• #Loi_immigration : l’accueil des étrangers n’est pas un fardeau mais une nécessité économique

    Contrairement aux discours répétés ad nauseam, le #coût des aides accordées aux immigrés, dont la jeunesse permet de compenser le vieillissement des Français, est extrêmement faible. Le #poids_financier de l’#immigration n’est qu’un #faux_problème brandi pour flatter les plus bas instincts.

    Quand les paroles ne sont plus audibles, écrasées par trop de contre-vérités et de mauvaise foi, il est bon parfois de se référer aux #chiffres. Alors que le débat sur la loi immigration va rebondir dans les semaines à venir, l’idée d’entendre à nouveau les sempiternels discours sur l’étranger qui coûte cher et prend nos emplois nous monte déjà au cerveau. Si l’on regarde concrètement ce qu’il en est, le coût de l’immigration en France, que certains présentent comme bien trop élevé, serait en réalité extrêmement faible selon les économistes. Pour l’OCDE, il est contenu entre -0,5% et +0,5% du PIB selon les pays d’Europe, soit un montant parfaitement supportable. Certes, les immigrés reçoivent davantage d’#aides que les autres (et encore, beaucoup d’entre elles ne sont pas réclamées) car ils sont pour la plupart dans une situation précaire, mais leur #jeunesse permet de compenser le vieillissement de la population française, et donc de booster l’économie.

    Eh oui, il est bien loin ce temps de l’après-guerre où les naissances explosaient : les bébés de cette période ont tous pris leur retraite ou sont en passe de le faire et, bientôt, il n’y aura plus assez de jeunes pour abonder les caisses de #retraite et d’#assurance_sociale. Sans compter que, vu l’allongement de la durée de vie, la question de la dépendance va requérir énormément de main-d’œuvre et, pour le coup, devenir un véritable poids financier. L’immigration, loin d’être un fardeau, est bien une #nécessité si l’on ne veut pas voir imploser notre modèle de société. Les Allemands, eux, l’assument haut et fort : ils ont besoin d’immigrés pour faire tourner le pays, comme l’a clamé le chancelier Olaf Scholz au dernier sommet économique de Davos. Le poids financier de l’immigration est donc un faux problème brandi par des politiques qui ne pensent qu’à flatter les plus bas instincts d’une population qui craint que l’avenir soit pire encore que le présent. On peut la comprendre, mais elle se trompe d’ennemi.

    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/loi-immigration-laccueil-des-etrangers-nest-pas-un-fardeau-mais-une-neces
    #économie #démographie #France #migrations

    –-

    voir aussi cette métaliste sur le lien entre #économie (et surtout l’#Etat_providence) et la #migration... des arguments pour détruire l’#idée_reçue : « Les migrants profitent (voire : viennent POUR profiter) du système social des pays européens »...
    https://seenthis.net/messages/971875

    ping @karine4

    • Sur les #prestations_sociales aux étrangers, la #contradiction d’#Emmanuel_Macron

      Le pouvoir exécutif vante une loi « immigration » qui concourt à une meilleure intégration des « travailleurs » et soutient « ceux qui travaillent ». Mais la restriction des droits sociaux pour les non-Européens fragilise le système de #protection_sociale.

      Depuis son adoption au Parlement, la loi relative à l’immigration est présentée par Emmanuel Macron et par le gouvernement comme fidèle à la doctrine du « #en_même_temps ». D’un côté, le texte prétend lutter « contre les #passeurs » et l’entrée illicite d’étrangers dans l’Hexagone. De l’autre, il viserait à « mieux intégrer ceux qui ont vocation à demeurer sur notre sol » : les « réfugiés, étudiants, chercheurs, travailleurs ». En s’exprimant ainsi dans ses vœux à la nation, le 31 décembre 2023, le président de la République a cherché à montrer que la #réforme, fruit d’un compromis avec les élus Les Républicains, et inspirée par endroits du logiciel du Rassemblement national, conciliait #fermeté et #humanisme.

      Mais cette volonté d’#équilibre est contredite par les mesures concernant les prestations sociales. En réalité, le texte pose de nouvelles règles qui durcissent les conditions d’accès à plusieurs droits pour les étrangers non ressortissants de l’Union européenne, en situation régulière, ce qui risque de plonger ces personnes dans le dénuement.

      Un premier régime est créé, qui prévoit que l’étranger devra soit avoir résidé en France depuis au moins cinq ans, soit « justifier d’une durée d’affiliation d’au moins trente mois au titre d’une activité professionnelle » – sachant que cela peut aussi inclure des périodes non travaillées (chômage, arrêt-maladie). Ce « #délai_de_carence » est une nouveauté pour les aides visées : #allocations_familiales, prestation d’accueil du jeune enfant, allocation de rentrée scolaire, complément familial, allocation personnalisée d’autonomie, etc.

      « #Régression considérable »

      Un deuxième régime est mis en place pour les #aides_personnelles_au_logement (#APL) : pour les toucher, l’étranger devra soit être titulaire d’un visa étudiant, soit être établi sur le territoire depuis au moins cinq ans, soit justifier d’une « durée d’affiliation d’au moins trois mois au titre d’une activité professionnelle ». Là aussi, il s’agit d’une innovation. Ces critères plus stricts, précise la loi, ne jouent cependant pas pour ceux qui ont obtenu le statut de réfugié ou détiennent la carte de résident.

      Le 19 décembre 2023, Olivier Dussopt, le ministre du travail, a réfuté la logique d’une #discrimination entre nationaux et étrangers, et fait valoir que le texte établissait une « #différence » entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas, « qu’on soit français ou qu’on soit étranger ». « Nous voulons que celles et ceux qui travaillent soient mieux accompagnés », a-t-il ajouté, en faisant allusion au délai de carence moins long pour les étrangers en emploi que pour les autres. Une présentation qui omet que le nouveau régime ne s’applique qu’aux résidents non européens, et laisse penser que certains étrangers mériteraient plus que d’autres d’être couverts par notre #Etat-providence.

      Alors que la loi est censée faciliter – sous certaines conditions – l’#intégration de ressortissants d’autres pays, des spécialistes de la protection sociale considèrent que les mesures sur les prestations tournent le dos à cet objectif. « Les délais de carence vont totalement à l’encontre de l’intégration que l’on prétend viser », estime Michel Borgetto, professeur émérite de l’université Paris Panthéon-Assas. Ils risquent, d’une part, de « précipiter dans la #précarité des personnes confrontées déjà à des #conditions_de_vie difficiles, ce qui aura pour effet d’accroître le nombre de #travailleurs_pauvres et de #mal-logés, voire de #sans-abri, relève-t-il. Ils sont, d’autre part, susceptibles de se révéler largement contre-productifs et terriblement néfastes, poursuit le spécialiste du droit de la #sécurité_sociale, dans la mesure où les étrangers en situation régulière se voient privés des aides et accompagnements nécessaires à leur insertion durable dans la société, dans les premiers mois ou années de leur vie en France. C’est-à-dire, en fait, au moment même où ils en ont précisément le plus besoin… »

      Maîtresse de conférences en droit social à l’université Lyon-II, Laure Camaji tient à rappeler que les prestations visées constituent des « #droits_universels, attribués depuis des décennies en raison de la résidence sur le territoire ». « Cela fait bien longtemps – depuis une loi de 1975 – que le droit aux #prestations_familiales n’est plus lié à l’exercice d’une #activité_professionnelle, souligne-t-elle. C’est un principe fondamental de notre système de sécurité sociale, un #acquis majeur qui forme le socle de notre #pacte_social, tout comme l’est l’#universalité de la #couverture_maladie, de la prise en charge du #handicap et de la #dépendance, du droit au logement et à l’#hébergement_d’urgence. »

      A ses yeux, le texte entraîne une « régression considérable » en instaurant une « #dualité de régimes entre les Français et les Européens d’un côté, les personnes non ressortissantes de l’Union de l’autre ». L’intégralité du système de protection sociale est fragilisée, « pour tous, quelle que soit la nationalité, l’origine, la situation familiale, puisque l’universalité n’est plus le principe », analyse-t-elle.

      Motivation « idéologique »

      Francis Kessler, maître de conférences à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, ne comprend pas « la logique à l’œuvre dans cette loi, sauf à considérer qu’il est illégitime de verser certaines prestations à une catégorie de la population, au motif qu’elle n’a pas la nationalité française, ou que les étrangers viennent en France pour toucher des aides – ce qu’aucune étude n’a démontré ». En réalité, complète-t-il, la seule motivation de cette loi est « idéologique » : « Elle repose très clairement sur une idée de “#préférence_nationale” et place notre pays sur une pente extrêmement dangereuse. »

      Toute la question, maintenant, est de savoir si les dispositions en cause seront validées par le #Conseil_constitutionnel. L’institution de la rue de Montpensier a été saisie par la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, ainsi que par des députés et sénateurs de gauche, notamment sur les restrictions des #aides_financières aux étrangers. Les parlementaires d’opposition ont mis en avant le fait que les délais de carence violaient – entre autres – le #principe_d’égalité. Plusieurs membres du gouvernement, dont la première ministre, Elisabeth Borne, ont reconnu que des articles du texte, comme celui sur les APL, pouvaient être jugés contraires à la Loi fondamentale. Le Conseil constitutionnel rendra sa décision avant la fin du mois de janvier.

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/01/05/sur-les-prestations-sociales-aux-etrangers-la-contradiction-d-emmanuel-macro
      #Macron #loi_immigration #accès_aux_droits

  • Loi « immigration » : experts et associations soulignent la rupture politique marquée par le texte
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/12/20/loi-immigration-experts-et-associations-soulignent-la-rupture-politique-marq

    Loi « immigration » : experts et associations soulignent la rupture politique marquée par le texte
    Par Julia Pascual
    JULIEN MUGUET POUR « LE MONDE
    Une « victoire idéologique de l’extrême droite », des « digues qui sautent », le texte « le plus régressif depuis quarante ans »… Mardi 19 décembre, le projet de loi sur l’immigration » a été définitivement adopté par le Parlement à 349 voix contre 186, au sortir d’une commission mixte paritaire conclusive.
    Un an et demi après avoir été annoncé par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, et malgré une motion de rejet essuyée le 11 décembre devant l’Assemblée nationale, le vote de la loi marque aux yeux de nombreux chercheurs, historiens, syndicats, avocats ou associations une rupture politique inédite tant son contenu reprend plusieurs marqueurs de l’extrême droite en matière d’immigration. Le tout, avec l’assentiment du gouvernement et d’une majorité de ses troupes à l’Assemblée nationale, outre celui, unanime, des députés Les Républicains (LR) et Rassemblement national.
    Composée de près d’une centaine d’articles, la loi reprend l’essentiel de la version du texte adopté au Sénat en novembre, durci sous la domination de la droite et du centre, alliés indispensables à la Macronie dans la recherche d’un vote. Il entérine notamment le rétablissement du délit de séjour irrégulier, le conditionnement de l’accès aux prestations familiales et aux aides au logement à cinq ans de séjour régulier, la remise en cause de l’automaticité du droit du sol, la possibilité de placer en rétention certains demandeurs d’asile à la frontière, celle de retirer un titre de séjour en cas de non-respect des « valeurs de la République », l’allongement des délais pour bénéficier du regroupement familial, le durcissement des conditions de l’immigration étudiante ou pour soins ou encore le vote de quotas annuels d’immigration par le Parlement.
    Ces mesures se sont ajoutées aux dispositions initiales du projet de loi qui lèvent les protections à l’éloignement dont bénéficient certains étrangers – en particulier ceux arrivés en France avant l’âge de 13 ans –, accélèrent le traitement des demandes d’asile ou exigent un niveau minimal de français pour l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel (prérequis jusque-là réservé à la naturalisation).
    Une victoire « historique » de la droite, a salué le patron des Républicains, Eric Ciotti. Ce texte laisse « le champ libre à une xénophobie aujourd’hui complètement décomplexée », ont dénoncé mardi une large coalition d’associations parmi lesquelles la Fondation Abbé Pierre et France terre d’asile. Il « heurte de plein fouet les principes de notre République », a aussi déclaré la Défenseure des droits, Claire Hédon, s’alarmant notamment de la consécration de la « préférence nationale ». « C’est un basculement, estime à son tour Pierre Henry, président de France Fraternités et directeur général de l’association France terre d’asile entre 1997 et 2020. En franchissant ces lignes rouges, le gouvernement français rejoint les gouvernements illibéraux et populistes d’Europe. »
     »Alors qu’une loi sur l’immigration est votée en moyenne tous les deux à trois ans depuis les années 1980, celle qui vient d’être entérinée se distingue par une accumulation de mesures ayant trait à des champs très larges touchant à la fois au droit de la nationalité, au droit du séjour, à l’asile ou au code de la Sécurité sociale.
    L’opposition au texte avait gagné jusqu’aux syndicats de magistrats administratifs, le Syndicat de la juridiction administrative (SJA) et l’Union syndicale des magistrats administratifs, qui avaient de façon inédite appelé à la grève lundi 18 décembre pour dénoncer, en particulier, les dispositions – prévues dès la première version du texte – qui généralisent les audiences délocalisées ou en vidéoconférence pour juger des recours d’étrangers placés en rétention administrative. « C’est la première fois que, pour une catégorie entière de contentieux, on dit qu’on peut tenir des audiences sans la présence physique de l’ensemble des parties ou en dehors d’un lieu de justice, analyse Julien Henninger, président du SJA. C’est une bascule parce qu’on crée une inégalité devant la justice pour toute une catégorie de requérants. » Idem pour la disposition – également présente dans le texte initial – qui prévoit la généralisation du juge unique au détriment des formations collégiales de trois juges pour statuer sur les demandes d’asile. « Alors que le président de la République a encore déclaré [le 10 décembre] qu’il était attaché à la tradition d’asile, il remet en cause ce que la droite n’a jamais osé faire, c’est une rupture », juge l’historien Patrick Weil. La droite a largement œuvré à durcir la copie gouvernementale. Elle a, par exemple, resserré les conditions d’obtention du titre de séjour étudiant à travers le dépôt d’une caution ou la majoration des frais d’inscription. « C’est la première fois qu’une mesure aussi forte est prise, qui laisse à penser que les étudiants étrangers ne sont pas les bienvenus, regrette Guillaume Gellé, le président de France Universités, l’entité qui rassemble les dirigeants des universités et des grandes écoles. Cela va à l’encontre des intérêts de nos établissements – où plus de 40 % des doctorants sont étrangers – et de la diplomatie scientifique, culturelle et d’influence de notre pays. »
    Plus symbolique de la reprise des marqueurs idéologiques de la droite, le rétablissement du délit de séjour irrégulier (passible d’une amende de 3 750 euros), voulu par LR avec l’assentiment de l’exécutif, signe un retour en arrière dans l’histoire. Ce délit avait été supprimé en 2012 par la gauche, en application d’une directive européenne, et remplacé par la possibilité de placer les étrangers en retenue administrative. Devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, M. Darmanin avait d’ailleurs convenu que « l’absence d’un délit de séjour irrégulier n’empêche pas la police de procéder à des retenues ni de renvoyer les personnes ». Mais l’exécutif s’est finalement rangé derrière les desiderata de la droite.
    Il l’a fait encore – en dépit d’âpres négociations – sur le conditionnement de l’accès à certaines prestations sociales à cinq ans de séjour régulier (délai minoré pour ceux qui travaillent), qui « légitime la préférence nationale chère à l’extrême droite », regrette Dominique Sopo, président de SOS-Racisme. Avalisée également, la fin de l’automaticité du droit du sol. L’enfant né en France de parents étrangers devra ainsi manifester sa « volonté » de devenir français à sa majorité. Une « régression énorme », selon Patrick Weil. M. Darmanin voyait dans cette mesure, introduite par la droite sénatoriale, un cavalier législatif (sans rapport avec l’objet de la loi) susceptible d’être retoqué par le Conseil constitutionnel. Mais, là encore, les digues ont cédé. « C’est un peu le retour de la droite Pasqua », s’est d’ailleurs réjoui mardi Olivier Marleix, le chef de file du parti Les Républicains à l’Assemblée nationale, en référence à celui qui, ministre de l’intérieur, avait remis en cause la tradition républicaine du droit du sol et introduit la manifestation de la volonté entre 1993 et 1998.Egalement considérée comme un cavalier législatif, la suppression de l’aide médicale d’Etat – une couverture maladie pour les sans-papiers – a été écartée du texte final mais, sous la pression des LR, le gouvernement a promis une réforme début 2024.« L’accumulation de mesures dans le texte installe une logique de soupçon inédite vis-à-vis de l’immigré », considère le sociologue François Héran. « Ce n’est pas l’opinion publique qui pousse dans ce sens, dénonce l’avocat Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés. Ce sont les politiques qui créent un appel d’air au racisme. »Longtemps présenté comme la jambe gauche du texte gouvernemental et conspué par la droite, le titre de séjour pour les travailleurs sans papiers dans les métiers en tension a été réduit à peau de chagrin. La régularisation de ces immigrés salariés devait à l’origine se faire de « plein droit ». A l’arrivée, elle demeure à la libre appréciation des préfets et seul l’accompagnement de l’employeur dans les démarches n’est plus un prérequis. « Historiquement, on a toujours eu des vagues de régularisation, même sous Nicolas Sarkozy, recontextualise l’avocat Patrick Berdugo, vice-président de l’association Avocats pour la défense des droits des étrangers. Aujourd’hui, c’est totalement exclu, au point que la droite se coupe d’une partie non négligeable de son électorat parmi les patrons de PME. » Mardi encore, le Medef expliquait pourtant que l’économie avait un besoin « massif » d’immigration.

    #Covid-19#migration#migrant#france#loimigration#droitdesejour#retention#prestationsociale#etudiant#regularisation#prefet#titredesejour#metierentension#economie#racisme

  • Loi « immigration » : experts et associations soulignent la rupture politique marquée par le texte
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/12/20/loi-immigration-experts-et-associations-soulignent-la-rupture-politique-marq

    Loi « immigration » : experts et associations soulignent la rupture politique marquée par le texte
    Par Julia Pascual
    JULIEN MUGUET POUR « LE MONDE
    Une « victoire idéologique de l’extrême droite », des « digues qui sautent », le texte « le plus régressif depuis quarante ans »… Mardi 19 décembre, le projet de loi sur l’immigration » a été définitivement adopté par le Parlement à 349 voix contre 186, au sortir d’une commission mixte paritaire conclusive.
    Un an et demi après avoir été annoncé par le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, et malgré une motion de rejet essuyée le 11 décembre devant l’Assemblée nationale, le vote de la loi marque aux yeux de nombreux chercheurs, historiens, syndicats, avocats ou associations une rupture politique inédite tant son contenu reprend plusieurs marqueurs de l’extrême droite en matière d’immigration. Le tout, avec l’assentiment du gouvernement et d’une majorité de ses troupes à l’Assemblée nationale, outre celui, unanime, des députés Les Républicains (LR) et Rassemblement national.
    Composée de près d’une centaine d’articles, la loi reprend l’essentiel de la version du texte adopté au Sénat en novembre, durci sous la domination de la droite et du centre, alliés indispensables à la Macronie dans la recherche d’un vote. Il entérine notamment le rétablissement du délit de séjour irrégulier, le conditionnement de l’accès aux prestations familiales et aux aides au logement à cinq ans de séjour régulier, la remise en cause de l’automaticité du droit du sol, la possibilité de placer en rétention certains demandeurs d’asile à la frontière, celle de retirer un titre de séjour en cas de non-respect des « valeurs de la République », l’allongement des délais pour bénéficier du regroupement familial, le durcissement des conditions de l’immigration étudiante ou pour soins ou encore le vote de quotas annuels d’immigration par le Parlement.
    Ces mesures se sont ajoutées aux dispositions initiales du projet de loi qui lèvent les protections à l’éloignement dont bénéficient certains étrangers – en particulier ceux arrivés en France avant l’âge de 13 ans –, accélèrent le traitement des demandes d’asile ou exigent un niveau minimal de français pour l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel (prérequis jusque-là réservé à la naturalisation).
    Une victoire « historique » de la droite, a salué le patron des Républicains, Eric Ciotti. Ce texte laisse « le champ libre à une xénophobie aujourd’hui complètement décomplexée », ont dénoncé mardi une large coalition d’associations parmi lesquelles la Fondation Abbé Pierre et France terre d’asile. Il « heurte de plein fouet les principes de notre République », a aussi déclaré la Défenseure des droits, Claire Hédon, s’alarmant notamment de la consécration de la « préférence nationale ». « C’est un basculement, estime à son tour Pierre Henry, président de France Fraternités et directeur général de l’association France terre d’asile entre 1997 et 2020. En franchissant ces lignes rouges, le gouvernement français rejoint les gouvernements illibéraux et populistes d’Europe. »
     »Alors qu’une loi sur l’immigration est votée en moyenne tous les deux à trois ans depuis les années 1980, celle qui vient d’être entérinée se distingue par une accumulation de mesures ayant trait à des champs très larges touchant à la fois au droit de la nationalité, au droit du séjour, à l’asile ou au code de la Sécurité sociale.
    L’opposition au texte avait gagné jusqu’aux syndicats de magistrats administratifs, le Syndicat de la juridiction administrative (SJA) et l’Union syndicale des magistrats administratifs, qui avaient de façon inédite appelé à la grève lundi 18 décembre pour dénoncer, en particulier, les dispositions – prévues dès la première version du texte – qui généralisent les audiences délocalisées ou en vidéoconférence pour juger des recours d’étrangers placés en rétention administrative. « C’est la première fois que, pour une catégorie entière de contentieux, on dit qu’on peut tenir des audiences sans la présence physique de l’ensemble des parties ou en dehors d’un lieu de justice, analyse Julien Henninger, président du SJA. C’est une bascule parce qu’on crée une inégalité devant la justice pour toute une catégorie de requérants. » Idem pour la disposition – également présente dans le texte initial – qui prévoit la généralisation du juge unique au détriment des formations collégiales de trois juges pour statuer sur les demandes d’asile. « Alors que le président de la République a encore déclaré [le 10 décembre] qu’il était attaché à la tradition d’asile, il remet en cause ce que la droite n’a jamais osé faire, c’est une rupture », juge l’historien Patrick Weil. La droite a largement œuvré à durcir la copie gouvernementale. Elle a, par exemple, resserré les conditions d’obtention du titre de séjour étudiant à travers le dépôt d’une caution ou la majoration des frais d’inscription. « C’est la première fois qu’une mesure aussi forte est prise, qui laisse à penser que les étudiants étrangers ne sont pas les bienvenus, regrette Guillaume Gellé, le président de France Universités, l’entité qui rassemble les dirigeants des universités et des grandes écoles. Cela va à l’encontre des intérêts de nos établissements – où plus de 40 % des doctorants sont étrangers – et de la diplomatie scientifique, culturelle et d’influence de notre pays. »
    Plus symbolique de la reprise des marqueurs idéologiques de la droite, le rétablissement du délit de séjour irrégulier (passible d’une amende de 3 750 euros), voulu par LR avec l’assentiment de l’exécutif, signe un retour en arrière dans l’histoire. Ce délit avait été supprimé en 2012 par la gauche, en application d’une directive européenne, et remplacé par la possibilité de placer les étrangers en retenue administrative. Devant la commission des lois de l’Assemblée nationale, M. Darmanin avait d’ailleurs convenu que « l’absence d’un délit de séjour irrégulier n’empêche pas la police de procéder à des retenues ni de renvoyer les personnes ». Mais l’exécutif s’est finalement rangé derrière les desiderata de la droite.
    Il l’a fait encore – en dépit d’âpres négociations – sur le conditionnement de l’accès à certaines prestations sociales à cinq ans de séjour régulier (délai minoré pour ceux qui travaillent), qui « légitime la préférence nationale chère à l’extrême droite », regrette Dominique Sopo, président de SOS-Racisme. Avalisée également, la fin de l’automaticité du droit du sol. L’enfant né en France de parents étrangers devra ainsi manifester sa « volonté » de devenir français à sa majorité. Une « régression énorme », selon Patrick Weil. M. Darmanin voyait dans cette mesure, introduite par la droite sénatoriale, un cavalier législatif (sans rapport avec l’objet de la loi) susceptible d’être retoqué par le Conseil constitutionnel. Mais, là encore, les digues ont cédé. « C’est un peu le retour de la droite Pasqua », s’est d’ailleurs réjoui mardi Olivier Marleix, le chef de file du parti Les Républicains à l’Assemblée nationale, en référence à celui qui, ministre de l’intérieur, avait remis en cause la tradition républicaine du droit du sol et introduit la manifestation de la volonté entre 1993 et 1998.Egalement considérée comme un cavalier législatif, la suppression de l’aide médicale d’Etat – une couverture maladie pour les sans-papiers – a été écartée du texte final mais, sous la pression des LR, le gouvernement a promis une réforme début 2024.« L’accumulation de mesures dans le texte installe une logique de soupçon inédite vis-à-vis de l’immigré », considère le sociologue François Héran. « Ce n’est pas l’opinion publique qui pousse dans ce sens, dénonce l’avocat Stéphane Maugendre, président du Groupe d’information et de soutien des immigrés. Ce sont les politiques qui créent un appel d’air au racisme. »Longtemps présenté comme la jambe gauche du texte gouvernemental et conspué par la droite, le titre de séjour pour les travailleurs sans papiers dans les métiers en tension a été réduit à peau de chagrin. La régularisation de ces immigrés salariés devait à l’origine se faire de « plein droit ». A l’arrivée, elle demeure à la libre appréciation des préfets et seul l’accompagnement de l’employeur dans les démarches n’est plus un prérequis. « Historiquement, on a toujours eu des vagues de régularisation, même sous Nicolas Sarkozy, recontextualise l’avocat Patrick Berdugo, vice-président de l’association Avocats pour la défense des droits des étrangers. Aujourd’hui, c’est totalement exclu, au point que la droite se coupe d’une partie non négligeable de son électorat parmi les patrons de PME. » Mardi encore, le Medef expliquait pourtant que l’économie avait un besoin « massif » d’immigration.

    #Covid-19#migration#migrant#france#loimigration#droitdesejour#retention#prestationsociale#etudiant#regularisation#prefet#titredesejour#metierentension#economie#racisme

  • Sans les #services_publics, les #inégalités exploseraient

    Une étude de l’#Insee montre à quel point le modèle social français et les services publics, notamment l’#éducation et la #santé, permettent de réduire les inégalités en #France. Et que leur #dégradation s’avérerait désastreuse.

    SouventSouvent vilipendés pour le poids trop important qu’ils représentent dans la dépense publique, le modèle social français et les services publics jouent un rôle fondamental dans la baisse des inégalités en France. Une étude de l’Insee publiée le 19 septembre le montre de manière chiffrée.

