• Dominique Costagliola : « J’ai reçu des menaces, mais si c’était à refaire je le referais » – L’Express
    https://www.lexpress.fr/sciences-sante/sciences/dominique-costagliola-jai-recu-des-menaces-mais-si-cetait-a-refaire-je-le-r
    https://www.lexpress.fr/resizer/obcHjmEfxcRvs9jCE5IRAM1uqvc=/1200x630/filters:focal(2752x1480:2762x1490)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/lexpress/EY5RPSGIZNC2NA6UYDMDG2GUEY.jpg

    Avez-vous l’impression que votre combat en faveur de la rationalité et la méthode scientifique a porté ses fruits ? Accorde-t-on aujourd’hui plus d’importance à ces questions ?

    Je ne suis pas convaincue que l’on ait fait beaucoup de progrès, notamment parce que des comportements qui auraient dû être punis ne l’ont pas été. Il est sidérant qu’une enquête ait pu être lancée contre moi sans aucune base, alors que des chercheurs qui n’ont pas respecté les lois relatives aux études sur la personne humaine n’ont subi aucune conséquence d’aucun type.

    Qu’auriez-vous attendu ?

    Que l’on punisse ceux qui étaient punissables ! Quand des gens ne respectent pas la loi, il est logique qu’ils soient incriminés. Or il ne s’est rien passé. Je parle de scientifiques dont certains sont toujours en poste. C’est incompréhensible.

  • Quand le #comité_d’éthique du #CNRS se penche sur l’#engagement_public des chercheurs et chercheuses

    #Neutralité ? #Intégrité ? #Transparence ?

    Le Comité d’éthique du CNRS rappelle qu’il n’y a pas d’#incompatibilité de principe, plaide pour un « guide pratique de l’engagement » et place la direction de l’institution scientifique devant les mêmes obligations que les chercheurs.

    Avec la crise climatique, la pandémie de covid-19, l’accroissement des inégalités, le développement de l’intelligence artificielle ou les technologies de surveillance, la question de l’#engagement public des chercheurs est d’autant plus visible que les réseaux sociaux leur permettent une communication directe.

    Cette question dans les débats de société n’est pas nouvelle. De l’appel d’#Albert_Einstein, en novembre 1945, à la création d’un « #gouvernement_du_monde » pour réagir aux dangers de la #bombe_atomique à l’alerte lancée par #Irène_Frachon concernant le #Médiator, en passant par celle lancée sur les dangers des grands modèles de langage par #Timnit_Gebru et ses collègues, les chercheurs et chercheuses s’engagent régulièrement et créent même des sujets de #débats_publics.

    Une question renouvelée dans un monde incertain

    Le #comité_d'éthique_du_CNRS (#COMETS) ne fait pas semblant de le découvrir. Mais, selon lui, « face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée ». Il s’est donc auto-saisi pour « fournir aux chercheurs des clés de compréhension et des repères éthiques concernant l’engagement public » et vient de publier son #rapport sur le sujet [PDF].

    Il faut dire que les deux premières années du Covid-19 ont laissé des traces dans la communauté scientifique sur ces questions de prises de paroles des chercheurs. Le COMETS avait d’ailleurs publié en mai 2021 un avis accusant Didier Raoult alors que la direction du Centre avait rappelé tardivement à l’ordre, en août de la même année, et sans le nommer, le sociologue et directeur de recherche au CNRS Laurent Mucchielli, qui appelait notamment à suspendre la campagne de vaccination.

    Le COMETS relève que les chercheurs s’engagent selon des modalités variées, « de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog ». Il souligne aussi que les #réseaux_sociaux ont « sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés ».

    La présidente du comité d’éthique, Christine Noiville, égrène sur le site du CNRS, les « interrogations profondes » que ces engagements soulèvent :

    « S’engager publiquement, n’est-ce pas contraire à l’exigence d’#objectivité de la recherche ? N’est-ce pas risquer de la « politiser » ou de l’« idéologiser » ? S’engager ne risque-t-il pas de fragiliser la #crédibilité du chercheur, de mettre à mal sa réputation, sa carrière ? Est-on en droit de s’engager ? Pourrait-il même s’agir d’un devoir, comme certains collègues ou journalistes pourraient le laisser entendre ? »

    Pas d’incompatibilité de principe

    Le comité d’éthique aborde les inquiétudes que suscite cet engagement public des chercheurs et pose franchement la question de savoir s’il serait « une atteinte à la #neutralité_scientifique ? ». Faudrait-il laisser de côté ses opinions et valeurs pour « faire de la « bonne » science et produire des connaissances objectives » ?

