes ne devraient pas se faire stériliser car elles risquent de changer d’avis. C’est tout à fait vrai, les choix sont fluctuants. Les circonstances changent et les grandes décisions avec. Le problème avec ce raisonnement est qu’aucune décision de vie n’est totalement réversible. Se marier, avoir un enfant ou ne pas avoir d’enfant sont toutes des décisions qui auront un impact indélébile sur la suite de la vie d’un individu. »

    Samia Hurst remarque pourtant, « qu’on est beaucoup plus inquiets lorsqu’une femme prend la décision de ne pas avoir d’enfants plutôt que lorsqu’elle décide d’en avoir. Il y a une #norme_sociétale importante qui dit que les gens (et plus particulièrement les femmes) doivent avoir des enfants. Il demeure difficile de s’écarter de cette #norme pour les femmes qui veulent se stériliser et pour les médecins pratiquant l’opération. »

    La professeure d’#éthique conclut sur le #droit_à_l’erreur : « Accepter la #liberté de quelqu’un, c’est aussi lui laisser le droit de se tromper. Pour être libre, je dois prendre mes propres décisions, même si elles ne sont pas les bonnes. Un médecin n’a pas besoin d’adhérer à l’idée de sa patiente pour accéder à sa requête. »

    Militantisme ou manque de moyens

    Charlotte explique que, dans son cas, se stériliser est aussi une façon de donner un signal clair : « La société incite les femmes à vouloir des enfants et celles qui n’en veulent pas sont stigmatisées. On entend trop souvent dire que si on ne veut pas d’enfant à vingt ans, on va forcément changer d’avis plus tard. Pour moi, me stériliser était aussi un moyen de prouver à mon entourage ma volonté de ne pas enfanter. J’ai fait en sorte que mon corps ne soit pas capable d’avoir un enfant car je ne veux pas de cette vie. Je suis désormais enfin une femme libre et totalement détachée ! » Laure ne partage pas cette motivation mais la comprend : « Je pense que les femmes savent ce qu’elles veulent et qu’on ne doit pas choisir pour elles. »

    Aujourd’hui, aucun moyen de contraception féminin n’est dépourvu d’effet secondaire. De plus, la charge de devoir penser à la contraception au mieux tous les ans ou au pire tous les jours revient toujours aux femmes. Pour Laure, c’est ce déficit qui pose problème : « Si j’avais accès à une contraception sans hormones qui ne me demande pas de repasser sur la chaise du gynéco pendant trente minutes tous les cinq ans, je ne penserais même pas à la stérilisation. Je trouve qu’actuellement la recherche dans le domaine de la #contraception_féminine n’est pas assez poussée. »

    https://www.tdg.ch/geneve/actu-genevoise/j-vingt-ans-naurai-jamais-denfants/story/16727912

    #stérilisation #femmes #corps #femmes

    • Il y a un vrai problème aussi avec la manière dont le DIU est sous-vendu et les règles douloureuses sous-traitées. Le DIU peut être laissé en place 10 ans sans soucis, mais il semble que la secte des gynécos de France ait obtenu une AMM de 5 ans, juste pour faire tourner leur foutu tiroir-caisse, alors que le risque max de cette contraception, c’est justement d’être mal posée.
      Quant aux règles abondantes et douloureuses, j’en ai chié des années, jusqu’à ce que Winckler explique que, non, les anti-inflammatoires ne sont pas du tout contre-indiqués en cas de règles pourries sous DIU, au contraire, c’est même le truc recommandé pour réduire le flux.

      Une fois cette question réglée, le DIU et la contraception la moins chère, la moins contraignante et la plus efficace pour le moment. En plus, il y a un travail actuellement autour de la création d’un kit d’auto-pose.
      Ensuite, le principe, c’est quand même de ne plus penser à sa contraception pendant 10 ans, garanti sans hormones qui nous pourrissent la vie !

    • Quand j’ai réussie à bénéficier de la contraception définitive, juste après l’intervention la secrétaire médicale qui m’a dit etre militante féministe m’a gratifié de cette remarque :
      « - Vous ca va, vous pouvez être stériliser (j’avais 38 ans), mais les gamines de 20 ans qui ont la flemme de prendre la pilule, il n’en est pas question. »

  • Moi, mes poils sur les jambes et les 15 minutes les plus longues de ma vie - Rockie
    https://www.rockiemag.com/poils-jambes-humiliation-3937

    Comment en seulement 15min j’ai pu passer de « meuf sûre d’elle » à « meuf qui se sent observée et jugée par tous les passants » ? Comment une dizaine de cons ont pu me miner à ce point le moral alors que j’étais toute guillerette ? Il a suffi de quinze minutes pour que je remette en question mes choix et mes convictions forgées en plusieurs années.

