• #Mayotte va ériger un « rideau de fer » de technologies civilo-militaires de surveillance

    Le sous-préfet chargé de la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte vient de publier 11 demandes d’information réclamant aux industriels un arsenal impressionnant de technologies de #surveillance pour combattre le « défi migratoire » dans ce département de la #France d’outre-mer.

    Le 10 février dernier, #Gérald_Darmanin a annoncé qu’ « avec le ministre des Armées, nous mettons en place un "#rideau_de_fer" dans l’eau, qui empêchera le passage des #kwassa-kwassa [des #pirogues légères, qui tanguent énormément, et sont utilisées par les passeurs pour convoyer des migrants d’#Anjouan aux #Comores à Mayotte, ndlr] et des #bateaux, beaucoup plus de moyens d’interception, des #radars, et vous verrez un changement radical ».

    Concrètement, ce dispositif consiste en « une nouvelle vague d’#investissements dans des outils technologiques (radars, moyens maritimes…) permettant de déceler et d’interpeller les migrants en mer », précise le ministère de l’Intérieur à France Info.

    Il s’agit du prolongement de l’#opération_Shikandra, du nom d’un redouté poisson baliste du lagon qui défend son territoire et se montre extrêmement agressif envers les poissons et tout animal (plongeurs et nageurs inclus) qui traverse sa zone de nidification en période de reproduction.

    L’opération Shikandra est quant à elle qualifiée par le ministère d’ « approche globale, civilo-militaire, pour relever durablement le défi migratoire à Mayotte », « qui a permis une première vague d’investissements massifs dans ces outils » depuis son lancement (https://www.mayotte.gouv.fr/contenu/telechargement/15319/116719/file/26082019_+DP+Op%C3%A9ration+Shikandra+Mayotte.pdf) en 2019.

    Il était alors question de déployer 35 fonctionnaires supplémentaires à la #Police_aux_frontières (#PAF), plus 26 gendarmes départementaux et sept effectifs supplémentaires pour le greffe du TGI de Mamoudzou, mais également d’affecter 22 personnels supplémentaires aux effectifs embarqués dans les unités maritimes, de remplacer les cinq vedettes d’interception vétustes par huit intercepteurs en parfaites conditions opérationnelles (quatre neufs et quatre rénovés).

    En décembre dernier, Elisabeth Borne a annoncé le lancement, en 2024, du #plan_interministériel_Shikandra 2, contrat d’engagement financier entre l’État et le département doté de plusieurs centaines de millions d’euros jusqu’en 2027 : « Nous investirons massivement dans la protection des #frontières avec de nouveaux outils de #détection et d’#interception ».

    À l’en croire, la mobilisation de « moyens considérables » via la première opération Shikandra aurait déjà porté ses fruits : « Depuis 5 ans, près de 112 000 personnes ont été éloignées du territoire, dont plus de 22 000 depuis le début de l’année ».

    Les derniers chiffres fournis par la préfecture de Mayotte, en octobre 2023, évoquent de leur côté un total de 60 610 reconduites à la frontière (8 127 en 2020, 17 853 en 2021, 17 380 en 2022 et 17 250 en 2023, l’interception de 1 353 kwassa-kwassa, 17 192 étrangers en situation irrégulière interpellés en mer, et 59 789 à terre, la destruction de 622 barques et 424 moteurs, et la condamnation à de la prison ferme de 285 passeurs.

    https://next.ink/130597/mayotte-va-eriger-un-rideau-de-fer-de-technologies-civilo-militaires-de-survei
    #murs #barrières_frontalières #migrations #réfugiés #chiffres #statistiques #complexe_militaro-industrielle #technologie #frontières #militarisation_des_frontières

  • Les forces du désordre - Une anthropologie de la police turque par Deniz Yonucu
    https://lundi.am/Les-forces-du-desordre

    #ACAB quelqu’un ? Au fait c’est pire que ça. Il y a des choses à apprendre à travers les interrogations sur la police turque.

    25.3.2024 - Il ne faut pas se laisser décourager par les premiers paragraphes, un peu universitaro-centrés, de cet article. Cette critique d’un livre écrit en anglais par une anthropologue turque, avance sur deux axes : d’une part, elle nous renseigne sur une réalité peu connue en français, la vie des quartiers-ghettos ethniques des grandes villes turques avec un historique des formes d’autogestion qui s’y sont affirmées avant d’être presque anéanties par la police, d’autre part, elle procède à une analyse plus générale, et qui nous concerne aussi directement, sur le rôle de la police, non pas comme institution de maintien de l’ordre, mais comme productrice d’un désordre visant à « démanteler les structures organisationnelles et politiques locales, et plonger les quartiers dans le chaos et la peur. »

    Qu’est-ce qu’un État ? Comment se comporte-t-il ? Pourquoi lui accordons-nous tant de légitimité ? Mais surtout : est-ce qu’il se renforce, s’affaiblit ou se transforme en autre chose ? L’anthropologie, science qui étudie les formes d’organisation des groupes humains, tente depuis longtemps de répondre à ce type de questions. De Comment pensent les institutions de Mary Douglas à Legends of People, Myths od States de Bruce Kapferer, en passant par Akhil Gupta, Veena Das, jusqu’à Cultural Intimacy. Social Poetics and the Real Life of States, Societies and Institutions de Michael Herzfeld (aussi ici), les anthropologues se sont affrontés au mystère de cette construction sociale très récente, mais capable de faire croire à d’énormes masses de la population qu’elle a toujours existé, ou qu’elle a ses racines dans un passé très lointain, sinon dans la nature humaine elle-même. Leurs réflexions sont très profondes, mais elles sont restées loin du débat public. D’un autre côté, comme l’écrit Herzfeld, « si nous n’évitons pas les abstractions excessives et le jargon qui obscurcit plutôt qu’il explique, nous n’avons pas le droit de demander au public une appréciation sérieuse du rôle que l’anthropologie pourrait jouer dans le démantèlement des structures oppressives et des droits exclusifs’.

    Le livre de Deniz Yonucu, Police, provocation and politics (Cornell University Press, 2023) est une contribution fondamentale à la compréhension de ce qu’est l’État, à travers l’étude de l’une de ses institutions fondamentales : la police. C’est un livre bien écrit, clair et compréhensible, et en même temps profondément radical, dans le sens qu’il va à la racine des problèmes. L’autrice est une anthropologue turque qui enseigne à Newcastle (Angleterre) et a reçu le prix Anthony Leeds pour ce travail, considéré comme le meilleur livre d’anthropologie urbaine de l’année ; un résultat remarquable, étant donné que dès les premières lignes il prend ouvertement le parti des victimes de la violence d’État, déclarant que certains éléments de la recherche seront délibérément omis, précisément pour ne pas collaborer avec cette institution. De plus, la réunion de l’American Anthropological Association où Deniz a été récompensé a également été le moment où des milliers d’anthropologues de toute l’Amérique du Nord et au-delà ont condamné collectivement la violence coloniale et meurtrière de l’armée israélienne à Gaza (je l’ai déjà mentionné dans un article d’il y a quelques mois). La critique ouverte et motivée du militarisme, du nationalisme et de la violence d’État gagne de plus en plus de place parmi les anthropologues.

