• Un magistrat ordonne la censure préalable d’une enquête de Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/politique/211122/un-magistrat-ordonne-la-censure-prealable-d-une-enquete-de-mediapart

    Vendredi 18 novembre, un huissier est venu au siège de Mediapart nous délivrer un acte judiciaire sans précédent de mémoire de journaliste comme de juriste.

    Il nous ordonne de ne pas publier une enquête d’intérêt public à la demande expresse de la personnalité concernée sans qu’à un seul instant les arguments de Mediapart n’aient été sollicités. Mediapart n’était pas informé de cette procédure et l’ordonnance a été prise par un juge sans que notre journal n’ait pu défendre son travail et ses droits.

  • Que prévoit la #France pour les 230 migrants de l’#Ocean_Viking ?

    Les migrants arrivés vendredi à #Toulon font l’objet d’un suivi sanitaire, et de contrôles de sécurité, avant d’être entendus par l’#Ofpra dans le cadre d’une #procédure_d’asile à la frontière. Pendant tout ce temps, ils sont maintenus dans une « #zone_d'attente ». Des associations dénoncent ces conditions d’accueil.

    Si les 230 migrants sauvés par l’Ocean Viking ont bien débarqué en France, vendredi 11 novembre, dans le port de Toulon (http://www.infomigrants.net/fr/post/44677/locean-viking-et-ses-230-migrants-accostent-a-toulon-en-france), ils ne se trouvent « pas techniquement sur le sol français », comme l’a indiqué le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

    En effet, les autorités françaises ont choisi de les placer dans une « zone d’attente », définie jeudi soir dans la zone portuaire de Toulon et sur un #centre_de_vacances de la #presqu’île de #Giens à #Hyères, où les exilés sont hébergés pour l’occasion. Un « #centre_administratif » dont ils n’ont pas le droit de sortir.

    Le maintien des personnes dans ce lieu peut durer 26 jours au maximum d’après la loi française.

    « Un système d’#enfermement de #privation_de_liberté et non d’accueil »

    Un dispositif dénoncé par plusieurs associations, dont l’Anafé qui défend les étrangers aux frontières. Interrogée par InfoMigrants, sa directrice Laure Palun souligne que c’est « un système d’enfermement de privation de liberté et non d’accueil, qui pose question quant aux conséquences sur des personnes vulnérables ».

    Gérad Sadik, responsable national de l’asile à La Cimade, estime, quant à lui, que cette #zone_temporaire est « illégale » car ce dispositif est normalement réservé aux espaces situés sur une frontière, dans les aéroports par exemple.

    Une centaine de « #Zones_d'attente_pour_personnes_en_instance » (#ZAPI) existe actuellement en France. Plusieurs associations dont l’Anafé, la Cimade et la Croix-Rouge interviennent dans ces lieux où patientent les étrangers qui ne sont pas autorisés à entrer sur le territoire, pour leur porter une assistance juridique, sanitaire et sociale.

    Mais, concernant les migrants de l’Ocean Viking, la Cimade s’inquiète de ne pas avoir accès aux personnes retenues dans la zone d’attente. Gérard Sadik affirme que l’entrée leur a été refusée. Il alerte également sur le fait que les mineurs non accompagnés ne doivent pas être placés dans ces zones d’attente, or 42 jeunes dans ce cas se trouvaient à bord de l’Ocean Viking selon SOS Méditerranée.

    Dans cette zone d’attente, les migrants feront l’objet d’un suivi sanitaire, puis de contrôles de sécurité des services de renseignement, avant d’être entendus par l’Office français de protection des réfugiés (Ofpra), qui examine les demandes d’asile et décide ou non d’attribuer le statut de réfugié.

    Procédure d’asile à la frontière comme dans les #aéroports

    La France, qui veut décider « très rapidement » du sort des migrants de l’Ocean Viking, a choisi d’appliquer la procédure d’asile à la frontière.

    Habituellement une demande d’asile française est d’abord enregistrée en préfecture, déposée auprès de l’Ofpra sous forme de dossier puis s’ensuit une convocation à un entretien, et entre trois à six mois mois d’attente avant la réponse.

    Mais dans le cas des migrants de l’Ocean Viking, l’Etat a choisi d’appliquer une #procédure_exceptionnelle qui prévoit qu’un agent de la mission asile frontière de l’Ofpra mène un entretien avec ces personnes dans un délai de 48 heures ouvrées afin d’évaluer si la demande d’asile n’est pas « #manifestement_infondée ».

    Cela peut poser problème, car cette notion floue et présentée sous une forme alambiquée laisse un large champ aux autorités françaises pour refuser l’entrée d’une personne, soulèvent les associations d’aide aux migrants.

    « En théorie, l’examen du caractère manifestement infondé ou non d’une demande d’asile ne devrait consister à vérifier que de façon sommaire si les motifs invoqués par le demandeur correspondent à un besoin de protection », soulignait l’Anafé, interrogée par InfoMigrants début novembre sur cette même procédure très régulièrement appliquée sur l’île de La Réunion. « Il ne devrait s’agir que d’un examen superficiel, et non d’un examen au fond, de la demande d’asile, visant à écarter les personnes qui souhaiteraient venir en France pour un autre motif (tourisme, travail, étude, regroupement familial, etc.) en s’affranchissant de la procédure de délivrance des visas », précisait l’association.

    Difficile donc pour des migrants tout juste arrivés après plusieurs semaines d’errance en mer, et parfois la perte de leurs papiers d’identité lors des naufrages, de prouver le fondement de leur demande lors d’un entretien de quelques minutes. D’autres considérations rentrent aussi en ligne de compte lors de ce type d’entretiens, notamment la langue parlée, et la qualité de la traduction effectuée par l’interprète de l’Ofpra.

    Pour accélérer encore un peu plus la procédure, « l’Ofpra a prévu de mobiliser dès ce week-end seize agents pouvant réaliser jusqu’à 90 entretiens par jour », a insisté vendredi le directeur général des étrangers (DGEF) au ministère de l’Intérieur, Eric Jalon.

    Après avoir mené ces entretiens, l’Ofpra donne un avis au ministère de l’Intérieur qui autorise ou non les migrants interrogés à déposer leur demande d’asile. Dans la plupart des cas, les personnes soumises à ce type de procédure échouent avec un taux de refoulement de 60%, indique l’Anafé.

    « Doutes sur le fait que les autorités françaises puissent expulser rapidement »

    « Pour les personnes dont la demande d’asile serait manifestement infondée, qui présenteraient un risque sécuritaire, nous mettrons en œuvre (...) les procédures d’#éloignement pour qu’elles regagnent leur pays d’origine », a prévenu Eric Jalon. Le ministère de l’Intérieur affirme également que des contacts ont déjà été pris avec les pays d’origine de ces rescapés.

    D’après les informations dont dispose InfoMigrants, les rescapés de l’Ocean Viking sont majoritairement originaires du Bangladesh, d’Érythrée et de Syrie, mais aussi d’Égypte, du Pakistan et du Mali notamment.

    « Nous avons des doutes sur le fait que les autorités françaises puissent expulser rapidement », fait savoir Laure Palun, « car il faut que la personne soit détentrice d’un passeport et d’un laissez-passer consulaire ». Or ce document doit être délivré par le pays d’origine et cela prend du temps car certains pays tardent à l’octroyer.

    Deux-tiers des personnes ne resteront de toute façon pas en France, puisqu’elles seront relocalisées dans neuf pays, a précisé le ministère, citant l’#Allemagne qui doit en accueillir environ 80, le #Luxembourg, la #Bulgarie, la #Roumanie, la #Croatie, la #Lituanie, #Malte, le #Portugal et l’#Irlande.

    Si une personne se voit refuser l’entrée sur le territoire par le ministère de l’Intérieur, un recours juridique est possible. Il s’agit du recours contre le refus d’admission sur le territoire au titre de l’asile à déposer dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision de refus prise par le ministère de l’Intérieur, explique la Cimade.

    http://www.infomigrants.net/fr/post/44696/que-prevoit-la-france-pour-les-230-migrants-de-locean-viking
    #sauvetage #asile #migrations #réfugiés #Méditerranée #Italie #ports #ports_fermés #frontières #relocalisation #renvois #expulsions

    ping @isskein @karine4 @_kg_

    –—

    ajouté à la métaliste autour de la création de zones frontalières (au lieu de lignes de frontière) en vue de refoulements :
    https://seenthis.net/messages/795053

    • À peine débarqués, les rescapés de l’« Ocean Viking » sont privés de liberté

      C’est sous #escorte_militaire que le navire de #SOS_Méditerranée a pu s’amarrer à Toulon. Les migrants, dont des enfants, ont été transférés dans une « zone d’attente », soit un lieu de privation de liberté. Un député LFI, qui a pu y entrer, a vu « des humains au bord du gouffre ».

      Deux places, deux ambiances pour l’arrivée du bateau de SOS Méditerranée, vendredi, à Toulon. Sur le quai Cronstadt, en fin de matinée, une centaine de personnes se sont rassemblées pour affirmer un message de bienvenue aux 230 exilé·es secouru·es par l’Ocean Viking. Les slogans, cependant, n’ont pas pu être entendus des concerné·es, puisque le gouvernement a organisé leur réception au port militaire, loin des regards, y compris de ceux de la presse.

      Deux heures plus tard, quelques dizaines de soutiens d’Éric Zemmour ont tenu le pavé devant l’entrée de l’arsenal, tandis que leur chef déclamait un énième discours xénophobe devant un mur de caméras. Outre #Marion_Maréchal-Le Pen, il était accompagné d’anciens de #Génération_identitaire, dont l’Aixois #Jérémie_Piano, récemment condamné à huit mois de prison avec sursis pour des faits de violence au siège de SOS Méditerranée en 2018.

      Jeudi, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, avait annoncé l’autorisation donnée à l’Ocean Viking de débarquer à Toulon, après trois semaines d’errance en mer dans l’attente d’un port sûr que lui ont refusé Malte et l’Italie. Le navire et ses 230 passagers et passagères, dont 13 enfants accompagnés et 44 mineur·es sans famille, s’est amarré à 8 h 50 ce vendredi. Son entrée en rade de Toulon s’est faite sous escorte de plusieurs bateaux militaires et d’un hélicoptère. Puis les personnes ont été acheminées dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, transformé en « zone d’attente » provisoire. Autrement dit : aux yeux de l’administration, les rescapé·es de l’Ocean Viking ne sont pas entré·es sur le territoire français.

      Des bus sont chargés de les conduire « sous #escorte_policière jusqu’au site d’hébergement situé sur la commune d’Hyères », a précisé le préfet du Var, Evence Richard à l’occasion d’une conférence de presse. Les personnes y seront privées de leur liberté, le temps de l’évaluation de leur situation, et sous la #garde_policière de quelque 200 agents.

      Des centaines de policiers

      Le représentant de l’État annonce d’importants moyens mis en place par ses services pour répondre à un triptyque : « #dignité_humanitaire ; #sécurité ; #rigueur et #fermeté ». 600 personnes en tout, forces de l’ordre comprises, vont se consacrer à cet « accueil » prévu pour un maximum de 26 jours. La prise en charge médicale est assurée par les services des pompiers et du Samu.

      D’un point de vue administratif, le ministère veut d’abord « évaluer les #risques_sécuritaires », via des entretiens menés par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), selon les mots d’Éric Jalon, directeur général des étrangers en France, présent au côté du préfet. La mise en avant de cet aspect est un gage donné par Gérald Darmanin à l’extrême droite.

      Ensuite, si les personnes demandent l’asile et rentrent dans les critères, elles pourront, pour un tiers seulement des adultes, rester en France ou bien être « relocalisées », selon le jargon administratif, dans au moins neuf autres pays européens : Allemagne, Luxembourg, Bulgarie, Roumanie, Croatie, Lituanie, Malte, Portugal et Irlande.

      Des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), l’instance dépendant du ministère de l’intérieur chargée d’attribuer ou non le statut de réfugié, évalueront les situations « sous 48 heures », insistent les hauts fonctionnaires. Une procédure express réservée aux « zones d’attente », ces sites habituellement installés dans les aéroports, les ports ou à des postes-frontières, régulièrement dénoncés par des associations comme des lieux où les droits de certains étrangers et étrangères sont bafoués.

      Si les personnes ne demandent pas l’asile, si l’Ofpra rejette leur demande ou si elles sont considérées comme présentant un risque pour la sécurité, le ministère de l’intérieur s’efforcera de les renvoyer dans leur pays d’origine. « Des contacts ont d’ores et déjà été pris avec les pays vers lesquels les personnes ont vocation à retourner », affirme Éric Jalon.

      Les 44 mineur·es non accompagné·es déclaré·es par SOS Méditerranée, pour leur part, verront leur situation évaluée par les services de l’Aide sociale à l’enfance du Var. Si celle-ci ne met pas en cause leur minorité, ils pourront quitter la zone d’attente et être sous la protection du département, comme la loi l’impose.

      Des parlementaires interdits d’accès au quai

      Venue à Toulon pour observer, Laure Palun, de l’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers), organisation active pour défendre les droits des étrangers et étrangères en zones d’attente, critique la méthode. « Il n’y a pas assez d’agents de l’Ofpra formés aux demandes d’asile formulées à la frontière. Il risque d’y avoir plein d’erreurs, dit-elle. Et puis, pour des gens qui ont failli se noyer, qui sont restés autant de temps sur ce bateau, comment pourront-ils être opérationnels dès demain pour faire un récit de vie qui va être crédible aux yeux des autorités françaises ? »

      Sur le plan humain, « enfermer ces personnes, c’est rajouter une couche de #violence à ce qu’elles ont déjà vécu. La zone d’attente n’est pas un lieu qui permet d’aborder sereinement l’asile. Je ne suis pas certaine qu’il y aura une prise en charge psychologique », juge la responsable associative. Dans de nombreuses zones d’attente temporaire habituellement mises en place dans les départements d’outre-mer, l’association a observé que l’information sur la demande d’asile n’est pas toujours donnée aux individus. « C’est une obligation d’informer les étrangers de leurs droits », assure pour sa part Éric Jalon.

      Des rescapés harassés, pieds nus, sans pantalon

      L’opération du gouvernement interpelle aussi par le secret qu’elle s’évertue à organiser. En dehors des agents de l’État, personne n’a eu accès à l’arsenal vendredi, une zone militaire, donc confidentielle. Le député de Marseille Sébastien Delogu (La France insoumise – LFI) s’est vu refuser l’accès à l’Ocean Viking, alors que la loi autorise n’importe quel parlementaire à visiter une zone d’attente à l’improviste, et que celle créée dans le village vacances englobe « l’emprise de la base navale de Toulon », d’après l’arrêté publié vendredi par le préfet.

      Le gouvernement prétend faire primer, semble-t-il, le secret défense. « Moi je ne viens pas pour faire du théâtre comme l’extrême droite, je veux exercer mon droit de parlementaire, s’agace le député insoumis. J’ai aussi été élu pour ça. Sinon, qui a un droit de regard ? » Son collègue Hendrik Davi (LFI) a également été repoussé.

      Plus tard, Sébastien Delogu a pu, tout de même, se rendre au village vacances et « constater toute la souffrance et la détresse physique et mentale dans laquelle se trouvent les rescapés ». « Ces jeunes hommes et femmes sont épuisés, parfois pieds nus ou sans pantalon, harassés par ce périple durant lequel ils ont tout quitté et risqué leur vie. Je n’ai vu que des humains au bord du gouffre, a-t-il précisé, à la sortie, dans un communiqué. Nous ne céderons pas un centimètre d’espace politique aux fascistes qui instrumentalisent ces drames pour propager la haine et la xénophobie. »

      Entre soulagement et amertume, les responsables de SOS Méditerranée ont quant à eux fustigé vendredi des blocus de plus en plus longs imposés à leur navire, au détriment de la sécurité physique et psychologique des naufragé·es recueilli·es à bord. Comme elle le fait depuis sept ans, l’ONG a appelé à la (re)constitution d’une flotte européenne pour faire du sauvetage en Méditerranée centrale et à la mise en place d’un processus de solidarité entre États européens pour la répartition des personnes secourues, qui respecte le droit maritime (soit un débarquement dans le port sûr le plus proche).

      Les finances de l’association étant en baisse à cause de l’explosion des coûts due à l’inflation et à la diminution des dons reçus, elle a relancé un appel aux soutiens. « Dans l’état actuel de nos finances, on ne peut continuer encore que quelques mois, précise sa directrice Sophie Beau. Depuis le premier jour, SOS Méditerranée est essentiellement soutenu par la société civile. » Si quelques collectivités complètent le budget par des subventions, l’État français, lui, ne verse évidemment pas un centime.

      « C’est essentiel qu’on retourne en mer, déclare Xavier Lauth, directeur des opérations de SOS Méditerranée. Parce qu’il y a eu déjà au mois 1 300 morts depuis le début de l’année [en Méditerranée centrale, face à la Libye – ndlr]. » Le décompte de l’Organisation internationale pour les migrations (liée à l’ONU) a précisément dénombré 1 912 personnes disparues en Méditerranée depuis le début de l’année, que les embarcations aient visé l’Italie, la Grèce ou encore l’Espagne. Et depuis 2014, plus de 25 000.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/111122/peine-debarques-les-rescapes-de-l-ocean-viking-sont-prives-de-liberte

    • Le jour où la France n’a pas (vraiment) accueilli l’Océan Viking…

      Après trois semaines à errer, sans qu’on lui assigne de port où débarquer les 234 rescapés secourus en mer, l’Océan Viking, de Sos-Méditerranée, a enfin accosté à Toulon. Entre soulagement et indignation, les associations dénoncent l’instrumentalisation politique de cette crise et les défaillances des États membres de l’Union Européenne.

