• La désindustrialisation (presque) silencieuse ...

    via https://diasp.eu/p/17859398

    https://histoireetsociete.com/la-desindustrialisation-presque-silencieuse-compte-rendu-du-rasse

    ..., compte rendu du rassemblement de la CGT devant la verrerie de Vayres (et le discours de Sophie Binet) par Franck Marsal

    L’usine verrière de Vayres (Gironde) a été construite après les 30 glorieuses, pour répondre aux besoins locaux de la région vinicole la plus importante de France. En 2023, un investissement a permis la rénovation d’un four permettant au site de baisser de 20% sa consommation énergétique.

    Près de 75 % de la production est livrée aux clients dans un rayon de 100 km aux alentours de l’usine, ce qui permet d’optimiser l’empreinte carbone en termes de transport et de se trouver au cœur des besoins.

    La verrerie a été créée dans les années 1970 par le groupe français BSN et rachetée au milieu des années 2000 par le groupe états-unien Owens (...)

    • [...]

      Les verriers de Gironde n’ont pas besoin de choses extraordinaires. Ils réclament 20 millions d’euros (en plus des 15 millions d’aide publique que perçoit déjà chaque année le groupe O-I) qui permettraient de moderniser et de rouvrir le four fermé au lieu de le démanteler et de produire du verre blanc, très demandé par le marché. Ils ont surtout besoin de se débarrasser des actionnaires prédateurs et des directions de groupe internationales qui leurs sont acquises, et pour lesquelles, une usine n’est qu’un pion dans un vaste mercato financier.Mais le combat est inégal. Les fonds d’investissements états-uniens sont organisés internationalement. Ils ont table ouverte à l’Elysée, à Matignon, à la Commission Européenne et disposent d’une force de frappe financière considérable. Ils savent mener leur action sur du long terme même s’ils priorisent le profit à court terme. Ils imposent les agendas législatifs dans de nombreux pays pour obtenir le cadre d’action qui leur est nécessaire. Le débat sur le budget de l’état et sur la question de la dette doit être pris à ce niveau. Il existe un grand nombre de mesures possibles qui permettraient de réduire le déficit et la dette en accroissant les moyens de l’état et de la sécurité sociale, pour préserver le potentiel productif et créatif de la France. Mais toutes ses mesures se heurteront à ce bloc de fer du capital international. C’était déjà le cas de la Grèce. Lorsque Tsipras et Varoufakis faisait face à la Troïka, ils remplissaient des pages et des pages de mesures alternatives capables de mieux réduire la dette que le plan d’ajustement qui a été finalement imposé. Ils ne comprenaient pas d’être traités comme des enfants alors qu’ils étaient persuadés de l’intelligence de ce qu’ils proposaient. Le capital international a brisé l’intelligence toute petite-bourgeoise de Tsipras en menaçant de retirer les euros des distributeurs de billets grecs.

      [...]

      oAnth / Isarathener :

      Les marchés financiers internationaux, principalement d’origine anglo-saxonne, se comportent comme des métastases cancéreuses néocoloniales vis-à-vis des industries européennes et de la main-d’œuvre hautement qualifiée : ils les dépouillent de leurs capacités, les détournent vers leur sphère d’intérêt (start-ups), et les détruisent ou les pillent non seulement pour réaliser des profits, mais aussi pour des objectifs fondamentalement coordonnés avec les intérêts géopolitiques entre les deux centres financiers mondiaux : #New_York et #Londres .

      #déindustrialisation #marchés_financiers #Europe #Start-ups #pillage

  • #Finances_publiques : où est passé l’argent ?

    Les visages changent, les mêmes #mensonges restent : cette semaine, le ministre de l’Economie Eric Lombard a annoncé que l’Etat devait trouver de toute urgence « 40 à 50 milliards d’euros » (pour la précision, on repassera) pour freiner le #déficit_public. Ce chiffre sorti du chapeau et annoncé dans l’urgence, relayé par #François_Bayrou qui compare l’#endettement de la France à une dette de 50 000 euros par citoyen, alors que les deux n’ont techniquement rien à voir est devenu un classique de la propagande bourgeoise au XXIe siècle mais se base sur un fait réel : le niveau de #dépenses de l’État est considérable mais nous n’en voyons pas la couleur. Tous ces gens aux commandes du pays depuis trente ans s’accusent mutuellement des déficits publics, s’en déresponsabilisent et surtout les exagèrent pour alimenter leurs #politiques_antisociales. Mais ce coup-ci, les faits sont là : de l’argent a été massivement dépensé durant sept ans, creusant considérablement la #dette_publique. Or, cet argent n’a pas servi à améliorer nos conditions de vie, par exemple via des #services_publics de qualité. Au contraire, ces derniers se sont considérablement dégradés. Alors où est passé l’argent ? Puisque le journalisme mainstream a la mémoire courte, retour chronologique sur les principaux vols commis par le #macronisme en sept ans, pendant lesquels l’argent est passé de nos poches à celles des possédants.

    2017 : tout juste arrivé au pouvoir, Macron réduit considérablement nos #recettes_fiscales… pour rien

    Un #budget, tout le monde le vit au quotidien, est composé de recettes et de dépenses. Macron a réduit les premières et a considérablement augmenté les secondes, tout en rognant celles dont on avait le plus besoin. À l’automne 2017, le premier budget voté par la majorité macroniste, alors écrasante, a comporté une #réforme_fiscale d’ampleur :

    – Suppression de la partie financière de l’#impôt_de_solidarité_sur_la_fortune (#ISF), transformé en #impôt_sur_la_fortune_immobilière (#IFI). Cette mesure fait perdre chaque année 4 milliards d’euros aux contribuables. Son rétablissement a été demandé, en vain, par les Gilets jaunes.

    – Mise en place d’un #prélèvement_forfaitaire_unique à 30% (ou #flat_tax) qui est venu réduire considérablement l’#imposition_du_capital. En effet, les plus riches étaient taxés de façon bien supérieure (jusqu’à 45%) et désormais tout le monde paye le même taux sur ses #dividendes, plus-values de cession de valeurs mobilières, l’#assurance-vie… Comment s’étonner dès lors que selon le ministère des #Finances, 44% de cette baisse ait profité aux 1% les plus riches ?

    Au total, la suppression de l’ISF et la mise en place de la flat tax rapportent 1,5 million d’euros par an à chacun des cent foyers les plus riches, toujours selon Bercy.

    Oui mais l’objectif était de pousser les riches à investir dans notre économie en les libérant du fardeau de nos impôts, non ? Objectif complètement raté, alors. #France_Stratégie, organisme gouvernemental rattaché au Premier ministre, a publié son rapport sur l’effet de ces deux mesures il y a un peu plus d’un mois : l’effet est nul. “L’observation des grandes variables économiques – croissance, investissement, flux de placements financiers des ménages, etc. – avant et après les réformes ne suffit pas pour conclure sur l’effet réel de ces #réformes”, estime le rapport. “Il ne sera pas possible d’estimer par ce seul moyen si la suppression de l’ISF a permis une réorientation de l’#épargne des contribuables concernés vers le financement des entreprises”. Bref, ces deux mesures fiscales ont été des cadeaux purs et simples pour les plus riches.

    2017-2024 : Dans la droite lignée de Hollande, Macron réduit l’imposition et les cotisations des #entreprises privées… sans rien demander en retour

    Retour en 2014 : #François_Hollande est président, #Arnaud_Montebourg ministre de l’Economie. En cœur, ils annoncent un vaste de plan de réduction d’impôts et de #cotisations_patronales pour les entreprises. Cela s’appelle « #pacte_de_responsabilité_et_de_solidarité » : en échange de ces #aides qui coûtent des milliards aux finances publiques, le #patronat doit créer des #emplois. C’est ce que le #MEDEF promet à l’époque, en défilant sur les plateaux télé avec un badge “#un_million_d’emploi”. Mais il ne signe aucun accord formel.

    Mise en œuvre par le nouveau ministre de l’Economie #Emmanuel_Macron, cette réforme réduit les “charges” des entreprises. Devenu président de la République, Macron fait voter à l’automne 2018, dans le budget de la sécurité sociale, la pérennisation de ce dispositif censé être limité dans le temps. Les entreprises ne payent désormais plus aucune #cotisation_patronale sur les bas salaires (coût : plus de 20 milliards d’euros par an). Leur #taux_d’imposition a été considérablement réduit (coût : 11,5 milliards d’euros par an). C’est une perte sèche pour le budget de l’Etat : en effet, la loi prévoit que les baisses de cotisations qui bénéficient à la #sécurité_sociale soient compensées par le budget de l’Etat. Autrement dit, ce que les entreprises privées ne payent plus, ce sont les contribuables qui le payent à leur place, ainsi que les usagers des services publics sur lesquels des économies ont été faites pour financer ces cadeaux.

    Au total, ces nombreux dispositifs visant à aider les entreprises représentent 200 milliards d’euros par an à notre charge. Ils sont donc, pour commencer, composés des réductions de cotisations patronales payées par les entreprises. C’est le cas de la #réduction_Fillon, mise en place sous #Nicolas_Sarkozy, qui exonère de cotisations patronales les salaires payés entre 1 et 1,6 SMIC. Vient ensuite la baisse pérenne de #cotisations_sociales, mise en place en 2019, qui exonère de cotisations jusqu’à 2,6 SMIC. Ensuite, il y a des #crédits_d’impôts comme le #Crédit_impôt_recherche (#CIR), mis en place dans les années 1980 puis sans cesse étendu et simplifié, qui donne des crédits d’impôt aux entreprises qui déclarent des dépenses de recherche et développement (quelles qu’elles soient), et enfin le #Pacte_de_responsabilité, donc. La dernière mesure en date est la suppression progressive de la #Cotisation_sur_la_valeur_ajoutée_des_entreprises (#CVAE), 4,3 milliards d’euros perdus chaque année. Chaque gouvernement, depuis le début des années 2000, a ajouté des dizaines de milliards d’euros transférés des ménages (les contribuables) vers les entreprises – mais c’est Macron qui en a fait le plus.

    « Nous estimons l’impact de la réforme sur l’#emploi, la #valeur_ajoutée et l’#investissement. Aucun impact n’est détecté sur ces variables. Les entreprises ayant fortement recours au CICE n’ont pas embauché plus, après 2019 que les entreprises ayant peu recours au CICE. »
    Rapport de l’Institut des Politiques Publiques, 2022

    Des #cadeaux, vraiment ? Ce genre de mesure ne vient-il pas renforcer la “#compétitivité” des entreprises françaises en réduisant le “#coût_du_travail” ? Et non : toutes les études, y compris ministérielles, sur les effets de ces 200 milliards d’euros annuels dépensés pour les #entreprises_privées montrent que les effets sont faibles, voire inexistants. En 2022, l’Institut des politiques publiques disait de la transformation du CICE en baisse pérenne de cotisations patronales : « Nous estimons l’#impact de la réforme sur l’emploi, la valeur ajoutée et l’investissement. Aucun impact n’est détecté sur ces variables. Les entreprises ayant fortement recours au CICE n’ont pas embauché plus, après 2019, que les entreprises ayant peu recours au CICE. »

    Le dernier gros rapport en date, celui de l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES), n’y va pas par quatre chemins : “L’#efficacité des #allègements du #coût_du_travail se trouve sans doute ailleurs : dans le soutien apporté aux marges des entreprises”, nous dit-il… et ces marges, les entreprises en font bien ce qu’elles veulent. Et ça n’a pas servi à créer de l’emploi, ni à relocaliser notre industrie, mais bien à augmenter les #dividendes des #actionnaires.

    Ces aides aux entreprises représentent 25% du budget de l’État dépensés chaque année – un montant supérieur au budget de l’Éducation nationale, et nous n’en voyons pas la couleur. Ils sont absorbés ailleurs. Et on appelle cela « l’économie de marché », « la loi du marché », « le capitalisme globalisé » ? La vérité, c’est que nous #subventionnions les entreprises privées à hauteur de 10 milliards d’euros par an en 1980, nous renseigne ce même rapport, contre au moins 200 milliards en 2024.

    2019 : la #prime_d’activité pour faire payer les contribuables à la place des actionnaires

    En décembre 2018, le mouvement des Gilets jaunes dévaste les beaux quartiers de Paris après avoir pris son envol sur les ronds-points partout dans le pays. Ce mouvement sans leader ni parti inquiète le gouvernement, Macron prépare même un hélicoptère pour pouvoir échapper à la foule en colère le 8 décembre.

    “On bosse mais on ne s’en sort pas” : les manifestants qui se sont d’abord mobilisés contre la tentative de hausse de la #taxe_sur_le_carburant ont fini par réclamer la fin des cadeaux pour les entreprises et le retour de l’ISF. Le gouvernement a finalement – pour la première fois depuis longtemps – cédé face au mouvement social, en renonçant à sa taxe injuste. Il a en outre proposé une amélioration des revenus des plus modestes.

    Pour cela, il n’a pas augmenté le #SMIC et ainsi mis à contribution le patronat et les actionnaires. Non, il a augmenté la prime d’activité, dispositif créé sous Hollande et qui permet aux salariés aux revenus modestes de bénéficier d’un complément de revenu versé par l’Etat, c’est-à-dire nous. Après les Gilets jaunes, les salariés au SMIC ont touché 90 euros de plus, ce qui n’est pas négligeable. Mais en refusant de faire contribuer le patronat, le gouvernement dépense chaque année 10 milliards d’euros pour compenser la faiblesse des salaires versés par les entreprises.

    2022 : le scandale #McKinsey révèle la ruine quotidienne de l’Etat au profit des copains

    Début 2022, peu avant la campagne présidentielle qui allait permettre la réélection de Macron avec l’aide de son joker Le Pen, on apprenait que l’Etat français aurait payé au moins 1 milliard d’euros par an à des #cabinets_de_conseil pour concevoir sa politique, en doublon de l’administration publique et pour des missions dont l’intérêt n’est pas facile à saisir (et le mot est faible). De l’argent public balancé par les fenêtres ? Oui, et principalement en faveur d’une entreprise, McKinsey, dont on a appris en mars de la même année qu’elle ne payait absolument aucun impôt en France. L’homme en charge de la passation de contrat de ce cabinet de conseil avec l’Etat n’est autre qu’un ami du président, #Karim_Tadjeddine, qui partage avec lui une vision de l’Etat « en mode start up ».

    En 2021, le poids croissant de ces consultants dans la gestion des affaires publiques ayant fait un peu de bruit, le groupe communiste au Sénat avait mis en place une commission d’enquête chargée de faire la lumière sur cette nouvelle tendance. Le rapport qui en a résulté est particulièrement riche car il se base sur des dizaines d’heures d’audition des principaux acteurs de l’affaire, des consultants eux-mêmes aux ministres qui ont fait appel à eux.

    On y apprend d’abord que les dépenses de cabinet de conseil ont doublé au cours du quinquennat, pour atteindre la somme d’un milliard d’euros en 2021. Pour comparaison, le budget annuel consacré à l’égalité femmes-hommes est de 50 millions d’euros. Donner de l’argent aux cabinets privés semble être la véritable « grande cause du quinquennat », à en croire le rapport, qui souligne le recours de plus en plus systématique à leurs services, majoritairement en doublons de compétences existantes dans l’administration publique. Les rapporteurs précisent que la somme d’un milliard d’euros annuelle est « une estimation minimale car les dépenses des opérateurs sont en réalité plus élevées. Si la commission d’enquête a interrogé ceux dont le budget était le plus important (Pôle emploi, Caisse des dépôts et consignations, etc.), l’échantillon ne représente que 10 % du total des opérateurs » (p.8). La somme d’un milliard d’euros est donc TRÈS sous-estimée.

    Pour quoi faire ? Parfois rien du tout : le rapport documente ainsi une facture de 496 800€ de McKinsey pour une mission de réflexion sur « l’avenir du métier d’enseignant » qui n’a pas abouti. Enfin si, ça a abouti à un rapport de deux cent pages qui enfonce des portes ouvertes – soit 2 480€ la page. Mais aussi 558 900€ pour le cabinet #Boston_Consulting_Group (#BCG pour les intimes), pour l’organisation d’une “#convention_des_managers_de_l’Etat”… qui n’a jamais eu lieu.

    Ce mois-ci, l’émission Cash Investigation est venue confirmer ce qui se dessinait il y a deux ans : oui, les consultants de McKinsey ont bien travaillé gratuitement pour le candidat Macron en 2017, ce qui explique pourquoi l’Etat a eu autant recours à leur service depuis son élection.

    On pourrait parler aussi de l’explosion du budget du palais de l’Elysée ou de la façon dont le ministre des Comptes publics Gérald Darmanin a aidé les propriétaires du Paris-St-Germain à éviter de payer des impôts lors du transfert de Neymar en 2017… Les exemples ne manquent pas pour montrer la façon dont Macron et ses sbires ont dilapidé notre argent.

    2023 : la barre d’un million d’apprentis donnés quasi gratuitement au patronat est franchie

    En 2018, la loi dite « #pour_la_liberté_de_choisir_son_avenir_professionnel » a permis de profonds changements alors qu’elle est passée, sur le moment, inaperçue. C’est parce que cette loi existe que le gouvernement a pu affaiblir brutalement l’#assurance-chômage. C’est cette loi qui a libéralisé la #formation_professionnelle et provoqué l’augmentation des arnaques pour les salariés en désir de reconversion. Et c’est cette loi qui a provoqué l’augmentation considérable du nombre d’apprentis en France. Les #apprentis sont des jeunes qui, pour obtenir un diplôme, se forment en #alternance, c’est-à-dire en travaillant pour une entreprise sensée les former et accompagnés par un organisme de formation. Entre 2017 et 2022, le nombre de nouveaux contrats d’#apprentissage signés est passé d’un peu plus de 320 000 à 837 000. En 2023, on aurait donc atteint le million.

    Cette augmentation a principalement été obtenue grâce à de la distribution d’argent public au patronat français : pour chaque contrat signé, la première année, les entreprises privées ont touché entre 5 000 et 8 000 euros d’aides à partir de 2020. Désormais, une aide unique de 6 000 euros leur est octroyée. Concrètement, et puisque la rémunération des apprentis est très basse, cela signifie qu’embaucher un apprenti de moins de 18 ans ne coûte pas un centime aux entreprises la première année : le contribuable paye tout à la place du patron. Sur ce site de promotion de l’apprentissage, on apprend ainsi que la dépense publique permet au patronat de dépenser un minimum pour rémunérer ses apprentis. Même la troisième année, cela coûte nettement moins cher que d’embaucher un salarié au SMIC. Il faut ajouter à ça le fait que les contrats d’apprentissage sont largement exonérés de cotisations patronales : concrètement, ça ne coûte quasi plus rien d’embaucher un apprenti.

    Nous ne sommes pas passés de 300 000 à un million d’apprentis en six ans simplement parce qu’un beau matin de nombreux patrons se sont découvert une vocation pédagogique. Toutes les études, notamment celle de la Cour des Comptes, montrent que c’est bien la prise en charge par l’Etat de l’apprentissage qui a provoqué un effet d’aubaine et incité les employeurs à recourir à cette main d’œuvre gratuite. Après tout, pourquoi s’en priver ?

    Et puisque les critères sont inexistants et que le seul encadrement provient d’organismes de formation souvent privés et peu scrupuleux (et cogérés par le patronat via les Chambres de commerce et d’industrie, dans le cas des CFA), les abus explosent. Selon une étude de l’Observatoire de l’alternance, un organisme patronal, 27% des alternants sondés déclarent ne pas avoir eu de tuteur pendant leur contrat de travail, ce qui est totalement illégal. Et seules 40% des entreprises sondées déclarent former leur tuteur. Une proportion qui chute à 28% dans le commerce. L’apprentissage n’est pas une chance pour la jeunesse. D’abord, c’est une nouvelle réserve de main d’œuvre gratuite ou à prix cassé pour le patronat. Ensuite c’est une main d’œuvre docile, que l’on forme à devenir les salariés soumis du futur. Des salariés qui n’auront pas pu choisir leur vie et dont la formation très spécialisée les enchaîne à un secteur professionnel.

    En 2024, le coût de l’apprentissage pourrait avoisiner les 25 milliards d’euros pour les contribuables ! Et pour quels effets durables ? Potentiellement catastrophiques, au point que l’OFCE parle, dans une étude récente, de “#bulle_de_l’apprentissage”. « Il y a beaucoup d’emplois artificiels, explique Bruno Coquet, économiste, au journal La Tribune. La Dares et l’OFCE avaient estimé leur nombre entre 200 000 et 250 000, il y a deux ans. Tous ces emplois pourraient disparaître. Certains emplois en apprentissage se sont substitués à des contrats en CDD ou CDI, car ils coûtaient moins cher. Ces effets de substitution ont été estimés à 200 000. »

    2025 : la contribution des grandes entreprises est écourtée

    Lors du budget préparé par #Michel_Barnier (éphémère Premier ministre du gouvernement putschiste de l’automne 2024) prévoyait un certain nombre de micro-reculs dans cette politique pro-actionnaires. Ce budget prévoyait la réduction des #aides_aux_entreprises dans le cadre de l’apprentissage et, dans sa version parvenue à l’après-dissolution, comportait un projet de surtaxe sur le bénéfice des grandes entreprises, pendant deux ans. Aussitôt annoncée, cette mesure a provoqué la colère de #Bernard_Arnault. Le patron de #LVMH n’a pas supporté cette mini-contribution au redressement des finances publiques et a rappelé à Macron son unique mandat : continuer de gaver les capitalistes. La surtaxe a donc été réduite à une seule année, comme l’a confirmé le ministre de l’Economie Eric Lombard ; le même jour, il annonçait la nécessité de trouver 40 milliards de plus en réduisant les dépenses publiques… Cet abandon va nous coûter 4 milliards d’euros, qui vont donc rester dans la poche des actionnaires. C’était évidemment insuffisant pour un rééquilibrage budgétaire mais cela ouvrait la porte au débat sur l’état et l’origine des recettes de l’État : elles sont de plus en plus faibles car Macron a pour mission d’exonérer les riches d’impôts.