    Policiers, militaires et agents coloniaux ont toujours été présents dans les « champs » où travaillent les anthropologues : il y en avait dans les villages trobriandais étudiés par Malinowski, dans les samoans par Margaret Mead et chez les Nuers par Evans-Pritchard. Mais à quelques exceptions près, les soi-disant « organismes chargés de l’application des lois » sont presque toujours restés en dehors de l’analyse, qui s’est concentrée sur les institutions indigènes ou natives, sans trop se soucier de la manière dont elles interagissent avec les États nationaux. Mais progressivement - un épisode important a été décrit par Clifford Geertz à Bali en 1973 - les chercheurs ont commencé à les voir, à décrire leur présence et leur action, jusqu’à ce qu’ils commencent à théoriser sur la manière de faire des recherches sur la police. En 2018, un recueil d’essais a été publié, The anthropology of police (édité par Karpiak et Garriot), ainsi qu’un article dans l’Annual Review of Anthropology (par Jeffrey T. Martin) qui explique que l’anthropologie de la police repose sur une vision de l’État comme un objet nouveau, mais fondé sur des formes plus anciennes d’ordre moral, et donc toujours double et stratifié. Naturellement, ces recherches ont pris un nouveau souffle aussi par les mobilisations après la mort de George Floyd, dont beaucoup avaient pour horizon l’abolition de la police. Mais pour l’abolir, nous devons d’abord comprendre : et le fonctionnement des États et de leur structure monopolistique de la violence civile, la police, n’est pas encore tout à fait clair. Le livre de Yonucu, sous-titré ’Contre-insurrection à Istanbul’, décrit le comportement de la police dans les quartiers populaires de la capitale turque, avec une reconstitution historique basée principalement sur des entretiens avec des habitants, et une observation prolongée dans le temps de l’évolution du siège policier dans les zones périphériques. Son origine est la participation de l’autrice aux mobilisations de 2013 au parc Gezi, lorsque pour la première fois des rejetons de la bourgeoisie et des intellectuels se sont retrouvés en butte à la répression policière aux côtés des enfants des quartiers les plus pauvres de la ville, où cette répression était la norme depuis des décennies. Le « printemps » turc, explique Deniz, était précisément divisé sur ce point : lorsque la police a augmenté le niveau de violence dans les banlieues, les enfants de ces villages se sont retirés de la manifestation de Gezi, car ils devaient aller défendre leurs quartiers, et des militants de la classe moyenne comme l’autrice ont tenté de les accompagner, mais ont été pour la plupart choqués, voire dégoûtés, par le niveau de violence dans ces quartiers. Deniz était parmi les rares qui n’ont pas digéré cette nouvelle division de classe ; et elle a commencé à travailler dans l’un de ces quartiers, pour comprendre comment fonctionnait l’imbrication de la violence, de la répression et de la politique locale. La découverte fondamentale a été que, même si ces zones étaient considérées par tous comme intrinsèquement violentes, cette violence est l’effet de décennies de provocations et de divisions largement créées par les soi-disant « forces de l’ordre », pour démanteler les structures organisationnelles et politiques locales, et plonger les quartiers dans le chaos et la peur. Il y avait un plan de « contre-insurrection » à l’œuvre, très clair pour les habitants du lieu, mais invisible pour le reste de la ville.

    La maison d’édition qui a publié le livre, Cornell University Press, s’est prémunie contre cette évidence en présentant le livre comme « une analyse contre-intuitive des pratiques policières contemporaines », qui se concentre sur « la promotion de la contre-violence, des conflits perpétuels et des tensions ethniques et sectaires » plutôt que sur le maintien de l’ordre. Mais que la police fomente des conflits et sème la discorde, plutôt que d’essayer de faire la paix, n’est contre-intuitif que pour ceux qui n’ont jamais entendu parler de la stratégie de tension, ni de la violence lors du G8 de Gênes en 2001 ; ou pour ceux qui – comme les maisons d’édition universitaires – entretiennent la fiction de l’État de droit, où des « forces de l’ordre » bien intentionnées garantissent la paix et la justice aux citoyens, en veillant à ne punir que ceux qui « se comportent mal ». Même le plus grand théoricien de l’État moderne, Michel Foucault, tenait pour acquis la fonction pacificatrice de la police : discipliner et punir, avec ou sans force, devait servir à maintenir l’ordre, à garantir les corps et à protéger la société. Agamben expliquait même en 2014 qu’après la « guerre contre la terreur », au lieu de créer de l’ordre, les États avaient commencé à « gérer le désordre » (cit. p. 154). Deniz démontre exactement le contraire : la police travaille précisément à promouvoir le désordre et la peur ; rendre la vie collective impossible, boycotter l’organisation communautaire et porter atteinte à la paix sociale de certaines classes ou zones géographiques. Pas vraiment de la « gouvernementalité » ! Les États nations sont des machines de guerre contre la coexistence pacifique et l’autogestion populaire ; les provocations et la violence de la police se déchaînent précisément contre ceux qui sont les plus capables de s’autogérer et de coexister, en dressant au besoin les personnes et les groupes sociaux les uns contre les autres. Dans le quartier d’Istanbul que Deniz appelle Devrimova (du mot turc devrim, « révolution »), cette dynamique est particulièrement visible et violente ; mais on ne peut éviter de reconnaître les similitudes avec ce qui se passe dans les États dits « démocratiques », où l’infiltration non motivée de la police, les accusations absurdes de terrorisme contre des militants de base, la connivence avec la grande criminalité, semblent conçues pour alimenter la peur et la méfiance mutuelle ; on peut en dire autant de la tentative continue de diviser entre bons militants et mauvais militants, entre pauvres victimes blanches et pauvres de couleur (ou méridionaux en Italie), oisifs et dangereux. Dans les années 70, les soi-disant gecekondu, ou quartiers « nocturnes » du prolétariat turc – semblables aux villages auto-construits de Rome et de Milan – furent le théâtre d’une grande expérimentation d’une « nouvelle forme de vie socialiste » (p. .38), composé de comités de quartier, de réseaux de solidarité, de groupes d’autodéfense, de structures d’autogestion et d’autoconstruction collective, voire de « tribunaux populaires » et d’organisations de femmes contre l’alcoolisme et les violences domestiques. Ces expériences ont permis à des dizaines de milliers de personnes de survivre à l’exclusion et à la ségrégation urbaine, mais elles ont été mal vues par la majorité turque sunnite, majoritairement nationaliste, qui considérait ces quartiers comme dangereux et ennemis.