      « Le sauvetage que nous avons débuté le 22 octobre n’est toujours pas terminé », c’est en substance ce qu’explique Louise Guillaumat, directrice adjointe des opérations de SOS-Méditerranée, lors de la conférence de presse tenue, le vendredi 11 novembre à midi. À cette heure, plus de la moitié des rescapés tirés des eaux par l’ONG, trois semaines auparavant, sont toujours à bord de l’Océan Viking, qui a accosté le matin même, sur le quai de l’artillerie de la base navale varoise.

      Au soleil levant, sur le quai Cronstadt, au pied du « cul-vers-ville », une statue évoquant le génie de la navigation, les caméras de télévision se sont frayé une place parmi les pêcheurs matinaux. Il est 7 h 00, le bateau de Sos-méditerranée est à moins de six miles marins des côtes toulonnaises. Il accoste deux heures plus tard. Pourtant, les 231 exilés à son bord ne sont pas accueillis par la France.
      44 enfants isolés

      « Les passagers ont été placés en zone d’attente. Ils n’ont pas été autorisés à entrer sur le territoire national. » explique Éric Jalon, préfet, et directeur général des étrangers en France (DGEF). Le port militaire et le centre où vont être hébergés les exilés ont été, par décret, définis, la veille, comme « zone d’attente provisoire » gérée par la Police des airs et des frontières (PAF). « Des évaluations de leur état de santé sont faites dès leur descente du navire », promet le préfet.

      Après quoi, ils sont conduits en bus dans un centre de vacances, mis à disposition par la Caisse centrale d’activités sociales (CCAS) des agents des industries électriques et gazières en France, en solidarité avec les personnes réfugiées. Une fois là-bas, ces dernières, parmi lesquelles 44 mineurs isolés, doivent pouvoir formuler une demande d’asile en procédure accélérée.

      « Des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ont été détachés sur place pour y mener des entretiens », poursuit le DGEF. Ceux pour qui la demande d’asile sera jugée « irrecevable et manifestement infondée » feront l’objet de reconduites dans leur pays d’origine. Ce n’est qu’après cette procédure, pouvant durer jusqu’à 26 jours, que les autres pourront alors prétendre à demander l’asile en France ou dans un des neuf pays de l’union européenne s’étant déclaré prêt à en accueillir une partie.
      Une façon de détourner le règlement de Dublin

      « Ce n’est pas ce que prévoit le droit dans l’état », pointe Laure Palun, la directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), présente au rassemblement organisé sur le port, en milieu de matinée, par les associations, syndicats et partis solidaires des exilés. « Les demandeurs d’asile doivent normalement être accueillis sur le territoire d’un État avant leur relocalisation. » explique-t-elle.

      Le choix fait par la France est une façon de détourner le règlement de Dublin qui prévoit qu’une demande d’asile ne puisse être étudiée que par le pays de première entrée du candidat. Et ce n’est pas la seule entorse à la loi que revêt le dispositif « exceptionnel » mise en place par Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. « Ce matin, on nous a refusé l’entrée dans la zone d’attente alors que nous sommes une des associations agréées pour y accéder en tant qu’observateur », dénonce ainsi la responsable associative. La loi prévoit, d’ailleurs, dans le même cadre un libre accès aux parlementaires. Le député LFI de la 7e circonscription de Marseille, Sébastien Delogu, s’est porté volontaire ce matin. Mais « le cabinet de Sébastien Lecornu, ministre des armées, nous interdit l’accès au port », confia-t-il, en début d’après-midi, au téléphone depuis le bureau du préfet maritime. Même les membres de Sos-Méditerranée n’ont pas pu venir à la rencontre de leur équipage bloqué en mer depuis 21 jours.
      L’indignité monte d’un cran

      « La France a su accueillir dignement les réfugiés venus d’Ukraine », rappelle Olivier Masini, secrétaire général de l’UD CGT du Var, alors que plusieurs centaines de militants entament une marche solidaire en direction du théâtre de la liberté où les représentants de SOS-Méditerranée tiennent leur conférence de presse. « Nous sommes ici pour affirmer les valeurs humanistes de notre syndicat et pour demander que les réfugiés débarqués aujourd’hui puissent bénéficier d’un traitement similaire. »

      C’est avec les traits tendus par la colère et la fatigue que les quatre dirigeants de l’Ong de sauvetage en mer accueillent leur auditoire. « Les États Européens négligent depuis sept ans la situation » , lance Sophie Beau, Co-fondatrice de SOS-Méditerranée. « Il est temps que soit mis en place un véritable mécanisme opérationnel et pérenne de répartition des exilés secourus en Méditerranée centrale. L’instrumentalisation politique de cette crise est indigne des démocraties européennes. »

      L’#indignité est d’ailleurs montée d’un cran en début d’après-midi, lorsque devant l’arsenal, les représentants du parti d’extrême-droite, Reconquête, sont venus s’exprimer devant une poignée de groupies haineux. Pas de quoi décourager, cependant, les sauveteurs de Sos-Méditerranée. «  Je préfère rester optimiste, reprend Sophie Beau. Les citoyens européens sont porteurs de solidarité. Nous repartirons rapidement en mer pour continuer notre mission de sauvetage. Et dans le contexte économique actuel, nous avons plus que jamais besoin du soutien de la société civile… Répondez à ce SOS. »

      https://www.humanite.fr/societe/ocean-viking/le-jour-ou-la-france-n-pas-vraiment-accueilli-l-ocean-viking-770755#xtor=RS

      #migrerrance

    • « Ocean-Viking », un désastre européen

      Editorial du « Monde » . Les trois semaines d’errance du navire humanitaire, qui a fini par accoster à Toulon sur fond de crise diplomatique entre la France et l’Italie, rappellent l’impuissance européenne à mettre en œuvre les droits humains.

      L’Union européenne (UE) n’avait pas besoin de cela. Déjà aux prises avec une guerre à ses portes, une crise énergétique, la montée de l’inflation et les tensions que ce contexte exacerbe entre ses membres, voilà que la terrible errance depuis trois semaines d’un navire humanitaire, l’Ocean-Viking, chargé de migrants secourus en Méditerranée, remet en lumière son incapacité à organiser la solidarité en son sein. Cela sur la principale question qui nourrit l’extrême droite dans chaque pays – l’immigration – et, partant, menace l’avenir de l’Union elle-même.

      Si la France a, finalement, sauvé l’honneur en acceptant que l’Ocean-Viking accoste à Toulon, vendredi 11 novembre, après le refus italien, l’impuissance européenne à mettre en œuvre les droits humains qui la fondent historiquement – en l’occurrence la sauvegarde de 234 vies, dont celles de 57 enfants – est extrêmement préoccupante.

      Que la France et l’Italie, que rapprochent mille liens historiques, géographiques et humains, en viennent à s’apostropher par ministres de l’intérieur interposés donne la mesure de la déstabilisation d’un équilibre déjà fragile, consécutif à l’arrivée à Rome de Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien issue de l’extrême droite.

      Sept ans après la crise migratoire de 2015, au cours de laquelle l’UE avait manqué de solidarité à l’égard de l’Italie, y nourrissant la xénophobie, les ingrédients du malaise sont toujours là. Même si les migrants de l’Ocean-Viking doivent être répartis dans l’UE, le fragile système de partage des demandeurs d’asile dans une douzaine d’Etats européens, obtenu par la France en juin, qui n’a jusqu’à présent connu qu’une application homéopathique, a déjà volé en éclats avec l’Italie.

      Volte-face

      Pour l’exécutif français, enclin à présenter l’Union européenne comme un facteur de protection, le scénario de l’Ocean-Viking est également désastreux. S’il a pris en définitive la bonne décision, il semble s’être fait forcer la main par le gouvernement italien. Alors qu’Emmanuel Macron avait refusé en 2018 l’accostage de l’Aquarius, un autre bateau humanitaire, pour ne pas « faire basculer le pays vers les extrêmes », sa volte-face intervient alors que le Rassemblement national, avec ses 89 députés, a renforcé son emprise sur la vie politique.

      Si le dénouement de Toulon devrait logiquement être salué à gauche, il risque de compromettre le ralliement déjà incertain de la droite au projet de loi sur l’immigration, construit sur un équilibre entre régularisation de travailleurs étrangers et fermeté sur les mesures d’éloignement.

      Le poids des images et des symboles – le navire chargé de malheureux, le débarquement sous escorte militaire – ne saurait cependant faire perdre la véritable mesure de l’événement : l’arrivée de quelques dizaines de demandeurs d’asile est bien loin de déstabiliser un pays comme la France. Une centaine de milliers de réfugiés ukrainiens y sont d’ailleurs accueillis à bras ouverts. Comme eux, les migrants venus d’autres continents ont droit à un examen sérieux de leur demande d’asile.

      Les difficultés d’intégration, les malaises et les craintes que suscite l’immigration dans l’opinion sont évidents et doivent être sérieusement écoutés et pris en compte. Mais, alors que l’extrême droite fait des migrants le bouc émissaire de tous les dysfonctionnements de la société et tient la mise au ban des étrangers pour la panacée, il faut rappeler que des hommes, des femmes et des enfants sont là, derrière les statistiques et les joutes politiques.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/11/12/ocean-viking-un-desastre-europeen_6149574_3232.html

    • Pour le plein respect des droits et de la dignité des passager.e.s de l’Ocean Viking, pour une véritable politique d’accueil européenne [Communiqué de presse inter-associatif]

      L’accueil de l’Ocean Viking à Toulon en France a été un soulagement face au drame terrible et indigne que vivaient ses passager.e.s depuis plusieurs semaines, balloté.e.s sur les flots en attente d’une décision sur leur possibilité de débarquement.

      Maintenant se pose la question des conditions de l’accueil des passager.e.s.

      Nous demandons la mise en place des dispositions suivantes :

      – Pas de privation de liberté en zone d’attente, qui ne ferait qu’accroitre les souffrances et traumatismes vécus en mer et sur le parcours d’exil ; de nos expériences sur le terrain, le respect des droits des personnes et de leur dignité n’est pas compatible avec l’enfermement de ces dernières, quel que soit le contexte de leur arrivée, et a fortiori après un périple tel que l’on vécut les rescapés de l’Océan Viking.
      En outre, il est inadmissible que le gouvernement ait fait le choix de « fabriquer » une zone d’attente temporaire dans une base militaire, rendant impossible l’accès des associations habilitées et des élu.e.s de la République, sous prétexte de secret défense, ne permettant pas à des personnes en situation de particulière vulnérabilité d’avoir accès à l’assistance minimale que la loi leur reconnaît.

      – Mobilisation d’un centre d’accueil ouvert, permettant de mettre en place l’accompagnement sanitaire, social, et également psychologique nécessaire.

      – Protection immédiate, mise à l’abri et hébergement des passager.e.s, dépôt de demandes d’asile pour toutes les personnes le souhaitant, et examen approfondi de toutes les situations des personnes afin de garantir le respect de l’exercice effectif de leurs droits.

      Plus globalement, pour éviter demain d’autres drames avec d’autres bateaux :

      – Nous rappelons le nécessaire respect du droit international de la mer, en particulier l’obligation de porter secours aux passagers d’un bateau en difficulté, le débarquement des personnes dans un lieu sûr dans les meilleurs délais ainsi que le principe de non-refoulement vers des pays où les personnes encourent un risque d’être soumises à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants.

      – La solidarité en Europe ne fonctionne pas. Le « mécanisme de solidarité » proposé dans le cadre du pacte européen « migrations et asile » est non seulement non respecté par les pays mais très en-deçà d’une véritable politique d’accueil respectueuse de la dignité des personnes et de leurs droits fondamentaux. L’Italie est à la pointe des égoïsmes nationaux mais globalement les pays européens dans leur ensemble ne sont pas à la hauteur.

      – C’est donc un changement de modèle politique qui est indispensable : passer de politiques européennes fondées sur la fermeture et le repli vis-à-vis des migrant.e.s considéré.e.s comme indésirables pour prôner un autre système :

      > permettre un accès inconditionnel au territoire européen pour les personnes bloquées à ses frontières extérieures afin d’examiner avec attention et impartialité leurs situations et assurer le respect effectif des droits de tou∙te∙s
      > permettre l’accueil des réfugié.e.s non pas sur la base de quotas imposés aux pays, mais sur la base des choix des personnes concernées (selon leurs attaches familiales, leurs compétences linguistiques ou leurs projets personnels), dans le cadre d’une politique de l’asile harmonisée, fondée sur la solidarité entre Etats et le respect inconditionnel des droits fondamentaux.

      http://www.anafe.org/spip.php?article655

    • Zone d’attente de Toulon : violations des droits des personnes sauvées par l’Ocean Viking [Communiqué de presse]

      Depuis 5 jours, l’Anafé se mobilise pour venir en soutien aux personnes enfermées en zone d’attente de Toulon après le débarquement de l’Ocean Viking, le vendredi 11 novembre. Ses constats sont alarmants. Les personnes sauvées par l’Ocean Viking sont victimes de violations de leurs droits fondamentaux dans ce lieu d’enfermement qui n’a rien d’un village de vacances : violations du droit d’asile, personnes portant des bracelets avec numéro, absence d’interprétariat, absence de suivi psychologique effectif, pas de téléphones disponibles et pas de visites de proches, pas d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

      Violation du droit d’asile
      Toutes les personnes enfermées dans la zone d’attente de Toulon ont demandé l’asile. L’Anafé dénonce le choix des autorités de priver de liberté ces personnes en demande de protection internationale alors que ces mêmes autorités n’ont pas nié l’état psychologique dégradé dans lequel elles se trouvent après un long parcours au cours duquel elles ont failli se noyer et après avoir été débarquées d’un bateau de sauvetage sur lequel elles avaient passé 21 jours. Or, la procédure d’asile à la frontière est une procédure d’asile « au rabais », réalisée dans l’urgence mais aussi dans un lieu d’enfermement, quelques heures seulement après le débarquement.
      Les autorités auraient pu, à l’instar de ce qui a été mis en œuvre l’année dernière à l’arrivée de personnes ressortissantes d’Afghanistan ou lors de l’arrivée de ressortissants d’Ukraine depuis le début d’année, prévoir des mesures d’hébergement et un accès à la procédure de demande d’asile sur le territoire, après un temps de repos et de prise en charge médicale sur le plan physique et psychologique.

      Les conditions d’entretien Ofpra
      Les entretiens Ofpra doivent veiller au respect de la confidentialité des échanges et de la dignité des personnes, tout en prenant en compte leur vulnérabilité. L’Ofpra aurait pu refuser de réaliser les entretiens de personnes à peine débarquées au regard de leur vulnérabilité. Cela n’a pas été le cas. Au contraire, elles ont dû expliquer leurs craintes de persécutions sitôt enfermées en zone d’attente. Surtout, des entretiens se sont déroulés dans des tentes, dont certaines laissant une visibilité depuis l’extérieur et sans respect de la confidentialité des échanges, les conversations étaient audibles depuis l’extérieur. Les autres ont été faits dans des locaux où avaient été réalisés des entretiens avec les services de police, ajoutant à la confusion des interlocuteurs et des rôles. Rien, hormis le petit badge porté par les officiers de protection, ne pouvait les distinguer des policiers en civil ou des associations présents dans le camp.

      L’absence d’interprétariat
      Les personnes ainsi enfermées n’ont pas eu accès à des interprètes. Seulement deux interprètes en arabe étaient présentes lors d’une visite organisée par des sénateurs et un député. Leur rôle : traduire les entretiens avec la police aux frontières. Hormis ces deux interprètes, l’ensemble des entretiens sont effectués via un interprétariat téléphonique assuré par un prestataire, y compris pour les entretiens Ofpra. L’Anafé a pu observer les difficultés de la police aux frontières pour contacter un interprète, faisant parfois appel à une personne maintenue en zone d’attente.
      Dès lors, les personnes ne sont pas en mesure de comprendre la procédure de maintien en zone d’attente, leurs droits, la procédure spécifique d’asile à la frontière et ses tenants et aboutissants.

      Des numéros aux poignets
      Les personnes maintenues sont identifiées par des bracelets de couleur au poignet portant un numéro. Les autorités n’ont donc pas hésité à les numéroter sans aucun respect pour leur individualité et leur identité.

      L’absence de suivi psychologique effectif
      L’Anafé a pu constater dans la zone d’attente que si la CUMP83 (cellules d’urgence médico-psychologique) était présente, les conditions d’enfermement ne permettent pas aux infirmiers d’échanger avec les personnes maintenues, les services d’interprétariat téléphonique toujours assurés par le même prestataire étant saturés. De plus, la CUMP83 ne bénéficie pas d’un local adapté pour s’entretenir de manière confidentielle avec les personnes mais d’une tente située dans le « village Croix-Rouge » au milieu de la zone d’attente. Cette disposition ne permet donc pas aux personnes maintenues de bénéficier d’un soutien psychologique confidentiel et adapté au traumatisme qu’elles ont subi lors de leur parcours migratoire et des trois semaines passées en mer.
      De plus, si un médecin, une sage-femme et une infirmière étaient présents le samedi 13 novembre 2022, nous avons pu constater le lendemain qu’aucun médecin n’était présent sur le site. Il nous a été indiqué qu’en cas de nécessité, il serait fait appel à SOS Médecin.