    #pilophobie

  • « Mime à la Carte » à Paris à l’Hôtel Plaza Athénée

    Hier dimanche il faisait bien chaud : 30° et il me fallait assurer une animation de Mime à la Carte » pour la compagnie « Le Bateau Ivre »... https://www.silencecommunity.com/blog/view/47417/« mime-a-la-carte »-a-paris-a-l’hotel-plaza-athenee

    #artiste_mime #mime #artiste #journal_de_bord #le_bateau_ivre #philippe_pillavoine #pillavoine #paris #palace #hôtel #Plaza_Athénée #event #animation #événementiel #mime_à_la_carte #silence_community

  • Turquie : l’Autorité électorale ordonne un nouveau scrutin municipal à Istanbul
    http://www.lefigaro.fr/flash-actu/turquie-l-autorite-electorale-ordonne-un-nouveau-scrutin-municipal-a-istanb

    Le parti présidentiel islamo-conservateur, l’AKP, réclamait la tenue d’un nouveau scrutin en dénonçant des « irrégularités » qui auraient selon lui émaillé le vote du 31 mars. « Les élections à Istanbul seront renouvelées », s’est félicité sur Twitter le représentant de l’AKP auprès de l’YSK, Recep Ozel. La décision d’annuler le scrutin et d’ordonner la tenue d’un nouveau vote a été prise à l’issue d’une réunion de l’YSK à Ankara pour examiner un « recours extraordinaire » contre les résultats présentés par l’AKP en avril. Lors de ces élections, le candidat de plusieurs partis d’opposition, Ekrem Imamoglu, a battu celui de l’AKP, l’ex-premier ministre Binali Yildirim, avec moins de 15.000 voix d’avance, un écart infime à l’échelle de la mégapole turque.

    L’AKP de Recep Tayyip Erdogan a également perdu la capitale Ankara, un camouflet qui s’explique notamment par la tempête économique qui secoue le pays, avec la première récession en 10 ans, une inflation à 20% et une monnaie qui s’érode. Mais refusant d’admettre la défaite à Istanbul, Erdogan a crié aux « irrégularités massives ». L’AKP accuse notamment des responsables de bureaux de vote d’avoir minimisé le nombre de voix remportées par son candidat.

    #démocratie #je_vote_jusqu_au_resultat_attendu comme à #pile_ou_face

  • Antiquities looted in Syria and Iraq are sold on Facebook - BBC News
    https://www.bbc.com/news/world-middle-east-47628369

    Private groups also discuss how to illegally excavate ancient tombs, according to research by academics.

    Facebook says it has removed 49 groups following the BBC’s investigation.

    The BBC has also seen evidence that antiquities are still being smuggled from Iraq and Syria into Turkey, despite a police clampdown and the retreat of the Islamic State group.

    #antiquités #pillage #syrie #irak #Turquie

  • « Mime Suiveur » à Cergy (95)

    Le samedi 15 juin 2019, de 13h30 à 17 heures, l’artiste Mime Philippe PILLAVOINE que vous pouvez apercevoir sur la chaîne YouTube de Golden Moustache dans les sketch si justement intitulé « Le Mime », sera à Cergy Pontoise (95) pour présenter son animation de « Mime Suiveur »... https://www.silencecommunity.com/events/event/view/47364/« mime-suiveur »-a-cergy-95

    https://www.youtube.com/watch?v=wqygGD2V8HA

    #artiste_mime #mime #animation #événementiel #cergy #cergy_pontoise #île_de_france #val_d_oise #pillavoine #philippe_pillavoine #mime_suiveur

  • BALLAST | Françoise Vergès : « La lutte décoloniale élargit les analyses » (1/2)
    https://www.revue-ballast.fr/francoise-verges-la-lutte-decoloniale