    Au lieu de Foucault, Deniz suit Jacques Rancière, pour qui la police est exactement le contraire de la politique : la guerre continue de l’État contre la population peut se résumer à la tentative de la police de détruire la politique, c’est-à-dire la politique fondamentale, la capacité humaine à s’organiser et créer des formes stables d’autonomie territoriale. La police n’est pas seulement répression et discipline, mais elle est la structure institutionnelle qui distribue et attribue des espaces à la population, définissant ce qui doit être rendu visible et invisible, ce qui doit être perçu comme parole et ce qui sera plutôt relégué au rôle de ’bruit’. La politique, pour Rancière, c’est exactement le contraire, c’est-à-dire « tout ce qui éloigne un corps de la place qui lui est assignée, ou change la destination d’un lieu », « rendre visible ce qui ne pouvait pas être vu », et « rendre audible comme parole » ce qui n’était auparavant perçu que comme du bruit » (cit. p.14). Dans le livre, cette lecture émerge de l’étude des quartiers marginaux d’Istanbul où vit l’un des trois groupes de population anatoliens conquis par l’État turc : les Alévis, qui, avec les Kurdes et les Arméniens, constituent plus de la moitié de la population du pays. Si l’oppression des Kurdes et le génocide des Arméniens sont également connus en Europe occidentale, la marginalisation et la stigmatisation des Alévis le sont moins, mais tout aussi systématiques. Les Alévis sont en théorie un groupe religieux, mais historiquement laïcs, hostiles à l’islamisme sunnite et au nationalisme conservateur, ils ont toujours été identifiés aux organisations révolutionnaires, auxquelles ils ont adhéré massivement. Leurs quartiers étaient des « zones libérées », nées d’une opposition collective à l’agression continue de la police, qui tentait de démolir leurs maisons, considérées comme illégales. Comme le raconte une personne interrogée d’une cinquantaine d’années : « Quand nous étions enfants, nous jouions dans les terrains vagues du quartier, et quand nous avons vu les bulldozers approcher, nous avons commencé à courir et à crier : ’L’État arrive !’ L’État arrive !’. Les hommes étaient pour la plupart au travail, mais les femmes qui nous entendaient remplissaient les rues et commençaient à ramasser des pierres dans leurs jupes pour les jeter sur les bulldozers » (p.35). Après chaque démolition, le quartier se réorganisait pour reconstruire les maisons démolies : « Il n’y avait pas d’électricité, pas d’eau, pas de routes, pas de services... c’était un terrain vide plein de boue [...]. Lorsque les gens ont commencé à s’installer ici, nous nous réunissions pour déterminer quoi faire. Les organisations révolutionnaires discutaient déjà de la manière de créer des comités populaires […]. Nous n’avions pas le choix. Nous avons dû développer nos propres outils pour résoudre les problèmes le plus rapidement possible. Ce n’était pas seulement un choix politique : c’était une nécessité fondamentale », explique une autre personne interrogée, plus âgée (p. 37). Au fil du temps, de cette auto-organisation est née la distribution autogérée des terres, également avec l’aide d’architectes, d’urbanistes et d’étudiants en architecture, ainsi que des formes de tribunaux populaires, basés sur des conseils de village à la campagne, dans lesquels les décisions étaient prises sur des conflits internes, sans avoir recours à la police turque (qui aurait de toute façon considéré tout le monde comme coupable, simplement parce qu’ils étaient alévis). Les femmes participaient également aux conseils de quartier, comme c’était également la coutume dans les villages alévis. Deniz dit que dans les quartiers révolutionnaires il y avait une « politique féministe de facto » : la participation politique des femmes a conduit à remettre en question les formes patriarcales de gestion familiale, à lutter contre la violence, l’alcoolisme et à appeler à une gestion féminine des ressources. Un jour, un tribunal populaire a ordonné à un homme qui avait battu sa femme de quitter le quartier et de ne jamais y revenir. Une autre fois, un tribunal a sanctionné un groupe d’étudiants qui avaient promis d’amener un spectacle de théâtre, mais qui sont ensuite revenus sur leur promesse alors que les habitants avaient déjà tout organisé. Ils les ont traduits devant le tribunal populaire, qui a écouté leurs excuses mais leur a ordonné de ne pas retourner dans le quartier pendant deux mois. Ces organisations locales comprenaient également des groupes d’autodéfense de quartier contre la police et contre les attaques des résidents locaux fidèles à l’État ; naturellement, ils étaient considérés comme des ennemis par les institutions et la police. Depuis la fin des années 70, puis avec le coup d’État de 1980 - qui a tué mille deux cents personnes et emprisonné six cent cinquante mille - la police a articulé une stratégie contre-insurrectionnelle contre ces quartiers, faite d’attaques directes, infiltrations et incursions de groupes paramilitaires. La police « a exporté vers les périphéries urbaines d’Istanbul les techniques de contre-insurrection spatiale qu’elle avait appliquées dans les provinces kurdes » (p.54), transformant de nombreux gecekondu en petits « Istanbul Gazas » isolés les uns des autres, sorte d’archipel d’enclaves guère différent également de la manière dont l’armée israélienne a réussi à utiliser la planification et l’architecture pour empêcher l’organisation politique palestinienne (Eyal Weizman l’explique magistralement, tout comme Alessandro Petti). Dans ces « petites Gazas » ségréguées, au fil du temps, des formes d’organisation révolutionnaire ont commencé à fleurir, ce qui a permis de maintenir vivant le souvenir de l’auto-organisation du passé. C’est à ce stade qu’il devient intéressant de comprendre le rôle de la police. Car c’est contre ces quartiers que s’articule le travail policier expliqué par Deniz, qui « n’est pas seulement un projet gouvernemental foucaldien de production de docilité, mais aussi un projet schmittien de production d’hostilité, qui favorise activement l’inimitié entre différentes populations » (p.11). Dans la guerre contre le PKK, le parti communiste kurde, l’armée turque a eu recours aux déportations, à l’exil et au contrôle généralisé de l’information, transformant certaines villes en prisons à ciel ouvert dont on ne savait pratiquement rien dans le reste du pays. De même, les quartiers rebelles kurdes et alévis d’Istanbul étaient isolés les uns des autres, ce qui faisait que les habitants avaient du mal à sortir, que les non-résidents ne passaient jamais par là et qu’un sentiment général de peur planait sur certaines parties de la ville. Ces formes de provocation, combinées au travail généralisé des agents infiltrés, ont modifié la perception même du monde des habitants des quartiers. Une autre dynamique entre ici en jeu : Deniz l’appelle l’interpellation violente. L’État a encadré la répression des organisations révolutionnaires comme une répression ethnique : les Kurdes n’ont pas été persécutés en tant que rebelles, mais en tant que Kurdes, et il en a été de même pour les Alévis. « Mort aux Alévis ! » », a crié la police lorsqu’elle a tiré sur la foule lors d’une manifestation dans le quartier de Gazi en 1995, tuant dix-huit personnes. Après avoir été réprimés en tant qu’Alévis, de nombreux révolutionnaires ont commencé à se percevoir comme tels plutôt que comme révolutionnaires. Hannah Arendt explique qu’elle s’est rendu compte qu’elle était juive à partir des insultes antisémites qui lui étaient adressées par les enfants des nazis : « Celui qui est attaqué en tant que juif doit se défendre en tant que juif. Pas comme un Allemand, ni comme un citoyen du monde, ni comme un défenseur des droits de l’homme » (cit. p. 78). Cette « interpellation violente » a eu pour effet d’amener les révolutionnaires alévis à s’identifier de plus en plus comme membres d’un groupe ethnique et religieux, plutôt que comme militants d’une idée émancipatrice universelle. Le résultat fut une fracture de plus en plus évidente entre les révolutionnaires alévis, les révolutionnaires kurdes et les révolutionnaires de la majorité sunnite turque, qui commencèrent à douter les uns des autres. « Après [le massacre de] Gazi, les gens ont commencé à parler de qui était alévi et qui était sunnite », raconte une personne interrogée âgée de soixante-dix ans, turque sunnite, mais résidente et militante du quartier de Devrimova. « Peut-être que c’était déjà là, mais c’est devenu beaucoup plus explicite » (p.83). La répression agit avant tout en renforçant l’identité de chaque individu, en enfermant chaque groupe dans sa petite bulle et en stimulant la méfiance et les conflits entre tous les groupes qui mettent l’État en difficulté. Il est impossible de ne pas y voir comme un reflet démesuré de la fragmentation du mouvement radical italien (et romain plus que tout autre), divisé en bulles d’« individualité » ou de « subjectivité » indisciplinées, méfiantes les unes envers les autres et incapables de s’allier, parfois même pas temporairement. Après le massacre de Gazi, une fois ce climat de tension et de ségrégation installé, avec des check-points et des tanks dans les rues, la police s’est soudainement retirée des quartiers. « Nous en étions fiers à l’époque, pensant leur avoir fait peur. Mais maintenant, je comprends qu’ils laissaient la violence se propager parmi nous », explique un militant exilé après avoir été arrêté et torturé. « Ce n’est pas que la police ait abandonné les quartiers : comme dans la guérilla, la police est venue créer la tension puis s’est retirée » (p.89). La ségrégation n’a plus besoin de tanks : ce sont les mêmes dynamiques construites par l’État qui permettent à la violence de se propager dans certains quartiers, de les qualifier de dangereux et de les séparer du reste de la ville. Combien de fois, même en Italie, la police vous arrête-t-elle à l’entrée de certaines banlieues, vous demandant où vous allez et pourquoi, tenant pour acquis que quiconque y va de l’extérieur cherche de la drogue, ou en tout cas quelque chose d’interdit. C’est la même dynamique de création de ghettos, évidemment à plus petite échelle.

    En outre, la police a activement encouragé la marginalisation de toutes les personnalités de la médiation, celles qui ont réussi à maintenir ensemble les différents groupes et communautés, tout en laissant impunis ceux qui ont exercé la violence dans un but de pouvoir et de profit, par exemple les trafiquants de drogue. Avec le temps, et les actions incessantes de provocation et de détention arbitraire, les groupes d’autodéfense se sont radicalisés, devenant des justiciers, largement impossibles à distinguer des voyous des narcos, des paramilitaires et de la police elle-même. (Cette dérive se reflète également dans d’autres pays européens, où parfois le masculinisme généralisé rapproche fascistes et antifascistes, ou bien où certaines formes de « service d’ordre » et d’autoritarisme des espaces autogérés semblent singer l’État et la police : pensez au pass des vaccinés demandé dans certains centres sociaux autogérés !). Ainsi, les quartiers où avait eu lieu une tentative d’émancipation collective, laïque et intersectaire, sont devenus en l’espace de quelques décennies des lieux dangereux et violents, où déambulent des jeunes armés et cagoulés, peut-être membres des anciennes organisations révolutionnaires, peut-être à la solde de trafiquants, peut-être policiers en civil. Ce qui domine, c’est la méfiance mutuelle, la suspicion et le ressentiment, notamment à l’égard des jeunes, toujours présentés comme violents par nature. Stigmatisation, diffamation, ambiguïté, stéréotypes ethniques et de classe, conflits intergénérationnels sont activement encouragés pour alimenter des situations tendues et légitimer la présence et la violence de la police contre les habitants. Cette action se cache toujours derrière une rhétorique de l’ordre, de la dignité, de la raison et de la courtoisie, ce qui la rend incompréhensible pour les parties les plus intégrées des citoyens. Deniz reconstitue également en détail comment ces tactiques de provocation du désordre et de la peur sont parvenues jusqu’à la police turque à travers les manuels utilisés par l’armée britannique en Irlande du Nord, eux-mêmes basés sur les manuels de « sale guerre » de l’OTAN, eux-mêmes basés sur les stratégies de conquête de l’armée coloniale française en Algérie. Un fil noir relie la colonisation européenne en Afrique, à la guerre froide, aux stratégies utilisées par la police contre les dissidents politiques.