      Impossibilité d’avoir des contacts avec l’extérieur, contrairement à la législation régissant les zones d’attente
      Les numéros utiles ne sont pas affichés. Le wifi installé par la Croix-Rouge ne fonctionne pas correctement. Si huit téléphones portables sont disponibles toute la journée, les conversations sont limitées à 5 minutes et jusqu’à 18h environ. Il n’est pas possible d’être appelé sur ces numéros et ils ne servent que dans le cadre du rétablissement des liens familiaux. Hormis ces téléphones, aucune cabine téléphonique n’est prévue sur le site de la zone d’attente. Il n’est donc pas possible pour les personnes maintenues de s’entretenir de manière confidentielle, notamment avec un avocat, une association ou leurs proches. Il est impossible pour les personnes maintenues de se faire appeler de l’extérieur.
      Aucune visite de proche n’est possible en raison de l’absence de de mise en place d’un système de visite ou d’un local dédié.

      L’impossible accès aux avocats et aux associations
      L’Anafé a pu constater que les personnes maintenues n’avaient aucune connaissance de leur droit à contacter un avocat et qu’aucun numéro de téléphone ne leur avait été communiqué, là encore, contrairement à la législation applicable. Après la visite de la Bâtonnière de l’Ordre des avocats de Toulon et des élus, les avocats se sont vu attribuer deux chambres faisant office de bureau qui ne sont équipées ni d’ordinateur, ni de fax, ni d’internet pour transmettre les recours.
      L’Anafé n’a pas de local pour s’entretenir de manière confidentielle avec les personnes maintenues, notamment en faisant appel à un service d’interprétariat. D’après les informations fournies par la protection civile, il n’y avait pas de local disponible.
      Il est donc impossible pour les avocats et pour les associations de défense des droits d’exercer leur mission dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges et un accompagnement digne des personnes.

      Toutes ces violations constituent des manquements graves aux droits des personnes enfermées dans la zone d’attente de Toulon. Ces atteintes inacceptables sont le résultat du choix fait par les autorités d’enfermer ces personnes au lieu de les accueillir. Comme à chaque fois que des gens sont enfermés en zone d’attente, leurs droits ne sont pas respectés. C’est ce que l’Anafé dénonce depuis la création des zones d’attente. Il est temps de mettre fin à ce régime d’enfermement.

      http://www.anafe.org/spip.php?article656

    • Comment l’affaire de l’Ocean Viking révèle l’ambiguïté des « zones d’attente »

      Vendredi 11 novembre, les 234 migrantes et migrants secourus par le navire Ocean Viking ont pu rejoindre la base navale de Toulon, après trois semaines d’errance en mer. Ultime épisode du drame de la migration qui se joue en Méditerranée et dont le déroulement puis le dénouement peuvent donner lieu à plusieurs clés de lecture. Au niveau de la politique et de l’intégration européennes, le bras de fer entre Paris et Rome, rejouant le duel ayant opposé en 2018 Emmanuel Macron avec l’alors Président du Conseil des ministres italien et actuel Vice-Président Matteo Salvini, a souligné les obstacles à l’affirmation de la solidarité européenne sur la question. Au niveau de la politique interne, ensuite, l’on a vu combien la situation de l’Ocean Viking a accusé les clivages entre « humanistes » et partisans de la fermeté.

      Rappelons d’ailleurs que les propos ayant valu l’exclusion pour deux semaines du député du Rassemblement national Grégoire de Fournas ont précisément été tenus à l’occasion de l’allocution d’un député de la France insoumise dénonçant le sort réservé aux passagers du navire humanitaire.

      Le dernier épisode en date dans l’épopée de l’Ocean Viking est également et entre autres justiciable d’une analyse juridique.
      Les limites du droit international de la mer

      Pendant son errance, les difficultés à trouver un lieu de débarquement ont de nouveau souligné les limites d’un droit de la mer peinant à imposer à un État clairement défini d’ouvrir ses ports pour accueillir les rescapés. La décision de laisser les passagers de l’Ocean Viking débarquer à Toulon est également significative. Elle signe certes leur prise en charge temporaire par la France, mais n’emporte pas, du moins dans un premier temps, leur admission sur le territoire français (au sens juridique). Ce dont le ministre de l’Intérieur ne s’est d’ailleurs fait faute de souligner).

      Cette situation permet alors de mettre en exergue l’une des singularités de la conception juridique du territoire, notamment en ce qui concerne la situation des étrangers. Les zones d’attente en sont une claire illustration.
      Les « zones d’attente »

      Les aéroports ont été les premiers espaces où sont apparues ces zones considérées comme ne relevant pas juridiquement du territoire de l’État les accueillant. Le film Le Terminal, dans lequel Tom Hanks campait un iranien ayant vécu plusieurs années à Roissy – où il s’est d’ailleurs éteint ce samedi 12 novembre –, avait en 2004 porté à la connaissance du grand public cette situation.

      En France, les « zones internationales », initialement nimbées d’un flou quant à leur fondement juridique et au sein desquelles les autorités prétendaient par conséquent n’y être pas assujetties au respect des règles protectrices des droits humains, ont cédé la place aux « zones d’attente » à la faveur de la loi du 6 juillet 1992).

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      À une situation d’exclusion – du moins, alléguée par les autorités – du droit, s’est alors substitué un régime d’exception : les personnes y étant maintenues n’étaient toujours pas considérées comme ayant pénétré juridiquement le territoire français.

      N’étant plus – prétendument – placées « hors du droit » comme l’étaient les zones internationales, les zones d’attente n’en restaient pas moins « hors sol ». L’une des conséquences en est que les demandes d’asile qui y sont le cas échéant déposées relèvent alors de l’« asile à la frontière ». Elles sont par conséquent soumises à un régime, notamment procédural, beaucoup moins favorable aux demandeurs (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile CESEDA, Titre V, article L.350-1 à L.352-9).
      La « fiction juridique »

      La « fiction juridique » que constituent les zones d’attente s’étend désormais entre autres aux gares ferroviaires ouvertes au trafic international, aux ports ou à proximité du lieu de débarquement (CESEDA, article L.341-1). Ces « enclaves » au sein du territoire, autour d’une centaine actuellement, peuvent par ailleurs inclure, y compris « à proximité de la gare, du port ou de l’aéroport ou à proximité du lieu de débarquement, un ou plusieurs lieux d’hébergement assurant aux étrangers concernés des prestations de type hôtelier » (CESEDA, article L.341-6).

      Tel est le cas de la zone d’attente créée par le préfet du Var par le biais d’un arrêté, à la suite de l’accueil de l’Ocean Viking.

      « pour la période du 11 novembre au 6 décembre 2022 inclus, une zone d’attente temporaire d’attente sur l’emprise de la base navale de Toulon et sur celle du Village Vacances CCAS EDF 1654, avenue des Arbanais 83400 Hyères (Giens) ».

      Accueillis dans ce Village Vacances dont les « prestations de type hôtelier » ne semblent aucunement correspondre à la caricature opportunément dépeinte par certains, les rescapés demeurent, juridiquement, aux frontières de la France.
      Aux portes du territoire français

      Ils ne se situent pas pour autant, de ce fait, dans une zone de non-droit : placés sous le contrôle des autorités françaises, ils doivent se voir garantir par elles le respect de leurs droits humains. Aux portes du territoire français, les migrantes et migrants secourus par l’Ocean Viking n’en relèvent pas moins de la « juridiction » française comme le rappelle la Cour européenne des droits de l’Homme. La France est ainsi tenue d’observer ses obligations, notamment au regard des conditions de leur maintien contraint au sein de la zone.

      Une partie des rescapés recouvreront leur liberté en étant admis à entrer juridiquement sur le territoire de la France. Tel est le cas des mineurs non accompagnés, dont il est annoncé qu’ils seront pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance.

      Tel est également le cas de ceux qui auront été autorisés à déposer une demande d’asile sur le territoire français et se seront vus, à cette fin, délivrer un visa de régularisation de huit jours. Parmi eux, la plupart (175) devraient être acheminés vers des États européens qui se seraient engagés à les accueillir, vraisemblablement afin que soient examinées leurs demandes de protection internationale. Expression d’une solidarité européenne a minima dont il faudra cependant voir cependant les suites.

      À lire aussi : Podcast : « Quand la science se met au service de l’humanitaire », le Comité international de la Croix-Rouge

      Pour tous les autres enfin, ceux à qui un refus d’entrer sur le territoire français aura été notifié et qui ne seront pris en charge par aucun autre État, le ministre de l’Intérieur précise qu’ils seront contraints de quitter la zone d’attente vers une destination qui demeure cependant encore pour le moins incertaine. Ceux-là auront alors été accueillis (très) temporairement par la France mais seront considérés comme n’ayant jamais pénétré sur le territoire français.

      https://theconversation.com/comment-laffaire-de-locean-viking-revele-lambigu-te-des-zones-datte

    • « Migrants » de l’« Ocean Viking », « réfugiés » d’Ukraine : quelle différence ?

      Comme elle l’a fait après l’invasion russe, la France doit mener une véritable politique d’accueil pour les passagers de l’« Ocean Viking » : permettre l’accès inconditionnel au territoire sans présupposé lié à leur origine ni distinction entre « migrants » et « réfugiés ».

      Après trois semaines d’errance en Méditerranée, la France a accepté « à titre exceptionnel » de laisser débarquer le 11 novembre, à Toulon, les 234 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking. Tout en précisant, par la voix du ministre de l’Intérieur, que ces « migrants ne pourront pas sortir du centre administratif de Toulon » où ils seront placés et qu’« ils ne sont donc pas légalement sur le territoire national » : à cette fin, une zone d’attente a été créée en urgence où les personnes, qui ont toutes déposé une demande d’asile, sont donc enfermées sous surveillance policière.

      Pour la suite, il est prévu que la France ne gardera sur son sol, s’ils remplissent les conditions de l’asile, qu’environ un tiers des passagers du bateau. Les autres seront autoritairement relocalisés dans neuf pays de l’Union européenne. Voilà donc « l’accueil » réservé à des femmes, des enfants et des hommes qui, après avoir fui la guerre, la misère, l’oppression, et pour beaucoup subi les sévices et la violence du parcours migratoire, ont enduré une longue attente en mer aux conséquences notoirement néfastes sur la santé mentale et physique. L’accueil réservé par la France à ceux qu’elle désigne comme « migrants ».
      Pas de répartition entre les Etats européens

      Rappelons-nous : il y a moins d’un an, au mois de février, lorsque plusieurs millions d’Ukrainiens fuyant l’invasion russe se sont précipités aux frontières des pays européens, la France a su mettre en place en quelques jours un dispositif à la hauteur de cette situation imprévue. Pas question de compter : au ministère de l’Intérieur, on expliquait que « dès lors que des besoins seront exprimés, la France y répondra », tandis que le ministre lui-même annonçait que « nous pouvons aujourd’hui accueillir jusqu’à 100 000 personnes réfugiées sur le territoire national ». Pas question non plus de répartition entre les Etats européens : « Ce sont des personnes libres, elles vont là où elles veulent », affirmait la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur. Et pour celles qui choisiraient de rester en France, un statut provisoire de protection immédiate était prévu, donnant droit au travail, à un logement et à un accompagnement social. On n’a pas manqué de se féliciter de l’élan formidable de solidarité et d’humanité dont la France avait fait preuve à l’égard des réfugiés, à l’instar de ses voisins européens.

      Une solidarité et une humanité qui semblent aujourd’hui oubliées. Parce qu’ils sont d’emblée qualifiés de « migrants », les passagers de l’Ocean Viking, sans qu’on ne connaisse rien de leurs situations individuelles, sont traités comme des suspects, qu’on enferme, qu’on trie et qu’on s’apprête, pour ceux qui ne seront pas expulsés, à « relocaliser » ailleurs, au gré d’accords entre gouvernements, sans considération de leurs aspirations et de leurs besoins.

      On entend déjà les arguments qui justifieraient cette différence de traitement : les « réfugiés » ukrainiens sont les victimes d’un conflit bien identifié, dans le contexte d’une partie de bras de fer qui oppose l’Europe occidentale aux tentations hégémoniques du voisin russe. Des « migrants » de l’Ocean Viking,on prétend ne pas savoir grand-chose ; mais on sait au moins qu’ils et elles viennent de pays que fuient, depuis des années, d’innombrables cohortes d’exilés victimes des désordres du monde – guerres, corruption, spoliations, famines, désertification et autres dérèglements environnementaux – dont les Européens feignent d’ignorer les conséquences sur les mouvements migratoires mondiaux, pour décréter que ce ne sont pas de « vrais » réfugiés.
      Une hospitalité à deux vitesses

      Mais cette hospitalité à deux vitesses est aussi la marque du racisme sous-jacent qui imprègne la politique migratoire de la France, comme celle de l’Union européenne. Exprimée sans retenue par un élu d’extrême droite sur les bancs de l’Assemblée à propos de l’Ocean Viking (« qu’il(s) retourne(nt) en Afrique ! »), elle s’est manifestée dès les premiers jours de l’exode ukrainien, quand un tri des exilés s’est opéré, sur la base de la nationalité ou de la couleur de peau, à la frontière polonaise, au point que la haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu s’était dite « alarmée par les informations crédibles et vérifiées faisant état de discrimination, de violence et de xénophobie à l’encontre de ressortissants de pays tiers qui tentent de fuir le conflit en Ukraine ». Le traitement réservé depuis des années en France aux exilés privés d’abri et de nourriture, harcelés et pourchassés par la police, dans le Calaisis comme en région parisienne, à la frontière italienne ou dans le Pays basque est la traduction quotidienne de cette politique xénophobe et raciste.

      Au-delà d’une indispensable réorganisation du secours en mer afin que les passagers d’un navire en détresse puissent être débarqués sans délai dans un lieu sûr, comme le prescrit le droit international, l’épisode de l’Ocean Viking nous rappelle, une fois de plus, la nécessité d’une véritable politique d’accueil, dont l’exemple ukrainien montre qu’elle est possible. Elle doit être fondée sur l’accès inconditionnel au territoire de toutes celles et ceux qui demandent protection aux frontières de la France et de l’Europe, sans présupposé lié à leur origine ni distinction arbitraire entre « migrants » et « réfugiés », la mise à l’écart de tout dispositif coercitif au profit d’un examen attentif et de la prise en charge de leurs besoins, et le respect du choix par les personnes de leur terre d’asile, à l’exclusion de toute répartition imposée.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/migrants-de-locean-viking-refugies-dukraine-quelle-difference-20221115_WG

    • « Ocean Viking » : les fourberies de Darmanin

      Le ministre de l’intérieur a annoncé, mardi 15 novembre, que 44 des 234 rescapés de l’« Ocean Viking » seront expulsés dans leur pays d’origine, tandis que la majorité des autres seront relocalisés dans des pays de l’Union européenne. La #fable de la générosité française s’est rapidement fracassée sur l’obsession de Gérald Darmanin de ne pas donner de prises au RN, en acceptant de secourir, mais pas d’accueillir.

      « Expulsés », « relocalisés » : ces termes affreux pour désigner des personnes résument à eux seuls le vrai visage de l’« accueil » que la France réserve aux rescapés de l’Ocean Viking, bien loin d’une certaine idée que l’on pourrait se faire de l’hospitalité due à des hommes, des femmes et des enfants ayant risqué de se noyer en mer pour fuir leur pays. On avait bien compris depuis ses premières interventions que Gérald Darmanin avait agi contraint et forcé. Que les autorités françaises, par la voix blanche du ministre de l’intérieur, avaient fini, à contrecœur, par autoriser les passagers à débarquer à Toulon, dans le Var, vendredi 11 novembre, uniquement parce qu’elles estimaient ne pouvoir faire autrement : à la suite du refus de la nouvelle présidente post-fasciste du conseil italien, Giorgia Meloni, de voir le bateau affrété par SOS Méditerranée accoster sur les rives italiennes, les exilés étaient à bout de forces, et risquaient de mourir.

      Après avoir failli dans le sauvetage de 27 exilés dans la Manche en 2021 (les secours français ayant attendu leur entrée dans les eaux anglaises sans envoyer de moyen de sauvetage, selon les récentes révélations du Monde), la France cette fois-ci ne les laisserait pas périr en mer. Mais elle s’en tiendrait là, sans accueil digne de son nom, ni élan de solidarité. Et ce qui a été vécu par Paris comme un affront ne resterait pas sans conséquences. Tels étaient les messages passés après la décision à reculons d’accepter le débarquement.

      Le courroux français s’est logiquement abattu sur la dirigeante italienne, qui, contrevenant au droit international, a bloqué l’accès de ses côtes au navire humanitaire. Mais il y a fort à parier que la discorde diplomatique finisse par se dissiper. Et qu’en définitive les exilés eux-mêmes soient les principales victimes des mesures de rétorsion françaises.

      Mardi 15 novembre, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, le ministre de l’intérieur a ainsi annoncé, telle une victoire, qu’au moins 44 des 234 rescapés seraient renvoyés dans leur pays d’origine. « Dès que leur état de santé » le permettra, bien sûr, et alors même que l’étude des dossiers est toujours en cours, selon son propre aveu devant les députés. « J’ai déjà pris […] contact dès [lundi] avec mes homologues étrangers pour que ces reconduites à la frontière puissent se faire dans les temps les plus courts possible », s’est-il réjoui, espérant que ces expulsions seront réalisées d’ici à la fermeture de la zone d’attente « dans une vingtaine de jours ». Sachant que le ministre avait d’emblée assuré que les deux tiers des rescapés acceptés sur le sol européen feraient l’objet d’une « relocalisation » vers onze autres pays de l’UE, le nombre de celles et ceux autorisés à demander l’asile en France sera réduit à la portion congrue.