    C’est une bonne image ! Le Sud, ce n’est pas un espace purement géographique, mais politique. C’est le produit d’une longue fabrication par le Nord et par le système capitaliste, qui en a fait un espace de vulnérabilité, à piller et à exploiter. Ce qu’on a appelé le « #Tiers_monde » et qu’on appelle maintenant le « Sud global », c’est cette constante division de l’humanité et de la planète en deux espaces, avec des frontières mouvantes qui distinguent d’un côté les gens qui ont droit à une vie décente, qui ont accès à de l’eau ou de l’air propre, et de l’autre ceux qui n’y ont pas droit. Dans le même temps, on trouve dans ce qu’on appelle le « Nord » (y compris en Europe) des espaces construits comme des Suds. Une géographie urbaine en enclaves se développe, et partout les classes moyennes et riches se protègent en construisant des « gated communities ». Leurs membres passent d’une enclave à l’autre, de leur maison climatisée au centre commercial climatisé — autant d’espaces entretenus par des femmes et des hommes racisés (mais surtout des #femmes), surexploités puis rejetés dans des quartiers excentrés où l’eau et l’air sont pollués. Le confort de quelques-uns est construit sur l’#invisibilisation et l’#exploitation de plusieurs. Et cette construction en enclaves sécurisées, surveillées, interdites aux pauvres, est visible y compris dans les villes du Sud. Il faut constamment affiner les cartographies que construisent des États autoritaires, le #néolibéralisme et l’#impérialisme, mais aussi intégrer le fait d’un monde multipolaire.

    #colonialisme #racisme #esclavage #capitalisme #consommation

  • « Laurenzaccio » la Bande-annonce

    Voici elle est arrivée et est postée sur PeerTube. J’ai nommé la Bande-annonce de « Laurenzaccio », tragédie clownesque mise en scène par Mario Gonzalez. Elle a été montée et filmée par Jean-Pierre Villaret et Bruno Souverbie (Phase-B). C’est une captation de la première représentation au Théâtre de Chaoué Port Belle Eau d’Allonnes. Je vous laisse l’admirer : https://www.philippepillavoine.com/leblog/2019/03/01/laurenzaccio-la-bande-annonce

    #spectacle #création #bande_annonce #teaser #trailer #laurenzaccio #musset #sand #gonzalez #pillavoine #clown #tragédie #villaret #souverbie #captation #allonnes

  • 16 mars : la guerre des pauvres – ACTA - Partisans dans la métropole
    https://acta.zone/le-16-mars-la-guerre-des-pauvres

    Nous avons reçu ce texte, écrit par “quelques #gilets_jaunes parisien.ne.s”, et le publions afin de compléter ceux déjà disponibles à propos de l’émeute du 16 mars dernier. En effet celui-ci s’intéresse à une pratique trop souvent ignorée (ou caricaturée) : celle du pillage.

    Combattre on sait faire que ça
    Et on repartira avec leur argent, leur sang et leurs pes-sa

    Lunatic, “Introduction”, Mauvais Oeil.

    Il y a tout ce que vous voulez aux Champs Elysées
    Joe Dassin, “Les Champs-Élysées”

    L’Acte 18 a été marqué par la destruction massive des enseignes de luxe sur les Champs-Élysées, ainsi que la réappropriation généralisée et systématique de tout ce qui s’y trouvait. Face à l’offensive médiatique actuelle qui décrit ces vols comme les actes de pilleurs et pilleuses apolitiques, nous souhaitons restituer notre version de la journée de samedi, en guise d’éloge politique du #pillage #populaire.

    En rentrant samedi soir, on va sur BMFTV, petit plaisir coupable de voir transpirer les éditorialistes : on n’est ni déçu.es ni surpris.es, le même discours convenu s’épuise à imposer sa lecture criminalisante, s’acharne à construire la panique autour des fameux casseurs. Dans le langage médiatique, les gilets jaunes sont autant de foules sauvages, de voyous, de vandales, qui saccagent, pillent et brûlent dans un déferlement de violence qui ferait pâlir les organisations terroristes les plus ambitieuses. Les médias redoublent de superlatifs, aucun mot n’est assez fort pour caractériser la situation : pour France TV Info “La plus belle avenue du monde [est] dévastée”, pour Le Monde c’est un “déferlement de rage”. Alors, devant les images de catastrophe du Fouquet’s en flammes, devant BFM, on se dit que les gilets jaunes ont quand même la classe.