    Le livre est un chef-d’œuvre d’ethnographie militante, qu’il serait très important de le traduire.D’un point de vue méthodologique, il s’agit d’un modèle sur la manière de mener une recherche sur le terrain et d’articuler la présentation des résultats de manière non seulement à parler à d’autres chercheurs, mais aussi sans donner d’informations qui pourraient être utilisées contre les protagonistes de la recherche. Il combine un travail de terrain approfondi, une clarté éthique et politique du rôle et de la responsabilité du chercheur et une reconstruction d’une rare profondeur du contexte historique et des implications politiques.La conclusion est qu’il existe une guerre permanente entre l’État et la population, dont l’intensité augmente ou diminue selon la mesure dans laquelle l’État parvient à maintenir invisibles certaines pratiques populaires de libération et d’autogestion.C’est aussi l’essence de la lecture de l’État que fait David Graeber dans Sur les rois et dans d’autres textes : différentes structures politiques et sociales convergent dans l’État, elles sont continuellement en tension et risquent continuellement de perdre leur emprise. La bonne nouvelle est qu’il est très difficile pour l’État de gagner cette guerre contre ses propres citoyens. Paradoxalement, en fait, la violence institutionnelle, la provocation et la contre-insurrection sont en elles-mêmes une « véritable preuve de l’existence d’une lutte politique » (p. 161). Ainsi, malgré des décennies de tentatives, « l’élite dirigeante turque n’a jamais réussi à éteindre complètement la dissidence de gauche en Turquie ». Il existe en effet une force politique très forte qui défie toute tentative de provocation et continue de pousser les gens à défier l’État : la mémoire de ceux qui l’ont déjà fait. « La contre-insurrection est également productrice de lutte politique, car ses techniques sales exacerbent les injustices déjà présentes dans la société. Tant que les racines de la dissidence existeront – la domination, l’exploitation, l’inégalité, l’injustice – la contre-insurrection et son antithèse : la politique continueront d’exister. »

    Stefano Portelli
    Traduit de l’italien par Palidda
    La version originale (et italienne) de cette recension a été publiée sur le site Monitor

    Petite note du traducteur

    La logique policière du désordre permanent n’est pas toujours ignorée (en dehors de la posture institutionnelle dominante), elle est évoquée par certains auteurs, au-delà du constat élémentaire que la police ne justifie son existence que lorsqu’il y a du « désordre »... et souvent la fomente ou incite la « pègre » e les criminels pour cette raison ; c’est un fait connu depuis l’aube de l’État moderne... (pensez à l’histoire des Poignardeurs racontée aussi par Sciascia...) et il ne faut pas oublier que certains flics ont facilement tendance à adopter un comportement criminel.

    La critique répétée contre Foucault me ​​semble injuste car on ne peut certainement pas dire qu’il soit pour l’Etat et l’ordre ... il se concentre sur l’objectif biopolitique du pouvoir mais ensuite il n’exclut pas du tout la thanatopolitique que n’est pas seulement celle pratiquée par les nazis, mais celle que les pays dominants adoptent encore aujourd’hui notamment vis-à-vis des migrations mais aussi contre les jeunes des banlieues ou les napolitains ... (voir les cas de jeunes tués par des policiers ou des carabiniers …)

    #Turquie #police #division_ethnique #urbanisme #counterinsurgency

  • De la complicité de la France

    Cet épisode pilote revient sur le soutien apporté par l’État français au gouvernement génocidaire rwandais. Les documents secret défense analysés et rassemblés permettent de comprendre les mécanismes qui ont permis l’une des plus atroces compromissions de la Ve République autour de 4 questions : Pourquoi la France s’est-elle impliquée au Rwanda ? A quand remonte l’implication de la France au Rwanda ? Jusqu’à quand la France a-t-elle poursuivi son soutien au régime génocidaire ? Que penser des conclusions du « rapport Duclert » quant aux "responsabilités lourdes et accablantes de la France dans le génocide des Tutsis ?

    https://www.youtube.com/watch?v=zElcjCs4GE8&list=PLnTYnV3R1tVAO35eRrLP1a1QJxXD_Ts5z

    #génocide #complicité #France #Rwanda #vidéo #colonisation #politique_coloniale #Front_patriotique_rwandais (#FPR) #opération_Noroît #armée #armée_française #François_Mittérand #responsabilité #néo-colonialisme #rapport_Duclert #commission_Duclert #excuses #Macron #Emmanuel_Macron #soutien_actif #forces_spéciales #plainte #justice

  • #Liban. Sur les #traces des #disparus de la #guerre_civile

    Comment filmer la #disparition ? Traduire par l’image ce qui n’est plus ? C’est un travail de #remémoration contre l’#amnésie_officielle et collective, et donc un travail pour l’histoire, que propose l’équipe du film The Soil and the Sea (« La terre et la mer »), qui sillonne le Liban sur les traces des #charniers de la guerre civile.

    Image trouble, son étranglé, vagues menaçantes… The Soil and the Sea (« La terre et la mer ») commence littéralement à contre-courant, la caméra submergée dans une lutte contre les vagues, dont nous tire la voix de l’écrivain libanais Elias Khoury lisant en arabe son poème « La mer blanche ». Ce sauvetage n’est pourtant qu’une illusion : c’est bien une noyade longue d’un peu plus d’une heure qui commence avec le film réalisé par Daniele Rugo, véritable plongée cinématographique dans la violence de la guerre civile libanaise.

    Partant de la côte beyrouthine, le film nous fait entrer au Liban par le charnier méditerranéen qui le borde, cette mer dans laquelle la guerre a souvent dégurgité ses #cadavres. The Soil and the Sea interroge les disparitions, exhume les histoires des #victimes et de leurs familles, creuse les bas-fonds de près de quinze années de #guerre_civile.

    Un pays amnésique et imprégné de #violence

    Au Liban, 17 415 personnes auraient disparu de 1975 à 1990, pendant la guerre civile qui a opposé de très nombreuses factions locales et internationales, mais dont les victimes ont été en majorité libanaises, palestiniennes et syriennes. Ce chiffre est tiré de la recherche constituée par le Lebanon Memory Archive, un projet piloté par l’équipe du film qui met en lumière cinq sites libanais abritant des #fosses_communes datant de la guerre1. Massacres délibérés, emprisonnements, torture, enlèvements, assassinats arbitraires ou ciblés, des lieux tels que #Damour, #Chatila, #Beit_Mery, #Aita_Al-Foukhar ou #Tripoli, sont emblématiques de toutes les facettes de la violence devenue routinière dans le Liban des années 1980. Leurs noms seuls suffisent à réveiller le souvenir d’une opération militaire, d’une prison ou d’une hécatombe dont les histoires sont tues dans un pays qui s’est remis de la guerre civile en instaurant un fragile statu quo.

    Afin de saisir la force de The Soil and the Sea, il faut comprendre la portée politique du simple geste de prise de parole proposé par le film. Dans les années 1990, la principale barrière mise en place pour éviter de retomber dans les méandres d’un affrontement civil a été le #silence. Aucune #politique_mémorielle n’a été mise en place à l’échelle du pays, les programmes scolaires s’arrêtent notoirement à la veille de la guerre civile, et la guerre est un arrière-plan anecdotique dans les conversations des Libanais·es. Des organisations de la société civile plaident pourtant depuis longtemps en défense des familles des personnes disparu·es, et une loi de 2018 promettait même d’éclaircir leur sort, mais le silence reste de mise pour la majorité de la société libanaise. La faute en revient surtout à l’absence de politiques publiques et d’institutions dédiées : il n’existe pas au Liban d’histoire « objective » de la guerre, scientifiquement constituée, et admise par l’État et la population. The Soil and the Sea donne un exemple saisissant de cette #amnésie_collective avec l’anecdote d’une mère qui pose une plaque et plante un olivier en mémoire de son fils Maher, disparu devant la faculté des sciences dans la banlieue sud de la capitale. Alors que cette faculté relève du seul établissement supérieur public du pays - l’Université libanaise -, les étudiant·es et les professeur·es rencontré·es par la mère de Maher sont effaré·es d’apprendre qu’une fosse commune « de trente mètres de long » a été enfouie sous les dalles de leur campus à la suite d’une bataille entre des factions libanaises et l’armée israélienne pénétrant dans Beyrouth en 1982.