      Gérald Darmanin, en vérité, avait commencé ses calculs d’apothicaire avant même le débarquement, en déclarant que la France suspendait immédiatement l’accueil pourtant prévu de longue date de 3 500 réfugiés se trouvant en Italie et qu’il renforcerait les contrôles à la frontière franco-italienne.

      Entre les « expulsés », les « relocalisés » et les « refusés », la générosité de la France s’est vite muée en démonstration de force à visée politique sur le dos de personnes qui, venues du Bangladesh, d’Érythrée, de Syrie, d’Égypte, du Pakistan, du Mali, du Soudan et de Guinée, ont enduré les dangers de l’exil dans l’espoir d’une vie meilleure. Personne, faut-il le rappeler, ne quitte ses proches, son pays, sa maison, son travail, ses habitudes, avec pour seul bagage quelques billets en poche, pour le plaisir de traverser la Méditerranée. Politiques, économiques, sociaux, climatiques, leurs motifs sont le plus souvent solides. Sauvés en mer par l’équipage de l’Ocean Viking, les 234 rescapés ont attendu trois semaines, dans des conditions indicibles, la possibilité de poser un pied sur la terre ferme. La Commission européenne avait rappelé la nécessité, la veille du feu vert français, de les laisser accoster, soulignant « l’obligation légale de sauver les vies humaines en mer, claire et sans équivoque, quelles que soient les circonstances ».
      « Secourir et reconduire »

      Guidé par sa volonté de répondre à l’extrême droite qui l’accuse de « complaisance », le ministre de l’intérieur a en réalité anticipé son attente, telle qu’exprimée par une élue RN du Var, Laure Lavalette, dans l’hémicycle mardi, l’appelant à « secourir et reconduire ».

      Le cadre répressif de cet accueil à la française a été posé au moment même où les rescapés sont arrivés en France. Leur débarquement s’est fait sous escorte militaire, à l’abri des regards des élus, des ONG et des journalistes, dans le port militaire de Toulon (lire ici et là). Ils ont aussitôt été placés dans une « zone d’attente » créée pour l’occasion, dans un ancien « village de vacances » de la presqu’île de Giens, c’est-à-dire dans un lieu d’enfermement. Ainsi l’« accueil » a commencé sous de sombres auspices.

      Placés sous la garde de deux cents policiers et gendarmes, les 234 rescapés ont été soumis, sans attendre d’être remis des épreuves physiques et psychologiques de la traversée, à un examen de leur situation administrative. Pratiquée dans l’urgence, la procédure, dans ce cadre « exceptionnel », est particulièrement expéditive : les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), instance dépendant du ministère de l’intérieur, sont tenus de délivrer un avis « sous 48 heures » sur le « caractère manifestement fondé ou non de la demande d’asile », charge ensuite au ministère de l’intérieur de poursuivre – ou non – l’examen du dossier. Comment peut-on humainement demander à des personnes venant de passer trois semaines d’errance en mer, et qui ont pour la plupart subi des chocs de toute sorte, de retracer posément – et de manière convaincante, c’est-à-dire preuves à l’appui – les raisons qui leur permettraient d’obtenir une protection de la France ? L’urgence, l’arbitraire et le respect de la dignité des personnes font rarement bon ménage.

      Habilitée à intervenir en zone d’attente, l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers, qui a pu se rendre sur place, estime dans un communiqué publié mardi que les rescapés de l’Ocean Viking sont « victimes de violation de leurs droits fondamentaux » dans cette zone d’attente. Ses constats sont « alarmants ». Elle regrette tout d’abord le manque de temps de repos à l’arrivée et une prise en charge médicale passablement insuffisante. Elle évoque ensuite de nombreuses violations du droit d’asile dans le déroulement des entretiens administrés par l’Ofpra, liées notamment au manque d’interprétariat, à l’absence de confidentialité des échanges et à l’absence d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

      Mais discuter de la légalité des procédures n’est, à cette heure, pas la priorité du ministre de l’intérieur dont l’objectif est de montrer qu’il prend garde à ce que la France ne soit pas « submergée » par quelques dizaines d’exilés. Sa célérité à annoncer, le plus vite possible, et avant même la fin de la procédure, qu’une partie des rescapés seront expulsés, en est la preuve.

      Quand on se souvient de l’accueil réservé aux Afghans fuyant le régime des talibans ou aux Ukrainiens fuyant la guerre, on observe pourtant qu’il existe d’autres manières d’assurer que les droits des demandeurs d’asile soient respectés. Pour ne prendre que cet exemple, il y a un an, lorsque plusieurs millions d’Ukrainiens ont fui l’invasion russe, « la France a su mettre en place en quelques jours un dispositif à la hauteur de cette situation imprévue », souligne Claire Rodier, membre du Groupe d’information et de soutien des immigré·es (Gisti) et du réseau Migreurop, dans une tribune à Libération. Et de rappeler les déclarations du ministre de l’intérieur lui-même assurant alors que « nous pouvons aujourd’hui accueillir jusqu’à 100 000 personnes réfugiées sur le territoire national ».

      Précédent également notable, la France, en 2018, avait refusé d’accueillir l’Aquarius, soumis au même sort que l’Ocean Viking. À l’époque, Emmanuel Macron n’avait pas voulu céder et le navire avait fait route vers Valence, en Espagne, suscitant la honte d’une partie des soutiens du président de la République. L’accueil alors réservé aux exilés par les autorités et la société civile espagnole avait été d’une tout autre teneur. Le pays s’était largement mobilisé, dans un grand élan de solidarité, pour que les rescapés trouvent le repos et le réconfort nécessaires après les épreuves de l’exil.

      Il faut se souvenir enfin de l’émoi national légitimement suscité, il n’y a pas si longtemps, par les propos racistes du député RN Grégoire de Fournas, en réponse à une intervention de l’élu LFI Carlos Martens Bilongo concernant… l’Ocean Viking. « Qu’il(s) retourne(nt) en Afrique », avait-il déclaré (lire notre article), sans que l’on sache trop s’il s’adressait à l’élu noir ou aux exilés en perdition. Alors qu’il est désormais établi qu’au moins quarante-quatre d’entre eux seront renvoyés dans leur pays d’origine, vraisemblablement, pour certains, sur le continent africain, il sera intéressant de constater à quel niveau notre pays, et plus seulement nos gouvernants, placera son curseur d’indignation.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/161122/ocean-viking-les-fourberies-de-darmanin

    • Ocean Viking : 123 « #refus_d'entrée » en France et une grande confusion

      Une semaine après leur débarquement à Toulon, une soixantaine de migrants de l’Ocean Viking a été autorisée à demander l’asile. En parallèle de la procédure d’asile aux frontière, des décisions judiciaires ont conduit à la libération d’une centaine de rescapés retenus dans la « zone d’attente », désormais libres d’entrer sur le sol français. Une vingtaine de mineurs, ont quant à eux, pris la fuite vers d’autres pays.

      Sur les 234 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking débarqués à Toulon il y a une semaine, 123 migrants se sont vu opposer un refus à leur demande d’asile, soit plus de la moitié, a indiqué vendredi 18 novembre le ministère de l’Intérieur. Ils font donc « l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire » français, soit plus de la moitié, a ajouté le ministère de l’Intérieur.

      Hormis les 44 passagers reconnus mineurs et placés dès les premiers jours sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance, les 189 adultes restant avaient été retenus dans une « zone d’attente » fermée, qui n’est pas considérée comme appartenant au territoire français. Un espace créé dans le cadre de la procédure d’asile à la frontière, pour l’occasion, dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, à proximité de Toulon.

      Ils sont tous passés cette semaine entre les mains de la police et des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), pour des contrôles de sécurité et de premiers entretiens effectués depuis cette « zone d’attente », afin d’évaluer si leur demande d’asile était fondée.

      Au terme de ces entretiens, l’Ofpra a émis « 66 avis favorables » a précisé Charles-Edouard Minet, sous-directeur du conseil juridique et du contentieux du ministère de l’Intérieur. Cette soixantaine de migrants a donc été autorisée à déposer des demandes d’asile, et autorisée à entrer sur le territoire français. Ils ont été conduits vers des centres d’hébergement du Var, dont des #Centres_d'accueil_et_d'évaluation_des_situations (#CAES).

      Parmi eux, certains seront « relocalisés » vers les onze pays européens (dont l’Allemagne, la Finlande ou le Portugal) qui s’étaient portés volontaires pour se répartir les efforts et les accueillir après leur débarquement en France.

      Des avis défavorables mais pas d’expulsions massives et immédiates

      Les « 123 avis défavorables », quant à eux, ne sont pas pour autant immédiatement expulsables. Le gouvernement français veut aller vite, le ministre de l’Intérieur Gerald Darmanina ayant affirmé dès le 15 novembre que ces personnes « seront reconduites [vers leur pays d’origine] dès que leur état de santé » le permettra. Mais les refoulements pourraient prendre un temps plus long, car ces procédures nécessitent que « la personne soit détentrice d’un passeport et d’un laissez-passer consulaire ». Or ce document doit être délivré par le pays d’origine et cela prend du temps car certains pays tardent à l’octroyer, avait expliqué l’Anafé, association de défense des étrangers aux frontières, à InfoMigrants il y a quelques jours.

      D’autre part, des décisions de justice sont venues chambouler le calendrier annoncé par l’Etat. La cour d’appel d’Aix-en-Provence a annoncé vendredi 18 novembre avoir validé la remise en liberté de la « quasi-totalité, voire la totalité » des 108 rescapés qui réclamaient de ne plus être enfermés dans la « zone d’attente ».

      En cause, des vices de procédure dans les dossiers montés dans l’urgence et de juges dépassés par la centaine de cas à traiter. Les juges des libertés et de la détention (JLD) qui doivent en France, se prononcer pour ou contre un maintien en « zone d’attente » après 4 jours d’enfermement, ont estimé dans une majorité de cas que les migrants devaient être libérés. Le parquet a fait appel de ces décisions, mais la cour d’appel a donné raison au JLD pour une non-prolongation du maintien dans la « zone d’attente » dans la plupart des cas.

      Certains des migrants libérés avaient reçu ces fameux avis défavorables de l’Ofpra, notifiés par le ministère de l’Intérieur. D’après l’Anafé, ils devraient néamoins pouvoir désormais « faire une demande d’asile une fois entrés sur le territoire ».

      Douze migrants en « zone d’attente »

      Après ces annonces de libération, le gouvernement a estimé dans l’après-midi, vendredi, que seuls douze migrants se trouvaient toujours dans ce centre fermé vendredi après-midi. A ce flou s’ajoutent « les personnes libérées mais revenues volontairement » sur le site « pour bénéficier » de l’hébergement, a reconnu, désabusé, le représentant du ministère.

      Ces complications judiciaires et administratives ont perturbé nombre des rescapés, parmi lesquels se trouvent des personnes fragiles, dont la santé nécessite des soins psychologiques après les 20 jours d’errance en mer sur l’Ocean Viking qui ont précédé cette arrivée chaotique en France. Et ce d’autant que les autorités et les associations présentes dans la « zone d’attente » ont été confrontés à une pénurie de traducteurs dès les premiers jours.

      A tel point que le préfet du Var, Evence Richard, a alerté le 16 novembre sur le manque d’interprètes, estimant qu’il s’agissait d’"un vrai handicap" pour s’occuper des migrants. « Dès lors, les personnes ne sont pas en mesure de comprendre la procédure de maintien en zone d’attente, leurs droits, la procédure spécifique d’asile à la frontière et ses tenants et aboutissants », avait aussi fait savoir l’Anafé dans un communiqué publié mardi.

      Des scènes de grande confusion

      En effet, la presse locale du Var et d’autres journaux français ont rapporté des scènes de grande confusion lors des audiences devant le tribunal de Toulon et la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avec des « interprètes anglais pour des Pakistanais, une femme de ménage du commissariat de Toulon réquisitionnée comme interprète de langue arabe, des entretiens confidentiels tenus dans les couloirs », comme en atteste dans les colonnes du Monde, la bâtonnière du barreau varois, Sophie Caïs, présente le 15 novembre au tribunal.

      Dans une autre audience, décrite par un journaliste du quotidien français ce même jour, une mère Malienne « fond en larmes lorsque la juge lui demande ce qu’elle a à ajouter aux débats. Sa petite fille de 6 ans, qui, depuis le début de la matinée ne la quitte pas d’un pouce, ouvre de grands yeux ».

      Des mineurs en fugue

      En parallèle, parmi les 44 rescapés mineurs logés hors de la « zone d’attente », dans un hôtel où ils étaient pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, 26 ont quitté les lieux de leur propre chef, a-t-on appris le 17 novembre dans un communiqué du Conseil départemental du Var.

      Les mineurs qui ont fugué « ont eu un comportement exemplaire, ils sont partis en nous remerciant », a insisté Christophe Paquette, directeur général adjoint en charge des solidarités au conseil départemental du Var. D’après lui, ces jeunes, dont une majorité d’Erythréens, « ont des objectifs précis dans des pays d’Europe du nord » tels que les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Allemagne, où ils souhaitent rejoindre de la famille ou des proches.

      Les services sociaux ont « essayé de les en dissuader », mais « notre mission est de les protéger et pas de les retenir », a ajouté M. Paquette.

      http://www.infomigrants.net/fr/post/44849/ocean-viking--123-refus-dentree-en-france-et-une-grande-confusion

    • Ocean Viking : le #Conseil_d’État rejette l’#appel demandant qu’il soit mis fin à la zone temporaire d’attente où certains passagers ont été maintenus

      Le juge des référés du Conseil d’État rejette aujourd’hui la demande de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) de mettre fin à la zone d’attente temporaire dans laquelle ont été placés certains passagers de l’Ocean Viking. L’association requérante, avec le soutien d’autres associations, contestait les conditions de création de la zone d’attente et estimait que les personnes qui y avaient été placées n’avaient pas accès à leurs droits. Le juge relève les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé. Il observe également que les demandes d’asile à la frontière ont pu être examinées, 66 personnes étant finalement autorisées à entrer sur le territoire pour déposer leur demande d’asile, et que les procédures judiciaires ont suivi leur cours, la prolongation du maintien de la détention n’ayant d’ailleurs pas été autorisée pour la très grande majorité des intéressés. Enfin, il constate qu’à la date de son intervention, les associations et les avocats peuvent accéder à la zone d’attente et y exercer leurs missions dans des conditions n’appelant pas, en l’état de l’instruction, que soient prises des mesures en urgence.

      Pour des raisons humanitaires, le navire « Ocean Viking » qui transportait 234 personnes provenant de différents pays, a été autorisé par les autorités françaises à accoster au port de la base militaire navale de Toulon. Le préfet a alors créé une zone d’attente temporaire incluant cette base militaire et un village vacances à Hyères, où ont été transférées, dès le 11 novembre dernier au soir, les 189 personnes placées en zone d’attente.

      L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) a saisi en urgence le juge des référés du tribunal administratif de Toulon pour demander la suspension de l’exécution de l’arrêté préfectoral créant la zone d’attente temporaire, estimant que les personnes placées en zone d’attente se trouvaient illégalement privées de liberté et n’avaient pas un accès effectif à leurs droits. Après le rejet de son recours mercredi 16 novembre, l’association a saisi le juge des référé-liberté du Conseil d’État, qui peut, en appel, ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale en cas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Ce dernier confirme aujourd’hui la décision du tribunal administratif et rejette l’appel de l’association.

      Le juge relève les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé (nombre important de personnes, nécessité d’une prise en charge médicale urgente, considérations d’ordre public), ce qui a conduit à la création par le préfet d’une zone d’attente temporaire sur le fondement des dispositions issues d’une loi du 16 juin 20111, en cas d’arrivée d’un groupe de personnes en dehors d’une « zone de passage frontalier ». Il observe également que les droits de ces étrangers n’ont pas, de ce seul fait, été entravés de façon grave et manifestement illégale. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a pu mener les entretiens légalement prévus, ce qui a conduit à ce que 66 personnes soient autorisées à entrer sur le territoire pour présenter une demande d’asile, et le juge des libertés et de la détention puis la cour d’appel d’Aix-en-Provence se sont prononcés sur la prolongation des mesures de détention, qui a d’ailleurs été refusée dans la grande majorité d’entre eux.

      S’agissant de l’exercice des droits au sein même de la zone, le juge des référés, qui se prononce en fonction de la situation de fait à la date à laquelle son ordonnance est rendue, note qu’à l’exception des quelques heures durant lesquelles les personnes étaient présentes sur la base militaire, l’association requérante a pu accéder au village vacances sans entrave. Si la persistance de difficultés a pu être signalée à l’audience, elles ne sont pas d’une gravité telle qu’elles rendraient nécessaires une intervention du juge des référés. Le ministère de l’intérieur a par ailleurs transmis à l’association, une liste actualisée des 16 personnes encore maintenues, afin de lui faciliter l’exercice de sa mission d’assistance, comme il s’y était engagé lors de l’audience au Conseil d’État qui a eu lieu hier.

      Les avocats ont également accès au village vacances. Là encore, des insuffisances ont pu être constatées dans les premiers jours de mise en place de la zone d’attente. Mais des mesures ont été progressivement mises en œuvre pour tenter d’y répondre, notamment la mise à disposition de deux locaux dédiés et un renforcement de l’accès aux réseaux téléphoniques et internet.