    Les médias, chiens de garde du pouvoir et de la #propriété_privée
    Le lexique de la sauvagerie préside : des “assassins” aux “saccages” en passant par les “complices”, les Champs-Elysées se transforment en territoire de guerre chaotique, envahie par des raids vikings et des hordes de barbares en masque à gaz. Ce qui se joue ici, c’est la #dépolitisation de l’émeute d’une part, la déshumanisation des manifestant.es d’autre part. Il s’agit pour les médias de présenter le pillage et la destruction comme des actes incompréhensibles, réalisés sous l’emprise d’une foule haineuse, comme si les gens étaient devenus fous. (...)

  • Allemagne : des pilotes empêchent les vols de renvoi de migrant·es
    5295 personnes ont été expulsées l’année dernière via les aéroports de la La Rhénanie-du-Nord–Westphalie. 240 expulsions ont échoué parce que les compagnies aériennes ou les pilotes ont refusé de le faire.

    Widerstand gegen Abschiebungen in NRW.
    Piloten verhindern Abschiebeflüge

    2018 sind an nordrhein-westfälischen Flughäfen rund 240 Abschiebungen verhindert worden. Meistens durch den Widerstand von Piloten oder Fluggesellschaften.
    DÜSSELDORF dpa/lnw | Über Flughäfen in Nordrhein-Westfalen wurden im vergangenen Jahr 5295 Menschen abgeschoben. Rund 240 geplante Rückführungen auf dem Luftweg scheiterten in NRW – meistens wegen Widerstands durch Fluggesellschaften oder die jeweiligen Piloten. Das geht aus der Antwort der Bundesregierung auf eine Kleine Anfrage der Linke-Fraktion im Bundestag hervor.

    Bundesweit wurden demnach 2018 deutschlandweit 21.059 Menschen über den Luftweg abgeschoben. 5.008 davon vom Flughafen Düsseldorf aus, 285 über Köln/Bonn, zwei Personen wurden über Dortmund ausgeflogen.

    169 Mal scheiterten Abschiebungen am Flughafen Düsseldorf, weil sich Fluggesellschaft oder der Pilot weigerten, die Personen mitzunehmen. In Köln passierte das sechsmal. Dort wiederum leisteten 30 Menschen so heftigen Widerstand, dass sie nicht abgeschoben werden konnten.

    In Düsseldorf scheiterten acht Abschiebungen an „Widerstandshandlungen“, so die Bundesregierung. In 28 Fällen mussten in Düsseldorf Abschiebungen wegen medizinischer Gründe“ abgebrochen werden, zweimal in Köln.

    Insgesamt hat das Land NRW im vergangenen Jahr 6.603 Menschen abgeschoben. Laut einem Bericht des Flüchtlingsministeriums waren das 5 Prozent mehr als im Jahr zuvor.

    http://www.taz.de/Widerstand-gegen-Abschiebungen-in-NRW/!5577565

    #politiques_migratoires #reconduction #désobéissance #pilotes #Allemagne

  • Pilot verhindert Abschiebung einer Hochschwangeren nach Algerien

    Sie war im achten Monat schwanger und laut Attest nicht reisefähig - dennoch sollte eine 30-Jährige mit ihrer Familie nach Algerien abgeschoben werden. Erst der Pilot hatte ein Einsehen. In #Marburg schlägt der Fall hohe Wellen.


    https://www.hessenschau.de/gesellschaft/pilot-verhindert-abschiebung-einer-hochschwangeren-nach-algerien,abschie
    #résistance #pilotes #asile #migrations #réfugiés #renvois #expulsions #Allemagne

    v. aussi la métaliste ici:
    https://seenthis.net/messages/725457

  • #Trump et le coup d’État des #multinationales

    Comment Donald Trump a-t-il conquis la Maison-Blanche ? Au travers d’analyses d’observateurs et de paroles d’électeurs, Fred Peabody dessine le saisissant portrait d’une démocratie confisquée.