    Pour recomposer l’histoire d’un pays amnésique, The Soil and the Sea choisit d’enchaîner les #témoignages, comme celui de la mère de Maher. Les #récits sont racontés en « voix off », superposés à des images montrant les lieux banals, gris, bétonnés, où les Libanais·es foulent souvent sans s’en douter - ou sans y penser - les corps de centaines de leurs semblables. Les voix des proches ou des survivant·es qui témoignent sont anonymes. Seuls ces lieux du quotidien incarnent la violence. Le film offre l’image d’un Liban pâle et quasi désert, où l’immobilier aussi bien que la végétation ont recouvert les plaies mal cicatrisées de la guerre. Des silhouettes lointaines parcourent ruines antiques et bâtiments modernes, gravats et pousses verdoyantes, mais on ne verra jamais les visages des voix qui racontent, par-dessus des plans savamment composés, les disparitions des proches, l’angoisse des familles, parfois de précieuses retrouvailles, plus souvent des vies passées dans l’errance et la nostalgie. Filmant le présent pour illustrer les récits du passé, The Soil and the Sea met au défi l’expérience libanaise contemporaine en montrant des lieux imprégnés jusque dans leurs fondations par une violence rarement nommée, qui prend enfin corps à l’écran dans les récits des familles laissées pour compte. Le travail de mise en scène du témoignage oral est aussi soigné du point de vue de l’image que du son, les mots crus des proches étant délicatement accompagnés par les arrangements légers et angoissants de Yara Asmar au synthétiseur.

    Géographie de l’oubli

    Faut-il déterrer les cadavres ? Serait-ce rendre justice aux familles que de retourner aujourd’hui la terre, et risquer ainsi de raviver les blessures d’un pays jamais guéri de la violence ? Ces questions, posées par un survivant du massacre commis par les milices palestiniennes à Damour en 1976, reçoivent plus tard une réponse indirecte de la part de la mère de Maher : « S’ils exhument des restes, où est-ce que je les mettrais ? » Juxtaposant des témoignages qui se font écho, The Soil and the Sea devient un jeu de questions et réponses qui exprime le paradoxe de l’#amnésie libanaise. Aux dépens de nombreuses victimes et de leurs familles, l’oubli a été un geste d’amnistie qui a permis à la société libanaise de se reconstruire, d’élever des banques et de déployer des champs sur une terre ravagée par le conflit. Beaucoup de victimes ont aussi été acteur·rices de la violence, à commencer par Maher, mort au service d’une milice, dont le récit de la disparition entame et conclut le film. En exhumant leurs corps, on risquerait de raviver des colères enfouies avec eux. Au lieu de prendre un tel risque, et outre l’impossibilité matérielle et politique d’une telle entreprise, le documentaire et le projet de recherche auquel il s’adosse se contentent de recueillir des #souvenirs sans les commenter autrement que par des images du quotidien, familières à tous·tes les Libanais·es.

    L’absence de protagonistes à l’écran, le choix de filmer les lieux représentés à des moments où ils sont inhabituellement déserts, illustrent d’abord la #disparition, thème principal de l’œuvre. Nous, spectateurs et spectatrices, sommes invité·es dans ces espaces comme dans des arènes cinématographiques qui réverbèrent les récits de la violence et abattent le quatrième mur, nous mettant au centre d’un récit oral, musical et visuel. Nous qui foulons le sol libanais, nous qui partageons sa mer et contemplons ses espaces, sommes responsables de constater la violence gravée en eux, nous dit le film. Si on ne peut résoudre les disparitions sans raviver la violence qui les a causées, si on ne peut déterrer les cadavres sans risquer d’exhumer la guerre qui les a tués, on peut au moins admettre l’amnésie, s’en reconnaître responsable, et apaiser par des #actes_mémoriels la violence fantôme qui hante le Liban.

    The Soil and the Sea apporte sa pierre à l’édifice mémoriel par la constitution d’une #géographie qui relève un à un des #lieux de l’oubli libanais. Les récits qui permettent l’enquête ne sont jamais exhaustifs. Ils permettent d’incarner cette géographie, lui donnant le relief et la profondeur qui manquent aux images du quotidien libanais contemporain. Par des procédés fins et dépouillés, le film de #Daniele_Rugo nomme l’innommable, montre ce qui ne peut être montré, et parvient ainsi à nous remémorer notre #oubli.

    https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/liban-sur-les-traces-des-disparus-de-la-guerre-civile,7167
    #film #documentaire #film_documentaire

  • Migrants : la coopération franco-britannique trans-Manche en question
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/03/30/migrants-la-cooperation-franco-britannique-trans-manche-en-question_6225111_

    Migrants : la coopération franco-britannique trans-Manche en question
    Des drames récurrents entachent l’image de la France et du Royaume-Uni, deux pays porteurs des plus hautes valeurs des droits humains, ceux vécus par les migrants qui, chaque jour, au départ des côtes françaises, tentent de franchir la Manche et parfois s’y noient. Au cours des seuls trois premiers mois de 2024, au moins dix d’entre eux ont trouvé la mort, selon la préfecture du Nord. Les traversées maritimes clandestines ont commencé en 2018, succédant aux tentatives via le tunnel, après des années de « sécurisation » de plus en plus drastiques des abords de ce dernier.
    Le gouvernement conservateur britannique a fait du franchissement du channel par small boats, ces canots pneumatiques loués à prix d’or par des trafiquants, un tel enjeu à l’approche des élections législatives qu’il n’a cessé d’accroître sa pression sur les autorités françaises. Depuis 2000, celles-ci ont accepté de se faire les gardiennes de la frontière du Royaume-Uni.
    Les terribles conséquences de cette situation sont décrites dans l’enquête menée en commun par Le Monde et le média Lighthouse Reports. Des policiers ont été vus par des témoins à plusieurs dizaines de mètres de la côte française en train de crever des bateaux bondés ; d’autres créant des vagues pour dissuader les départs. Un exilé syrien est mort après une intervention policière. Quant à la noyade de 27 personnes dans la Manche, le 24 novembre 2021, elle serait à rapprocher de l’absence de réponse à leurs appels de détresse du centre de secours français. Un soupçon d’entrave à l’enquête judiciaire ouverte après cette tragédie pèse sur les autorités militaires.
    Cette hécatombe à bas bruit dans une mer séparant deux des pays les plus riches du monde a une cause : le cynisme révoltant des passeurs, profitant de la détresse de migrants fuyant la pauvreté et la répression. Mais elle se développe dans un cadre juridique spécifique : les accords qui, depuis ceux de Sangatte (2000), du Touquet (2003) et de Sandhurst (2018), délèguent aux forces de l’ordre françaises la surveillance de la frontière britannique.
    En mars 2023, Londres a promis le versement sur trois ans de 543 millions d’euros à la France pour « stopper davantage de bateaux », et 700 policiers et gendarmes français sont affectés à cette tâche. Les officiers britanniques qui participent aux réunions des forces de l’ordre françaises sont devenus « extrêmement intrusifs », selon un cadre de la gendarmerie. Ces pressions expliquent sans aucunement les justifier des pratiques de plus en plus violentes.
    De fait, la France, en empêchant les migrants de gagner la côte anglaise, joue un rôle analogue à celui, contestable, qu’acceptent la Turquie ou la Libye s’agissant des migrations vers l’Europe, en échange d’un financement de l’Union européenne. Ce rôle de la France comme « bras policier de la politique migratoire britannique », dénoncé dès 2015 par la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), doit être questionné. Emmanuel Macron, qui le remettait en cause avant 2017, n’a fait que le conforter depuis qu’il est à l’Elysée.
    Faire cesser les tragédies récurrentes dans la Manche suppose une lutte implacable contre les trafiquants et l’absolu respect des droits humains par les forces de l’ordre. Mais la situation exige aussi que soient rediscutées les conditions de la coopération franco-britannique, actuellement à sens unique, et définies des alternatives à un état de tension sur tout le littoral du nord de la France, qui ne fait qu’envenimer le débat sur l’immigration.

    #Covid-19#migrant#migration#france#royaumeuni#politiquemigratoire#frontiere#CNCDH#traversee#manche#smallboat#sante#mortalite#droit

  • « Il n’existe aucun scénario de transition qui n’implique des changements profonds dans notre relation aux animaux »

    Dans la seconde moitié du mois de mars, quelque part sur la côte qui s’étire entre Kerpape et Larmor-Plage, dans le Morbihan, une laie a pris la mer. Elle s’est jetée dans les flots, sans doute poussée vers l’océan par une battue organisée sur le territoire des deux communes. Mue par une force mystérieuse dont nul ne saura jamais rien, elle a affronté le large. Elle a nagé près de dix kilomètres avant d’accoster sur les rivages de l’île de Groix, au terme d’une épreuve d’autant plus rude qu’elle s’apprêtait à mettre bas.

