• Isis: In a borderless world, the days when we could fight foreign wars and be safe at home may be long gone

    Isis was quick to understand a truth the West must now confront: that the national borders imposed by colonial powers 100 years go are becoming meaningless, says Robert Fisk

    What really manifested itself that year, I now believe, was a much more deeply held Arab conviction; that the very institutions that we in the West had built for these people 100 years ago were worthless, that the statehood which we had later awarded to artificial nations within equally artificial borders was meaningless. They were rejecting the whole construct that we had foisted upon them. That Egypt regressed back into military patriarchy – and the subsequent and utterly predictable Western acqiescence in this – after a brief period of elected Muslim Brotherhood government, does not change this equation. While the revolutions largely stayed within national boundaries – at least at the start – the borders began to lose their meaning.

    Isis has weirdly replicated this gruesome policy. However many atrocities in Europe have been committed by men who have supposedly been “radicalised” in Syria, the killers have usually been local proxies; British Muslims in the UK, French Muslims who were citizens of France or residents of Belgium. The significance of this – that Isis clearly intends to provoke a civil war within Europe, especially between France’s huge Algerian-origin Muslims and the police and political elite of France – has been spoken of in whispers. Indeed, much of the media coverage of the Paris massacres has often avoided the very word Muslim.

    But that’s what George W Bush and Tony Blair told us before marching into the graveyard of Iraq in 2003. We are always declaring ourselves “at war”. We are told to be merciless. We must invade “their” territory to stop them invading ours. But the days are long gone when we can have foreign adventures and expect to be safe at home. New York, Washington, Madrid, London, Paris all tell us that. Perhaps if we spoke more of “justice” – courts, legal process for killers, however morally repugnant they may be, sentences, prisons, redemption for those who may retrieve their lost souls from the Isis midden – we would be a little safer in our sceptered continent. There should be justice not just for ourselves or our enemies, but for the peoples of the Middle East who have suffered this past century from the theatre of dictatorships and cardboard institutions we created for them – and which have helped Isis to thrive.

    http://www.independent.co.uk/news/world/middle-east/isis-in-a-borderless-world-the-days-when-we-could-fight-foreign-wars-
    #Etat-nation #ISIS #EI #Etat_islamique #Etat_national #frontières #post-colonialisme #colonialisme #nations_imaginaires #justice
    cc @reka

    • Pourvu qu’il n’ait pas raison...

      The significance of this – that Isis clearly intends to provoke a civil war within Europe, especially between France’s huge Algerian-origin Muslims and the police and political elite of France – has been spoken of in whispers

      #guerre_civile

  • Historiographies d’ailleurs : Comment écrit-on l’histoire en dehors du monde occidental ? - La Cliothèque
    http://clio-cr.clionautes.org/historiographies-d-ailleurs-comment-ecrit-on-l-histoire-en-dehor

    Nathalie Kouamé rassemble ici une vingtaine de contributions. Dans une introduction très claire, elle explique le projet en rappelant l’influence qu’ont eu les Occidentaux sur l’écriture de l’Histoire. Ils ont diffusé leurs modèles à l’échelle de la planète. Cependant, cette histoire occidentale n’a pas fait disparaitre les autres histoires. Elle évoque d’ailleurs cette tendance actuelle à revisiter l’histoire du monde en citant le livre récent d’Hervé Inglebert « Le monde, l’histoire : essai sur les histoires universelles ». Ce livre s’interroge donc sur les relations que l’histoire entretient avec les différents pouvoirs qui constituent ou qui dominent à un moment donné une société.

    #historiographie #histoire #pouvoir #occidentocentrisme

  • #Sénégal - Massacre de #Thiaroye : 1er décembre 1944, quand l’armée française décimait ses « #indigènes »
    http://www.jeuneafrique.com/Article/ARTJAWEB20141128114120

    Le 1er décembre 1944, des dizaines de tirailleurs sénégalais qui réclamaient le paiement de leurs soldes étaient massacrés par l’armée française dans le camp de Thiaroye, près de #Dakar. Soixante-dix ans après, retour sur ce drame et ses zones d’ombres en vidéo.