      A la date de l’ordonnance et en l’absence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, il n’y avait donc pas lieu pour le juge des référés de prononcer des mesures en urgence.

      1 Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

      https://www.conseil-etat.fr/actualites/ocean-viking-le-conseil-d-etat-rejette-l-appel-demandant-qu-il-soit-mis
      #justice

    • Le Conseil d’État valide l’accueil au rabais des rescapés de l’Ocean Viking

      Des associations contestaient la création de la zone d’attente dans laquelle ont été enfermés les exilés après leur débarquement dans le port militaire de Toulon. Bien qu’elle ait reconnu « des insuffisances », la plus haute juridiction administrative a donné raison au ministère de l’intérieur, invoquant des « circonstances exceptionnelles ».

      LeLe Conseil d’État a donné son blanc-seing à la manière dont le ministère de l’intérieur a géré l’arrivée en France des rescapés de l’Ocean Viking. Débarqués le 11 novembre à Toulon après vingt jours d’errance en mer, à la suite du refus de l’Italie de les faire accoster sur ses côtes, les migrants avaient immédiatement été placés dans une zone d’attente temporaire à Hyères (Var), sur la presqu’île de Giens. Gerald Darmanin avait en effet décidé de secourir, sans accueillir. 

      Ce lieu d’enfermement, créé spécialement pour y maintenir les exilés avant qu’ils ne soient autorisés à demander l’asile, est-il légal ? L’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) posait cette fois la question au Conseil d’État, après avoir été déboutée une première fois par le tribunal administratif de Toulon. 

      La plus haute juridiction administrative du pays a rejeté samedi 19 novembre la demande de l’association qui souhaitait la fermeture de la zone d’attente au motif que les droits des exilés n’étaient pas respectés. Le Conseil d’État reconnaît que « des insuffisances ont pu être constatées dans les premiers jours de mise en place de la zone d’attente ». Mais il invoque « les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé ». 

      L’audience s’est déroulée vendredi matin, sous les moulures et lustres recouverts d’or du Conseil d’État. Si 189 personnes étaient initialement maintenues dans la zone d’attente le 11 novembre, elles étaient de moins en moins nombreuses au fil de la journée, assurait d’entrée de jeu le représentant du ministère de l’intérieur, Charles-Édouard Minet. « Vous êtes en train de me dire qu’à la fin de la journée, il peut n’y avoir plus personne en zone d’attente », s’était étonnée la magistrate qui présidait l’audience. « Absolument, oui », confirmait Charles-Édouard Minet. Rires dans la salle.

      Symbole de la grande improvisation ministérielle, la situation évoluait d’heure en heure, à mesure que la justice mettait fin au maintien prolongé des exilés en zone d’attente. Au moment de l’audience, entre 12 et 16 personnes étaient encore enfermées. Deux heures plus tard, la cour d’appel d’Aix-en-Provence décidait de remettre en liberté la « quasi-totalité voire la totalité » des personnes retenues dans la zone d’attente d’Hyères. Moins de dix personnes y seraient encore retenues. 

      Devant le Conseil d’État, s’est tenue une passe d’armes entre les avocats défendant les droits des étrangers et le ministère de l’intérieur. Son représentant a assuré que l’accès aux droits des personnes retenues était garanti. Ce qu’a fermement contesté le camp adverse : « Il existe un vrai hiatus entre ce que dit l’administration et ce qu’ont constaté les associations : les avocats ne peuvent pas accéder comme il le devrait à la zone d’attente », a affirmé Cédric Uzan-Sarano, conseil du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI). 

      En creux, les représentants des associations dénoncent les choix très politiques de Gerald Darmanin. Plutôt que de soumettre les rescapés de l’Ocean Viking à la procédure classique de demande d’asile, la décision a été prise de les priver de leurs libertés dès leur débarquement sur le port militaire de Toulon. « Tous les dysfonctionnements constatés trouvent leur source dans l’idée de l’administration de créer cette zone d’urgence, exceptionnelle et dérogatoire », tance Patrice Spinosi, avocat de l’Anafé. 

      Les associations reprochent aux autorités le choix de « s’être placées toutes seules dans une situation d’urgence » en créant la zone d’attente temporaire. La procédure étant « exceptionnelle » et « mise en œuvre dans la précipitation », « il ne peut en découler que des atteintes aux droits des étrangers », ont attaqué leurs avocats.

      Dans sa décision, le Conseil d’État considère toutefois que la création de la zone d’attente est conforme à la loi. Il met en avant « le nombre important de personnes, la nécessité d’une prise en charge médicale urgente et des considérations d’ordre public ». L’autorité administrative note par ailleurs qu’au moment où elle statue, « à l’exception des quelques heures durant lesquelles les personnes étaient présentes sur la base militaire, [l’Anafé] a pu accéder au village vacances sans entrave ».

      À écouter les arguments de l’Anafé, les dysfonctionnements sont pourtant nombreux et persistants. À peine remis d’un périple éprouvant, les exilés ont dû sitôt expliquer les persécutions qu’ils ont fuies aux agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

      « Puisque les entretiens avec l’Ofpra sont devenus l’alpha et l’oméga des procédures d’asile, il est indispensable que les personnes soient préparées par des avocats », juge Gérard Sadik, représentant de La Cimade, une association qui vient en aide aux réfugiés. 
      Plus de la moitié des rescapés interdits d’entrée sur le territoire

      L’Anafé estime que les conditions sur la zone d’attente d’Hyères ne permettent pas aux associations et aux avocats d’accomplir leur mission d’accompagnement. Si les autorités ont mis à disposition deux locaux, ceux-ci « ne sont équipés ni d’ordinateur, ni de fax, ni d’Internet pour transmettre les recours », indique l’Anafé. Par ailleurs, ces pièces, très vite remplacées par des tentes, empêchent la confidentialité des échanges, pourtant imposée par la loi. 

      Laure Palun, directrice de l’Anafé, est la seule personne présente ce jour-là à l’audience à avoir visité la zone d’attente. « Quand on passait à côté des tentes, on pouvait entendre et voir tout ce qui se passait à l’intérieur, décrit-t-elle. Un moment, on a même vu un exilé quasiment couché sur une table pour comprendre ce que l’interprète lui disait au téléphone. »

      Le Conseil d’État a préféré relever les efforts réalisés par les autorités pour corriger les « insuffisances constatées dans les premiers jours » : « Des mesures ont été progressivement mises en œuvre [...], notamment la mise à disposition de deux locaux dédiés et un renforcement de l’accès aux réseaux téléphoniques et Internet. »

      Conséquence de cette procédure d’asile au rabais et des obstacles rencontrés par les exilés dans l’exercice de leurs droits ? Charles-Édouard Minet a annoncé que plus de la moitié des rescapés du navire de SOS Méditerranée, soit cent vingt-trois personnes, ont fait « l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire » français, à la suite de leur entretien individuel avec l’Ofpra. Pour l’heure, le ministère de l’intérieur n’a pas précisé s’ils allaient être expulsés. 

      D’un ton solennel, Patrice Spinosi avait résumé l’enjeu de l’audience : « La décision que vous allez rendre sera la première sur les zones d’attente exceptionnelles. Il existe un risque évident que cette situation se reproduise, [...] l’ordonnance que vous rendrez définira une grille de lecture sur ce que peut faire ou pas l’administration. » L’administration n’aura donc pas à modifier ses procédures.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/191122/le-conseil-d-etat-valide-l-accueil-au-rabais-des-rescapes-de-l-ocean-vikin

    • Ocean Viking : « On vient d’assister à un #fiasco »

      Laure Palun, directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) énumère les multiples entraves aux droits des personnes recueillies par l’Ocean Viking et déplore que le choix de l’enfermement l’ait emporté sur celui de l’accueil.

      La France avait annoncé vouloir faire vite. Se prononcer « très rapidement » sur le sort des passager·ères de l’Ocean Viking tout juste débarqué·es sur la base navale de Toulon (Var), après que le gouvernement italien d’extrême droite avait refusé (en toute illégalité) que le navire accoste sur son territoire. Ces personnes étaient maintenues dans une zone d’attente temporaire créée dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens.

      Un lieu de privation de liberté qui, juridiquement, n’est pas considéré comme étant sur le sol français. Dans les quarante-huit heures, avaient estimé les autorités, l’ensemble des rescapé·es auraient vu examiner la pertinence de leur demande d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Une procédure accélérée qui n’a pas vocation à attribuer une protection internationale, mais à examiner si la demande d’entrée sur le territoire au titre de l’asile est manifestement fondée ou pas.

      Rien, toutefois, ne s’est passé comme prévu puisque la quasi-totalité des rescapé·es, à l’heure où nous écrivons ces lignes, ont pu être libéré·es au terme de différentes décisions judiciaires (1). Pour Laure Palun, directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étranger·ères (Anafé) – la principale association autorisée à intervenir en zone d’attente –, « on vient d’assister à un fiasco ». Tant pour l’administration que pour les demandeur·ses d’asile.

      En créant une zone d’attente temporaire, les autorités ont choisi d’accueillir les passager·ères de l’Ocean Viking sous le régime de la privation de liberté. Que dit la méthode ?

      Laure Palun : Que nous aurions pu faire le choix de l’accueil, plutôt que celui de l’enfermement ! La zone d’attente est un lieu privatif de liberté où la procédure d’asile « classique » ne s’applique pas. La procédure d’asile à la frontière permet de procéder à une sorte de tri en amont et de dire si, oui ou non, la personne peut entrer sur le territoire pour y demander la protection internationale. Mais l’expérience nous le montre : le tri, les opérations de filtrage et les procédures d’asile à la frontière, ça ne fonctionne pas si on veut être en conformité avec le respect des droits.

      La situation des personnes sauvées par l’Ocean Viking et enfermées dans la zone d’attente de Toulon nous a donné raison puisque la plupart d’entre elles ont été libérées et prises en charge pour entrer dans le dispositif national d’accueil (DNA). Soit parce qu’elles avaient été admises sur le territoire au titre de l’asile, soit parce qu’elles avaient fait l’objet d’une décision judiciaire allant dans le sens d’une libération.

      Lire aussi > Ocean Viking, un naufrage diplomatique

      On vient d’assister à un fiasco. Non seulement du côté des autorités – considérant l’échec de leur stratégie politique –, mais aussi pour les personnes maintenues, qui auraient pu se reposer et entrer dans le processus d’asile classique sur le territoire une semaine plus tôt si elles n’avaient pas été privées de liberté. Au lieu de ça, elles ont été fichées, fouillées et interrogées à de multiples reprises.

      Le point positif, c’est que les mineur·es non accompagné·es – qui ont bien été placé·es quelques heures en zone d’attente, contrairement à ce qu’a déclaré le ministère de l’Intérieur – ont été libéré·es le premier jour pour être pris·es en charge. Le Ceseda [code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile] prévoit en effet que les mineur·es non accompagné·es qui souhaitent demander l’asile ne peuvent être maintenu·es en zone d’attente « sauf exception ». Mais c’est généralement le cas.

      Le 16 novembre, devant l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait pourtant annoncé l’expulsion de 44 personnes d’ici à la fin de la période de maintien en zone d’attente.

      Une telle déclaration pose de vraies questions sur le non-respect de la convention de Genève, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et du droit national : il n’est pas possible de dire une chose pareille, alors même que les personnes sont en cours de procédure d’asile. Même si les demandes de ces personnes ont été rejetées, il existe des recours, et ça fait partie de la procédure !

      Le droit à un recours effectif est inscrit dans la Convention européenne des droits de l’homme et a même été consacré concernant la procédure d’asile à la frontière en 2007 (2). Mais Gérald Darmanin a aussi dit qu’il avait pris contact, la veille [le 15 novembre, NDLR], avec les autorités des pays d’origine.

      Non seulement les décisions de l’Ofpra n’avaient pas encore été notifiées aux demandeur·ses d’asile à ce moment-là – et quand bien même ça aurait été le cas, elles étaient encore susceptibles de recours –, mais il s’agit encore d’une atteinte grave et manifeste à la convention de Genève. Contacter les pays d’origine de personnes en cours de demande d’asile, a fortiori pour envisager leur expulsion, ajoute des risques de persécutions en cas de retour dans le pays.

      Dans un communiqué, vous avez dénoncé de « nombreuses violations des droits » au sein de la zone d’attente, notamment dans le cadre des procédures d’asile. Lesquelles ?

      À leur arrivée, les personnes ont été prises en charge d’un point de vue humanitaire. À ce sujet, l’Anafé n’a pas de commentaire à faire. En revanche, elles n’ont reçu quasiment aucune information sur la procédure, sur leurs droits, et elles ne comprenaient souvent pas ce qui se passait. En dehors de la procédure d’asile, il n’y avait pratiquement aucun interprétariat.

      Cela a représenté une immense difficulté sur le terrain, où les conditions n’étaient globalement pas réunies pour permettre l’exercice effectif des droits. Notamment le droit de contacter un·e avocat·e, une association de défense des droits, ou un·e médecin. Et ni les associations ni les avocat·es n’ont pu accéder à un local pour s’entretenir en toute confidentialité avec les demandeur·ses d’asile.

      Concernant les demandes d’asile, ça a été très compliqué. Déjà, à l’ordinaire, les procédures à la frontière se tiennent dans des délais très courts. Mais, ici, l’Ofpra a dû mener environ 80 entretiens par jour. Pour les officier·ères de protection, cela paraît très lourd. Et ça signifie aussi que les personnes ont dû passer à la chaîne, moins de 48 heures après leur débarquement, pour répondre à des questions portant sur les risques de persécution dans leurs pays.

      Les entretiens ont été organisés sans confidentialité, dans des bungalows ou des tentes au travers desquels on entendait ce qui se disait, avec des interprètes par téléphone – ce que nous dénonçons mais qui est classique en zone d’attente. Ces entretiens déterminants devraient être menés dans des conditions sereines et nécessitent de pouvoir se préparer. Cela n’a pas été le cas, et on le constate : 123 dossiers de demande d’entrée sur le territoire ont été rejetés.

      Le Conseil d’État a pourtant estimé que, malgré « les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé », les droits des personnes placées en zone d’attente n’avaient pas été « entravés de façon grave et manifestement illégale ».

      Nous avons déposé une requête devant le tribunal administratif de Toulon pour demander la suspension de l’arrêt de création de la zone d’attente, mais cela n’a pas abouti. L’Anafé a fait appel et porté l’affaire devant le Conseil d’État. Ce dernier n’a pas fait droit à notre demande, constatant que des améliorations avaient été apportées par l’administration avant la clôture de l’instruction, tout en reconnaissant que des manquements avaient été commis.

      Le Conseil d’État a néanmoins rappelé que les droits des personnes devaient être respectés, et notamment l’accès à un avocat, à une association de défense des droits et à la communication avec l’extérieur. Par exemple, ce n’est qu’après l’audience que l’administration a consenti à transmettre à l’Anafé le nom des personnes encore enfermées (16 au moment de l’audience) pour qu’elle puisse exercer sa mission de défense des droits.

      Il faut se rappeler que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui ont été enfermés après avoir vécu l’enfer.

      Ces entraves affectent notre liberté d’aider autrui à titre humanitaire découlant du principe de fraternité, consacré en 2018 par le Conseil constitutionnel, mais surtout les droits fondamentaux des personnes que l’Anafé accompagne.

      Il est à déplorer que les autorités ne respectent pas les droits des personnes qu’elle enferme et qu’il faille, à chaque fois, passer par la voie contentieuse pour que des petites améliorations, au cas par cas, soient apportées. Le respect des droits fondamentaux n’est pas une option, et l’Anafé continuera d’y veiller.

      Avec le projet de réforme européenne sur la migration et l’asile, qui prévoit notamment de systématiser la privation de liberté aux frontières européennes le temps de procéder aux opérations de « filtrage », faut-il s’attendre à ce que de telles situations se reproduisent et, en l’absence de condamnation du Conseil d’État, à des expulsions qui seraient, cette fois, effectives ?

      La situation vécue ces derniers jours démontre une nouvelle fois que la procédure d’asile à la frontière et la zone d’attente ne permettent pas de respecter les droits des personnes qui se présentent aux frontières européennes. C’est ce que l’Anafé dénonce depuis de nombreuses années et c’est ce qu’elle a mis en avant dans le cadre de sa campagne « Fermons les zones d’attente ».

      La perspective d’étendre cette pratique au niveau européen dans le cadre du pacte sur la migration et l’asile est un fiasco politique annoncé. Surtout, cela aura pour conséquence des violations des droits fondamentaux des personnes exilées. Au-delà du camouflet pour le gouvernement français, il faut se rappeler que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui ont été enfermés, et pour certains qui le sont encore, dans la zone d’attente de Toulon, après avoir vécu l’enfer – camps libyens, traversée de la Méditerranée…

      Le filtrage, le tri et l’enfermement ne peuvent pas être la réponse européenne à de telles situations de détresse, sauf à ajouter de la souffrance et de la violence pour ces personnes.

      En représailles de l’action de l’Italie, le gouvernement a annoncé le déploiement de 500 policiers et gendarmes supplémentaires à la frontière franco-italienne, où l’Anafé constate quotidiennement des atteintes aux droits. À quoi vous attendez-vous dans les prochains jours, sur le terrain ?

      Nous sommes évidemment très mobilisés. Actuellement, nous constatons toujours la même situation que celle que nous dénonçons depuis de nombreuses années. Conséquence de ces contrôles, les personnes prennent de plus en plus de risques et, pour certaines, mettent leur vie en péril… Preuve en est l’accident qui a eu lieu ce week-end à la frontière franco-italienne haute (3).