    Le COMETS explique, en s’appuyant sur les travaux de l’anthropologue #Sarah_Carvallo, que ce concept de neutralité est « devenu central au XXe siècle, pour les sciences de la nature mais également pour les sciences sociales », notamment avec les philosophes des sciences #Hans_Reichenbach et #Karl_Popper, ainsi que le sociologue #Max_Weber dont le concept de « #neutralité_axiologique » – c’est-à-dire une neutralité comme valeur fondamentale – voudrait que le « savant » « tienne ses #convictions_politiques à distance de son enseignement et ne les impose pas subrepticement ».

    Mais le comité explique aussi, que depuis Reichenbach, Popper et Weber, la recherche a avancé. Citant le livre d’#Hilary_Putnam, « The Collapse of the Fact/Value Dichotomy and Other Essays », le COMETS explique que les chercheurs ont montré que « toute #science s’inscrit dans un #contexte_social et se nourrit donc de #valeurs multiples ».

    Le comité explique que le monde de la recherche est actuellement traversé de valeurs (citant le respect de la dignité humaine, le devoir envers les animaux, la préservation de l’environnement, la science ouverte) et que le chercheur « porte lui aussi nécessairement des valeurs sociales et culturelles dont il lui est impossible de se débarrasser totalement dans son travail de recherche ».

    Le COMETS préfère donc insister sur les « notions de #fiabilité, de #quête_d’objectivité, d’#intégrité et de #rigueur de la #démarche_scientifique, et de transparence sur les valeurs » que sur celle de la neutralité. « Dans le respect de ces conditions, il n’y a aucune incompatibilité avec l’engagement public du chercheur », assure-t-il.

    Liberté de s’engager... ou non

    Il rappelle aussi que les chercheurs ont une large #liberté_d'expression assurée par le code de l’éducation tout en n’étant pas exemptés des limites de droit commun (diffamation, racisme, sexisme, injure ...). Mais cette liberté doit s’appliquer à double sens : le chercheur est libre de s’engager ou non. Elle est aussi à prendre à titre individuel, insiste le COMETS : la démarche collective via les laboratoires, sociétés savantes et autres n’est pas la seule possible, même si donner une assise collective « présente de nombreux avantages (réflexion partagée, portée du message délivré, moindre exposition du chercheur, etc.) ».

    Le comité insiste par contre sur le fait que, lorsque le chercheur s’engage, il doit « prendre conscience qu’il met en jeu sa #responsabilité, non seulement juridique mais aussi morale, en raison du crédit que lui confère son statut et le savoir approfondi qu’il implique ».

    Il appuie aussi sur le fait que sa position privilégiée « crédite sa parole d’un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser ».

    Des #devoirs lors de la #prise_de_parole

    Outre le respect de la loi, le COMETS considère, dans ce cadre, que les chercheurs et chercheuses ont des devoirs vis-à-vis du public. Notamment, ils doivent s’efforcer de mettre en contexte le cadre dans lequel ils parlent. S’agit-il d’une prise de parole en nom propre ? Le thème est-il dans le domaine de compétence du chercheur ? Est-il spécialiste ? A-t-il des liens d’intérêts ? Quelles valeurs sous-tendent son propos ? Le #degré_de_certitude doit aussi être abordé. Le Comité exprime néanmoins sa compréhension de la difficulté pratique que cela implique, vu les limites de temps de paroles dans les médias.

    Une autre obligation qui devrait s’appliquer à tout engagement de chercheurs selon le COMETS, et pas des moindres, est de l’asseoir sur des savoirs « robustes » et le faire « reposer sur une démarche scientifique rigoureuse ».

    Proposition de co-construction d’un guide

    Le COMETS recommande, dans ce cadre, au CNRS d’ « élaborer avec les personnels de la recherche un guide de l’engagement public » ainsi que des formations. Il propose aussi d’envisager que ce guide soit élaboré avec d’autres organismes de recherche.

    La direction du CNRS à sa place

    Le Comité d’éthique considère en revanche que « le CNRS ne devrait ni inciter, ni condamner a priori l’engagement des chercheurs, ni opérer une quelconque police des engagements », que ce soit dans l’évaluation des travaux de recherche ou dans d’éventuelles controverses provoquées par un engagement public.

