• #Loi_immigration : l’accueil des étrangers n’est pas un fardeau mais une nécessité économique

    Contrairement aux discours répétés ad nauseam, le #coût des aides accordées aux immigrés, dont la jeunesse permet de compenser le vieillissement des Français, est extrêmement faible. Le #poids_financier de l’#immigration n’est qu’un #faux_problème brandi pour flatter les plus bas instincts.

    Quand les paroles ne sont plus audibles, écrasées par trop de contre-vérités et de mauvaise foi, il est bon parfois de se référer aux #chiffres. Alors que le débat sur la loi immigration va rebondir dans les semaines à venir, l’idée d’entendre à nouveau les sempiternels discours sur l’étranger qui coûte cher et prend nos emplois nous monte déjà au cerveau. Si l’on regarde concrètement ce qu’il en est, le coût de l’immigration en France, que certains présentent comme bien trop élevé, serait en réalité extrêmement faible selon les économistes. Pour l’OCDE, il est contenu entre -0,5% et +0,5% du PIB selon les pays d’Europe, soit un montant parfaitement supportable. Certes, les immigrés reçoivent davantage d’#aides que les autres (et encore, beaucoup d’entre elles ne sont pas réclamées) car ils sont pour la plupart dans une situation précaire, mais leur #jeunesse permet de compenser le vieillissement de la population française, et donc de booster l’économie.

    Eh oui, il est bien loin ce temps de l’après-guerre où les naissances explosaient : les bébés de cette période ont tous pris leur retraite ou sont en passe de le faire et, bientôt, il n’y aura plus assez de jeunes pour abonder les caisses de #retraite et d’#assurance_sociale. Sans compter que, vu l’allongement de la durée de vie, la question de la dépendance va requérir énormément de main-d’œuvre et, pour le coup, devenir un véritable poids financier. L’immigration, loin d’être un fardeau, est bien une #nécessité si l’on ne veut pas voir imploser notre modèle de société. Les Allemands, eux, l’assument haut et fort : ils ont besoin d’immigrés pour faire tourner le pays, comme l’a clamé le chancelier Olaf Scholz au dernier sommet économique de Davos. Le poids financier de l’immigration est donc un faux problème brandi par des politiques qui ne pensent qu’à flatter les plus bas instincts d’une population qui craint que l’avenir soit pire encore que le présent. On peut la comprendre, mais elle se trompe d’ennemi.

    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/loi-immigration-laccueil-des-etrangers-nest-pas-un-fardeau-mais-une-neces
    #économie #démographie #France #migrations

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    voir aussi cette métaliste sur le lien entre #économie (et surtout l’#Etat_providence) et la #migration... des arguments pour détruire l’#idée_reçue : « Les migrants profitent (voire : viennent POUR profiter) du système social des pays européens »...
    https://seenthis.net/messages/971875

    ping @karine4

    • Sur les #prestations_sociales aux étrangers, la #contradiction d’#Emmanuel_Macron

      Le pouvoir exécutif vante une loi « immigration » qui concourt à une meilleure intégration des « travailleurs » et soutient « ceux qui travaillent ». Mais la restriction des droits sociaux pour les non-Européens fragilise le système de #protection_sociale.

      Depuis son adoption au Parlement, la loi relative à l’immigration est présentée par Emmanuel Macron et par le gouvernement comme fidèle à la doctrine du « #en_même_temps ». D’un côté, le texte prétend lutter « contre les #passeurs » et l’entrée illicite d’étrangers dans l’Hexagone. De l’autre, il viserait à « mieux intégrer ceux qui ont vocation à demeurer sur notre sol » : les « réfugiés, étudiants, chercheurs, travailleurs ». En s’exprimant ainsi dans ses vœux à la nation, le 31 décembre 2023, le président de la République a cherché à montrer que la #réforme, fruit d’un compromis avec les élus Les Républicains, et inspirée par endroits du logiciel du Rassemblement national, conciliait #fermeté et #humanisme.