    Pour étayer leur propos, les statisticiens de l’Insee ont développé une approche comptable élargie du système de redistribution français. Ils considèrent d’abord, concernant les prélèvements obligatoires, que « tout impôt prélevé a in fine une contrepartie directe ou indirecte pour les ménages ». Dès lors, ils prennent en compte dans leurs calculs « outre les impôts directs, les autres prélèvements comme les taxes sur les produits et la production ainsi que les cotisations sociales des employeurs et des salariés ».

    Et côté versements, l’Insee considère toutes les prestations sociales – retraites, chômage, APL, etc. – mais aussi, et c’est une particularité de son étude, « une valorisation monétaire des services publics » qu’ils soient individualisables – comme l’éducation et la santé – ou collectifs, comme la défense ou la recherche.
    Baisse drastique des inégalités

    Tout cela pris en compte, l’Insee estime que l’ensemble de ces transferts publics s’élève « à un peu plus de 500 milliards d’euros (25 % du revenu national net en 2019) » et « contribue à une réduction significative des inégalités de revenus ».

    Voyez plutôt : avant transferts, les ménages aisés – les 10 % les plus riches – ont un revenu 18 fois plus élevé que celui des ménages pauvres – ceux dont les revenus sont inférieurs à 60 % du niveau de vie médian, soit environ 13 % de la population. Mais après transferts publics, ce rapport n’est plus que de… 1 à 3.

    Autres chiffres : en 2019, et toujours en prenant en compte l’approche de redistribution élargie de l’Insee, 57 % des personnes recevaient plus qu’ils ne versaient à la collectivité. Cette part de bénéficiaires nets de la redistribution élargie s’élève à 85 % parmi les 30 % les plus modestes et, à l’inverse, à 13 % parmi les 5 % les plus aisés. Preuve que le système redistributif, s’il est loin d’être parfait, remplit une partie de sa mission.

    Quels sont les principaux facteurs explicatifs de cette baisse des inégalités ? Principalement « l’ampleur des dépenses en santé et d’éducation » qui explique plus de 50 % de la réduction des inégalités ; ainsi que les minima sociaux ciblés sur les plus modestes, qui pèsent 40 % de la baisse, répond l’Insee.

    Les dépenses de santé, d’abord, réduisent les inégalités du fait « des montants plus importants de remboursements de santé en direction des plus modestes, liés à un état de santé plus dégradé de cette partie de la population », dit l’Insee.

    Les dépenses d’éducation, ensuite, bénéficient de la même manière aux ménages ayant des enfants scolarisés indépendamment de leurs revenus, donc « elles contribuent à réduire la différence relative de revenus ». Par ailleurs, « les ménages ayant des enfants en âge d’être scolarisés (ou à leur charge) se retrouvent plus souvent dans le bas de la distribution du niveau de vie [...] en premier lieu les familles monoparentales » qui bénéficient donc plus en part de leurs revenus « du service rendu par l’éducation », ce qui tend à réduire les inégalités.

    Enfin, précise l’Insee, les prestations sociales en espèces – hors retraites – jouent un rôle déterminant dans la réduction de la pauvreté : « Les minima sociaux et allocations logement sont en effet ciblés sur les 30 % des personnes les plus modestes et décroissent fortement avec les revenus. »

    En plus des plus modestes, des familles avec enfants et des ménages les moins diplômés, une autre catégorie de population bénéficie fortement de la redistribution en France : les retraités. Environ 90 % des individus appartenant à un ménage dont la personne de référence est âgée de 65 ans ou plus voient leur niveau de vie augmenter grâce au système de redistribution élargie, nous dit l’Insee.

    S’ils bénéficient moins des dépenses d’éducation que les autres ménages car ils n’ont pour la plupart plus d’enfant scolarisé, en revanche ils sont les principaux destinataires des dépenses de santé et du système de retraite par répartition.
    Un système fiscal injuste

    Mais il demeure toutefois d’importants trous dans la raquette du système de redistribution en France. Et ce, principalement concernant le système fiscal qui, précise l’Insee, tend à augmenter légèrement les inégalités.

    Cela est dû à deux choses : d’abord à l’effet dégressif avec les revenus des taxes sur les produits et sur la production, qui pénalisent les plus modestes. L’exemple le plus connu est celui de la TVA dont le taux sur les produits dans les rayons des supermarchés s’applique de la même manière au consommateur au Smic qu’à l’ultrariche. C’est également le cas avec les impôts indirects sur l’alcool, le tabac et les carburants.

    Hélas, dit l’Insee, l’effet de ces taxes inégalitaires n’est pas compensé totalement par l’effet progressif des impôts sur le revenu et le patrimoine.

    L’autre raison au caractère injuste du système fiscal français tient à la sous-taxation des plus riches : au sein des 10 % les plus aisés, explique l’Insee, le profil des prélèvements décroît en part du revenu, principalement en raison d’une hausse de l’épargne, qui n’est pas imposée au moment de sa constitution, et des revenus du patrimoine, qui sont moins soumis aux cotisations sociales que les salaires.
    Besoins de services publics

    En somme, faute de système fiscal efficace, heureusement que le modèle social et les services publics sont là pour compenser, grâce aux transferts publics, les effets inégalitaires de l’économie de marché. Il est toujours bon de le rappeler à quelques jours de l’ouverture des débats budgétaires sur la prochaine loi de finances, durant lesquels la vision comptable de l’économie l’emporte souvent sur l’intérêt général.

    D’autant que la qualité des services publics au regard des besoins tend à se dégrader. Une étude récente du collectif « Nos services publics » montre que sur plusieurs pans de l’action publique – la santé, l’éducation, la justice, les transports, l’environnement... –, les dépenses pour les services publics sont très loin de suivre l’évolution des besoins non pourvus de la population en la matière.

    Cela a des conséquences désastreuses : l’augmentation des inégalités, le désamour de la chose publique et la marchandisation de secteurs pourtant considérés comme d’intérêt général. L’exécutif gagnerait à prendre davantage en compte ce constat pour le maintien de la cohésion sociale du pays.

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/200923/sans-les-services-publics-les-inegalites-exploseraient
    #statistiques #chiffres

    • La #redistribution_élargie, incluant l’ensemble des #transferts_monétaires et les services publics, améliore le #niveau_de_vie de 57 % des personnes

      Les #impôts, #taxes et #cotisations_sociales financent les #retraites, les #prestations_sociales et les services publics, individualisables – comme l’éducation et la santé – ou collectifs, comme la #défense ou la #recherche. L’ensemble de ces #transferts_publics, prélevés sur ou perçus par les ménages, organisent une #redistribution dite élargie. Cette redistribution élargie à l’ensemble des services publics et incluant les #retraites correspond à un transfert de 500 milliards d’euros (25 % du revenu national net en 2019) et contribue à une réduction significative des inégalités de revenus. À ce titre, en 2019, 57 % des personnes reçoivent plus qu’ils ne versent. Cette part de personnes bénéficiaires nets de la redistribution élargie s’élève à 49 % autour du niveau de vie médian, contre plus de 85 % parmi les 30 % les plus modestes et 13 % parmi les 5 % les plus aisés. Avant transferts, les ménages aisés ont un revenu 18 fois plus élevé que celui des ménages pauvres, contre 1 à 3 après transferts.

      La redistribution élargie améliore le niveau de vie de 90 % des individus appartenant à un ménage dont la personne de référence est âgée de 65 ans ou plus ; ils sont les principaux destinataires des dépenses de santé et du système de retraite par répartition. Parmi les 50-59 ans, près de 70 % des individus sont à l’inverse contributeurs nets à la redistribution élargie. En dehors des retraités, les bénéficiaires nets de la redistribution élargie sont surtout les plus modestes, ainsi que les familles avec enfants et les ménages moins diplômés ; pour les ouvriers et les employés, le bilan redistributif est quasi neutre, alors que les cadres, travailleurs indépendants, chefs d’entreprise sont contributeurs nets ainsi que, dans une moindre mesure, les professions intermédiaires. La redistribution réduit également les inégalités entre les habitants de l’agglomération de Paris aux revenus primaires plus élevés et ceux des autres territoires. Les contributeurs nets sont ainsi des ménages actifs, aisés, âgés entre 40 et 60 ans, plutôt cadres ou urbains.

      https://www.insee.fr/fr/statistiques/7669723

      #rapport #étude

    • Le service public, un besoin radical

      Organiser les services publics en fonction des #besoins n’est pas seulement une nécessité évidente, c’est aussi un premier pas vers une organisation de la production fondamentalement différente.

      PourPour dénoncer la dégradation des services publics, le discours est bien rodé et semble évident. Il suffit d’insister sur le décalage entre les « besoins » et les « moyens ». C’est d’ailleurs le cœur de l’étude du groupe Nos Services publics publiée à la mi-septembre, et c’est sur ce même créneau que beaucoup d’hommes et femmes politiques de gauche l’ont repris. C’est d’autant plus parfait que c’est là le slogan principal de la gauche française : « gouverner par les besoins ».

      Si on prend ces ambitions au sérieux, si l’on veut des services publics qui répondent aux « besoins », alors il faut prendre à bras-le-corps cette question centrale, mais hautement difficile. Car rien n’est moins évident que ces besoins, et rien n’est moins facile que de trouver une méthode pour les définir. L’enjeu est pourtant essentiel. De fait, on pourrait presque lire l’histoire des échecs de la gauche et des projets de dépassement du capitalisme à l’aune de cette esquive.

      En effet, si l’on veut une société où les besoins soient définis collectivement, mais en laissant aux marchés le soin de les satisfaire, une tension apparaît immédiatement et se traduit par une instabilité souvent difficilement tenable : inflation, déséquilibres externes, mécontentements populaires. Du Front populaire au « tournant de la rigueur » en passant par l’expérience chilienne, la gauche a partout été « disciplinée » parce qu’elle avait évité de se confronter à ce sujet.

      Or, les services publics sont en première ligne de cette affaire, car, leur existence même les plaçant dans une logique non marchande, ils sont le fruit d’une décision indépendante d’un marché destiné à gérer leur satisfaction, et cette indépendance est bien souvent la source même de leur existence. En définissant les « besoins » en services publics, on ouvre donc le champ à une réflexion politique plus large qui pose la question des conditions de cette prise de décision.
      Des besoins évidents ?

      La réflexion précédente peut paraître à beaucoup sans objet. On sait bien quels sont les besoins non satisfaits de notre société. On les constate avec un peu de bon sens. La liste est longue mais simple à faire. Les queues des étudiants devant les banques alimentaires, les sans-abri qui n’ont pas accès à un logement décent, les travailleurs qui sont au bord de la pauvreté, le système de santé qui ne peut plus fonctionner, l’Éducation nationale qui ne peut plus recruter, les transports publics trop rares… Il y en a encore bien d’autres, mais il suffit de sortir pour les constater.

      Face à l’abondance délirante et révoltante des ultrariches, ces besoins semblent bien « évidents ». Mais il convient de se méfier de ce type de réflexe, si moralement juste soit-il. Car une telle vision se fonde sur l’idée que les besoins essentiels s’imposent objectivement à la société. Sauf que, dans ce cas, le « gouvernement par les besoins » serait absurde. Car si les besoins sont objectifs, extérieurs à la société, il n’y a aucun sens à demander des choix démocratiques les concernant. C’est d’ailleurs pour cela que les sectateurs du marché contestent toute conception a priori des besoins.

      En réalité, se nourrir, se loger, se soigner, apprendre et se déplacer sont des actes sociaux. S’il faut certes bien manger pour vivre, la signification de cet acte n’a pas le même sens selon les sociétés et les époques. Dans les Grundrisse, Marx a écrit cette phrase qui résume toute l’affaire : « La faim est la faim, mais la faim qui se satisfait de la viande cuite avec un couteau et une fourchette est une autre faim que celle qui avale de la viande crue avec des mains, des ongles et des dents. »

      Autrement dit, tous les besoins, même ceux qui nous semblent les plus essentiels, sont construits dans un cadre social. Si nous ne tolérons pas que des étudiants peinent à se nourrir correctement, ce qui a été le cas d’une part massive de la population pendant des siècles, c’est parce que nous nous faisons une autre idée des rapports sociaux que, par exemple, le XVIIe siècle. Et de même, si l’état de nos services de santé nous révolte, c’est parce que nous sommes convaincus que notre société doit assurer la meilleure prise en charge possible, quand bien même notre système serait historiquement et géographiquement un des meilleurs.

      Et dès lors, si l’on veut « gouverner par les besoins », on ne peut pas s’en sortir par la pirouette rhétorique des « besoins essentiels » sans répondre à la question de savoir pourquoi les besoins sont essentiels, et de ce que l’on fait des autres besoins que l’on juge non essentiels. Et cela renvoie immédiatement à une décision collective, c’est-à-dire démocratique.

      Pour expliquer cela, on peut prendre un exemple simple. Quels sont les besoins du système de santé ? Le gouvernement a placé quelques rustines après la crise sanitaire, tout en continuant à sous-dimensionner les dépenses courantes. On pourrait, au contraire, estimer que les « besoins essentiels » du secteur consisteraient à lui fournir un objectif de dépenses qui lui permette d’assurer le rythme « naturel » de ces besoins. Mais ce serait un objectif conservateur, considérant que les besoins ne se modifient pas, alors que tant de malades sont, même dans ce cadre, mal pris en charge. On pourrait alors estimer que les besoins du système de santé sont encore plus larges, que, même en sauvegardant l’existant, tant de besoins sont insatisfaits. Tout dépend en réalité des choix sociaux que l’on fait.

      « Gouverner par les besoins » revient ainsi nécessairement à prendre en compte et à assumer la subjectivité des besoins. Les besoins sont toujours et partout des besoins sociaux, c’est-à-dire construits par la société. Leur satisfaction renvoie donc à une organisation sociale globale et à une question beaucoup plus délicate, celle de savoir à quels besoins cette organisation est capable de répondre.

      C’est d’ailleurs ici que réside la différence entre la gestion des besoins par les services publics et la gestion des besoins par le marché. Dans ce deuxième cas, c’est le marché qui valide socialement les besoins et qui, en conséquence, va réaliser cette détermination en apparence « objective » des besoins parce qu’il les impose au reste de la société, tant du côté de la production que de la consommation. C’est une mystification que l’on appelle « fétichisme » : les personnes renoncent à leur responsabilité en s’en remettant aux règles fixées par une institution qu’ils ont créée, mais qui leur échappe.

      Dans le premier cas, au contraire, la validation des besoins est préalable à l’acte capable de les satisfaire. Cette validation ne peut donc se prévaloir d’une quelconque « objectivité » extérieure, sauf à vouloir retrouver un fétichisme finalement peu différent de celui de l’organisation marchande. La collectivité doit assumer cette validation a priori en faisant des choix conscients. Et, dès lors, c’est bien la forme politique capable de réaliser cette validation qui devient centrale.

      Dans un ouvrage de 1981 devenu introuvable mais qui est un des plus fouillés sur le sujet, On human needs (Harvester, non traduit), la philosophe britannique Kate Soper souligne ce fait : la définition des besoins est fondamentalement politique, en raison même de leur aspect social. « La tentative de nier l’aspect politique des besoins est elle-même une forme de politique des besoins et l’on devrait peut-être distinguer entre une politique des besoins qui vise à distinguer cet aspect politique et une politique des besoins qui se reconnaîtrait implicitement comme telle », explique-t-elle.
      Quels besoins satisfaire ?

      Une fois cette première étape franchie, il faut aller un peu plus loin. Car disposer d’une conscience sur ses besoins est un autre obstacle considérable à dépasser. Si, en effet, les besoins sont des faits sociaux, alors l’organisation sociale existante crée ses propres besoins et les impose aux citoyens. La difficulté devient alors considérable : il faut construire une subjectivité sociale capable de dépasser la subjectivité existante. Ou bien le changement même de rapport de propriété pourrait n’être pas suffisant.

      Dans le capitalisme, les besoins ne sont satisfaits que s’ils reçoivent la validation ultime de la rentabilité. La satisfaction de certains besoins non rentables est donc volontiers laissée à la charge de « services publics » et, en parallèle, de nouveaux besoins rentables sont créés et deviennent bientôt essentiels pour les individus, venant remplacer ou dégrader des services publics existants. L’automobile individuelle devient une nécessité qui rend caduques les petites lignes de chemin de fer et même, parfois, les grandes. Le téléphone portable individuel s’appuyant sur une pseudo-concurrence remplace le combiné partagé par une famille et régulé par un service public.

      Dans tous les cas, bien rares sont celles et ceux qui veulent revenir en arrière et sont prêts à renoncer à ces biens ou à ces services. Et bientôt d’autres besoins seront créés, qui deviendront tout aussi indispensables. C’est qu’il ne s’agit pas réellement là d’une question de volonté. Les besoins de la marchandise sont devenus ceux des individus, aussi essentiels (parfois davantage) que la santé, la nourriture ou l’éducation, parce que ces derniers évoluent dans la société de la marchandise. Le consommateur adopte pour lui-même des besoins qui, en réalité, ne viennent pas de lui mais du système économique. C’est ce que Marx appelle « l’aliénation ».

      C’est évidemment un argument des plus solides pour les conservateurs qui, défendant la société existante, jugent légitimes les besoins qu’elle produit en refusant de remettre en cause leur processus de production. Et cela place le camp de la transformation dans une double difficulté : celle de risquer de se placer dans une posture moralisatrice en jugeant négativement des besoins désormais ancrés et celle de devoir gouverner en prenant en compte les besoins créés par la marchandise.

      C’est un problème que l’on ne réglera pas dans ces lignes et qui est des plus vastes sur le plan philosophique, mais qu’il semble urgent de prendre en considération, au risque de perdre irrémédiablement l’ambition de définir a priori les besoins.

      Du moins peut-on tenter de comprendre le phénomène. Un des fondements de la production capitaliste est la séparation du producteur et du fruit de sa production, qui conduit à la séparation du même individu entre le producteur et le consommateur. Cette séparation fait échapper la valeur d’usage des marchandises aux producteurs et cette dernière peut alors être imposée au même individu en tant que consommateur. Mais on comprend alors que tout change : le besoin ne peut plus être défini a priori lors de la production, il ne peut plus l’être qu’au moment de l’échange par le consommateur. Et dès lors, le consommateur n’a accès qu’à une offre déterminée par la valorisation du capital, c’est-à-dire par la seule fin de la production capitaliste. La valeur d’usage est alors soumise à la valeur d’échange.

      Dans La Société du spectacle, Guy Debord résume ce phénomène ainsi : « La valeur d’échange est le condottiere de la valeur d’usage qui finit par mener la guerre pour son propre compte. » Se développent alors des « pseudo-besoins », fruit de « pseudo-usages » qui s’imposent à des consommateurs formellement libres mais en réalité englués dans une logique qui ne peut que leur échapper, même s’ils la font leur. C’est cette organisation sociale qui est au service de ces besoins imposés, et pourtant bien réels, que Debord appelle le « spectacle » : « Le spectacle n’est pas seulement le serviteur du pseudo-usage, il est déjà en lui-même le pseudo-usage de la vie. »

      Si les besoins du consommateur ne sont pas authentiques, on peut dire qu’ils sont « artificiels », comme le fait Razmig Keucheyan dans un livre qui est une référence (Les Besoins artificiels, Zones, 2019) pour tous ceux que le sujet intéresse. Ce caractère « artificiel » ne découle pas du rapport à une référence extérieure, métaphysique ou morale, mais du point de vue même de l’individu puisque le mode de production lui arrache la possibilité de construire ses propres besoins. La marchandise devient un pouvoir autonome qui soumet les besoins ou, comme le dit Debord, « falsifie la vie sociale ».
      Radicaliser les besoins pour s’émanciper

      Tout cela amène deux conséquences majeures. La première est que l’accusation de « totalitarisme » qu’avance en permanence le camp conservateur dès qu’il est question d’une définition a priori des besoins ne tient pas. L’individu dans le capitalisme, et encore plus dans celui dominé par le « spectacle », peut se croire libre et la fiction juridique peut entretenir cette illusion, mais ses choix sont toujours déterminés par la nécessité de produire de la valeur. Il est en cela « objectifié », « réifié », comme dirait Lukács.

      Comme le souligne Kate Soper, un des aspects les plus évidents de ce phénomène est la prétention à une « neutralisation » des besoins, à leur dépolitisation. Une neutralisation que, selon la même autrice, on retrouvait, sous une autre forme dans le « socialisme réel » où une bureaucratie « consciente » définissait les besoins pour le reste de la population, selon des critères « scientifiques ». Dans les deux cas, pour reprendre les termes de Debord, le « vécu » n’avait pas son mot à dire dans la formation des besoins. Il n’était que l’objet d’un choix pris ailleurs.

      L’enjeu devient alors de permettre à l’individu de redevenir un sujet capable de décider de ses besoins. C’est la condition sine qua non de tout « gouvernement par les besoins ». Toute tentative de réaliser cette ambition ou de « sauver les services publics » sans affronter directement ce problème est vouée à l’échec. Ce qui est à la fois un défi considérable et un défi « libérateur » que les conservateurs ne peuvent proposer.

      La deuxième conséquence de cette situation est évidemment celle de l’urgence. La conséquence de la définition de l’usage, et donc des besoins, par les convenances de la valorisation du capital, c’est que ces besoins vont au rythme de l’accumulation du capital. C’est ce que Debord appelle la « libération d’un artificiel illimité ». Mais cette production incessante de besoins nouveaux à la satisfaction toujours décevante et toujours renouvelée est de moins en moins tenable, tant du point de vue économique qu’écologique.

      La situation actuelle ouvre donc la porte à un nouveau besoin, qui est celui de sortir de ce cercle infernal. Et l’enjeu désormais est de ne pas voir ce besoin lui-même falsifié par la marchandise sous les atours de la « croissance verte » et de la « consommation durable ». Gouverner par les besoins n’a ainsi jamais été aussi difficile et, en même temps, aussi indispensable.

      Or, c’est peut-être ici qu’est la faille. Razmig Keucheyan en 2019 reprend ainsi la notion de « besoins radicaux » développée par la philosophe hongroise Agnès Heller dans un ouvrage de 1974, La Théorie des besoins chez Marx (disponible en anglais dans une édition de 2018 chez Verso). Ces « besoins radicaux » sont issus du développement capitaliste, ils se développent avec lui, mais échappent à la possibilité d’une satisfaction marchande. Ils seraient donc une forme d’appel à modifier le mode de définition et de satisfaction des besoins et donc un moyen de poser le problème des besoins authentiques et de l’organisation sociale.

      Le besoin de faire face à la crise écologique et sociale serait alors un levier important. Mais la crise des services publics pourrait en être un autre. Le constat de leur dégradation, de leur abandon ou de leur soumission à la marchandise pourrait être le ferment d’une réflexion plus générale.

      Ce serait alors logique : si les services publics sont des formes imparfaites mais réelles de « gouvernement par les besoins », leur défense, contre la logique de la marchandise, devient de fait un « besoin radical » qui permet de s’interroger sur le système d’organisation et de création des besoins. Kate Soper rappelle ainsi que l’abolition de la forme aliénée des besoins se fait par le fait que « l’affirmation a priori des besoins remplace l’ajustement a posteriori de la production à la consommation par l’échange sur le marché ». C’est la définition même d’un service public.

      Mais il faut alors assumer le contenu radical de ce besoin, c’est-à-dire en faire un levier d’émancipation libéré de l’emprise étatique et un laboratoire de la définition consciente des besoins. Si la question des besoins est réellement révolutionnaire, la lutte pour les services publics deviendrait alors non plus une simple « défense », mais bien une offensive à l’ambition plus vaste.

      https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/250923/le-service-public-un-besoin-radical

  • 🛑 Payer pour percevoir ses aides : le désengagement de l’État laisse place au privé - Basta !

    Faire valoir ses droits au RSA ou à une allocation devient de plus en plus compliqué. Des sociétés privées se saisissent de cette opportunité et de la désorganisation des Caisses de sécurité sociale pour marchander l’accès aux aides.

    « Je ne saurais absolument pas quelles aides me correspondent, ni quelles démarches faire, ni où me présenter, ni avec qui parler… Ni rien. » Thomas, 37 ans, secoue la tête devant les caméras de TF1, dans un reportage du journal de 20 heures. Comme lui, des millions de personnes se retrouvent démunies en France face au difficile accès aux allocations sociales. La dématérialisation a encore accru la complexité (...)

    #RSA #prestationssociales

    ⏩ Lire l’article complet...

    ▶️ https://basta.media/payer-pour-percevoir-ses-aides-le-desengagement-de-l-etat-laisse-place-au-p

    • . Ces services payants, pour faire valoir un droit censé être garanti par l’État, prospèrent sur la complexité des prestations sociales, et la lenteur des services publics, plus prompts à contrôler et à sanctionner, qu’à traiter convenablement les dossiers des demandeurs, comme l’illustre la situation des Caisses d’allocations familiales.

      vous devez fréquenter la jungle ? Prenez un guide ! ici, il s’agit de payer pour accéder à des droits, ce qu’impose l’opacité défensive des caisses et du monstre froid qui les commande. le terme aides est là, dans le langage courant (celui de la défaite) pour ramener au principe des « aides facultatives » c’est-à-dire attribuées selon des évaluations au procédures diverses, des arbitraires peu anticipables. tout l’inverse du droit dont relèvent pourtant le RSA, la prime d’activité, l’alloc chômage, l’ASPA, la CSS, en même temps que d’autres, dont l’#AAH est un bon exemple, se rapprochent de l’aide, puisque pour devenir un droit elle doit être d’abord accordée par une commission, au vu de l’"étude" d’un dossier, d’un cas, et en fonction du budget disponible, de la politique suivie en la matière.
      le « manque » d’assistantes sociales aggrave la situation. mais le passage obligé par les A.S., avec la sujétion qu’il implique, ne garantissaient déjà pas une information suffisante, puisque ces dernières évaluant qui parmi leurs « clients » mérite telle ou telle « aides », et à quel niveau.

      le pauvre, cet enfant à qui on donne ou refuse le biberon (ils vont boire !), cet enfant auquel on tape sur les doigts, et bien fort (expulsions locatives, interdictions bancaires, jobs de merde, prison, ...). fallait réussir, s’intégrer. chez les autres, ça inquiète (sombrer soi-même), ça rassure (on a fait ce qu’il faut pour ne pas en être), et ça distrait (il me coûtent, qu’on les mettent au taf au vrai, ou bine qu’on les pende !).

      #droits_sociaux #aides #jungle

    • La #dématérialisation participe de la volonté de l’état d’atomiser non seulement les #services_publics d’aide aux personnes mais aussi les services administratifs au sens plus large : une amie nous a confié qu’elle avait eu recours à une officine privée (payante) en ligne pour faire modifier la carte grise de la voiture du couple suite au décès de son mari.