    « La direction du CNRS n’a pas vocation à s’immiscer dans ces questions qui relèvent au premier chef du débat scientifique entre pairs », affirme-t-il. La place du CNRS est d’intervenir en cas de problème d’#intégrité_scientifique ou de #déontologie, mais aussi de #soutien aux chercheurs engagés « qui font l’objet d’#attaques personnelles ou de #procès_bâillons », selon lui.

    Le comité aborde aussi le cas dans lequel un chercheur mènerait des actions de #désobéissance_civile, sujet pour le moins d’actualité. Il considère que le CNRS ne doit ni « se substituer aux institutions de police et de justice », ni condamner par avance ce mode d’engagement, « ni le sanctionner en lieu et place de l’institution judiciaire ». Une #sanction_disciplinaire peut, par contre, être envisagée « éventuellement », « en cas de décision pénale définitive à l’encontre d’un chercheur ».

    Enfin, le Comité place la direction du CNRS devant les mêmes droits et obligations que les chercheurs dans son engagement vis-à-vis du public. Si le CNRS « prenait publiquement des positions normatives sur des sujets de société, le COMETS considère qu’il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent, etc. Cette prise de position de l’institution devrait pouvoir être discutée sur la base d’un débat contradictoire au sein de l’institution ».

    https://next.ink/985/quand-comite-dethique-cnrs-se-penche-sur-engagement-public-chercheurs-et-cherc

    • Avis du COMETS « Entre liberté et responsabilité : l’engagement public des chercheurs et chercheuses »

      Que des personnels de recherche s’engagent publiquement en prenant position dans la sphère publique sur divers enjeux moraux, politiques ou sociaux ne constitue pas une réalité nouvelle. Aujourd’hui toutefois, face aux nombreux défis auxquels notre société est confrontée, la question de l’engagement public des chercheurs s’est renouvelée. Nombre d’entre eux s’investissent pour soutenir des causes ou prendre position sur des enjeux de société – lutte contre les pandémies, dégradation de l’environnement, essor des technologies de surveillance, etc. – selon des modalités variées, de la signature de tribunes à la contribution aux travaux d’ONG ou de think tanks en passant par le soutien à des actions en justice ou l’écriture de billets de blog. Par ailleurs, le développement des médias et des réseaux sociaux a sensiblement renforcé l’exposition publique des chercheurs engagés.

      Dans le même temps, de forts questionnements s’expriment dans le monde de la recherche. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur les modalités de l’engagement public, son opportunité et son principe même. Ils se demandent si et comment s’engager publiquement sans mettre en risque leur réputation et les valeurs partagées par leurs communautés de recherche, sans déroger à la neutralité traditionnellement attendue des chercheurs, sans perdre en impartialité et en crédibilité. Ce débat, qui anime de longue date les sciences sociales, irrigue désormais l’ensemble de la communauté scientifique.

      C’est dans ce contexte que s’inscrit le présent avis. Fruit d’une auto-saisine du COMETS, il entend fournir aux chercheurs des clés de compréhension et des repères éthiques concernant l’engagement public.

      Le COMETS rappelle d’abord qu’il n’y a pas d’incompatibilité de principe entre, d’un côté, l’engagement public du chercheur et, de l’autre, les normes attribuées ou effectivement applicables à l’activité de recherche. C’est notamment le cas de la notion de « neutralité » de la science, souvent considérée comme une condition indispensable de production de connaissances objectives et fiables. Si on ne peut qu’adhérer au souci de distinguer les faits scientifiques des opinions, il est illusoire de penser que le chercheur puisse se débarrasser totalement de ses valeurs : toute science est une entreprise humaine, inscrite dans un contexte social et, ce faisant, nourrie de valeurs. L’enjeu premier n’est donc pas d’attendre du chercheur qu’il en soit dépourvu mais qu’il les explicite et qu’il respecte les exigences d’intégrité et de rigueur qui doivent caractériser la démarche scientifique.

      Si diverses normes applicables à la recherche publique affirment une obligation de neutralité à la charge du chercheur, cette obligation ne fait en réalité pas obstacle, sur le principe, à la liberté et à l’esprit critique indissociables du travail de recherche, ni à l’implication du chercheur dans des débats de société auxquels, en tant que détenteur d’un savoir spécialisé, il a potentiellement une contribution utile à apporter.