    Une #dette creusée… contre nous

    Une dette importante, ce n’est pas un problème en soi, comme nous l’avons montré à plusieurs reprises. Ce qui est un problème, c’est que cette dette-là n’a servi à rien : elle n’est pas un #investissement dans l’avenir, elle est constituée de multiples cadeaux aux plus fortunés. Et ces cadeaux se sont révélés tout bonnement improductifs : ils ont servi à accumuler, pas à investir.

    Les preuves sont là : la fortune des 500 familles les plus riches de France a été multipliée par 3,1 en 10 ans. C’est normal : les dividendes ont régulièrement augmenté ces dernières années, pas tant parce que nos entreprises sont plus performantes que parce qu’elles sont beaucoup moins imposées et davantage aidées. Or, aucune de ces aides n’est conditionnée : les entreprises en font ce qu’elles veulent. Le patronat a visiblement décidé d’attribuer une bonne part de ces gains aux actionnaires. Or, 96 % des dividendes sont attribués à 1 % de l’ensemble des foyers fiscaux, selon France Stratégie.

    Ces gens enrichis vont-ils un jour investir et entretenir une saine croissance qui pourrait, à terme, bénéficier à nos emplois et nos salaires ? C’est que les macronistes ont affirmé pendant des années, sans le moindre effet. Désormais, ils ne prennent même plus la peine de nous le faire croire. Leur dictature bourgeoise n’a plus besoin de motifs. Le vol est de toute façon trop caractérisé.

    Pendant que quelques-uns accumulaient, l’état du reste de la société s’est considérablement dégradé. Tout le monde a pu constater le délabrement des services publics – ce patrimoine commun des moins fortunés. De façon encore plus nette, la pauvreté a augmenté ces dernières années. La crise inflationniste, dont nous avons montré à quel point elle profitait aux possédants, est venue augmenter cette tendance.

    Macron nous a bel et bien pillé. Début juillet, les électeurs ont décidé de lui retirer le pouvoir de continuer, en votant majoritairement NFP et RN. Qu’à cela ne tienne : avec son coup d’Etat, il a décidé de continuer ce #vol_en_bande_organisée… Jusqu’à ce que nous le stoppions par d’autres moyens.

    https://frustrationmagazine.fr/finances-publiques-ou-est-largent
    #France #pillage #à_lire

    signalé aussi par @monolecte
    https://seenthis.net/messages/1126878

  • #FramamIA. Comprendre l’IA pour la démystifier

    1. L’IA c’est #technique, donc #politique  !
    2. Mieux comprendre l’IA
    2.1 L’IA c’est quoi  ?
    2.2 Comment ça marche  ?
    2.3 Pas une IA mais des IA
    2.4 Les grandes familles d’IA
    3. Impacts d’une IA capitaliste
    3.1 L’IA, une #économie comme les autres  ?
    3.2 #Extractivisme, #pillage et #appropriation
    3.3 Une industrie écocide
    4. #Risques culturels et démocratiques
    4.1 Reconfiguration du monde du #travail
    4.2 Des bouleversements culturels
    4.3 #Confiscation des choix démocratiques
    5. Choix d’outil, choix de société
    5.1 Collectivement, exiger l’#éthique
    5.2 Individuellement, questionner l’acceptable
    5.3 L’expérimentation de #Framasoft  : #Lokas
    6. Pour aller plus loin

    https://framamia.org
    #IA #intelligence_artificielle #à_lire #démystification #mythe #démocratie #culture #écologie #impact_environnemental #inégalités #individualisme #auto-aliénation #Biais #deepfake #infopollution

    voir aussi :
    AI myths


    https://seenthis.net/messages/1103416

    • Petit manuel de #résistance aux introductions des IA dans une organisation

      De plus en plus d’organisations (entreprises, associations et services publics) ont déjà introduit les Intelligences Artificielles (IA) dans leur fonctionnement. Ou s’apprêtent à le faire. Pour diverses raisons :

      –pari sur l’optimisation de temps et la hausse de la performance
      – pari sur l’augmentation de la valeur
      – crainte de se faire déborder par la concurrence en termes « d’innovation »

      L’introduction des IA dans une organisation même réalisée de manière « raisonnée » ou « responsable » pose de nombreux problèmes. Il y a un effet cliquet : après l’introduction d’une nouvelle technologie, il est quasi-impossible de revenir en arrière. Au contraire, petit à petit, le terrain s’érode et les limites sont à chaque fois repoussées. Or, il est plus qu’urgent de résister le plus possible.

      1. Refuser les IA c’est éviter de détruire encore plus les conditions d’habitabilité de la Terre car l’empreinte environnementale et sociale directe c’est à dire le coût d’initialisation et de fonctionnement des IA est insoutenable.
      2. Résister aux IA c’est refuser leur insoutenable empreinte environnementale, sociale et sociétale indirecte c’est à dire l’accélération des processus, voire l’accélérationnisme technologique.
      3. Refuser les usages futiles ou réalisables autrement que par les IA. Mais pas de problème, nous Occidentaux avons ce privilège de nous accaparer les ressources et de réduire en esclavage les « petites mains » pour mettre en œuvre ces infrastructures et ces technologies.
      4. Résister aux IA, c’est refuser d’accentuer les biais qui existent dans nos sociétés. Ces biais, quoi qu’on en dise, sont difficilement corrigeables (car reflets de la société) à moins de tomber dans le ridicule (représenterait-on des jeunes blancs dans des banlieues / ghettos ?).
      5. Dire non à l’IA, c’est ne pas être complice du pillage des données privées voire de propriétés intellectuelles (cf. le pillage de l’œuvre des studios Ghibli)
      6. C’est refuser le coût réel des ces technologies supérieur aux prix actuels trop bas pour être vrai. Cela ne durera pas et il est difficile de croire que le couple optimisation et efficacité seront suffisants.
      7. C’est refuser un fort risque de dépendance à des algorithmes basés sur des technologies états-uniennes. Une dépendance à des entreprises complètement gangrenées par des idéologies de puissance, libertariennes et fascisantes. Utiliser des technologies dites « souveraines » ou open-source ne suffit pas compte tenu des autres points soulevés ici.
      8. C’est aussi éviter le risque de nuire à la réputation d’une organisation qui décide d’intégrer les IA malgré toute la littérature et l’actualité défavorables à l’IA. Un retour de bâton « no-IA » est en marche... On l’a vu avec les « startup packs » illustrés par les dessinateurs sans IA pour dénoncer la gabegie d’énergie et l’uniformisme des images générées.
      9. L’introduction des IA a complètement vidé le sens du travail notamment dans les services publics. Le travail est devenu morcelé, cloisonné, répétitif et déshumanisé. Il y a une perte de maitrise sur tout le « processus métier ». Pire, le service rendu au public s’est dégradé. Sans compter la privatisation ou la sous-traitance du travail au secteur privé, entraînant des suppressions de postes (peut-être était-ce l’objectif principal ?). De plus, on assiste à une gestion algorithmique de la population et à de nouvelles formes de discrimination des plus précaires.
      10. Enfin, résister à ces technologies, c’est refuser d’enrichir et rendre encore plus puissants les dominants.

      https://richardhanna.dev/blog/2025/resister-aux-introductions-des-ia.html
      #arguments #argumentaire

  • La #migration est un #fait_social_total

    Parti pris · Omniprésente dans le paysage audiovisuel et les discours politiques, la question de l’immigration est sans conteste l’#obsession du #complexe_politico-médiatique français. Mais les deux visions principales qui s’affrontent – à #droite et à #gauche – pêchent considérablement par #distorsion et #omissions et peinent à embrasser la #dimension_globale de ce fait social.

    Si l’entrée de l’immigration dans le #débat_public fut progressive, on peut considérer comme un premier tournant les #agressions_racistes de #1973 et leur #médiatisation. En effet, le sujet va gagner en #visibilité à partir de ces événements et de leurs conséquences politiques, bien avant, comme on peut le lire parfois, la percée du #Front_national, au milieu des années 1980, et son affrontement avec les mouvements antiracistes.

    L’occasion est alors donnée aux immigrés de se présenter à la société française et de raconter leurs #conditions_de_travail et de vie. C’est aussi une opportunité, pour la société française, de débattre d’un sujet qui ne quittera plus les champs médiatique et politique, au point d’éclipser toutes les autres préoccupations citoyennes et même de les absorber, puisque le traitement qui en est fait suggère insidieusement sa responsabilité dans tous les #problèmes_sociaux.

    Si l’on peut penser que la surreprésentation de la question de l’immigration est imputable aux exigences et aux intérêts propres au secteur des médias, au vu de l’appétence de ces derniers pour les polémiques, on est bien en peine de justifier son #omniprésence dans le #discours_politique qui en a fait un #enjeu_électoral majeur. Cette évolution du #débat, en ampleur et en intensité, s’est accompagnée d’une #polarisation de plus en plus marquée et de la résurgence d’un #racisme_décomplexé, qui dénonce l’immigration comme un #poids pour le pays d’accueil et n’est contré que par une #rhétorique utilitariste qui associe immigration et #bénéfices_économiques.

    « #Grand_remplacement », « #invasion_migratoire » et « #submersion_migratoire »

    Porté par la droite et l’#extrême_droite, mais pas seulement, ce discours raciste développe l’idée que l’immigration représente non seulement une #charge_sociale, mais aussi une #menace_identitaire et sécuritaire pour les Français. Les immigrés sont ici présentés comme des individus #indésirables et en surnombre – on parle de « grand remplacement », d’« invasion migratoire » et de « submersion migratoire » – qui menaceraient la #sécurité et l’#identité nationales. L’argumentaire principal mobilisé pour défendre cette thèse est l’#incompatibilité des caractéristiques culturelles et religieuses des populations immigrées avec les valeurs de la #République, avec une focalisation sur l’#islam. Ce discours prône ouvertement l’arrêt des flux migratoires et même la possibilité du retour dans le pays d’origine. Sauf que…

    Lorsqu’il s’agissait de répondre à un besoin de #main-d’œuvre et d’abaisser les #coûts_du_travail, la droite, de connivence avec le #patronat, était favorable à l’immigration, notamment dans les années 1960, lorsque les constructeurs automobiles et les patrons des mines recrutaient massivement dans les pays du Maghreb. Ou encore au début des années 2000, lorsque le discours gouvernemental a fait de « l’#immigration_choisie » un leitmotiv. Aujourd’hui encore, cette pratique est maintenue et « protégée » parce que voulue par les élites économiques, bien que décriée sur les plateaux télévisés.

    De l’autre côté du spectre politique, l’argument utilitaire est mobilisé pour défendre les populations immigrées. Il est de plus en plus porté par la gauche, qui aime à rappeler la contribution des étrangers pendant la Grande Guerre et la Seconde Guerre mondiale ainsi que dans les #mines, les #usines et sur les grands #chantiers portés par le développement de l’#industrialisation, et qui souligne aujourd’hui le rôle des #médecins_étrangers dans le maintien du système de #santé_publique. Discours utilitariste donc (qui s’appuie sur les résultats de recherches en sciences économiques et en démographie conduites notamment par l’OCDE, la Banque mondiale et le FMI) mais qui est présenté comme humaniste par ses tenants, qui mettent en avant la #solidarité avec les immigrés et défendent une politique de #régularisation des #sans-papiers.

    Justifier le jeu du #capitalisme

    Ce discours est apprécié par la population concernée et il est souvent et naïvement repris par elle, puisqu’elle y trouve une justification à sa présence, au point de faire son totem de cette phrase qu’on entend souvent dans les bouches d’immigrés : « On travaille. » Mais la gauche dénie ici le fait que l’importation de populations étrangères dévalue les #classes_populaires (son principal électorat), qui se sont d’ailleurs progressivement détournées d’elle. En effet, valoriser la #participation des immigrés revient à justifier le jeu du capitalisme, qui utilise la #concurrence entre travailleurs et l’importation de main-d’œuvre pour casser les grèves, baisser les #salaires et ne pas améliorer les conditions de travail.

    Autrement dit, lorsqu’une partie de la gauche renonce à sa position historique sur la #régulation de l’immigration, elle protège ce que #Karl_Marx qualifie de « secret grâce auquel la classe capitaliste maintient son #pouvoir ». Elle devient dès lors ce que le sociologue #Ramón_Grosfoguel appelle une #gauche_impérialiste, dans le sens où « elle construit un #projet_politique où elle ne demande qu’à améliorer sa situation à l’intérieur des murs [frontières], à l’intérieur des espaces impérialistes, sans les remettre en cause, sans problématiser la #domination que ce #système-monde exerce sur les habitants à l’extérieur des murs [frontières]… Elle ne remet pas en question les #structures_de_pouvoir qui produisent le #pillage et l’#appauvrissement de la grande majorité de la population mondiale, qui vit juste à l’extérieur des murs et est soumise aux formes les plus despotiques, les plus appauvries et les plus violentes de l’accumulation du capital ». Pire, dans une démarche paternaliste, elle appelle à renforcer l’#aide_publique_au_développement au lieu de militer pour la #désimpérialisation.

    Dans les deux discours présentés ci-dessus, il y a des omissions et des distorsions si considérables qu’elles altèrent complètement l’appréhension du sujet de l’immigration. Il s’agit également de discours prisonniers de leurs points de vue et de leurs antagonismes réciproques, jusqu’à donner parfois l’impression qu’ils se définissent non pas en fonction des besoins de la réalité et des idées qu’ils défendent mais bien en réaction l’un à l’autre. À cela s’ajoute le fait que l’immigré est systématiquement abordé comme #objet et non comme #sujet, ce qui contribue à normaliser une #pensée_impérialiste qui ne participe qu’à stigmatiser les populations immigrées et à les dépouiller de leur #agentivité.

    Les trois quarts des migrations africaines sont intracontinentales

    Il s’agit d’un double phénomène : émigration-immigration. Toute étude ou tout discours qui ferait l’économie de l’un se condamnerait à l’incompréhension de l’autre, car l’un et l’autre sont les deux faces d’une même pièce. On comprend donc qu’une réflexion sur les conséquences de l’#immigration dans les pays d’arrivée doit nécessairement et impérativement s’accompagner d’une réflexion sur les #causes de l’#émigration dans les pays de départ.

    Une mise en perspective plus large permettra donc de montrer que les migrations ne concernent pas seulement les pays occidentaux – il s’agit d’un phénomène mondial –, voire qu’ils ne sont concernés que dans une moindre mesure, puisque les trois quarts des migrations africaines, par exemple, sont intracontinentales. Cela permettra également de jeter la lumière sur les problèmes réels ou supposés qui poussent des personnes du Sud à affluer en masse vers le Nord (pauvreté, conflits armés, accroissement démographique…), ainsi que sur les problèmes réels ou supposés qui poussent l’Occident à recruter des étrangers (déclin démographique, pénurie de main-d’œuvre, déserts médicaux…).

    Cette approche, qu’on pourrait qualifier de globale, est cruciale, parce qu’elle permet de démontrer combien une réflexion intramuros est vouée à l’échec, la seule manière de comprendre et de gérer la question migratoire étant d’établir un dialogue bilatéral, qui implique non seulement les pays d’émigration et les pays d’immigration mais aussi les populations migrantes et les sociétés d’accueil.

    L’immigration en #France est liée à l’#histoire_coloniale

    Il est aussi nécessaire de prendre en considération le rôle de l’histoire coloniale (esclavage, mobilisation militaire forcée et recrutement de travailleurs dans les colonies) dans la création des schémas migratoires ainsi que les rapports de force qui existent entre pays anciennement colonisateurs et pays anciennement colonisés. En effet, l’histoire de l’immigration en France est fondamentalement liée à l’histoire coloniale qui l’a créée, ce qui implique que, pour comprendre les migrations aujourd’hui volontaires, il est essentiel de revenir sur les #migrations_forcées dans les anciennes colonies, puisqu’elles ont des trajectoires identiques mais surtout qu’elles obéissent d’abord et avant tout aux besoins des pays occidentaux.

    Qualifiée comme telle – parce que c’est ce qu’on veut voir en elle, ce qu’on aimerait qu’elle soit et qu’elle le demeure –, l’#immigration_de_travail est une expression qui porte en elle un refus : regarder l’immigré autrement que comme un agent au service du capital, un corps au service des possédants. Or l’immigré est une personne, qui vient avec son histoire, sa religion, sa langue, sa façon d’être au monde, ses représentations et ses croyances, bref sa #culture. Il vient également avec ses besoins et ses aspirations : se marier, se perpétuer et vivre auprès de sa famille. Pourtant, et alors que, comme l’écrit le sociologue et non moins émigré-immigré #Sayad_Abdelmalek, « la chose était prévisible dès le premier acte d’immigration », tout semble se réaliser, du moins dans un premier temps, dans une logique du #provisoire.

    Ce sont là les #illusions qui accompagnent le phénomène migratoire, très bien expliquées par Abdelmalek Sayad. « L’image de l’émigration comme “#rotation” continuelle exerce sur chacun un fort pouvoir de séduction : la société d’accueil a la conviction de pouvoir disposer éternellement de #travailleurs […] sans avoir pour autant à payer (ou fort peu) en problèmes sociaux ; la société d’origine croit pouvoir se procurer de la sorte et indéfiniment les ressources monétaires dont elle a besoin, sans qu’il résulte pour elle la moindre altération ; les émigrés sont persuadés de s’acquitter de leurs obligations à l’égard de leur groupe […] sans avoir pour cela le sentiment de se renier. »

    L’illusion du provisoire

    C’est cette triple fonction des illusions qui maintient la notion de provisoire et lui donne une place centrale dans les #imaginaires de chacun, malgré sa mise en défaut par la réalité. C’est-à-dire, même après que le turnover a été révolu, que les séjours de travail se sont allongés jusqu’à devenir quasi permanents (transformant radicalement les rapports aux groupes d’appartenance et au #pays_natal), que les profils et les trajectoires migratoires se sont complexifiés, et que l’immigration de travail s’est transformée en #immigration_familiale, puis en #immigration_de_peuplement. La notion de provisoire est une consolation pour l’émigré face à sa désertion, pour la société d’origine face à sa désintégration et pour la société d’accueil dans son rêve de purification.

    La #délocalisation d’une partie de la société vers un autre pays, comme l’entretien de relations sociales et affectives entre ceux qui partent vivre à l’étranger et ceux qui restent dans le pays natal, semble créer une route qui grandit en même temps que la communauté d’expatriés. L’existence d’une solidarité intracommunautaire semble également faciliter, quand elle ne l’encourage pas directement, le passage à l’acte. En effet, l’idée de trouver des compatriotes ou même des membres du cercle familial (qui peuvent aider financièrement et psychologiquement) rassure le candidat à l’émigration sur la faisabilité de son #projet_migratoire et elle atténue sa peur de la #solitude et de l’#isolement. C’est ce qui explique le fait qu’on retrouve dans des villes et des quartiers à fortes densités immigrantes toute une communauté d’immigrés souvent originaires d’une même région et ayant parfois des liens de parenté.

    Les coûts importants des procédures administratives pour les demandes de visa et le pourcentage très élevé de refus dans certains pays (plus de 50 % en Algérie) rendent la voie légale souvent inaccessible. Le recours à la #clandestinité devient une possibilité de dépasser ces #blocages. En effet, traverser la Méditerranée dans une embarcation et franchir la frontière illégalement est une option choisie par des milliers de personnes chaque année, malgré les #risques et malgré les actions de prévention et de lutte contre la migration illégale.

    Maintenir coûte que coûte une #hiérarchie_sociale

    Ce qu’on peut relever du débat tel qu’il se présente aujourd’hui autour de la migration, c’est qu’elle est posée comme problème pour certaines populations et pas pour d’autres. Par exemple, en France ou en Allemagne, les réfugiés syriens ou afghans ne sont pas perçus comme les réfugiés ukrainiens. Le #traitement_médiatique qui leur est réservé n’est pas le même, pas plus que les dispositions prises pour leur #accueil et leur #insertion.

    Cet exemple permet d’inscrire la question dans le tableau plus large de la migration des pays du Sud vers les pays du Nord. Cette migration a ses spécificités et ses problématiques propres et elle ne saurait être confondue avec les mobilités intra-européennes ou euro-australo-américaines, par exemple, qui ne sont pas source de tensions, les populations qui en sont issues étant considérées comme assimilables, sinon semblables. Il n’en a pas toujours été ainsi. On se souvient du racisme envers les Bretons à Paris, des Britanniques envers les Irlandais, des Français envers les Italiens, les Espagnols, les Portugais…

    Ainsi posée, c’est la question du #racisme qui émerge comme point nodal de la migration, considérée par les uns comme phénomène social et par les autres comme problème social. Cette discrimination, qui a longtemps trouvé sa justification dans la #théorie_des_races et l’#infériorité_biologique supposée des uns par rapport aux autres, est remplacée, depuis la Seconde Guerre mondiale, par un #racisme_culturel, c’est-à-dire par un ensemble de pratiques et de discours dans lesquels la culture de certains groupes sociaux (généralement racisés) est essentialisée et infériorisée, l’objectif étant toujours le même : maintenir coûte que coûte une hiérarchie sociale.

    Faire l’impasse sur le #système-monde

    Penser l’État-nation dans un contexte d’#interdépendance_internationale est une ineptie, tout comme l’est le fait de chercher à préserver les intérêts d’un État ou à établir un #ordre_national plus juste dans un monde ravagé par les injustices, où l’on assiste au pillage des richesses humaines et naturelles par des multinationales occidentales ; un monde où rien ne protège les plus démunis de la prédation des États les plus puissants, qui se maintiennent par une #force_de_travail bon marché et des #matières_premières bradées. En effet, dans ce marché international qu’est devenu le monde et qui est régi par les intérêts économiques du capital et ses injonctions, le racisme apparaît comme une condition essentielle pour conserver une main-d’œuvre privée de droits, une force de travail à bas coût, non seulement dans les périphéries mais aussi au cœur des puissances économiques.