      Pour la santé, pareil : tu dois te créer un compte sur doctolib si tu veux obtenir un rendez-vous dans un centre de radiologie. Le téléphone, tu peux oublier : ça ne sert plus qu’à prendre des selfies pour alimenter tes « stories » sur Insta ou TikTok.

      Le pire, c’est bien sûr la CAF, devenue un véritable léviathan qui paralyse d’effroi ses allocataires. Ne va surtout pas à l’encontre de leurs décisions, ils seraient capables de t’assigner au tribunal pour fraudes. Mon petit dernier vient d’en faire les frais : refus de poursuivre le versement de l’APL vu que (soit disant) il avait trop gagné en mai dernier. Résultat, le fils laisse tomber l’affaire (en s’asseyant sur 3 X 400 €) vu qu’il a plein d’autres projets plus importants et beaucoup plus motivants qu’un recours en indemnités auprès d’un tribunal administratif.

      La volonté d’affamer la bête des gouvernements successifs depuis 2007, et ce, par pure complaisance aux forces profondément réactionnaires de la société française, a permis que s’installe une profonde incurie au sein de tous les services publics. Le #non_recours n’est qu’une manifestation particulière de ce qu’il conviendrait de nommer globalement un régime de #terreur_administrative, lequel relève d’une volonté descendante de provoquer la panique et la soumission auprès des ayant-droits. Et tout cela n’a rien à voir avec la « phobie ».

      #starving_the_beast #marchandisation (des démarches pour faire valoir ses droits)

      Voir aussi tous les articles connexes sur la page de Basta.media à propos des CAF :

      https://basta.media/caf-declaration-en-ligne-prestations-APL-RSA-AAH-numerisation-chaos-raconte

      https://basta.media/Face-a-des-CAF-devenues-des-monstres-numeriques-sans-humanite-un-collectif-

      https://basta.media/CAF-controles-abusifs-des-allocataires-CNAF-score-de-risque-fraude-tribune-

    • L’institution des aides sociales (je les prends pour une seule pour me mettre dans la perspective des ayants droit sans formation en la matière) en Allemagne est aussi opaque qu’en France. Il y a également un biotope d’associations, entreprises, conseiller et avocats qui se font de l’argent en s’occupant des démarches administratives.

      La différence : l’état allemand est obligé de les payer pour leur travail.

      Quand moi, analphabète en matières officielles, je me trouve sans les sous pour payer mon appartement (toujours si j’en a un), je vais voir mon conseiller de quartier qui activera le fond municipal contre les évictions qui se chargera de mes loyers impayés. En même temps mon conseiller remplira ma demande d’allocations (Wohngeld, Bürgergeld, etc.) et me conseillera d’aller voir l’institution officiellement chargée de résoudre les problèmes d’endettement individuel où on établira avec moi un plan de désendettement.
      Si mes problèmes sont trop compliquées pour les résoudre avec l’aide d’un simple conseiller, je serai orienté vers des avocats spécialisés qui me représenteront au et seront payés par l’état.

      Mon rôle dans ce processus sera de suivre les consignes de mes conseillers, de prendre rendez-vous avec aux quand j’en ai besoin (quand je trouve un lettre du « Amt » dans ma boîte postale). On ne résoudra pas mon problème de pauvreté mais j’aurai des partenaires compétents et compréhensifs qui me protégeront contre l’incompétence, le harcèlement et l’injustice de la part des agents de l’institution des aides sociales. Si ma santé le permet je serai en mesure de reconstruire ma vie.

      Malheureusement les choses ne fonctionnent pas exactement comme ça. Je dois être en mesure de les trouver et communiquer avec ces conseillers. Quand je suis déjà à la rue, quand je n’ose pas sortir, quand je suis malade et tout seul, c’est un grand effort de partir à la recherche d’aide. Si je suis réfugié les choses sont tellement compliquées que la démarche décrite n’est pas suffisante. Je risque de rencontrer des conseillers qui ne savent pas identifier les bonnes ressources pour moi. Si je ne me trouve pas dans une grande ville où il y a des structures d’aide et de conseil, je risque de devoir me débrouiller tout seul.

      Bref, c’est souvent le parcours du combattant. Cette situation n’est pas le résultat du hasard mais le produit de l’idéologie qui considère les pauvres comme responsables de leur situation et de lois qui constituent un compromis entre cette idéologie fasciste et la constitution qui veut que l’état allemand soit un état social.

      #Allemagne #France #aide_sociale #exclusion

  • Quel est le poids de l’immigration sur les #prestations_sociales ?

    Il n’est pas rare de présenter les immigrés comme des "#profiteurs" qui choisiraient leur pays d’accueil en fonction des #bénéfices_sociaux escomptés. De ce point de vue, la "générosité" de la France, serait particulièrement attractive. Ainsi en 2018 les dépenses de #protection_sociale représentaient en France 31% du PIB, devant le Danemark (30,8%) et la Finlande (30,1%), le trio de tête européen. En Allemagne, en Italie ou en Suède cette part représente entre 27 et 30% du PIB, au Royaume Uni ou en Espagne la part de la protection sociale se situe entre 23 et 27%. Alors qu’en 2017 la moyenne européenne est de 27%, elle est de 19% du PIB aux USA et de 18% au Canada. Comment expliquer alors que les migrants se dirigent, plus massivement, vers des pays comme les USA, l’Allemagne, la Grande-Bretagne ou le Canada dont les systèmes de protection sociale sont bien moins… "séduisants" ? (Eurostat, Sespros ; OCDE)

    La part de l’immigration dans les #dépenses_publiques

    Concernant la contribution des immigrés aux #finances_publiques, en 2009 l’économiste Lionel Ragot, montrait que la population immigrée a une contribution totale légèrement positive aux finances publiques. Ces résultats viennent d’être confirmée par le rapport de l’OCDE sur les « Perspectives des migrations internationales 2021 ». « Dans les 25 pays de l’OCDE, en moyenne au cours de la période 2006-18, la contribution des immigrés sous la forme d’#impôts et de #cotisations a été supérieure aux dépenses publiques consacrées à leur protection sociale, leur santé et leur éducation. (…) La #contribution_budgétaire nette totale des immigrés était continuellement faible sur la période 2006-18, étant comprise entre -1 % et +1 % du PIB dans la plupart des pays. La situation varie selon les pays en fonction de l’âge de la population immigrée : en effet, les immigrés âgés ne contribuent pas dans la même mesure à l’économie que les immigrés d’âge actif ». En France, par exemple, la contribution budgétaire nette des personnes nées à l’étranger est de 1,02 % du PIB, donc légèrement excédentaire, contre une moyenne de 1,56 % sur l’ensemble des pays.
    Pour Jean-Christophe Dumont, la question du #coût de l’immigration « ne devrait pas nous obséder, car quand on fait le compte, on observe que la contribution est positive jusqu’à la prise en compte des dépenses militaires et de la dette publique ». En effet, lorsque le budget de la défense et le remboursement de la dette publique, qui ne concernent pas que les immigrés mais toute la population, sont pris en compte, la contribution devient négative pour la France (-0,85 %) comme pour la moyenne des 25 pays étudiés (-0,16).
    Aujourd’hui, selon l’OCDE, les dépenses publiques consacrées aux immigrés sont plus faibles que pour le reste de la population dans les domaines telles que les pensions de vieillesse et de réversion, la maladie, l’invalidité, l’éducation, la santé. Elles sont à l’inverse plus fortes concernant la famille, le chômage, l’exclusion sociale et le logement.
    Dans l’ensemble, les personnes nées à l’étranger contribuent 11 % de moins que les « natifs » au budget de l’Etat. Une participation « plombée » par une mauvaise intégration sur le marché du travail, avec 56 % des immigrés en emploi en France, or, selon une simulation réalisée par l’OCDE, avec un taux d’emploi similaire au reste de la population, les immigrés pourraient générer 0,2 % du PIB supplémentaires pour les comptes publics. Comme le rappelle Lionel Ragot, « individuellement, ils [les immigrés] sont plus au chômage, perçoivent plus d’allocations, c’est vrai. C’est le raccourci qui est souvent mis en avant pour dire qu’ils coûtent très cher à la France. Sauf que ce résultat individuel est compensé par une structure d’âge, avec des immigrés qui sont souvent dans la population active et qui donc cotisent beaucoup » (Libération, 28 octobre 2021).
    Les plus jeunes et les plus âgés coûtent le plus aux finances publiques (en dépenses de santé et vieillesse). Or, les prestations familiales visent à favoriser les naissances en France, et les enfants des familles immigrées (françaises ou étrangères !) sont les citoyennes et les citoyens de demain, appelés à contribuer au développement économique et démographique du pays. Le coût de ces allocations devrait être reporté sur le cycle de vie des enfants, comme tous les enfants de France… et non sur leurs parents.

    Surreprésentation & sous évaluations

    L’argument selon lequel les immigrés pèsent sur les comptes sociaux repose sur la surreprésentation des immigrés extra-européens au titre des prestations sociales (RMI, allocations chômage, aides au logement). Pour autant, ces immigrés cotisent, et cette surreprésentation est à corréler à leur exclusion du marché du travail mais aussi à leur situation professionnelle et aux discriminations dont ils sont victimes : faible qualification, promotion freinée, bas salaires, premiers licenciés, emplois non déclarés ou encore allégements des charges patronales sur les bas salaires.
    Par ailleurs, nombre d’immigrés ne font pas valoir leurs droits. Ainsi en est-il des immigrés qui retournent dans leur pays sans bénéficier de leurs prestations sociales : ainsi, les mouvements de retour ou « remigrations » des immigrés seraient de 20 % à 50 % au cours des cinq années suivant leur arrivée (Dumont et Spielvogel, 2008), et, selon un audit parlementaire de mai 2011, "5 ans après leur entrée, seuls 60% des titulaires d’un titre de séjour sont encore sur le territoire français". De même, à la retraite, des immigrés repartent chez eux allégeant ainsi les dépenses de santé en France. De leurs côtés, les salariés sans-papiers qui travaillent et s’acquittent de leurs cotisations sociales ne peuvent bénéficier de certaines prestations sociales auxquelles ils pourraient prétendre. Enfin, si l’immigration ne constitue qu’un élément de la réponse au vieillissement des pays européens, l’arrivée d’une main d’œuvre étrangère, qui n’aura rien coûté en frais d’éducation, contribuera aussi à améliorer le rapport entre actifs et inactifs et donc à alléger… les comptes sociaux.
    L’allongement de l’espérance de vie, le chômage de masse ou les inégalités en matière de cotisations sociales, restent les véritables causes de la fragilité de la protection sociale en France. Pas l’étranger.

    https://www.histoire-immigration.fr/economie-et-immigration/quel-est-le-poids-de-l-immigration-sur-les-prestations-sociales

    #migrations #asile #attractivité #économie #welfare_state #Etat_providence

    –—

    ajouté à la métaliste sur le lien entre #économie (et surtout l’#Etat_providence) et la #migration... des arguments pour détruire l’#idée_reçue : « Les migrants profitent (voire : viennent POUR profiter) du système social des pays européens »... :

    https://seenthis.net/messages/971875

  • Asile, une industrie qui dérape

    Le traitement des demandes d’asile en Suisse est devenu une véritable industrie, avec des #centres_fédéraux gérés principalement par des sociétés privées. Employés mal payés, manque cruel de formation, dérapages violents, dérives bureaucratiques, accès aux soins problématique : des témoignages et des documents d’enquêtes pénales inédits permettent de percer la boîte noire des centres fédéraux d’asile.

    https://pages.rts.ch/emissions/temps-present/12754866-asile-une-industrie-qui-derape.html

    #Budget de fonctionnement des centres : 215 millions en 2021, dont 57 mio à l’encadrement et 60 millions à la sécurité (min 53’50) :

    Dans le reportage, l’histoire de #Sezgin_Dag est racontée. Sezgin décède dans un taxi qui était en train de l’amener à l’hôpital (à partir de la minute 3’06).

    #asile #migrations #réfugiés #privatisation #business #Suisse #ORS #Protectas
    #violence #accélération_des_procédures #procédures_accélérées #accès_aux_soins #souffrance #témoignage #industrie_de_l'asile #business #SEM #Securitas #coût #dysfonctionnement #Boudry #cellule_de_réflexion #décès #morts #suicides #automutilations #traumatismes #dérapages #Gouglera #injures #violence_systématique #frontaliers #conditions_de_travail #plan_d'exploitation_hébergement (#PLEX) #fouilles #nourriture #alimentation #punitions #privations_de_sortie #mesures_disciplinaires #horaires #pénalité #formation #spray #agents_de_sécurité #salaires #centres_pour_récalcitrants #récalcitrants #Verrières #centres_spécifiques #centre_des_Verrières #disparitions #délinquance #optimisation #sécurité #prestations #société_anonyme

    –-
    Ajouté à la métaliste sur #ORS en Suisse :
    https://seenthis.net/messages/884092

  • Non-déclaration de ressources pour le #RSA : pour qu’il y ait #fraude, il faut établir l’#intention de frauder
    https://www.banquedesterritoires.fr/non-declaration-de-ressources-pour-le-rsa-pour-quil-y-ait-fraud

    Dans un arrêt du 13 janvier 2021, la #Cour_de_cassation apporte des précisions importantes sur les sanctions applicables aux allocataires du RSA en cas de non déclaration de certaines ressources. En l’espèce, Mme V..., domiciliée dans le Rhône, avait omis de déclarer dans ses DTR (déclarations de ressources trimestrielles) plusieurs revenus de différentes nature, sous la forme de « nombreux virements, remises de chèques et dépôts d’espèces, pour des montants variables mais non négligeables ». Il s’agissait notamment de prêts familiaux ou amicaux, ainsi que des revenus – modestes – de ses enfants. Par un jugement du 22 juin 2017, le tribunal correctionnel avait déclaré Mme V... coupable de fraude aux #prestations_sociales, en l’espèce le RSA, pour un montant de 10.591,18 euros. Saisie d’un pourvoi, la cour d’appel de Lyon avait, dans un arrêt du 18 octobre 2019, condamné Mme. V... à trois mois d’emprisonnement avec sursis et prononcé sur les intérêts civils.

    Dans son arrêt du 13 janvier 2021, la Cour de cassation « casse et annule, en toutes ses dispositions, l’arrêt de la cour d’appel de Lyon » et renvoie les parties devant cette cour, autrement composée. Le raisonnement est intéressant et devrait inspirer les départements et les CAF confrontés à ce cas de figure. En effet, la Cour de cassation ne conteste nullement la matérialité des faits constatés, mais elle avance deux arguments. D’une part, elle fait valoir qu’il convenait de s’assurer que l’intéressée avait bien connaissance de l’obligation de déclarer les ressources en question. Or la défense faisait valoir que, sur la questions des prêts familiaux et amicaux, « aucune information n’était disponible et que les sites internet concernés ne font jamais mention de l’obligation de déclarer un prêt au titre des ressources devant figurer sur la déclaration trimestrielle RSA ». La cour d’appel aurait donc dû vérifier s’il s’agissait d’une intention délibérée de frauder ou d’une simple erreur, faute d’information suffisante (ce qui aurait alors constitué un simple indu et non pas une fraude). La seule présence de ces rentrées non déclarées sur le compte de Mme V..., mises en évidence par le contrôle sur ces comptes effectué par un agent assermenté de la CAF, ne pouvait, à elle seule, constituer la preuve d’une fraude. D’autre part, il convenait de vérifier si la perception des sommes contestées était de nature à faire perdre à Mme V... le bénéfice de son RSA.

    Conclusion de la Cour de cassation : « En se déterminant ainsi, sans autrement rechercher, d’une part, si Mme V... avait conscience, au vu des informations délivrées par l’organisme public concernant la liste des ressources à déclarer, que des prêts familiaux ou amicaux, réalisés de manière ponctuelle et à charge pour elle de les rembourser, devaient être considérés comme des ressources nécessitant leur déclaration, d’autre part, si la totalité des montants perçus était de nature à lui ôter, en tout état de cause, son droit à percevoir un revenu de solidarité active, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision. »

  • Observatoire des #non-recours aux droits et services

    Objectifs

    Dans les domaines des #prestations_sociales, de la #santé, de l’insertion sociale et professionnelle, de l’#autonomie, de la #médiation_sociale, des déplacements, de la lutte contre les #discriminations

    - Observer des situations de non-recours, mesurer leur importance, caractériser les populations concernées, enquêter sur les causes.
    – Analyser les limites de l’#intégration_sociale par les politiques publiques au regard des phénomènes de non-recours.
    – Diffuser les connaissances, les données et les méthodes d’identification et d’évaluation du non-recours.
    – Accueillir la réalisation de stages, de mémoires de Master et de recherches doctorales ; servir de support à des séjours scientifiques dans le cadre de collaborations internationales.

    Une observation productrice d’#outils utiles pour la #recherche et l’#action

    – Requêtes #statistiques sur des bases de données constituées.
    - Dispositifs ad hoc de suivi/évaluation au sein de structures administratives ou associatives.
    - Enquêtes qualitatives suivant plusieurs techniques : entretien individuel ou collectif, focus group, groupe de qualification mutuelle.
    – Ateliers de #témoignages.

    Une #observation articulée à des recherches pour de nombreux organismes

    le CNRS, l’ANR, la CNAMTS, la CNSA, la DGCS, la DREES-MIRe/ONPES, le PUCA, l’INPES, le PREDIT, l’INCA, …

    Axes de questionnement

    Pourquoi des individus ou des populations ne recourent pas, volontairement ou non, à l’#offre_publique.
    Que ce soit dans des rapports directs aux services prestataires (services publics, associations, entreprises), à des acteurs intermédiaires (organisés ou non organisés) ou dans la participation à des actions collectives soutenant l’accès aux droits.

    Pourquoi et comment les institutions se saisissent des phénomènes de non recours à l’offre publique. Renouvellement du contenu de l’offre publique et organisation spatiale des pratiques sociales (autour de logiques de contrat, d’incitation et de responsabilisation, de proximité, d’accessibilité et de mobilité) ; développement d’outils de connaissance des phénomènes de non-recours ; mise en œuvre de dispositifs d’information, d’expression de la demande sociale, de (re)mise en capacité des individus, de lutte contre les discriminations, de construction d’intérêts collectifs.

    Une démarche scientifique fondée sur l’observation

    L’#invisibilité des phénomènes de non-recours demande d’articuler trois types de recherche dans une démarche scientifique interdisciplinaire.


    https://odenore.msh-alpes.fr
    #précarité #recherche-action #droits #accès_aux_droits

    • Collectif SOIF de connaissances

      Renforcer les liens entre la recherche, la formation des professionnels et les #pratiques de terrain dans le champ sanitaire et social

      Le secteur de l’#action_sociale connaît actuellement de profondes évolutions et remises en question, illustrées notamment par les débats menés dans le cadre des Etats Généraux du #Travail_Social. L’une des questions centrales concerne l’articulation, au niveau des territoires, entre les pratiques de terrain, la formation – continue ou initiale – des professionnels, et la recherche scientifique dans les différents domaines d’intervention. Le cloisonnement trop souvent observé des divers acteurs concernés mène en effet à une certaine incohérence entre les besoins identifiés, les réponses apportées par les structures, et les contenus de formation.

      Le Plan d’action en faveur du travail social et de l’#intervention_sociale présenté en conseil des ministres le 21 octobre 2015 prend en compte ces enjeux, en fixant notamment les objectifs suivants :

      – Inscrire progressivement le travail social dans un parcours conduisant à des grades universitaires.
      - Reconnaître l’intervention sociale comme un champ de recherche.
      - Garantir la qualité des formations et des diplômes d’Etat, via notamment un cahier des charges partagé Etat-Régions.

      http://www.collectif-soif.fr/le-collectif

  • La #Cour_des_comptes appelle à renforcer sans tarder la lutte contre la #fraude_sociale | Public Senat
    https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/la-cour-des-comptes-appelle-a-renforcer-sans-tarder-la-lutte-contre-la-f

    Auditionné ce 8 septembre 2020 devant la commission des Affaires sociales du Sénat, le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, n’a pas pu livrer une estimation précise du volume des fraudes aux #prestations_sociales. En cause : le manque d’enquêtes de la part de différents organismes de #protection_sociale, la « zone grise » entre #erreurs et fraudes, ou encore le calendrier contraint de la Cour pour remettre ses conclusions.

    https://www.ccomptes.fr/system/files/2020-09/20200908-rapport-Lutte-contre-fraudes-prestations-sociales.pdf

    • Petit résumé de l’#entubage

      La réforme des retraites.

      Âge légal de la retraite actuellement : 62 ans.

      Le mode de calcul prévu par la réforme, soit le rapport Delevoye qui a paru au mois de juillet, rend nécessaire de travailler au-delà de l’#âge_légal. La retraite minimum envisagée à 1 000 euros par mois dans ce même rapport ne sera garantie qu’à celles et ceux qui partiront au-delà d’un « #âge_pivot » ou « âge d’équilibre », qui sera au départ fixé à 64 ans et pourra reculer par la suite. Ce nouvel ’âge pivot’ incite les travailleur.se.s à nettement différer leur départ à la retraite. Sous l’âge pivot, des tranches de moins 5% sont appliquées, au-dessus de l’âge pivot des tranches de +5%. Pour les #fonctionnaires, aujourd’hui, les retraites du public sont
      calculées sur les six derniers mois de salaire. Il est envisagé de
      prendre en compte l’intégralité de la carrière dans le nouveau #régime_universel, ce qui aboutit à un montant nécessairement fortement réduit.
      Actuellement en moyenne, la pension des #femmes (1 123 euros) est inférieure de 42 % à celle des #hommes (1 933 euros). La réforme va accentuer cet écart. Les #infirmières, les #aides-soignants et les #enseignants sont les salarié.e.s du public qui vont le plus être touché.e.s : les pensions ne seront plus calculées sur les six derniers mois, mais sur l’ensemble de la carrière, et sans bénéficier de l’intégration de #primes dans le calcul. Par ailleurs, en créant un régime dit universel de retraite par points (en fonction du nombre d’années travaillées, avec un âge pivot tardif, et amené encore à être repoussé), et la disparition des 42 caisses actuelles de retraite « Les gouvernements seraient seuls décideurs (…) pour gérer les retraites en fonction de ce que les gouvernement appelleront "contraintes budgétaires et financières" ».

      Reçu par email, le 05.12.2019

      #genre

    • Pour se conformer aux règles de l’Isotype, il faudrait, bien sûr, utiliser un pictogramme pour représenter l’argent, c’est à dire des pastilles. Pardonnez-moi cet abus.

    • Parole de #Macron... c’était le 25 avril 2019 :

      « Mes bons amis, allez travailler plus longtemps »... Le 25 avril 2019, Emmanuel Macron expliquait pourquoi il ne fallait pas reculer l’âge légal (avant de faire l’inverse dans sa réforme). Deux raisons :
      – Il s’est engagé à ne pas le faire
      – Ca serait hypocrite.

      source : https://twitter.com/nico_lambert/status/1205751406042472449

      #âge_légal #âge_pivot

    • Analyse Retraites par le ce comité de mobilisation de la DG de l’Insee

      Nous sommes des statisticiennes et statisticiens de l’Insee, l’Institut national de la statistique et des études économiques. À ce titre, nous réaffirmons que le rôle de la statistique publique est d’éclairer le débat public et d’apporter aux citoyens des éléments de compréhension des enjeux sociaux et économiques. Mercredi 11 décembre 2019, le Premier ministre, M. Édouard Philippe, a affirmé : « La responsabilité, c’est tenir compte, comme tous nos voisins, de données économiques et démographiques incontestables. » Nous le prenons au mot en rappelant quelques chiffres fondamentaux, afin que les citoyens s’en saisissent et comprennent l’enjeu d’un refus collectif de la réforme régressive en cours.

      Le comité de mobilisation de la direction générale de l’Insee, soutenu par les sections CGT, FO, SUD

      https://tendanceclaire.org/contenu/autre/Analyse_Retraites_Comite_mobilisation_Insee.pdf
      #pauvreté #solidarité #inégalités #dégradation #niveau_de_vie #femmes #marché_du_travail #répartition #démographie #choix_de_société #choix_politiques #temps_de_travail #productivité #financement_des_retraites #ressources_financières #cotisations_patronales #fonction_publique #austérité #chômage #cotisations_sociales #statistiques #chiffres #caisses_de_retraite #salaires #égalité_salariale #retraite_par_points #64_ans #espérance_de_vie #espérance_de_vie_en_bonne_santé #marché_du_travail #taux_de_remplacement

      signalé par @unagi sur seenthis :
      https://seenthis.net/messages/816267

    • ​Peut-on demander à toutes et tous de travailler jusqu’à 64 ans ?

      Un collectif d’agent·e·s de la #DARES (direction statistique du Ministère du Travail) a rédigé un article sur l’emploi des seniors à partir de données étayées sur leur situation actuelle.

      Un collectif d’agent·e·s de la DARES (direction statistique du Ministère du Travail) a rédigé un article sur l’emploi des seniors à partir de données étayées sur leur situation actuelle.

      Ce travail met en évidence les difficultés actuels auxquels font face les seniors sur le marché du travail avant leur retraite, de même que les inégalités, entre ca​dres et ouvrier×es, en matière de pénibilité, de santé et d’espérance de vie. Enfin, l’étude s’achève sur des comparaisons internationales sur l’évolution du taux de pauvreté des seniors.

      L’ensemble des éléments qui composent cette étude enrichissent le débat actuel sur la réforme des retraite par son analyse sur le fort taux d’inactivité des seniors, ainsi qu’une transition vers la retraite souvent affecté par des épisodes de non-emploi, y compris le chômage, et les liens entre pénibilité, santé et emploi. Ainsi, cette étude interroge sur les conséquences des principales mesures de la ​réforme des retraites à venir.

      Au-delà des données sur l’emploi des seniors, cette étude souligne la mobilisation des agent×es de la statistique publique, comme cela a été fait au préalable par des camarades de l’INSEE, à partir de données nationales validées, pour mettre en évidence les limites importantes de la réforme à venir.

      Depuis plus d’un mois les syndicats de salariés se mobilisent contre le projet de réforme du système de retraites présenté par le gouvernement. Jean-Paul Delevoye, ancien haut- commissaire à la réforme des retraites, déclarait, avant sa démission forcée, que cette réforme « doit être l’occasion de réfléchir collectivement à notre modèle de société, aux valeurs sur lesquelles nous voulons fonder notre pacte social » .