    C’est l’un des pires crimes commis par l’armée française à l’encontre des soldats « indigènes », ces hommes issus des colonies qui se sont battus pour la #France durant les deux guerres mondiale. Il y a soixante-dix ans, le 1er décembre 1944, à la levée du jour, des militaires français ouvraient le feu sans merci sur des tirailleurs sénégalais massés dans le camp de Thiaroye. Accusés de mutinerie par leur hiérarchie, ces soldats, originaires de toute l’Afrique occidentale française (AOF), avaient simplement osé réclamer le paiement de leurs arriérés de soldes.

    Aujourd’hui encore, la vérité sur ce massacre n’a toujours pas été clairement établie et les autorités françaises commencent à peine à reconnaitre les faits. Pour le soixante-dixième anniversaire de commémoration, une cérémonie officielle regroupant le président français, François Hollande, et son homologue sénégalais, Macky Sall, sera organisée à Thiaroye en marge du sommet de la Francophonie, qui se tient les 29 et 30 novembre à Dakar. En attendant d’éventuelles annonces du chef de l’État français, retour, en vidéo, sur ce drame et ses zones d’ombre.

    http://www.dailymotion.com/video/x2b9ti9_retour-sur-le-massacre-de-thiaroye-le-1er-decembre-1944_news#fr

  • Intervention de Houria Bouteldja lors de la plénière de clôture « Au-delà de l’impérialisme » au colloque Penser l’émancipation http://penserlemancipation.net la semaine dernière à Nanterre.

    Dieudonné au prisme de la gauche blanche ou comment penser l’internationalisme domestique ? | Les Indigènes de la République
    http://indigenes-republique.fr/dieudonne-au-prisme-de-la-gauche-blanche-ou-comment-penser-lint

    Avant de commencer, permettez-moi de faire un petit préambule en quatre points :

    1/ Je voudrais prévenir que mon propos n’est pas de gauche. Il n’est pas de droite non plus. Mais il n’est pas extra-terrestre. Il est décolonial. J’ai envie de vous dire qu’à la fin de mon intervention, ce sera à vous de décider s’il est de #gauche ou pas ou en d’autres termes s’il pourrait vous appartenir, ou en d’autre terme si vous pensez qu’il pourrait s’intégrer au logiciel #politique de la gauche radicale.

    2/ Je vous invite également à garder en tête que je suis une indigène de la république, qu’il s’agit là d’un statut politique et social, que je parle à partir de l’expérience historique et sociale d’un sujet colonial. Cette positionnalité introduit dans le débat et dans la lutte une dialectique et des conflictualités paradoxales qui mettent en évidence un autre axe de clivage qui est la race et la colonialité du pouvoir et qui souvent brouillent le clivage gauche/droite. C’est ce brouillage que nous tentons d’expliquer par le concept d’ « espace/temps » mais que je n’ai pas le temps de développer ici.

    3/ J’ajoute que j’appartiens à une organisation politique et qu’au sein de celle-ci, nous réfléchissons principalement en termes d’enjeux politiques, de rapports de force, de pouvoir, de stratégie et non en terme de morale abstraite et de principe.

    4/ Enfin, retenez cette citation de Sadri Khiari : « Parce qu’elle est le partenaire indispensable des indigènes, la gauche est leur adversaire premier ».

    #race cc : @alaingresh @mona @isskein

    • De ce point de vue-là qui est un point de vue matérialiste, les populations issues de l’immigration et des quartiers n’ont aucune raison de rester fidèles à la gauche. Et ils ont raison. Leur tort n’est pas de se libérer de la gauche. Leur tort c’est de passer d’un maître à un autre. De changer de tuteur. Leur tort ici, c’est de choisir la facilité. De fuir les sentiers de l’autonomie.