      Il me paraît surtout important de rappeler que ces effectifs sont mobilisés dans le cadre du rétablissement du contrôle aux frontières intérieures, mesure ininterrompue depuis sept ans par les autorités françaises. Or ces renouvellements [tous les six mois, NDLR] sont contraires au droit européen et au code frontières Schengen. Il est temps que ça s’arrête.

      (1) Soit parce qu’elles ont reçu une autorisation d’entrée sur le territoire au titre de l’asile, soit parce que les juges des libertés et de la détention (JLD) ont refusé la prolongation du maintien en zone d’attente, soit parce que les JLD se sont dessaisis par manque de temps pour traiter les dossiers dans le délai imparti, soit en cour d’appel.

      (2) À la suite d’une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme, la France a modifié sa législation (Gebremedhin contre France, req n° 25389/05, 26 avril 2007).

      (3) Un jeune Guinéen est tombé dans un ravin dans les environs de Montgenèvre (Hautes-Alpes), ce dimanche 20 novembre.

      https://www.politis.fr/articles/2022/11/ocean-viking-on-vient-dassister-a-un-fiasco-45077

    • « Ocean Viking », autopsie d’un « accueil » à la française

      La sagesse, comme la simple humanité, aurait dû conduire à offrir aux rescapés de l’Ocean Viking des conditions d’accueil propres à leur permettre de se reposer de leurs épreuves et d’envisager dans le calme leur avenir. Au contraire, outre qu’elle a prolongé les souffrances qu’ils avaient subies, la précipitation des autorités à mettre en place un dispositif exceptionnel de détention a été la source d’une multitude de dysfonctionnements, d’illégalités et de violations des droits : un résultat dont personne ne sort gagnant.
      Dix jours après le débarquement à Toulon des 234 rescapés de l’Ocean Viking – et malgré les annonces du ministre de l’Intérieur affirmant que tous ceux qui ne seraient pas admis à demander l’asile en France seraient expulsés et les deux tiers des autres « relocalisés » dans d’autres pays de l’Union européenne – 230 étaient présents et libres de circuler sur le territoire français, y compris ceux qui n’avaient pas été autorisés à y accéder. Ce bilan, qui constitue à l’évidence un camouflet pour le gouvernement, met en évidence une autre réalité : le sinistre système des « zones d’attente », consistant à enfermer toutes les personnes qui se présentent aux frontières en demandant protection à la France, est intrinsèquement porteur de violations des droits humains. Principale association pouvant accéder aux zones d’attente, l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) le rappelle depuis 2016 : « Il est illusoire de penser pouvoir [y] enfermer des personnes dans le respect de leurs droits et de leur dignité. » Ce qui s’est passé dans la zone d’attente créée à Toulon en est la démonstration implacable.

      Une gestion calamiteuse

      Pour évaluer a posteriori la gestion calamiteuse du débarquement de ces naufragés, il faut rembobiner le film : poussé dans ses ultimes retranchements mais y voyant aussi l’occasion de se poser en donneur de leçon à l’Italie, le gouvernement annonce le 10 novembre sa décision d’autoriser « à titre tout à fait exceptionnel » l’Ocean Viking à rejoindre un port français pour y débarquer les hommes, femmes et enfants qui, ayant échappé à l’enfer libyen, puis à une mort certaine, ont passé trois semaines d’errance à son bord. « Il fallait que nous prenions une décision. Et on l’a fait en toute humanité », a conclu le ministre de l’Intérieur.

      Preuve que les considérations humanitaires avancées n’ont rien à voir avec une décision prise à contrecœur, le ministre l’assortit aussitôt de la suspension « à effet immédiat » de la relocalisation promise en France de 3 500 exilés actuellement sur le sol italien : sous couvert de solidarité européenne, c’est bien le marchandage du non-accueil qui constitue l’unique boussole de cette politique du mistigri.

      Preuve, encore, que la situation de ces naufragé·e·s pèse de peu de poids dans « l’accueil » qui leur est réservé, une zone d’attente temporaire est créée, incluant la base navale de Toulon, où leur débarquement, le 11 novembre, est caché, militarisé, « sécurisé ». Alors même qu’ils ont tous expressément demandé l’asile, ils sont ensuite enfermés dans un « village vacances », à l’exception de 44 mineurs isolés, sous la garde de 300 policiers et gendarmes, le ministre prenant soin de préciser que, pour autant « ils ne sont pas légalement sur le territoire national ».

      La suspicion tenant lieu de compassion pour ces rescapés, débutent dès le 12 novembre, dans des conditions indignes et avec un interprétariat déficient, des auditions à la chaîne leur imposant de répéter inlassablement, aux policiers, puis aux agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), les récits des épreuves jalonnant leur parcours d’exil, récits sur la base desquels doivent être triés ceux dont la demande d’asile pourra d’emblée apparaître « manifestement infondée », les empêchant de fouler le sol de cette République qui prétendait, quelques heures auparavant, faire la preuve de son humanité.

      Seuls 66 de ces demandeurs d’asile échappent à ce couperet, si bien que les juges des libertés et de la détention du tribunal de Toulon sont alors chargés d’examiner la question du maintien dans la zone d’attente, au-delà du délai initial de quatre jours, de plus de 130 d’entre eux. La juridiction se révélant rapidement embolisée par cet afflux de dossiers, les juges se trouvent dans l’impossibilité de statuer dans les vingt-quatre heures de leur saisine comme l’impose la loi et ils n’ont d’autre solution que d’ordonner la mise en liberté de la plupart.

      En deux jours 124 dossiers examinés au pas de charge

      Le calvaire pourrait s’arrêter là pour ces exilé·e·s perdu·e·s dans les arcanes de procédures incompréhensibles, mais le procureur de la République de Toulon fait immédiatement appel de toutes les ordonnances de mise en liberté, sans doute soucieux que les annonces du ministre ne soient pas contredites par des libérations en masse. C’est alors la cour d’appel d’Aix-en-Provence – qui est soumise au train d’enfer imposé par la gestion de l’accueil à la française : entre le 16 et le 17 novembre 124 dossiers sont examinés au pas de charge pendant que les personnes concernées sont parquées dans un hall de la cour d’appel jusque tard dans la nuit. Mais les faits étant têtus et la loi sans ambiguïté, les juges d’appel confirment que leurs collègues de Toulon n’avaient pas d’autres choix que de prononcer les mises en liberté contestées. A l’issue de ce marathon, il ne reste, le 21 novembre, que quatre personnes en zone d’attente.

      « Tout ça pour ça » : ayant choisi la posture du gardien implacable des frontières qu’un instant de faiblesse humanitaire ne détourne pas de son cap, le gouvernement doit maintenant assumer d’avoir attenté à la dignité de ceux qu’il prétendait sauver et aggravé encore le sort qu’ils avaient subi. Il faudra bien qu’il tire les leçons de ce fiasco : la gestion policière et judiciaire de l’accueil qu’implique le placement en zone d’attente se révélant radicalement incompatible avec le respect des obligations internationales de la France, il n’y a pas d’autre solution – sauf à rejeter à la mer les prochains contingents d’hommes, de femmes et d’enfants en quête de protection – que de renoncer à toute forme d’enfermement à la frontière.

      Signataires : Avocats pour la défense des droits des étrangers (Adde) Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et trans à l’immigration et au séjour (Ardhis) La Cimade, groupe d’information et de soutien des immigré·e·s (Gisti) La Ligue des Droits de l’homme (LDH) Syndicat des avocats de France (SAF) Syndicat de la magistrature (SM).

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/ocean-viking-autopsie-dun-accueil-a-la-francaise-20221127_B53JAB6K7BDGFKV

    • #Mineurs_non_accompagnés de l’« Ocean Viking » : « Un #hôtel, ça ne correspond pas aux besoins d’un gamin »

      Pour Violaine Husson, de la Cimade, la France, signataire de la convention des droits de l’enfant, contrevient à ses engagements en plaçant des mineurs dans des situations loin d’être adéquates.
      L’information a fuité par voie de presse jeudi : 26 des 44 mineurs arrivés en France à bord du bateau humanitaire Ocean Viking ont fugué de l’hôtel où ils étaient logés à Toulon. « Le département a vocation à mettre les mineurs en sécurité mais pas dans des geôles, on ne peut pas les maintenir de force dans un foyer. Ils peuvent fuguer et c’est ce que certains on fait. On ne peut pas les contraindre, il n’y a pas de mesures coercitives à leur égard », a assuré Jean-Louis Masson, le président du conseil départemental du Var. Parmi ces 26 mineurs se trouvaient une majorité d’Erythréens qui, selon Christophe Paquette, directeur général adjoint en charge des solidarités au conseil départemental du Var, « ne restent jamais » car « ils ont des objectifs précis dans des pays d’Europe du Nord » comme les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Allemagne, où ils souhaitent rejoindre de la famille ou des proches. Les associations et les ONG, elles, pointent du doigt les conditions d’accueil et de prise en charge de ces jeunes, souvent inadaptées. Violaine Husson, responsable nationale Genre et Protections à la Cimade, répond à nos questions.

      Quelles sont les conditions de vie des mineurs étrangers non accompagnés, comme ceux de l’Ocean Viking, pris en charge dans des hôtels en France ?

      Il faut d’abord préciser une chose : la loi Taquet de février 2022 interdit le placement des mineurs non accompagnés dans des établissements hôteliers. Cela dit, il y a une exception : dans leur phase de mise à l’abri, en attendant l’entretien d’évaluation de leur minorité, il y a une possibilité de les placer à l’hôtel jusqu’à deux mois. C’est le cas pour cette quarantaine d’enfants, ça l’est aussi pour des centaines d’autres chaque année.

      Un hôtel, ça ne correspond pas aux besoins d’un gamin. Ils sont placés dans des chambres à plusieurs – en fonction des établissements, ils peuvent se retrouver à une deux ou trois personnes dans une chambre, voire plus –, ils ne parlent pas la même langue, ils n’ont pas la même religion… Il n’y a rien qui les relie vraiment. Par ailleurs, il n’y a pas de suivi social, personne ne vient les voir dans la journée pour leur demander si ça va ou ce qu’ils font. Il n’y a pas de jeux prévus, ils sont indépendants. Ce sont aussi souvent des hôtels miteux, pas chers, avec des toilettes et des salles de bains communes. C’est un quotidien qui est loin de l’idée que l’on se fait des mesures de protection de l’enfance en France.

      Ça peut expliquer pourquoi certains décident de quitter ces établissements ?

      Oui, il y a des enfants qui partent parce que les conditions ne vont pas du tout, elles ne sont pas adéquates. Certains ont dû tomber des nues. Dans certains hôtels, il n’y a pas que des mineurs, parfois ils peuvent être placés avec d’autres publics, des majeurs notamment. Ça les rend particulièrement vulnérables : ils sont des enfants étrangers isolés qui viennent d’arriver d’une traversée éprouvante et des personnes peuvent leur mettre la main dessus.

      La question des mineurs non accompagnés est souvent débattue, certaines personnalités politiques estiment qu’ils coûtent énormément d’argent, qu’ils seraient des délinquants. Qu’en est-il réellement selon vous ?

      En effet, on a parlé des mineurs non accompagnés de manière très négative : il y a la délinquance mais aussi le fait qu’ils mentiraient et qu’ils frauderaient, qu’ils coûteraient beaucoup à l’Aide sociale à l’enfance… Certains politiques ont même affirmé que 80 000 mineurs non accompagnés arriveraient en France chaque année. La réalité est toute autre : il y en a eu un peu plus de 9 000 en 2021. On est quand même loin du fantasme véhiculé.

      La protection de l’enfance est problématique aujourd’hui, il y a un véritable manque de moyen et de compétences, y compris pour les enfants français. Mais c’est bien plus simple de dire que c’est la faute des étrangers, même si leur proportion dans la prise en charge est dérisoire. Il y a cette injonction des politiques politiciennes de dire : le problème de l’Aide sociale à l’enfance, c’est les étrangers. Selon eux, ils mentent, ils fraudent, ils fuguent, ils ne sont pas mineurs ou ne sont pas vraiment isolés. Alors que le système de protection ne fait pas la différence entre les enfants français et étrangers.

      La France, comme d’autres pays, a signé la convention internationale des droits de l’enfant. Les démarches doivent donc être faites en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant. On voit bien que quand on les place à l’hôtel ou qu’on les suspecte de mentir sur leur âge parce qu’ils sont étrangers, ce n’est pas le cas.

      https://www.liberation.fr/societe/mineurs-non-accompagnes-de-locean-viking-un-hotel-ca-ne-correspond-pas-au
      #MNA #enfants #enfance

  • Octobre-novembre 1972 : le procès de Bobigny, un tournant dans la lutte pour le droit des femmes

    Le 11 octobre 1972, Marie-Claire, une mineure de 17 ans, comparaissait devant le tribunal pour enfants de Bobigny pour avoir avorté après un viol. Le procès allait se terminer par la relaxe de l’accusée et être suivi d’un autre, impliquant sa mère, Michelle, et trois autres femmes qui l’avaient aidée...
    https://journal.lutte-ouvriere.org/2022/11/09/octobre-novembre-1972-le-proces-de-bobigny-un-tournant-dans-


    #Procès_de_Bobigny #droits_des_femmes

  • Avortement : Paul Milliez, le témoin courageux qui a bouleversé le procès de Bobigny en 1972
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2022/11/08/avortement-la-courageuse-conversion-du-docteur-paul-milliez-au-proces-de-bob

    Un article extraordinaire sur une personne (une belle personne) que je ne connaissais pas. J’ai toujours été fasciné par les gens qui gardaient une droiture de leurs idées devant la pression de leur propre groupe social. Et je m’interroge depuis longtemps sur les qualités propres de ceux que l’on a appelé dans les années 1970 les « gaullistes de gauche ». Souvent bien plus de gauche avec leur droiture et leur dévouement que la gauche officielle.
    En tout cas, l’article est d’une grande beauté, d’une force de conviction qui tire les larmes.
    C’est d’autant plus important que ce que l’on croyait acquis concernant le droit des femmes est aujourd’hui largement remis en cause dans le monde entier. Il faudra que des gens honnêtes basculent de nouveau dans le camp de la liberté pour que l’on puisse revenir sur cette tendance mortifère.
    Chapeau bas Monsieur Milliez.

    Récit
    Il y a cinquante ans, le procès de Bobigny ouvrait la voie à la dépénalisation de l’avortement en France. L’avocate Gisèle Halimi y obtint la clémence pour des femmes mises en cause grâce à l’engagement de ce professeur de médecine. Un acte de courage qui allait contre ses convictions catholiques.
    Cet article peut être écouté dans l’application « La Matinale du Monde »

    C’est l’un des héros méconnus du procès de Bobigny. L’un de ses « grands témoins » dont la déposition, le 8 novembre 1972, a eu un impact considérable et fait – peut-être – basculer l’opinion du tribunal vers un jugement historique de clémence à l’égard de quatre femmes mises en cause dans un avortement. « Un humaniste d’exception », dira l’avocate Gisèle Halimi, qui savait ce qu’il en avait coûté à ce professeur de médecine, catholique fervent, profondément hostile à l’avortement, de venir témoigner dans ce procès destiné à torpiller la loi de 1920 interdisant l’interruption de grossesse. « Un chevalier, se souvient Bernard Kouchner, impérial et fraternel, sincère et terriblement humain. Il savait qu’il paierait très cher son engagement à Bobigny. Mais comme toujours, il a choisi le courage. Et nous autres, jeunes médecins, nous lui vouions une admiration sans bornes. » Robert Badinter en garde lui aussi un souvenir vibrant : « Milliez ! dit-il. Cet homme sans peur, toujours au service des justes causes ! C’était un chrétien de gauche qui savait combien l’humanité est à la fois souffrante et souffrance. Je le ressens comme frère d’esprit. »

    C’est le professeur Jacques Monod qui avait conseillé à Me Halimi de contacter Paul Milliez. Révolté par l’histoire de Marie-Claire Chevalier, violée à 16 ans et dénoncée par son violeur à la police pour s’être fait avorter, le Prix Nobel de physiologie et de médecine avait en effet décidé de soutenir l’avocate dans sa volonté d’entreprendre, à partir de cette affaire, « le grand procès de l’avortement ». Un procès qui n’aurait pas comme seul but de défendre les inculpées (la jeune fille, sa mère et trois « complices » de l’avortement), mais viserait à secouer la société tout entière, provoquer des débats, ébranler les consciences, briser le tabou de l’avortement et dénoncer la législation en vigueur. Un procès qui obligerait les pouvoirs publics à regarder en face un phénomène qui concernait chaque année près d’un million de Françaises et faisait de nombreuses victimes. Un procès qui pointerait l’hypocrisie d’un système dans lequel les plus riches s’en sortaient sans problème, au prix de voyages à l’étranger ou de séjours en clinique privée, tandis que les plus pauvres, soumises aux « faiseuses d’anges », risquaient leur vie et affrontaient les tourments de la justice. Bref, il fallait un procès politique. Le mot ne faisait pas peur à Gisèle Halimi. Le droit était son instrument, l’insoumission sa marque de fabrique, et son métier d’avocate un levier pour changer le monde.