    Et si le 45e président des États-Unis n’était pas le symbole d’une ère nouvelle, mais au contraire l’aboutissement d’un processus entamé depuis de longues années ? Alors que la journaliste canadienne Naomi Klein a récemment comparé l’administration Trump à un « coup d’État des grandes entreprises », son compatriote philosophe John Saul (Mort de la globalisation, éd. Payot) estime, lui, que la confiscation de la démocratie et des biens publics par les intérêts privés a débuté dès la fin des années 1970, la première élection de Ronald Reagan en 1981 la rendant effective. Sa théorie du « coup d’État au ralenti » a notamment inspiré le journaliste Chris Hedges dans son analyse de l’état de l’Amérique. Pour lui, et certains de ses pairs, également interviewés ici, l’élection de Donald Trump ne constitue que le dernier rebondissement, le plus visible sans doute, d’une dérive à laquelle ses prédécesseurs démocrates, Bill Clinton et Barack Obama, ont activement prêté la main. Des pans entiers de la population américaine, notamment dans les anciennes régions ouvrières, ont ainsi été délibérément sacrifiés par les élites au nom de la libéralisation du marché, et la crise de 2008 a contribué à accélérer cet abandon.

    Outsiders
    En écho à ces réquisitoires très argumentés, le réalisateur Fred Peabody (Tous les gouvernements mentent) explore ainsi les villes dévastées de Camden (New Jersey) et de Youngstown (Ohio), anciens bastions industriels livrés au chômage et à la misère, où des sans-abri, citoyens jadis prospères, campent à deux pas de rangées de maisons murées. Et c’est l’aspect le plus passionnant, et le plus novateur, de son film, que de donner la parole à des électeurs de Trump qui, ni haineux, ni racistes, ni religieux fanatiques, expliquent pourquoi ils n’ont pu se résoudre, une fois de plus, à voter pour un parti qui les a rayés de la carte sans sourciller. Sans illusion sur Trump, ils lui reconnaissent une seule vertu : celle de l’outsider, méprisé comme eux par les politiciens professionnels et les médias. De Washington à la Rust Belt, la « ceinture de rouille », cette balade dans une Amérique oubliée fait puissamment écho à l’actualité française.


    https://www.arte.tv/fr/videos/084760-000-A/trump-et-le-coup-d-etat-des-multinationales
    #coup_d'Etat #USA #Etats-Unis #corporation #coup_d'Etat_permanent #impôts #fiscalité #élite #pouvoir_économique #démocratie #groupes_d'intérêt #intérêt_personnel #Mussolini #fascisme #corporatisme #propagande #médias #presse #lobby #Camden (New Jersey) #pauvreté #SDF #sans-abris #sans-abrisme #villes-fantôme #capitalisme #ghost-city #pillage #Youngstown (Ohio) #sidérurgie #industrie_sidérurgique #acierie #désindustrialisation #Rusting_belt #délocalisation #chômage #drogue #Manifeste_Powell #inégalités #richesse #pauvreté #ALENA #traité_de_libre-échange #accords_de_libre-échange #syndicats #prisons #privatisation_des_prisons #emprisonnement #divisions #diviser_pour_régner #racisme #sexisme #patriarcat #film #documentaire #film_documentaire

  • « La Crosse en l’Air » | 1997

    La compagnie « Le Bateau Ivre » qui produit mes spectacles depuis plus de 25 ans vient d’investir dans un nouveau NAS. La capacité du disque dur est énorme afin de permettre la numérisation des créations théâtrales passées. Voici la plus ancienne que nous ayons filmée et que je viens de publier sur PeerTube. Il s’agit de « La Crosse en l’Air » de Jacques Prévert... https://www.philippepillavoine.com/leblog/2019/02/01/la-crosse-en-l-air-1997

    #blog #vidéo #PeerTube #Pillavoine #Prévert #spectacle #théâtre #captation #seul_en_scène #archive

  • « Gilets jaunes » : les vidéos amateurs, des chaînes d’info ou de surveillance nourrissent les enquêtes judiciaires et font tomber plein de gens pris dans la tourmente d’une légitime colère...
    Par Nicolas Chapuis : https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/02/01/gilets-jaunes-les-videos-de-surveillance-amateurs-ou-des-chaines-d-infos-nou

    À ajouter à la compile que je tente de faire sur la responsabilité des preneureuses d’images en manifestations : https://seenthis.net/messages/490706

    A Paris, les mobilisations et leurs dérapages ont été largement filmés, permettant aux policiers de « filocher » virtuellement des fauteurs de troubles peu vigilants.

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    « C’est formidable », résume une source policière, qui raconte comment on peut désormais « filocher » un individu à travers quasiment toute la capitale, en mêlant caméras officielles et observation des réseaux sociaux, où pullulent les films amateurs.