      Le COMETS estime que l’engagement public doit être compris comme une liberté individuelle et ce, dans un double sens :

      -- d’une part, chaque chercheur doit rester libre de s’engager ou non ; qu’il choisisse de ne pas prendre position dans la sphère publique ne constitue en rien un manquement à une obligation professionnelle ou morale qui lui incomberait ;

      -- d’autre part, le chercheur qui s’engage n’a pas nécessairement à solliciter le soutien de communautés plus larges (laboratoire, société savante, etc.), même si le COMETS considère que donner une assise collective à une démarche d’engagement présente de nombreux avantages (réflexion partagée, portée du message délivré, moindre exposition du chercheur, etc.).

      S’il constitue une liberté, l’engagement nécessite également pour le chercheur de prendre conscience qu’il met en jeu sa responsabilité, non seulement juridique mais aussi morale, en raison du crédit que lui confère son statut et le savoir approfondi qu’il implique. En effet, en s’engageant publiquement, le chercheur met potentiellement en jeu non seulement sa réputation académique et sa carrière, mais aussi l’image de son institution, celle de la recherche et, plus généralement, la qualité du débat public auquel il contribue ou qu’il entend susciter. Le chercheur dispose d’une position privilégiée qui crédite sa parole d’un poids particulier. Il doit mettre ce crédit au service de la collectivité et ne pas en abuser. Le COMETS rappelle dès lors que tout engagement public doit se faire dans le respect de devoirs.

      Ces devoirs concernent en premier lieu la manière dont le chercheur s’exprime publiquement. Dans le sillage de son avis 42 rendu à l’occasion de la crise du COVID-19, le COMETS rappelle que le chercheur doit s’exprimer non seulement en respectant les règles de droit (lois mémorielles, lois condamnant la diffamation, l’injure, etc.) mais aussi en offrant à son auditoire la possibilité de mettre son discours en contexte, au minimum pour ne pas être induit en erreur. A cet effet, le chercheur doit prendre soin de :

      situer son propos : parle-t-il en son nom propre, au nom de sa communauté de recherche, de son organisme de rattachement ? Quel est son domaine de compétence ? Est-il spécialiste de la question sur laquelle il prend position ? Quels sont ses éventuels liens d’intérêts (avec telle entreprise, association, etc.) ? Quelles valeurs sous-tendent son propos ? ;
      mettre son propos en perspective : quel est le statut des résultats scientifiques sur lesquels il s’appuie ? Des incertitudes demeurent-elles ? Existe-t-il des controverses ?

      Le COMETS a conscience de la difficulté pratique à mettre en œuvre certaines de ces normes (temps de parole limité dans les médias, espace réduit des tribunes écrites, etc.). Leur respect constitue toutefois un objectif vers lequel le chercheur doit systématiquement tendre. Ce dernier doit également réfléchir, avant de s’exprimer publiquement, à ce qui fonde sa légitimité à le faire.

      En second lieu, les savoirs sur lesquels le chercheur assoit son engagement doivent être robustes et reposer sur une démarche scientifique rigoureuse. Engagé ou non, il doit obéir aux exigences classiques d’intégrité et de rigueur applicables à la production de connaissances fiables – description du protocole de recherche, référencement des sources, mise à disposition des résultats bruts, révision par les pairs, etc. Le COMETS rappelle que ces devoirs sont le corollaire nécessaire de la liberté de la recherche, qui est une liberté professionnelle, et que rien, pas même la défense d’une cause, aussi noble soit-elle, ne justifie de transiger avec ces règles et de s’accommoder de savoirs fragiles. Loin d’empêcher le chercheur d’affirmer une thèse avec force dans l’espace public, ces devoirs constituent au contraire un soutien indispensable à l’engagement public auquel, sinon, il peut lui être facilement reproché d’être militant.

      Afin de munir ceux qui souhaitent s’engager de repères et d’outils concrets, le COMETS invite le CNRS à élaborer avec les personnels de la recherche un guide de l’engagement public. Si de nombreux textes existent d’ores et déjà qui énoncent les droits et devoirs des chercheurs – statut du chercheur, chartes de déontologie, avis du COMETS, etc. –, ils sont éparpillés, parfois difficiles à interpréter (sur l’obligation de neutralité notamment) ou complexes à mettre en œuvre (déclaration des liens d’intérêt dans les médias, etc.). Un guide de l’engagement public devrait permettre de donner un contenu lisible, concret et réaliste à ces normes apparemment simples mais en réalité difficiles à comprendre ou à appliquer.

