• Nicolas Sarkozy a mésestimé la symbolique politique du pays". Entretien avec Stéphane Rozès - Nonfiction.fr le portail des livres et des idées
    http://www.nonfiction.fr/article-5775-p3-nicolas_sarkozy_a_mesestime_la_symbolique_politique_du_pa

    Nonfiction.fr- Une thèse développée par Laurent Bouvet par exemple est que le legs de Nicolas Sarkozy sera la réintégration dans le système politique français de l’électorat du Front national. Cet électorat, congelé pendant une vingtaine d’années en raison d’un Front national anti-système et infréquentable, sous la houlette de Jean-Marie Le Pen, pourra, du fait de la stratégie de dédiabolisation du Front national par Marine Le Pen et de la droitisation de l’UMP, réintégrer le jeu politique français et donc faire peser sur la politique gouvernementale et législative ses thématiques. La France peut-elle voir arriver au pouvoir, dans le cadre d’une coalition gouvernementale, le Front national, comme c’est le cas pour d’autres partis #populistes en #Europe ?

    Stéphane Rozès- S’il y a un point commun aux populismes européens, dont l’origine est à chercher dans la tension entre la promesse européenne à laquelle les dirigeants s’indexent et la réalité des politiques de libre-échange et de libre-concurrence, c’est l’idée que les élites, par définition, ne seraient pas capables de représenter le peuple. En France, l’articulation entre la question sociale et la question nationale encadre les représentations et les conduites électorales. Je serais effectivement étonné que le paysage politique français change fondamentalement. Dans l’hypothèse d’une forte victoire de François Hollande et d’une forte défaite de Nicolas Sarkozy, #l’UMP éclaterait, l’UDF vivrait par elle-même, et le FN pourrait devenir la première force politique à droite. Qu’est-ce qui serait le plus fort : les dirigeants du #FN ou un segment du pays qui constitue l’électorat du FN ? Je crois que c’est le segment du pays qui vote pour le FN. C’est le pays dans sa diversité qui se forge des représentations. Le FN peut recomposer à droite mais s’il le fait vraiment, que sera t-il devenu ?

    N’oublions pas que c’est l’élection présidentielle qui va déterminer les législatives et la suite. Le FN peut avoir quelques députés, surtout dans l’hypothèse où Nicolas Sarkozy est battu et quitte la vie politique. Les thématiques du parti de Marine Le Pen vont peser. Il y aura une vraie pression sur la politique européenne de la France. Le vrai sujet, c’est ce qui va se passer à Bruxelles. Le populisme n’existe que comme conséquence des politiques qui sont menées. J’aime bien cette phrase de #Bossuet : « Dieu s’amuse de ceux qui s’accablent des effets dont ils chérissent les causes. » Elle s’applique très bien à ce qui se passe en Europe. Dans le cours du monde actuel, qu’est-ce que l’Europe ? Est-ce que c’est une puissance qui pèse sur la globalisation ou est-ce qu’elle est un relais de la globalisation ? Soit l’Europe existe et se protège, soit les herses nationales monteront partout en Europe. Il faut choisir entre un protectionnisme européen ou des #protectionnismes nationaux ainsi que la montée des populismes. Je pense que le débat ne porte pas sur l’opposition entre une France ouverte et une France fermée. Il porte sur l’intériorisation ou la projection de ce que nous voulons faire ensemble. C’est ce qui m’inspire une prudence vis-à-vis du score du FN.