      #émancipation #post-colonialisme #racisme #extrême-droite

    • C’est probablement ça leur « positionnalité » comme dit cet Houria. Pur baratin, sous-branche des études de genre, catégorie : je-réfléchis-blah-blah

    • tbn, comment construire une réflexion politique sans « principe » guidant ta recherche ?
      Ni « extra-terreste » mais « décolonial », dit le type dans sa 1° partie définissant les caractéristiques même de sa « pensée ». « Décolonial » ? c’est quoi ? Et la « colonialité » ? Charabia, verbosité d’une pensée absente, parlotte... Une confusion sans limite squatte cet esprit désespérément à la recherche d’un nouveau sens à donner à sa vie. « Matérialiste », propose généreusement Rasta, c’est bien aimable ; ce qui est incontestable c’est qu’il y a là un orphelin de la pensée, certes à la recherche d’un maître. Mais cela ne fait pas de lui et des siens un réaliste. Se définissant contre, ils imaginent maîtriser une démarche politique ( paragraphe 3) encore des mots ; ils sont dans le potage car (et parce que) ils refusent les nécessaires outils de toute pensée cohérente.
      Bon, j’en fais pas une affaire...

    • Perso, c’est plutôt tes phrases qui ne sont absolument pas claires et que je qualifierai de « charabia » @paulo. Ça parle dans le flou, on ne comprend pas vraiment de quel sujet tu parles, à quoi tu fais allusion, à quels outils, etc. Comme si tu ne parlais que par private joke, genre « ceux qui savent me comprennent hinhinhin ».

      Avant de dire que le PIR ne se base sur rien, sur du vide, que les luttes décoloniales ne sont que de la « verbiosité » (sic quoi !), peut-être faudrait-il lire un peu, je ne sais pas moi : Césaire, Frantz Fanon, James Baldwin, Edward Said… Que du charabia tout ça…

    • Bon, je vois que tu proposes des lectures. Elles ont été les miennes, il y a déjà longtemps. Avec d’ailleurs le tri que le temps a imposé.
      Quant à ceux-ci , les « PIR » que tu parais comprendre, je ne vois dans ces déclarations aucune cohérence, rien de l’exigence d’un Saïd, par exemple. Uniquement des tentatives pour se donner une ligne politique, bref un groupe à la recherche de son pouvoir.
      Non. Pas de private joke, surtout si l’humour manque.
      Je ne suis pas ici pour convaincre.

    • J’ajoute Rasta ( effet d’amour-propre : paulo est vexé) que je n’ai jamais lu chez Saïd, jamais , cette sorte de néologismes échangés entre des gus qui doivent pour le coup s’entendre à demi-mots.

    • D’ailleurs si Rasta. -ou d’autres- ont des références précises à proposer, je veux bien en échange bouffer mon chapeau. Faut pas jeter des bouquins à la tête du client.

    • Si c’est le néologisme « colonialité » qui te pose problème @paulo, on pourrait le définir par un état d’infériorité subi par des populations colonisées et par leur dépendance vis à vis de la puissance coloniale, dépendance d’ordres divers, de l’économique au psychologique en passant par le culturel.
      C’est marrant, j’étais prêt à te donner les références cités par @rastapopoulos mais il semble que tu aies le don de l’énerver. Me trompe-je ? :-D
      A la décharge de ce dernier, tu as une fâcheuse tendance à affirmer des positions qui mériteraient un tant soit peu d’être développées.
      Pour revenir au contenu, relis tout de même l’article de Houria Bouteldja et aussi (et surtout) les articles qui sont liés :
      http://indigenes-republique.fr/dieudonne-les-juifs-et-nous
      http://indigenes-republique.fr/pour-une-lecture-decoloniale-de-la-shoah avec ce passage qui pose une vraie question

      Des anticolonialistes comme Aimé Césaire à travers cette réflexion « où Hitler a-t-il appris le racisme ? » ont quant à eux établi une filiation nette entre la traite atlantique, le colonialisme occidental et le nazisme. Ces deux pistes de réflexion nous paraissent devoir être prolongées et approfondies dans le cadre de l’effort nécessaire pour déconstruire la Shoah comme « religion civile du monde occidental » (Enzo Traverso) et replacer la dénonciation du génocide nazi dans le cadre d’un projet décolonial, critique de la Modernité.