      Mais cette volonté d’#équilibre est contredite par les mesures concernant les prestations sociales. En réalité, le texte pose de nouvelles règles qui durcissent les conditions d’accès à plusieurs droits pour les étrangers non ressortissants de l’Union européenne, en situation régulière, ce qui risque de plonger ces personnes dans le dénuement.

      Un premier régime est créé, qui prévoit que l’étranger devra soit avoir résidé en France depuis au moins cinq ans, soit « justifier d’une durée d’affiliation d’au moins trente mois au titre d’une activité professionnelle » – sachant que cela peut aussi inclure des périodes non travaillées (chômage, arrêt-maladie). Ce « #délai_de_carence » est une nouveauté pour les aides visées : #allocations_familiales, prestation d’accueil du jeune enfant, allocation de rentrée scolaire, complément familial, allocation personnalisée d’autonomie, etc.

      « #Régression considérable »

      Un deuxième régime est mis en place pour les #aides_personnelles_au_logement (#APL) : pour les toucher, l’étranger devra soit être titulaire d’un visa étudiant, soit être établi sur le territoire depuis au moins cinq ans, soit justifier d’une « durée d’affiliation d’au moins trois mois au titre d’une activité professionnelle ». Là aussi, il s’agit d’une innovation. Ces critères plus stricts, précise la loi, ne jouent cependant pas pour ceux qui ont obtenu le statut de réfugié ou détiennent la carte de résident.

      Le 19 décembre 2023, Olivier Dussopt, le ministre du travail, a réfuté la logique d’une #discrimination entre nationaux et étrangers, et fait valoir que le texte établissait une « #différence » entre ceux qui travaillent et ceux qui ne travaillent pas, « qu’on soit français ou qu’on soit étranger ». « Nous voulons que celles et ceux qui travaillent soient mieux accompagnés », a-t-il ajouté, en faisant allusion au délai de carence moins long pour les étrangers en emploi que pour les autres. Une présentation qui omet que le nouveau régime ne s’applique qu’aux résidents non européens, et laisse penser que certains étrangers mériteraient plus que d’autres d’être couverts par notre #Etat-providence.

      Alors que la loi est censée faciliter – sous certaines conditions – l’#intégration de ressortissants d’autres pays, des spécialistes de la protection sociale considèrent que les mesures sur les prestations tournent le dos à cet objectif. « Les délais de carence vont totalement à l’encontre de l’intégration que l’on prétend viser », estime Michel Borgetto, professeur émérite de l’université Paris Panthéon-Assas. Ils risquent, d’une part, de « précipiter dans la #précarité des personnes confrontées déjà à des #conditions_de_vie difficiles, ce qui aura pour effet d’accroître le nombre de #travailleurs_pauvres et de #mal-logés, voire de #sans-abri, relève-t-il. Ils sont, d’autre part, susceptibles de se révéler largement contre-productifs et terriblement néfastes, poursuit le spécialiste du droit de la #sécurité_sociale, dans la mesure où les étrangers en situation régulière se voient privés des aides et accompagnements nécessaires à leur insertion durable dans la société, dans les premiers mois ou années de leur vie en France. C’est-à-dire, en fait, au moment même où ils en ont précisément le plus besoin… »

      Maîtresse de conférences en droit social à l’université Lyon-II, Laure Camaji tient à rappeler que les prestations visées constituent des « #droits_universels, attribués depuis des décennies en raison de la résidence sur le territoire ». « Cela fait bien longtemps – depuis une loi de 1975 – que le droit aux #prestations_familiales n’est plus lié à l’exercice d’une #activité_professionnelle, souligne-t-elle. C’est un principe fondamental de notre système de sécurité sociale, un #acquis majeur qui forme le socle de notre #pacte_social, tout comme l’est l’#universalité de la #couverture_maladie, de la prise en charge du #handicap et de la #dépendance, du droit au logement et à l’#hébergement_d’urgence. »

      A ses yeux, le texte entraîne une « régression considérable » en instaurant une « #dualité de régimes entre les Français et les Européens d’un côté, les personnes non ressortissantes de l’Union de l’autre ». L’intégralité du système de protection sociale est fragilisée, « pour tous, quelle que soit la nationalité, l’origine, la situation familiale, puisque l’universalité n’est plus le principe », analyse-t-elle.