    Le racisme fonctionne donc selon des besoins cycliques. D’une part, il permet d’offrir des compétences à la demande et une main-d’œuvre bon marché dans les périodes de croissance, et, d’autre part, il permet d’exclure certaines populations du marché du travail dans les périodes de crise. Pour que cette mécanique puisse se perpétuer, les discriminations doivent persister, les frontières se renforcer et les populations « déplaçables » se résigner à leur #instrumentalisation. C’est ainsi que la splendide forteresse (le #centre) se protège contre les populations issues des #périphéries. C’est à ces conditions que peut se maintenir indéfiniment cet #ordre inique à l’échelle mondiale et c’est à ce niveau que doit s’inscrire la lutte pour la #justice_sociale.

    Ainsi déployée, la question migratoire déborde complètement celle des attitudes individuelles ou collectives vis-à-vis des immigrés, tout comme elle ne saurait être attribuée aux seuls faits politique ou économique, puisqu’elle est un fait social total, et que toute tentative de la saisir par un seul bout est vouée à l’échec. Il faut donc réinventer le débat, lui donner l’ampleur qu’il mérite et mettre à jour le lien direct qui lie les migrations avec les #guerres menées en Afrique et au Moyen-Orient, avec l’#extractivisme effréné et l’#exploitation irresponsable des #ressources des pays du Sud. Ce faisant, la question migratoire reprendra la place qui est la sienne au cœur de la lutte anti-impérialiste.

    https://afriquexxi.info/Migration-fait-social-total
    #utilitarisme #humanitarisme #paternalisme #diaspora #approche_globale #voies_légales #Etat-nation #nationalisme #nationalisme_méthodologique #périphérie #anti-impérialisme
    ping @reka @karine4 @_kg_ @isskein

  • #KURDISTAN. #Écocide sous la supervision de l’armée turque

    Alors que le pillage et la destruction de la nature du Kurdistan se poursuit, des milliers de tonnes d’#arbres coupés du #Mont_Gabar de la province kurde de #Sirnak sont transportés par camions à travers des points de contrôle de l’armée turque avant d’être vendus dans d’autres villes.

    Des centaines de milliers d’arbres ont été abattus en 2021 par la #Turkish_Petroleum_Corporation (#TPAO) sur le mont Gabar, à #Şirnex, sous couvert de recherches de pétrole. Des forêts sont également détruites par des explosions de dynamite dans la région où se déroulent les opérations d’abattage. La région kurde, interdite à la population depuis les années 1990, est en proie à un véritable #pillage de la nature. La #montagne est criblée de trous dus à la construction de routes, de fortifications et de tours militaires. L’abattage des arbres dans la région est effectué avec l’approbation et la supervision de la Direction provinciale des forêts et des responsables militaires, et les gardes villageois sont connus pour perpétrer ce massacre.

    Des arbres transportés par camion depuis la montagne Gabar ont été filmés alors qu’ils franchissaient le poste de contrôle de la gendarmerie du village de #Misuri, à #Cizîr. Les images montrent de nombreux camions chargés d’arbres franchissant le poste de contrôle sans encombre. Elles révèlent la collaboration des soldats, des gardes villageois et de la Direction provinciale des forêts dans la destruction de la nature. Elles révèlent également que les arbres abattus sont vendus sous le contrôle de la Direction provinciale des forêts de Şırnak et des soldats. Il a été signalé qu’au moins un camion chargé d’arbres est transporté de cette manière chaque jour vers des villes comme Riha (Urfa), Dîlok (Antep) et Semsûr (Adiyaman).

    La population kurde, qui protestait auparavant contre l’exploitation forestière pour des soi-disants « raisons de sécurité », a attiré l’attention sur le processus en cours, s’interrogeant : « Ils ne font plus cela pour des raisons de sécurité, mais pour le commerce. Ils nous empêchent d’entrer dans nos villages et sur nos terres sous prétexte de « sécurité », mais ils laissent entrer ceux qui pillent notre nature. Les autorités doivent trouver une solution à cette situation. De quel type de sécurité parlent-ils à Gabar ? Ils l’interdisent aux civils d’entrer pour piller notre nature. Certains responsables militaires affirment ne pas pouvoir contrôler les gardes villageois. Comment l’État pourrait-il ne pas les contrôler ? »

    Le Barreau de Şirnex et les ONG environnementales ont engagé à plusieurs reprises des poursuites judiciaires contre le pillage de la nature. Cependant, à ce jour, aucune mesure n’a été prise contre les responsables.

    https://kurdistan-au-feminin.fr/2025/07/25/kurdistan-ecocide-sous-la-supervision-de-larmee-turque
    #Turquie #Kurdistan_turc #forêt #déforestation #Sirnex #Cizir

  • Sénégal  : la féminisation des migrations vers l’Europe

    Traditionnellement, en Afrique de l’Ouest, la migration était essentiellement masculine. Mais depuis une vingtaine d’années, des femmes, de plus en plus nombreuses, embarquent au Sénégal dans des #pirogues à destination des Canaries ou tentent le voyage irrégulier vers l’Europe via le Maroc ou la Tunisie. Qu’est-ce qui les pousse à braver la mer, le désert, les violences liées à l’exil et à risquer leur vie ? La misère et le rêve d’une vie meilleure ? Des atteintes aux droits humains liées au genre et la quête de l’égalité ? Le désir de rejoindre leur mari en Europe ou des pressions familiales ? Un reportage pour mieux comprendre pourquoi les femmes sont désormais en première ligne dans le processus migratoire. Et quelles en sont les conséquences pour la société de départ, notamment en termes d’#impact sur le statut de la femme et les rapports de #genre.

    Place de la mosquée à Bargny, un village de pêcheurs englué dans la banlieue industrielle de Dakar. Bedy Mbow, journaliste à la radio communautaire Jokkoo FM, et moi avons rendez-vous avec des mareyeuses (femmes vendeuses ou transformatrices de poisson). Avant d’entamer la discussion, Ndeye Yacine Dieng, conseillère municipale à Bargny et présidente d’AVEC, l’Association pour la valorisation de l’environnement et des côtes, tient à nous montrer les dégâts causés par l’avancée de la mer. Elle nous emmène à quelques dizaines de mètres de là, dans le quartier qui borde la plage. «  Vous voyez cette maison  ? Elle comptait deux pièces de plus, mais elles ont été emportées par la mer. Aujourd’hui, dix personnes vivent dans la seule chambre qui reste.  » Devant le bâtiment éventré, les habitant·es ont placé des pneus de camions et quelques sacs de sable, dérisoire protection contre les dents de la mer. «  Le maire avait attribué 1.433 parcelles de terrain aux victimes de l’érosion côtière, pour qu’elles puissent y reconstruire leur maison. Mais en 2008, cette zone a été déclarée d’utilité publique et vendue à un promoteur pour y installer une centrale électrique au charbon  », déplore-t-elle. Depuis, aucune solution n’a été mise en œuvre pour reloger les personnes sinistrées.

    Le pillage des ressources par des bateaux de pêche étrangers

    Outre la montée du niveau de la mer, la crise de la pêche est un autre problème qui se pose avec acuité. «  Dès les années 1950, le Sénégal a mené des programmes de développement de la pêche artisanale  : motorisation des pirogues, sennes tournantes et coulissantes [grands filets utilisés pour encercler et capturer les poissons, ndlr], introduction de pirogues en fibres de verre, etc. Mais ces améliorations technologiques ont provoqué une surcapacité de pêche qui a participé à épuiser la ressource halieutique [poissons, crustacés, mollusques…, ndlr]«  , explique Moussa Mbengue, Secrétaire exécutif de l’ADEPA, l’Association Ouest Africaine pour le développement de la pêche artisanale.

    Parmi les autres causes de cette crise, il faut citer les pratiques de pêche non durables (comme la capture de poissons juvéniles n’ayant pas atteint la taille marchande) et la multiplication des usines de farine et d’huile de poisson qui accaparent une grande part de la ressource. Ainsi, «  il faut 5 kg de poisson frais pour obtenir un kilo de farine  », précise Moussa Mbengue. Et ce produit sera ensuite exporté vers l’Europe et l’Asie pour y nourrir des poissons d’élevage. Au détriment de la population sénégalaise qui paie de plus en plus cher le poisson dont elle s’alimente.

    Le pillage des ressources halieutiques par des bateaux étrangers vient considérablement aggraver le phénomène. Ceux-ci se cachent sous pavillon sénégalais, grâce à des sociétés mixtes de droit sénégalais détenues à 51 % par des nationaux. Ainsi, au moins 46 bateaux chinois pêcheraient actuellement dans les eaux territoriales sénégalaises sous pavillon local. Une enquête menée par la plateforme de journalisme d’investigation Follow the Money a par ailleurs révélé qu’«  au moins un cinquième des 132 chalutiers de pêche industrielle battant pavillon sénégalais appartiennent à des coentreprises dont les sociétés mères sont basées dans l’Union européenne  », essentiellement en Espagne et en France.

    La pêche artisanale ne rapporte plus

    Tous ces facteurs ont contribué à une sévère diminution des stocks de poissons accessibles pour la pêche artisanale. «  Nos maris dépensent beaucoup d’argent pour aller en mer et rentrent souvent bredouilles. La pêche et la transformation du poisson ne sont plus des activités rentables  », soupire une mareyeuse. Les femmes ont toujours joué un grand rôle dans la commercialisation du poisson frais. Ce sont elles aussi qui s’occupent de sa transformation  : elles le braisent, y ajoutent du sel et le font sécher, une technique qui permet aux habitant·es des régions enclavées du Sénégal d’avoir accès aux produits de la mer.

    Au nombre de 45.000 environ dans le pays, selon le Réseau des femmes de la pêche artisanale (REFEPAS), les transformatrices de poisson sont aujourd’hui en grande difficulté. «  La raréfaction des ressources halieutiques est telle qu’il n’y a plus que très peu de matière première à transformer  », explique Fatou Ndoye, sociologue et coordinatrice de l’association Suxali Jigeen («  l’autonomisation de la femme  »).

    L’organisation d’analyse de données IDinsight a mené en 2023 une enquête auprès de femmes qui travaillent dans le secteur de la pêche artisanale. Plus de deux tiers d’entre elles déclarent avoir observé une diminution de leurs revenus au cours des cinq dernières années.
    Or, 85 % de ces femmes prennent en charge totalement ou partiellement les frais d’éducation et de santé des enfants. Elles participent aussi aux autres dépenses du foyer, que ce soit l’alimentation, les factures d’eau et d’électricité ou les dépenses liées à la vie sociale, selon cette même étude.

    En raison du mal-développement économique, mais aussi de la polygamie, les hommes ne sont plus en capacité de faire face seuls aux besoins courants des ménages. Selon le Recensement général de la population de 2023, 47,4 % des femmes mariées vivaient en union polygamique. Dans ce contexte, l’apport économique des femmes est devenu indispensable pour de nombreux foyers. Une situation qui pousse certaines d’entre elles à migrer, de manière légale ou non, dans l’espoir d’arriver à mieux subvenir à leurs besoins et à ceux de la famille.

    «  Il n’y a plus d’avenir ici, témoigne Yaye Fatou Djiguel, 34 ans et 5 enfants, qui a déjà tenté à deux reprises de gagner les Canaries en pirogue. Avant, c’étaient les hommes qui partaient. Mais aujourd’hui, tout le monde embarque, sans distinction d’âge ni de sexe. On voit même des femmes enceintes et des bébés dans les pirogues, parce qu’il n’y a plus de travail et que la mer avale nos maisons  » (voir son portrait dans notre n° 264). Autour de nous, les femmes qui ont tenté la traversée disent avoir payé entre 300.000 et 500.000 francs CFA au passeur, soit entre 458 et 763 euros (ce qui représente entre 4 et 7 mois du salaire féminin moyen, d’après des chiffres de l’ANSD, l’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie).

    «  Le nombre de femmes qui migrent seules va croissant  »

    La mobilité féminine internationale a beaucoup évolué. Durant les années 1970-1980, les Sénégalaises voyageaient le plus souvent de manière légale et majoritairement pour deux raisons  : rejoindre leur conjoint déjà établi en Europe et nanti de papiers (regroupement familial) ou, ce qui était plus rare, poursuivre des études en Europe. Jusqu’en 1986, il est intéressant de s’en souvenir, les Sénégalais·es n’avaient pas besoin de visa pour voyager en France, un simple passeport suffisait.

    «  Ce n’est qu’en 2005 qu’on a remarqué, avec beaucoup de sidération, les premières femmes monter dans des pirogues pour un voyage irrégulier vers l’Espagne  », se souvient un contractuel du ministère des Pêches. Aujourd’hui, «  le nombre de femmes qui migrent seules va croissant  », note le Dr Daouda Dianka, géographe et auteur de l’étude «  Migrations féminines et évolution du rapport de genre en milieu sénégalais  », publiée en 2016 dans la Revue Canadienne de Géographie Tropicale. Selon lui, la mobilité de femmes actives et autonomes est en passe de devenir un phénomène de société au Sénégal.

    La principale raison de la féminisation des migrations est donc d’ordre économique. C’est la pauvreté et le manque de perspectives d’avenir qui poussent de nombreuses personnes à tout quitter et à risquer leur vie pour gagner l’Europe. «  Si les richesses ne vont pas vers les hommes, alors les hommes iront naturellement vers les richesses  », aurait averti l’économiste et démographe français Alfred Sauvy dès 1974.
    «  Les jeunes peinent à trouver un emploi  »

    L’inégale répartition des richesses et l’iniquité des relations internationales jouent un rôle majeur en matière de flux migratoires. Si la responsabilité – historique et actuelle – des pays de destination est indéniable, celle des pays de départ est bien réelle aussi. La corruption, les détournements de fonds et la gabegie dans la gestion des affaires de l’État n’ont pas permis au Sénégal de mettre en œuvre des politiques économiques et de l’emploi adéquates, qui auraient favorisé un réel développement et sorti le pays de l’économie informelle dans laquelle il stagne depuis des décennies. 49,6 % de la population active travaille en effet dans le secteur informel, nous apprend le Recensement général de la population de 2023. «  Même diplômés, la plupart des jeunes peinent à trouver un emploi dans l’économie formelle, quels que soient les secteurs concernés  », souligne Fatou Ndoye. «  Près de la moitié des individus ayant suivi une formation formelle ne sont pas occupés  », confirme le recensement.

    Toutefois, pour les personnes qui arrivent de manière irrégulière en Belgique, la fuite de la pauvreté et le désir d’une vie meilleure ne seront pas considérés comme des motifs valables, pouvant conduire à une régularisation. Sauf exception.

    Par ailleurs, au Sénégal, à part l’avortement qui est passible de prison (nous avions publié l’an dernier un reportage à ce sujet) et le mariage forcé, les atteintes aux droits humains pour des motifs liés au genre sont moins fréquentes que dans certains pays voisins. En Guinée, par exemple, l’excision affecte 95 % des jeunes filles et des femmes âgées de 15 à 49 ans, contre 25 % au Sénégal, selon un rapport de l’UNICEF datant de 2024.

    Un certain nombre de migrantes économiques devront dès lors évoquer une histoire de persécution pour tenter d’obtenir le statut de réfugiée ou de protection subsidiaire leur permettant de rester en Belgique en toute légalité. Le mensonge devient alors une des stratégies de contournement de politiques migratoires restrictives. Tout le monde le sait, mais l’hypocrisie continue, plongeant ces migrantes dans un profond désarroi. Car rester dans un centre «  d’accueil  », durant plusieurs années parfois, en partageant une chambre avec 4, 5 ou même 7 personnes que l’on ne connaît pas, est une situation peu enviable. Surtout si on y ajoute le stress considérable provoqué par l’incertitude face à l’avenir  : recevront-elles la précieuse carte A, donnant droit à un séjour de 5 ans ou au contraire un ordre de quitter le territoire  ? On comprend les cauchemars et les angoisses qui les assaillent nuit et jour  ! En 2024, 70 Sénégalaises ont introduit une demande de protection en Belgique. Et 15 ont obtenu le statut de réfugiée, selon des chiffres fournis par l’Office des étrangers.
    Migrer pour s’émanciper

    Le désir d’émancipation constitue un autre facteur qui les pousse à émigrer. «  Les femmes d’Afrique centrale et de l’Ouest sont de plus en plus nombreuses à rechercher l’égalité à travers la migration  », notait l’OIM, l’Organisation internationale pour les migrations, en 2020. Elles la perçoivent comme une occasion d’échapper aux structures sociales patriarcales, souvent pesantes, qui les maintiennent dans un statut de femmes au foyer, limitant leur horizon aux tâches domestiques et aux soins aux enfants. Sans voix au chapitre dans les décisions concernant la famille. Se soustraire aux pressions sociales et aux attentes liées au genre et chercher à s’accomplir en tant qu’individu est devenu une motivation importante pour de nombreuses jeunes femmes.

    À 27 ans, divorcée et mère d’un enfant, Khadiatou (prénom d’emprunt) a pris le bateau pour l’Espagne, puis le bus pour la Belgique, où vit une de ses amies. «  La famille voulait me faire épouser un cousin plus âgé que moi, qui avait déjà une autre femme en France, m’explique-t-elle. Moi, je voulais juste fuir toutes ces pressions et vivre ma vie comme je l’entends.  »

    La décision de migrer reste toutefois souvent une stratégie collective, dans laquelle les mères jouent un rôle prépondérant d’incitatrices. Ce sont elles qui, fréquemment, poussent leur fils ou leur fille à partir à l’étranger et financent leur voyage en vendant leurs bijoux. Elles agissent ainsi «  dans l’espoir que leur investissement sera rentable  » et parce qu’elles pensent qu’avoir un·e enfant émigré·e est un signe de réussite sociale, précise le Dr Babacar Ndione, expert en migrations, co-auteur avec Fatou Binetou Dial d’une étude intitulée «  Rôle et place de la femme dans les dynamiques migratoires internationales au Sénégal  » (CODESRIA, 2021). Dans les familles polygames, «  c’est sur fond de rivalité entre coépouses que certaines mères encouragent leur enfant à partir  », car le père «  est souvent plus proche de l’épouse dont les enfants ont le mieux réussi  », ajoute-t-il. Même lorsqu’elles ne voyagent pas, les femmes jouent donc un rôle essentiel dans la mobilité internationale de membres de la famille.

    Miroir aux alouettes ou poule aux œufs d’or  ?

    Le mythe de l’eldorado, soigneusement entretenu par nombre de migrant·es, constitue lui aussi un facteur important d’émigration. Lorsque ces personnes sont victimes d’exploitation en Europe, où elles vivent souvent elles-mêmes dans la pauvreté, elles cachent cette situation à la famille restée au pays, en se saignant parfois aux quatre veines pour leur envoyer de l’argent. Et lorsque celles qui auront obtenu des papiers reviendront au pays pour les vacances, elles feront étalage d’argent et submergeront leurs proches de cadeaux pour témoigner de leur réussite. «  Les migrants ne racontent jamais la réalité de leur vie  », constate Gilles Cressan, économiste et représentant au Sénégal de l’ONG belge Échos communication.

    La construction du mythe commence souvent dès les premiers pas sur le territoire européen. À peine arrivée à Paris, avant même de déposer sa demande de protection internationale, Zeinabou (prénom d’emprunt) a pris des selfies devant la Tour Eiffel, habillée à la dernière mode, et les a envoyés à toutes ses amies et cousines. Beaucoup se sont dès lors mises à rêver de partir à leur tour, me confie une de ses sœurs. Au Sénégal, tous·tes les jeunes vous raconteront l’histoire de migrant·es qui ont réussi, ont payé une maison à leur maman et envoient régulièrement de l’argent à leurs proches.

    «  Culturellement et socialement, le fait d’aider sa famille est considéré comme un honneur dans la société sénégalaise  », souligne Babacar Ndione. Mais la pression sociale pour aider la famille est immense. Vécue de manière douloureuse par certain·es, elle pousse à la migration  : «  Si tu es dans la maison de tes parents et que tu ne gagnes pas d’argent, tu n’es pas considéré. Et tu préfères mourir que de vivre  », explique un jeune conducteur de taxi dakarois.
    La manne de la diaspora

    Globalement, l’argent envoyé par les émigré·es sénégalais·es représente une manne impressionnante  : «  Les montants des transferts de la diaspora sénégalaise ont pris une ampleur considérable au cours des dernières années. Leur volume est passé de 233 millions USD en 2000 à 925 millions en 2006, puis à 1.614 millions en 2013, pour atteindre 2.220 millions en 2017. La part de ces transferts dans le PIB du Sénégal est passée de 6 % en 2001 à 8,6 % en 2007 et à 13 % en 2017  », relève Babacar Ndione dans Migration au Sénégal. Profil national 2018 (OIM, 2018). «  Toutefois, l’apport des Sénégalais de l’extérieur dans l’investissement économique est relativement faible, souligne-t-il. En effet, l’essentiel des transferts de fonds effectués par les émigrés sont destinés à la consommation des ménages d’origine. Le souci majeur renvoie à la question de savoir comment orienter une part importante de ces envois de fonds vers l’investissement économiquement productif. Néanmoins, ces transferts contribuent de manière significative à la réduction de la pauvreté. Leur importance est vitale pour de nombreuses familles.  »

    On comprend dès lors le peu d’empressement des autorités sénégalaises à agir réellement pour lutter contre l’émigration illégale, malgré les accords passés avec l’UE pour «  endiguer le flux  » des migrant·es. Et en dépit de plusieurs accords bilatéraux, dont celui conclu entre la Belgique et le Sénégal en mai 2023, portant notamment sur le retour au pays des migrant·es en séjour irrégulier.

    Braver la mort, les violences sexuelles, l’endettement

    Parmi les conséquences des migrations, la plus dramatique est évidemment la disparition d’un·e membre de la famille, aggravée par le sentiment de culpabilité des mères lorsqu’elles ont poussé leur fils ou leur fille à entreprendre le voyage. En 2024, au moins 8.938 personnes sont mortes sur les routes migratoires à travers le monde, ce qui en fait l’année la plus meurtrière jamais enregistrée, selon l’OIM.