      En conclusion et pour faire bref, le PIR est contre l’intégrationnisme. Oui, je sais encore un mot en -isme mais qui définit bien la volonté d’assimilation de la part des élites politiques françaises à l’encontre des immigrés en général, comme si on voulait gommer l’identité ethnique et culturelle de tous ces gens qui ont choisi (ou pas) de venir en France. Peau noire, masque blanc, c’est bien cela que Fanon avait dénoncé en son temps.

    • Merci Hombre. Tu te trompes-je pas. J’ai en effet le don d’énerver quelques uns sur le circuit. Pourtant j’aime les lire, enfin, certains.
      C’est regrettable, ça joue des mauvais tours et ça fait mauvais effet.
      Je me souviens d’un gus qui s’était demandé sur ma page : « troll ? ». (Merde à l’unanimité.)

      « Brièveté des positions » ? Oui. C’est qu’il existe une culture ( et même plusieurs), des références et des lectures qui, me semble-t-il, n’ont pas besoin d’être claironnées, vu que le site a par lui-même clairement opéré un tri. Non ?

      ( Je me souviens d’une fille qui avait été jetée dehors d’ici. J’en avais été étonné. Elle était pas casher, loin de là, donc on lui avait coupé le sifflet)
      Puis d’autres accrochages encore, par exemple avec quelque féministe en fureur, avide donner des leçons de correction avec toute la brutalité qui trahissait le simple et dur désir de pouvoir.

      Alors les développements du PIR , ceux rapportés par tbn, faudrait détailler par le menu en quoi c’est une « pensée » d’ectoplasme ? un exposé sans contenu ?
      Ca me rappelle un texte théorique d’un groupe de réflexion communiste rapporté ici, il y a quelques mois. Pure compote de termes, aucun contenu, comique branlette née de l’entre-soi. Quasi-moisi par manque d’oxygène.

      Faudrait pas exagérer, du moins le croyais-je, la solidarité se mérite, et voilà que pas du tout. : je me trompe-je !
      ( re-merde)

      ( quant à « déconstruire » l’holocauste, sous le prétexte de « replacer la dénonciation du génocide nazi dans le cadre d’un projet décolonial, critique de la Modernité », ça me fait spontanément gerber ; je laisse ça à ceux-là qui ne comprennent pas qu’ils sont juifs et palestiniens. Ce qu’avait parfaitement énoncé E. Saïd. Faut dire qu’il ne manquait pas d’air, lui. Né palestinien, avec enfance en Egypte, puis devenu américain ( avec toutes les humiliations)... Ce qui crée des haines durables dans tous les camps.

      « Où Hitler a appris le racisme ? » Grand poète et tout, Aimé Césaire, pas de doute. sauf que cette question révèle une candeur sans fond.
      Ca me rappelle ma mère juive russe (et agnostique) en fuite qui me racontait l’antisémitisme des bolchos, la haine féroce du juif chez les Polonais de l’entre-deux guerres ( encore maintenant) et le mépris subi chez les Anglais, pour être enfin dénoncée en 1943 comme juive aux nazis d’Aloïs Brunner par les russes blancs de Nice. Où donc avaient-ils tous appris la même chose ?

      Déconstruisez moi ça, on va enfin comprendre.

      Comparer les souffrances afin d’en légitimer certaines qui seraient plus actuelles et pas d’autres est simplement abjecte. C’est la caractéristique d’apprentis politiques dévoyés, propagateurs de la confusion actuelle.
      Bon, voilà, tant pis c’est dit et c’est trop long, Hermano.