      Un collectif d’agents mobilisés contre cette réforme au sein de l’Insee a récemment rassemblé des données issues de la statistique publique qui infirment les principales justifications de la réforme [0]. À notre tour, nous, collectif d’agents de la Dares, direction statistique du ministère du Travail, voulons contribuer à cet exercice, en présentant des données sur la situation actuelle des seniors à l’égard du travail et de l’emploi. Nous espérons participer ainsi à la réflexion collective sur notre « modèle de société ».

      Collectif de mobilisation des agents de la Dares soutenu par la CGT.

      Emploi des seniors : une situation déjà fortement dégradée

      La réforme, comme beaucoup d’autres mesures récentes visant à augmenter l’activité des seniors (encadré 1), vise à prolonger la durée d’activité des seniors dans un contexte où leur situation d’emploi est déjà très dégra- dée, en particulier pour les moins qualifiés.
      Inactivité forcée et chômage de longue durée : les seniors particulièrement tou- chés

      Depuis 2008, du fait des réformes successives, l’âge moyen de départ à la retraite a augmenté, jusqu’à 62 ans et demi en 2017 (graphique 1, [1]. Si le taux de chômage des seniors apparaît relativement faible (7,5 % pour les 60-64 ans), c’est qu’il masque un fort taux d’inactivité : entre 59 et 61 ans plus d’un senior sur cinq est inactif sans être encore à la retraite [2] (graphiques 2a et 2b), souvent découragé après une recherche d’emploi longue et infructueuse ou pour des raisons de santé (infra).

      L’inactivité des seniors rime souvent avec pauvreté. En 2015, 11 % des personnes âgées de 53 à 69 ans (soit 1,4 million de personnes), ne perçoivent ni revenu d’activité ni pension de retraite, de droit direct ou de réversion [3]. Ces seniors sans emploi ni retraite, en majorité des femmes, sont moins diplômés que les autres et en moins bonne santé. Avec un niveau de vie médian de 1 270 euros par mois, leur taux de pauvreté atteint 32 %, contre 7 % pour les autres seniors en emploi ou à la retraite.

      Quand ils sont au chômage, les seniors y demeurent longtemps : 68% des chômeurs âgés de 55 à 64 ans le sont depuis un an au moins sans interruption [2]. Parmi les seniors demandeurs d’emploi s’étant inscrits à Pôle emploi en décembre 2016, 72 % sont ainsi encore au chômage 18 mois plus tard (contre 45 % pour l’ensemble des inscrits), et 51 % n’ont occupé aucun emploi durant ces 18 mois (contre 21 %) [4]. Selon Pôle emploi, la durée moyenne au chômage (2) des plus de 50 ans est de 546 jours, contre 336 jours pour l’ensemble des demandeurs d’emploi [5].

      C’est notamment parce qu’ils font l’objet de discriminations : trois managers sur quatre évoquent l’âge comme un facteur défavorable à l’embauche [6], ce qui est confirmé par d’autres travaux où l’âge est ainsi, avec le sexe, le premier motif évoqué de discrimination au travail [7].

      L’automatisation des processus de recrutement joue également, en défaveur des seniors, accordant beaucoup plus de valeur aux diplômes et autres critères formels, qu’aux parcours professionnels et aux compétences acquises, rendues invisibles par ces méthodes d’embauche [8].

      Une situation encore plus dégradée pour les femmes

      Quand elles sont au chômage, la durée moyenne de chômage des femmes de 50 à 59 ans est de 53 jours supérieure à celle des hommes du même âge. Les mon- tants qu’elles perçoivent par l’assurance chômage sont significativement plus faibles, de 33 % en moyenne. A partir de 60 ans cet écart atteint 44 % : 950 € nets par mois pour les femmes, 1 650 € pour les hommes, reflet des inégalités de salaires et de carrières [9].

      La retraite par points : désavantageuse pour les seniors en inactivité ou à temps partiel

      Non seulement beaucoup de seniors, notamment parmi les moins qualifiés, ne sont ni en emploi ni au chômage avant leur retraite et ne pourront donc pas accumuler de points ; mais ceux qui sont en emploi sont plus souvent à temps partiel en fin de carrière, ce qui les défavorisera de nouveau par rapport au système actuel où ces années pouvaient ne pas compter parmi les 25 meilleures et donc ne réduisaient pas les droits à retraite.

      En effet les salariés seniors sont deux fois plus nombreux que les 30-54 ans à déclarer être à temps partiel pour raison de santé. En particulier, les ouvriers de 55 à 64 ans déclarent 5 fois plus souvent être à temps partiel pour raison de santé que les cadres. Plus de 40 % des 55-64 ans à temps partiel ont une durée de travail inférieure ou égale à un mi-temps.

      Travail, retraite et santé des seniors : de fortes inégalités

      Les difficultés des seniors sur le marché du travail touchent particulièrement les employés et les ouvriers, dont la santé a souvent été affectée par un travail pénible.
      Inactivité avant la retraite : souvent à cause d’une santé dégradée par le travail

      Les seniors devenus inactifs avant d’avoir liquidé leur retraite indiquent que les principaux motifs d’arrêt d’activité ont été un licenciement (37 %) ou des problèmes de santé rendant le travail difficile (35 %) [10].

      Les problèmes de santé et d’emploi des seniors ne sont pas sans lien avec leur travail antérieur. Les salariés qui ont exercé pendant au moins quinze ans des emplois pénibles sont moins souvent en emploi, et bien plus souvent limités dans leurs activités quotidiennes (24 % contre 17 % des personnes qui n’ont pas été exposées au moins 15 ans) [11]. La pénibilité physique au travail est un facteur considérable d’inégalités : 61 % des aides- soignantes déclarent au moins une contrainte physique intense, ainsi que 79 % des ouvriers du second œuvre du bâtiment ou 80 % des ouvriers qualifiés de l’automobile, contre 38 % de l’ensemble des salariés en 2010 [12]. Les mêmes écarts se retrouvent pour l’exposition aux risques chimiques cancérogènes, qui touchent prioritairement les ouvriers.
      Pénibilité du travail : toujours pas prise en compte

      Avec l’âge, nombre de travailleurs, particulièrement chez les ouvriers, n’arrivent donc pas à se maintenir en emploi en raison de leur état de santé. Le compte personnel de prévention de la pénibilité (C3P), introduit par la réforme des retraites de 2013, était supposé compenser ces inégalités en permettant aux salariés les plus exposés au cours de leur carrière de partir plus tôt à la retraite (2 ans au maximum, après 20 ans d’exposition reconnue). Mais du fait d’une mauvaise volonté patronale le C3P n’a pas tenu ses promesses : alors que l’étude d’impact de la loi de 2013 prévoyait que chaque année 3,3 millions de salariés pourraient y avoir droit, cela n’a été le cas que pour 870 000 salariés en 2016 et 650 000 en 2017, respectivement 26 % et 20 % des bénéficiaires potentiels [13].

      La réforme de 2017, décidée sous la pression du Medef, a encore affaibli sa portée en supprimant 4 critères de pénibilité (postures pénibles, charges lourdes, vibrations, agents chimiques dangereux), qui concernaient particulièrement des professions difficiles comme les ouvriers du bâtiment ou les aides-soignantes. En supprimant les régimes spéciaux, la réforme élimine les rares dispositifs qui permettaient vraiment aux salariés exerçant des métiers pénibles de partir plus tôt.
      Les ouvriers, plus longtemps au travail mais moins longtemps à la retraite que les cadres

      Les plus diplômés (niveau bac +5, soit 17 % d’une génération) terminent leurs études à 25 ans environ, contre 19 ans au niveau CAP-BEP (13 %) et 18 ans en l’absence de tout diplôme (14 %) [14].

      Travaillant plus tôt, les ouvriers et employés profitent également moins longtemps de leur retraite : l’espérance de vie en France a certes progressé depuis 1947 (+3 années pour les femmes et +4,9 ans pour les hommes entre 1997 et 2017 [15]), mais demeure très inégale selon la position sociale. Entre les 5 % les plus aisés et les 5 % les plus pauvres, l’écart d’espérance de vie approche 13 ans pour les hommes (graphique 3, [16]).

      Les hommes ouvriers risquent beaucoup plus de mourir avant 60 ans que les hommes cadres (13 % contre 6 %) ; l’écart est un peu moins important pour les femmes (5 % pour les ouvrières contre 3 % pour les femmes cadres) [18].

      Les cadres retraités, vivant plus longtemps, bénéficient de leurs retraites pour une durée plus longue que les ouvriers, en moyenne 23 ans contre 20 ans chez les hommes et 29 ans contre 26 ans chez les femmes [19].

      L’écart entre cadres et ouvriers se creuse plus encore lorsque l’on considère l’espérance de vie sans incapacité. A 35 ans, selon le type d’incapacité, un cadre espère en moyenne vivre 34 à 45 ans sans incapacité, contre 24 à 38 ans pour un ouvrier [20]. En somme, pour une même durée de cotisation, les cadres passent plus de temps en retraite et en bonne santé que les ouvriers.
      Les réformes à l’étranger : des retraités appauvris

      Dans de nombreux pays de l’OCDE, le système des retraites actuel est le fruit de réformes enclenchées au cours des années 1990 après des périodes de concertation entre partenaires sociaux et État relativement longues. La mise en œuvre de ces réformes a été par ailleurs étalée sur une période également assez conséquente.

      Trois pays sont souvent évoqués comme exemplaires en matière de réformes sociales et/ou d’indicateurs de performance économique : la Suède, l’Allemagne et le Royaume Uni.

      La Suède a été citée à plusieurs reprises comme une « source d’inspiration » . En 1994, elle a adopté un sys- tème à points, entré progressivement en vigueur à partir de 2001. Les retraites jusqu’à-là indexées sur les quinze meilleures années et liquidées après trente ans de cotisations pour une pension à taux plein, sont désormais basées sur des cotisations fixes ; leur niveau dépend de l’âge de départ, de l’espérance de vie et de la situation économique du pays. Le montant annuel de la retraite est obtenu en divisant les cotisations versées pendant la vie active par le nombre d’années restant à vivre, selon l’espérance de vie moyenne, incitant à un départ plus tardif à la retraite. Le départ aujourd’hui fixé à 65 ans va progressivement passer à 67 ans en 2026. Ce système a pour objectif d’empêcher la possibilité d’un déficit en permettant à la valeur du point de fluctuer. Les pensions peuvent alors baisser en période de crise, comme cela fut le cas en 2010, 2011 et 2014. D’après l’OCDE, le taux de remplacement est passé de 60 % du dernier salaire il y a 20 ans [21], à 53,4 % aujourd’hui. Le taux de pauvreté des plus de 65 ans est, selon Eurostat, de 14,6 % en 2018 contre 7,3 % en France (tableau 1).

      En Allemagne, en dépit des réformes qui se sont succédées depuis les années 1990, le financement du système des retraites ne parvient toujours pas à faire face au vieillissement de la population et à la baisse du nombre d’actifs. Pourtant, la durée de cotisation a été plusieurs fois rallongée et l’âge de départ à la retraite a été progressivement reculé à 65 ans ou à 67 ans (pour les personnes nées après 1964). Pour percevoir une retraite à taux plein, il faut avoir cotisé 45 ans. Les cotisations-retraite (salarié et employeur) déjà à 18,6 %, atteindront 20 % en 2025. Selon Eurostat, 18,7% des retraités sont pauvres et les écarts entre les pensions des hommes et celles des femmes sont les plus élevés des pays de l’OCDE.

      Au Royaume-Uni, l’État verse 200 euros par semaine environ à tous ceux qui ont cotisé pendant 35 ans. L’âge minimum légal de départ à la retraite aujourd’hui de 65 ans, va passer à 66 ans en 2020, 67 ans en 2028 et 68 ans en 2037. Le taux de remplacement du dernier salaire n’est que de 28 %. À cette retraite publique peut s’ajouter un régime par capitalisation, dont le montant dépend de l’état des marchés financiers. Le taux de pauvreté des plus de 65 ans est très élevé : 19,3 % selon Eurostat.

      En France, le taux de pauvreté des plus de 65 ans se situe en 2018 à 1,7 point au-dessous de celui des 55-64 ans (Graphique 4). C’est là une caractéristique distinctive du système de retraites français actuel : cela n’a pas toujours été le cas auparavant (jusqu’en 2010, le taux de pauvreté des plus de 65 étant plus élevé que celui des 55-64 ans), et peu de pays de l’OCDE présentent des taux de pauvreté des seniors aussi faibles.

      https://reforme-retraite.info/travailler-jusque-64-ans
      #Suède #Allemagne #Royaume-Uni #UK

      Pour télécharger le document en pdf :
      https://www.souffrance-et-travail.com/wp-content/uploads/collectif-statistiques-du-travail.pdf

    • Rapport du #COR : un déficit construit de toutes pièces

      Le gouvernement a demandé au COR de publier une nouvelle #prévision du régime de retraites allant jusqu’en 2030, peu de temps donc après la projection de juin, qui allait jusqu’en 2070. Son objectif est clair : il s’agit de montrer que le système est déficitaire et donc qu’il faut des mesures de correction avant 2025, date envisagée de mise en place de la retraite par points, « pour redresser l’#équilibre_financier du régime ».

      Le COR a cependant publié un rapport relativement balancé annonçant certes un certain #déficit pour 2025, mais reconnaissant que son évaluation provient de conventions comptables discutables. Le risque est que le gouvernement et la presse mettent l’accent sur le déficit maximum prévu pour 2025, soit pour l’ensemble des régimes de retraite : 0,7 point de PIB (17,2 milliards d’euros) dans l’hypothèse que les #taux_de_cotisation restent fixes. Nous verrons que ce pseudo-déficit provient essentiellement de la baisse des #ressources affectées au système, en raison de la forte baisse de la part de la #masse_salariale du #secteur_public, de la #non-compensation de certaines #exonérations de #cotisations_sociales, de la baisse des transferts de l’#Unedic et de la #CNAF. Il disparaît pratiquement si une autre convention comptable est adoptée.

      http://www.atterres.org/article/rapport-du-cor-un-d%C3%A9ficit-construit-de-toutes-pi%C3%A8ces

      Note à télécharger ici :
      http://atterres.org/sites/default/files/Note%20EA%20COR_0.pdf

      –-> Note citée dans cette analyse de deux sociologues :
      Les fonctionnaires sacrifiés sur l’autel du système « universel » de retraites
      https://seenthis.net/messages/820914

    • Nous sommes à un tournant [https://www.youtube.com/watch?v=iJKVd609iGU&feature=emb_logo]

      dans le mouvement en faveur du système de retraite solidaire imaginé pour nous par le Conseil National de la Résistance, et revenu à l’équilibre financier [https://www.alternatives-economiques.fr/systeme-de-retraites-ne-connait-crise/00091163]. Si des dizaines de textes, venant même des économistes de LREM, ont fait une critique factuelle et chiffrée de la “réforme”, aucun argumentaire rationnel n’a été publié pour la soutenir mais un usage renversé de la rhétorique d’abolition des privilèges, contre la fonction publique [https://www.liberation.fr/debats/2020/01/14/les-fonctionnaires-sacrifies-sur-l-autel-du-systeme-universel-de-retraite. L’objet même de la réforme est indicible, car indéfendable : il s’agit de mettre le système de retraite en déficit de financement de 67 milliards € [https://www.alternatives-economiques.fr/guillaume-duval/reforme-risque-de-desequilibrer-fortement-financement-retraites/00091464], créant une crise qui amènera mécaniquement à une diminution des pensions facilitée par le système à points [https://www.alternatives-economiques.fr/michel-husson/garantir-point-ne-garantit-rien/00091288], à une augmentation de l’âge de départ en retraite et à un allongement de la durée de cotisation.

      Message reçu via une mailing-list militante, le 15.01.2020.

      Ci-dessous dans le fil de discussion je vais copier-coller quelques articles citées dans ce message et qui me paraissent forts intéressants.

    • Notre système de retraites ne connaît pas la crise

      Loin du tableau apocalyptique dressé par certains, l’avenir du système français de retraites est assez serein, les difficultés qu’il a connues étant d’ores et déjà largement résorbées.

      Le gouvernement veut chambouler le système de retraites. Au grand projet de réforme universelle à points défendu par Emmanuel Macron vient s’ajouter le spectre d’un allongement de la durée de vie au travail, justifié par l’annonce d’un déficit de 8 à 17 milliards d’euros en 2025. Une réforme, voire deux réformes à hauts risques pour un jeu qui n’en vaut pas forcément la chandelle. Car la santé de notre système par répartition qui a enchaîné les régimes se porte bien, merci. Tour d’horizon en 9 graphes.
      1/ Un système de retraites français (quasiment) revenu à l’équilibre

      Le déficit des retraites n’oblige-t-il pas, quoi qu’il arrive, à serrer les boulons ? Pas vraiment. La crise de 2008-2009 avait logiquement creusé ce déficit : les rentrées du système de retraite sont très dépendantes des cotisations payées par les salariés et les entreprises et donc de la santé économique du pays, tandis que ses dépenses ne varient pas avec l’activité.

      L’effet des réformes menées depuis 1990, combiné aux mesures supplémentaires prises en 2010 et 2013 pour combler ce déficit et au rétablissement de l’économie ont quasiment ramené le système de retraites à l’équilibre. Il n’y a donc aucune urgence particulière à réformer une fois de plus le système.

      2/ Financement des retraites : rien d’inquiétant à l’horizon 2030

      Le système est aujourd’hui quasiment à l’équilibre mais demain ? Comment ses finances vont-elles évoluer dans le futur ? Le gouvernement a demandé au Conseil d’orientation des retraites (COR) de produire un rapport à ce sujet à l’horizon 2030, un document qui vient d’être rendu public.

      Le rapport du COR aboutit à un creusement du déficit d’ici 2030 avec une fourchette assez large pour la valeur de ce déficit à cet horizon. L’évolution des dépenses de retraites dépend, sans surprise, du niveau qu’atteindra en moyenne la croissance économique d’ici 2030 : si cette croissance n’est que de 1 %, la part des retraites dans le PIB devrait monter selon le COR de 13,8 % du PIB aujourd’hui à 13,9 % en 2030. A contrario si la croissance est en moyenne de 1,8 % d’ici là, cette part baisserait à 13,6 %. Cela reste en tout cas dans l’épaisseur du trait et il ne devrait rien se produire qui ressemble de près ou de loin à une explosion des dépenses.

      Ce qui crée le déficit, c’est la baisse des recettes. Celle-ci est notamment liée à la baisse des emplois publics prévue par le gouvernement, car l’Etat cotise davantage que les employeurs privés pour le système de retraite. Cette diminution des recettes est due cependant également aux exonérations non compensées de cotisations sociales mises en place depuis 2017, notamment sur les heures supplémentaires. Le niveau des recettes dans le PIB dépend très peu en revanche de la croissance économique : c’est en gros un pourcentage constant de la richesse produite.

      Il dépend en revanche fortement des conventions qu’on prend pour l’évolution future de la contribution de l’Etat employeur au financement du système de retraite. Si on fait l’hypothèse, qui semble raisonnable, que la part du PIB qu’il y consacre devrait rester constante d’ici 2030, les recettes globales du système de retraite devraient baisser de 13,7 % du PIB - aujourd’hui à 13,4 % du PIB - , créant ainsi un déficit oscillant entre 0,2 et 0,5 % du PIB en 2030 au lieu de 0,1 % actuellement. Là aussi, il s’agit de l’épaisseur du trait avec 54 % de dépenses publiques… Ce déficit serait quasiment nul, voire se transformerait en excédent si on se contente simplement d’accroître de 0,3 point de PIB les recettes pour maintenir constante la part du PIB consacrée au financement des retraites. Rien de dramatique donc.

      3/ Les retraités partent déjà de plus en plus tard
      Alors que le discours gouvernemental plaide pour que les Français travaillent plus longtemps s’ils veulent toucher une retraite à taux plein, faut-il s’alarmer du fait qu’ils ouvrent leurs droits à la retraite bien trop tôt ? Pas d’inquiétude, là non plus. Les nombreuses réformes menées depuis le début des années 1990 ont produit leurs effets : l’âge de départ en retraite monte très régulièrement.

      Si on met de côté les salariés qui ont commencé à travailler avant 20 ans, dits en « carrière longue », qui bénéficient de dispositifs particuliers pour partir en retraite plus tôt, l’âge moyen de départ en retraite est déjà de 63,1 ans dans le secteur privé. Quant au public, il est déjà de 62,7 ans dans la fonction publique d’Etat, exception faite des militaires et des policiers, et de 63,2 ans dans les collectivités locales, hors pompiers. Et cet âge continue année après année à augmenter rapidement.
      4/ La retraite moyenne baisse déjà

      On justifie souvent l’urgence d’une nouvelle réforme des retraites par le niveau de vie relativement élevé des retraités. Celui-ci est équivalent à celui des actifs, sachant qu’« actifs » ne signifie pas en emploi : le niveau de vie moyen des retraités est inférieur à celui des actifs employés mais supérieur à celui des chômeurs, qui font eux aussi partie de la « population active ».

      Mais cette situation appartient en réalité déjà au passé : elle reflète la présence parmi les retraités de nombreuses personnes ayant bénéficié de règles qui étaient plus généreuses qu’aujourd’hui. Pour les nouveaux retraités, le niveau des pensions est déjà en recul sensible du fait du durcissement de ces règles : en 2017, 9,8 % des salariés du secteur privé ont dû prendre leur retraite avec une « décote » parce qu’ils n’ont pas cotisé assez longtemps pour obtenir une retraite à taux plein. C’est quasiment le double d’en 2006. Résultat : à l’âge de 66 ans, qui est l’âge où quasiment tout le monde est en retraite, la retraite moyenne n’était plus que de 1 514 euros en 2017 pour les résidents français contre 1 589 euros en 2013, un recul de 4,8 %.

      5/ La baisse des pensions devrait se poursuivre

      De plus, dans le cadre du système actuel, le mouvement engagé de baisse des pensions devrait se poursuivre au cours des prochaines décennies selon les projections réalisées par le Conseil d’orientation des retraites. Au point qu’il est surtout urgent de se demander si nous ne sommes pas déjà allés trop loin dans le durcissement des règles et la baisse des pensions futures.

      6/ La France est bien un des pays d’Europe où les retraites pèsent le plus lourd

      La France est incontestablement un des pays d’Europe, derrière la Grèce et l’Italie, qui dépense la plus grande part de son PIB pour financer les retraites. C’est un des principaux arguments utilisés pour justifier une énième réforme des retraites de manière à contenir cette part dans le futur mais en réalité cet argument ne tient pas la route.

      7/ Parce que l’Hexagone dépense beaucoup, il a peu de retraités pauvres

      La contrepartie de la part importante du PIB consacrée aux retraites en France est que nous sommes aussi un des pays d’Europe où la part des plus de 65 ans vivant sous le seuil de pauvreté est la plus faible. Le fameux modèle suédois de retraite à points, qui sert de référence dans la réforme engagée, ne se montre pas particulièrement performant en la matière. Mais la situation des personnes âgées est également très difficile en Allemagne ou au Royaume-Uni.

      Si l’objectif visé par le gouvernement est de nous ramener dans la moyenne européenne dans ce domaine, le prix à payer va être très élevé pour les futurs seniors… Leur situation est si dégradée chez beaucoup de nos voisins que plusieurs d’entre eux, à commencer par l’Allemagne, sont en train de prendre au contraire des mesures pour augmenter significativement leurs dépenses de retraites dans le futur afin de se rapprocher du « modèle français ».

      8/ La France est un des pays d’Europe où la part des retraites dans le PIB devrait baisser le plus

      La France est un des pays d’Europe qui consacre une des parts les plus importantes de son PIB aux retraites mais, dans le cadre du système actuel de retraites, cela ne devrait plus être le cas en 2070 compte tenu de la démographie française et des réformes déjà décidées selon les projections réalisées par la Commission européenne (qu’on ne peut guère soupçonner de francophilie excessive dans ce genre de domaine). Avec une baisse de plus de deux points de la part du PIB consacrée aux retraites, la France fait partie des pays européens où le retour de balancier – qui entraînera une réduction des pensions – est le plus fort.

      9/ La mauvaise-bonne nouvelle de l’espérance de vie

      Enfin, la plupart des scénarios alarmistes débouchant sur des prévisions catastrophiques sont établis sur la base d’une prolongation des tendances passées en matière d’allongement de l’espérance de vie. Or on a eu sur ce plan régulièrement des mauvaises nouvelles ces dernières années. Certes, cet allongement se poursuit mais à un rythme très lent, beaucoup plus lent que celui que l’Insee considérait jusque-là comme son scénario central dans ses prévisions démographiques. Ce qui est une mauvaise nouvelle pour nous toutes et tous, en est néanmoins plutôt une bonne pour le financement du système de retraite…

      Bref, notre système de retraites présente certes quelques défauts qu’il faudrait corriger mais il n’y a manifestement pas le « feu au lac ». Le gouvernement entend pourtant changer radicalement le fonctionnement du système. Avec la retraite à points, on passerait en effet d’un système principalement « à prestations définies » – le niveau de la rémunération reçue pendant la période d’activité détermine celui de la retraite future – à un système « à cotisation définie » – ce que l’on paie chaque mois pour la retraite n’engage à rien de précis sur ce qu’on touchera plus tard.

      Un tel changement risque de faire de nombreux perdants, notamment parmi les fonctionnaires mais aussi parmi ceux qui auront connu des années difficiles sur le marché du travail – chômage, petits boulots précaires… Il parachèverait également l’étatisation de la protection sociale en donnant les clefs du système à Bercy. Et la tentation serait évidemment forte pour nos grands argentiers d’en profiter pour accélérer encore la baisse des retraites futures afin de diminuer les dépenses publiques.

      https://www.alternatives-economiques.fr/systeme-de-retraites-ne-connait-crise/00091163

    • La réforme risque de déséquilibrer fortement le financement des retraites

      Ce qui frappe dans le projet de réforme des retraites du gouvernement, eu égard à l’ampleur du bouleversement proposé, c’est son imprécision et l’absence de tout chiffrage détaillé et transparent de ses effets tant globaux qu’individuels. Il n’est pas surprenant dans ces conditions que ce projet se révèle aussi anxiogène.

      Le plus impressionnant à ce niveau concerne un des points centraux d’une réforme censée créer un système de retraite unique, avec des taux de cotisation eux aussi uniques. « Il est proposé que le taux de cotisation des salariés et assimilés soit fixé à 28,12 %. Il sera partagé à 60 % pour les employeurs et à 40 % pour les assurés », précise le rapport Delevoye qui fait toujours foi avant le projet de loi qui sera examiné en conseil des ministres le 24 janvier. « Tous les salariés et leurs employeurs, quels que soient le secteur d’activité ou la nature juridique de l’employeur, seront traités identiquement du point de vue des cotisations », ajoute le rapport.