    Pour les femmes, le parcours vers l’Europe est encore plus risqué que pour les hommes, surtout si elles ont choisi une des routes passant par l’Afrique du Nord, puis la Méditerranée. Elles sont en effet particulièrement vulnérables à la violence, notamment sexuelle. Certaines se retrouveront à la merci de réseaux de traite des êtres humains et soumises au travail forcé ou à la prostitution.

    Par ailleurs, pour payer les frais du voyage, de nombreuses migrantes et leur famille s’endettent. Une situation qui compliquera leur réintégration économique et sociale si elles sont contraintes de rentrer au pays.

    Quel est l’impact de la féminisation des migrations sur le statut social des femmes  ?

    La mobilité internationale de femmes seules et actives a une influence réelle sur les relations de couple, les rapports de genre et l’autonomisation des femmes. Leur participation à la prise en charge des besoins de la famille a, en effet, modifié leur statut dans la société. Traditionnellement, ce rôle économique était dévolu à l’homme, qui est toujours de droit considéré comme chef de ménage. Aujourd’hui, sous l’effet de leur propre migration ou de celle du mari, les femmes ont vu croître leurs responsabilités et sont de plus en plus nombreuses à assumer ce rôle de fait. Selon le recensement général de la population de 2023, près d’un quart des ménages (24,5 %) sont dirigés par une femme, un chiffre en hausse de 2,1 % par rapport au recensement précédent, avec de fortes disparités entre milieu rural et urbain.

    Cette augmentation «  peut augurer l’amorce de mutations sociales profondes dans la place qu’occupent les femmes dans la société sénégalaise  », souligne le géographe Daouda Dianka. Et «  entraîner une renégociation du statut de la femme, maintenue dans des rôles secondaires par un pouvoir masculin relativement discriminant  », confirme Babacar Ndione.

    Le fait que les femmes migrantes soient devenues des soutiens incontournables pour les parents restés au pays a contribué à changer le regard porté sur elles par la société. Les familles se rendent à présent compte qu’il faut investir dans la scolarisation des filles, ce qui n’était guère fréquent auparavant.

    Mais la migration des femmes mariées est aussi source de difficultés dans le couple. Les hommes monogames restés au pays sont parfois dévalorisés, car «  considérés comme des maris dominés  », note Daouda Dianka. Quant aux enfants, elles/ils ne vivent pas toujours très bien le départ de leur maman, même s’il n’est pas inhabituel dans les sociétés sénégalaises de confier un·e enfant à sa grand-mère ou à une tante.

    Des sociétés vieillissantes qui se claquemurent

    Partout en Europe, à l’exception peut-être de l’Espagne, la tendance est au durcissement des politiques migratoires. En Belgique, il y a une volonté exprimée sans détour par Anneleen Van Bossuyt (N-VA), la ministre de l’Asile et de la Migration, de rendre la Belgique moins attrayante pour les demandeurs/euses d’asile. «  On veut donner le message que la Belgique n’est plus le pays de l’accueil généreux et sans conditions  », expliquait-elle au journal Le Soir lors de sa prise de fonction. «  L’accueil nous coûte chaque année un milliard d’euros, un coût que la société ne peut plus gérer. […] Il faut donc que ça change. Il nous faut des flux migratoires plus contrôlés. Voilà pourquoi on va mener la politique d’asile et de migration la plus stricte de l’histoire de ce pays.  »

    Une prise de position récusée par nombre de chercheurs et chercheuses qui soulignent que nos sociétés vieillissantes ont besoin de migrant·es. Dans un article intitulé «  Les effets économiques de l’immigration  », paru dans la revue Diplomatie en février-mars 2025, Ekrame Boubtane, chercheuse associée à l’École d’économie de Paris, notait que «  l’impact sur l’économie et les finances publiques de l’accueil des demandeurs d’asile ne se limite pas au coût budgétaire de la prise en charge immédiate. […] Dans les pays où le vieillissement démographique commence à produire ses effets, l’augmentation de la population en âge de travailler par rapport à la population dépendante a des effets positifs sur le PIB et sur les finances publiques.  »

    Les migrations sont un sujet complexe et polémique, au cœur des grands enjeux nationaux et internationaux. Elles touchent en effet à des thématiques particulièrement sensibles à propos desquelles l’opinion publique se divise  : les identités, le racisme, les cultures et les modes de vie, les inégalités, la mondialisation, le mal-développement, les violations des droits humains et le terrorisme. Elles font l’objet d’une instrumentalisation politique permanente dans laquelle la détresse des migrant·es est de moins en moins prise en compte.

    https://www.axellemag.be/senegal-la-feminisation-des-migrations-vers-leurope

    #féminisation #femmes #migrations #Sénégal #route_atlantique #femmes_migrantes #émancipation #pêche #pêche_artisanale #extractivisme #pillage_des_ressources #surpêche #endettement #dettes #VSS #violences_sexuelles #statut_social
    ping @6donie

  • « Je suis à peine de retour que me submerge déjà la tragédie de ce territoire assiégé » : l’historien Jean-Pierre Filiu raconte son séjour à Gaza
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/05/25/je-suis-a-peine-de-retour-a-gaza-que-me-submerge-deja-la-tragedie-de-ce-terr

    BONNES FEUILLES Dans son livre « Un historien à Gaza », à paraître mercredi 28 mai aux Arènes (224 pages, 19 euros), Jean-Pierre Filiu évoque son voyage de trente-deux jours, du 19 décembre 2024 au 21 janvier 2025, au sein du territoire palestinien. Un témoignage rare (...).

    https://archive.ph/swVhF

    • Gaza. Entre néant et chaos
      Pierre Prier > 29 mai 2025 > Orient XXI
      https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/gaza-entre-neant-et-chaos,8254

      « Des zones ravagées émergent de l’ombre… Un paysage dantesque, une litanie de ruines. » Les chauffeurs ne cachent pas leur soulagement quand « la zone des pillards est bientôt dépassée ».

      Ces pillards, l’auteur en fait bientôt l’expérience. Il leur consacre plusieurs pages dans un chapitre intitulé « Les vautours ». Réveillé le 4 janvier 2025 à 2 h 30 du matin par d’intenses échanges de tirs, « sur fond de clameurs et de hurlements », il comprendra qu’il a vécu un épisode récurrent de la bande de Gaza : un convoi humanitaire est tombé dans une embuscade tendue par un gang mafieux. Des quadricoptères israéliens, ces monstrueux petits drones armés qui terrorisent Gaza, font feu contre… les hommes qui tentent d’assurer la protection du convoi. Encouragés par ce soutien, les pillards intensifient leur assaut tandis que des habitants profitent de la confusion pour s’emparer d’une partie du butin. Bilan, selon l’ONU : 11 tués, cinq par l’armée israélienne et six dans des échanges de tirs entre Palestiniens. Cinquante camions pillés sur soixante-quatorze, « certaines marchandises se retrouvant sur le marché d’Al-Mawassi dès le lendemain ».

      Filiu fait ensuite le recensement des attaques de convois d’aide, systématiquement appuyées par les Israéliens, dans le but de préparer l’éviction des organisations de l’ONU de la bande de Gaza et d’y créer le chaos. Il s’appuie sur les données de l’ONU et aussi sur de nombreux témoignages. « Jamais on ne m’avait confié tant d’histoires de pillages, avec un tel luxe de détails sordides. »

      #pillage #pillards

  • Bilan du samedi 24 mai 2025 à Gaza : 52 morts alors que les bombardements israéliens se poursuivent à Gaza
    25 mai 2025 | - IMEMC News
    https://imemc.org/article/saturday-in-gaza-21-killed-before-dawn-as-israeli-bombardment-continues-in-ga

    Les bombardements israéliens sur Gaza se sont poursuivis sans interruption samedi, après la semaine la plus meurtrière pour les Palestiniens de Gaza depuis que l’armée israélienne a rompu le cessez-le-feu et repris les bombardements sur Gaza le 18 mars 2025.

    Mise à jour à 22 h 40 :
    Cinq Palestiniens ont été tués et plusieurs autres blessés samedi soir lors d’une frappe aérienne israélienne sur un magasin commercial à Deir al-Balah , dans le centre de la bande de Gaza. Le bilan dans l’enclave pour la seule journée de samedi s’élève désormais à 52 morts.

    Les correspondants de l’agence de presse Wafa ont rapporté que cinq citoyens palestiniens ont été tués et plusieurs autres blessés lors d’une frappe de drone israélien sur un magasin appartenant à la famille Abu Amra dans le quartier d’Al-Hakr à Deir al-Balah.

    (...) L’hôpital Al-Awda, dans le nord de Gaza, a rapporté que la zone entourant l’hôpital était le théâtre de tirs nourris des forces d’occupation israéliennes, menaçant la sécurité des patients et du personnel médical et exacerbant la situation humanitaire dans la région .

    Des hélicoptères israéliens ont également tiré sur différentes zones de Beit Lahia et du nord-est de Jabalia, au nord de la bande de Gaza, tandis que l’artillerie israélienne continuait de bombarder la région.

    Rahaf, une fillette palestinienne traumatisée, a vu sa grand-mère de 80 ans se faire tuer aujourd’hui lors d’une attaque israélienne contre leur maison au nord de Gaza. Elle a elle-même échappé de justesse à la mort, extraite des décombres alors que la poussière flottait encore dans l’air.
    En état de choc, elle exprime tranquillement ses souhaits : que le génocide israélien cesse, que la vie revienne à la normale et qu’elle puisse manger de la mélasse avant de se coucher, comme elle en avait l’habitude.
    https://imemc.org/wp-content/uploads/2025/05/video_2025-05-24_16-12-13.mp4?_=1

    Plus tôt, cinq civils, dont quatre femmes, ont été tués lorsque les forces d’occupation israéliennes ont bombardé la maison de la famille Al-Bayouk dans la ville d’Al-Fakhari, à l’est de Khan Yunis. Deux civils ont également été tués lors d’un raid de l’occupation dans la région d’ Al-Mawasi , à l’ouest de la ville.

    Les équipes d’ambulance et de secours ont récupéré le corps d’un martyr de la famille Al-Masry sous les décombres de leur maison, détruite par des frappes aériennes israéliennes dans la région de Jouret al-Lut, à Khan Yunis.

    Deux citoyens palestiniens ont été tués et deux autres blessés lors d’une frappe aérienne israélienne visant la maison de la famille Al-Araj dans le camp de Khan Yunis , tandis qu’une citoyenne est décédée des suites de ses blessures lors d’un précédent bombardement à l’ouest de Khan Yunis.

    Dans la ville de Gaza , quatre citoyens palestiniens ont été tués et d’autres blessés lorsque les forces d’occupation ont bombardé un groupe de citoyens dans le quartier d’Al-Tuffah, au nord-est de la ville. Quatre femmes, dont un enfant, ont également été tuées lors d’une deuxième frappe aérienne des forces d’occupation à proximité du carrefour Al-Sanafour dans le quartier.

    À Rafah , dans le sud de la bande de Gaza, sept civils ont été tués et plus de 60 autres blessés lors d’une frappe aérienne israélienne visant un rassemblement de civils à l’ouest de la ville.

    Samedi après-midi, un correspondant de l’agence de presse Wafa a rapporté que les forces d’occupation israéliennes avaient bombardé la zone de Bir al-Na’ja , dans le nord de la bande de Gaza, tuant deux civils et en blessant plusieurs autres.

    Depuis le 7 octobre 2023, l’occupation israélienne commet des crimes de génocide dans la bande de Gaza, faisant plus de 176 000 morts ou blessés parmi les civils, dont la plupart sont des enfants et des femmes, et plus de 11 000 disparus, sans compter les centaines de milliers de personnes déplacées.

    Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, le Dr Victoria Rose, une chirurgienne britannique bénévole à l’hôpital Nasser de Khan Younis, dans le nord de Gaza, a déclaré que la « salle des tentes », un ensemble de tentes abritant les patients en surnombre qui ne pouvaient pas être admis à l’hôpital, était désormais « complètement pleine ».

    11h29
    Au moins 10 Palestiniens ont été tués et des dizaines d’autres blessés samedi lors de bombardements israéliens sur Khan Yunis et Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.
    Des sources locales ont rapporté que des avions de combat israéliens ont bombardé la zone de Mawasi , dans la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, tuant au moins cinq civils et en blessant 50 autres.
    Les sources ont ajouté qu’un drone israélien a pris pour cible la maison de la famille Al-Sharif dans les environs de la ville d’Asdaa, au nord-ouest de Khan Yunis, tuant cinq citoyens.

    Des sources médicales ont rapporté que 21 Palestiniens ont été tués depuis l’aube samedi, à la suite des bombardements de l’occupation dans diverses zones de la bande de Gaza.

    Samedi également, le Programme alimentaire mondial (PAM) a confirmé que des pillards avaient saisi 15 de ses camions d’aide humanitaire dans le sud de Gaza pendant la nuit, après qu’Israël a tué six policiers qui escortaient le convoi.

    Selon le bureau des médias de Gaza et des témoins oculaires, une unité de police sécurisait les camions lorsqu’elle a rencontré un groupe de pillards. Alors que les policiers tentaient de mettre fin au chaos, des avions de combat israéliens ont frappé la zone avec plusieurs missiles, tuant six policiers et en blessant 20 autres. Le convoi se rendait à un entrepôt du PAM à Deir al-Balah.

    À la suite de la frappe aérienne et de la perte de sécurité, des pillards ont pris d’assaut les camions et volé l’aide humanitaire, a confirmé le PAM dans un communiqué officiel.

    #Bilan #Génocide #Pillage

    • Principaux événements du samedi 24 mai 2025, 23 h 56 BST | Middle East Eye
      https://www.middleeasteye.net/live-blog/live-blog-update/evening-recap-446

      • Le nombre de Palestiniens tués par les forces israéliennes à Gaza depuis octobre 2023 est passé à 53 901, a déclaré samedi le ministère palestinien de la Santé. Au moins 122 593 personnes ont été blessées depuis le début de la guerre, a-t-il ajouté.

      • Depuis l’aube samedi, 52 personnes ont été confirmées mortes dans l’enclave.

      • Une pédiatre palestinienne a reçu les corps calcinés de neuf de ses enfants alors qu’elle était de garde à l’hôpital après qu’une frappe israélienne a touché sa maison à Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza.

      • Les autorités de Gaza affirment qu’au moins 300 femmes enceintes ont fait une fausse couche alors que la famine sévit dans l’enclave assiégée.

      • Le Programme alimentaire mondial a averti que plus de 70 000 enfants à Gaza souffraient de malnutrition sévère, alors qu’Israël continue de bloquer la grande majorité des convois d’aide.

      • Le Hamas a déclaré que les témoignages de détenus palestiniens et de soldats israéliens dans un rapport d’information de l’Associated Press documentaient « les crimes odieux commis par » Israël.

      • Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Simon Harris, a fermement condamné les actions d’Israël à Gaza, déclarant qu’« il est clair que des crimes de guerre sont commis ».

      • Une vingtaine d’associations de journalistes en France, dont celles affiliées à France 24, Le Monde et Radio France Internationale, ont appelé Paris à évacuer les journalistes travaillant pour des médias français à Gaza.

      • Des colons israéliens ont endommagé des canalisations d’eau alimentant des familles palestiniennes dans la région de la cascade d’al-Auja, au nord de Jéricho, en Cisjordanie occupée.

  • Des trésors indonésiens restitués par les #Pays-Bas retrouvent leur terre d’origine

    L’Indonésie poursuit un processus de #rapatriement complet des œuvres culturelles pillées durant la période coloniale. À la mi-décembre, 828 #objets avaient été restitués par les Pays-Bas, selon l’Agence indonésienne du patrimoine.

    Au milieu du XIXe siècle, des fonctionnaires coloniaux néerlandais ont découvert une statue ancienne du dieu hindou Ganesh en Indonésie, qu’ils ont ensuite emportée vers les Pays-Bas, rejoignant ainsi de nombreux autres #objets_culturels pris pendant la période coloniale. Cette statue, en pierre volcanique et représentant Ganesh avec quatre bras et une tête d’éléphant, est aujourd’hui exposée au Musée national indonésien à Jakarta. L’Indonésie œuvre activement pour récupérer de tels trésors, qui font partie intégrante de son #patrimoine perdu sous le régime colonial néerlandais, qui a duré jusqu’à son indépendance en 1945.

    Cette #restitution fait partie d’un mouvement mondial pour rendre aux pays du Sud les biens culturels volés durant la période coloniale. En décembre 2023, les Pays-Bas ont restitué 828 objets à l’Indonésie, dont des sculptures hindoues et bouddhistes prises dans un temple du XIIIe siècle. Le gouvernement néerlandais a reconnu que ces objets n’auraient jamais dû quitter le pays et s’est engagé à les restituer, comme l’indiquait une recommandation de 2020. Ces restitutions sont rendues possibles grâce aux relations diplomatiques solides entre l’Indonésie et les Pays-Bas, renforcées par un accord culturel en 2017.

    Le retour de ces objets est perçu comme un effort pour restaurer l’#identité_culturelle de l’Indonésie et apaiser les tensions liées aux catastrophes naturelles fréquentes dans ce pays situé sur la « ceinture de feu » du Pacifique. Cependant, le débat reste ouvert sur la meilleure manière de conserver et d’exposer ces objets, avec des voix s’élevant pour leur restitution sur leur site d’origine ou pour leur présentation dans des musées qui respectent leur histoire et leur importance culturelle.

    Des milliers d’autres objets culturels pris durant la colonisation se trouvent encore à l’étranger, et des recherches supplémentaires sont nécessaires pour les rapatrier. Pour les Indonésiens, ces trésors représentent non seulement un retour à leur passé mais aussi un moyen de renforcer leur identité nationale et de redécouvrir l’histoire de leur patrimoine.

    https://elwatan-dz.com/des-tresors-indonesiens-restitues-par-les-pays-bas-retrouvent-leur-terre
    #restitution #biens_culturels #Indonésie #colonialisme #pillage #colonisation

    ping @reka @cede

  • Déjà entendu parler de ce « truc » ?

    https://datascientest.com/nightshade-tout-savoir

    Nightshade, développé par des chercheurs de l’université de Chicago, représente une avancée majeure dans la protection des droits des artistes à l’ère numérique. Cet outil innovant vise à sauvegarder la propriété intellectuelle des créateurs en altérant les pixels des images pour prévenir leur exploitation abusive par des intelligences artificielles génératives.

    (La consultation de cette page déclenche tout de même 45 alertes chez uBlock Origin) ...

    Sinon, il y aussi cette autre solution :

    https://glaze.cs.uchicago.edu/what-is-glaze.html

    Generative AI models have changed the way we create and consume content, particularly images and art. Diffusion models such as MidJourney and Stable Diffusion have been trained on large datasets of scraped images from online, many of which are copyrighted, private, or sensitive in subject matter. Many artists have discovered significant numbers of their art pieces in training data such as LAION-5B, without their knowledge, consent, credit or compensation.

    #IA #AI #protections_numériques #pillage (des œuvres) #dataset #machine_learning #apprentissage_machine

  • Tatiana Ventôse - « Les élites ont atomisé la classe ouvrière française »

    https://www.youtube.com/watch?v=d7HjQeyiexU

    Depuis 50 ans, la France s’endette, s’appauvrit, diluée dans une Union Européenne qui l’essore et une finance mondialisée qui la pille.
    Notre pays est de moins en moins souverain, de plus en plus dépendant des nations à qui elle a abandonné sa production.
    Mais nos producteurs existent toujours : ils sont dans la France périphérique, tandis que les élites logent dans des métropoles déconnectées du réél.
    Dans Il est venu le temps des producteurs (éditions du Fil d’Actu), la youtubeuse politique Tatiana Ventôse en appelle à leur réveil.

    #analyse #France #analyse #pillage #élites #ue #union_européenne #dette #économie #bruno_lemaire #bruno_lemaire

  • À #Genève, un musée met en débat la restitution d’œuvres

    Le musée d’ethnographie de Genève met au jour ses errements passés, dans une exposition stimulante consacrée au rôle joué par la ville suisse dans le monde colonial. Et envisage, sur un registre apaisé, la restitution de pans de sa collection.

    La manœuvre n’est pas si fréquente : à Genève, un vénérable musée a décidé de faire en grand son autocritique, et d’égratigner la légende de ses pères fondateurs. À travers l’exposition « Mémoires. Genève dans le monde colonial », le musée d’Ethnographie (MEG), inauguré en 1901, interroge ses collections sous le prisme colonial. Il pose aussi de manière subtile l’enjeu des restitutions, non sans écho avec le film de Mati Diop Dahomey, qui sort en salles mercredi 11 septembre.

    Sur le parcours conçu dans l’immense sous-sol sombre du musée, une vitrine est consacrée à l’un des glorieux donateurs de l’établissement, le peintre suisse Émile Chambon (1905-1993), qui avait amassé un millier de pièces d’Afrique et d’Océanie : il surgit dans un autoportrait de 1931, portant le casque et l’uniforme de son oncle, qui fut administrateur colonial en Afrique équatoriale française. C’est de cet oncle qu’il avait hérité les premiers artefacts africains de sa collection.

    Un artiste contemporain, Mathias Pfund, a inversé les bordures du cadre de cette peinture malaisante, l’un des cœurs malades de cette exposition : une discrète intervention, qui signale que quelque chose s’est déréglé. Face aux objets personnels de Chambon, qui traduisent sa fascination pour l’Afrique, ont été rassemblés, dans une autre vitrine, certains de ses dons au musée : des statues de cuivre ou de fer qui représentent des gardiens de reliquaires kotas, sur les territoires du Gabon et de la République du Congo.

    Lorsque des missionnaires ont arraché ces figures au XIXe siècle, ils se sont débarrassés, en les brûlant ou en les cachant en forêt, des corbeilles d’os qu’elles surveillaient. Depuis, le MEG les a exposées comme de simples statues africaines. Cette fois, le musée a sculpté de nouvelles urnes funéraires glissées au pied de leurs gardiens, avec l’aide de visiteurs réguliers du MEG d’origine kota, pour tenter de rendre à ces objets une forme d’intégrité.