    L’étrangeté de cette prouesse, son incongruité radicale nous portent à des questions non moins inhabituelles. A quoi pense un sanglier seul, perdu en pleine mer, bousculé par la houle ? Par quelles émotions est-il traversé ? A-t-il peur, et comment ? Hésite-t-il, après un moment, à faire demi-tour ? Quelque chose qui ressemble à de la joie lui passe-t-il par l’esprit lorsqu’il aperçoit enfin une terre à l’horizon ?

    L’épopée de cette laie nous renvoie à ce que nous pourrions projeter de plus humain sur l’animal : la singularité des individus, l’audace exploratrice, la confrontation avec l’inconnu, l’âpreté avec laquelle on lutte pour sa vie et, plus encore, pour celle qu’on s’apprête à donner. Sitôt arrivée à Groix, la laie s’est cachée dans un roncier et y a mis au monde trois petits. Lundi 25 mars, à peine le quotidien Ouest-France avait-il eu le temps de raconter l’histoire que des membres de l’amicale des chasseurs du coin sont tranquillement venus tuer tout ce petit monde – la mère et ses trois marcassins.

    Faits politiques majeurs

    Nul besoin d’être encarté au Parti animaliste pour ressentir un trouble à la lecture de ce fait divers. D’ailleurs, Ouest-France n’a pu l’évacuer en une brève, mais y a consacré pas moins de trois articles. Ce qui trouble, bien sûr, c’est le profond hiatus entre l’énergie déployée par la laie pour survivre et sauver ses petits – et par laquelle elle s’humanise en quelque sorte aux yeux de certains d’entre nous – et la brutalité désinvolte, irréfléchie, avec laquelle la mort, en définitive, lui est administrée.

    Ce n’est pas une histoire pour faire pleurnicher dans les chaumières. Derrière la manière dont nous traitons les #animaux, derrière les motifs et les modalités de leur mort, se cachent souvent des faits politiques majeurs. Et d’autant plus majeurs que nous savons désormais avec certitude qu’il n’existe aucun scénario de transition qui n’implique des changements profonds dans notre relation aux animaux.
    C’est vrai, on le sait, pour ce qui est du #bétail. Outre les questions éthiques qu’elles posent, l’intensification et l’industrialisation de la « production animale » ont des effets catastrophiques sur l’ensemble des #écosystèmes et sur la #santé humaine. La pression sur les #terres_agricoles, dont les deux tiers en Europe sont consacrés à nourrir porcs, bovins et volailles, la disponibilité de la ressource en #eau, la #pollution par les nitrates des cours d’eau, des aquifères et des écosystèmes côtiers, la #déforestation forcenée pour faire place aux monocultures de soja… à des degrés divers, la surconsommation de viande génère ou aggrave tous les grands périls environnementaux et sanitaires.
    Tout cela est directement indexé sur le nombre d’animaux que nous nous permettons de tuer chaque jour : d’une certaine manière, nous payons, et paierons toujours plus, le pouvoir sans limite ni partage que nous nous sommes donné sur leur vie.

    Pour saisir le lien avec notre laie groisillonne, il faut lire un bref et remarquable ouvrage des écologues et géographes Raphaël Mathevet et Roméo Bondon (Sangliers. Géographies d’un animal politique, Actes Sud, 2022). Ils y expliquent comment, et pourquoi, en l’espace d’un demi-siècle, le sanglier est passé du statut d’animal forestier discret à celui d’espèce proliférante et invasive, colonisant tous les milieux. Au début des années 1970, on tuait 35 000 sangliers par an en France. Aujourd’hui, ils sont environ 800 000 par an à être tués, sans que cela semble entamer sérieusement la magnitude des dégâts de toutes sortes qu’ils causent à l’environnement et aux activités humaines.

    Prolifération des sangliers

    Avec le remembrement agricole, l’arrachage des haies et la mise à l’équerre des paysages de nos campagnes, la raréfaction du petit gibier a peu à peu laissé les chasseurs orphelins de leurs proies. Pour perpétuer la chasse et le plaisir de tenir une vie au bout de son fusil, la prolifération des sangliers a été organisée par l’agrainage (nourrissage hivernal), l’#élevage et l’hybridation avec des cochons domestiques plus fertiles, des méthodes de #chasse sélectives, etc. « Alors que, par le passé, le chasseur exerçait un droit de souveraineté qui reposait sur l’alternative “faire mourir ou laisser vivre” le gibier, écrivent les deux auteurs, la chasse du XXe siècle se saisit d’un droit inverse, qui est double : celui de “pouvoir faire vivre et laisser mourir” le gibier. » Ce redoublement du pouvoir que nous nous octroyons sur la vie du gibier vient, là encore, avec un fardeau : subir sa pullulation.

    Mais est-il bien sérieux, alors que le monde traverse tant de drames, et que la famine est redevenue une arme de guerre, de s’appesantir sur le sort des bêtes ? L’indifférence à leur égard, répondent en général les militants de la cause animale, est l’antichambre de celle envers le malheur qui frappe nos semblables les plus fragiles.

    « Des cruautés que l’on voit dans les campagnes commettre sur les animaux, de l’aspect horrible de leur condition, date avec ma pitié pour eux la compréhension des crimes de la force, écrivait Louise Michel dans ses Mémoires, en 1886. C’est ainsi que ceux qui tiennent les peuples agissent envers eux ! »

    Stéphane Foucart
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/03/31/ecologie-il-n-existe-aucun-scenario-de-transition-qui-n-implique-des-changem

    #indifférence #écologie

  • Socialité brisée | Nate Holdren
    https://cabrioles.substack.com/p/socialite-brisee-nate-holdren

    La solitude sociale se mêle à une autre facette de la socialité brisée, que je nommerai solitude politique. C’est le sentiment d’un fossé dans les valeurs ou la compréhension de certains aspects très importants du monde. Savoir que le retour à la normale signifie encore plus de morts et de souffrances qui altèrent la vie est terrible. Savoir que beaucoup de gens ne semblent pas s’en rendre compte, que des compagne·ons de route de gauche ne traitent pas cela comme une priorité, tout cela isole à un degré que je trouve difficile à exprimer.

    #covid #politique #gauche

  • Pourquoi Glucksmann ? - CONTRETEMPS
    https://www.contretemps.eu/pourquoi-glucksmann-parti-socialiste-gauche-strategie-palombarini

    Raphaël Glucksmann semble l’enfant chéri de la presse mainstream, qui voit en lui – dans la perspective des élections européennes à venir – un antidote utile à la gauche de rupture, incarnée depuis plusieurs années par Jean-Luc Mélenchon et la France insoumise. Son profil politique ne laisse effectivement guère place au doute : il s’agit d’une version vaguement rafistolée de l’orientation d’accompagnement du capitalisme néolibéral qui a plongé la gauche dans une crise historique, partout dans le monde.

    Mais qu’est-ce que cela dit des batailles qui se jouent à gauche actuellement et des stratégies des différents partis qui s’étaient unis dans le cadre de la NUPES, en particulier du PS ? L’économiste Stefano Palombarini, auteur notamment (avec Bruno Amable) de L’Illusion du bloc bourgeois, avance quelques pistes.

    #Politique #NUPES #Stratégie

  • La résurrection du crucifié

    À l’occasion de la fête de Pâques, la fête la plus importante et la plus ancienne du christianisme, qui commémore la Résurrection de Jésus, il est approprié de publier un extrait du livre de Kautsky qui questionne la mythologie chrétienne (p. 390-396).

    D. La résurrection du crucifié
    Il ne manquait pas de Messies à l’époque de Jésus, surtout pas en Galilée, où surgissaient à tout instant des prophètes et des chefs de bandes qui se présentaient comme des rédempteurs et des oints du Seigneur. Or, à partir du moment où un tel homme avait succombé devant la puissance romaine, où il avait été arrêté, crucifié ou tué, alors son rôle de Messie était terminé, il était considéré comme un faux prophète et un faux Messie. Il fallait encore attendre la venue du vrai Messie.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/31/la-resurrection-du-crucifie

    #politique #religion

  • La nature humaine est-elle réactionnaire ?

    Derrière ce titre un peu provocateur, la question que soulève ce court billet n’est pas de savoir si l’humain serait naturellement « bon » ou « mauvais », mais celle de savoir si l’idée (et la réalité) d’une « nature humaine » devrait être bannie de toute démarche scientifique, militante, ou les deux.