    #photo #video #fichage & #criminalisation des #mouvements_sociaux #maintien_de_l'ordre
    #filocher ... et #filochage, aussi, du coup !

    • « Gilets jaunes » : comment les films amateurs, les chaînes d’info et la vidéosurveillance nourrissent les enquêtes judiciaires, Nicolas Chapuis
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/02/01/gilets-jaunes-les-videos-de-surveillance-amateurs-ou-des-chaines-d-infos-nou

      " Un basculement de la #police dans l’ère de la #vidéo, que certains n’hésitent pas à comparer à la révolution des empreintes digitales. "

      A Paris, les mobilisations et leurs dérapages ont été largement filmés, permettant aux policiers de « filocher » virtuellement des fauteurs de troubles peu vigilants.

      C’est une bataille de l’image qui fait rage. Jamais un conflit social en France n’a été autant filmé de toutes parts que celui des « gilets jaunes », qui ont fait de ces séquences postées sur les réseaux sociaux une arme de contestation massive. Mais une arme à double tranchant. Grâce à cette profusion de vidéos, les enquêteurs de police bénéficient depuis deux mois d’une masse d’information totalement inédite, surtout à Paris où tous les projecteurs sont braqués.

      Qu’elles proviennent de caméras d’amateurs, de journalistes indépendants – par exemple du média Brut, apprécié des « gilets jaunes » –, de chaînes d’information – notamment RT France, qui a la confiance des manifestants –, du plan de vidéoprotection de la Ville de Paris, des forces de l’ordre ou même des magasins, ces bandes sont visionnées avec une grande attention par les officiers de police judiciaire, pour résoudre les enquêtes dont ils ont la charge.

      Car si l’accent est mis depuis le début du mouvement des « gilets jaunes » sur les opérations de maintien de l’ordre, une grande partie des effectifs de police sont en réalité consacrés quotidiennement au travail d’#investigation. Sur la zone de compétence de la Préfecture de police de Paris, chaque samedi et chaque dimanche, quelque 300 agents de la direction de la sécurité publique de l’agglomération parisienne (DSPAP) ont été mobilisés pour traiter l’ensemble des procédures d’interpellation, ainsi qu’une bonne partie des affaires judiciaires. Les dossiers les plus sensibles, au nombre de dix-neuf, ont été confiés à la direction régionale de la police judiciaire, le fameux « 36 ».

      Sur les réseaux sociaux, les films amateurs pullulent

      Quel que soit le service sollicité, les enquêteurs s’accordent à souligner le poids pris par l’analyse des images dans leur travail. « C’est formidable », résume une source policière, qui raconte comment on peut désormais « filocher » un individu à travers quasiment toute la capitale, en mêlant caméras officielles et observation des réseaux sociaux, où pullulent les films amateurs.

      La plus symptomatique de ces affaires « vidéo résolues » par la police judiciaire parisienne est certainement l’interpellation, le 31 décembre 2018, de l’un des agresseurs des trois motards d’une compagnie de sécurité et d’intervention. La scène, qui avait eu lieu le 22 décembre, avait marqué les esprits : face à une foule menaçante, l’un des gardiens de la paix avait dégainé son arme brièvement, avant de la ranger.

      Sur les images d’un vidéaste indépendant, on pouvait voir un homme, coiffé d’un casque de scooter bleu et ceint d’un mégaphone, frapper l’un des policiers. Ce sont ces deux détails qui le trahiront quelques jours plus tard. Les enquêteurs ont retracé son parcours, en le suivant de caméra en caméra grâce à son mégaphone visible, jusqu’à le retrouver en train d’enfourcher son scooter dans une rue. Le relevé de la plaque d’immatriculation aboutira quelques jours plus tard à l’interpellation de ce jeune homme de 26 ans habitant le 18e arrondissement de Paris, sur son lieu de travail, un magasin de jeux vidéo.
      Les enquêteurs ont établi qu’il avait par ailleurs tenté de se procurer sur Internet un bouclier antiémeute ainsi… qu’un lanceur de balles de défense, l’arme de force intermédiaire de la police, si décriée actuellement.