    « Dans l’exposition, les objets n’illustrent pas les discours. Les propos historiques viennent étoffer, dans un deuxième temps, l’histoire de ces objets. C’est pourquoi il y a beaucoup de choses que nous ne disons pas, sur le colonialisme à Genève et en Suisse, parce que les objets de notre collection ne le racontent pas », précise la Française Floriane Morin, commissaire de l’exposition.
    Le colonialisme suisse

    La Suisse, puissance coloniale ? L’affirmation peut surprendre, en particulier depuis la France. Dans l’exposition, une carte interactive relaie les conclusions d’un rapport de 2022 sur « l’héritage raciste et colonial dans l’espace public genevois ». « L’État suisse n’a pas conquis de territoires ni administré directement de colonies, explique Fabio Rossinelli, l’un des historiens qui ont travaillé sur l’exposition, rattaché aux universités de Lausanne et de Genève. Mais des sociétés suisses se sont formées spontanément, en Égypte ou encore au Brésil, qui étaient reconnues par le corps consulaire, et entretenaient des relations avec Berne. »

    Il poursuit, soucieux de « ne pas dédouaner l’État de ses responsabilités » : « L’État était bien présent, mais plutôt un peu à l’arrière-plan, en cachette. Prenez la Société de géographie de Genève [fondée en 1858 – ndlr]. C’était une société privée. Des collaborations avec l’État avaient lieu, des subventions étaient au besoin octroyées. On voulait favoriser l’intégration du pays dans le monde impérial et colonial. » Beaucoup des missionnaires suisses partis à cette époque, soutenus par cette société, ont rapporté des objets qui constituent le socle des collections actuelles du MEG.

    Quant à l’implication de la Suisse dans la traite négrière, elle est, là encore, bien réelle. D’après l’historienne Béatrice Veyrassat, la participation suisse à la traite, d’une manière « active » (des commerçants suisses qui recourent à l’esclavage dans leurs plantations aux Amériques) ou « indirecte » (via des investissements dans des compagnies maritimes dotées de bateaux négriers) « est estimée entre 1 % et 2 % de l’ensemble des Africain·es déplacé·es vers les Amériques ».

    Avec Nantes, Genève fut aussi, à partir des années 1670, l’un des centres de production des « indiennes », ces tissus fabriqués à partir de coton importé des comptoirs d’Inde (les collections suisses d’indiennes sont accrochées au château de Prangins, on ne voit que des reproductions frustrantes dans l’exposition genevoise). Ces indiennes pouvaient servir de monnaie d’échange des Européens contre des êtres humains mis en esclavage dans les ports africains, lors du commerce triangulaire. En 1785, pas moins de 20 % de la population active à Genève travaille pour une dizaine d’« indienneries ».
    Objets éclatés

    À bien des endroits, l’exposition est coupante et inconfortable, en particulier lorsqu’elle revient de manière très précise sur le travail problématique des équipes passées du MEG. Alors que Genève organise une « exposition nationale suisse » en 1896, dotée en son sein d’un « village noir », dans la sinistre tradition des zoos humains, le MEG achète à l’époque 85 artefacts fabriqués par ces captifs africains, majoritairement venus du Sénégal et de Gambie. Mais les experts du musée gomment ensuite leur origine et les font passer pour des objets fabriqués en Afrique de l’Ouest.

    Autre silence complice : une sublime coiffure de femme faite de cuir et de fer, attribuée à une femme d’origine herero, rapportée de Namibie par un couple de collectionneurs en 1906. Au même moment se déroule, de 1904 à 1908, le génocide des Herero (et des Nama), premier génocide commis par l’Allemagne. « La datation de ces objets laisse peu de doutes quant au contexte génocidaire et d’extrêmes violences qui a rendu leur acquisition possible », tranche un cartel de l’exposition.

    Une vitrine montre encore un ustensile aux allures de fouet, utilisé pour repousser les mouches, dans le Ghana du XIXe siècle. Ce chasse-mouches, peut-être détenu par un roi, avait aussi valeur de talisman coranique. À une date inconnue, des employés du musée l’ont éventré pour lui retirer sa charge magique, constituée notamment d’une lame de couteau – disparue – et de cinq feuillets de prières, retrouvés des décennies plus tard dans un tiroir du musée. « Comment perdre l’intégrité d’un objet au musée ? », s’interroge un cartel.

    L’exposition revient aussi sur l’essor de l’anthropologie telle qu’elle est enseignée à Genève à partir de 1860, discipline qui s’est distinguée en justifiant l’impérialisme occidental et en décrétant la supériorité européenne. C’est le point d’ancrage morbide des premières collections d’objets amassées à Genève, qui, là encore, alimenteront les réserves du MEG. Dans les années 1920, Eugène Pittard, fondateur du musée, tire aussi profit du trafic de restes humains dans les colonies britanniques.
    « Ramatriement »

    Floriane Morin assume cette approche « incisive » vis-à-vis de l’histoire de son musée, « parce qu’elle est la seule condition à la possibilité d’une réparation ». Mais est-il encore possible de décoloniser un musée construit sur des mensonges aussi lourds ? Même si le MEG s’est doté d’un nouveau bâtiment en 2014, en forme de pirogue blanche spectaculaire et facile à reconnaître dans le paysage genevois, ne faudrait-il pas plutôt fermer ses portes à jamais ?

    L’un des espaces les plus originaux de l’exposition prouve en tout cas que le musée a encore des choses à dire, et des chantiers à mener. « Nous ne parviendrons pas à décoloniser notre musée, à redéfinir l’institution, sans engager des relations sur le temps long, avec des personnes qui sont le plus à même [originaires des pays et populations concernés – ndlr] de reconsidérer ces collections et de réfléchir à leur avenir », avance encore Floriane Morin.

    Cinq « capsules » ont été aménagées, comme autant de cocons qui posent la question de la restitution d’objets aux populations qui les réclament. Dans ces salles, des registres de paroles se mêlent – juridiques, historiques, administratifs, intimes, mais aussi depuis le Nord et les Suds –, pour restituer le dialogue entretenu au fil des décennies entre le MEG et des populations autochtones.

    Ici, des objets déjà restitués à une communauté autochtone du Canada – un « ramatriement » plutôt qu’un rapatriement, précise le cartel – sont représentés par de simples silhouettes de papier noir sur le mur. On prend des nouvelles de leur vie d’après, réintégrés à des cérémonies rituelles. Ailleurs, un réseau de huit musées suisses négocie directement avec le Nigeria, pour le retour de biens originaires de l’ancien royaume du Bénin.

    L’histoire de deux mâts-totems est sans doute la plus emblématique. Achetés en 1955 par un collectionneur suisse dans une ville du sud-est de l’Alaska, les deux immenses totems aux motifs d’oiseaux ont été plantés dans le jardin du musée suisse pendant trente-quatre ans. Stockés par la suite dans des entrepôts dans un souci de protection, ils ont été remplacés par des copies. Mais ils sont restés des emblèmes de ce quartier de Genève au fil des années. L’exposition donne la parole aux descendants du sculpteur de ces mâts, qui disent leur sensation de manque et l’importance qu’ils revêtent encore pour eux, mais décrit aussi l’attachement de générations de Genevois·es à ces objets aux pouvoirs manifestement actifs des deux côtés de l’Atlantique.

    « Il y a une histoire qui se crée après la restitution, insiste Floriane Morin. Les restitutions ne sont pas la fin de quelque chose. Rendre un objet n’est pas fermer la porte, mais entamer une nouvelle histoire avec des personnes qui nous font confiance, cela crée plein de choses, déclenche de nouveaux projets, et c’est aussi ce que nous avons voulu raconter dans cette exposition. »

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/100924/geneve-un-musee-met-en-debat-la-restitution-d-oeuvres

    #Suisse #Suisse_coloniale #colonialisme_suisse #MEG #exposition
    #oeuvres_d'art #art #décolonial #Afrique #pillage #musées #colonisation #Emile_Chambon #Océanie #héritage #Société_de_géographie_de_Genève #missionnaires #objets #traite_négrière #indiennes #tissus #industrie_textile #coton #esclavage #exposition_nationale_suisse #village_noir #zoo_humain #ramatriement #réparation #mensonges

    ping @reka @cede

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    ajouté à la métaliste sur le #colonialisme_suisse :
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  • #Biens_culturels en voie de #restitution

    Alors que sort en salle le #film_documentaire « #Dahomey », qui suit la restitution par la #France de vingt-six œuvres d’art au #Bénin, différentes équipes de recherche travaillent sur le retour des biens culturels africains à leurs communautés d’origine.

    Du fond de sa caisse en bois, dans laquelle les manutentionnaires aux gants blancs du musée du quai Branly-Jacques Chirac viennent de l’enfermer, la voix caverneuse de la statue anthropomorphe du roi Béhanzin, mi-homme mi-requin, s’interroge elle-même en langue fongbé, la langue du Bénin : « Reconnaîtrai-je quelque chose, me reconnaîtra-t-on ? » Aujourd’hui cette statue est un numéro, parmi les vingt-six œuvres que la France renvoie cette année-là (2021) par avion-cargo au pays qu’elle a colonisé de 1894 à 1958. La réalisatrice Mati Diop, née dans une famille franco-sénégalaise, est présente pour filmer cette première restitution officielle et accompagner les œuvres jusqu’au palais présidentiel de Cotonou, la capitale économique du pays, où des milliers de Béninois vont venir les découvrir, après cent trente ans d’absence.

    Le pillage a eu lieu en fait avant même la colonisation : de 1890 à 1892, des batailles font rage entre l’armée française et les troupes du roi Béhanzin, composées d’un tiers de combattantes, les « Agodjié », que les Français nomment « les Amazones ». Le 17 novembre 1892, sous les ordres du colonel Dodds, les Français entrent à Abomey, capitale de l’ancien royaume du Dahomey (actuel Bénin) où les palais royaux sont en feu : Béhanzin a déclenché l’incendie avant de prendre le maquis. Les militaires saisissent un grand nombre d’objets, dont trois grandes statues royales et quatre portes que Béhanzin et ses fidèles avaient enfouies dans le sol. Une petite partie sera donnée six mois plus tard, en 1893, au musée d’ethnographie du Trocadéro par le colonel Dodds, devenu général. Le reste sera écoulé sur le marché de l’art.
    Des appels à restitution depuis la fin du XIXe siècle

    La question de la restitution des œuvres aux pays africains, mais aussi aux autres anciennes colonies (Océanie notamment), n’est pas nouvelle. Les réclamations sont presque aussi anciennes que les spoliations elles-mêmes. L’une des premières demandes officielles émane sans doute de l’empereur Yohannes IV d’Éthiopie, lorsqu’il exige en 1880 la restitution de collections royales arrachées dans la forteresse de Maqdala en avril 1868. Ce joyau composé d’une coupole ornée des représentations des Apôtres et des quatre autres évangélistes, dérobé par un soldat britannique lors de l’attaque de la forteresse, trône toujours… au Victoria and Albert Museum, à Londres.

    Les appels à la restitution d’objets deviennent plus explicites au moment des indépendances, dans les années 1960. En 1970, l’Unesco adopte une convention qui établit notamment la légitimité du retour des biens culturels. En 1973, l’Assemblée générale des Nations unies adopte une résolution sur la restitution « prompte et gratuite » des œuvres d’art aux pays victimes d’expropriation, qui « autant qu’elle constitue une juste réparation du préjudice commis, est de nature à renforcer la coopération internationale ». Mais cette résolution est adoptée avec l’abstention des anciennes puissances coloniales… En 1978, le directeur général de l’Unesco lance un appel « pour le retour à ceux qui l’ont créé d’un patrimoine culturel irremplaçable » où il affirme avec force que « cette revendication est légitime ».

    « Mais, sur le terrain du droit, la colonisation a été qualifiée de “mission sacrée de civilisation” par le pacte de la Société des Nations en 1919 et aujourd’hui encore ne relève pas d’un fait internationalement illicite, en conséquence duquel pourrait être fixé un principe de réparation, rappelle le juriste Vincent Négri, à l’Institut des sciences sociales du politique1. La légalité internationale est ancrée sur une règle de non réactivité des traités internationaux, et aucune des conventions adoptées ne peut atteindre dans les rebours du temps les actes de dépossession des peuples pendant la période coloniale. »

    En France, c’est donc toujours le droit du patrimoine qui prévaut. En 2016, au gouvernement du Bénin qui réclamait la restitution, notamment du fait que « nos parents, nos enfants n’ont jamais vu ces biens culturels, ce qui constitue un handicap à une transmission transgénérationnelle harmonieuse de notre mémoire collective », le ministre des Affaires étrangères français adresse une fin de non-recevoir dans un pur langage administratif : « Les biens que vous évoquez sont inscrits parfois depuis plus d’un siècle au domaine public mobilier de l’État français, ils sont donc soumis aux principes d’inaliénabilité, d’imprescriptibilité et d’insaisissabilité. En conséquence leur restitution n’est pas possible ».

    Aux revendications argumentées sur l’histoire, l’identité, la reconstitution des patrimoines, la mémoire, est donc opposé un argument asymétrique fondé sur le droit des collections publiques, déplore Vincent Négri. Un argument qui jusqu’ici n’a été levé que dans trois cas : pour les biens spoliés aux familles juives pendant la Seconde Guerre mondiale, pour les restes humains quand ils peuvent être identifiés et pour les biens culturels ayant fait l’objet de trafics illicites.

    Dans ce contexte, le discours prononcé à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso, par le président français Emmanuel Macron le 28 novembre 2017 fait date. En affirmant vouloir la « restitution temporaire ou définitive du patrimoine africain d’ici cinq ans », il introduit au sommet de l’État une parole dissonante. S’ensuit la commande d’un rapport aux universitaires Bénédicte Savoy, historienne de l’art française et Felwine Sarr, économiste sénégalais, qui dressent un état des lieux des spoliations et proposent un agenda de restitution, affirmant que plusieurs types de biens culturels africains peuvent nécessiter une restitution légitime : « Les butins de guerre et missions punitives ; les collectes des missions ethnologiques et “raids” scientifiques financés par des institutions publiques ; les objets issus de telles opérations, passés en mains privées et donnés à des musées par des héritiers d’officiers ou de fonctionnaires coloniaux ; enfin les objets issus de trafics illicites après les indépendances » .
    Vingt-six biens restitués : le premier petit pas de la France

    Les marchands d’art et certains conservateurs de musées tremblent, le débat est réanimé (et houleux) dans tous les pays européens, mais la France, après ce grand pas en avant, fait marche arrière. Elle ne s’engage pas dans une loi-cadre mais vote, en 2020, une « loi d’exception » pour restituer vingt-six biens culturels à la République du Bénin (choisis par la France) et un unique bien à la République du Sénégal (le sabre dit « d’El Hadj Omar Tall », du nom du chef de guerre toucouleur disparu en 1864). Vingt-six seulement, sur les milliers conservés en France, c’est peu ! D’autant que les Béninois n’ont pas eu leur mot à dire sur le choix des objets restitués, malgré leurs demandes répétées de voir notamment revenir le dieu Gou, exposé au pavillon des Sessions, au Louvre. « Pour passer de la “légitimité du retour” à un principe universel de “légalité des restitutions”, il faudra encore attendre », commente Vincent Négri… Mais les mentalités évoluent et de nombreux programmes de recherche et réseaux émergent pour identifier, cartographier ou documenter les biens culturels africains détenus dans les musées occidentaux. En France, Claire Bosc-Tiessé, directrice de recherches au CNRS, historienne de l’art africain et spécialiste de l’Éthiopie chrétienne entre le XIIIe et le XVIIIe siècle, avait devancé le mouvement et demandé dès 2017 à être détachée à l’Institut national d’histoire de l’art pour se lancer dans un inventaire des collections africaines conservées dans les musées français.

    Avec la participation du musée d’Angoulême, la cartographie « Le monde en musée. Collections des objets d’Afrique et d’Océanie dans les musées français » est désormais accessible en ligne2. Outre l’inventaire, elle rassemble aussi « des éléments pour des recherches futures sur la constitution des collections et les processus d’acquisition, en indiquant les archives afférentes (inventaires anciens, carnets de voyage des acquéreurs, etc.) et en répertoriant, quand c’est possible, donateurs et vendeurs, explique Claire Bosc-Tiessé. En 2021, nous avons recensé près de 230 musées en France qui possèdent des objets africains et 129 des objets océaniens. Par exemple, on trouve des biens culturels du Bénin au musée du quai Branly, mais il y en a également dans soixante autres musées français ! »

    Au total, Claire Bosc-Tiessé estime à environ 150 000 le nombre de biens culturels africains dans les musées de France (à comparer aux 121 millions d’objets qu’ils détiennent), dont 70 000 sont au musée du quai Branly. Il suffit de glisser sa souris sur la carte de France pour tomber sur des trésors conservés , dans des lieux tout à fait confidentiels.

    Ces biens ne sont parfois même plus exposés, comme ceux conservés dans ce petit musée du Jura, à Poligny, (4 000 habitants), depuis longtemps fermé au public : pagaies de Polynésie, petit sac en filet de Nouvelle-Calédonie, collier en dents de mammifère marin des îles Marquises, ornement d’oreille masculin en ivoire (de cachalot ?, s’interroge la notice), lampe à huile à six becs d’Algérie, sont bien référencés sur le site internet de ces salles devenues virtuelles. Et ici comme ailleurs, c’est un véritable inventaire à la Prévert qui s’égrène, d’objets dont on ne sait s’ils ont été achetés ou volés, mais qui se retrouvent éparpillés aux quatre coins de la France.

    « Reconstituer l’histoire de ces objets, c’est raconter à la fois la colonisation et celle de la constitution des musées en France à la fin du XIXe siècle, explique Claire Bosc-Tiessé. Le musée d’ethnographie du Trocadéro (aujourd’hui musée de l’Homme) a envoyé dans les musées de province beaucoup de pièces qu’il possédait en double. Par ailleurs, les particuliers étaient souvent heureux, notamment à la fin de leur vie, de faire don au musée de leur ville natale des objets qu’ils avaient achetés, volés ou reçus en cadeau dans le cadre de leur vie professionnelle, qu’ils aient été missionnaires, médecins, enseignants, fonctionnaires ou militaires dans les colonies.

    À Allex, village de 2 500 habitants dans la Drôme, ce sont ainsi les missionnaires de la congrégation du Saint-Esprit qui, au XIXe siècle, ont rapporté de leurs campagnes d’évangélisation du Gabon, du Congo-Brazzaville et du Congo-Kinshasa quantité d’objets : amulettes ou effigies gardiennes de reliquaire du peuple fang au Gabon, statuettes anthropomorphes du peuple bembé au Congo, couvercle à proverbes du peuple hoyo en Angola… Tous ces biens culturels témoins de la vie quotidienne, des traditions et des croyances des populations africaines viennent de trouver place dans un musée local flambant neuf, ouvert en 2018. « Alors que le principe de la restitution semble faire l’unanimité en Afrique, la question du retour concret des biens suscite parfois des réticences dans les pays concernés », explique Saskia Cousin, anthropologue, responsable des programmes de recherche pluridisciplinaires ReTours3 et Matrimoines/Rematriation4, constitué chacun d’une vingtaine de chercheurs, artistes et opérateurs culturels internationaux.
    De la « restitution » au « retour »

    « La première réticence, alimentée par les marchands et les conservateurs occidentaux, consiste à dire que l’Afrique ne dispose pas d’institutions capables de conserver ses collections et de lutter contre le trafic illicite ». L’ouverture et la construction de musées un peu partout sur le continent sont autant de réponses à ces critiques. Rien qu’au Bénin, quatre musées sont en construction ! « Le deuxième problème soulevé est celui des coûts de ce retour, poursuit Saskia Cousin. Effectivement, la construction de musées se fait au moyen d’emprunts, contractés notamment auprès de la France. C’est la raison pour laquelle les pays concernés souhaitent développer le tourisme notamment de leurs diasporas. Le troisième problème est celui du devenir des biens. En bref, doivent-ils revenir au temple ou au musée ? C’est une question de souveraineté qui concernent les pays du retour, et surtout, les choses sont un peu plus compliquées que le laissent entendre les polémiques françaises ».

    D’une part, le retour aux espaces sacrés ne signifie pas l’interdiction au public ; d’autre part, la vision française d’un musée devant être vidé de toute vitalité et de toute sacralité est loin d’être universelle. « Ainsi, souligne Saskia Cousin, si les vingt-six objets restitués au Bénin l’ont été sous le titre de “Trésors royaux du Bénin”, expression empruntée au marché de l’art, et exposés sous vitrines, selon des critères bien occidentaux, de nombreux Béninois et notamment les princesses d’Abomey sont venus les honorer aux moyens de gestes et de chants ».

    Dans le film Dahomey, on voit l’artiste Didier Donatien Alihonou – sur l’affiche du film – converser avec le roi ancêtre Gbéhanzin. Pour lui, comme pour beaucoup, ces statues ne sont pas seulement des biens matériels, elles incarnent un héritage revenu, une force de retour, avec lesquelles il est enfin possible de se reconnecter. « Il faudrait cesser de penser cette question des retours seulement comme un arbitrage entre des pays qui formulent une demande de restitution et des États qui y répondent favorablement ou non, estime Claire Bosc-Tiessé. Il est d’ailleurs symptomatique que ce sujet au niveau gouvernemental soit confié au ministère de la Culture et à celui des Affaires étrangères, tandis que la recherche et l’enseignement sont laissés en dehors d’un débat rarement appréhendé sous l’angle scientifique. Il serait pourtant souhaitable de solliciter les chercheurs, afin de faire le récit de la façon dont ces œuvres sont arrivées sur le territoire, de la violence des captures peu prise en compte jusqu’ici, et donc écrire cette histoire occultée de la colonisation, et de le faire dans toute sa complexité. »

    Il serait temps aussi de déplacer la question de la « restitution » à celle du « retour », en prenant en compte le point de vue des populations et des États d’origine, complète Saskia Cousin. « Dans le cadre des programmes ReTours et Matrimoines/Rematriations, nous travaillons donc avec des chercheurs du Bénin, du Cameroun, du Mali, du Togo, du Sénégal et leurs diasporas, selon les méthodes inspirées de l’anthropologie collaborative. Par exemple dans le cas du Bénin, les mémoires sont essentiellement transmises par les “héritières”, des femmes qui héritent des savoirs, explique l’anthropologue. Nous les rencontrons et nous leurs présentons des photos ou des dessins de statues ou d’amulettes dont elles connaissent les noms, les usages et les panégyriques (discours à la louange de certaines personnes) associés. Dans les mondes féminins non francophones, cette mémoire est restée extrêmement vivante ».