      Il en résulte un taux unique de cotisation patronale pour les retraites de 16,87 % rapporté au traitement brut des salariés qui devrait s’appliquer à l’avenir uniformément à tous les employeurs, publics comme privés. Or aujourd’hui, ces taux sont très différents suivant les secteurs. Ils sont surtout très supérieurs à ce niveau dans le secteur public : ils sont de 74,28 % dans la fonction publique d’Etat et de 30,65 % dans les collectivités territoriales et la fonction publique hospitalière. Alors que ce taux n’est que de 16,48 % dans le privé selon les chiffres du Conseil d’orientation des retraites (COR).

      Ces différences résultent, pour une part, de retraites un peu plus généreuses dans le secteur public : la fameuse « bonne retraite » qui compense des salaires faibles en période d’activité. Mais elles sont aussi et surtout le fruit d’une évolution démographique défavorable à l’emploi public, du fait des mesures restrictives en termes d’embauche dans ce secteur, et en particulier au niveau de l’Etat depuis de longues années maintenant. Il y a de ce fait beaucoup plus de retraités par actif dans le secteur public que dans le secteur privé.
      Un manque à gagner de 67 milliards d’euros

      Si on calcule la moyenne des cotisations patronales pour la retraite en pondérant les masses salariales des différents secteurs, on aboutit à un taux de 23,8 %. Or ce n’est pas du tout celui prévu par le projet du gouvernement. Ce dernier veut au contraire aligner toutes les cotisations patronales sur le taux le plus bas, celui du secteur privé.

      Entre le taux de 16,9 % prévu par le gouvernement et les 23,8 % moyens actuels, il existe donc un trou de presque 7 points de cotisations. Compte tenu des 916 milliards d’euros de salaires bruts distribués en 2018, cela équivaut à un manque à gagner de 63 milliards d’euros par an pour les retraites.

      Auxquels il convient d’ajouter les quelque 3,8 milliards d’euros de pertes de recettes estimées par l’Agirc-Arrco, suite à la sortie prévue du système obligatoire des revenus salariaux excédant 120 000 euros annuels, sans baisse équivalente des pensions versées. Alors haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye avait concédé aux syndicats une transition de 15 ans pour atteindre progressivement ce plafond, afin d’adoucir le choc pour les finances publiques.

      A terme, la facture sera au total de l’ordre de 67 milliards d’euros de manque à gagner par an pour le financement des retraites, 3 points de PIB ou encore une baisse de 22 % des ressources actuelles du système de retraites. Or nulle part dans le rapport Delevoye comme dans les éléments communiqués depuis par le Premier ministre, il n’est précisé par quel miracle le financement des retraites est supposé rester constant après la réforme malgré cette chute spectaculaire des cotisations employeurs du secteur public.

      En fait, parmi les points qui ne tiennent guère la route dans cette réforme, on trouve déjà à la base les éléments les plus fondamentaux de son équation financière.

      https://www.alternatives-economiques.fr/guillaume-duval/reforme-risque-de-desequilibrer-fortement-financement-retraites/00091464

      #équilibre #déséquilibre

    • Garantir la valeur du point ne garantit rien

      Les promoteurs de la réforme des retraites reprennent les chiffres donnés par le rapport Delevoye : « A l’instauration du système universel de retraite, un point correspondra à 10 euros de cotisations [et] la valeur du point servant au calcul de la retraite serait fixée à 0,55 euro au démarrage du système universel ». Ils y trouvent aussi des éléments de langage : les droits acquis par le travail « seront revalorisés comme les salaires : cette règle favorable permettra de préserver leur valeur jusqu’au moment du départ en retraite (…) A la liquidation, ces points seront convertis en euros, selon une valeur de service qui obéira à la même règle et la retraite ainsi versée sera indexée sur l’inflation. »

      Bref, nous dit-on, la valeur du point est garantie. Mais cette rhétorique rassurante comporte quelques aspérités. La valeur d’achat sera de 10 euros, mais « à l’instauration du système ». Et ensuite ? Pour déterminer le montant de la retraite le point vaudra 0,55 euro « au démarrage du système ». Et plus tard ?

      Le rapport Delevoye souligne que « les Français pourront ainsi déterminer en connaissance de cause à quel moment et avec quel revenu ils souhaitent partir en retraite ». A quel moment et avec quel revenu ? N’est-ce pas l’aveu qu’il existera un arbitrage entre âge du départ à la retraite et montant de la pension ?
      Une garantie qui ne garantit rien

      Comment réconcilier toutes ces affirmations ? La clé se trouve dans cette formule du rapport : « A la liquidation, les points seront convertis en euros selon une valeur de service ». C’est dans cette opération de conversion que gît le lièvre.

      Comme l’ont déjà bien montré Justin Benard et Michaël Zemmour, il faut en effet distinguer trois notions :

      La « valeur d’acquisition » du point (10 euros de cotisation = 1 point)
      La « valeur de service » (1 point = 0,55 euro de pension)
      Le « coefficient de conversion » qui permet de calculer la valeur effective du point au moment de la retraite

      La formule permettant de calculer sa pension est donc : « ma retraite » = « mon salaire » x « le taux de cotisation » x « valeur de service » x « coefficient de conversion »

      Cette équation a des implications bien précises si on la couple avec l’exigence d’équilibre du système comme le souhaite le gouvernement. Admettons, pour simplifier, que la valeur de service soit revalorisée comme les salaires (ce qui est annoncé), que le taux de cotisation est fixe (ce qui est prévu) et le système à l’équilibre : les dépenses (pensions versées) doivent donc être égales aux recettes (cotisations perçues).

      Moyennant quelques calculs, ces hypothèses conduisent à un résultat très simple : le coefficient de conversion varie en fonction du rapport entre le nombre de retraités et le nombre de cotisants (aujourd’hui, on a environ un retraité pour 1,5 cotisant). Puisque ce ratio est appelé à augmenter – il y aura encore moins de cotisants pour un retraité –, l’obscur coefficient de conversion est donc arithmétiquement appelé à baisser. En d’autres termes, moins il y aura de cotisants par retraités, plus les pensions futures baisseront.

      En janvier 2010, le Conseil d’orientation des retraites (COR) avait d’ailleurs publié un remarquable rapport intitulé Retraites : annuités, points ou comptes notionnels ? dont l’ex-haut-commissariat aux retraites aurait pu s’imprégner un peu plus. Il rassemblait dans un style pédagogique tout le savoir accumulé par les meilleurs spécialistes, et voilà ce qu’on pouvait y lire (page 103) :

      « Comme la masse des pensions est égale au produit du nombre de points de tous les retraités par la valeur de service du point, cette dernière peut être ajustée année après année de façon à respecter l’équilibre du régime », tout en pointant « le risque que les pensions durant la période de retraite connaissent une évolution incertaine et non nécessairement en phase avec l’évolution des prix ». Et il enfonçait le clou un peu plus loin (page 177) : « On peut agir année après année sur la valeur d’achat du point et/ou la valeur de service du point pour faire face aux besoins de financement entraînés par le vieillissement de la population ». C’est on ne peut plus clair !
      Expérience complémentaire

      On a déjà l’expérience de ce genre de situation avec les régimes complémentaires à points de l’Agirc-Arrco : le coefficient de conversion existe déjà, il est baptisé « taux d’appel ». C’est ce qu’explique très bien la CFDT-retraités : « A partir de 1971 à l’Arrco et de 1979 à l’Agirc, les régimes ont pratiqué un taux d’appel supérieur au taux contractuel ». Aujourd’hui, le taux d’appel est de 127 %, cela veut dire qu’il faut cotiser 127 euros pour être crédité de 100 de retraite.

      Une ancienne administratrice de l’Agirc et de l’Arrco, Sylvie Durand, vient de dresser un bilan détaillé des régimes complémentaires. Il a l’avantage de montrer à quel point le pilotage d’un système par points n’a vraiment rien d’automatique et qu’il nécessite des calculs extrêmement complexes.

      Les accords successifs ont conduit à une baisse des taux de remplacement (le niveau de la pension par rapport au dernier salaire, NDLR) de l’ordre d’un tiers entre 1993 et 2018. Pour parvenir à ce résultat, retrace-t-elle, « le prix d’acquisition du point de retraite augmenta plus vite que les salaires et la valeur de service du point fut au mieux indexée sur les prix, c’est-à-dire gelée en termes de pouvoir d’achat ». Voilà peut-être ce qui nous attend dans le régime à points généralisé.
      Espérances de vie

      Antoine Bozio, l’inspirateur de la réforme est déçu, puisqu’il parle d’un « formidable gâchis » dans les colonnes du journal Le Monde. Mais il est sans doute le mieux placé pour expliquer les principes que la réforme aurait dû selon lui respecter. Dans une note de l’Institut des politiques publiques (IPP) qu’il dirige, il est explicité que dans un système par points « pur », le montant des pensions est obtenu « en appliquant un coefficient de conversion à la somme des points accumulés. » Et c’est ce coefficient qui « définit le cœur du barème des pensions : pour chaque génération, et pour chaque âge, il détermine la conversion des droits accumulés en pension mensuelle ».

      La question clé est donc celle du niveau de ce coefficient de conversion. Comment est-il déterminé ? Un peu comme dans le système suédois, il « dépend négativement de l’espérance de vie au moment de la liquidation ». Un tel système n’a donc pas besoin d’un âge de référence : il est implicite. Admettons par exemple que j’ai 60 ans et que l’espérance de vie de ma génération est de 80 ans. Mon coefficient de conversion va donc dépendre de mon « reste à vivre », soit 20 ans. Si j’attends plutôt d’avoir 65 ans pour faire valoir mes droits à la retraite, il ne me reste plus (statistiquement) que 15 ans à vivre et donc mon coefficient de conversion sera plus favorable et ma pension plus élevée.

      Jean-Paul Delevoye ne semblait pas avoir vraiment compris la logique d’un système par points, on verra ce qu’il en est de son successeur. Il n’avait pas besoin d’afficher la notion d’âge dans son rapport en évoquant « un pilotage de l’âge du taux plein pour tenir compte de l’évolution de l’espérance de vie et de l’allongement de la durée passée en retraite ». Le réglage d’un système par points est beaucoup plus opaque : il passe par l’ajustement du coefficient de conversion, ou – ce qui se verrait plus – par l’introduction d’un mécanisme de taux d’appel qui rendrait plus coûteux l’acquisition d’un point.
      Déjà dans les tuyaux

      Même sans nouvelle réforme, l’appauvrissement des retraités est déjà programmé : c’est un élément qui est souvent oublié dans le débat actuel. Il suffit pour s’en convaincre de consulter les rapports du COR, et notamment celui de juin dernier. On y apprend qu’en 2017, la pension moyenne représentait 51,3 % du revenu d’activité moyen brut. Ce ratio serait en moyenne (selon les hypothèses de taux de croissance) de 47,7 % en 20301, puis de 40 % en 2050 et enfin de 35,8 % en 2070.

      Surtout, la part des pensions dans le PIB devrait même baisser, comme l’indique le rapport de novembre. Avec la « convention TCC » (taux de cotisation et de subvention d’équilibre figés à leur niveau de 2018) elle devrait passer de 13,8 % aujourd’hui à moins de 13 % en 2030.

      Universalisme, automaticité, équité : aucun de ces arguments rhétoriques ne résiste à un examen détaillé. La volonté de faire passer à tout prix la réforme, au lieu d’améliorer le système actuel, reste une énigme. A moins d’y voir un projet visant à dévaluer un peu plus nos retraites publiques.

      https://www.alternatives-economiques.fr/michel-husson/garantir-point-ne-garantit-rien/00091288

    • La valeur du point ne pourra pas baisser… Mais le niveau de votre pension, si.

      Dans le débat sur la réforme des retraites et le passage vers un système à point, une inquiétude revient souvent : qu’est-ce qui garantit la valeur du point ? Devant la défiance grandissante face à la réforme, le Premier Ministre a notamment annoncé le 27 novembre 2019 « L’indexation des points de retraite sur le niveau des salaires pour éviter tout risque de décrochage. (…) Nous le savons, nos concitoyens veulent être rassurés au sujet de la valeur du point, ils auront cette garantie ». Cette déclaration donne quelques indications sur le pilotage du futur système. En revanche, on aurait tort d’y voir une garantie sur le niveau des pensions, tout simplement car dans le système envisagé par le gouvernement, le calcul de la pension ne se base pas sur la « valeur du point », mais sur un « coefficient de conversion » qui évoluerait bien moins vite. De ce fait, l’indexation de la valeur du point n’empêchera pas la baisse du niveau des pensions.

      Une valeur du point en « pilote automatique », avantages et inconvénient

      La déclaration du Premier ministre a un premier sens : elle signifie que la « valeur du point » serait définie « automatiquement », en fonction de la situation de l’économie. Ce ne sera donc pas un paramètre de pilotage du système, dans les mains des gestionnaires (parlementaires). Dans une première version de la réforme (rapport Delevoye), il était envisagé que la valeur d’achat et la valeur de vente du point soient décidés chaque année par les gestionnaires du systèmes (en pratique, par le gouvernement avec un vote du parlement, et après consultation des partenaires sociaux). Cette déclaration renforce donc l’hypothèse d’un système « en pilote automatique » davantage que piloté à la discrétion des pouvoirs publics[1].

      Cela dit on peut se demander si cet engagement sera contraignant : dans quelle mesure sera-t-il simple ou compliqué pour un gouvernement futur de dévier de cette indexation de référence ? Il pourrait y avoir différentes raisons à cela : soit pour des raisons d’économies budgétaires, soit à l’inverse pour éviter une baisse en cas d’épisode de récession. D’ailleurs, dans les régimes complémentaires actuels (AGIRC-ARRCO), la liberté des organisations syndicales et patronales de définir la valeur d’achat et de service du point leur a permis d’éviter une baisse des retraites pendant la récession de 2008 (jouant ainsi le rôle d’amortisseur social), puis de levier pour réaliser des économies sur les pensions dans la période suivante.

      La valeur du point ne constitue aucunement une garantie contre le décrochage des pensions

      Derrière l’appellation de "valeur du point" on entend souvent, en réalité, trois choses tout à fait distinctes :

      la "valeur d’acquisition " s’entend de la valeur du point à l’achat. Selon le rapport Delevoye, la valeur du point sera de 10€ en 2025 : pour chaque 10€ de cotisation, vous pourrez accumuler un point retraites
      la "valeur de service" (appelé ainsi par le rapport Delevoye) représente la valeur qu’aura chaque point liquidation pour un départ à l’âge d’équilibre. Selon le rapport Delevoye, ce coefficient serait de 0,55€ en 2025 pour un départ à 64 ans.
      le "coefficient de conversion", valeur effective du point à la vente

      Le coefficient de conversion (« vente ») s’écarte de la valeur de service dès lors que l’âge de départ ne correspond pas strictement à l’âge d’équilibre (ou âge pivot). Pour toute année de départ avant l’âge d’équilibre, le coefficient de conversion est diminué de 5 %. A l’inverse, pour tout année de départ après l’âge d’équilibre, le coefficient de conversion augmente de 5%.

      La pension est donc calculée selon la formule suivante :

      Pension brute = stock de points x coefficient de conversion (« vente »)

      Dans laquelle le stock de points est la somme des points accumulés chaque année, telle que pour une année n :

      Nombre de points = salaire brut x taux de cotisation / valeur d’acquisition (« achat »)

      Un des engagements du gouvernement est de faire évoluer la valeur d’acquisition du point selon la croissance des salaires (sauf dans les premières années de la réforme où le point évoluerait moins vite). Qu’est-ce que cela signifie ? Tout simplement que, si votre salaire augmente au même rythme que le salaire moyen, vous accumulerez chaque année le même nombre de points que l’année précédente. Et donc qu’en fin de carrière, chacune de vos années de salaire contribuera a égalité à votre stock de points (il n’y a pas d’année qui compte plus que d’autres).

      La valeur de service sera indexée sur les salaires… mais pas le coefficient de conversion

      Le coefficient de conversion serait donc fixé aux alentours de 0,55€ en 2025 pour un départ à 64 ans. Pour maintenir le niveau des pensions[2], ce coefficient de conversion devrait augmenter à la même vitesse que la valeur d’acquisition, c’est-à-dire selon les salaires.

      Ce ne sera pas le cas : ce qui est indexé sur les salaires c’est « la valeur de service », c’est-à-dire la valeur du point à l’âge d’équilibre. Or cet âge d’équilibre augmenterait pour chaque nouvelle génération, notamment selon la hausse de l’espérance de vie.

      En pratique, le rapport Delevoye prévoit un décalage de « l’âge d’équilibre » d’environ 1 an tous les 12 ans, mais cela peut aller plus ou moins vite, dans le seul but d’équilibrer le système.. Pour chaque année de départ avant cet âge d’équilibre (64 ans en 2025), votre pension serait affectée d’une « décote », soit d’une diminution de 5 % (10% pour deux années, 15 % pour trois années etc.). Un décalage de cet âge d’équilibre conduirait donc, mécaniquement, à une augmentation de la décote pour un départ au même âge.

      Par exemple si une personne part à 63 ans en 2025 alors que l’âge d’équilibre est de 64 ans elle touche pour chaque point 95 % de sa « valeur de service » (5% de décote) car il lui manque un an avant d’atteindre l’âge d’équilibre. Pour une personne née douze ans plus tard, l’âge d’équilibre serait porté à 65 ans. Si cette personne part également à 63 ans, elle touchera donc pour chaque point seulement 90% de sa valeur de service (10% de décote).

      Ainsi, même si la "valeur de service", augmente chaque année aussi vite que les salaires (ici 1,3 % par an), le coefficient de conversion (valeur réelle de « vente ») à un âge donné, lui, augmente nettement moins vite (0,8% par an) (figure 1).

      Figure 1 : La « valeur de service » (ou valeur du point l’âge d’équilibre) est indexée sur les salaires (hypothèse 1,3 % par an), mais le coefficient de conversion (« valeur effective » du point au moment de la liquidation) à 63 ans, augmente lui, bien moins vite.

      La conséquence immédiate de ce mécanisme est que la véritable valeur, en montant de retraite, que l’on touche pour un point à un âge donné, diminuera par rapport au salaire moyen.

      Une baisse programmée des taux de remplacement

      Pour mesurer l’impact réel de cette baisse sur la pension de chacun, il faut utiliser un indicateur de taux de remplacement (niveau de la retraite par rapport au dernier salaire). Il représente la question que chacun.e se posera au moment de son départ en retraite : de combien vais-je pouvoir (ou non) bénéficier, par rapport à mon niveau de vie au travail ?

      Du fait du décrochage du coefficient de conversion par rapport aux salaires, le taux de remplacement diminue mécaniquement. Imaginons un stock de points qui garantit, en 2025, un taux de remplacement de 70 % à 63 ans. Avec la hausse de l’âge d’équilibre, et donc de la décote, le même stock de points (donc la même carrière) ne permet plus, en 2050, qu’un taux de remplacement de 62 % (Figure 2). Il est d’ailleurs tout à fait possible que la baisse soit plus forte ou plus faible, puisque la raison d’être de l’âge d’équilibre (et donc du coefficient de conversion) est de s’ajuster en fonction de l’espérance de vie[3] et des données macroéconomiques, pour équilibrer le système.

      Figure 2 : Evolution du taux de remplacement (pension/ dernier salaire) à 63 ans en fonction de l’année de départ. Exemple d’une carrière permettant de partir à 63 ans avec 70% de son dernier salaire en 2025. En 2050, la même carrière fournit le même nombre de points, mais leur valeur effective à 63 ans a évolué moins vite que les salaires. Le taux de remplacement n’est plus que de 62%.

      Aussi lorsque le Haut-commissaire affirme « que la valeur du point ne pourra pas baisser », ou le Premier ministre que « la valeur du point sera indexée », ils disent vrai, mais ils jouent sur les mots. Même avec une indexation du point sur les salaires telle que le prévoit le système, et même si la valeur nominale (en euros) du coefficient de conversion ne « baisse » pas, les pensions elles, vont bien décrocher par rapport aux salaires.

      Derrière la technicité de l’explication, il y a cette réalité simple que la communication autour de la réforme tend à masquer : le principe même du système à points, c’est que le niveau des pensions serve de variable d’ajustement, à la baisse, pour équilibrer le système.

      Ce billet s’inspire en partie des éléments présentés dans une note de l’IPP, ainsi que de nombreux échanges avec Sam.

      Justin Benard est membre du collectif @nosretraites

      [1] Le rapport Delevoye prévoit par ailleurs une transition d’une durée indéterminée durant laquelle le point est indexé plus que les prix, mais moins que les salaires.

      [2] On parle ici du « taux de remplacement, c’est-à-dire ce que la retraite représente par rapport au dernier salaire.

      [3] Il s’agit de l’espérance de vie moyenne de chaque génération, pas l’espérance de vie individuelle.

      https://blogs.alternatives-economiques.fr/zemmour/2019/11/30/la-valeur-du-point-ne-pourra-pas-baisser-mais-le-nive

    • Conférence de #Michael_Zemmour, très édifiante :

      https://www.youtube.com/watch?v=iJKVd609iGU&feature=youtu.be

      Je l’ai transcrite ici :
      https://seenthis.net/messages/821185

      Je remets ici la transcription :

      2 enjeux :
      – est-ce qu’on fait une nouvelle réforme de retraite pour faire des économies pour les personnes qui sont à 5 années de retraites ou plus ? —> Baisse de la retraite à partir de 2022
      – est-ce qu’on change de régime en passant d’un système à cotisation définie ou alors, comme c’est le cas dans la plupart des pays d’Europe, on veut faire de la retraite publique un premier étage ? En sachant qu’en France la plupart des retraités vivent uniquement de leur retraite, sauf le « top 10 », les retraités riches, qui peuvent avoir un peu d’épargne à côté. En France on a fait le choix de tout mettre dans le système par #répartition. Ce qui est prévu par la réforme c’est que cet étage public se dégonfle pour devenir un premier étage qui ne permet pas de maintenir son niveau de vie quand on part à la retraite et que celles et ceux qui peuvent doivent compléter... comment ? Avec de l’assurance vie, de la spéculation immobilière ou de la retraite par capitalisation.

      Qu’est-ce qu’il y a dans le projet de loi ?
      Il y a 2 types de systèmes :
      – un système à #prestations_définies, le système dans lequel on est aujourd’hui, un système dans lequel la loi inscrit le calcul des prestations. Le droit garanti le niveau des droits sociaux. On voit combien ça coûte à financer et on ajuste les financements, et quand il n’y a pas ces financements, on discute : est-ce qu’on fait une réforme ? Est-ce qu’on met plus de financements ? La loi a comme objectif qu’on maintienne son niveau de vie quand on part à la retraite. On a un objectif de niveau de vie.
      – un système à #cotisations_définies —> son objectif premier c’est l’équilibre financier du système, donc « pas de déficit ». L’objectif de niveau de vie disparaît et est subordonné à cela.

      Article 1 du #projet_de_loi_organique —> on instaure une #règle_d'or qui interdit le système d’être en #déficit sur une période de 5 ans. On impose l’équilibre.
      Ceci signifie que le passage d’un système à cotisations définies, donc on fixe les ressources et on ne sait pas combien vous aurez à la retraite, on n’attend pas le système à points pour le mettre en place, on le met en place tout de suite, en 2022 avec application en 2025.

      En quoi c’est un problème la règle d’or ?
      D’abord, on change d’objectif politique. On n’a plus un objectif de droit social, mais un objectif d’équilibre du système.
      Associée à cette règle d’or, il y a un double contexte :
      – le gouvernement et le patronat ont dit leur opposition à toute augmentation des ressources. Or, on sait que la part de retraités dans la population va augmenter. Si vous gelez le niveau des ressources et que la part des retraités augmente et qu’en plus vous voulez être à l’équilibre, c’est mécanique, ça diminue
      – le gouvernement et l’Etat ont les moyens de diminuer les recettes même sans changer de taux de cotisation. C’est ce qui s’est fait les années précédentes. Aujourd’hui le gouvernement pointe un déficit de 12 milliards d’EUR. D’où vient ce déficit ? La moitié environ c’est le ralentissement de la masse salariale de l’Etat. En gros, comme l’Etat paie moins ses fonctionnaires et embauche moins, il finance moins le système des retraites et ça génère du déficit. L’autre moitié, ce sont des baisses de compensations qui ne sont plus financées par l’Etat (les parts salariales sur lesquelles on ne paie pas de cotisations sociales, etc.). En gros c’est du définancement.

      –-> D’un côté on dit que ça soit à l’équilibre, d’un autre côté on a les moyens de diminuer les ressources.
      Donc, la première partie de la réforme, faire 12 milliards d’économie à l’horizon 2027, c’est l’application immédiate de cette règle d’or.

      Si vous voulez expliquer la réforme autour de vous... il faut créer 2 cases :
      – il y a des gens qui sont nés entre 1960 et 1975 : ce n’est pas vrai qu’ils ne sont pas concernés. Ils ne sont pas concernés par le système à points. Ils sont concernés par des mesures d’économie de l’ordre de 12 milliards d’ici 2027. 12 milliards c’est pas beaucoup si on regarde le système de retraites qui vaut 300 milliards. Par contre, il n’y a que 4 millions de personnes qui partent en retraite entre 2022 et 2027. Si vous concentrer 12 milliards d’économies, pas sur les retraités, pas sur les actives et les actifs, mais sur les personnes qui partent en retraite à ce moment-là, ça fait un choc très important. Comment vont être faites ces économies ? Dans le projet de loi il y avait une indication, c’était l’âge pivot. ça a changé. Pas la volonté de faire 12 milliards d’économies sur 4 milliards de personnes, même pas l’idée qu’on va payer plutôt que de faire des économies, ce qui a changé c’est que le gouvernement est d’accord de ne pas l’écrire dans le projet de loi, mais c’est une décision qu’on prendra par ordonnance. 2 mesures d’économies possibles : report de l’âge légal de retraite ou, plus probable, un allongement de la durée de cotisation. En gros, les gens ne les atteindront pas. On aura une durée tellement élevée qu’on fera payer aux gens un malus.
      – Les gens qui sont concernés par le système à points. C’est un système qui s’auto-ajuste avec un âge d’équilibre. L’#âge_d'équilibre sert à cela : on fixe le niveau de ressources, on a de plus en plus de retraités... la même enveloppe pour plus de retraités... pour ajuster, on déplace l’âge d’équilibre. Si vous n’avez pas atteint l’âge d’équilibre, votre point ne vaut pas sa valeur, il faut 5% en moins par année qui vous manque.