      Motivation « idéologique »

      Francis Kessler, maître de conférences à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, ne comprend pas « la logique à l’œuvre dans cette loi, sauf à considérer qu’il est illégitime de verser certaines prestations à une catégorie de la population, au motif qu’elle n’a pas la nationalité française, ou que les étrangers viennent en France pour toucher des aides – ce qu’aucune étude n’a démontré ». En réalité, complète-t-il, la seule motivation de cette loi est « idéologique » : « Elle repose très clairement sur une idée de “#préférence_nationale” et place notre pays sur une pente extrêmement dangereuse. »

      Toute la question, maintenant, est de savoir si les dispositions en cause seront validées par le #Conseil_constitutionnel. L’institution de la rue de Montpensier a été saisie par la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, ainsi que par des députés et sénateurs de gauche, notamment sur les restrictions des #aides_financières aux étrangers. Les parlementaires d’opposition ont mis en avant le fait que les délais de carence violaient – entre autres – le #principe_d’égalité. Plusieurs membres du gouvernement, dont la première ministre, Elisabeth Borne, ont reconnu que des articles du texte, comme celui sur les APL, pouvaient être jugés contraires à la Loi fondamentale. Le Conseil constitutionnel rendra sa décision avant la fin du mois de janvier.

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/01/05/sur-les-prestations-sociales-aux-etrangers-la-contradiction-d-emmanuel-macro
      #Macron #loi_immigration #accès_aux_droits

  • Pour le chercheur Antoine Math, « il s’agit d’une #préférence_nationale déguisée »

    Mediapart : Est-ce un changement de nature du versement des prestations sociales avec un #délai_de_carence étendu de six mois à cinq ans ou est-ce que ce texte signe un rapprochement du concept de préférence nationale ?

    Antoine Math : Il s’agit d’une préférence nationale déguisée. L’objectif, ou les effets recherchés, de la préférence nationale, c’est d’exclure les étrangers du seul fait d’être #étrangers. Cette fois-ci, vous atteignez presque la même chose si vous édictez une condition de plus en plus difficile à remplir pour les personnes étrangères. C’est extrêmement grave au regard du principe d’égalité.

    Cette condition d’antériorité de titre de séjour a pour fonction de fait de se substituer à une préférence nationale, qui, elle, est formellement et juridiquement impossible au regard de la Constitution actuelle et des engagements de la France, notamment la Convention européenne des droits de l’homme. Comme on ne peut pas exclure tous les étrangers, on fait en sorte d’en exclure une proportion toujours plus grande pour se rapprocher des effets de la préférence nationale.

    Cette condition ne va pas de soi et va conduire à exclure même des personnes étrangères remplissant cette condition. En effet, le moindre renouvellement de #titre_de_séjour peut prendre plus longtemps que prévu [ah oui...]. Il suffit d’avoir une rupture administrative de quelques jours le temps de décrocher un rendez-vous ou une convocation à la préfecture, ou de recevoir un récépissé ou une attestation de demande de titre ou de renouvellement de titre, pour que tous les compteurs soient remis à zéro, que l’on considère que la personne ne remplit plus la condition d’antériorité de séjour régulier de façon continue. Le fonctionnement de cette condition est connu puisqu’on a l’expérience avec le #RSA, avec la #prime_d’activité ou le #minimum_vieillesse.

    Donc, on a des gens, ils sont là parfois depuis 20 ans, en situation régulière, et ils sont pourtant exclus. 

    En outre, quand vous disposez d’un titre de séjour, par exemple une carte de résident d’une durée de validité de 10 ans qui vous a été attribuée ou renouvelée il y a 2 ans, vous pouvez justifier avec cette carte d’une antériorité de séjour régulier de 2 ans, mais pas de 5 ans. Or, pour le justifier, vous ne disposez plus des titres de séjour précédents que vous avez rendus à la préfecture lors du renouvellement. Donc si vous n’avez pas eu la présence d’esprit de conserver des photocopies ou des scans, ou que vous les avez perdus, vous ne pouvez justifier de cette condition.