    Plus d’une fois, alors que je soulignais la probable grande ancienneté de la domination masculine ou de la violence collective, on m’a rétorqué que si c’était vrai, cela voudrait dire que ces maux étaient inscrits dans la nature humaine ; et que comme tout progressiste (et a fortiori, tout marxiste) sait que la nature humaine n’existe pas, cela récusait ipso facto mes arguments.

    Il me semble qu’il y a dans cette réaction banale au moins deux erreurs majeures de raisonnement.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/30/la-nature-humaine-est-elle-reactionnaire

    #science #politique

  • Study: ‘gamechanger’ diabetes drugs cost up to 400 times more than needed
    https://www.theguardian.com/global-development/2024/mar/28/drug-companies-diabetes-drugs-medicines-ozempic-trulicity

    Drug companies are pricing diabetes medicines at almost 400 times the level necessary to make a profit, according to a new study.

    Researchers said it would also be possible for modern insulin pens, which are safer and offer more accurate doses than vials and syringes, to be used even in low-income countries if pharmaceutical firms “put people before their astronomical profits”.

    #pharma #diabète

  • Come il #Vaticano ha contribuito a legittimare l’autocrazia degli Aliyev
    https://irpimedia.irpi.eu/thebakuconnection-vaticano-relazioni-azerbaijan-aliyev

    Le relazioni con Baku sono emblematiche di come la Santa Sede stia cercando di accreditarsi in Oriente come interlocutore per la pace. Con qualche relazione privilegiata L’articolo Come il Vaticano ha contribuito a legittimare l’autocrazia degli Aliyev proviene da IrpiMedia.

    #Mondo #Armenia #Azerbaijan #Politica #Religione

  • En Bretagne, l’eau potable coûtera plus cher à cause des pesticides
    https://www.off-investigation.fr/en-bretagne-leau-potable-coutera-plus-cher-a-cause-des-pesticides

    L’eau en Bretagne est polluée par des métabolites. La persistance de ces résidus de pesticides risque de plomber encore longtemps les factures des consommateurs.Lire la suite : En Bretagne, l’eau potable coûtera plus cher à cause des pesticides

    #Enquêtes

  • Why a Diaspora Alliance?
    https://diasporaalliance.co

    In recent years, we have watched antisemitic rhetoric and violence increase – while political leaders and movements around the world have wielded bad faith accusations of antisemitism to promote authoritarian, racist, and misogynist polices and politics, and attack and attempt to silence Palestinians and their allies.

    Those instrumentalizing antisemitism are doing the opposite of what they purport to do: instead of offering safety, they isolate Jews and leave us vulnerable to real antisemitism; instead of promoting justice, they undermine the projects of democracy and social justice that our collective future on this planet depend on.

    We are united in our commitment to building a world where everyone has what they need to thrive. We know the future of Jewish communities is inextricably linked to the future and well being of all communities, especially those who are uprooted, displaced, and scapegoated—and that is why we chose to be a Diaspora Alliance.

    Beyond the Dichotomy: Disentangling Antisemitism and Anti-Zionism
    https://diasporaalliance.co/wp-content/uploads/2024/02/DA-UK-Response_-LFI_Antisemitic-Antizionism-Response-.pdf

    IHRA Explainer and Messaging
    https://diasporaalliance.co/wp-content/uploads/2023/11/IHRA-Explainer-and-Messaging.pdf

    International Advisory Board

    Alon Confino, Professor of History and Jewish Studies, University of Massachusetts Amherst (US/Israel)
    Amos Goldberg, The Hebrew University of Jerusalem (Israel)
    Anita Altman, Founder, ReelAbilities Festival (US)
    Avraham (Avrum) Burg, Author, Former Speaker of the Knesset (Israel)
    Anselm Franke, Zurich University of Arts (Germany/Switzerland)
    Barbara Kane, Psychoanalyst and Author (US)
    Barrie Kosky, Opera and Theater Director (Germany)
    Rabbi Becky Silverstein (US)
    Benjamin Seroussi, Artistic Director, Casa do Povo (Brazil)
    Dania Rajendra (US)
    Daniel Levy, US/Middle East Project (UK/US)
    David Feldman, Director, Birkbeck Institute for the Study of Antisemitism, University of London (UK)
    Eva Illouz, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (France)
    Eva Menasse, Novelist and Essayist (Germany)
    Francesca Klug, Human Rights Academic and Activist (UK)
    Heidi Grunebaum (South Africa)
    Jessy Tolkan, Founder and President, The Driver Agency (US)
    Jelena Subotic, Professor of Political Science, Georgia State University (US)
    Kathleen Peratis, Co-chair, Jewish Currents (US)
    Layla Al-Zubaidi (Germany)
    Leah Greenberg, Co-Executive Director, Indivisible (US)
    Libby Lenkinski, New Israel Fund (US/Israel)
    Lila Corwin Berman, Professor of History, Temple University (US)
    Marianne Hirsch, Professor, Columbia University (US)
    Max Kenner, Executive Director, Bard Prison Initiative (US)
    Michael Rothberg, Professor, University of California, Los Angeles (US)
    Natasha Josette, Director, Breathe (UK)
    Omri Boehm, Professor, New School for Social Research (US/Israel/Germany)
    Peter Beinart, Professor, City University of New York (US)
    Rabbi Rachel Kahn-Troster (US)
    Rachel E. Luft, Associate Professor, Seattle University (US)
    Rachel Shabi, Journalist and Author (UK)
    Dr. Santiago Slabodsky, Kaufman Chair in Jewish Studies, Hofstra University (US)
    Shahanna McKinney Baldon (US)
    Simone Susskind, Former Member, Brussels Parliament and the Federal Senate (Belgium)
    Stefanie Schüler-Springorum, Center for Research on Antisemitism, Berlin (Germany)
    Susan Neiman, Einstein Forum (Germany)
    Tom Haviv, Ayin Press (US)
    Z”L Natalie Zemon Davis, Princeton University, University of Toronto, (Canada/US)

    *Affiliations are listed for identification purposes only.
    Our Team

    Ben Malley (International)
    Carinne Luck (International Director)
    Charley Katan (UK)
    Diana Falchuk (US)
    Emily Dische-Becker (Germany)
    Emily Hilton (UK)
    Sasha Josette (UK)
    Emma Saltzberg (US)
    Natasha Roth-Rowland (International)
    Shoshana Brown (US)
    Simone Zimmerman (International)
    Tammy Shapiro (US)
    Yael Attia (Germany)

    #sionisme #antisemitisme #politique #gauche

  • L’Actu des Oublié.es • S IV • EP12 • Free Senegal, Partie 2
    https://ricochets.cc/L-Actu-des-Oublie-es-o-S-IV-o-EP12-o-Free-Senegal-Partie-2-7422.html

    Tous les deux lundis, l’Actu des Oublié.es s’intéresse aux luttes dans le monde. Cette semaine, suite et fin de notre volet sur le Sénégal où pour la première fois de l’histoire, un panafricain radical arrive au pouvoir. #Les_Articles

    / #Politique,_divers, #Audio, #International

    https://audioblog.arteradio.com/blog/157476/podcast/224845/saison-iv-e-p12-free-senegal-partie-2#

  • Opérations « Place nette » contre le trafic de drogue : des tensions avec les acteurs de terrain
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/03/26/operations-place-nette-contre-le-trafic-de-drogue-des-tensions-avec-les-acte

    Une nouvelle action antistupéfiants, orchestrée par Gérald Darmanin en personne sur le terrain, a été organisée dans le Nord, lundi. Mais le doute sur l’efficacité de ce dispositif gagne une partie des policiers, des parlementaires et des magistrats.

    Le plan de bataille a été scotché sur le capot d’une voiture de police garée dans une rue de Roubaix (Nord) aux façades de brique rouge. Devant un auditoire de gradés et de caméras de télévision, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, joue au général de campagne, posté devant cette carte de l’agglomération lilloise surmontée du titre : « Opération “Place nette XXL” dans le Nord ». (...)