      Le COMETS recommande au CNRS d’envisager l’élaboration d’un tel guide avec d’autres organismes de recherche qui réfléchissent actuellement à la question. Le guide devrait par ailleurs être accompagné d’actions sensibilisant les chercheurs aux enjeux et techniques de l’engagement public (dont des formations à la prise de parole dans les médias).

      Le COMETS s’est enfin interrogé sur le positionnement plus général du CNRS à l’égard de l’engagement public.

      Le COMETS considère que de manière générale, le CNRS ne devrait ni inciter, ni condamner a priori l’engagement des chercheurs, ni opérer une quelconque police des engagements. En pratique :

      – dans l’évaluation de leurs travaux de recherche, les chercheurs ne devraient pas pâtir de leur engagement public. L’évaluation de l’activité de recherche d’un chercheur ne devrait porter que sur ses travaux de recherche et pas sur ses engagements publics éventuels ;

      – lorsque l’engagement public conduit à des controverses, la direction du CNRS n’a pas vocation à s’immiscer dans ces questions qui relèvent au premier chef du débat scientifique entre pairs ;

      – le CNRS doit en revanche intervenir au cas où un chercheur contreviendrait à l’intégrité ou à la déontologie (au minimum, les référents concernés devraient alors être saisis) ou en cas de violation des limites légales à la liberté d’expression (lois mémorielles, lois réprimant la diffamation, etc.) ; de même, l’institution devrait intervenir pour soutenir les chercheurs engagés qui font l’objet d’attaques personnelles ou de procès bâillons.

      – au cas où un chercheur mènerait des actions de désobéissance civile, le CNRS ne devrait pas se substituer aux institutions de police et de justice. Il ne devrait pas condamner ex ante ce mode d’engagement, ni le sanctionner en lieu et place de l’institution judiciaire. A posteriori, en cas de décision pénale définitive à l’encontre d’un chercheur, le CNRS peut éventuellement considérer que son intervention est requise et prendre une sanction.

      Plus généralement, le COMETS encourage le CNRS à protéger et à favoriser la liberté d’expression de son personnel. Il est en effet de la responsabilité des institutions et des communautés de recherche de soutenir la confrontation constructive des idées, fondée sur la liberté d’expression.

      Si le CNRS venait à décider de s’engager en tant qu’institution, c’est-à-dire s’il prenait publiquement des positions normatives sur des sujets de société, le COMETS considère qu’il devrait respecter les règles qui s’appliquent aux chercheurs – faire connaître clairement sa position, expliciter les objectifs et valeurs qui la sous-tendent, etc. Cette prise de position de l’institution devrait pouvoir être discutée sur la base d’un débat contradictoire au sein de l’institution.

      Pour télécharger l’avis :
      https://comite-ethique.cnrs.fr/wp-content/uploads/2023/09/AVIS-2023-44.pdf

      https://comite-ethique.cnrs.fr/avis-du-comets-entre-liberte-et-responsabilite-engagement-public

      #avis

  • Trois journalistes de Radio France et Disclose à nouveau convoqués par la justice - L’Humanité
    https://www.humanite.fr/medias/armee-francaise/trois-journalistes-de-radio-france-et-disclose-a-nouveau-convoques-par-la-j

    Le journaliste Geoffrey Livolsi affirmait en décembre que « ces convocations sont une nouvelle tentative d’intimidation contre les journalistes enquêtant sur l’armée ». Il semble que cette nouvelle convocation lui donne raison. Son avocate, Me Virginie Marquet, relevait quant à elle que « les suites judiciaires en cours contre ces hauts gradés, directement liées aux révélations de l’enquête des journalistes, montrent que (les journalistes) ont bien agi dans le cadre de leur mission d’information. Ils ont ainsi permis au public d’avoir connaissance de ce sujet d’intérêt public mettant en cause des militaires soupçonnés de corruption et de favoritisme ». Ce qui est également puni par la loi…

  • Justice et #DrahiLeaks, une victoire pour le journalisme d’investigation | Reflets.info
    https://reflets.info/articles/justice-et-drahileaks-une-victoire-pour-le-journalisme-d-investigation

    Ce jeudi 19 janvier, la cour d’appel de Versailles a rendu son arrêt dans l’affaire qui opposait Reflets à Altice. La cour a estimé qu’il n’y avait pas lieu à référé au titre du dommage imminent. Elle infirme par ailleurs l’ordonnance du tribunal de commerce rendue le 6 octobre 2022 ordonnant de ne pas publier sur le site Reflets.info de nouvelles informations concernant Altice. La cour a très longuement motivé sa décision.