    Le parti Les Républicains (LR) colle au programme du RN, qui se félicite de cette victoire idéologique, et les parlementaires de Renaissance donnent du crédit à cela, c’est un changement de paradigme important, comment en est-on arrivé là ?

    On dit souvent que le problème n’est pas seulement le bruit des bottes mais aussi le silence des pantoufles. Mais je crois qu’entre les deux, il y a aussi les lâchetés de tous ceux qui ont bénéficié, au moins à un moment, de la voix ou du pouvoir, y compris à #gauche.

    Ce projet de loi vient de loin, ça fait longtemps que les esprits sont préparés. En 2004 par exemple, la première loi Sarkozy sur l’#immigration fait passer cette condition de séjour régulier de trois à cinq ans pour pouvoir toucher le #RSA (RMI à l’époque). En 2006, cette condition de cinq ans est étendue au minimum invalidité et au minimum vieillesse. En 2012, un amendement a fait passer de cinq à dix ans la condition d’antériorité de titre de séjour pour le minimum invalidité et le minimum vieillesse.

    La même année, le RSA est introduit à Mayotte en 2012, mais avec une condition portée à 15 ans. Idem pour percevoir l’allocation adulte handicapé et le minimum vieillesse. En Guyane, comme dans l’hexagone, la condition d’antériorité de titres de séjours pour percevoir le RSA est de 5 ans.

    Sauf qu’en 2018, cette majorité a fait voter au Parlement, lors du projet de loi de finances, une disposition pour porter cette durée à 15 ans. Cette disposition a finalement été censurée par le Conseil constitutionnel. Mais cet épisode témoigne bien que le basculement ne s’est pas produit hier. Les esprits ont été contaminés, bien au-delà de l’extrême droite et de la droite depuis un certain temps.

    [A.M. préserve la gauche au cas où elle puisse servir à quelque chose. C’est 1988, en fait https://seenthis.net/messages/1032496#message1032561]

    Qu’est-ce que la mise en œuvre de cette loi pourrait changer avec l’impossibilité de toucher les prestations sociales dans un délai raisonnable ?

    Concrètement, cela va générer un grand désordre avec une mise en œuvre infernale et des #démarches_infinies. Car, au regard des textes internationaux, il y aura des personnes épargnées de cette restriction grâce à des textes internationaux les protégeant et exigeant l’égalité de traitement ou la non-discrimination. On peut citer le cas des Algériens, déjà non concernés par les restrictions existantes pour l’accès au RSA, à la prime d’activité ou au minimum vieillesse.
    Si la mesure est appliquée, les personnes vont aussi devoir conserver des copies de tous leurs titres de séjour – qui sont rendus à la préfecture à chaque renouvellement – pour prouver qu’ils sont en France depuis un certain nombre d’années. Ceux qui ne savent pas qu’il faut tout archiver ou qui vont perdre ces documents ne vont pouvoir prétendre à aucune allocation.

    Sans compter la paupérisation accentuée de cette population déjà fragilisée…

    C’est évident, cela va être catastrophique pour les personnes concernées et leur entourage. Cela va priver des familles et des enfants de prestations sociales. Cela va conduire des familles à ne plus pouvoir se loger, à ne plus pouvoir payer le #loyer, à subir des #expulsions en raison des impayés. On peut imaginer qu’il y ait une proportion assez importante des quartiers populaires qui soient touchés. Ils n’ont pas besoin de se voir tailler davantage dans leurs droits et dans leurs ressources.

    Puis, ça instille dans les esprits l’idée que le #principe_d’égalité est plus que secondaire dès lors qu’on parle de personnes étrangères. Cette réforme est une étape supplémentaire dans la mise de côté des principes élémentaires qui président à notre système de #protection_sociale, en particulier l’égalité des #droits ou l’#universalité_[orique]_. Et cette dégradation risque d’être suivie, derrière, d’autres étapes, encore bien pires, de manière graduelle.