    La règle de base d’un procès politique était claire : il fallait dépasser les faits eux-mêmes, passer par-dessus la tête des juges pour s’adresser à l’opinion publique et la prendre à témoin. La législation était injuste, dépassée, inapplicable, inappliquée : Il fallait la changer. En conséquence, les accusées ne devaient pas nier les faits, ne pas demander pardon, ne pas réclamer l’indulgence. D’accusées, elles se feraient accusatrices de la loi et de tout un système. Et autour d’elles, de « grands témoins », hommes et femmes à la stature morale irréprochable, interviendraient pour resituer le sujet sur différents plans : médical, scientifique, sociologique, politique, philosophique. L’audience deviendrait tribune. Gisèle Halimi avait conçu un plan de bataille.
    Simone de Beauvoir bien sûr

    Dans sa manche, il y avait bien sûr plusieurs de ses amies féministes, adhérentes de l’association Choisir, et signataires un an plus tôt du « Manifeste des 343 » paru dans Le Nouvel Observateur, où elles déclaraient publiquement avoir eu recours à l’avortement : Simone de Beauvoir bien sûr, statue du commandeur ; la journaliste Claude Servan-Schreiber ; et puis les actrices Delphine Seyrig et Françoise Fabian, volontaires pour raconter leur propre avortement. Il y avait aussi des politiques : Michel Rocard, fondateur du Parti socialiste unifié, et le gaulliste de gauche Louis Vallon. Des scientifiques devaient jouer un rôle majeur : le biologiste Jean Rostand, les deux Prix Nobel de médecine Jacques Monod et François Jacob. Et puis Simone Iff, la présidente du Planning familial. Mais il manquait « une grande conscience », proche de l’Eglise catholique, dont l’influence était encore majeure dans la France des années 1970. C’était bien sûr une gageure, tant l’Eglise et l’épiscopat n’avaient cessé de répéter leur opposition radicale à l’avortement. Mais l’avocate s’est mis en tête de rallier le professeur Milliez, doyen de la faculté de médecine Broussais-Hôtel-Dieu, résistant de la première heure, connu pour son sens de l’éthique et ses engagements humanitaires, mais aussi pour sa foi chrétienne qui lui avait fait, un temps, songer à la prêtrise. Ce serait, si l’on ose dire, sa plus belle prise.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Droit à l’avortement : « J’avais en moi une rage, une force sauvage, je voulais me sauver », explique Gisèle Halimi

    Alors un soir de la fin de l’été 1972, elle sonne au domicile du professeur Milliez, dans le 8e arrondissement de Paris. Il la reçoit avec courtoisie, regard fiévreux, silhouette de cathédrale. Elle lui explique l’affaire « Marie-Claire Chevalier », ce cas flagrant d’injustice, de maltraitance, de discrimination sociale. Elle raconte la détresse de la mère, une femme remarquable d’honnêteté et de dignité, employée de la RATP, qui élève seule ses trois filles qu’un père a abandonnées sans prendre le temps de les reconnaître. Elle parle de la solidarité qui, dans ce milieu si modeste, a conduit des collègues du métro à chercher « une adresse » pour soulager la lycéenne qui refusait à tout prix cette grossesse contrainte. Elle évoque l’avortement raté et le chèque sans provision déposé par la mère angoissée à l’entrée d’une clinique privée chargée de rattraper les dégâts causés par l’avorteuse et sauver la vie de Marie-Claire. Elle décrit enfin la descente des policiers, au petit matin, dans l’appartement HLM des Chevalier, pour embarquer la mère et la fille dénoncées par le violeur…

    Paul Milliez, alors âgé de 60 ans, écoute avec gravité, ses longues mains croisées sous le menton. Mais il tient à être clair vis-à-vis de l’avocate : il est viscéralement contre l’avortement, crime absolu, crime odieux. Il le dit. Il le martèle. Elle l’entend et se lève. « Dans ces conditions, je ne peux pas vous demander de venir témoigner… » Elle saisit son cartable, attrape son manteau et se dirige déjà vers la porte. Le professeur est debout, comme désemparé. « Je pourrais écrire une lettre au tribunal… », dit-il, presque à lui-même. Son visage, racontera l’avocate, trahit une lutte intérieure. Une tension entre ses convictions religieuses, sa détestation de l’injustice et sa compassion naturelle pour les femmes en détresse. Au moment où elle ouvre la porte et se dirige vers l’ascenseur, il la rattrape : « Restez ! Cette affaire est injuste, insupportable. Je ne peux l’ignorer. Je ne peux pas me dérober. J’irai témoigner à Bobigny. »
    Le tourment, la détermination et la révolte

    La fille aînée de Paul Milliez assiste par hasard à la scène. Jeune médecin de 34 ans, mère de famille, Françoise Guize-Milliez est passée ce soir-là embrasser ses parents, qui sont ses voisins. Elle connaît bien son père. Elle lit sur son visage. Il saisit à la fois le tourment, la détermination et la révolte. Elle se doute qu’il s’agit d’un moment crucial. « C’était à la fois spectaculaire et émouvant, se souvient-elle. Mon père ne s’engageait jamais légèrement. Il se doutait que sa décision était de nature à bouleverser sa vie. Mais je pense qu’il ne savait pas à quel point. »

    Le médecin invite l’avocate à revenir dans son bureau. Elle le regarde, étonnée et reconnaissante, mais ne veut pas qu’il y ait entre eux le moindre malentendu. « Professeur, je vous demanderai publiquement à la barre : “Si Marie-Claire était venue vous consulter, qu’auriez-vous fait ?” » Il la fixe dans les yeux : « Je l’aurais avortée. » Elle insiste : « Je vous demanderai aussi : “Si votre fille, à 17 ans, était venue vous dire qu’elle était enceinte.” » Il ne baisse pas le regard : « J’aurais essayé de la convaincre de mener sa grossesse à terme. Si elle avait refusé, je l’aurais fait avorter. » C’est ainsi, dira Gisèle Halimi, que « Paul Milliez est devenu mon témoin capital ». Elle savait qu’en dépit de multiples pressions il ne se dégonflerait pas.
    Le 22 novembre 1972, à l’issue du procès de Bobigny, Gisèle Halimi (à gauche), avocate de la jeune Marie-Claire Chevalier (au 1er plan) accompagnée de sa mère (derrière elle), parle aux journalistes. Le verdict de ce procès, à savoir la relaxe de la jeune fille et de 3 autres femmes qui se sont fait avorter, est l’acte déclencheur du processus qui conduit au droit à l’avortement en 1974 en France.
    Le 22 novembre 1972, à l’issue du procès de Bobigny, Gisèle Halimi (à gauche), avocate de la jeune Marie-Claire Chevalier (au 1er plan) accompagnée de sa mère (derrière elle), parle aux journalistes. Le verdict de ce procès, à savoir la relaxe de la jeune fille et de 3 autres femmes qui se sont fait avorter, est l’acte déclencheur du processus qui conduit au droit à l’avortement en 1974 en France. KEYSTONE-FRANCE / KEYSTONE-FRANCE

    Le jour J, ce 8 novembre 1972, il est donc là. A Bobigny. Les abords du tribunal correctionnel ont été pris d’assaut par des groupes de militantes du Mouvement de libération des femmes et de Choisir qui manifestent bruyamment leur soutien aux quatre accusées, galvanisées par la relaxe de Marie-Claire, obtenue trois semaines plus tôt au tribunal pour enfants. Une victoire éclatante pour Gisèle Halimi qui sait cependant que la bataille la plus importante reste à livrer. Car ce jour, c’est la mère de Marie-Claire et ses trois complices qui vont être jugées. Et la compassion dont avait fait preuve le premier tribunal ne sera plus à l’ordre du jour.

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    « Mon devoir était d’aider cette femme »

    Le professeur Milliez est appelé, après Michel Rocard, à la barre des témoins. Et d’emblée, sans même qu’on lui pose la question, il affirme, d’une voix ferme, qu’il aurait aidé Mme Chevalier, si elle était venue le consulter, et qu’il aurait fait son « devoir », comme il l’a toujours fait lorsqu’il s’est trouvé confronté à « des cas dramatiques » similaires. Il va même plus loin en confiant avoir personnellement réalisé un avortement, à l’âge de 19 ans, alors qu’il était externe à l’hôpital Ambroise-Paré de Boulogne. La femme – une mère de quatre enfants abandonnée par son mari – était arrivée exsangue à l’hôpital après une tentative d’avortement ratée.

    « Cela n’est pas faire acte d’avortement, c’est réparer les conséquences », avance le président du tribunal. Non, rétorque Milliez. « Si je n’étais pas intervenu, sa grossesse se serait poursuivie. Je ne peux pas vous dire que j’ai fait cela sans troubles de conscience. J’étais alors catholique pratiquant. Mais j’ai considéré que mon devoir était d’aider cette femme dans la situation difficile où elle se trouvait. » Dans un livre d’entretiens écrit avec Igor Barrère en 1980 (Médecin de la liberté, Seuil), le professeur reviendra sur le cas de cette ouvrière désespérée qui avait introduit des queues de persil dans son vagin, espérant atteindre l’utérus, mais n’avait nullement enrayé sa grossesse. « Si vous ne l’avortez pas, savez-vous ce qu’elle va faire ?, lui avait dit alors son infirmière. Elle n’a plus qu’à aller se jeter dans la Seine. Enceinte, elle va perdre son emploi, n’aura aucun moyen de subsistance, ne pourra plus nourrir ses quatre petits… » La situation avait paru insoluble au jeune externe qui l’avait donc avortée.
    Lire aussi Gisèle Halimi, défenseuse passionnée de la cause des femmes, est morte

    « Depuis, continue le professeur à la barre des témoins, j’ai favorisé un certain nombre d’avortements, pas seulement thérapeutiques mais aussi sociaux. » Cela concerne notamment les filles violées qu’il choisit d’aider systématiquement (comme les nombreuses victimes d’inceste, « des gamines enceintes de leur père », précisera-t-il plus tard à Igor Barrère). Mais aussi d’autres femmes en situation de détresse financière. Car l’injustice sociale le révulse. « Il n’est pas d’exemple qu’une Française riche ne puisse se faire avorter, soit très simplement en France, soit à l’étranger. On a toujours assez d’argent dans ces cas-là pour un avortement fait dans de bonnes conditions. Les femmes pauvres, je ne les voyais qu’une fois qu’elles avaient fait leur tentative d’avortement. Mais quelle tentative et dans quelles conditions ! J’ai vu mourir des dizaines de femmes après des avortements clandestins. » Et le médecin de raconter, avec colère, la situation avant-guerre d’une de ces ouvrières de chez Renault « qui donnait deux mois de salaire à un médecin marron pour faire commencer l’avortement que je terminais douloureusement, à l’hôpital, sans anesthésie, parce que mon patron chirurgien, bien que socialiste très mondain, jugeait qu’il fallait que la femme s’en souvienne ».
    Conseils aux avorteurs

    Le président lui demande alors ce qu’il pense des avorteuses professionnelles. Paul Milliez répond qu’il désapprouve celles qui en tirent profit mais que les médecins français devraient comprendre qu’ils ont précisément là « un devoir à remplir ». Et il va plus loin dans la confidence : lui, médecin « foncièrement hostile » par principe à l’avortement, a prodigué pendant des années ses conseils aux avorteurs. « Comme je voyais mourir à Broussais des femmes avortées par des gens qui n’étaient pas qualifiés, j’ai bien été obligé de faire de l’enseignement ! J’ai répété à mes infirmiers, à mes étudiants, pendant des mois, qu’on n’avait pas le droit de faire un avortement sans faire de la pénicilline parce qu’une femme qui est avortée sans antiseptique a de grands risques de faire un accident. » Faire preuve de pragmatisme, affronter la réalité, tendre la main aux femmes… et se résoudre à l’avortement « quand il n’y a pas d’autre possibilité ».

    La solution, dit-il, est indiscutablement la contraception. « Il faut permettre aux femmes qui ne veulent pas d’enfants de ne pas attendre d’enfants. C’est à la femme de choisir. Ce n’est pas à nous d’imposer nos conceptions d’hommes, et d’hommes riches. » Quant à la loi de 1920, « inique », « mal faite », elle devrait d’urgence être changée. « Il faut que les femmes puissent avoir recours à la contraception et que, dans certains cas, elles puissent se faire avorter. Voilà la position du chrétien que je suis. »

    Le professeur était donc allé bien au-delà de ce que pouvait espérer l’avocate. Elle posera pourtant les questions qu’elle lui avait annoncées le soir de leur première entrevue. Et aux deux, il répondra positivement, avouant toutefois son déplaisir à comparaître dans ce procès – « Ne croyez pas, Me Halimi, que cette déposition ne me coûte pas, elle me coûte lourdement » – en même temps qu’un sentiment de devoir à l’égard de Marie-Claire. « Si ma femme avait été veuve, sans argent, avec des enfants, je suis sûr qu’elle aurait pris la même attitude que Mme Chevalier. Elle aurait fait avorter sa fille de 16 ans et elle aurait eu raison. »
    Blâme public au professeur

    Voilà. Un grand catho élevé chez les jésuites, père de six enfants, avait exposé la caducité d’une législation répressive totalement déconnectée de la réalité. Il avait confié ses tourments et scrupules en décrivant avec justesse l’hypocrisie d’un système mortifère. Une déferlante allait s’abattre sur sa tête.

    D’abord, il fut convoqué par le ministre de la santé, Jean Foyer, en présence du président du conseil national de l’ordre des médecins. Le ministre, lui-même très catholique, tenait à lui exprimer sa désapprobation à l’égard des propos tenus à Bobigny. Milliez s’est cabré : comment accepter l’injustice ? Comment se satisfaire d’une situation dans laquelle les femmes pauvres restent démunies et traquées, quand les femmes riches peuvent avorter sans risques dans des pays voisins ? « Ce n’est pas une raison pour que le vice des riches devienne le vice des pauvres », rétorqua Jean Foyer. Dès le lendemain, le conseil de l’ordre des médecins infligeait un blâme public au professeur qui en fut stupéfait – aucune procédure habituelle n’avait été respectée – et atteint.
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    « Il ne regrettait rien, bien sûr, affirme sa fille Françoise. Il avait agi en son âme et conscience. Et nous, sa famille, adhérions à son éthique et le soutenions avec admiration. Oui, j’avais ressenti un certain choc en entendant qu’il aurait fait avorter sa propre fille si elle avait connu la détresse d’une grossesse non voulue. C’était… si étonnant cet aveu dans un tribunal ! Si personnel ! Mais justement. Cela prouvait son amour et sa profonde sincérité. »

    Jacques Milliez, son fils, né en 1943, avait passé l’oral de l’internat de médecine en 1967 en planchant sur la question : « Complications des avortements criminels ». Un sujet auquel il avait lui aussi été confronté, très tôt, en voyant débarquer aux urgences de l’hôpital des femmes sauvagement avortées. Lui-même, gynécologue, dit avoir pratiqué des avortements clandestins, dans les années 1970, lors de ses nuits et week-ends de garde, en liaison avec le Mouvement pour la liberté de l’avortement et de la contraception. « Tous les copains le faisaient, dit-il. Notre obsession était moins la liberté des femmes à disposer de leur corps que l’urgence de réduire la mortalité maternelle et les séquelles abominables d’avortements clandestins. »
    Réaction outrée des bourgeois

    Des discussions avec son père ? Non, il ne s’en souvient pas. Il avait quitté le nid familial et plongé avec fougue dans son métier. Mais des répercussions de Bobigny, oui ! De la hargne de grands patrons jaloux et hypocrites qui envoyaient leurs maîtresses avorter en Suisse mais reprochaient à Milliez sa compassion pour les femmes pauvres. De la réaction outrée des milieux bourgeois, ultraconservateurs et bien-pensants, qui tournèrent le dos à Milliez, forcément influencé, selon eux, par ses amis communistes (depuis la Résistance) et gauchistes. Et de la rancœur d’une partie de l’Eglise qui ne pardonnait pas au professeur son éloignement du dogme et cette phrase, prononcée dans un entretien au Monde, trois semaines après Bobigny : « Je ne vois pas pourquoi nous, catholiques, imposerions notre morale à l’ensemble des Français. »
    Lire aussi un entretien avec Paul Milliez (1972) : Article réservé à nos abonnés « Je ne vois pas pourquoi nous, catholiques, imposerions notre morale à l’ensemble des Français », déclare le professeur Paul Milliez

    « Un jour où je remontais les Champs-Elysées pour aller au cinéma avec mon mari, se rappelle Françoise Guize-Milliez, la manchette d’un journal populaire affichée sur un kiosque m’a horrifiée : “Le professeur Milliez avoue avoir fait 1 000 avortements.” C’était dingue. Tout et n’importe quoi était décidément colporté. Ma grand-mère, qui vivait alors dans une pension de famille à Neuilly, retrouvait sous sa porte des messages accusant son fils d’être un assassin. Cela a plongé mon père dans un grand désarroi. » En 1973, l’Académie de médecine lui refusa une place à laquelle il pouvait naturellement prétendre. En 1974, il reçut un nouveau blâme du conseil de l’ordre sous un prétexte fallacieux, suscitant la réaction indignée de médecins anciens résistants qui dénoncèrent « une machination » destinée à faire taire ou abattre « un médecin de réputation mondiale, homme de cœur, de progrès et de courage ».