    En d’autres termes, Reflets remporte une victoire sur toute la ligne contre Altice et Patrick Drahi, mais aussi contre leur conseil Maître Ingrain et sa tentative de contourner le droit de la presse, comme il l’avait fait à l’encontre de Mediapart. Vous pouvez relire nos articles sur ce sujet précis ici, là et encore ici.

  • Bilan carbone TotalEnergies : le compte est [pas] bon ! | Greenpeace | 02.11.22

    https://www.greenpeace.fr/bilan-carbone-de-totalenergies-revelations

    Dans une nouvelle enquête, Greenpeace France révèle comment TotalEnergies a visiblement sous-évalué ses émissions de CO2 pour l’année 2019. D’après nos estimations, le groupe aurait émis quatre fois plus de gaz à effet de serre que les volumes déclarés. Un écart abyssal. Notre enquête vient jeter un énorme pavé dans la marre de la stratégie climat du groupe et de ses ambitions de neutralité carbone déjà peu crédibles.

    [...]
    Mise à jour du 4 novembre 2022 : suite à la publication de notre rapport, TotalEnergies menace de nous attaquer en justice, plutôt que de répondre sur le fond du problème, à savoir : la responsabilité de l’entreprise dans la crise climatique. Nous sommes tout à fait prêts à engager un débat judiciaire sur la réalité de l’impact climatique des activités de TotalEnergies. Pour rappel, nous avons nous-même assigné TotalEnergies en justice pour pratiques commerciales trompeuses en mars dernier.
    [...]
    nous avons saisi l’Autorité des marchés financiers (AMF), nous inscrivant ainsi à la suite d’une première saisine déposée par les associations Sherpa et Notre affaire à tous en mai 2020. Ces nouvelles estimations sur l’impact climatique réel de TotalEnergies et sa communication trompeuse sur ses engagements net zéro 2050 (qui fait déjà l’objet d’un recours) sont susceptibles de révéler des contradictions, inexactitudes et omissions sanctionnables.

    #pollueurs_pas_payeurs #foutage_de_gueule
    #procès_baillon aux corneilles sous la menace

  • Patrick Drahi ne nous fera pas taire !
    https://disclose.ngo/fr/article/patrick-drahi-ne-nous-fera-pas-taire

    Disclose dénonce aux côté de 73 médias indépendants et organisations de journaliste, la décision de justice obtenue par le milliardaire et son groupe Altice contre nos collègues de Reflets-info. Lire l’article

  • Une lanceuse d’alerte obligée de payer 125 000€ pour avoir révélé des pesticides dans des vins certifiés HVE
    https://lareleveetlapeste.fr/une-lanceuse-dalerte-condamnee-a-125-000e-damende-pour-avoir-revel

    Mercredi 10 novembre, la cour d’appel de Bordeaux n’a pas autorisé Valérie Murat, la porte-parole de l’association Alerte aux toxiques, le droit de faire appel de sa condamnation tant qu’elle n’aura pas réglé la totalité des 125000 euros d’amende infligée par le tribunal de Libourne le 25 février 2021. Elle avait été condamnée pour « dénigrement collectif à l’égard de la filière » du vin de Bordeaux, suite à sa révélation publique de résidus de pesticides dans des vins labellisés Haute Valeur Environnementale (HVE). Un exemple flagrant de « procédure-bâillon » qui remet en lumière la difficulté des lanceurs d’alerte à se faire entendre.

    #vin #bordeaux #pesticides #bâillon

    • Acharnement procédural ou décision inévitable contre l’appel de Valérie Murat pour dénigrement des vins de Bordeaux ?
      https://www.vitisphere.com/actualite-95271-acharnement-procedural-ou-decision-inevitable-contre-lap


      Dénonçant un « procès bâillon », l’activiste estime ce 10 novembre devantle CIVB que cette attaque judiciaire la vise personnellement.
      crédit photo : Alexandre Abellan (Vitisphere)

      Si la plus antiphyto des pasionarias attaque publiquement une décision de justice contraire à ses droits, des juristes évoquent un dossier répondant à une procédure somme toute classique.