      Capture d’écran d’une vidéo prise pendant l’acte III des gilets jaunes, le 22 décembre 2018 : un homme frappe un policier avec un mégaphone. C’est à partir de ces images que la police a pu l’identifier, à l’aide d’autres images (instagram, FB, vidéosurveillance), afin de le mettre en examen. LINEPRESS

      Images vidéo associées à des #prélèvements

      Au sein de la « PJ » parisienne, c’est le 1er district (compétent sur le centre et l’ouest de la capitale) qui a récupéré l’essentiel des dossiers les plus marquants, les faits se déroulant principalement aux abords des Champs-Elysées.
      Ainsi, l’enquête menée par ce service sur les dégradations de l’Arc de triomphe, le 1er décembre, a abouti, notamment grâce à l’exploitation des images, à quatorze #interpellations, dont celle, dans le Doubs, de l’auteur présumé du tag sur le monument signé « Sanglier », un militant proche de l’ultradroite. Les investigations se poursuivent dans ce dossier qui pourrait donner lieu à d’autres arrestations.
      Ce sont également des images vidéo, associées à des prélèvements, qui ont permis de progresser dans le dossier de l’incendie de l’hôtel particulier situé sur le rond-point de l’Etoile, le 1er décembre. Le rez-de-chaussée et le premier étage d’un cabinet d’avocats américain, Hughes Hubbard & Reed LLP, avaient été ravagés par les flammes et des pilleurs s’étaient généreusement servis à l’intérieur ; pour un préjudice total estimé à 500 000 euros. Deux hommes de 24 et 25 ans, issus du 9e arrondissement de Paris et du Val-de-Marne, ont été depuis interpellés et renvoyés devant la justice.

      La brigade criminelle a, pour sa part, récupéré les deux dossiers les plus sensibles aux yeux des forces de l’ordre : la tentative de lynchage d’un policier de la direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC) et les bombes agricoles lancées sur un gendarme mobile, deux scènes qui se sont déroulées aux abords de l’Arc de triomphe le 1er décembre. Le premier a été blessé au fémur, au nez et à la mâchoire. Le second a été gravement touché aux jambes, avec « des brûlures impressionnantes », selon une source policière. La justice a requalifié les faits en #tentative_d’homicide_volontaire_sur_personne_dépositaire_de_l’autorité.

      Amateurisme de certains casseurs

      Le cas du gendarme semble le plus difficile à résoudre, faute de vidéos probantes. « C’est typiquement le genre d’affaire où on manque cruellement d’images », résume une source policière, quand l’agression du policier a, elle, été filmée sous tous les angles. Deux personnes ont ainsi été interpellées, dont un homme de 45 ans demeurant dans le Tarn. Les enquêteurs ont retrouvé chez lui les vêtements qu’il portait le jour de la manifestation. « C’est la différence avec les enquêtes sur les voyous, qui se débarrassent de toutes leurs fringues dès qu’ils ont commis un délit », explique une source policière.

      L’amateurisme de certains casseurs est en effet criant. Un homme d’une trentaine d’années, issu de Seine-Saint-Denis, a ainsi été arrêté pour le pillage d’un magasin Givenchy, le 24 novembre, rue Francois-Ier, près des Champs-Elysées. Il avait tenté de revendre le produit de son larcin sur le site Leboncoin, surveillé par la police. Il a été condamné à douze mois de prison dont six avec sursis.

      Dans de rares cas, les enquêteurs n’ont pas eu à chercher bien loin.

      Dans l’affaire de la dégradation des Tuileries, l’un des casseurs, écrasé par le poids de la grille arrachée, avait fini la nuit à l’hôpital. Avant de s’échapper pour rentrer chez lui à Rouen, où les policiers de la brigade de répression du banditisme (BRB) venus prêter main-forte à leurs collègues débordés, l’ont cueilli.
      Quand ce n’est pas l’amateurisme, c’est parfois l’hybris qui les trahit. En effet, certaines affaires ont été résolues grâce aux images des coupables eux-mêmes, qui se sont filmés en train de commettre le délit. Les vidéos trouvées sur leurs propres téléphones permettent de les confondre en garde à vue. « J’appelle ça la délicieuse stupidité des voyous », s’amuse un policier.

      Plusieurs dossiers dans l’impasse

      La palme est sans doute détenue par le jeune homme qui s’est fait interpeller après le #pillage d’un magasin de vêtements, aux abords de l’Arc de triomphe. Il portait alors, empilé sur lui, l’ensemble de ses trouvailles. A la sortie du tribunal, il se vantait devant les caméras de TF1 de porter une veste volée que les policiers n’avaient pas remarquée. Et promettait de récidiver la semaine suivante. Mais si son visage était bien masqué, ses habits, les mêmes qu’il portait en garde à vue, étaient eux bien identifiables. Les agents de la DSPAP l’interpelleront de nouveau quelques jours plus tard.