    Dans le cadre du programme ReTours, une charte5 a été élaborée qui vise à considérer les musées et les espaces de conservation traditionnels comme complémentaires, légitimes et non exclusifs. L’enjeu est à la fois de faire reconnaître l’expertise des héritières et de faciliter l’accès des collègues du Sud aux ressources nécessaires à leurs enquêtes, y compris dans les pays du Nord : biens exposés, réserves, inventaires, dossiers d’œuvres, sources orales, etc. « Les musées belges, néerlandais et allemands sont très ouverts à l’accueil et à l’intégration des diasporas, des chercheurs et des héritiers concernés, c’est beaucoup plus compliqué en France où les musées veulent contrôler les récits relatifs à leurs collections », remarque Saskia Cousin.
    Un débat européen

    Outre la France, la question de la restitution anime tous les pays européens. Si en Angleterre le British Museum est le plus réticent, les musées universitaires de Cambridge, Oxford et Manchester ont rendu ou s’apprêtent à rendre des œuvres. En Belgique, un inventaire complet des objets d’art originaires du Congo, détenus par le musée de l’Afrique de Tervuren, a été réalisé. Et les Allemands ont largement entamé ce mouvement. Felicity Bodenstein, chercheuse en histoire de l’art au Centre André Chastel6, est à l’initiative du projet numérique « Digital Benin7 », qui documente les œuvres pillées dans l’ancien royaume du Bénin (actuel Nigeria, à ne pas confondre avec l’actuel Bénin, ancien Dahomey).

    À l’origine, ces œuvres ont été saisies par l’armée britannique lors d’une expédition punitive menée par 1 800 hommes en février 1897. À l’époque, les soldats prennent la capitale, Edo (aujourd’hui Benin City), au prix de lourdes pertes et mettent la main, de façon organisée ou individuelle, sur le trésor de l’Oba (le souverain).

    C’est ainsi que sont dispersés et en partie perdus plus de 5 000 « Bronzes du Bénin », dont des plaques en laiton fabriquées entre le milieu du XVIe et le milieu du XVIIe siècle. Représentant des individus, des symboles, des scènes de la cour, elles se retrouvent sur le marché de l’art puis en grande partie dispersées dans 136 musées de vingt pays, principalement en Angleterre et en Allemagne.

    À l’époque, contrairement à la France qui n’y consacrait que peu d’argent, les Allemands et les Anglais avaient une véritable politique d’achat de ce type d’objets pour leurs musées, explique Felicity Bodenstein. De plus, à la fin du XIXe siècle, chaque ville un peu importante en Allemagne créait son propre musée d’ethnographie, pour se montrer cosmopolite et ouverte sur le monde, notamment dans l’espoir de se voir désigner comme capitale de ce pays8. C’est ainsi que l’Allemagne s’est retrouvée avec dix fois plus d’objets africains que la France, qui fut pourtant présente bien plus longtemps sur ce continent avec ses colonies ». Le but du site web Digital Benin, réalisé par une équipe d’une douzaine de personnes, financé en partenariat avec le musée des Cultures et des Arts du monde de Hambourg et la fondation Siemens, est de relier les données de plus de 5 000 objets dont il fait l’inventaire et de les resituer dans une culture locale, de façon vivante, en mêlant archives visuelles et sonores, fixes et animées. Une partie du site, notamment la classification des objets, est en langue Edo, la langue vernaculaire du royaume dans lequel ils ont été élaborés puis pillés.

    Au-delà de ce site exemplaire, qu’en est-il de la politique de restitution des œuvres en Allemagne ? « La façon de procéder des Allemands est très différente de celle des français », explique Felicity Bodenstein, qui a commencé sa carrière de chercheuse dans ce pays, aux côtés de Bénédicte Savoy, à l’université technique de Berlin. « L’importance des collections qu’ils possèdent, mais aussi les questions très sensibles de mémoire liées à la Seconde Guerre mondiale font que le sujet des provenances est bien plus politique et inflammable en Allemagne qu’ailleurs en Europe ». En 2021, un accord national de restitution a donc été trouvé avec le Nigeria, à chaque musée ensuite d’élaborer son propre accord suivant les principes de l’État fédéral. Plusieurs centaines d’œuvres ont déjà été physiquement renvoyées par les musées au Nigeria.

    « Mais toutes les communautés d’origine, c’est du moins le cas pour le Bénin, ne souhaitent pas forcément récupérer toutes leurs œuvres, souligne l’anthropologue. Ils veulent surtout en retrouver la propriété et être associés au discours culturel et politique qui accompagne leur patrimoine. » Ainsi, lors des discussions pour l’ouverture au centre de la ville de Berlin du Humboldt Forum, immense musée qui prévoyait d’exposer une partie importante de cette collection de bronzes du Bénin, un débat très vif a permis de poser les bases d’une nouvelle façon de faire. L’espace d’exposition de ces objets est aujourd’hui cogéré avec les chercheurs et muséographes de Bénin City. Toutes les œuvres de Bénin City qui ont été identifiées ont d’abord été officiellement rendues au Nigeria qui les prête désormais à l’Allemagne, un écusson témoignant de ce processus étant apposé sur les vitrines d’exposition.

    En Allemagne toujours, une grande enquête collective, menée conjointement par l’université de Dschang et l’université technique de Berlin entre 2020 et 2023, intitulée « Provenances inversées9 », fait le point sur l’état du patrimoine camerounais pillé pendant la période coloniale : 40 000 objets qui font de l’Allemagne le premier pays détenteur d’œuvres camerounaises au monde ! « Il existe dans l’Allemagne contemporaine un “Cameroun fantôme” – pour reprendre le titre du célèbre ouvrage anticolonial de Michel Leiris, L’Afrique fantôme (1934) –, expliquent les auteurs de cette enquête, parmi lesquels Bénédicte Savoy. Malgré leur présence invisible (en Allemagne) et leur absence oubliée (au Cameroun), ces collections, qui sont aussi, du point de vue qualitatif, les plus anciennes et les plus variées au monde, continuent d’agir sur les sociétés qui les gardent ou les ont perdues ». L’objectif de l’enquête fut donc d’analyser et de publier les sources inédites permettant de confirmer cette présence massive. Et parallèlement d’aller à la rencontre, au Cameroun, des communautés privées de pièces matérielles importantes de leurs cultures respectives et de cerner, autant que faire se peut, les effets produits par cette absence patrimoniale prolongée.

    Le film Dahomey se termine par un débat organisé par la réalisatrice entre étudiants béninois, discutant de cette première rétrocession française. Premier pas ou insulte à leur peuple devant le peu d’objets revenus ? "Il était nécessaire de créer un espace qui permette à cette jeunesse de s’emparer de cette restitution comme de sa propre histoire, de se la réapproprier explique Mati Diop. Comment vivre le retour de ces ancêtres dans un pays qui a dû se construire et composer avec leur absence ? Comment mesurer la perte de ce dont on n’a pas conscience d’avoir perdu ?
    Dans l’attente d’une loi en France sans cesse reportée, les protagonistes de Dahomey soulignent l’urgence d’apporter une réponse à cette demande de restitution portée par tout un continent.

    https://lejournal.cnrs.fr/articles/biens-culturels-en-voie-de-restitution

    #oeuvres_d'art #art #décolonial #film #documentaire #Afrique #pillage #musées #colonisation #droit_du_patrimoine #patrimoine #identité #mémoire #visualisation #cartographie #retour

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    • Le monde en musée. Cartographie des collections d’objets d’Afrique et d’Océanie en France

      Cette cartographie propose de faire mieux connaître les collections d’objets d’Afrique et d’Océanie en France afin de faciliter leur étude. Elle signale les fonds ouverts au public qu’ils soient publics ou privés, elle décrit rapidement l’histoire de la collection et donne quelques éléments sur son contenu. Elle indique l’état des connaissances et donne les informations pour aller plus loin.

      https://monde-en-musee.inha.fr

    • #ReTours (programme de recherche)

      Résumé du programme de recherche collaboratif financé par l’Agence Nationale de la Recherche / 15 chercheurs, 7 pays. (in english below) – présentation du projet ici

      Alors que la question de la restitution des collections africaines fait polémique en France et en Europe, le programme comparatif, diachronique et multiscalaire ReTours vise à déplacer l’enquête 1) de l’Occident aux pays africains concernés, 2) des questions de restitution aux problématiques du retour, 3) de la vision muséo-centrée aux rôles des diasporas et du tourisme, 4) des instances et autorités officielles du patrimoine aux lieux, récits et transmissions considérés comme marginaux, secondaires ou officieux.

      ReTours est un programme novateur tant dans ses objectifs de recherche critiques que par ses méthodes d’enquêtes et ses collaborations culturelles. Constitué d’un consortium international et pluridisciplinaire de 15 chercheurs, ReTours travaillera à partir du Bénin, du Cameroun, du Mali et du Sénégal et sur leurs diasporas.

      L’objectif du programme est de saisir les enjeux politiques, les rôles économiques, les usages sociaux du retour. Il s’organise à partir de trois axes qui sont autant de manières de désigner les biens culturels : 1) Géopolitique du patrimoine, autour des mobilisations pour ou contre la restitution des “oeuvres”, 2) Économies du retour et imaginaires du tourisme, à propos des dispositifs d’accueil notamment touristiques des “pièces muséales” ; 3) Appropriations et resocialisations autour des mémoires sociales, de l’agency des “choses” revenues, des transformations des significations et des créations contemporaines.

      https://retours.hypotheses.org

  • #Soudan : la #guerre de l’#or

    Dans cet article, le chercheur Mohamed Salah Abdelrahmane analyse le rôle central de l’économie de l’or dans la guerre au Soudan. La défaillance de l’État entraîne le développement d’une économie parallèle qui permet aux factions armées de financer leur guerre, tout en satisfaisant les intérêts des puissances étrangères. Il propose également des pistes pour lutter contre les économies de guerre.

    La guerre entre les Forces armées soudanaises (SAF) et l’armée parallèle connue sous le nom de Forces de soutien rapide (RSF) ravage le Soudan depuis avril 2023. (…) La situation est sombre. Le Soudan a plongé vers une véritable guerre civile et un effondrement total de l’État. Cet article analyse l’évolution de l’économie de l’or depuis le début de la guerre actuelle, et interroge les politiques qui ont contribué à créer cette économie de guerre.

    La nature du conflit et des ressources

    L’or est la ressource la plus précieuse du Soudan, son principal produit d’exportation et sa première source de devises étrangères. Le secteur de l’or mobilise une main-d’œuvre intensive. Pas moins de 2,8 millions de travailleurs sont engagés dans l’extraction minière, et environ cinq millions de travailleurs exercent des professions liées à la production ou le commerce de l’or.

    Au cours de la dernière décennie, (…) les conflits au Soudan se sont concentrés autour de sites aurifères, tels que Jabal Amir. L’apparition des conflits coïncide avec une expansion des activités d’extraction d’or. Les bénéfices engendrés par l’économie de l’or contribuent ensuite à financer ces conflits.

    (…) Tous les groupes armés ont des activités économiques dans le secteur aurifère. Ces acteurs ont commencé à se disputer férocement le secteur de l’or, surtout après le coup d’État d’octobre 2021 [réalisé par l’armée soudanaise], qui s’est terminé par, ou plutôt a culminé dans la guerre entre l’armée soudanaise (SAF) et la milice paramilitaire des Forces de Soutien Rapide (RSF) qui ravage actuellement le pays.

    L’or et la guerre soudanaise

    (…) Lorsque la guerre a éclaté à Khartoum aux premières heures du matin du 15 avril 2023, tous les yeux étaient rivés sur les affrontements qui se déroulaient dans les différents endroits stratégiques de la capitale. Simultanément, cependant, une autre guerre éclatait loin de Khartoum. Une guerre pour l’or. Dans l’État du Darfour-Nord, les RSF resserraient leur emprise sur les célèbres mines de Jabal Amir.

    Cet assaut est intervenu dans un contexte précis. En 2020, la propriété des mines de Jabal Amir avait été transférée à l’Etat Soudanais d’une compensation financière versée par l’Etat à la société Al-Junaid, possédée par Abd al-Rahim Dagalo, le second commandant des RSF. Celui-ci a également reçu 33% des parts de Sudamin, une entreprise possédée par l’Etat, affiliée au ministère des Minerais. Cet accord avait été vivement critiqué par la société civile (…). De plus, le gouvernement a attribué aux RSF la mission de sécuriser les mines de Jabal Amir. Quand la guerre éclate le 15 avril 2023, les RSF prennent totalement le contrôle de la région de Kabkabiya, au nord du Darfour, où Jabal Amir est localisée. (…)

    Le 24 mai 2023, la principale raffinerie d’or du Soudan est à son tour tombée aux mains des RSF. La raffinerie a pour fonction de filtrer l’or pour le préparer à l’export. Selon les témoignages, 1,6 tonnes d’or (…) (dont 800 kilogrammes déjà raffinés), étaient stockés dans le bâtiment au moment où il a été pris d’assaut par les RSF. (…) Considérant le prix de l’or sur le marché mondial en avril 2023, la quantité d’or passé sous le contrôle des RSF dans cette opération est estimée à plus 150,5 millions de dollars. (…)

    Au Soudan, les familles riches conservent leur épargne sous forme de bijoux en or et de devises étrangères, gardés dans des coffres privés gérés par des banques commerciales. Ces banques[1], qui se trouvent en majorité dans les zones contrôlées par les RSF à Khartoum, ont été systématiquement pillées depuis le début de la guerre. D’après les témoignages, les soldats des RSF utilisent des instruments de détection d’or lorsqu’ils pillent les maisons des habitants. Cela indique qu’ils disposent des connaissances et de la technologie nécessaire au pillage de l’or (…).

    L’évolution du front militaire montre que les RSF cherchent à contrôler les réserves d’or et les sites de production minière, ce qui leur permet de financer leurs opérations militaires coûteuses. (…) Leur emprise s’étend sur de vastes zones dans le Sud Darfour, à Al Radom, Singo, Aghbash, Dharaba, et dans toutes les terres riches en or dispersées au sud de Buram près de la frontière Centrafricaine. Le 13 juin 2023, ils s’emparent d’Um Dafouk, une zone frontalière stratégique et une route logistique centrale pour l’exportation de l’or.

    Or, l’armée soudanaise n’a pas mené d’opérations pour protéger ces sites. Aucun autre mouvement armé, y compris l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS-Nord) dirigée par Abdelaziz al Hilu, n’a non plus tenté d’interférer dans les opérations minières.

    Les politiques de l’État depuis le début de la guerre

    Depuis le début de la guerre, les failles sécuritaires, et la généralisation des vols et du braconnage (…) ont entraîné la faillite et la fermeture des principales entreprises d’extraction d’or[2]. La production illégale de l’or de cesse de s’accroître. Des substances nocives pour l’environnement, telles que le cyanure et la thiourée, sont utilisées pour des projets d’extraction illégale. (…)

    Le ministère des Finances a modifié les conditions d’exportation de l’or depuis Port-Soudan, la nouvelle capitale dirigée par l’armée soudanaise, en stipulant que les ventes d’or devraient être payées avant le début des opérations d’exports. Cette décision occasionne de grandes difficultés pour les exportateurs légaux et facilitent le développement des opérations de contrebande (…).

    Aux frontières du Darfour-Nord, de l’État du Nord et de la Libye, les activités de pillage s’intensifient au fur et à mesure que les gangs (…) se multiplient. Les routes du trafic d’or convergent avec les trajectoires des trafics d’armes, de drogues, et d’êtres humains.

    La communauté régionale et les impacts de la guerre sur le commerce de l’or

    Les pays voisins qui entretiennent des liens historiques avec le Soudan sont eux aussi impliqués dans cette économie de guerre. L’Égypte, notamment, cherche à augmenter ses réserves d’or pour gérer sa crise économique interne et empêcher sa monnaie de s’effondrer (…). L’or représente 25% des réserves brutes totales du pays.

    Le début de la guerre actuelle au Soudan a coïncidé avec un pic des prix de l’or en Egypte. Le 10 mai, le premier ministre égyptien Mostafa Madbouly a publié une décision favorisant l’importation d’or en l’exonérant des frais de douanes. Ces mesures ont permis de stabiliser les prix de l’or en Égypte (…) et d’introduire plus de 306 kilogrammes d’or raffiné en seulement un mois (le volume d’or brut importé en Egypte n’est pas connu). Depuis, les réserves d’or égyptiennes ont continué à augmenter.

    (…) Dans de nombreux pays, comme la Syrie, le Yémen, la Libye, la Centrafrique, les liens économiques et politiques avec d’autres acteurs régionaux et internationaux contribuent à la persistance et à l’aggravation des conflits. Mais au Soudan, les intérêts enchevêtrés des différents acteurs rendent la situation peu lisible à ce stade. L’évolution des économies façonnées par la guerre nous permettra de clarifier, au fil du temps, les différents intérêts étrangers.

    Recommandations

    |La sortie du conflit armé au Soudan] requière discussion sérieuse sur la redéfinition du rôle des ressources dans la transition vers un gouvernement civil et démocratique, pour s’assurer que les ressources serviront à financer la reconstruction du Soudan.

    Au gouvernement « de facto » [dirigé par l’armée soudanaise et issu du coup d’État de 2021] :

    – Adopter des lois de réforme du secteur minier pour lutter contre les opérations de contrebande en obligeant efficacement les producteurs à payer leurs taxes à l’État
    - Restructurer en profondeur le secteur de la production (et en particulier de l’or), en vue d’une plus grande transparence et en permettant la participation populaire dans la gestion de cette économie

    A la communauté internationale :

    – Prendre en compte l’impact du secteur minier sur la perpétuation des conflits armés
    – Classifier de toute urgence l’or en provenance du Soudan comme de « l’or de guerre », en appliquant les règlements déjà en vigueur dans le droit européen et dans différentes législations nationales[3].
    - Placer sous embargo les entreprises qui utilisent de l’or produit par les acteurs de la guerre (gangs, milices, RSF, etc).

    Aux entreprises travaillant dans le commerce de l’or ou utilisant ces produits :

    – Renforcer la transparence et les contrôles rigoureux de la chaîne d’approvisionnement
    – Promouvoir des pratiques responsables dans le secteur des minerais.

    A la société civile soudanaise :

    - Surveiller et empêcher les abus liés aux interventions de l’armée dans les activités économiques
    - Mettre en place un observatoire des ressources naturelles et des abus liés à leur usage afin de mettre en lumière leur rôle dans le financement de la guerre au Soudan.

    https://blogs.mediapart.fr/sudfa/blog/270824/soudan-la-guerre-de-lor

    Traduction de :
    Sudan’s Other War : The Place of Gold in War Economics


    https://sudantransparency.org/sudans-other-war-the-place-of-gold-in-war-economics

    #économie_de_l'or #économie #économies_de_guerre #économie_de_guerre #Forces_armées_soudanaises (#SAF) #Forces_de_soutien_rapide (#RSF) #guerre_civile #extraction_minière #mines #Jabal_Amir #Al-Junaid #Abd_al-Rahim_Dagalo #Sudamin #Kabkabiya #Darfour #exportation #prix #Um_Dafouk #Armée_populaire_de_libération_du_Soudan (#APLS-Nord) #Abdelaziz_al_Hilu #cyanure #thiourée #pillage #Egypte #or_de_guerre

  • Time of israel : Gaza : Des images de soldats israéliens jouant avec de la lingerie féminine deviennent virales Reuters

    Des soldats de l’armée israélienne ont publié des photos et des vidéos les montrant en train de s’amuser avec de la lingerie féminine trouvée dans des habitations de Gaza.

    Dans une vidéo, un soldat est assis dans un fauteuil, souriant, une arme à la main et un sous-vêtement en satin blanc dans l’autre, qu’il tient au-dessus de la bouche ouverte d’un camarade allongé sur un sofa.

    Sur une autre, un militaire est assis sur un char avec un mannequin de femme simplement vêtu d’un soutien-gorge noir et d’un casque. Il dit : « J’ai trouvé une belle femme, une relation sérieuse à Gaza, une femme formidable ».

    Ces deux vidéos tournées par des soldats israéliens figurent parmi des dizaines de posts où des soldats, à Gaza, présentent des pièces de lingerie, des mannequins et parfois les deux dans certains cas. Ces images ont été vues des dizaines de milliers de fois sur les réseaux sociaux – une a glané plus d’un demi-million de vues – après avoir été signalées et partagées par Younis Tirawi, qui se dit être un journaliste palestinien.

    Interrogé sur les images qu’il a partagées à l’attention de ses plus de 100 000 abonnés sur X, entre le 23 février et le 1er mars, Tirawi a fourni les liens des publications originales, téléchargées sur internet par les soldats. Reuters a pu vérifier huit de ses photos et séquences qui avaient été postées sur Instagram ou sur YouTube.

    « La publication de telles images est humiliante pour les femmes palestiniennes comme pour toutes les femmes », a estimé Ravina Shamdasani, porte-parole du Bureau des Droits de l’Homme des Nations unies.

    Reuters a transmis à l’armée israélienne tous les renseignements qui ont pu être obtenus sur les huit publications vérifiées sur YouTube et sur Instagram, demandant d’éventuels commentaires.
    . . . . .
    Parmi les posts qui ont été authentifiés, la photo d’un militaire tenant un mannequin de femme, nue, de derrière, la main posée sur ses seins. Une autre montre un soldat tenant une poupée à moitié dénudée.