      Froide, la machine judiciaire fait s’échauffer les esprits à Bordeaux. « C’est une décision historique : nous n’aurons pas le droit de faire appel » déclare ce 10 novembre Valérie Murat, la porte-parole de l’association Alerte Aux Toxiques (AAT), après la radiation par la première chambre civile de la cour d’appel de Bordeaux de l’appel de sa condamnation à 125 000 euros pour « dénigrement des vins de Bordeaux », avec une exécution provisoire au profit de 26 plaignants, dont le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB). « Pour faire appel, on nous oblige à payer les 125 000 € » indique la militante, ajoutant que « cela signifie tout d’abord que je n’ai pas les mêmes droits que n’importe quel justiciable français. C’était déjà une condamnation démesurée et orientée, c’est en plus aujourd’hui le droit d’appel le plus exorbitant jamais vu. »

      « Liberté d’expression ou droit des affaires ? » posent ce 15 novembre dans un communiqué six associations écologistes, qui « expriment fermement leur soutien à l’association Alerte Aux Toxiques et sa porte-parole Valérie Murat dont le droit à se défendre et à faire appel est aujourd’hui soumis à une clause financière totalement disproportionnée ». « Dans la patrie des droits de l’Homme, c’est une sorte de justice à deux vitesses qui s’instaure, selon les moyens financiers. Il est vrai qu’on a rarement vu une juridiction bordelaise contrarier le CIVB » renchérit le même jour un communiqué de presse de la Confédération Paysanne de Gironde, appelant à soutenir financièrement la militante, qui a deux ans pour régler le montant de sa condamnation. Ayant levé une cagnotte en ligne, Valérie Murat a déjà reçu 20 000 € de la part de 470 donateurs. Appellant à « résister aux lobbies » de la filière vin, ces financeurs soutiennent une « lanceuse d’alerte » contre une « condamnation abusive [qui] incite au soutien de cette femme courageuse qu’on voudrait museler ».

      C’était gagnable
      Dans le milieu judiciaire bordelais, des experts indiquent à Vitisphere qu’il n’y a pas d’empêchement anormal dans cette procédure, mais une application toute procédurale liée à des choix de la défense de Valérie Murat, qui aurait pu éviter cette procédure de radiation ouverte par le CIVB. « Après la condamnation, il était possible de saisir le premier président de la cour d’appel pour obtenir la suspension de l’exécution provisoire. C’était gagnable, en expliquant qu’il y avait des problèmes de fond, comme la condamnation pour dénigrement alors qu’il n’y avait pas d’activité commerciale [NDLA : ce qui a été plaidé en première instance] ou le fait que les revenus ne le permettent pas, ou ouvrir une situation d’urgence au fond… » indique une source judiciaire girondine, qui s’appuie sur l’article 3 du décret n°2019-1333 du 11 décembre 2019, et note au passage une question de recevabilité des plaignants (avec un « doublon » entre syndicats viticoles et la Fédération des Grands Vins de Bordeaux, FGVB, qui les réunit).

      Au-delà de ce choix, « la décision de radiation rendue ne présente aucun caractère exceptionnel, s’agissant d’une application classique des textes en la matière, dès lors que ni les condamnations pécuniaires, ni les injonctions ordonnées, ni les mesures de publicité n’ont été exécutées, sans que les appelants ne démontrent se trouver dans l’un des deux cas faisant obstacle à la radiation : démontrer que l’exécution leur est impossible ou qu’elle aurait des conséquences manifestement excessives pour qu’il y ait suspension de l’exécution » indique une autre source judiciaire, s’appuyant sur l’ordonnance rendue ce 10 novembre. Devant ces éléments, « les critiques de madame Murat ne paraissent pas fondées » note un avocat bordelais. « Elle peut faire appel, avec les mêmes droits que tous les justiciables, dans l’application de la loi » souligne la première source judiciaire.

  • Bolloré et le parti des porcs
    https://lundi.am/Bollore-et-le-parti-des-porcs

    Quelques anecdotes récentes du management par la terreur des chaînes TV du groupe Canal+ ont amené quelques médias, ainsi que pléthore d’intervenants sur les réseaux sociaux, à questionner le rôle de Bolloré dans le paysage médiatique français. Cette séquence s’est déroulée en deux actes, avec le licenciement d’un humoriste de Canal+ pour faire la satire d’un commentateur vedette du groupe, suivi de celui d’un journaliste sportif pour avoir montrer sa solidarité au premier ; un peu comme si tous deux avaient cru travailler pour un média indépendant où ils eussent leur mot à dire. Curieusement, en réaction, “l’esprit Charlie” n’a pas déferlé sur la France, avec son lot de caricatures de Vincent Bolloré, casque colonial vissé sur la tête et ministres lui léchant les parties intimes.