    • C’est long et rempli de colère. Mais ça donne quelques pistes pour approfondir : par exemple, je ne connais pas encore Edward Said.

      Le racisme est d’une telle complexité qu’on peut s’y perdre.
      La lecture de Lévi Strauss peut être également très éclairante. Surtout dans « Race et histoire »

      Il y a donc une pluralité de cultures. Mais comment les jugeons-nous ? Nous les cataloguons selon deux critères : stationnaires ou cumulatives. Nous considérons comme cumulative toute culture allant dans le même sens que la nôtre, tandis que nous considérons les autres comme stationnaires « non pas nécessairement parce qu’elles le sont, mais parce que leur ligne de développement ne signifie rien pour nous, n’est pas mesurable dans les termes du système de référence que nous utilisons. »

      Lévi-Strauss ajoute que le progrès n’est ni nécessaire ni continu. Il procède par bonds, par mutations. Ces bonds ne consistent pas à aller toujours plus loin dans la même direction. « L’humanité en progrès ne ressemble guère à un personnage gravissant un escalier, ajoutant par chacun de ses mouvements une marche nouvelle à toutes celles dont la conquête lui est acquise. » Une culture momentanément stationnaire nous paraît dépourvue d’intérêt simplement parce qu’elle ne nous ressemble pas.

      Dans http://fr.wikipedia.org/wiki/Race_et_Histoire

      Et le complément « Race et culture »

      Race et culture, commandée en 1971 par l’Unesco à l’occasion d’une Année internationale de lutte contre le racisme. On attendait de lui qu’il reproduise les analyses développées, en 1952, dans Race et histoire et fondées sur le principe fondamental de la connaissance ethnologique : la relativité des cultures et l’impossibilité d’établir entre elles une quelconque hiérarchie. Mais Lévi-Strauss n’aime pas se répéter. Et surtout, il ne voulut pas cautionner le catéchisme moral qui, au prix d’une dangereuse confusion, dénonce comme raciste tout propos ou attitude consistant à manifester une préférence pour la culture à laquelle on appartient. Or le racisme, doctrine qui enracine les particularités intellectuelles et morales dans le patrimoine génétique d’une supposée race, n’est pas l’ethnocentrisme, naïf sentiment de supériorité qui accompagne toute culture. Tout le péché de la conférence de 1971 consistait donc à ne pas faire allégeance à l’idéologie multiculturaliste dont l’auteur, vingt ans plus tôt, pointait pourtant déjà les dangers : car si les cultures renoncent à faire valoir leurs différences au nom du principe de l’égalité des hommes, elles risquent fort de s’engager sur la voie appauvrissante d’une civilisation mondiale homogène.
      Deux textes historiques donc, qui aideront à éclaircir un débat où les bons sentiments éclipsent souvent la rigueur intellectuelle. —Emilio Balturi

  • La culpabilité : c’est l’homme blanc

    Cette image accompagnait l’article d’Erik Helmerson sur le post-colonialisme...

    https://dl.dropbox.com/s/z5hieopixfvgajg/colonisation.jpg

    Skulden är en vit man - DN.SE

    http://www.dn.se/ledare/signerat/skulden-ar-en-vit-man

    Skulden är en vit man

    Publicerad 2013-02-22 00:05
    Signerat – Erik Helmerson

    Artikeln i Dagens Arena den 19 februari innehåller flera egentligen oerhört kontroversiella påståenden. Här är tre av dem:

    1. Att säga ”babbe” och ”hora” är att tala ur hjärtat av den västerländska civilisationen.

    #colonialisme #post-colonialisme

  • « La nounou doit rester au bord du cocon bourgeois » - Libération
    http://www.liberation.fr/vous/01012388040-la-nounou-doit-rester-au-bord-du-cocon-bourgeois

    (très intéressant)

    Une enquête fouillée analyse le rapport entre mères parisiennes et migrantes venues du Sud qui gardent leurs enfants. Son auteure, la sociologue Caroline Ibos, revient sur cette relation où clichés post-coloniaux et préjugés raciaux perdurent

    #femmes #enfants #emploi #racisme #post-colonialisme #sexisme

    • A vrai dire, ce livre donne envie de crier « vive la crèche ! » Mais c’est un autre débat.