      Si elle a changé le quotidien des enquêteurs, l’omniprésence de la vidéo ne permet cependant pas de tout résoudre. Plusieurs dossiers sont toujours en cours d’investigation. Le vol du fusil d’assaut HK G36 dans une voiture de police n’a pas encore été résolu. Deux personnes ont été interpellées dans cette affaire par la police judiciaire. La première, un SDF de 18 ans identifié sur les vidéos, détenait une munition de 5,56 mm correspondant à celles de l’arme, et portait les mêmes vêtements que le jour du vol. La seconde a été arrêtée pour avoir jeté des projectiles sur les forces de l’ordre. Mais rien n’indique qu’il a participé au larcin. L’arme demeure à ce jour introuvable.
      L’intrusion dans le ministère des relations avec le Parlement le 5 janvier, à l’aide d’un engin de chantier, n’a pas encore été élucidée. Une seule certitude, les « gilets jaunes » n’ont pas eu à chercher bien loin pour trouver les clés du transpalette, l’outil qui a servi à enfoncer la porte : elles se trouvaient sous le tapis à côté, une pratique courante sur les zones de travaux. L’engin a également été utilisé pour saccager une banque dans une rue voisine.

      Les auteurs de #dégradations sur d’autres bâtiments symboliques, le Palais de Chaillot et l’ambassade de Belgique, n’ont pas non plus été identifiés. Tout comme certains pilleurs d’enseignes de luxe. C’est le cas de ceux qui ont saccagé la boutique Dior des Champs-Elysées le 24 novembre, pour un préjudice estimé à 1,5 million d’euros. Les casseurs, en plus des dégâts commis, sont partis avec un beau butin en bijoux.
      Une révolution
      Les enquêteurs ne désespèrent pas de faire parler les indices dans ces différents dossiers, voire de recevoir de nouvelles preuves par vidéo de la part de vidéastes amateurs, comme ce fut le cas dans certaines affaires.
      En attendant, ils continuent de visionner des dizaines d’heures de vidéos. Et pas que dans le cadre de la résolution d’#enquête. Les images des reporters indépendants qui filment les forces de l’ordre pour capter d’éventuelles violences policières sont aussi utilisées, mais à des fins pédagogiques cette fois. La hiérarchie s’en sert dans ses débriefings avec les troupes pour identifier les manœuvres ratées et les comportements à modifier.

      En attendant d’avoir ses propres images, avec la généralisation des caméras-piétons et des unités chargées de filmer. Un basculement de la police dans l’ère de la vidéo, que certains n’hésitent pas à comparer à la révolution des empreintes digitales.

      2 415 personnes interpellées à Paris depuis le début du mouvement

      Depuis le début du mouvement des « #gilets_jaunes », 2 415 personnes ont été interpellées à Paris et dans la petite couronne, parmi lesquelles 2 013 ont été placées en garde à vue, et 889 ont été déférées devant la #justice. Un pic a été atteint le 8 décembre 2018, avec 1 082 interpellés pour 974 gardes à vue. 87 % des personnes interpellées étaient majeures et près de 6 sur dix n’habitaient pas en Ile-de-France.

      La majorité des cas concerne des participations à des groupements en vue de commettre des dégradations, des violences sur personne dépositaire de l’autorité, des ports d’armes prohibées et des dégradations volontaires.

      Du côté de la préfecture de police de Paris, on souligne la volonté de mettre en place, les jours de rassemblement des « gilets jaunes », un dispositif qui permette d’interpeller et de mettre au plus vite les individus suspects « dans la chaîne judiciaire ». La justice a dû en effet se mettre au diapason pour traiter l’afflux de procédure. Sur les 889 personnes déférées, 296 sont passées en comparution immédiate, 197 condamnations, 56 renvois et 43 relaxes. 36 #mandats_de_dépôt ont été prononcés depuis le début, alors que 12 personnes sont en #détention_provisoire : au total, 48 personnes sont aujourd’hui écrouées.

      #surveillance #caméras_de_surveillance #journalistes #police #maintien_de_l'ordre