    L’épisode vient rappeler au grand-public que le management à la schlague est la marque de fabrique de Vincent Bolloré. Ce dernier montre ainsi une belle cohérence avec les idées qu’il promeut à travers ses employés, ces commentateurs de plateau dont l’avancement semble indexé sur leur degré de droitisation. Le souhait de voir un monde organisé comme une caserne est ainsi exprimée, chaque jour, chaque heure, chaque minute, par une entreprise régie comme une caserne.

  • Les eaux glacées du calcul égoïste — Assainissement non collectif : la faute des industriels, par Claude Réveillaut (*)
    http://www.eauxglacees.com/Assainissement-non-collectif-la,1947

    Par l’envoi de mises en demeure en rafales, assorties de menaces extravagantes, adressées à l’IRSTEA et à l’AFB (Agence Française de la Biodiversité qui a financé le suivi), ce syndicat prétendait tout simplement empêcher la publication des résultats de l’étude, rien moins !

    #spanc #eau #assainissement #procès_bâillon

  • Lanceurs d’alerte, journalistes, associations… face aux « procès baillon » intentés par les grandes entreprises | Mondialisation - Centre de Recherche sur la Mondialisation
    https://www.mondialisation.ca/lanceurs-dalerte-journalistes-associations-face-aux-proces-baillon-intentes-par-les-grandes-entreprises/5611315

    Si ces « procès bâillon » ne sont pas en soi une nouveauté, on observe une tendance inquiétante à leur prolifération. Les entreprises comme Bolloré ou Areva n’hésitent plus à poursuivre de simples blogueurs pour avoir mis en ligne un lien vers un article. Au-delà du droit de la diffamation, les entreprises rivalisent également d’inventivité pour trouver de nouveaux prétextes juridiques pour ennuyer leurs critiques – atteinte à la vie privée ou à la réputation, violation de la propriété intellectuelle, etc. Surtout, les poursuites tendent de plus en plus à cibler leurs critiques à titre individuel, et pour des sommes considérables. Inutile de rappeler que les multinationales disposent de ressources très largement supérieures aux individus ou aux petites organisations qu’elles tentent ainsi d’intimider…

    D’autres pays, confrontés à ce type de procédures, ont mis en place des garde-fous. C’est le cas du Québec, qui a adopté une loi visant à prévenir et sanctionner les abus de droit. C’est aussi le cas de l’Australie, qui a purement et simplement interdit les poursuites en diffamation aux organisations de plus de 10 salariés.

    #procès_bâillon #lanceurs_d'alertes #politique #droit #loi

  • Qu’est-ce qu’une SLAPP ? Une poursuite judiciaire stratégique contre la mobilisation publique
    http://parolecitoyenne.org/reflexe-juridique
    Les médias alternatifs faisant l’objet d’une multiplication des procédures judiciaires, notamment de journaux comme le Dauphiné Libéré, on pourra lire avec intérêt ce document québecois très complet pour les activistes. En France, l’exemple de référence de SLAPP est celle contre Denis Robert.
    http://parolecitoyenne.org/sites/citoyen.onf.ca/files/slapp_9.pdf

    L’acronyme SLAPP (strategic lawsuits against public participation) fait référence à une poursuite judiciaire intentée par un promoteur, une entreprise ou un intervenant public contre des citoyens ou citoyennes afin de limiter, circonscrire, empêcher ou pénaliser leur participation au débat public.
    La SLAPP se veut fondamentalement un outil d’intimidation
    judiciaire. Il s’agit essentiellement de sortir des opposants politiques d’une arène publique et politique pour les confiner dans une arène judiciaire privée. Pour ce faire, la partie plaignante affirme avoir subi un dommage quelconque afin de mobiliser les caractéristiques du système judiciaire – sa lenteur, son caractère excessivement onéreux, de même que le caractère formel, opaque et technique de la joute juridique – afin d’intimider des opposants, de les contraindre au silence, de détourner leurs énergies, ou de les punir pour avoir entrepris des actions politiques.