      Ah oui mais quand même, c’est drôlement important, dans le « débat », cette question ! S’il y avait suffisamment de places en crèche, j’aimerais bien savoir si les gens feraient encore appel à une nounou.

      Il n’y a tout de même qu’en évacuant ainsi la question qu’on peut écrire des phrases comme : « des migrantes venues du Sud pour s’occuper des tâches domestiques, permettant ainsi l’émancipation des Occidentales ». Non : le principe, pour permettre l’« émancipation » des individus (et si possible permettre une émancipation pas totalement inégalitaire réservée aux femmes les plus riches), c’est qu’on mutualise certaines tâches. En notamment la garde des enfants. S’il n’y a pas de solution mutualisée, il y a quoi ? Hé bien il y a les nounous et, forcément, ça n’est pas idéal (et notamment : c’est le contraire de l’émancipation plus égalitaire et correctement rémunérée que permet la mutualisation) : le rapport inégalitaire de l’entreprise (lieu un peu encadré et un peu public) passe dans le cadre ultra-restreint de la vie privée.

      Du coup, limite habituelle : on évacue le problème qui provoque la situation (il n’y a jamais assez de places en crèche), et on fait dans la critique culturelle contre ces méchantes bourgeoises parisiennes et leurs complexes racialo-sexistes. Facile : le manque de solutions mutualisées, c’est « un autre débat ».

    • En même temps, ne pas évacuer le problème — et j’imagine que l’auteur de l’enquête doit déplorer grandement le manque de crèches — ne change pas la situation : s’il est un peu gonflé de faire à nouveau peser cette responsabilité sur les femmes, l’analyse en terme de rapport de domination économico-ethnique ne semble pas invalide. La différence importante avec le même débat sur le ménage venant du caractère obligatoire de l’emploi d’une nounou quand les parents travaillent tous deux.

      Par ailleurs, je suis certain que s’il y avait des places en crèches, des gens feraient encore appels à des nounous, mais leur classe sociale serait probablement plus homogène.

    • Oui mais c’est justement cette contradiction qui me semble centrale :

      l’analyse en terme de rapport de domination économico-ethnique ne semble pas invalide. La différence importante […] caractère obligatoire de l’emploi d’une nounou

      Je ne suis pas sociologue de profession, m’enfin c’est ce qui m’a sauté aux yeux : tu ne peux pas prétendre étudier le rapport entre les gens si tu évacues un élément aussi important que la raison principale pour laquelle il y a ce rapport :
      – pas de place en crèche,
      – donc obligé de faire garder les enfants,
      – même en garde partagée avec une autre famille, ça coûte très cher chaque mois ;
      – donc pour limiter, emploi d’une personne aussi peu qualifiée que possible (SMIC) ;
      – donc employées immigrées « du Sud » (comme dans le BTP, c’est pas une lubie de bourgeoise parisienne) ;
      – donc évidemment que le rapport entre une famille obligée de débourser tout de même une somme importante pour employer une personne très peu qualifiée, ça induit des rapports forcément pas déments ;
      – et puisque les gens ne sont pas totalement des monstres, face à une situation inégalitaire pas démente dans leur propre foyer, ils développent (ou adoptent) un discours d’auto-justification à la con, à base d’amour maternel et de critères ethno-centrés. Il est d’ailleurs mentionné que les employeurs ne se perçoivent pas comme racistes ; il y a donc une tension morale chez ces gens.

      Je dis pas qu’il n’y a pas une classe sociale qui préférera toujours les nounous, ni qu’il n’y a pas des gens bourrés de préjugés a priori. Mais en l’occurrence, l’interview généralise en évacuant une question centrale.