    On épargne certaines catégories, celles et ceux qui ont un #emploi, avec cette idée qu’il y aurait d’un côté les méritants et de l’autre les #assistés #fraudeurs.

    Ce projet de loi omet de prendre en compte le fait que les étrangers contribuent au système social par leur travail ou leurs impôts. Au-delà de la philosophie de la mesure, c’est foncièrement injuste de les priver des prestations sociales…

    Ce sont des arguties [que Mediapart et une gauche du macronisme soudés par l’idéologie du travail cultivent] pour justifier les restrictions et se draper derrière une forme de rationalité. On emprunte un discours de légitimation des droits, certains ayant un caractère contributif car au moins en partie financés par les cotisations des bénéficiaires qui pourraient être un peu épargnés, et d’autres droits, considérés comme moins contributifs, pour lesquels on pourrait opérer tout type de restriction et de discrimination.

    Depuis les restrictions introduites en 1993, il ne suffit pas de cotiser ou d’avoir cotisé pour bénéficier de prestations d’assurances sociales – vieillesse, maladie, invalidité, etc. - dès lors que vous êtes étranger.
    Par exemple, aujourd’hui, même si vous avez travaillé et cotisé pendant 40 ans et que, pour une raison X ou Y, vous n’avez pas de titre de séjour au moment où vous partez à la retraite (soit que vous avez eu un problème lors d’un renouvellement, soit qu’après être parti de France, vous êtes revenu justement pour faciliter la liquidation de votre retraite), vous ne toucherez pas votre #retraite tant que vous n’aurez pas de titre de séjour. Peu importe que vous ayez cotisé pendant des années.

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/191223/pour-le-chercheur-antoine-math-il-s-agit-d-une-preference-nationale-deguis

    #AAH

  • #Bras_d’honneur d’Eric #Dupond-Moretti : « Le #délit d’#outrage pourrait être caractérisé à l’encontre du #garde_des_sceaux »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/03/09/bras-d-honneur-d-eric-dupond-moretti-le-delit-d-outrage-pourrait-etre-caract

    #insulteur_insulté
    #auto_legiferation

    « Les parlementaires et les élus locaux sont, par leur engagement et le mandat qu’ils détiennent, les représentants de la démocratie nationale et locale. Ils occupent une place fondamentale dans le fonctionnement de nos institutions et toute atteinte à leur encontre constitue également une atteinte au pacte républicain » : c’est par ces mots vibrants qu’Eric Dupond-Moretti, en sa qualité de garde des sceaux, commence sa circulaire du 7 décembre 2020 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l’encontre des personnes investies d’un mandat électif.

    Ironie du sort : un peu plus de deux années plus tard, le ministre de la justice s’est mis en situation d’être rattrapé par sa propre circulaire. En effet, en reconnaissant avoir effectué, en plein Hémicycle, deux bras d’honneur en réaction aux propos d’Olivier Marleix, président du groupe des députés Les Républicains (LR), le garde des sceaux pourrait s’exposer à des poursuites pour outrage devant la Cour de justice de la République. D’un point de vue juridique, la démonstration en est très simple.

    Pour commencer, l’article 433-5 du code pénal prévoit que « constituent un outrage puni de 7 500 euros d’amende les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie ».

    [...]

    Si aucune poursuite ne devait avoir lieu, on retiendra que, chaque année, plusieurs de nos concitoyens sont condamnés pour avoir adressé des doigts d’honneur à des personnes chargées d’une mission de service public ou dépositaires de l’autorité publique, sans bénéficier d’un tel traitement de faveur, et parfois en s’appuyant sur une circulaire émanant du garde des sceaux lui-même…

    En plus de faire mal à la #République, cette #affaire serait aussi un #bras_d’honneur au #principe_d’égalité_des_citoyens_devant_la_justice.

  • #Retraites : le #Conseil_d'Etat étrille le #gouvernement

    Manque de « précision », projections économiques « lacunaires »... Dans son #avis rendu public ce vendredi, la plus haute juridiction administrative estime en outre ne pas avoir eu « les délais de réflexion nécessaires pour garantir au mieux la #sécurité_juridique ».