      Qu’est-ce que ça produit ?
      Pour les gens qui sont proches de la retraite, ça produit une baisse de la retraite car ils n’ont pas le temps de s’ajuster. Les gens qui sont loin de la retraite, ils vont devoir, si ils ont les moyens, compléter en cotisant à des systèmes de retraite complémentaires, en général en entreprises. Les gens qui n’ont pas les moyens vont avoir une retraite diminuée et il faudra cumuler emploi et retraite tant qu’on est encore en situation.

    • Une étude d’impact truquée, nous publions les chiffres corrigés

      Publiée ce jour, l’#étude_d’impact du gouvernement de près de 1 000 pages tient plus de l’opération de communication que de l’éclairage sincère du débat parlementaire. Les #cas-types présentés pour rendre compte de l’impact de la réforme sont délibérément faussés.

      Par conséquent, l’étude d’impact ne rend pas compte des conséquences du projet de réforme des retraites, ce qui est pourtant l’objectif que la Constitution lui assigne. De plus elle est volontairement trompeuse quant aux résultats de la réforme.

      Le projet de loi indique clairement (article 10) que l’âge d’équilibre du système à points sera amené à évoluer d’une génération à l’autre (par défaut, de l’équivalent des deux tiers des gains d’espérance de vie de la génération en question). Mais, au moment de comparer les résultats du système à points avec le système actuel, le gouvernement rétropédale : tous les cas types sont présentés avec un âge d’équilibre gelé à 65 ans, ce qui conduit à faire disparaître une partie du malus. Ce choix est à la fois en contradiction avec le chiffrage macro-économique de l’étude d’impact (qui inclut un âge d’équilibre glissant), et avec le texte de la loi.

      Le collectif Nos retraites a donc redressé les données des 28 cas-types du gouvernement, en les corrigeant de cet effet trompeur d’un âge d’équilibre fixe et non évolutif comme le prévoit le projet de loi. Alors que pour la génération 1990 le gouvernement présente 21 situations sur 28 comme avantageuses avec un départ à la retraite à 64 ans, elles ne sont plus que 10 une fois que les données ont été redressées. Pour cette génération, les retraité·e·s perdent 7 % du niveau de leur pension avec nos corrections, 7 % qui ont donc été indûment ajoutés dans l’étude d’impact.

      De nombreuses inquiétudes sont confirmées par cette étude et méritent d’être soulignées :

      Les #femmes avec enfants sont les grandes perdantes du passage au système Macron, en particulier pour un départ avant l’âge d’équilibre. Une femme, née en 1990 (au SMIC, 2 enfants) qui part à 62 ans, perdra ainsi 15 % de ses droits par rapport au système actuel.
      Dans le système à points, les employé·e·s perdent beaucoup plus que les cadres supérieur·e·s. Ces dernier·e·s seront ainsi “gagnant·e·s” quel que soit leur âge de départ, alors que les employé·e·s seront perdant·e·s pour tout départ avant 66 ans.

      Enfin, il est important de souligner qu’il ne s’agit pas d’un simple rapport qui serait un peu trop orienté. Le gouvernement ne s’est pas contenté de simuler sa réforme en prenant des hypothèses excessivement avantageuses ou en ne retenant que les cas qui lui étaient favorables. En incluant des données faussées dans une étude d’impact officiellement remise au Parlement, le gouvernement manque à ses obligations constitutionnelles. Il trompe la représentation nationale et, avec elle, bafoue notre système démocratique.

      https://reformedesretraites.fr/etude
      #trucage

      –—

      Le dossier en pdf :
      Retraites : une étude d’impact truquée, nous publions les chiffres corrigés


      https://reformedesretraites.fr/wp-content/uploads/2020/01/Communication_E%CC%81tude-dimpact_Nos-Retraites.pdf

    • Pour les retraites, l’Europe a un plan
      Une très bonne chronique à lire !
      https://www.liberation.fr/debats/2020/01/27/pour-les-retraites-l-europe-a-un-plan_1775567

      Si cette réforme passe, les retraites vont baisser, c’est mécanique : en passant au système à points, on fixe d’abord les cotisations et donc les recettes et on ajuste ensuite le niveau des retraites. Autrement dit, un nombre plus important de retraités va se partager un gâteau qui ne grossira pas. C’est ce que l’économiste Michael Zemmour explique de façon convaincante (1). La philosophie de la réforme est donc assez simple : la couche de répartition du système actuel est un minimum garanti, une sorte de plancher, mais elle ne sera pas suffisante. Il y a deux couches en plus : la complémentaire obligatoire où on cotise en commun avec d’autres salariés… et le plan épargne retraite qui est destiné à constituer un patrimoine pour la retraite. Assez logiquement, une baisse des prestations devrait inciter les Français à ouvrir des plans d’épargne.

      Ça tombe bien, parce que l’industrie est en train de s’organiser pour nous faciliter l’accès à « un produit d’épargne simple, sûr, transparent, favorable aux consommateurs, proposé à un prix raisonnable et transférable dans toute l’Union européenne ». Si, si… Le Parlement et le Conseil européen ont lancé le produit paneuropéen de l’épargne-retraite individuelle (PEPP) en juillet 2019 (2), produit qui « complétera les régimes existants dans les États membres ». Le texte officiel du règlement énonce des arguments économiques que l’économiste que je suis mettent franchement mal à l’aise : plus d’épargne retraite individuelle permettra de financer plus d’investissement dans l’économie réelle ; sauf que l’argument, finance-croissance est sérieusement remis en question aujourd’hui qu’on a compris que trop de finance nuit à la croissance et qu’elle est associée à plus d’inégalités (3).

      Second argument : un produit paneuropéen permet de transférer son capital facilement quand on part travailler dans un autre pays membre, et donc cela favorise la mobilité des travailleurs. Seriously ? Et la portabilité des droits sociaux dans l’Union, comme le chômage, la retraite, la maladie ? Ce n’est pas plutôt ça, le vrai frein à la mobilité du travail en Europe aujourd’hui ?

      Troisième argument : un seul produit pour plus de transparence et plus de concurrence entre les différents gérants de fonds et assureurs. Le bon vieil argument de la concurrence qui permet de baisser les prix. Sauf qu’aux Etats-Unis (là où le marché est unifié et la retraite capitalisée…), on observe une hyperconcentration des gérants de fonds. Black Rock, Vanguard, Fidelity et quelques mastodontes se partagent l’épargne des Américains et cela a des effets pervers sur la concurrence justement : quand ils possèdent dans leur « portefeuille » des titres de plusieurs concurrents sur un même secteur (plusieurs grosses entreprises de pharmacologie par exemple), on les soupçonne de casser la concurrence du secteur pour augmenter leurs profits (les médicaments sont vendus plus cher par exemple).

      En réalité, le sujet en jeu, c’est bien d’avoir un seul produit pour collecter plus facilement l’épargne des ménages européens. L’Autorité européenne en charge des assurances (EIOPA) a pour mission la mise en œuvre du PEPP d’ici 2021 avec un groupe d’experts dont la composition est… bluffante (4). Et là, on se met à douter de l’argument de vente « favorable aux consommateurs » : sur 21 membres, 13 représentants directs de l’industrie (dont Fidelity, Vanguard), 2 représentants de fédérations européennes de fonds de pension et d’assurance, seulement 2 membres de représentants de consommateurs et d’épargnants… Le seul universitaire dans le groupe d’experts est aussi au conseil d’administration d’une société de gestion filiale de la plus grosse banque italienne, déjà représentée…. Et cerise sur le gâteau : une seule femme sur les 21 membres. Non décidément, ils n’ont même pas fait semblant.

    • Né·e·s avant 1975, voici les économies que le gouvernement prépare pour vous

      Né·e avant 1975, vous pensiez ne pas être concerné.e par la réforme des retraites ? C’est sans compter sur la volonté du gouvernement de réaliser 30 milliards d’euros d’économies d’ici à 2030. Nous en avons chiffré les conséquences.

      Né.e avant 1975, vous pensiez ne pas être concerné.e par la réforme des retraites ? C’est sans compter sur la volonté du gouvernement de réaliser 30 milliards d’euros d’économies d’ici à 2030. Nous en avons chiffré les conséquences.

      Lors de sa conférence de presse du 11 décembre dernier, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé un report du passage dans un système à points aux générations nées après 1975. Dans le même temps, il a cependant réaffirmé la volonté du gouvernement de mettre en place des « mesures d’équilibre » avant la mise en place du système à points (2037), qui toucheront les personnes nées entre 1960 et 1975. L’enjeu : réaliser 30 milliards d’euros d’économies à l’horizon 2030, soit en moyenne 4600€ d’économies par retraité né entre 1960 et 1967, pour l’année 2030.

      Ces économies peuvent prendre différentes formes. La mise en place d’un âge pivot, ou « âge d’équilibre », a été présentée par Édouard Philippe comme la solution par défaut. Le gouvernement laisse cependant ouverte la possibilité, pour les partenaires sociaux, d’opter pour au moins deux autres options. Toutes partagent un dénominateur commun : l’incitation à travailler plus longtemps, sanctionnée par une pénalisation dans le cas contraire.

      Des économies directes sur les générations 1960 à 1975

      Quel serait l’impact de ces mesures d’économies sur les générations 1960 à 1975 ? En nous fondant sur les scénarios présentés par le Conseil d’orientation des retraites (COR) le 22 novembre dernier, nous avons analysé les effets sur trois cas-types des trois principaux scénarios envisagés, tous équivalents en termes budgétaires. Ces simulations permettent de donner une vision concrète des effets des économies envisagées selon l’âge, la durée de cotisation ou encore la profession exercée :

      Scénario « par défaut » : un âge pivot à 64 ans. C’est l’option pour l’instant privilégiée par le gouvernement. Avec sa mise en place, une décote serait appliquée en cas de départ en retraite avant 64 ans, même en cas de carrière complète, et la surcote serait diminuée au-delà de cet âge. Dans ce scénario, la retraite d’un·e salarié·e du privé né·e en 1965 et ayant commencé sa carrière à 20 ans, et ayant droit dans le système actuel à une pension à 62 ans de 1927€ nets par mois, serait diminuée de 8 % (- 161€ / mois). Un abaissement simultané de l’âge d’annulation de la décote bénéficierait aux personnes partant aujourd’hui à 67 ans pour éviter la décote : cette option n’est pas simulée ici.
      Scénario « alternatif » : une durée de cotisation portée à 44,5 annuités. Une augmentation de la durée de cotisation à 44,5 annuités pour la génération 1965 (soit 2 ans et 3 mois de plus que prévu actuellement) aboutirait à des résultats identiques en termes budgétaires. Pour ce.tte même salarié·e du privé, cette augmentation de la durée de cotisation représenterait une baisse du montant de la pension de 14 % (soit – 269 € / mois sur une retraite de 1927€ nets dans le système actuel).
      Scénario « à l’ancienne » : le recul de l’âge légal de départ en retraite. Pour produire des effets financiers similaires, l’âge légal devrait être fixé à 63 ans et 4 mois pour une personne née en 1965. Cette option semble aujourd’hui écartée par le gouvernement.

      Dans ces trois cas de figure, les générations nées avant 1975 seraient directement touchées par les mesures d’économies présentées au sein de ce projet de réforme des retraites. Nos simulations mettent en évidence le fait que l’âge pivot n’est que l’une des modalités possibles d’un objectif plus général de baisses des « dépenses » de retraites. Les conséquences pour les futur·e·s retraité·e·s seront, in fine, liées avant tout à l’ampleur des économies recherchées plus qu’à la modalité retenue pour les atteindre.

      L’enjeu du retour à l’équilibre d’ici à 2027 : trois pistes principales

      Le discours d’Édouard Philippe du 11 décembre dernier a insisté sur la nécessité de retour à l’équilibre, non plus à l’horizon 2025 comme le gouvernement l’entendait initialement, mais à l’horizon 2027. Il s’est, pour cela, appuyé sur une hypothèse principale : la mise en place d’un âge pivot à 64 ans à l’horizon 2027, le chemin pour y parvenir restant à définir par les partenaires sociaux. L’objectif d’économies serait alors de 30 milliards d’euros en 2030 (0,6 % du PIB).

      Le Conseil d’orientation des retraites (COR) suggère plusieurs autres pistes permettant de réaliser ce même objectif d’économies, dont beaucoup ont d’ores et déjà été écartées par le gouvernement. En particulier, la hausse des taux de cotisation ou la désindexation des retraites liquidées ont été, à ce stade, exclues. En affichant un objectif de prolongation de la durée d’activité, le gouvernement privilégie donc implicitement trois scénarios :

      L’instauration d’un âge pivot, mesure qui n’a encore jamais été mise en œuvre et qui viendrait alourdir la décote dans le calcul des pensions ;
      L’allongement de la durée de cotisation nécessaire pour une retraite à taux plein ;
      Le recul de l’âge légal de départ à la retraite.

      Dans son dossier de presse, le gouvernement a indiqué souhaiter mettre en place, en l’absence de décision contraire des partenaires sociaux, un âge pivot à 64 ans. Cet âge entrerait en vigueur progressivement, à partir 2022 (génération 1960) à raison d’une augmentation de 4 mois tous les ans (64 ans en 2027, pour la génération 1965).

      Parmi les scénarios du COR du 22 novembre 2019, celui qui s’approche le plus de cette hypothèse est également le scénario que l’on pourrait qualifier d’« intermédiaire » : un scénario d’ « équilibre permanent des régimes » (ou EPR, soit le scénario correspondant à la législation actuelle) dans une hypothèse de croissance de la productivité du travail à 1,3 % (soit celle retenue par le rapport Delevoye du 18 juillet 2019).

      Nous avons donc chiffré les mesures d’économies envisagées par le gouvernement à partir des scénarios similaires (EPR, 1,3%) pour les deux autres scénarios envisagés : une hausse de la durée de cotisation, progressivement, vers 44,5 annuités, ou une hausse de l’âge légal, progressivement, vers 63 ans et quatre mois.

      Population concernée par les différents scénarios envisagés

      1. Scénario “par défaut” : Mise en place d’un âge pivot

      La mesure qui a été présentée mercredi 11 décembre par Édouard Philippe vise à instaurer un âge pivot, aussi appelé « âge d’équilibre », à 64 ans. Son principe est d’inciter à partir plus tardivement en pénalisant les départs à 62 ans et ce, quelle que soit la durée de cotisation. Le rapport du COR précise les contours d’une telle mesure, sous le nom d’« âge minimal du taux plein ».

      Qui serait concerné·e ?

      Ne seraient exclues de l’application de cette mesure que :
      Les personnes qui, à l’âge pivot, n’atteignent pas encore le nombre de trimestres donnant droit à un taux plein.
      Les personnes partant déjà à l’âge d’annulation de la décote (67 ans) et qui ne subiraient donc pas les effets de cette mesure
      Au moins les deux tiers des personnes nées entre 1960 et 1975 seraient ainsi concernés : ils verraient leur décote s’aggraver ou leur surcote diminuer.
      Si une baisse de l’âge d’annulation de la décote était envisagée, les 15 % de personnes atteignant aujourd’hui le taux plein par l’âge (67 ans) et non par la durée bénéficieraient de cette mesure : elles pourraient en effet partir plus tôt (au nouvel âge d’annulation de la décote). Cette mesure, demandée de longue date par les syndicats, est bien moins coûteuse que les économies réalisées par la mise en place d’un âge du taux plein. Elle pourrait donc être mise en place isolément, sans être assortie de mesures d’économies drastiques. Par manque de données et de précision des intentions du gouvernement, nous ne l’illustrons pas dans ce dossier.
      La mise en place d’un âge pivot pénaliserait en outre les personnes disposant d’un petit salaire de référence et d’une carrière longue (à temps partiel par exemple), qui devront attendre non seulement une carrière complète mais également l’âge de 64 ans pour bénéficier des minima de pension.

      Âge pivot, ou “âge minimal du taux plein” : l’exemple d’Amira, Omar et Jeannine

      Amira est une salariée du privé, non cadre, à carrière continue, qui a commencé sa carrière à 18 ans, tout en ayant déjà validé un trimestre de cotisations avant cet âge (« petit boulot »). Elle est donc éligible à un départ anticipé pour « carrière longue », à partir de 60 ans. Née en 1965, Amira peut partir dans le système actuel à 60 ans en 2025 avec une retraite à taux plein de 1506 €, ce qui représente 71% de son dernier salaire (cf. annexe méthodologique).

      Dans le cas de la mise en place d’un âge pivot à 64 ans, il est probable que les conditions de départ soient aménagées pour lessalarié·e·s pouvant prétendre au dispositif dit « carrières longues », comme le suggérait le COR dans son rapport du 22 novembre dernier. Si cet âge d’équilibre était fixé de manière dérogatoire à 62 ans pour les personnes ayant commencé à travailler tôt, Amira pourrait maintenir son départ à 60 ans. Dans ce cas, elle perdrait alors 9% (-164 € par mois) de sa pension. En effet, il lui manquerait alors huit trimestres (deux ans) pour une retraite à taux plein, et elle subirait une décote à la fois sur sa retraite de base et sur sa retraite complémentaire.

      Omar est un salarié du privé, non cadre, à carrière continue, qui a commencé sa carrière à 20 ans. Né en 1965, Omar peut partir dans le système actuel à 62 ans en 2027 avec un seul trimestre manquant et une retraite de 1927 €, ce qui représente 69 % de son dernier salaire (cf. annexe méthodologique). Si Omar partait à 64 ans, il bénéficierait d’une surcote sur sa retraite de base (régime général) pour l’équivalent de 7 trimestres et partirait en retraite en 2029 avec une pension de 2 270 €, soit 76 % de son dernier salaire[1].

      Dans le cas de la mise en place d’un âge pivot à 64 ans, Omar pourrait maintenir son départ à 62 ans. Dans ce cas, il perdrait alors 8 % (-161 € par mois) de sa pension. En effet, il lui manquerait alors huit trimestres (deux ans) pour une retraite à taux plein, et il subirait une décote à la fois sur sa retraite de base et sur sa retraite complémentaire.

      Et, avec un âge pivot à 64 ans, même si Omar partaità 64 ans, il perdrait 6 % (-134 € par mois) de sa pension par rapport à un départ au même âge dans la législation actuelle[2]. En effet, sa surcote au régime général serait annulée.

      Jeannine est agente de la fonction publique (catégorie C), ayant commencé à travailler à 20 ans et ayant eu une carrière complète. Née en 1963, elle peut partir dans le système actuel à 62 ans en 2025 avec une retraite à taux plein de 1541 €, qui représenterait 75 % de son dernier salaire (cf. annexe méthodologique). Si Jeannine décide de partir à 64 ans – et si elle le peut -, elle bénéficiera d’une surcote sur sa retraite pour l’équivalent de 8 trimestres et partira en retraite en 2027 avec une pension de 1 724 €, soit 83 % de son dernier salaire[3].

      Le gouvernement a précisé que la mise en œuvre d’un âge pivot serait réalisée progressivement, à raison d’un décalage de 4 mois à partir de 2022. Puisqu’elle est née en 1963, l’âge pivot serait fixé, pour Jeannine et sa génération, à 63,25 ans (soit 63 ans et 3 mois[4]).

      Dans cette hypothèse, elle pourrait maintenir à un départ à 62 ans. Dans ce cas, elle perdrait environ 6 % (-96 € par mois) de sa pension : il lui manquerait 1 an et 1 trimestre (5 trimestres) pour la retraite à taux plein, et elle subirait donc une décote sur sa retraite publique.

      Si Jeannine partait à 64 ans en cas d’âge pivot fixé à 63,25 ans, elle perdrait toujours environ 6 % (-98 € par mois) de sa pension, par rapport à un départ à 64 ans sans réforme[5]. En effet, sa surcote serait atténuée (puisqu’elle aurait une surcote pour trois trimestres au lieu de huit sans la réforme).

      Analyse : L’« âge pivot », une proposition qui frapperait de manière uniforme tou·te·s les retraité·e·s, à la fois sur l’âge de départ et le montant de la pension

      Aucun « âge pivot » (ou « âge minimal du taux plein » selon l’expression du COR) n’a, jusqu’à présent, encore été mis en œuvre dans le système français de retraite. Le calcul de la décote est en effet fondé uniquement sur une notion de durée de carrière : toute personne qui a cotisé l’intégralité des annuités demandées peut prétendre à une retraite à taux plein, quel que soit son âge de départ. La proposition d’Édouard Philippe vise ici à ajouter à cette règle de durée une règle d’âge : pour prétendre à une retraite à taux plein, il faudrait non seulement avoir cotisé toutes ses annuités, mais également avoir atteint cet âge pivot. Plus les personnes auront commencé à cotiser tôt, et donc auront accumulé toutes leurs annuités avant cet âge, plus elles seraient donc perdantes.

      Avec un âge pivot, le nombre de trimestres de décote dépendrait ou bien du nombre de trimestres manquant par rapport à la durée de cotisation de référence (durée), ou bien du nombre d’années manquantes par rapport à l’âge minimal du taux plein (âge) : serait retenue la règle la plus défavorable à l’assuré·e. De même, la surcote serait réduite, dans les mêmes conditions que la décote est augmentée. Sous ses abords relativement « anodins », cette mesure combinerait donc à la fois une hausse de l’âge de départ pour les retraité·e·s, s’ils et elles veulent partir à taux plein (à 64 ans) et une diminution de la pension au même âge. En effet, si aucune réforme n’avait eu lieu, en partant à 64 ans, ces individus toucheraient une surcote. Avec la mise en place de l’âge pivot, ils toucheraient tout juste une retraite à taux plein, malgré une durée de cotisation plus élevée.

      2. Scénario “alternatif” : durée de cotisation portée à 44,5 annuités

      La deuxième mesure envisagée est un allongement de la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une retraite à taux plein. Aujourd’hui, cette durée de cotisation est de 42 ans, soit 168 trimestres. Elle a augmenté progressivement sous l’effet des réformes successives : elle était ainsi de 37,5 annuités (150 trimestres) après la réforme de 1993, et la récente réforme Touraine a prévu son report jusqu’à 43 annuités (172 trimestres) en 2035. Pour la génération 1965, elle serait portée à 169 trimestres.

      La proposition serait ici d’allonger encore la durée de cotisation nécessaire, qui passerait progressivement à 44,5 annuités (178 trimestres), à raison d’une augmentation de deux trimestres par an entre 2022 et 2027.

      Qui serait concerné·e ?

      Toute personne née entre 1960 et 1975 non encore parties en retraite serait concernée.

      Hausse de la durée de cotisation : les exemples d’Amira, Omar et Jeannine

      En cas d’allongement de la durée de cotisation à 44,5 annuités, si Omar, salarié du privé né en 1965 (voir description ci-dessus) maintenait son départ à 62 ans, il perdrait 14 % (-269 € par mois) de sa pension. En effet, il lui manquerait alors 10 trimestres pour le taux plein, et il subirait une décote à la fois sur sa retraite de base et sur sa retraite complémentaire.

      Si, dans ce même cas d’allongement de la durée de cotisation, Omar partait à 64 ans, il perdrait 9 % (-202 € par mois) de sa pension. En effet, il perdrait le bénéfice de sa surcote sur sa retraite de base et subirait même une décote, puisqu’il lui manquerait 2 trimestres pour atteindre le taux plein.

      Pour Jeannine (fonctionnaire de catégorie C, née en 1963, voir ci-dessus) et sa génération, la durée de cotisation serait portée à 43,5 annuités.

      Dans ce cas, si Jeannine maintenait son départ à 62 ans, elle perdrait environ 11 % (-165 € par mois) de sa pension. Il lui manquerait en effet 6 trimestres pour atteindre le taux plein, et elle subirait donc une décote.

      Si, dans ce même cas d’allongement de la durée de cotisation à 43,5 annuités, Jeannine partait à 64 ans, elle perdrait 7 % (-118 € par mois) de sa pension, puisque sa surcote serait diminuée par rapport au système actuel, pour un départ au même âge.

      3. Scénario “à l’ancienne” : recul de l’âge légal de départ en retraite

      Une dernière mesure, qui semble pour le moment écartée par le gouvernement, est le recul de l’âge d’ouverture des droits, plus connu sous l’appellation d’« âge légal de départ en retraite » (parfois désigné comme âge d’ouverture des droits). Celui-ci représente l’âge en dessous duquel il est interdit de partir en retraite, quel que soit le nombre d’années cotisées. Fixé à 62 ans depuis la réforme Sarkozy de 2010 (précédemment 60 ans) à l’exception de certains métiers pénibles, cet âge connaîtrait alors un nouveau recul accéléré, de trois à quatre mois par génération, de manière à être repoussé à 63,4 ans en 2027 (63 ans et 5 mois pour la génération 1965).

      Qui serait concerné·e ?

      Seraient concernées toutes les personnes des générations 1960 à 1975 qui ne seraient pas encore parties à la retraite et, ce, quel que soit leur statut actuel (emploi, chômage, invalidité, RSA etc.). Mises à part d’éventuelles exceptions pour les carrières longues – ce qui n’est pas envisagé par le COR – le fait d’avoir commencé à travailler tôt, et donc d’avoir cotisé l’intégralité des annuités requises pour obtenir une retraite à taux plein, serait sans incidence sur le report de l’âge de départ.

      Recul de l’âge légal : l’exemple d’Omar et Amira et Jeannine

      Amira et Omar sont tous deux né·e·s en 1965. Elle et il subiraient donc de plein fouet les mesures de recul de l’âge légal de départ qui seraient alors décidées. Ainsi, elle et il n’auraient pas le droit de partir comme elle et il l’avaient prévu, respectivement à 60 ans (carrière longue) et 62 ans.

      L’âge légal de départ à la retraite reculerait de génération en génération : ainsi Jeannine, née en 1963, ne pourrait partir avant 62 ans et 10 ou 11 mois.

      L’ensemble des chiffres et des hypothèses ayant servi à réaliser ce dossier sont répertoriés dans deux annexes en accès ouvert (une annexe méthodologique et une annexe chiffrée).

      Le collectif Nos retraites reste en outre à votre disposition pour toute question sur les chiffres, les résultats ou leurs interprétations.

      Retrouvez l’étude sur le site du collectif Nos retraites : https://reformedesretraites.fr/neavant1975.

      https://blogs.mediapart.fr/collectif-nos-retraites/blog/231219/ne-e-s-avant-1975-voici-les-economies-que-le-gouvernement-prepare-po

    • Retraites : « L’étude envisage une forte paupérisation des #enseignants et plus généralement des #fonctionnaires »

      Même le cas type présenté dans l’étude d’impact indique que le pouvoir d’achat de la pension des enseignants connaîtra une forte baisse, analyse, dans une tribune au « Monde », l’économiste #Henri_Sterdyniak.