    • Je ne suis pas sociologue non plus, mais la plupart du temps, les situations de domination ne sont pas la conséquence de méchanceté de la part des dominants ou de seuls arbitrages moralement indéfendables mais le résultat d’un contexte socio-économico-politique particulier. Il ne s’agit pas de dire que les parents qui emploient des nounous sont des nazis exploiteurs mais d’analyser les rapports de facto qui sont issus de cette situation. Enfin, j’imagine, mais il faudrait lire le livre.

    • Oui, mais l’interview qui est référencée contient un certain nombre d’affirmations très claires.

      Immédiatement, et c’est l’un des axes du livre, on voit que l’émancipation des femmes diplômées n’est possible que parce que des femmes pauvres prennent en charge les tâches culturellement féminines.

      C’est tout de même là-dessus que je réagis dans mon premier message : non, c’est faux. Ce qui permet d’émancipation des femmes (en général) du côté de la garde des enfants, c’est la mutualisation de la garde. Le « n’est possible que parce… » est ultra-restrictif, et donc totalement faux.

      Mon hypothèse est que la société française reste bien plus qu’elle ne le croit une société post-coloniale et que les préjugés racistes sont loin d’avoir disparu.

      Pourquoi pas. Mais dans ce cas, l’hypothèse retenue n’est pas loin des méchants nazis exploiteurs.

      Pour parfaire son petit monde intérieur, la mère…
      Employée pour préserver et améliorer l’harmonie…

      Donc ça n’est pas parce que les couples qui travaillent à Paris n’ont pas le choix (faute de place en crèche) qu’ils employent une nounou, mais c’est « pour parfaire son petit monde intérieur » et en « préserver et améliorer l’harmonie ».

      Et on termine avec un référence la « lecture radicale » de « certaines sociologues américaines », directement liée à l’histoire de l’esclavage (notion qui n’apparaît pas dans l’exposé de l’histoire de la domesticité chez les bourgeois, précédemment).

    • En tout cas, moi ce que je sais c’est qu’apparemment une femme noire avec un enfant blond, c’est forcément une nounou et y’a des trucs qu’elle peut pas faire avec le gamin au parc sans s’attirer les foudres des mères et autres nounous du parc. Par exemple : prendre le gamin sur ses épaules, lui faire faire l’avion etc. Pour la fin de mon histoire sans rapport direct réel, face au courroux, j’ai bêtement signalé que les blonds en question étaient mes filleuls, nièces etc. et tout le monde s’est excusé. Moralité : la nounou est mal payée et doit rester à sa place avec la poussette.

    • #supergeante : je ne réfute pas l’idée qu’il y a un rapport de classe qui peut être violent et des critères sexistes, racistes, ethnocentrés. Je ne réfute pas non plus l’idée que l’ambiance dans les jardins publics pour enfants est carrément tarée de chez tarée (je suis un homme, blanc, même milieu social que les « employeurs », et il n’est pas du tout apprécié que je prenne dans mes bras un(e) gamin(e) qui vient de se vautrer en bas du toboggan pour le(la) consoler). Et je n’ignore pas non plus que les réflexes racistes sont omniprésents.

      Je fais remarquer que l’article utilise des tournures qui disent absolument autre chose : « pour parfaire son petit monde intérieur », et réaliser son « émancipation », la « femme diplômée » des « capitales du Nord » n’a d’autre choix, dans « une société post-coloniale », que d’exploiter la « femme du Sud ». Bref, l’émancipation de la femme blanche « n’est possible » que par l’exploitation de la femme noire, comme l’Europe et le Nouveau monde pré-industriels n’ont pu se développer économiquement que par l’esclavage de l’homme noir. C’est quasiment explicité ainsi.

      Sauf que ça ne tient que si on évacue la question du manque de solutions mutualisées de garde d’enfant.