    Voilà qui ne va pas arranger les affaires du gouvernement. A peine a-t-il fait adopter ce vendredi en Conseil des ministres ses deux projets de loi destinés à créer un régime universel de retraite par points que le Conseil d’Etat, dans son avis (https://www.conseil-etat.fr/ressources/avis-aux-pouvoirs-publics/derniers-avis-publies/avis-sur-un-projet-de-loi-organique-et-un-projet-de-loi-instituant-un-s) publié ce même jour dézingue la manière dont l’exécutif a bouclé ces deux textes qui doivent être examinés à partir du 3 février à l’Assemblée nationale. La majorité comptait dans les prochains jours s’appuyer sur l’imposante étude d’impact (plus de 1000 pages : https://www.liberation.fr/france/2020/01/24/travailler-plus-le-credo-social-douteux-du-gouvernement_1775134) pour enfin apporter des chiffres et convaincre du caractère « massivement redistributif » de cette réforme, elle va devoir, ces prochains jours, répondre aux mises en garde de la plus haute instance administrative française, pourtant peu connue pour sa rébellion…

    Cette fameuse « #étude_d’impact » ? Elle est jugée « insuffisante » pour « certaines dispositions », ne répondant pas « aux exigences générales d’#objectivité et de #sincérité » et manquant de « précision », pour notamment – et ce n’est pas rien – « vérifier que cette réforme est financièrement soutenable ». « Le Conseil d’Etat constate que les #projections_financières ainsi transmises restent lacunaires et que, dans certains cas, cette étude reste en deçà de ce qu’elle devrait être », peut-on lire dès les premières pages de l’avis. Et les conseillers de poursuivre : « Il incombe au gouvernement de l’améliorer encore avant le dépôt du #projet_de_loi au Parlement, poursuivent les magistrats, en particulier sur les différences qu’entraînent les changements législatifs sur la situation individuelle des assurés et des employeurs, l’impact de l’âge moyen plus avancé de départ à la retraite […] sur le taux d’emploi des seniors, les dépenses d’assurance-chômage et celles liées aux minima sociaux ». Rien que ça.

    Soufflante

    Par ailleurs, si les juristes se félicitent des longues « concertations » menées depuis le printemps 2018, ils regrettent l’« #urgence » des avis demandés aux différents organismes compétents en la matière et se couvrent en cas d’#inconstitutionnalité du texte. Selon eux, l’empressement du gouvernement à vouloir leur avis en trois semaines pour présenter ces projets de loi en Conseil des ministres cette semaine, ainsi que les nombreux ajouts en cours de route n’ont « pas mis à même (le Conseil d’Etat) de mener sa mission avec la sérénité et les délais de réflexion nécessaires pour garantir au mieux la sécurité juridique de l’examen auquel il a procédé ». « Cette situation est d’autant plus regrettable, poursuivent-ils, que les projets de loi procèdent à une réforme du système de retraite inédite depuis 1945 et destinée à transformer pour les décennies à venir un système social qui constitue l’une des composantes majeures du #contrat_social ». En langage juridique, c’est bel et bien une soufflante.

    Le Conseil d’Etat torpille au passage le #slogan_présidentiel (« chaque euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous ») : cet « objectif […] reflète imparfaitement la complexité et la diversité des #règles_de_cotisation ou d’ouverture de #droits définies par le projet de loi ». Il doute également de la « #lisibilité » revendiquée par le gouvernement puisque « le choix d’une détermination annuelle de chacun des paramètres du système […] aura pour conséquence de limiter la #visibilité des assurés proches de la retraite sur les règles qui leur seront applicables ». Enfin, il raye carrément l’engagement que comptait prendre le gouvernement dans ce texte d’une promesse de #revalorisations des #enseignants et des #chercheurs pour qu’ils ne figurent pas dans le camp des perdants de cette réforme. « Sauf à être regardées, par leur imprécision, comme dépourvues de toute valeur normative, ces dispositions (sont) contraires à la #Constitution ». Au revoir…

    « Le projet de loi ne crée pas un régime universel »