      La réforme des retraites a pour objectif de mettre en place un régime par points. Le niveau de la retraite dépendra de l’ensemble de la carrière, primes comprises. Les fonctionnaires seront donc particulièrement affectés puisque jusqu’à présent, ils ont droit à une retraite représentant 75 % du traitement indiciaire des six derniers mois de leur carrière (hors primes). Le principe selon lequel tous les fonctionnaires qui ont atteint le même grade doivent avoir la même retraite, considérée comme une rémunération différée, serait tout simplement oublié.

      En moyenne, le traitement de fin de carrière d’un fonctionnaire représente actuellement 123 % de son salaire moyen de carrière. Dans le nouveau système, qui annonce un taux de cotisation ouvrant des droits de 25,31 % et un taux de rendement de 5,5 %, le taux de remplacement à 65 ans, après 42 années de carrière, serait sur le salaire moyen de 58,47 % (soit 25,31 × 5,5 × 42/100). Sur le salaire de fin de période, il serait de 47,65 % alors qu’il est aujourd’hui de 70,5 % pour un enseignant dont les primes sont de 9 % du traitement – soit une baisse de 32,4 %.

      Ce chiffre n’est pas étonnant puisque la réforme vise à réduire le niveau relatif des retraites d’environ 22 % d’ici à 2050, afin de réduire de 0,5 point la part des retraites dans le PIB, ce malgré une hausse de plus de 20 % du nombre des retraités. La baisse relative du niveau des retraites des fonctionnaires avait été assurée jusqu’ici par la stagnation du point d’indice de la fonction publique, dont le pouvoir d’achat a diminué de 15 % depuis 2000.

      Malheureusement, ces informations sont totalement masquées dans l’étude d’impact associée au projet de loi.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/02/05/retraites-l-etude-envisage-une-forte-pauperisation-des-enseignants-et-plus-g
      #paywall

    • « Notre système de retraites n’a pas de problème de financement… »
      –-> Sébastien explique les retraites à un collègue

      Alors on répète : notre système de retraites actuel n’a pas de problème de financement. C’est le très officiel Conseil d’Orientation des Retraites qui l’illustre : voir ses deux derniers rapports : Évolutions des retraites et perspectives en France (juin 2019 : https://cor-retraites.fr/sites/default/files/2019-06/doc-4646.pdf) et Perspectives des retraites à l’horizon 2030 (novembre 2019 : https://www.cor-retraites.fr/sites/default/files/2020-01/Rapport_novembre_2019_V4.pdf)

      Actuellement il y a ZÉRO #déficit

      Vers 2027 le déficit sera à son max : une somme ridicule comprise entre 0.3 et 0.7% du PIB (deux fois plus faible en moyenne que la somme allouée au CICE chaque année, et pourrait être comblé en seulement 3 années de rétablissement de l’impôt sur la fortune ISF).
      Et surtout, sans réforme, ce déficit n’est que temporaire et le régime serait excédentaire d’ici 2040 / 2060 (pour les cas de croissance les moins pessimistes, y compris avec les comptabilités défavorables) .

      Et le système dispose de fonds disponibles dont certains ont été créés spécifiquement pour absorber les déficits momentanés :

      Le #Fond_de_Réserve_des_Retraites (32 Mds actuellement, 3 fois le déficit moyen attendu).
      Source : « Ce trésor de guerre qui pourrait faciliter la réforme des retraites », par Solveg Godeluck, Les Échos, 26 février 2018 (https://www.lesechos.fr/2018/02/ce-tresor-de-guerre-qui-pourrait-faciliter-la-reforme-des-retraites-985252).
      Mais aussi les autres fonds spéciaux des retraites (+ de 130 Mds, 10 fois le déficit moyen attendu)
      Source : Évolutions des retraites et perspectives en France, juin 2019.
      Sans oublier la disponibilité de la #Caisse_d’amortissement_de_la_dette_sociale #CADES
      Source : « L’extinction de la Cades libérera €24 mds à l’horizon 2024 », Reuters, 11 décembre 2018 (https://fr.reuters.com/article/frEuroRpt/idFRL8N1YG5NY).

      Par contre, la réforme assécherait le financement des retraites :

      Forte baisse des cotisations pour les salaires annuels entre 120000 et 324000 euros → manque à gagner de l’ordre de 3,7 milliards d’euros par an.
      Source : « Retraites : la fin des cotisations sur les hauts salaires coûterait 3,7 milliards par an pendant 15 ans », par Solveig Godeluck, 22 janvier 2020 (https://www.lesechos.fr/economie-france/social/retraites-la-fin-des-cotisations-sur-les-hauts-salaires-couterait-37-millia)
      Alignement vers le bas du taux de cotisation patronale public / privé ⇒ manque à gagner de 42 milliards d’euros par an (3.5 fois le déficit max attendu, par an !). Source : « Retraites : salariés, fonctionnaires, indépendants… qui va cotiser plus, qui va cotiser moins », par Solveig Godeluck, 21 janvier 2020 (https://www.lesechos.fr/economie-france/social/retraites-salaries-fonctionnaires-independants-qui-va-cotiser-plus-qui-va-c).

      Et la réforme et baisserait fortement le montant des retraites :

      Prise en compte de l’ensemble de la carrière et non plus des 25 meilleures années : baissera des pensions de tout le monde, en particulier des personnes ayant connu le chômage ou le temps partiel et les femmes..
      …et supprimera la dimension méritocratique au calcul de la retraite (un ouvrier qui aurait gravit tous les échelons pour devenir cadre en fin de carrière aura une pension moindre qu’un cadre au salaire identique mais qui aura cotisé dès le début de sa carrière comme cadre)
      La réforme sera particulièrement impactant pour les femmes mères de famille (on parle de pertes jusqu’à 15%).
      Source : « Réforme des retraites : chute de pension en vue pour les mères de famille », Marie-Cécile Renault, Le Figaro, 26 novembre 2019
      Perte de garantie sur le montant des pensions à l’avenir, qui pourra baisser, par ajustement de la valeur point :
      Source : François Fillon

      Baisse du niveau des pensions qu’il va falloir compléter par capitalisation … auquel même le MEDEF est opposé pour ses hauts cadres.
      Source : « Le patronat réclame le maintien de la retraite par répartition pour les hauts salaires », par Solveig Godeluck, Les Échos, 31 janvier 2020 (https://www.lesechos.fr/economie-france/social/le-patronat-reclame-le-maintien-de-la-retraite-par-repartition-pour-les-hau)
      Décalage du départ à la retraite, qui augmentera à chaque génération. Partir avant entraînera une décote pour toute la retraite de 7 à 8% par année de départ anticipé (et non pas 5%).
      Source : « Réforme des retraites : les simulations confirment le rôle capital de l’âge pivot », par Adrien Sénécat, Le Monde, 21 janvier 2020 (https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2020/01/21/retraites-les-simulations-du-gouvernement-confirment-le-role-capital-de-l-ag).

      Le tout sur fond de malhonnêteté gouvernementale :

      Les chiffres donnés par les « cas types » du gouvernement sont … faux : ils ne tiennent pas compte du texte du projet de loi (!) et omettent la prise en compte de l’âge pivot et de sa décote.
      Source : « Etude d’impact sur la réforme des retraites : le gouvernement accusé de calculs malhonnêtes », BFMTV, 25 janvier 2020.
      Sans parler qu’en plus de ça les cas sont choisis jusqu’à l’absurde pour être favorables (carrière pleine sans aucune augmentation de salaire).
      Source : « Retraites : comment le « simulateur » du gouvernement embellit la réforme », par Adrien Sénécat, Le Monde, 20 décembre 2019

      https://academia.hypotheses.org/12275

    • La carrière de Christelle : vers une baisse de 36% de la retraite des enseignants

      #Henri_Sterdyniak montre que les simulations présentées par le Haut-Commissariat à la Réforme des Retraites incorporent une baisse de 36% du niveau relatif des retraites des professeurs certifiés en 2050 par rapport à 2020.

      Le Haut-Commissariat à la réforme des retraites (HCRR) a publié sur son site l’impact de l’introduction du système universel à points sur une vingtaine de cas-types[1]. Dans la plupart des cas, l’impact est très faible, à la hausse ou à la baisse. En fait, ce résultat s’explique par le fait que le système à points n’est pas comparé au système actuel, mais au système tel qu’il serait après 25 ou 35 années de détérioration. Comme la détérioration du système actuel, telle qu’elle était déjà anticipée avant 2019 et le système à points envisagé aujourd’hui se donnent le même objectif de stabiliser (et même de baisser) les parts des dépenses de retraite dans le PIB malgré la hausse de 25% du ratio retraités/actifs, ce résultat n’est pas surprenant.

      Cependant, la méthode utilisée pour élaborer ces cas-types est plus que contestable. Nous allons le voir dans le cas de Christelle, en reprenant donc un des cas-type[2] et les hypothèses du HCRR. Christelle fait toute sa carrière de 22 à 67 ans comme professeure certifiée.

      Supposons d’abord que Christelle soit née en 1953 et qu’elle prenne sa retraite en 2020. Son dernier traitement[3] est de 3889 euros (en brut) et son taux de prime est de 9%. Dans le système actuel, sa retraite est de 75 % de son dernier traitement, soit 2917 euros, auxquels s’ajoutent environ 23 euros du régime additionnel de la fonction publique (RAFP) sur ses primes, ce qui amène à une retraite d’environ 2940 euros. Dans un système par points, sa retraite aurait été calculée sur l’ensemble des salaires de sa carrière, mais ceux-ci auraient été revalorisés selon la hausse du salaire moyen dans l’ensemble de l’économie. En reprenant la chronique de l’évolution du salaire des professeurs certifiés et du salaire moyen, le calcul montre que la retraite de Christelle aurait été alors de 2197 euros, soit une perte par rapport au système actuel de 25,3 % ou encore de 743 euros par mois.

      Le HCRR ne présente pas le bilan ainsi. Il évalue la retraite de Christelle en la faisant naître en 1990 ; elle prendrait donc sa retraite à 65 ans[4] en 2055, dans 35 ans. Le HCRR fait l’hypothèse que, durant ces 35 années, le salaire moyen de l’ensemble des salariés et le SMIC augmenteraient de 1,3% par an en pouvoir d’achat[5]. Pendant toute cette période, selon le HCRR, l’indice des traitements de la fonction publique serait fixe en pouvoir d’achat, tandis que le taux des primes des professeurs monterait de 9% à 17%. Aussi, le pouvoir d’achat du salaire d’un professeur certifié à un échelon donné n’aurait une augmentation que de 0,2% par an, entièrement due à la hausse des primes. Ainsi, le traitement indiciaire d’un professeur certifié à 10 ans de carrière passerait de 1,51 fois à 0,96 fois le SMIC, soit, en tenant compte de la prime, un salaire qui passerait de 1,65 fois le SMIC à 1,12 fois le SMIC, une perte de 32% par rapport au SMIC et au salaire moyen dans l’économie. Le HCRR envisage donc une forte paupérisation des enseignants (et plus généralement des fonctionnaires).

      Dans cette situation, selon le HCRR, Christelle partirait à la retraite à 65 ans avec une pension de 2991 euros selon le système actuel, de 2 903 euros (-3%) avec le système à points, mais la promesse du gouvernement que la réforme ne ferait pas baisser la retraite des enseignants, ferait monter ce montant à 3000 euros.

      Certes les 2991 euros versés par le régime actuel dégradé sont un peu supérieurs aux 2940 euros actuels, mais, comparés au salaire moyen de l’économie, ils représentent une baisse de 36 %. Il est facile pour le gouvernement de garantir que le nouveau système ne provoquera pas une baisse supplémentaire par rapport à un système ainsi dégradé.

      En fait, le nouveau système ne provoque en lui-même qu’une baisse de 3% par rapport au système actuel dégradé que pour 2 raisons. D’une part, le taux de prime est supposé passer à 17%. D’autre part, le salaire des enseignants, tout au long de leur carrière, serait stable en pourcentage du salaire moyen de l’économie : la hausse du salaire due à l’ancienneté serait à peu près équivalente à sa baisse à échelon donné, de sorte que le salaire de fin de carrière serait pratiquement égal au salaire moyen de la carrière revalorisé à 1,3% l’an.

      Si les salaires des professeurs certifiés augmentaient à l’avenir normalement, soit comme le salaire moyen de l’économie, Christelle aurait un traitement de fin de carrière de 6113 euros, avec 550 euros de prime. Sa retraite serait de 4628 euros (4585+43), selon les règles actuelles ; de 3102 euros dans le système à points, soit une perte de 33%. C’est le chiffre que le HCRR aurait dû indiquer. Le supplément nécessaire pour maintenir la retraite des professeurs certifiés ne devrait pas être de 97 euros, comme selon le HCRR, mais de 1 527 euros.

      La présentation de ce cas-type par le HCRR pose deux questions. Le gouvernement envisage-t-il de baisser de 36% le salaire relatif des enseignants ? Est-il acceptable qu’un ministre, qu’une administration présente des données fallacieuses dans le débat public ?

      https://blogs.mediapart.fr/les-economistes-atterres/blog/261219/la-carriere-de-christelle-vers-une-baisse-de-36-de-la-retraite-des-e

    • merci @cdb_77 . Je viens de regarder le cas des maîtres de conf, et il y a un truc me chiffonne : début de carrière à 23 ans ? Euhhh, je vois pas trop comment c’est possible... Sauf à compter les heures de monitorat/vacation/ATER etc. mais dans ce cas la personne n’est pas encore MCF.

  • Opinion | Médecins pour la bonne conscience ?
    https://asile.ch/2019/12/06/opinion-medecins-pour-la-bonne-conscience

    Mandats fédéraux aux entreprises privées Les médecins ont été utilisés, de longue date, par les pouvoirs politiques pour vernir de blanc certaines pratiques assez sombres. Même les régimes totalitaires du 20e siècle ont eu besoin d’eux pour leur bonne conscience. Les dirigeants soviétiques, par exemple, utilisaient des psychiatres pour déclarer « fous » les opposants […]

    • On mentionne ici #Joseph_Ndukaku_Chiakwa alias #Alex_Khamma sur un vol spécial

      Depuis le décès d’un Nigérian, survenu le 17 mars 2010, juste avant l’embarquement dans un de ces vols, des médecins sont requis pour déclarer « Fit to fly » les personnes ainsi renvoyées et sont mandatés pour accompagner ces vols. On les a vus prêts à injecter des sédatifs¹ lorsque menottes et baillons ne suffisaient plus…

      #caricature #dessin_de_presse
      #fit_to_fly
      #asile #migrations #réfugiés #vols #avion #médecins #privatisation #expulsions #Suisse #médecine

    • Mandats privés | Médecins aux ordres du #SEM

      Dans le domaine médical et a fortiori lorsqu’il s’agit de renvois, la tension entre devoir de réserve et déontologie est à son comble. La société médicale #OSEARA vient de voir son mandat prolongé dans de drôles de circonstances. Ceci, alors qu’elle a été dénoncée pour son manque d’indépendance à l’égard du SEM, pour avoir par le passé administré des psychotropes prohibés lors de vols spéciaux et plus récemment pour avoir avalisé des expulsions hautement problématiques(1). Alertée par les pratiques de l’entreprise, un groupe de médecins indépendants appelle à documenter tout manquement lors de renvois.

      Le 9 juillet 2020, le SEM annonçait avoir interrompu la procédure d’adjudication du mandat de #prestations_médicales lancée en avril 2020 et avoir prolongé le contrat de l’entreprise OSEARA, qui assure cette prestation depuis 2012(2). Motif : les cinq propositions reçues en réponse à l’appel d’offres étaient trop chères.

      Suite aux critiques concernant la qualification des #médecins d’OSEARA de nouvelles règles avaient été édictées dans le cadre de l’appel d’offres, notamment l’obligation d’engager uniquement des #médecins_secouristes. Il avait également été décidé de séparer les mandats en deux lots et de les confier à deux entités séparées : l’une pour établir l’aptitude au renvoi des personnes, l’autre pour l’#accompagnement_médical durant les vols.

      De graves négligences(3) lors de renvois avaient également mis en lumière un conflit d’intérêts : OSEARA avait en effet une incitation à déclarer les personnes aptes à être renvoyées (« fit to fly ») dans la mesure où elle était ensuite rémunérée pour l’accompagnement médical du vol. Autre problème éthique, dénoncé par le Tages-Anzeiger(4) suite à une bavure à Zurich : l’entreprise n’était rémunérée que si la personne était déclarée apte au renvoi. « Dans la plupart des cas, un médecin d’OSEARA certifie la transportabilité et un autre accompagne le vol spécial. L’entreprise gagne donc deux fois plus dans ces cas. Si une personne est jugée inapte au transport, elle ne gagne rien. Le pourcentage de ceux qui sont jugés inaptes à voler est très faible. […] ».

      L’annonce de cette scission des mandats et le fait qu’OSEARA ne soit pas certifiée pour les services de secours(5) – l’excluant de fait d’un des mandats – ont eu un impact immédiat : le président du conseil d’administration d’OSEARA a annoncé sa démission de cette fonction en avril. Il estimait en outre « peu probable » que l’entreprise postule pour assumer uniquement l’un des mandats. Derrière le peu probable, on comprend peu rentable.

      Trois mois plus tard, c’est donc un rétropédalage total. Le SEM indique qu’« en fin de compte, [la scission] ne sera pas mis[e] en oeuvre car les avantages qu’[elle] présente ne suffisent pas à justifier le surcoût qu’il engendre. Le respect des normes médicales est également assuré dans le cadre des prescriptions du contrat en cours. » Peut-on les croire sur parole ?

      https://asile.ch/2020/12/23/dossier-privatisation-de-lasile-oseara-le-e-meilleur-rapport-qualite-prix-vrai

  • #Fraude aux #prestations_sociales : un rapport du Sénat tord le cou aux #idées_reçues | Public Senat
    https://www.publicsenat.fr/article/parlementaire/fraude-aux-prestations-sociales-un-rapport-du-senat-tord-le-cou-aux-idee

    La fraude documentaire aux prestations sociales entraînerait chaque année pour l’État un préjudice de 200 à 300 millions d’euros. C’est ce qui ressort d’un rapport du Sénat remis ce mercredi. L’année dernière, un magistrat spécialisé, l’évaluait pourtant à 14 milliards par an. « Une extrapolation un peu abusive » selon le sénateur MoDem, Jean-Marie Vanlerenberghe.

    #sécurité_sociale #immatriculation #étrangers

  • Jean Arcelin : “Une large majorité des 700 000 personnes en #Ehpad mangera, pour le reste de sa vie, des repas à 1€” | Atlantico.fr
    https://www.atlantico.fr/decryptage/3568317/jean-arcelin--une-large-majorite-des-700-000-personnes-en-ehpad-mangera-po

    Je découvre avec stupéfaction qu’un tiers des revenus des Ehpad privés commerciaux provient des aides d’État. Le chiffre d’affaires est subventionné pour 35% par l’État, à travers les aides de l’ARS et les aides du Conseil départemental. Cela sert à payer le personnel soignant et une partie de ce qu’on appelle la #dépendance.

    Je suis diplômé de Sup de Co. Je connais la #gestion et les bilans. Je considère donc que l’État devient actionnaire de tous les Ehpad, y compris les Ehpad commerciaux et privés. Il doit récupérer au moins un tiers des #bénéfices … mais pas du tout, car tous les bénéfices reviennent à l’#actionnaire. Il en fait ce qu’il veut. Je trouve que cela n’est pas normal. Les Ehpad privés commerciaux ne pourraient pas obtenir cette #rentabilité, l’activité ne serait pas possible s’ils n’avaient pas ce tiers de #subventions de l’État. Donc ils doivent donner un tiers de leurs bénéfices avant impôt, et après on impose. Les caisses de l’État sont vides. Donc on doit trouver de l’argent.

    Or le #marché est verrouillé. J’ai géré des structures économiques qui dégageaient beaucoup de rentabilité. On avait une rentabilité dans la distribution automobile, de l’ordre de 3%, ce qui est élevé. Je suis ravi dans ce cas. Mais si vous dégagez de la rentabilité, vous devez quand même fournir des #prestations de qualité : c’est la loi du marché. Si vous dégagez une rentabilité élevée et que votre service est médiocre, c’est qu’il y a un #dysfonctionnement. Le dysfonctionnement, c’est que le marché est verrouillé. Il n’y a pas de saine concurrence. Le taux d’occupation des Ehpad, c’est dans le rapport parlementaire de MM. Iborra et Fiat, il est quasiment de 100%. Le Crion, le Plazza, le George V, ils ne sont pas à 100% de taux d’occupation dans l’année. Les Ehpad n’ont pas de problème de #concurrence, donc ils se permettent de surfacturer des prestations médiocres. Voilà ce que j’ai vu.

    Si vous n’avez pas d’argent, vous ne pouvez rien faire. On vous refuse votre budget animation parce que vous l’avez dépassé. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Les reportages coup de poing mériteraient d’être nuancés. Il faut dire que grâce à l’implication des équipes, cela peut fonctionner. Il y a des groupes d’Ehpad qui ont un positionnement de qualité qui sont différents. Je souhaite dénoncer un #système. Je ne souhaite même pas dénoncer les dirigeants, car ce sont les actionnaires qui fixent le cadre. Ils vous disent : cette année, notre feuille de route, c’est une rentabilité de 15%. A partir de ce moment-là, tout est décliné en cascade. En tant que directeur d’Ehpad, je dois alors faire des économies sur tout. J’ai quatre protections urinaires quand il en faudrait six. Je ne peux pas embaucher, pas faire des animations, pas mettre du bon pain parce que cela coûte trop cher, je dois supprimer le fromage…

  • Ces aides sociales que Bercy veut réduire selon une note interne
    https://www.nouvelobs.com/societe/social/20180518.OBS6858/ces-aides-sociales-que-bercy-veut-reduire-selon-une-note-interne.html

    Dans une note interne, dont « le Monde » dévoile le contenu ce vendredi 18 mai, la direction du budget constate que les prestations sociales constituent « un poids croissant » des dépenses publiques en France (26% des dépenses de l’Etat en 2016), et appelle à « maîtriser la dynamique » – comprendre, revoir à la baisse le niveau de plusieurs aides sociales. Il ne s’agit que de « travaux techniques », qui ne se situent pas du tout au « niveau politique », souligne auprès du « Monde » l’entourage du ministre de l’Action et des comptes publics, Gérald Darmanin.

    http://abonnes.lemonde.fr/politique/article/2018/05/18/les-pistes-explosives-de-bercy-pour-reduire-les-aides-sociales_53010

    Si le gouvernement ne sait pas comment s’y prendre pour réduire les dépenses publiques, il dispose d’une administration, prestigieuse mais crainte – voire honnie, parfois –, qui saura toujours lui souffler des idées : la direction du budget. Celle-ci a récemment formulé de « premières pistes d’économies » portant sur des dispositifs d’aide aux ménages, en général, et aux personnes démunies. Synthétisées dans un document qui s’intitule « Transformer les prestations sociales », que Le Monde s’est procuré, ces propositions seraient susceptibles – pour plusieurs d’entre elles – de provoquer un tollé si elles étaient mises en œuvre. Il ne s’agit que de « travaux techniques », qui ne se situent pas du tout au « niveau politique », fait-on valoir dans l’entourage du ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin. Mais l’inventivité des hauts fonctionnaires de Bercy pour alléger le montant de la facture peut cependant nourrir quelques inquiétudes.

    La direction du budget part du constat que les prestations sociales constituent « un poids croissant », représentant 26 % des dépenses publiques en 2016 (soit près de cinq points supplémentaires en une quinzaine d’années). « Plusieurs approches [sont] possibles pour maîtriser la dynamique », écrit-elle : ne plus indexer (totalement ou partiellement) la progression des aides à l’évolution des prix, « revoir les règles d’éligibilité », mieux prendre en compte le patrimoine des personnes dans le calcul de l’allocation, encourager le retour à l’emploi – par exemple en conditionnant l’octroi de certains minima sociaux « à des démarches actives de recherche » d’un poste, etc.

    Le document ne précise pas le montant d’économies induites par les diverses options esquissées, sauf dans un cas : le gel en 2019 des prestations, dites « légalement indexées » (allocations familiales, retraites…), « pourrait rapporter 3,5 milliards d’euros », sans que soient remises en cause les « revalorisations exceptionnelles » de certaines aides, décidées par le gouvernement d’Edouard Philippe (par exemple pour la prime d’activité). La direction du budget ne se place pas dans une optique strictement comptable : sa démarche vise également à améliorer le fonctionnement de dispositifs, dont elle rappelle les imperfections, à ses yeux.

    Allocation adultes handicapés (AAH)
    Des « disparités fortes » sont relevées entre départements dans l’octroi de cette aide. Il est, du coup, proposé de « maîtriser les flux d’entrée en [révisant] les critères d’attribution » et d’« uniformiser (…) les pratiques de prescription ». Les hauts fonctionnaires de Bercy suggèrent par ailleurs de « revoir plus périodiquement le stock » de bénéficiaires de l’AAH et d’« inciter effectivement à la reprise d’activité ».

    Allocation personnalisée pour l’autonomie (APA)
    Destinée aux personnes âgées qui ont de la peine à accomplir des gestes de la vie quotidienne, cette prestation est jugée « trop diluée et insuffisamment redistributive ». Il convient donc de la « recentrer (…) sur les publics prioritaires (…) pour garantir [sa] soutenabilité (…) dans un contexte de vieillissement démographique ». Les « plans d’aide » doivent également être modulés « en fonction du patrimoine » de la personne, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle, et non des seuls revenus. Les budgétaires de Bercy recommandent, par ailleurs, de se pencher sur « l’articulation de la prestation » avec les avantages fiscaux existants, par exemple l’abattement de 10 % sur les pensions dans le cadre de la déclaration d’impôt sur le revenu.

    Aides personnelles au logement (APL)
    Le dispositif comporte plusieurs limites, aux yeux de Bercy. Parmi elles, le fait que « les APL favorisent (…) les personnes inactives », à niveau égal de ressources. En outre, les « APL étudiants sont peu ciblées et ont trop peu d’effet redistributif », car le montant de la prestation « dépend très peu des ressources réelles (salaires et transferts intrafamiliaux) » des bénéficiaires. Dès lors, une réforme serait la bienvenue, en prévoyant le « non-cumul part fiscal et APL étudiants » – ce qui signifie que les intéressés devraient choisir : soit être rattachés au foyer fiscal de leurs parents, soit percevoir l’aide. Une idée maintes fois évoquée, mais jamais mise en œuvre, à ce stade, de crainte de provoquer des manifestations monstres d’étudiants. Le document formule d’autres pistes « à compter de 2020 », dont l’une est d’intégrer les minima sociaux et les prestations familiales dans la « base ressources » servant au calcul des APL.