    • Mes 2 enfants sont allés en crèche (coup de bol sur Paris), mais auparavant, ils sont allés chez des nourrices agréées. A noter que la nourrice est formée et suivie par la mairie, et que l’enfant est gardé chez elle : c’est une professionnelle, elle est reconnue comme telle par ses employeurs qui en ont fait la démarche. Le rapport est plus égalitaire. L’autre solution de garde pour les touts-petits, extrêmement malsaine, consiste à employer une personne pour garder les enfants ET faire le ménage, repasser, faire la vaisselle... Dans ce cas, on se rapproche plus de la bonne (à tout faire), et le rapport employeur-employé est bien différent, puisqu’il ne s’agit plus d’une professionnelle, comme dans le cas précédent. Donc oui aux crèches ou aux nourrices agrées, comme formes de gardes. Et non au bricolage.

    • @arno, l’argument du manque de crèche ne tient qu’en partie. Rien n’empêche ces familles de mettre en place des crèches parentales. C’est moins couteux qu’une nounou à domicile (multiplié par n enfants), plus structurant et pour l’enfant et pour les parents, et les professionnelles qui les encadrent sont mieux rémunérées. Cette mutualisation, c’est un état d’esprit, c’est une vraie démarche citoyenne pour lesquelles ces « bourgeoises » ne sont peut-être pas prête à faire le pas. En tout cas, personne ne leur interdit.

    • Les crèches parentales, c’est pas si simple à mettre en place et ça implique de pouvoir régulièrement y assurer une partie du travail, ce qui est loin d’être évident pour tout le monde. Et dans tous les cas, y’a pas beaucoup de places non plus…

    • mais peut-être qu’en province c’est plus facile, ici au Mans pour pallier le manque de crèches municipales il y a des crèches parentales et des nourrices agréées qui travaillent chez elles et gardent plusieurs enfants. Ce sont peut-être ces dernières qui font défaut à Paris et c’est peut-être là une des clés du problème.

    • @odilon : mais l’alternative ne se réduit pas à l’esclavagisme OU l’autogestion.

      Je parle bien de cette interview précise, dont j’extrais des phrases très dures qui s’attardent lourdement sur la mentalité colonialiste des femmes émancipées du Nord. Si on reste dans la question de la mentalité (le cadre de référence de ces mêmes femmes), j’ai signalé qu’il y a déjà une solution, conçue justement dans le cadre de référence de ces parisiennes, qui est la crèche. Contrairement à la réduction « n’est possible que… », je soutiens qu’elles disposent déjà dans leur propre logique d’une solution qui n’est ni « post-coloniale » ni de pure exploitation.

      On est bien libre, ensuite, de leur reprocher de ne pas être à la tête de la révolution par l’autogestion (m’enfin bon…), mais pour autant, dans le cadre « social démocrate » qui structure leur fonctionnement, elles ont déjà une solution qui n’est pas la nostalgie de l’esclavagisme dont cet article semble se délecter. Logique pas totalement dégueulasse : « dans mon modèle mental et dans mon modèle de société, je paie des impôts justement pour mutualiser un certain nombre de choses : la santé, la sécurité, l’éducation… » Oui, c’est une culture de délégation qu’on peut critiquer, mais ça n’est pas du tout la même chose que la nostalgie de l’esclavage pour « parfaire son petit monde intérieur ».

    • @arno, tatata, je n’ai en aucun cas posé comme alternative esclavagisme ou autogestion :)) Je t’accorde que les phrases que tu relèves présentées ainsi sont un peu caricaturales mais c’est une interview (ou extraits), cela reflète-t-il fidèlement l’esprit de l’auteur du livre en question ou celui de la journaliste qui l’a mené. On en sait assez peu sur le contexte sociologique là.

    • Odilon, vraiment très très d’accord sur cet aspect interview. J’aurais aussi tendance à croire que le livre, fruit de 3 ans de travail, est très différent de ce que la journaliste a choisi de retenir de l’entretien avec la sociologue. Mais bon, à nouveau, je commente ce qui est référencé dans le lien, hein.