    Lundi matin, Gérald Darmanin n’a pas eu à partager l’affiche avec le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti, ou Emmanuel Macron, invité de dernière minute à Marseille, le 19 mars. Une façon de reprendre à son compte ce moment politique des « places nettes », qui scande aussi les dernières semaines avant les élections européennes du 9 juin. Le ministre de l’intérieur en a profité pour dévider son argumentaire, notamment son intention de se montrer, grâce à des évolutions législatives, « plus dur avec les consommateurs », qu’il considère « souvent issus de la classe bourgeoise ». En visite à Lyon, vendredi 22 mars, il avait évoqué la possibilité d’autoriser les forces de l’ordre à pratiquer des tests salivaires sur la voie publique afin de verbaliser les consommateurs.

    https://justpaste.it/fy4hw

    #drogues #criminalité #police #communication

  • Nouvelle instrumentalisation de la loi séparatisme : une compagnie de théâtre privée de subvention au motif de son engagement militant

    La compagnie Arlette Moreau, qui réalise dans la rue des spectacles interactifs visant à faire réfléchir les spectateurs sur des problématiques contemporaines, s’est vu refuser une subvention par la Direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité de Nouvelle-Aquitaine au motif que son rapport d’activité ferait état « d’engagements militants non conformes au respect des lois de la République consigné dans le contrat d’engagement républicain (CER) ».

    Cette décision, qui porte une atteinte grave aux libertés d’association, d’expression et de création artistique, repose sur une interprétation erronée des obligations imposées par le contrat d’engagement républicain aux associations et de la loi confortant les principes de la République. Cette interprétation est extrêmement dangereuse en ce qu’elle permettrait aux collectivités publiques de cesser de financer des associations au motif qu’elles tiendraient des discours ou mèneraient des actions militantes, contestataires ou simplement critiques.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/23/nouvelle-instrumentalisation-de-la-loi-separat

    #politique

  • La question des nationalités (1907). Pour une « laïcité nationale »

    Si certain·es pouvaient penser que le sentiment d’appartenance à une histoire, une culture, un destin commun, en un mot le sentiment national, allait se dissoudre, il n’en a rien été.
    Catalogne, Kurdistan, Tibet, Ukraine, Fédération de Russie, Palestine/Israël, Rroms, sans oublier les multiples diasporas… partout dans le monde la question des nationalités, des peuples sans territoire, des territoires avec deux (ou plus) peuples déchire la planète et se pose aux internationalistes.
    La pleine réalisation de droits des peuples est la condition nécessaire à l’émancipation de toutes et tous à la disparition des nationalismes régressifs.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/22/la-question-des-nationalites-1907-pour-une-lai

    #politique #internationale #nation

  • https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/210324/scandale-du-chlordecone-le-conseil-de-l-europe-est-saisi

    Écosystèmes et pollution
    Scandale du chlordécone : le Conseil de l’Europe est saisi

    La Fédération internationale pour les droits humains a déposé jeudi une réclamation collective auprès du Comité européen des droits sociaux pour exiger de la France un accès urgent à l’eau potable en Guadeloupe et des réparations pour l’empoisonnement des Antilles à ce pesticide.

    Mickaël Correia, 21 mars 2024

    Dix-huit ans après le dépôt d’une première plainte qui a débouché en janvier 2023 sur un non-lieu, le combat pour réparer l’empoisonnement des Antilles françaises au chlordécone continue. Ce pesticide, abondamment utilisé dans les bananeraies de 1972 à 1993 en Guadeloupe et en Martinique, est au centre d’une nouvelle action en justice lancée jeudi 21 mars.

    La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH), avec le concours de la Ligue des droits de l’homme et de Kimbé Rèd FWI, association antillaise de défense des droits humains, a déposé une réclamation collective auprès du Comité européen des droits sociaux à l’égard de la France. Cette requête, que Mediapart a pu consulter, dénonce la violation du droit à l’eau potable et à l’assainissement en Guadeloupe, ainsi que la pollution au chlordécone des Antillais et Antillaises, considérée par ces trois organisations comme une atteinte au droit à la santé.

    Cette action contre l’État français est fondée sur la Charte sociale européenne, un traité du Conseil de l’Europe qui garantit le respect des droits économiques et sociaux fondamentaux, tels que la santé et la non-discrimination. Le Comité européen des droits sociaux, à qui a été adressé la réclamation, est l’institution du Conseil de l’Europe chargée de la mise en œuvre de cette charte ratifiée par la France en 1973 puis en 1999, dans sa version révisée.

    Le dossier déposé dénonce dans un premier temps « la privation d’eau potable à plus de 380 000 personnes en Guadeloupe », qui résulte tant des coupures chroniques du réseau de distribution que de la pollution de l’eau, notamment au chlordécone.

    Dans l’objet de la réclamation, la FIDH souligne qu’en Guadeloupe, « jusqu’à 80 % de l’eau produite est perdue à cause de fuites dans les réseaux ». Pis, lorsque l’eau est disponible, elle n’est pas potable en raison de « la vétusté des canalisations », de la « défaillance de l’assainissement » et de la « pollution au chlordécone ».

    Concernant l’empoisonnement au chlordécone des Antilles françaises, le dossier pointe « le manque de mesures préventives et curatives effectives pour plus de 665 000 personnes dont la santé est exposée aux conséquences néfastes du chlordécone en Martinique et en Guadeloupe ». Selon Santé publique France, plus de 90 % de la population adulte y est contaminée par le chlordécone et, dans les deux îles, « les taux d’incidence du cancer de la prostate se situent parmi les plus élevés au monde ».

    Bien que l’Organisation mondiale de la santé eût averti dès 1979 de la dangerosité de ce produit, le chlordécone n’a été interdit en France qu’en 1990, puis a continué d’être utilisé aux Antilles françaises par dérogation ministérielle jusqu’en 1993. À la suite de ces pollutions délétères pour la santé, la requête collective précise que « la traçabilité du chlordécone à titre préventif et la détoxification de l’être humain à titre curatif ne sont pas garanties et [que], fin 2023, seules 45 personnes avaient été indemnisées pour le préjudice subi ».

    En ce sens, concernant l’accès à l’eau potable et l’empoisonnement au chlordécone, le refus de l’État français d’appliquer des mesures d’urgence relève pour la FIDH d’un traitement discriminatoire « qui serait inimaginable dans l’Hexagone » et qui contrevient à plusieurs droits fondamentaux des ultramarin·es, pourtant consacrés par la Charte sociale européenne.

    « La France ne peut pas continuer à ignorer les problèmes récurrents des Antilles. Ils n’ont que trop duré, prévient Elena Crespi, responsable du bureau Europe de l’Ouest à la FIDH. Elle doit enfin reconnaître que la Charte sociale européenne doit s’appliquer à l’ensemble de ses territoires. »

    Face à ces violations « graves et répétées » des droits des Antillais et des Antillaises, l’organisation demande au Comité européen des droits sociaux d’« accorder un traitement prioritaire à [leur] réclamation et […] une attention particulière à la demande de mesures immédiates dont elle est assortie ».

    Dans sa requête, la FIDH exhorte le Comité à demander que « l’État français adopte urgemment des mesures » pour pallier les coupures d’eau et des mesures de traçabilité systématique du chlordécone dans l’alimentation, ou encore mette en place « des mesures de détoxification systématique du corps humain pour les personnes dépistées, en fonction du taux de chlordécone mesuré dans leur sang ».

    Elena Crespi résume : « En donnant une suite favorable à la présente réclamation collective, le Comité européen des droits sociaux inviterait la France à prendre plus sérieusement en compte les inégalités historiques entre l’Hexagone et les territoires ultramarins. »

    Le 29 février dernier, l’Assemblée nationale a adopté une proposition de loi visant à reconnaître la responsabilité de l’État dans le scandale du chlordécone. Dans ce texte, la République française « s’est assigné pour objectif » l’indemnisation des victimes.

    Mickaël Correia

    #Antilles #pollution #empoisonnement #justice

  • Le dévoiement identitaire et discriminatoire de la laïcité

    A l’occasion des vingt ans de la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux ostensibles à l’école, le sociologue Roland Pfefferkorn nous livre une série de 4 articles sans concession sur le dévoiement identitaire et discriminatoire de la laïcité.
    CAALAP (Coordination Antifasciste pour l’Affirmation des Libertés Académiques et Pédagogiques)

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    L’aspiration émancipatrice vers la liberté et l’égalité qui sous-tendait la laïcité historique s’est métamorphosée au cours des dernières décennies en son contraire. Après avoir, dès les lendemains de la Grande guerre, évolué vers une catho-laïcité, elle se transforme désormais aussi en une néo-laïcité identitaire et discriminante. Cette reconfiguration vise principalement à discriminer les musulmans, et parmi eux en premier lieu les femmes. Elle tourne clairement le dos aux principes de liberté et d’égalité et à la séparation des Églises et de l’État qui ont été aux fondements même de la laïcité historique.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/03/20/le-devoiement-identitaire-et-discriminatoire-d

    #politique #laicité