    Bourses sur critères sociaux (BCS)
    Accordées aux étudiants « issus de foyers modestes », ces aides ont vu leur montant s’envoler (+ 60 % en dix ans), du fait du dynamisme de la démographie dans l’enseignement supérieur et d’un « rythme de revalorisation discrétionnaire, supérieur à l’inflation ». Le dispositif est « faiblement ciblé », pour la direction du budget, qui souligne que « le nombre de bénéficiaires (…) atteint désormais 27 % des étudiants ». Du coup, plusieurs solutions sont énoncées : « accroître le ciblage », par exemple en abaissant les plafonds de ressources ; geler les revalorisations des barèmes ou, « a minima, en limiter la progression » ; « renforcer le contrôle d’assiduité » – les jeunes qui ne vont pas en cours étant susceptibles de perdre l’aide.

    Des recommandations sont faites également au sujet du revenu de solidarité active (RSA), de l’allocation de solidarité spécifique (pour les chômeurs en fin de droits), le minimum-vieillesse, la prime d’activité et les prestations familiales. Le fait que la direction du budget phosphore sur le sujet n’est nullement une surprise. Dans un entretien accordé au Parisien, M. Darmanin avait déclaré, le 27 avril, que, parmi les sources d’économies, « il y a bien sûr le champ social, qui (…) doit être audité ». Le comité d’experts CAP22, chargé de remettre prochainement un rapport sur la réforme de l’Etat, explore cette thématique.

    Toute la question, désormais, est de savoir si les pistes développées par Bercy seront retenues ou non. Certaines d’entre elles ont peu de chance de prospérer, notamment celles consistant à étaler, voire à annuler les revalorisations exceptionnelles décidées en 2017 par le gouvernement d’Edouard Philippe. Dans l’entourage de M. Darmanin, on affirme que ce sont aux ministères concernés de faire des propositions pour rénover les dispositifs sociaux, tout en reconnaissant que celles-ci ont vocation à être confrontées à « l’expertise » de la direction du budget. Les arbitrages interviendront au cours de l’été, ajoute-t-on. Ils seront guettés avec une bonne dose d’appréhension dans l’opinion.

    #prestations_sociales #darmanin #minima_sociaux #rsa #ass #apl #apa

  • #Guerre_aux_pauvres sur Arte à 20h30
    Hier, 09/11/2017, à une heure de grande écoute, 28 minutes consacre une émission entière pour traiter les pauvres d’assistés et plaindre les riches qui sont mal aimés. Une des protagonistes jamais interrompue, affirme même que les pauvres sous conditions de ressources coutent 97 milliards d’aide social.

    (voir à 34mn)

    Luchini (FL)
    – Pas un média, pas un plateau télé ou on ne vend pas le pauvre comme un éblouissement … à part TF1 …
    – Est-ce qu’il faudrait encore plus payé pour que les gens ne soient plus pauvres ?
    Agnès Verdier-Molinié (AVM)
    – Mais c’est ça le sujet ! ce qui n’est pas dit c’est que la France est dans les pays les plus géééénéreux au moooonde
    – FL : Et ça c’est vrai ?
    – mais les plus généreuuux au mooonde.
    – FL : Et c’est vrai ou pas ?
    – AVM : Mais oui, on a ,on a (là Luchini ouvre la bouche estomaqué) plus de 97 milliards de dépenses de protection sociale, d’aide sociale, qui sont versés sur critères de reeessources.
    Elisabeth Quin, présentatrice qui intervient à peine
    – Et pourtant 9 millions de français sont sous le seuil de pauvreté
    – Arrêtons de culpabiliser les français, ça coute très cher cette protection sociale

    #pauvrophobie qu’explique Nadia sous le regard goguenard des invités qui est la seule à être outrée et se moquer du terme cancer de l’assistanat qui semble commun à ce « débat ».
    Luchini (invité spécial) est quant à lui absolument infect, mais tout à fait dans la peau de ses #acteurs_français qui squattent l’espace cinématographique/politique (maintenant que les deux ne valent plus rien) de leur morbidité et en font renoncer plus d’un·e à aller au cinéma.

    Fabrice Luchini est rejoint pour ce débat par Agnès Verdier-Molinié, économiste et directrice du think tank libéral iFRAP, Éric Heyer, économiste à l’OFCE, et l’essayiste Pascal Bruckner.

    https://www.arte.tv/fr/videos/075223-054-A/28-minutes

    #consternation #arte #lamentable #goebels #mais_pourquoi_je_tombe_que_sur_des_merdes #nombril_des_riches #morale_de_droite

    • https://data.oecd.org/fr/socialexp/depenses-sociales.htm

      Les dépenses sociales couvrent les prestations en espèces, les biens et services fournis directement et les allègements fiscaux à visées sociales. Les prestations peuvent être ciblées sur les ménages à #faibles_revenu, les #personnes_âgées, les #handicapés, les personnes #malades, les #chômeurs ou les #jeunes. Un programme social se caractérise par une redistribution des ressources entre les ménages ou une participation obligatoire. Les #prestations_sociales sont qualifiées de publiques lorsque les administrations publiques (administrations centrale et locales, administrations d’États fédérés et de sécurité sociale) contrôlent les flux financiers correspondants. Toutes les prestations sociales non fournies par les administrations publiques sont considérées comme privées. Les transferts privés entre ménages ne sont pas considérés comme sociaux et ne sont pas inclus ici. Les dépenses sociales nettes totales englobent les dépenses publiques et privées, et prennent en compte les effets de la fiscalité directe et indirecte et des allègements fiscaux à visées sociales. Cet indicateur est mesuré en pourcentage du PIB ou en Dollars US par habitant.

      2017 Dépenses sociales de la France : 11,5 milliards d’euros

    • @touti , tu leur en fait de la publicité !
      J’ai regardé une partie du machin, c’est vrai, ils sont dans la fosse, au plus bas, sans@touti , tu leur en fait de la publicité !
      J’au regardé une partie du machin, c’est vrai, ils sont dans la fosse, au plus bas, sans scepticisme.

      Des parisiens #hors_sol , qui ne peuvent faire que semblant d’être avec les moyens fournis par l’argent public, ici arte, la chaine germano francophone.

      Fabrice Luchini rappelle la collaboration d’alain finkielkraut (l’éructeur) à ce qu’il qualifie de spectacle.
      Des répugnants en marche vers l’insignifiance.

      Pour rappel, finkielkrau bave le Samedi matin sur rance culture avec l’argent des contribuables, on n’est pas obligé d’écouter non plus.

      Ce ne sont pas les seuls, je cite :
      Les capitales sont bien en rupture avec le reste de leur territoire national. Un article de Juin 2016
      « Indépendance » de Paris et Londres : réponse d’un géographe à Sadiq Khan et Anne Hidalgo
      http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2016/06/29/31002-20160629ARTFIG00322-independance-de-paris-et-londres-reponse-d-un-geo

      Anne Hidalgo, directrice du Travail et de primes de conseillère de cabinet. 116 000 euros pour un soit disant travail à a Mairie.
      http://www.lefigaro.fr/politique/le-scan/2017/11/08/25001-20171108ARTFIG00117-selon-le-canard-hidalgo-a-beneficie-d-une-double-

      Attention, la #morale_de_droite c’est pour ceux qui n’ont pas de rolex.

    • @bce_106_6 tu m’accuses de leur faire de la pub alors que je dénonce ces pourritures ?
      en ce moment je lis le petit pamphlet génial de @aude_v #egologie je me moque aussi de ces ’militants’ qui ne veulent parler que des trucs cools qui ne perturbent pas le monde …
      Il faut faire honte à ces « répugnants en marche vers l’insignifiance » ! et je le fais pour les jeunes qui étaient avec moi hier et qui ne décryptaient pas de suite l’aspect dégueulasse du discours.
      Et je ne fais pas de confusion à la tous pourris, je montre clairement ceux qui profitent de leur position de dominants pour la renforcer. Ces sortes d’émission sont clairement là pour justifier la guerre sociale menée contre les pauvres, ce n’est pas un jeu, les conséquences de ces campagnes de propagande sont gravissimes.

    • Bonsoir @Touti !
      Du calme, du calme, je suis entièrement d’accord avec toi sur leur suffisance astronomique.

      Ton billet m’a fait prendre comprendre que Fabrice Lucchini était bon pour la poubelle, il est vrai que je ne suivais pas trop ce qu’il faisait.
      Il radotent comme d’habitude sur les Privilèges des prolos, afin de cacher les leurs.
      De moins en moins de gens y croient, la propagande, ça a des limites.
      En faisant mes courses, j’entends des propos dignes d’anarchistes entre clients ou caissières, dans les beaux quartiers des hauts de france.

      Ces « répugnants en marche vers l’insignifiance » , ne veulent qu’une seule chose, qu’on leur fasse de la réclame, c’est leur gagne pain à ces #baltringues.

      Une seule chose les terrifie , qu’on les montre dans leur réalité (L’inspirateur de Lucchini, chroniqueur sur rance Culture).
      https://www.youtube.com/watch?v=4lydlc16K0o

      Leur classe sociale semble avoir gagné, mais leur société est en train de s’effondrer, ça les rend obscènes, haineux, ils sont sans limites.

      Je suis souvent étonné de la violence des réactions sur seenthis, entre membres qui partagent 99 % de leurs idées.

    • Oui @touti, c’est à vomir.
      Ce petit entre soi, ultra libéral, décomplexé, la présentatrice (Elisabeth Quin) toujours aussi servile.
      Luchini pitoyable, caricature de lui même, beaucoup d’effet mais pas d’intelligence.
      Et l’autre propagandiste, Verdier Molinié, abonnée aux plateaux télé et à Radio Courtoisie, qui vient répandre son venin libéral.

      Il n’y a que Nadia Daam dans cette émission qui a tous les jours du recul et une vraie liberté de ton.

      Et encore, ça c’est sur Arte.
      Sur les autres chaines, y compris du service public, c’est pire (je pense aux émissions de Ruquier par exemple).

      #société_du_spectacle #guignols

  • #Statistique publique : une révolution silencieuse
    http://www.ofce.sciences-po.fr/blog/statistique-publique-une-revolution-silencieuse

    Parfois des révolutions se produisent sans que personne ne s’en rende vraiment compte. L’été dernier, l’#INSEE et la #DREES ont mis en accès libre, sous la licence #CeCILL, leur #modèle de #microsimulation de la législation socio-fiscale : #INES. Développé depuis plus de 20 ans, ce modèle représente une grande partie de la #fiscalité et des #prestations en espèces du #système_redistributif français. Couplé à une base de données qui donne une information annuelle précise sur plus de 50 000 ménages représentatifs (130 000 individus), le but premier de ce modèle est de simuler l’effet de la fiscalité et des prestations sur la population française. Si l’on veut connaître les conséquences d’une hausse du taux de la première tranche de l’impôt sur le revenu, INES permet, foyer fiscal par foyer fiscal, de calculer l’impôt sur le revenu avant et après la modification du barème et d’en déduire la masse d’impôts collectés ou encore il permet de savoir quels foyers paient davantage d’impôts selon les caractéristiques retenues. Fait remarquable, en l’état, le modèle INES fournit une bonne approximation des masses agrégées des principaux prélèvements et des principales prestations.

  • GISTI - Se servir d’un référé devant la juridiction administrative, pour les #prestations dont le contentieux relève du contentieux administratif devant le #TA par ex le #RSA ou l’#ASE
    http://www.gisti.org/spip.php?article4994#tele

    Le droit de contester la légalité d’un acte administratif devant un tribunal peut perdre toute effectivité en raison des très longs délais de jugement.

    C’est notamment le cas pour les personnes étrangères lorsqu’une décision peut entraîner de manière imminente leur expulsion, la rupture de leur vie familiale, l’interruption d’un contrat de travail ou d’un traitement médical, etc. Une carence de l’administration à délivrer un document, à enregistrer une demande d’asile ou de titre de séjour, à exécuter un jugement, etc., peut créer des situations analogues.

    Or, il est possible d’obtenir très rapidement qu’un·e juge prenne des mesures remédiant aux conséquences d’une telle décision ou pratique de l’administration. Ces procédures d’urgence sont appelées « #référés_administratifs ».

    Deux de ces référés, créés par une loi du 30 juin 2000, présentent une utilité particulière pour les étrangères et les #étrangers confrontés à une décision ou à un acte illégal de l’administration : le #référé-suspension et le #référé-liberté. Le référé « mesures utiles » peut également parfois être utilisé pour la défense des droits des personnes étrangères.

    Le #Gisti et le Cicade avaient élaboré en 2003 une Note pratique intitulée Se servir du référé-liberté et du référé-suspension afin d’expliquer à des non-spécialistes quand et comment en faire usage. Il était temps de la refondre en tenant compte de quinze années de #jurisprudence et de pratique : c’est l’objet de la présente note.

    #droit_social #se_défendre

  • La CEDH se prononce jeudi sur des allocations refusées à des familles étrangères
    http://www.leparisien.fr/strasbourg-67000/la-cedh-se-prononce-jeudi-sur-des-allocations-refusees-a-des-familles-etr

    Les parents #étrangers peuvent-ils être privés d’#allocations_familiales pour leurs enfants venus en France en dehors de la procédure de regroupement familial ? C’est la question que doit trancher jeudi la Cour européenne des droits de l’Homme, saisie par deux familles congolaises.

    « C’est une décision très attendue par des milliers d’étrangers » en situation similaire, a expliqué à l’AFP Me Hélène Gacon, l’avocate de l’une des deux familles requérantes.
    Ses clients, un couple de Congolais résidant dans la banlieue de Rennes, se battent depuis des années devant la justice, en vain, pour que la Caisse d’allocations familiales (#CAF) prenne en compte leurs quatre enfants pour le calcul de leurs allocations.
    Or la CAF ne « reconnaît » que leurs deux derniers enfants, nés en France. Les deux aînés, nés en République démocratique du Congo et arrivés en France en 2002, ne sont pas pris en considération, car ils n’ont pas rejoint leurs parents selon une procédure de regroupement familial - comme le stipule le #Code_de_la_Sécurité_sociale.
    Sont concernées non seulement les allocations familiales, mais aussi l’allocation de rentrée scolaire, ou encore des aides au logement, calculées en fonction de la taille du foyer.
    « Le cas fréquent, c’est une famille arrivée en France avec un visa de court séjour, puis qui est restée illégalement sur le territoire après l’expiration de ce visa », explique l’avocate, également membre du #Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigrés).
    « Plus tard, la famille a été régularisée. Mais la CAF ne veut pas prendre en compte les enfants, alors que toute la famille réside désormais légalement en France. C’est ça qui est discriminant, car pour une famille de nationalité française, la question ne se pose pas », poursuit Me Gacon.
    Saisie de cas similaires, la Cour de cassation avait donné raison en 2004 aux familles étrangères, avant d’opérer un changement de jurisprudence en 2011. C’est ce revirement que les familles concernées contestent devant la #CEDH, en faisant valoir une discrimination et une atteinte à la vie familiale.
    Selon l’économiste Antoine Math, de l’Institut de recherches économiques et sociales (IRES), ce problème concernerait au maximum 9.000 enfants étrangers en France.
    Les ressortissants de pays liés à l’Union européenne par un accord d’association (notamment les Algériens, Marocains, Tunisiens et Turcs) ne sont pas concernés, la Cour de cassation ayant jugé en 2013 qu’en vertu de ces accords ils devaient bénéficier des mêmes #prestations familiales que les Français.

    #préférence_nationale aux mille visages #droit_social

  • Près de 50 000 « collaborateurs occasionnels du service public » ne sont pas déclarés (...) Parmi eux, quarante mille cinq cents officient au sein du ministère de la justice.
    http://www.lemonde.fr/emploi/article/2015/09/01/pres-de-50-000-collaborateurs-occasionnels-du-service-public-ne-sont-pas-dec

    Ces employés — interprètes, experts, médiateurs… —, qui sont souvent amenés à intervenir quotidiennement, sont considérés comme des prestataires, rémunérés à l’heure : « Le ministère de la justice n’applique aucun assujettissement aux #cotisations_sociales et assimile les indemnités de ses collaborateurs à des #prestations sans pour autant mettre en place les conditions de leur assujettissement à la TVA », détaille le document, rendu à l’été 2014 et révélé par Le Canard enchaîné à paraître mercredi 2 septembre.

    #travail #précarité

  • La pauvreté se concentre dans les villes-centres plus que dans les périphéries
    http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/06/02/la-pauvrete-se-concentre-dans-les-villes-centres-plus-que-dans-les-peripheri

    C’est dans les #centres-villes des grands pôles urbains que se concentre la #pauvreté en France, bien plus que dans les banlieues et les couronnes périurbaines. L’Insee livre, dans une étude publiée mardi 2 juin, une image détaillée et actualisée de la pauvreté, déjà esquissée dans son « Portrait social de la France » en novembre 2014. Et confirme qu’à rebours des thèses défendues par le géographe Christophe Guilluy en septembre 2014 dans son ouvrage La France périphérique (Flammarion, 18 euros), « la pauvreté est dans l’ensemble la plus forte dans les villes-centres des grandes aires urbaines ».

    Dans ces cœurs d’agglomération, 20 % des ménages en moyenne ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté. Le taux de pauvreté dans les villes-centres « atteint parfois deux à trois fois celui des banlieues et plus de quatre fois celui des couronnes périurbaines », souligne l’Insee. Plus on s’éloigne du centre, plus ce taux recule : il est de 14 % dans les proches banlieues, de 10 % environ dans les grandes couronnes.

    Dans les grands pôles urbains, les niveaux de vie médians « sont presque toujours plus élevés en banlieue qu’en ville-centre », souligne l’Insee. « Cela recouvre de grandes disparités : ces pôles urbains regroupent des villes hétérogènes, avec des populations aisées et de la pauvreté », précise Luc Brière, chef de la division statistiques régionales, locales et urbaines de l’Insee.

    « Revenu disponible »

    Pour établir ces statistiques basées sur les indicateurs de 2012 – les plus récents disponibles –, l’Insee a pu, pour la première fois, utiliser un fichier de #données_sociales et fiscales exhaustif, baptisé #Filosofi. Celui-ci croise les données fiscales issues de la direction des finances publiques et les données sur les #prestations_sociales fournies par les principaux organismes prestataires. « Ce fichier nous permet de nous baser sur le #revenu_disponible, et non seulement le revenu fiscal. Pour parler correctement de la pauvreté, il faut tenir compte aussi des prestations sociales reçues et des impôts payés, explique Luc Brière. Grâce à Filosofi, nous pouvons aussi travailler au niveau communal, et non plus seulement à une échelle départementale. »

    Alors que Christophe Guilluy, pour souligner la fracture entre des métropoles mondialisées et des territoires périphériques laissés pour compte, assurait que la question sociale se concentrait « de l’autre côté des métropoles, dans les espaces ruraux, les petites villes, les villes moyennes, dans certains espaces périurbains », l’étude de l’Insee montre au contraire une pauvreté limitée dans les communes situées aux portes des grandes aires urbaines.

    Et si les communes isolées, rurales ou peu denses situées en dehors de l’attraction d’un pôle urbain affichent un taux de pauvreté élevé – 17 % –, elles n’hébergent malgré tout que 5 % de la population pauvre en France. « Globalement, 77 % de la population pauvre réside dans les 230 grandes aires urbaines de métropole, dont 65 % dans les grands pôles urbains et 20 % dans l’aire urbaine de Paris » , résume l’Insee.

    De fortes inégalités

    Les villes-centres sont aussi celles qui concentrent les plus fortes inégalités. « Le niveau de vie au-dessus duquel se situent les 10 % de personnes les plus aisées est en moyenne plus de 4,4 fois supérieur à celui en dessous duquel se trouvent les 10 % les moins aisés », détaille l’Insee. A Paris, ce coefficient est même de 6,7 fois… contre un rapport de 3,5 fois en moyenne sur l’ensemble de la population.

    Dans ces cœurs d’agglomération, la part des revenus du patrimoine représente 30 % du revenu pour les 10 % les plus riches, quand la part des prestations sociales atteint 46 % du revenu des 10 % les plus pauvres.

    Sans surprise, ce sont les ménages jeunes, les familles nombreuses et les familles monoparentales qui sont le plus touchés par la pauvreté. Dans les villes-centres, 27 % des ménages jeunes, 35 % des familles monoparentales et 37 % des ménages de cinq personnes et plus vivent en situation de pauvreté. A l’inverse, là aussi, c’est dans les couronnes des grands pôles urbains que ces taux sont les plus faibles.
    A plus grande échelle, les statistiques issues du fichier Filosofi soulignent une pauvreté très élevée en Corse, Languedoc-Roussillon et Nord - Pas-de-Calais (autour de 20 %), tandis que le taux de pauvreté reste autour de 10 % en Bretagne et Pays de la Loire. L’Ile-de-France compte à la fois les départements ayant le plus fort et le plus faible taux de pauvreté (9 % dans les Yvelines, 27 % en Seine-Saint-Denis).

    Après des décennies d’éviction des prolos et pauvres, Paris est exemplaire de cette forte polarisation sociale des grandes villes, une ville riche faite pour les riches, avec une quantifié phénoménale de pauvres (environ 70 000 #Rsastes et 250 000 #CMU, pour ne prendre que ces deux indices). Bien sûr, la pauvreté n’est pas qu’affaire monétaire ; d’une part la structure des dépenses diffère (moins de bagneule, plus de loyer) et les ressources disponibles aussi. Pas de potager, mais des transports éventuellement gratuits, une "offre culturelle dont une part est gratuite (plus de concert dans plus d’église, plus de musée accessibles aux chômeurs, etc), et souvent plus de facilité à être employé dans ces villes. Bref, le dic de l’’Insee est une saisie partielle. On est pas près de savoir qui sont les « vrais pauvres »...

  • Protection sociale : pourquoi les plus riches touchent trois fois plus que les plus pauvres
    http://inegalites.fr/spip.php?page=analyse&id_article=2058&id_rubrique=64&id_mot=30&id_groupe=
    C’est surtout à cause des retraites

    Les 10 % les plus riches ont perçu 56 milliards de revenus redistribués en 2011 (17 % de l’ensemble), alors que 17 milliards (5 % de l’ensemble) sont allés aux 10 % les plus pauvres, selon les calculs du Centre d’observation de la société, réalisés à partir des données de l’Insee. Notre système social coûte cher, mais ses dépenses bénéficient d’abord aux plus aisés, qui reçoivent trois fois plus que les plus pauvres. Certes, cette distribution est plus équitable que celle des revenus. Même après impôts et prestations, les 10 % du haut de la pyramide reçoivent sept fois plus que ceux du bas.
    [...]

    Au total, les 10 % les plus riches ont perçu 52 milliards de pensions de retraites (21 % du total), contre 4,6 milliards (2 % du total) pour les plus démunis. C’est l’inverse pour les prestations sociales : les 10 % les plus pauvres ont touché 11 milliards, alors que les 10 % les plus riches n’en ont reçu que 1,3 milliard.

    A partir du moment où l’on pense qu’il est juste que les retraites soient proportionnelles aux salaires et donc aux cotisations versées [1], il n’est pas injuste que les plus aisés touchent davantage de pensions au final. Cette situation reflète l’inégalité de ces salaires dans la vie active, c’est donc elle que l’on doit juger juste ou pas.

    Notre modèle social est de qualité, mais cette qualité a un prix. Près des deux tiers de la différence de dépenses publiques entre la France et le reste de l’Europe vient des retraites [2]. La France ne dépense pas davantage que les autres pays pour les plus pauvres, mais pour maintenir les revenus des plus aisés, en particulier âgés. C’est une bonne chose. Pour l’essentiel ceci est dû au fait que le système de retraite français est public alors que le privé (non comptabilisé comme prélèvement obligatoire dans les autres pays) occupe une place plus grande ailleurs. La plupart de ceux qui dénoncent avec virulence l’excès de dépenses collectives de notre pays ne comprennent pas grand chose de ce dont ils parlent en réalité.


    #retraite #prestations_sociales #inégalités

  • « Fraude de survie » et chasse aux pauvres.
    CAF : un arsenal judiciaire adapté contre la fraude - 05/02/2015 - LaDepeche.fr
    http://www.ladepeche.fr/article/2015/02/05/2043490-caf-un-arsenal-judiciaire-adapte-contre-la-fraude.html

    « Nous avons mis en place des procédures internes pour identifier les fraudes, explique Daniel Chardenoux, le directeur de la #CAF. Nous avons deux #contrôleurs assermentés et deux personnes supplémentaires formées contre la falsification des documents. Nous avons de véritables outils numériques pour faire du #profilage. Dans le cadre de la #procédure, nous avons aussi accès aux #relevés_bancaires des suspects. À un moment ou à un autre, la fraude sera découverte. »

    D’autant que la CAF n’agit pas seule, mais dans un véritable réseau articulé autour du comité départemental de lutte contre la fraude, où se retrouvent la préfecture, les caisses sociales, #Pôle_Emploi, les impôts, le conseil général ainsi que les forces de l’ordre et le parquet.

    « Nous avons progressé dans la détection en resserrant le maillage entre organismes », explique Anne-Marie Castellot, responsable du service #prestations.

    « Pour une partie, il s’agit de fraude de survie que l’on peut comprendre mais pas accepter dans un pays déjà généreux en matière de droits sociaux , précise le directeur. Il ne faut pas que ces débordements délégitimisent tout le système. Il s’agit d’un petit travail non déclaré ou d’apparaître comme une personne seule alors qu’on vit en couple. »

    Le responsable évoque aussi des fraudes plus organisées via des sociétés écrans. Il pointe aussi deux motifs d’inquiétude et de vigilance :

    « Nous avons près d’1 M€ de situations douteuses ou problématiques, proches de la fraude. L’autre phénomène, c’est l’explosion des #dénonciations, dont la majorité d’ailleurs n’est finalement pas avérée. »

    200 dénonciations ont été reçues l’an dernier, la plupart par écrits anonymes. Pour Daniel Chardenoux, « cela témoigne d’un climat pas très sain et d’une moindre acceptation de ces situations considérées comme abusives. Il y a aussi la complexité du système qui nuit à son efficacité ». 30 prestations et pas moins de 17.000 règles de droit concernent la CAF. « Il faut simplifier ce cadre et disposer de réponses adaptées. »

    À la CAF, une commission gère les #sanctions à l’encontre des #fraudeurs qui sont mis en #recouvrement : soit un avertissement, soit une pénalité financière, soit la poursuite devant les tribunaux.

    « C’est là qu’intervient la convention avec le parquet, précise le directeur. Elle hiérarchise les implications des uns et des autres par rapport à l’importance de la fraude et à la situation des personnes. »

    Plusieurs réponses s’offrent alors à la justice : un rappel à la loi, une médiation pénale ou une sanction. Sur les 40.000 allocataires bigourdans, on n’a recensé que 89 fraudeurs en 2014.

    #police_des_conduites