    Autre risque constitutionnel : le trop-plein d’#ordonnances (29 en tout). « S’en remettre » à un tel instrument pour définir des « éléments structurants du nouveau système de retraite fait perdre la visibilité d’ensemble qui est nécessaire à l’appréciation des conséquences de la réforme », disent les juges. Plus embêtant encore pour le gouvernement, l’institution bat en brèche l’idée d’un grand soir de l’#universalité : « Le projet de loi ne crée pas un "#régime_universel de retraite" qui serait caractérisé, comme tout régime de #sécurité_sociale, par un ensemble constitué d’une population éligible unique, de règles uniformes et d’une caisse unique ». Aïe… Si le gouvernement crée bien le même système pour les salariés du public et du privé, il maintient à l’intérieur « cinq #régimes » (salariés ; fonctionnaires, magistrats et militaires ; salariés agricoles ; non-salariés agricoles ; marins) et « à l’intérieur de chacun de ces régimes créés ou maintenus », il met en place des « #règles_dérogatoires à celles du système universel ».

    L’exécutif va donc devoir bien mieux « justifier » pourquoi il garde ces « #différences_de_traitement […] entre assurés relevant du système universel de retraite et rattachés, le cas échéant, à des régimes distincts ». En tout cas, les navigants aériens qui pensaient avoir sauvé leur caisse complémentaire pour financer des départs anticipés sont rattrapés par le #principe_d’égalité : elle « serait ainsi la seule à bénéficier d’une compensation apportée par les ressources du système universel afin de financer à l’avenir des avantages de retraites propres », fait remarquer le Conseil pour qui « aucune différence de situation ni aucun motif d’#intérêt_général ne justifi(e) une telle #différence_de_traitement ». Conclusion : « Elle ne peut être maintenue dans le projet de loi. »

    Le gouvernement pourra néanmoins se rassurer en se disant que le nouvel « #âge_d’équilibre » qu’il compte instituer, le fonctionnement « en #points » proposé, les durées de transitions définies, la fin des régimes spéciaux, les droits familiaux, les mécanismes de réversion ou encore les compétences offertes à la future « gouvernance » dirigée par les partenaires sociaux devraient – sauf surprises – passer sans problème le cut du #Conseil_constitutionnel. A condition de résister aux oppositions parlementaires qui, elles, vont se nourrir des arguments du Conseil d’Etat pour réclamer un report ou l’abandon de cette réforme.

    https://www.liberation.fr/france/2020/01/25/retraites-le-conseil-d-etat-etrille-le-gouvernement_1775182
    #retraite #constitutionnalité #justice

  • #Féminicide : « Le #principe_d’égalité devant la loi s’oppose à ce que les crimes soient “genrés” »

    L’introduction du terme « féminicide » dans le #code_pénal nuirait à la clarté du #droit et donc à son efficacité, estime Céline Parisot, présidente de l’Union syndicale des magistrats, dans une tribune au « Monde ».

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/09/12/feminicide-le-principe-d-egalite-devant-la-loi-s-oppose-a-ce-que-les-crimes-
    #genre #justice #égalité

  • Le mauvais coup du fisc contre Mediapart - Page 1 | Mediapart
    http://www.mediapart.fr/journal/france/051115/le-mauvais-coup-du-fisc-contre-mediapart

    Traduction du #principe_d’égalité consacré tant par la #Constitution que par la Charte européenne des droits fondamentaux, le principe de neutralité fiscale interdit l’application d’une fiscalité différenciée à des activités de même nature. Alors que la #presse écrite, qu’elle soit imprimée ou en ligne, s’adresse aux mêmes lecteurs, le fisc crée une distorsion de concurrence en nous appliquant une #TVA près de dix fois supérieure à celle de nos concurrents imprimés. De plus, cette #distorsion_de_concurrence pénalise la presse numérique indépendante ayant choisi, par son modèle payant, de dépendre de ses seuls lecteurs tandis qu’elle avantage les sites de presse gratuits et publicitaires, adossés à la presse imprimée existante, bénéficiaire du taux réduit de 2,1 %.