    Sur une image, un militaire pose avec son arme, levant le pouce, devant un lit double sur lequel des sous-vêtements féminins ont été éparpillés.

    YouTube a annoncé avoir supprimé l’une des vidéos trouvées par Reuters, estimant qu’elle contrevient aux politiques sur le harcèlement de la plateforme qui interdisent des contenus susceptibles de révéler des informations personnelles identifiables. Instagram, de son côté, n’a fait aucun commentaire.
    . . . . .
    Au mois de février, la générale Yifat Tomer-Yerushalmi, la procureure-générale militaire, avait indiqué qu’elle avait « rencontré des cas de conduite inacceptable, qui nient les valeurs et les protocoles de tsahal ».

    Tomer-Yerushalmi avait expliqué qu’il y avait, parmi ces cas, « des déclarations inappropriées qui encouragent des phénomènes inacceptables ; un usage injustifié de la force, notamment contre les détenus ; des pillages, ce qui comprend l’utilisation ou la saisie pure et simple de biens privés à des fins non-opérationnelles et des actes de destruction de biens civils, ce qui est contraire au protocole ».

    « Certains incidents vont au-delà du domaine disciplinaire et franchissent le seuil du pénal », avait-elle averti.

    Également au mois de février, le chef d’état-major, le général Herzi Halevi, avait expliqué aux troupes que « nous agissons comme des êtres humains et, contrairement à notre ennemi, nous conservons notre humanité. Nous devons prendre garde à ne pas utiliser la force quand elle n’est pas requise ; nous devons prendre garde à faire la distinction entre les terroristes et ceux qui ne le sont pas ; à ne pas prendre quelque chose qui ne nous appartient pas – un souvenir ou des armes – et à ne pas filmer de vidéo à des fins de vengeance ».

    Les propos tenus par Halevi et par Tomer-Yerushalmi étaient survenus quelques semaines après la publication d’un article paru dans le New York Times qui était intitulé : « Ce que révèlent les vidéos filmées par les soldats : Acclamation des destructions et railleries à l’encontre des Gazaouis ». L’article montrait des vidéos filmées par les troupes israéliennes, leurs pairs prononçant des paroles méprisantes à l’égard des Palestiniens, commettant des actes de vandalisme chez les particuliers et souriant à la caméra alors qu’ils conduisaient des bulldozers ou qu’ils utilisaient des explosifs.

    L’article avait publié une déclaration de l’armée qui avait estimé que les séquences étaient « déplorables ».

    Le porte-parole de Tsahal, Daniel Hagari, avait aussi, à l’époque, appelé les militaires à ne pas se filmer si les images n’avaient pas une visée opérationnelle, évoquant une violation des ordres militaires.

    #femmes #palestiniennes #Palestine #Gaza #Gazaouis #tsahal #violences #pillages #YouTube #palestine_assassinée #bds #occupation #apartheid #racisme #sexisme #culture_du_viol #israel

    Source : https://fr.timesofisrael.com/gaza-des-images-de-soldats-jouant-avec-de-la-lingerie-feminine-dev

  • Thread by JehadAbusalim on Thread Reader App – Thread Reader App
    https://threadreaderapp.com/thread/1768701602628567432.html

    Did you know that in the 1970s & 1980s, Israel looted one of the most important Canaanite sites in Gaza, which also was linked to ancient Egypt? The following thread tells the story of how Israeli archaeologists and military looted historical treasures from Deir el-Balah. 1/15

    #pillage #sionisme

  • #Ikea, le seigneur des forêts

    Derrière son image familiale et écolo, le géant du meuble suédois, plus gros consommateur de bois au monde, révèle des pratiques bien peu scrupuleuses. Une investigation édifiante sur cette firme à l’appétit démesuré.

    C’est une des enseignes préférées des consommateurs, qui équipe depuis des générations cuisines, salons et chambres d’enfants du monde entier. Depuis sa création en 1943 par le visionnaire mais controversé Ingvar Kamprad, et au fil des innovations – meubles en kit, vente par correspondance, magasins en self-service… –, la petite entreprise a connu une croissance fulgurante, et a accompagné l’entrée de la Suède dans l’ère de la consommation de masse. Aujourd’hui, ce fleuron commercial, qui participe pleinement au rayonnement du pays à l’international, est devenu un mastodonte en expansion continue. Les chiffres donnent le tournis : 422 magasins dans cinquante pays ; près d’un milliard de clients ; 2 000 nouveaux articles au catalogue par an… et un exemplaire de son produit phare, la bibliothèque Billy, vendu toutes les cinq secondes. Mais le modèle Ikea a un coût. Pour poursuivre son développement exponentiel et vendre toujours plus de meubles à bas prix, le géant suédois dévore chaque année 20 millions de mètres cubes de bois, soit 1 % des réserves mondiales de ce matériau… Et si la firme vante un approvisionnement responsable et une gestion durable des forêts, la réalité derrière le discours se révèle autrement plus trouble.

    Greenwashing
    Pendant plus d’un an, les journalistes d’investigation Xavier Deleu (Épidémies, l’empreinte de l’homme) et Marianne Kerfriden ont remonté la chaîne de production d’Ikea aux quatre coins du globe. Des dernières forêts boréales suédoises aux plantations brésiliennes en passant par la campagne néo-zélandaise et les grands espaces de Pologne ou de Roumanie, le documentaire dévoile les liens entre la multinationale de l’ameublement et l’exploitation intensive et incontrôlée du bois. Il révèle comment la marque au logo jaune et bleu, souvent via des fournisseurs ou sous-traitants peu scrupuleux, contribue à la destruction de la biodiversité à travers la planète et alimente le trafic de bois. Comme en Roumanie, où Ikea possède 50 000 hectares de forêts, et où des activistes se mobilisent au péril de leur vie contre une mafia du bois endémique. Derrière la réussite de l’une des firmes les plus populaires au monde, cette enquête inédite éclaire l’incroyable expansion d’un prédateur discret devenu un champion du greenwashing.

    https://www.arte.tv/fr/videos/112297-000-A/ikea-le-seigneur-des-forets
    #film #film_documentaire #documentaire #enquête
    #greenwashing #green-washing #bois #multinationale #meubles #Pologne #Mazovie #Mardom_House #pins #Ingvar_Kamprad #délocalisation #société_de_consommation #consumérisme #résistance #justice #Fondation_Forêt_et_citoyens #Marta_Jagusztyn #Basses-Carpates #Carpates #coupes_abusives #exploitation #exploitation_forestière #consommation_de_masse #collection #fast-furniture #catalogue #mode #marketing #neuro-marketing #manipulation #sous-traitance #chaîne_d'approvisionnement #Sibérie #Russie #Ukraine #Roumanie #accaparement_de_terres #Agent_Green #trafic_de_bois #privatisation #Gabriel_Paun #pillage #érosion_du_sol #image #prix #impact_environnemental #FSC #certification #norme #identité_suédoise #modèle_suédois #nation_branding #Estonie #Lettonie #Lituanie #lobby #mafia_forestière #coupes_rases #Suède #monoculture #sylviculture #Sami #peuples_autochtones #plantation #extrême_droite #Brésil #Parcel_Reflorestadora #Artemobili #code_de_conduite #justice #responsabilité #abattage #Nouvelle-Zélande #neutralité_carbone #compensation_carbone #maori #crédits-carbone #colonisation

    • #fsc_watch

      This site has been developed by a group of people, FSC supporters and members among them, who are very concerned about the constant and serious erosion of the FSC’s reliability and thus credibility. The group includes Simon Counsell, one of the Founder Members of the FSC; Hermann Edelmann, working for a long term FSC member organisation; and Chris Lang, who has looked critically at several FSC certifications in Thailand, Laos, Brazil, USA, New Zealand, South Africa and Uganda – finding serious problems in each case.

      As with many other activists working on forests worldwide, we share the frustration that whilst the structural problems within the FSC system have been known for many years, the formal mechanisms of governance and control, including the elected Board, the General Assembly, and the Complaints Procedures have been highly ineffective in addressing these problems. The possibility of reforming – and thus ‘saving’ – the FSC through these mechanisms is, we feel, declining, as power within the FSC is increasingly captured by vested commercial interest.

      We feel that unless drastic action is taken, the FSC is doomed to failure. Part of the problem, in our analysis, is that too few FSC members are aware of the many profound problems within the organisation. The FSC Secretariat continues to pour out ‘good news stories’ about its ‘successes’, without acknowledging, for example, the numerous complaints against certificates and certifiers, the cancellation of certificates that should never have been awarded in the first place, the calls for FSC to cease certifying where there is no local agreement to do so, the walk-outs of FSC members from national processes because of their disillusionment with the role of the economic chamber, etc. etc. etc.

      There has been no honest evaluation of what is working and what is not what working in the FSC, and no open forum for discussing these issues. This website is an attempt to redress this imbalance. The site will also help people who are normally excluded from the FSC’s processes to express their views and concerns about the FSC’s activities.

      Please share your thoughts or information. Feel free to comment on our postings or send us any information that you consider valuable for the site.

      UPDATE (25 March 2010): A couple of people have requested that we explain why we are focussing on FSC rather than PEFC. Shortly after starting FSC-Watch we posted an article titled: FSC vs PEFC: Holy cows vs the Emperor’s new clothes. As this is somewhat buried in the archives, it’s reproduced in full here (if you want to discuss this, please click on the link to go to the original post):
      FSC vs PEFC: Holy cows vs the Emperor’s new clothes

      One of the reasons I am involved in this website is that I believe that many people are aware of serious problems with FSC, but don’t discuss them publicly because the alternative to FSC is even worse. The alternative, in this case is PEFC (Programme for the Endorsement of Forest Certification schemes) and all the other certification schemes (Cerflor, Certflor, the Australian Forestry Standard, the Malaysian Timber Certification Council and so on). One person has suggested that we should set up PEFC-Watch, in order “to be even-handed”.

      The trouble with this argument is that PEFC et al have no credibility. No NGOs, people’s organisations or indigenous peoples’ organisations were involved in setting them up. Why bother spending our time monitoring something that amounts to little more than a rubber stamp? I can just see the headlines: “Rubber stamp PEFC scheme rubber stamps another controversial logging operation!” Shock, horror. The Emperor is stark bollock naked, and it’s not just some little boy pointing this out – it’s plain for all to see, isn’t it?

      One way of countering all these other schemes would be to point out that FSC is better. But, if there are serious problems with FSC – which there are, and if we can see them, so can anyone else who cares to look – then the argument starts to look very shaky.

      FSC standards aren’t bad (apart from Principle 10, which really isn’t much use to anyone except the pulp and paper industry). They say lots of things we’d probably want forest management standards to say. The trouble is that the standards are not being applied in practice. Sure, campaign against PEFC, but if FSC becomes a Holy Cow which is immune to criticism (not least because all the criticism takes place behind closed doors), then we can hardly present it as an alternative, can we?…”

      By the way, anyone who thinks that PEFC and FSC are in opposition should read this interview with Heiko Liedeker (FSC’s Executive Director) and Ben Gunneberg (PEFC’s General Secretary). In particular this bit (I thought at first it must be a mix up between FSC and PEFC, or Liedeker and Gunneberg):

      Question: As a follow-up question, Heiko Liedeker, from your perspective, is there room ultimately for programs like the Australian Forestry Standard, Certfor and others to operate under the FSC umbrella?

      Heiko Liedeker: Absolutely. FSC was a scheme that was set-up to provide mutual recognition between national standard-setting initiatives. Every national initiative sets its standard. Some of them are called FSC working groups, some of them are called something else. In the UK they are called UKWAS. We’ve been in dialogue with Edwardo Morales at Certfor Chile. They are some of the FSC requirements listed for endorsement, we certainly entered into discussion. We’ve been in discussion with the Australian Forestry Standard and other standard-setting initiatives. What FSC does not do is, it has one global scheme for recognizing certification. So we do not, and that’s one of the many differences between FSC and PEFC, we do not require the development of a certification program as such. A standard-setting program is sufficient to participate in the network.

      https://fsc-watch.com

    • Complicit in destruction: new investigation reveals IKEA’s role in the decimation of Romania’s forests

      IKEA claims to be people and planet positive, yet it is complicit in the degradation and destruction of Romania’s forests. A new report by Agent Green and Bruno Manser Fonds documents this destruction and presents clear requests to the furniture giant.

      A new investigative report (https://www.bmf.ch/upload/Kampagnen/Ikea/AG_BMF_report_IKEA_web_EN.pdf) by Agent Green and Bruno Manser Fonds shows a consistent pattern of destructive logging in IKEA-linked forests in Romania, with massive consequences for nature and climate. The findings are based on an analysis of official documents and field investigations of nine forest areas in Romania. Seven of them are owned by the IKEA-related company Ingka Investments and two are public forests supplying factories that produce for IKEA. The analysis uncovers over 50 suspected law violations and bad forest management practices. Biodiversity rich forest areas cut to the ground, intensive commercial logging conducted in ecologically sensitive or even old-growth forests without environmental assessments, dozens of meters deep tractor roads cutting through the forest are just a few of the issues documented.

      Most of the visited forests are fully or partially overlapping with EU protected areas. Some of these forests were strictly protected or under low-intensity logging before Ingka took over. Now they are all managed to maximize wood extraction, with no regard to forest habitats and their vital role for species. Only 1.04% of the total Ingka property in Romania are under a strict protection regime and 8.24% under partial protection. This is totally insufficient to meet EU goals. The EU biodiversity strategy requires the protection of a minimum of 30% of EU land area, from which 10% need to be strictly protected. One key goal is to strictly protect all remaining primary and old-growth forests in the EU.

      At the press conference in Bucharest Gabriel Păun, President of Agent Green, stated: “IKEA/Ingka seem to manage their forests like agricultural crops. Letting trees grow old is not in their culture. Removing entire forests in a short period of time is a matter of urgency for IKEA, the tree hunter. The entity disregards both the written laws and the unwritten ways of nature. IKEA does not practice what they preach regardless of whether it is the European Union nature directives, Romanian national legislation, or the FSC forest certification standard. But as a company with revenues of billions of Euros and Romania’s largest private forest owner, IKEA / Ingka should be an example of best practice.”

      Ines Gavrilut, Eastern Europe Campaigner at the Bruno Manser Fonds, added: “It is high time that IKEA started to apply its declared sustainability goals. IKEA could do so much good if it really wanted to set a good example as a forest owner, administrator, and large wood consumer in Romania and beyond. Needs could also be covered without resorting to destructive logging, without converting natural forests into plantations – but this requires tackling difficult issues such as the core of IKEA’s business model of “fast furniture”. Wood products should not be for fast consumption but should be made to last for decades.”

      Agent Green and Bruno Manser Fonds urge IKEA and the Ingka Group to get a grip on their forest operations in Romania to better control logging companies, not to source wood from national or natural parks, to effectively increase protection and apply forestry close to nature in own forests, to ensure full traceability and transparency of the IKEA supply chain, and allow independent forest oversight by civil society and investigative journalists.

      In August 2021, Agent Green published its first report documenting destruction in IKEA-linked forests in Romania. In May 2023, Agent Green and Bruno Manser Fonds sent an open letter of concern to the Ingka Group and IKEA Switzerland. BMF also started a petition demanding IKEA to stop deforestation in Romania’s protected forest areas and other high conservation value forests.

      The ARTE documentary IKEA, the tree hunter brilliantly tells the story of the real cost of IKEA furniture, the uncontrolled exploitation of wood and human labour.

      https://bmf.ch/en/news/neue-untersuchung-belegt-ikeas-beteiligung-an-der-waldzerstorung-in-rumanien-256

      #rapport

  • RTS  : La « conduite inappropriée » de certains soldats israéliens à Gaza dénoncée

    En Israël, l’avocate générale des armées met en garde contre des comportements inacceptables de la part de certains soldats à Gaza. En effet, plusieurs d’entre eux ont affiché leurs faits d’armes sur les réseaux sociaux, notamment des actes de #vengeance.

    Dans une lettre envoyée au bureau du procureur militaire, l’avocate générale des armées fait état de « conduites inappropriées qui s’écartent des valeurs de l’armée israélienne » : des recours à la force injustifié, des #pillages, des #destructions de biens civils…

    Moqueurs, sans-gêne, destructeurs...
    Plusieurs publications de vidéos prises en territoire palestinien par des soldats israéliens ont été dénoncés. Par exemple, sur l’une d’elles, un soldat assis sur une chaise sort d’un sac posé devant lui des maillots de football de grands clubs européens.

    Sur d’autres images, un militaire montre un pendentif qu’il compte, dit-il, ramener à sa petite amie. Tandis qu’un autre joue avec une guitare trouvée dans les décombres et que d’autres forcent un petit coffre-fort.

    Dans une autre vidéo, tournée dans une papeterie du camp de réfugié de Jabaliya, au nord de la bande de Gaza, un militaire renverse un présentoir encore rempli de crayons et d’autocollants. Il jette les cahiers qui se trouvent sur les étagères de cette petite boutique alors que son camarade le filme en riant.

    Des images de soldats qui mettent le feu à des cartons de nourriture et à des packs d’eau trouvés à l’arrière d’un camion dans un entrepôt ont aussi été diffusées. Le militaire qui filme retourne la caméra vers lui et conclut tout sourire par souhaiter à tous de bonnes vacances et de joyeuses fêtes de #hanouka.

    Un préjudice stratégique
    Selon l’avocate générale de l’armée israélienne, de tels actes causent à l’Etat d’israël et à l’armée un préjudice stratégique sur la scène internationale. Certains incidents dépassent le seuil disciplinaire et franchissent le seuil pénal, poursuit Yifat Tomer Yérushalmi.

    Ces actes entachent l’image des forces de défenses israéliennes qui se sont longtemps targuées d’être l’armée la plus morale au monde.

    Dans une lettre envoyée tout récemment à ses troupes, le chef d’état-major de l’armée, Herzi Halevi, rappelle notamment aux soldats qu’il ne faut rien prendre qui ne leur appartient pas et qu’il ne faut pas filmer de vidéos de vengeance.

    Sujet radio : Charlotte Derouin
    Adaptation web : juma
    Publié vendredi à 09:57 Modifié vendredi à 09:58

    Source : https://www.rts.ch/info/dossiers/2023/guerre-entre-israel-et-le-hamas/2024/article/la-conduite-inappropriee-de-certains-soldats-israeliens-a-gaza-denoncee-28413706

    #vols #destruction #moralité #armée #militaires #exactions #soldats #violence #butin #racisme #religion

  • Tapis, cosmétiques, motos : les soldats israéliens pillent en masse les maisons de Gaza - International Solidarity Movement - ISM-France
    https://ismfrance.org/index.php/2024/02/21/tapis-cosmetiques-motos-les-soldats-israeliens-pillent-en-masse-les-maiso

    Sur la chaîne publique israélienne Kan, des soldats israéliens montrent un miroir qu’ils ont volé à Gaza (Capture d’écran)

    Oren Ziv, 20 février 2024. Les soldats israéliens combattant à Gaza n’ont pas hésité à publier des vidéos sur les réseaux sociaux documentant joyeusement la destruction gratuite de bâtiments et l’humiliation des détenus palestiniens. Certains de ces clips ont même été présentés lors de la présentation de l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de Justice le mois dernier comme preuve du génocide. Mais il existe un autre crime de guerre facilement documenté par les soldats israéliens qui a suscité moins d’attention et de condamnation malgré sa prévalence : le pillage.

    En novembre, le chanteur palestinien Hamada Nasrallah a été choqué de découvrir sur TikTok un soldat jouant de la guitare que son père lui avait achetée 15 ans plus tôt. D’autres vidéos mises en ligne sur les réseaux sociaux ces derniers mois montrent des soldats israéliens se vantant d’avoir trouvé des montres-bracelets, déballant une collection de maillots de football de quelqu’un et volant des tapis, des produits d’épicerie et des bijoux.

    Dans un groupe Facebook d’Israéliennes comptant près de 100.000 utilisatrices, une femme se demandait quoi faire des « cadeaux de Gaza » que son compagnon, un soldat, lui avait rapportés. Partageant une photo de produits cosmétiques, elle a écrit : « Ils sont tous fermés sauf un. Les utiliseriez-vous ? Et est-ce que quelqu’un connaît ces produits ou les trouve-t-on uniquement à Gaza ? » (...)

    https://seenthis.net/messages/1042829
    #Pillage

  • Energy firms face legal threat over Israeli licences to drill for gas off Gaza
    By Dania Akkad | 15 February 2024 14:28 GMT | Middle East Eye
    Rights groups say exploration licences handed to companies in first weeks of war encroach on Palestinian waters and may amount to the war crime of pillaging
    https://www.middleeasteye.net/news/gaza-energy-firms-legal-threat-companies-cease-activity-drill-gas-coa

    Major energy companies awarded licences by Israel to explore for gas off Gaza’s coast have been warned that they could face legal action for possible breaches of Palestinian maritime sovereignty and war pillaging.

    Israel’s Ministry of Energy granted exploration rights to three companies - Italian energy giant Eni, UK-based Dana Energy and Israel’s Ratio Petroleum - three weeks after the war on Gaza began in October.

    Lawyers working on behalf of three Palestinian NGOs - Al Haq, the Palestinian Centre for Human Rights and Al-Mezan Center for Human Rights - notified the companies in letters this month that they would use “all legal mechanisms to the fullest extent” if they proceeded and called on them to desist from any activities relating to the licences.

    The organisations contend that over half of the zone for which the companies were awarded licences lies within Palestine’s maritime boundaries.

    Those boundaries were declared in 2015 when the Palestinians acceded to the UN Convention on the Law of the Sea (UNCLOS), the international agreement providing the legal framework for all marine and maritime activities. (...)

