Le Truvada, « révolutionnaire » contre le VIH ? A quatre détails près - Rue89 - L’Obs
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« Des résultats presque parfaits », écrit Libération, « un médicament révolutionnaire », titre iTélé, quand Ouest-France parle d’un « traitement préventif efficace contre le VIH ». Les médias sont emballés par les résultats définitifs de l’essai dit Ipergay, dévoilés le 24 février à Seattle aux Etats-Unis. Et on les comprend.
Lancée en janvier 2012 en France par l’Agence nationale de recherche contre le sida (ANRS), l’étude Ipergay a été menée sur 414 hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), très exposés au risque d’infection par le VIH par leurs pratiques sexuelles, et séronégatifs. Le but : tester le traitement anti-VIH pris par les séropositifs, mais cette fois-ci comme outil de prévention pour les séronégatifs.
Les volontaires de cette expérimentation ont donc été divisés en deux groupes. Le premier devait absorber le médicament Truvada (qui associe ténofovir et emtricitabine) avant et après chaque rapport sexuel. Le second groupe, lui, se contentait du placebo.
Après deux ans d’expérimentation, cette étude a montré [PDF] qu’il y avait 86% de réduction du risque de contamination par le VIH. Seize personnes ont été contaminées sur les 414 volontaires, mais seulement deux d’entre elles appartenaient au groupe Truvada et ont admis ne pas avoir pris le médicament avant leur rapport sexuel non protégé.
Ces conclusions suscitent donc beaucoup d’enthousiasme dans la lutte contre le VIH. En prenant ce comprimé régulièrement, certains gays habitués aux rapports sexuels fréquents et non protégés pourraient échapper au VIH.
Oui, mais l’ANRS et Aides qui soutient également cette étude et milite pour commercialiser le Truvada en France, n’ont pas vraiment insisté sur quelques détails... qui nuancent, pour certains, le résultat de cet essai.
Avec notamment ce passage intéressant :
« Ils ont eu beaucoup de mal à recruter des volontaires en France et ont même dû s’associer au Canada pour obtenir 414 personnes. Aujourd’hui, ils arrêtent de recruter. C’est quand même très étonnant pour une étude qui était censée s’achever en 2016. »
Joint par Rue89, le Pr Jean-Michel Molina, qui a coordonné l’étude, met en avant l’« éthique » pour expliquer ce choix :
« Le comité indépendant a recommandé l’arrêt du bras placebo [du groupe recevant un placebo, ndlr] et la mise à disposition du Truvada à la demande pour tous les participants.
Cette recommandation a été rapidement mise en place après avis de l’ANRS et du conseil scientifique de l’essai. Il n’était en effet plus éthiquement acceptable d’inclure de nouveaux participants qui auraient pu recevoir un placebo et le recrutement dans l’étude s’est interrompu sans que nous n’ayons eu besoin d’inclure les 1 900 participants initialement prévus. »
Mais si les associations liées à Ipergay vantent un très bon résultat, les études antérieures étaient beaucoup moins optimistes.