    #gaz #gaza #exploration_gazière #pillage_de_guerre

  • Restitution au Ghana d’objets royaux en or volés : quel est le deal ?
    https://www.justiceinfo.net/fr/128288-or-asante-pille-ghana-revient-pays-quel-deal.html

    L’or d’Asante, pillé au Ghana, revient au pays – quel est le deal ?
    9 février 2024 Par Rachel Ama Asaa Engmann (pour The Conversation France)

    150 ans après, 39 pièces faisant partie des costumes royaux du peuple Asante doivent être restituées à son souverain, l’Asantehene, qui siège à Kumasi, au Ghana, entre février et avril 2024. Rachel Ama Asaa Engmann, archéologue et spécialiste du patrimoine ghanéen, s’entretient avec Ivor Agyeman-Duah, conseiller technique de l’Asantehene pour ce projet majeur de restitution culturelle, au sujet du retour de ces objets et de ses implications.

    Au XVIIIe siècle, l’empire Asante était le plus grand et le plus puissant de la région et contrôlait une zone riche en or. De nombreux objets royaux en or ont été pillés par les troupes britanniques lors de la troisième guerre anglo-asante de 1874. La première collection de 7 objets est attendue du Fowler Museum de l’Université de Californie à Los Angeles. La deuxième collection de 32 objets proviendra du British Museum et du Victoria & Albert Museum au Royaume-Uni. Ces objets sont prêtés au peuple Asante pour une durée de six ans.

    RACHEL AMA ASAA ENGMANN : Que représentent ces objets et comment ont-ils été pillés ?

    IVOR AGYEMAN-DUAH : Il s’agit d’objets royaux qui ont été pillés en 1874 dans le palais de Kumasi après la mise à sac de la ville par les troupes militaires coloniales britanniques. Une autre expédition punitive a eu lieu en 1896, qui a donné lieu à d’autres pillages. Parmi ces objets figuraient des épées et des coupes d’apparat, dont certaines étaient très importantes pour exprimer la mesure de la royauté dans le palais. Par exemple, l’épée Mponponsuo, créée il y a 300 ans, remonte au légendaire Okomfo (chef spirituel) lié à la fondation de l’empire, Okomfo Anokye. C’est avec cette épée que l’Asantehene prêtait le serment d’allégeance à son peuple. Les chefs utilisaient la même épée pour lui prêter serment.

    Certains objets ont été vendus aux enchères sur le marché libre de Londres ; des collectionneurs d’art les ont achetés et ont finalement fait don de certains d’entre eux à des musées (d’autres ont été conservés dans des collections privées). Le British Museum et le Victoria & Albert Museum en ont également acheté.

    Cependant, tous les objets que vous voyez au British Museum n’ont pas été pillés. Par exemple, il y a eu des échanges culturels entre l’Asantehene Osei Bonsu et Thomas Edward Bowdich, un émissaire de l’African Company of Merchants qui s’est rendu à Kumasi en 1817 pour négocier des échanges commerciaux. Certains cadeaux ont été offerts à Bowdich, qui les a ensuite déposés au British Museum. Ces objets sont au nombre de 14.

    Comment l’accord a-t-il été conclu ?

    La question est à l’étude depuis un demi-siècle. Ce n’est pas seulement une préoccupation de l’actuel Asantehene. Les trois derniers occupants du trône s’en sont préoccupés. Mais cette année est cruciale car elle marque les 150 ans de la guerre de Sagrenti. Elle marque également les 100 ans du retour de l’Asantehene Agyeman Prempeh après son exil aux Seychelles et les 25 ans de l’ascension de l’Asantehene actuel, Oseu Tutu II, sur le trône.

    Ainsi, lors de son séjour à Londres en mai 2023, après avoir eu des entretiens officiels avec les directeurs de ces musées, il a rouvert les discussions et les négociations. Il m’a demandé, ainsi qu’à Malcolm McLeod, ancien conservateur et chercheur au British Museum et vice-principal de l’université de Glasgow, de l’aider à prendre les décisions techniques qui s’imposaient. Nous avons travaillé ensemble sur ce dossier pendant les neuf derniers mois.

    Pourquoi s’agit-il d’un prêt de six ans ?

    Le droit moral à la propriété existe. Mais il y a aussi les lois sur l’antiquité au Royaume-Uni. Le Victoria & Albert et le British Museum sont des musées nationaux. Ils sont régis par des lois très strictes qui n’autorisent pas le retrait permanent d’une œuvre d’art ou d’un autre objet de la collection d’un musée pour le vendre ou s’en débarrasser d’une autre manière.
    Cela a toujours été un facteur contraignant au cours des 50 dernières années. Mais il y avait aussi un moyen de conserver ces objets pour une durée maximale de six ans. Tous les objets ne sont pas exposés au British Museum. Beaucoup n’ont jamais été exposés et sont stockés dans un entrepôt. Compte tenu des circonstances et de la trilogie d’anniversaires, nous sommes parvenus à cet accord. Les discussions se poursuivront toutefois entre nous et ces musées pour trouver un accord durable.

    Bien entendu, l’expérience du Ghana sera importante pour les demandes de restitution émanant d’autres pays d’Afrique.
    Qu’est-ce que cela signifie pour le peuple Asante et pour le Ghana ?

    Le fait qu’au cours des deux derniers mois, nous ayons pu parvenir à une forme d’accord témoigne de l’intérêt que suscitent les accords multiculturels.
    Tout cet ensemble d’objets datant de 150 ans (ou plus) intéressera de nombreuses personnes. Ces pièces nous aident à faire le lien entre le passé et le présent. Elles sont significatives de la façon dont notre peuple était, en termes de créativité et de technologie, de la façon dont il était capable d’utiliser l’or et d’autres propriétés artistiques. Ils sont aussi une source d’inspiration pour ceux qui travaillent aujourd’hui dans le domaine de la production d’or.
    Le musée du palais de Manhiya rouvrira ses portes en avril. L’exposition de ces objets va augmenter la fréquentation du musée. Il accueille déjà environ 80 000 visiteurs par an et nous estimons que ce chiffre pourrait passer à 200 000 par an avec le retour de ces objets. Cela générera des revenus et nous permettra d’agrandir et de développer nos propres musées.

    #restitutions #pillages #musées #Ghana #Grande-Bretagne #colonisation

  • Deux #musées britanniques vont restituer au# Ghana des trésors royaux pillés il y a 150 ans
    https://www.francetvinfo.fr/culture/arts-expos/deux-musees-britanniques-vont-restituer-au-ghana-des-tresors-royaux-pil

    Le British Museum et le Victoria and Albert Museum vont restituer au Ghana des objets en or et en argent de la cour royale #ashanti dérobés à l’époque coloniale. Ils l’ont annoncé jeudi 25 janvier 2024. L’accord conclu avec le Ghana pour un prêt à long terme de ces objets s’inscrit dans un contexte de pression croissante sur les musées et les institutions internationales pour rendre les #objets_d'art africains pillés par les anciennes puissances coloniales.

    Parmi les objets restitués figurent une épée Mponponso vieille de 300 ans, utilisée lors des cérémonies de prestation de serment des monarques ashanti, les Asantehene, et un calumet de la paix en or. Ces objets ont été accaparés après la troisième guerre anglo-ashanti en 1874, et comprennent un total de 32 pièces.

    #pillage #patrimoine

  • La violence militaire coloniale au Cameroun et les collections muséales en Allemagne : histoire d’une symbiose.

    « Ne s’obtient que par la force »
    https://visionscarto.net/ne-s-obtient-que-par-la-force

    Voici un texte majeur et inédit que le chercheur Yann LeGall (Université technique de Berlin, TU) a confié à visionscarto. Il a passé des années à lire, décrypter et analyser les rapports dans archives allemandes des expéditions punitives militaires au Cameroun (aussi au Togo) et a fait apparaître non seulement la cruauté coloniale de l’armée allemande, mais aussi, par exemple, le cynisme absolu des directeurs de musées en Allemagne qui n’hésitaient pas à suggérer aux militaires d’engager des expéditions dans des lieux où se trouvaient des objets et œuvres d’art qu’ils convoitaient...

    Trois décennies d’exactions et de pillages, dont le résultat est la présence dans les musée allemands de plus de 60 000 objets camerounais divers volés lors des raids militaires, et par conséquence, l’absence au Cameroun de ce patrimoine culturel qui reste — plus d’un siècle après — encore une blessure vive.

    C’est long, mais cette histoire (dans les deux sens du terme) est importante. L’Allemagne a fait depuis quelques décennies, un énorme travail mémoriel sur la période nazie, ainsi que sur la période DDR, mais jusqu’à aujourd’hui, pas trop sur la période coloniale. Lacune qui commence à être comblée, car d’une part il y a ce projet, mais aussi d’autres mouvements, comme ce processus qui s’engage, de "débaptisation" des rues et avenues qui portent encore le nom des grands criminels, acteurs majeurs de cette période coloniale.

    –---

    Cet article — le premier d’une série dont la publication sera étalée dans les prochaines semaines, a été initialement publié en allemand dans l’Atlas der Abwesenheit. Kameruns Kulturerbe in Deutschland (Atlas de l’absence. Le patrimoine culturel du Cameroun en Allemagne) , issu du projet « Umgekehrte Sammlungsgeschichte » (Histoire inversée des collections) porté par l’Université de Dschang au Cameroun (Prof. Dr. Albert Gouaffo) et l’Université Technique de Berlin (Prof. Dr. Bénédicte Savoy).

    Avec des remerciements tout particuliers à Isabelle Saint-Saëns pour l’édition méticuleuse de la version française de ce texte. La cartographie est conçue et produite par Philippe Rekacewicz.

  • The Congo Tribunal

    En plus de 20 ans, la #guerre du #Congo a déjà fait plus de 6 millions de victimes. La population souffre de cet état d’#impunité totale, les #crimes_de_guerre n’ayant jamais fait l’objet de poursuites judiciaires. Cette région recèle les gisements les plus importants de #matières_premières nécessitées par les technologies de pointe. Dans son « #Tribunal_sur_le_Congo », Milo Rau parvient à réunir les victimes, les bourreaux, les témoins et les experts de cette guerre et à instituer un #tribunal d’exception du peuple du Congo de l’Est. Un portrait bouleversant de la guerre économique la plus vaste et la plus sanglante de l’histoire humaine.

    https://vimeo.com/234124116

    https://www.film-documentaire.fr/4DACTION/w_fiche_film/53668_0


    http://www.the-congo-tribunal.com

    #film #documentaire #film_documentaire #extractivisme #tribunal_des_peuples #justice_transformatrice #justice #vérité_et_justice #multinationales #responsabilité #Banro #RDC #massacres #témoignage #Twangiza #massacre_de_Mutarule #mine #extractivisme #Sud-Kivu #or #Banro_Corporation #impunité #crimes #douleur #tribunal #engagement #viols #vérité_et_justice #multinationales #guerre #concessions_minières #ressources_naturelles #pillage #minerai #Mining_and_Processing_Congo (#MPC) #Walikale #Bisie #droits_humains #MCP_Alptamin #Mukungwe #milices #Cheka_Group #groupes_armés #diamants #cassiterite #marché_noir #loi_Dodd_Frank #minerai_critique #Mutarule #MONUSCO #ONU #Nations_Unies

    • La production du réel sur scène est ce qui m’intéresse
      Entretien avec #Milo_Rau

      Né à Berne, en Suisse en 1977, Milo Rau étudie la sociologie auprès de Pierre Bourdieu et Tzvetan Todorov, ainsi que les littératures allemandes et romanes à Paris, Zurich et Berlin. Tout d’abord journaliste, ses premiers voyages et reportages se déroulent au Chiapas ainsi qu’à Cuba en 1997. À partir de 2000, Rau travaille comme auteur au sein de la Neue Zürcher Zeitung, un groupe de presse suisse qui édite le journal du même nom puis il entame en 2003 sa carrière de metteur en scène en Suisse tout d’abord et, par la suite, à l’étranger.

      https://www.cairn.info/la-video-en-scene--9782379243431-page-329.htm

    • #IIPM#International_Institute_of_Political_Murder

      Produktionsgesellschaft für Theater, Film und Soziale Plastik


      Das IIPM – International Institute of Political Murder wurde vom Regisseur und Autor Milo Rau im Jahr 2007 mit Sitz in der Schweiz und in Deutschland gegründet zur Produktion und internationalen Verwertung seiner Theaterinszenierungen, Aktionen und Filme.

      Die bisherigen Produktionen des IIPM stießen international auf große Resonanz und stehen für eine neue, dokumentarisch und ästhetisch verdichtete Form politischer Kunst – „Real-Theater“, wie Alexander Kluge Milo Raus Ästhetik einmal nannte. Seit 2007 hat das IIPM mehr als 50 Theaterinszenierungen, Filme, Bücher, Ausstellungen und Aktionen realisiert. Die Stücke des IIPM tourten durch bisher über 30 Länder und wurden an alle bedeutenden internationalen Festivals eingeladen. Wiederkehrende Kooperationspartner sind u. a. die Schaubühne am Lehniner Platz, das Théâtre Nanterre-Amandiers, das Theaterspektakel Zürich, das Kunstenfestival Brüssel, das Goethe Institut, die Prohelvetia, ARTE, das Schweizerische und das Deutsche Fernsehen, der Berliner Senat oder die Kulturstiftung des Bundes. Bisherige Projekt- und Essaybände des IIPM wurden mehrfach aufgelegt („Die letzten Tage der Ceausescus“, 2010), von der Bundeszentrale für Politische Bildung als Schulbücher nachgedruckt („Hate Radio“, 2014) und von der taz zum „Buch des Jahres“ gewählt („Was tun? Kritik der postmodernen Vernunft“, 2013). Für 2017 entstehen der ästhetiktheoretische Band „Wiederholung und Ekstase“ (Diaphanes Verlag, Abschlussband zu einem Forschungsprojekt, das das IIPM an der Zürcher Hochschule der Künste zum Realismus in den Künsten durchführte), die beiden Projektbände „Das Kongo Tribunal“ und „1917“ (beide Verbrecher Verlag) sowie das Manifest „Die Rückeroberung der Zukunft“ (Rowohlt Verlag).

      Seit der Gründung konzentriert sich das IIPM auf die multimediale Bearbeitung historischer oder gesellschaftspolitischer Konflikte: Unter anderem holte die Produktionsgesellschaft die Erschießung des Ehepaars Ceausescu („Die letzten Tage der Ceausescus“), den ruandischen Völkermord („Hate Radio“) und den norwegischen Terroristen Anders B. Breivik („Breiviks Erklärung“) auf die Bühne, boxte per Theaterperformance das Ausländerstimmrecht ins Parlament einer Schweizer Stadt („City of Change“), hob im Frühjahr 2013 mit zwei mehrtägigen Justiz-Spektakeln („Die Moskauer Prozesse“ und „Die Zürcher Prozesse“) ein völlig neues Theaterformat aus der Taufe und eröffnete mit „The Civil Wars“ (2014) das Großprojekt „Die Europa-Trilogie“, die mit „The Dark Ages“ (2015) fortgeführt wurde und 2016 mit „Empire“ ihren Abschluss fand. Mit „Five Easy Pieces“ (2016) und „Die 120 Tage von Sodom“ (2017) unterzogen Rau und das IIPM das Einfühlungs- und Darstellungsinstrumentarium des Theaters einer eingehenden Prüfung – das eine Mal mit minderjährigen, das andere mal mit behinderten Darstellern.

      Von Debatten weit über die Kunstwelt hinaus begleitet, wurden die vom IIPM produzierten Filme, Video-installationen, Peformances und Inszenierungen mit zahllosen Preisen weltweit ausgezeichnet. Die „zutiefst berührende“ (La Libre Belgique) Inszenierung „The Civil Wars“, von Publikum und Kritik euphorisch gefeiert, etwa wurde mit dem Jury-Preis der Theatertriennale „Politik im Freien Theater“ ausgezeichnet und von der Experten-Jury des Schweizer Fernsehens in die Liste der „5 besten Theaterstücke 2014“ gewählt. Außerdem wurde „The Civil Wars“ unter die „besten Stücke der Niederlande und Flanderns 2014/15″ ausgewählt. Die Inszenierung „Five Easy Pieces“ (2016) wurde mit dem Hauptpreis des belgischen „Prix de la Critique Théâtre et Danse“ ausgezeichnet. Zu den weiteren Auszeichnungen gehören Einladungen zum Berliner Theatertreffen oder ans Festival d’Avignon, der Schweizer Theaterpreis oder der Preis des Internationalen Theaterinstituts (ITI).

      „Mehr Wirkung kann Theater kaum provozieren“, urteilte die Basler Zeitung über die Lecture-Performance „Breiviks Erklärung“, die 2014 nach zahlreichen Stationen im EU-Parlament Brüssel zu sehen war. Die Produktion „Die Moskauer Prozesse“, zu der in Kooperation mit Fruitmarket Kultur und Medien GmbH eine Kinofassung und mit dem Verbrecher Verlag Berlin eine Buchfassung entstand, führte zu einer internationalen Debatte über Kunstfreiheit und Zensur. Die Kinofassung lief international in den Kinos und auf Festivals und wurde mit einer „Besonderen Auszeichnung“ am Festival des Deutschen Films 2014 geehrt.

      Zu den „Zürcher Prozessen“ entstand – wie auch zu den Produktionen „Die letzten Tage der Ceausescus“ und „Hate Radio“ – eine abendfüllende Filmfassung, die auf 3sat und im Schweizer Fernsehen ausgestrahlt wurde und in ausgewählten Kinos zu sehen war. Die Hörspielfassung von „Hate Radio“ wurde mit dem renommierten „Hörspielpreis der Kriegsblinden 2014“ ausgezeichnet.

      In der Spielzeit 2013/14 fand in den Sophiensaelen (Berlin) unter dem Titel „Die Enthüllung des Realen“ eine Retrospektive zur Arbeit des IIPM statt. Anlässlich der Ausstellung erschien im Verlag „Theater der Zeit“ eine gleichnamige Monographie mit Beiträgen von u. a. Elisabeth Bronfen, Heinz Bude, Alexander Kluge, Sandra Umathum, Michail Ryklin und Christine Wahl, die das Werk des IIPM aus verschiedenster Perspektive beleuchteten. Nach Einzelausstellungen in Österreich (Kunsthaus Bregenz 2011, Akademie der Bildenden Künste Wien, 2013) und der Schweiz (migrosmuseum für gegenwartskunst Zürich 2011, KonzertTheaterBern, 2013) handelte es sich dabei um die erste Retrospektive zur Arbeit Milo Raus und des IIPM in Deutschland, die in der Presse heiß diskutiert wurde.

      In der Saison 2014/15 folgten Werkschauen in Genf (Festival La Batie) und Paris (Théatre Nanterre-Amandiers), in der Saison 2015/16 in Gent (CAMPO). Die Live-Talkshowreihe „Die Berliner Gespräche“ (in Kooperation mit den Sophiensaelen und der Schweizerischen Botschaft Berlin) 2013/14 war der Startpunkt der Produktionsphase von Milo Raus Theaterinszenierung “The Civil Wars” (2014), dem ersten Teiler seiner „Europa Trilogie“. Die mit „The Dark Ages“ im Jahr 2015 weitergeführte und 2016 mit „Empire“ abgeschlossene, monumentale „Europa Trilogie“ – in der 13 Schauspieler aus 11 Ländern den Kontinent einer „politischen Psychoanalyse“ (Libération) unterziehen – führte zu euphorischen Reaktionen bei Presse und Publikum: „von der Intimität eines Kammerspiels und der Wucht einer griechischen Tragödie“, urteilte etwa das ORF über „Empire“.

      Zu einem weltweiten Medienecho führte auch das insgesamt 30stündige „Kongo Tribunal“, das Milo Rau und sein Team im Sommer 2015 in Bukavu und Berlin durchführten: ein Volkstribunal zur Verwicklung der internationalen Minenfirmen, der kongolesischen Regierung, der UNO, der EU und der Weltbank in den Bürgerkrieg im Ostkongo, der in 20 Jahren mehr als 5 Millionen Tote gefordert hat. Presse und Publikum verfolgten die „ungeheuerlich spannenden“ (taz) Verhöre atemlos. „Das ambitionierteste politische Theaterprojekt, das je inszeniert wurde“, urteilte die Zeitung THE GUARDIAN, und fügte hinzu: „Ein Meilenstein.“ „Ein Wahnsinnsprojekt“, schrieb die ZEIT: „Wo die Politik versagt, hilft nur die Kunst.“ Die belgische Zeitung LE SOIR schrieb: „Makellos. Milo Rau ist einer der freiesten und kontroversesten Geister unserer Zeit.“ Und die taz brachte es auf den Punkt: „Zum ersten Mal in der Geschichte wird hier die Frage nach der Verantwortung für Verbrechen gestellt.“ Mehr als hundert Journalisten aus der ganzen Welt nahmen an den Tribunalen in Ostafrika und Europa teil, um über das „größenwahnsinnigste Kunstprojekt unserer Zeit“ (Radio France Internationale – RFI) zu berichten.

      Als „ein Meisterwerk, brennend vor Aktualität“ (24 heures) und „atemraubend“ (NZZ) feierten Kritik und Publikum gleichermaßen Milo Raus Stück „Mitleid. Die Geschichte des Maschinengewehrs“ (Uraufführung Januar 2016, Schaubühne am Lehniner Platz Berlin), das seit seiner Uraufführung durch die Welt tourt und u. a. zum „Friedrich-Luft-Preis“ als bestes Stück der Saison in Berlin nominiert und in der Kategorie „Beste Schauspielerin“ (Hauptrolle: Ursina Lardi) in der Kritikerumfrage der Zeitschrift „Theater Heute“ auf den zweiten Platz gewählt wurde.

      Das im Frühjahr 2016 in Kooperation mit CAMPO Gent entstandne Stück „Five Easy Pieces“ war das erste IIPM-Projekt mit Kindern und Jugendlichen. Als „ganz großes Theater, menschlich, sensibel, intelligent und politisch“ beschrieb das belgische Fernsehen (RTBF) das Stück, das bereits durch halb Europa und bis Singapur tourte: „Ein Theaterstück jenseits aller bekannten Maßstäbe.“

      http://international-institute.de

      #art_et_politique