    Pendant ce temps, des Françaises de tous âges et de toutes conditions, alertées par le tumulte autour de Bobigny, se tournaient vers le professeur pour avoir de l’aide. Des centaines de lettres lui parvinrent à l’hôpital Broussais ou à son domicile, qui étaient autant d’appels au secours. Il répondait comme il pouvait, conseillait, rassurait. Il adressait telle patiente enceinte à un gynécologue de ses connaissances, fixait en urgence un rendez-vous à telle autre qu’il pressentait en grand danger. Ces lettres qu’il a remises un jour à Gisèle Halimi, conscient de leur intérêt historique, et qui sont, pour certaines, publiées sur le site de Choisir, dressent le tableau d’une époque où l’éducation sexuelle et la contraception n’existaient pas, ou peu ; où les femmes pauvres souffraient d’un grand isolement et d’un manque quasi total d’information ; et où l’annonce d’une grossesse non désirée suscitait panique et désespoir.

    22 novembre 1972

    Monsieur,

    Je m’excuse de vous déranger, mais peut-être êtes-vous mon salut, mon seul refuge, de vous dépend ma vie. Voici : je suis enceinte et ne veux absolument pas de cet enfant, en ayant déjà cinq et un mari malade du cœur. J’ai fait tout ce que je pouvais pour faire une fausse couche mais rien n’y fait. J’ai donc pris une assurance-vie et ainsi, je pourrai me suicider sans laisser mon mari et mes enfants dans le besoin du moins dans l’immédiat car n’étant pas riche, je n’ai pu prendre une assurance-vie de plus de 3 200 000, j’écris en anciens francs. Mais ce qui m’ennuie le plus dans ce projet, c’est mon petit garçon de 3 ans. Il est toujours derrière moi et dès qu’il ne me voit plus, il m’appelle et me cherche partout (…) Aussi, je vous demanderai si vous pouvez quelque chose pour moi SVP, ou si vous ne pouvez pas, ce que je comprends très bien à cause de la loi, pouvez-vous me donner l’adresse et le montant d’une clinique en Angleterre SVP. Je vous en prie, Professeur, essayez. Seulement je vous demanderais de me répondre vite SVP, car la 24e semaine se termine le 10 décembre. (…)

    Réponse du professeur

    Madame,

    Venez me voir le plus rapidement possible, dès samedi matin 2 décembre, si ma lettre vous arrive à temps. Avec mes sentiments dévoués.

    26 novembre 1972

    Docteur,

    J’ai 21 ans et je suis enceinte de cinq mois et demi, je travaille dans la ferme avec mes parents. Je viens vous demander de me faire avorter, je ne voudrais pas avoir des inconvénients avec ma santé plus tard. (…) S’il vous plaît, merci de me dire le nombre de jours d’hospitalisation et le prix que je dois verser. Ou alors s’il y a un médicament à prendre pour provoquer une fausse couche. (…)

    Réponse du professeur

    Mademoiselle,

    Il n’est pas question, à cinq mois et demi, de vous faire avorter. Ce serait folie. On risquerait de vous tuer et de tuer un enfant vivant. Réfléchissez à ce crime. Je suis naturellement prêt à vous voir dans mon bureau à l’hôpital Broussais. Avec mes sentiments dévoués.

    29 novembre 1972

    Docteur,

    Je viens par ce petit mot vous faire part de mon problème. Voilà, je suis enceinte de trois semaines. J’ai déjà trois garçons et je n’ai que 25 ans. Je ne voudrais pas le garder, car trois, j’estime que j’en ai assez. Mon mari ne le sait pas. Je viens voir si vous pourriez pas m’avorter. Dites-moi combien vous prenez, car, vous savez, je ne suis pas bien riche. (…)

    Réponse du professeur

    Madame,

    Je ne suis pas un avorteur, et je n’ai pas coutume de faire payer des malades qui sont dans une situation modeste. Il faut vous adresser à (…).

    Recevez, Madame, l’expression de mes respectueux hommages

    8 mars 1973

    Professeur,

    Je vous écris car j’ai lu un de vos articles dans Détective sur l’avortement et je suis de ce cas-là. Je suis fille mère, j’ai déjà deux petites filles de 4 et 2 ans. Je ne veux pas du troisième que je porte. Je suis enceinte de deux mois et demi. Professeur, pouvez-vous faire quelque chose pour moi ? Car je suis bien embêtée, je travaille en usine, mais je n’arrive pas assez à gagner ma vie pour moi et mes deux gosses. Pouvez-vous me répondre, Professeur, ou me donner un RDV ? Pouvez-vous me le faire passer ? (…)

    Réponse du professeur

    Mademoiselle,

    Il faut que je vous voie le plus vite possible. Venez le samedi matin 17 mars à 8 h 45 à mon bureau de l’hôpital Broussais. Avec mes sentiments dévoués.

    En décembre 1974, Paul Milliez fut victime d’un accident opératoire qui le plongea dans le coma. Soigné avec ferveur par ses élèves, il revint à lui mais dut lutter plusieurs années pour retrouver l’usage total de son corps, ce qui ne l’empêcha pas de continuer ses consultations à Broussais, de poursuivre ses recherches en demeurant l’un des plus grands spécialistes de l’hypertension artérielle, d’être appelé en consultation auprès de nombreux chefs d’Etat étrangers, de dénoncer aux côtés des étudiants et des infirmières la misère des hôpitaux, de défendre « la fonction sociale du médecin-citoyen » et de mener une multitude de combats dans de nombreux pays du monde, fidèle notamment à la Palestine et au Liban. Quand il s’est éteint, en 1994, à l’âge de 82 ans, Le Monde publia un long article d’hommage intitulé « Le courage du croisé ». C’est l’image qu’en gardait Gisèle Halimi, à jamais reconnaissante à ce médecin ardent de son intervention décisive à Bobigny.

    Annick Cojean

    #Paul_Milliez #Avortement #Procès_Bobigny

  • Bolsonaro génocidaire | Nathalia Kloos et Némo Camus
    https://www.jefklak.org/bolsonaro-genocidaire

    L’ancien président d’extrême droite Jair Bolsonaro fait l’objet de plusieurs accusations, qui, relevant du droit commun, pourraient donner lieu à un ou plusieurs procès. Sa gestion criminelle de la crise sanitaire liée à la pandémie de covid 19 lui est notamment reprochée. Et pour cause : le virus a fourni l’occasion à Bolsonaro de mener une politique meurtrière à l’encontre de certaines populations, notamment dans les États les plus pauvres au Nord du pays. Retour sur le cas de la ville de Manaus, où il a pu mettre en œuvre sa vision viriliste et raciste du monde, héritée du colonialisme génocidaire. Source : Jef (...)

  • Bilan carbone TotalEnergies : le compte est [pas] bon ! | Greenpeace | 02.11.22

    https://www.greenpeace.fr/bilan-carbone-de-totalenergies-revelations

    Dans une nouvelle enquête, Greenpeace France révèle comment TotalEnergies a visiblement sous-évalué ses émissions de CO2 pour l’année 2019. D’après nos estimations, le groupe aurait émis quatre fois plus de gaz à effet de serre que les volumes déclarés. Un écart abyssal. Notre enquête vient jeter un énorme pavé dans la marre de la stratégie climat du groupe et de ses ambitions de neutralité carbone déjà peu crédibles.

    [...]
    Mise à jour du 4 novembre 2022 : suite à la publication de notre rapport, TotalEnergies menace de nous attaquer en justice, plutôt que de répondre sur le fond du problème, à savoir : la responsabilité de l’entreprise dans la crise climatique. Nous sommes tout à fait prêts à engager un débat judiciaire sur la réalité de l’impact climatique des activités de TotalEnergies. Pour rappel, nous avons nous-même assigné TotalEnergies en justice pour pratiques commerciales trompeuses en mars dernier.
    [...]
    nous avons saisi l’Autorité des marchés financiers (AMF), nous inscrivant ainsi à la suite d’une première saisine déposée par les associations Sherpa et Notre affaire à tous en mai 2020. Ces nouvelles estimations sur l’impact climatique réel de TotalEnergies et sa communication trompeuse sur ses engagements net zéro 2050 (qui fait déjà l’objet d’un recours) sont susceptibles de révéler des contradictions, inexactitudes et omissions sanctionnables.

    #pollueurs_pas_payeurs #foutage_de_gueule
    #procès_baillon aux corneilles sous la menace

  • #Gérald_Darmanin veut rendre « impossible » la vie des étrangers soumis à une obligation de quitter le territoire

    Les circonstances de la mort de la petite #Lola et le profil de la suspecte, de nationalité algérienne et sous le coup d’une #obligation_de_quitter_le_territoire_français (#OQTF), ont suscité de vives critiques à droite et à l’extrême droite. Si les parents de l’enfant ont regretté les tentatives de récupération politique de ce terrible drame, les discussions politiques se poursuivent. Ce jeudi, le ministre de l’intérieur a annoncé l’intention du gouvernement de rendre « impossible » la vie des étrangers faisant l’objet d’une OQTF.

    « Nous avons un travail à faire pour rendre impossible la vie des OQTF en France » dans le futur projet de #loi sur l’immigration, a déclaré Gérald Darmanin sur France Inter, en soulignant comme exemple le fait qu’« aujourd’hui quelqu’un qui fait l’objet d’une OQTF peut encore avoir un #logement_social ». « Un étranger arrivé légalement sur le sol [français] et qui perd son statut, devenant irrégulier, ne doit plus pouvoir garder son logement social », a insisté l’entourage du ministre.

    « Un droit trop complexe » pour expulser

    La #mesure_d’expulsion, dite OQTF, fait l’objet de polémiques récurrentes, notamment sur son taux d’application réel que le gouvernement veut augmenter à l’aide de la loi. Cette polémique a été ravivée depuis le meurtre sauvage de Lola. Sur ce sujet, le ministre de l’Intérieur a déploré un « droit trop complexe pour expulser un étranger en situation irrégulière, avec jusqu’à douze recours administratifs et judiciaires ».

    Selon lui, « plus de la moitié » des 120.000 OQTF prises ne sont pas exécutoires à cause de #recours_administratifs. Le projet de loi à venir prévoit de diviser par trois ce nombre possible de recours, de douze à quatre, a expliqué Gérard Darmanin, en prévoyant sur ce sujet « un grand débat parlementaire très compliqué ». Le gouvernement envisage par ailleurs de « lever les protections pour un certain nombre d’étrangers », a dit le ministre en citant la nécessité de mettre fin au système de #double_peine, qui voit un étranger condamné devoir purger sa peine sur le territoire avant son expulsion.

    Une situation « déjà » impossible

    La suppression de cette mesure permettrait selon lui « d’expulser 4.000 étrangers délinquants supplémentaires par année ». Rendre la vie « impossible » aux étrangers en situation irrégulière, « c’est déjà le cas actuellement », dénonce Mélanie Louis, responsable des questions d’expulsions à l’association La Cimade, pour qui les mesures du projet de loi vont faire rompre la France avec « l’Etat de droit ».

    Selon Mélanie Louis, il est d’ailleurs « complètement faux » qu’une personne sous le coup d’une OQTF ait droit à un logement social en France : « ces personnes bénéficient simplement du droit, inconditionnel, à une place d’#hébergement_d’urgence via le 115 [le numéro d’urgence dédié aux sans-abri], mais dans aucun cas à un HLM ».

    « 100 % d’application » pour les expulsions

    Jeudi soir, le président Emmanuel Macron a dit vouloir « réformer en profondeur les règles, nos lois, pour simplifier les procédures » d’expulsion, à l’occasion d’une nouvelle #loi_sur_l’asile_et_l’immigration qui doit être présentée « On va durcir les règles » pour « aller à ces 100 % » d’application des obligations de quitter le territoire français, des #procédures_d’expulsion dont moins de 10 % seulement sont exécutées. « au premier semestre de l’année prochaine ».

    « On va durcir les règles » pour « aller à ces 100 % » d’application des obligations de quitter le territoire français, des procédures d’expulsion dont moins de 10 % seulement sont exécutées.

    https://www.20minutes.fr/politique/4007487-20221027-darmanin-veut-rendre-impossible-vie-etrangers-soumis-obli

    #Darmanin #Gérard_Darmanin_comme_Theresa_May #hostile_environment #environnement_hostile #asile #migrations #réfugiés #instrumentalisation #sans-papiers #rendre_la_vie_impossible #expulsions #renvois #durcissement

    ping @karine4 @isskein

  • L’écoterrorisme, c’est la brutalité quotidienne des Etats et du capitalisme, c’est le réchauffement climatique et les destructions du vivant
    https://ricochets.cc/L-ecoterrorisme-c-est-la-brutalite-quotidienne-des-Etats-et-du-capitalisme

    Le terrorisme de l’Etat-capitalisme s’exerce quotidiennement dans la banalité froide du contrôle social, des inégalités sociales, des vies brisées par le travail, les pollutions, le désespoir, les canicules récurrentes, les violences d’Etat... Et parfois, souvent même, ce terrorisme institutionnel et armé éclate encore plus crûment dans une répression brutale et absurde pour protéger des projets et politiques criminels caricaturaux ; à Sainte Soline pour protéger l’agro-industrie ce week-end, ou dans le (...) #Les_Articles

    / Autoritarisme, régime policier, démocrature..., #Procès,_justice,_répression_policière_ou_judiciaire, Catastrophes climatiques et destructions (...)

    #Autoritarisme,_régime_policier,_démocrature... #Catastrophes_climatiques_et_destructions_écologiques
    https://ricochets.cc/IMG/distant/html/watchvHtj-zfbddd-60bc4f0.html

  • Mimmo Lucano, chiesti 10 anni e 5 mesi di reclusione in appello per l’ex sindaco di Riace

    Requisitoria dei sostituti procuratori generali Adriana Fimiani e Antonio Giuttari: chiesti meno dei 13 anni e 2 mesi inflitti in primo grado. Rilevate alcune prescrizioni e chiesta l’assoluzione per una parte della truffa. I legali Andrea Daqua e Giuliano Pisapia: «Condivise in parte le nostre osservazioni, spiegheremo i nostri motivi e speriamo in esito positivo»

    Dieci anni e 5 mesi di reclusione. È la richiesta della Procura generale di Reggio Calabria per l’ex sindaco di Riace Mimmo Lucano, il principale imputato del processo Xenia che si sta celebrando davanti alla Corte d’Appello e che è nato da un’inchiesta della Guardia di finanza sulla gestione dei progetti di accoglienza dei migranti. Nell’udienza di oggi, c’è stata la requisitoria dei sostituti procuratori generali Adriana Fimiani e Antonio Giuttari che hanno chiesto per Lucano una pena inferiore rispetto ai 13 anni e 2 mesi inflitti in primo grado dal Tribunale di Locri nel settembre 2021.

    In sostanza, per la Procura generale l’ex sindaco di Riace dovrebbe essere condannato per reati che riguardano la gestione del denaro pubblico. Lucano nel 2018 era stato arrestato dai finanzieri. Sottoposto prima ai domiciliari e poi al divieto di dimora, è ancora sotto processo per i reati di associazione per delinquere, truffa, peculato, falso e abusi d’ufficio. Come per la Procura di Locri, che aveva coordinato le indagini, anche per i sostituti pg, l’ex sindaco Lucano sarebbe stato il promotore di un’associazione a delinquere ai danni dello Stato. Stando all’impianto accusatorio, si tratta di un’associazione che avrebbe avuto lo scopo di commettere “un numero indeterminato di delitti (contro la pubblica amministrazione, la fede pubblica e il patrimonio), così orientando l’esercizio della funzione pubblica del ministero dell’Interno e della prefettura di Reggio Calabria, preposti alla gestione dell’accoglienza dei rifugiati nell’ambito dei progetti Sprar, Cas e Msna e per l’affidamento dei servizi da espletare nell’ambito del Comune di Riace”.

    Rispetto alla sentenza di primo grado, al termine della requisitoria i sostituti procuratori generali hanno rilevato la prescrizione per i due presunti abusi d’ufficio: quello relativo alla mancata riscossione da parte del Comune dei diritti per il rilascio delle carte di identità, e quello sull’affidamento della raccolta dei rifiuti a due cooperative che utilizzavano gli asinelli per effettuare il servizio nel borgo ma che erano prive dell’iscrizione all’albo regionale. È stata, inoltre, chiesta l’assoluzione per una parte del reato di truffa contestato a Lucano. La Procura generale, infine, ha riconosciuto l’unificazione di tutti reati con il vincolo della continuazione. Questo è il motivo per il quale l’accusa ha ridotto la richiesta di condanna rispetto alla sentenza di primo grado.

    Sentenza che dovrebbe essere rideterminata anche per buona parte degli altri 15 imputati: Fernando Antonio Capone (8 anni e 10 mesi di carcere), Cosimina Ierinò (8 anni e 1 mese), Jerry Tornese (5 anni), Pietro Curiale Oberdan (4 anni e 8 mesi), Abeba Abraha Gebremarian (4 mesi con pena sospesa), Giuseppe Ammendolia (2 anni e 10 mesi), Nicola Auddino (4 anni), Assan Balde (8 mesi con pena sospesa), Oumar Keita (8 mesi con pena sospesa), Anna Maria Maiolo (4 anni e 8 mesi), Gianfranco Musuraca (4 anni), Salvatore Romeo (4 anni e 10 mesi), Maria Taverniti (4 anni e 4 mesi), Lemlem Tesfahun (4 anni e 8 mesi) e Filmon Tesfalem (8 mesi con pena sospesa). È stata chiesta, infine, l’assoluzione per Cosimo Damiano Musuraca e Maurizio Senese.

    Al termine dell’udienza, l’intervento dei pg in aula è stato commentato dagli avvocati Andrea Daqua e Giuliano Pisapia, difensori di Mimmo Lucano. “È stata una requisitoria serena, pacata – ha affermato Pisapia – In parte i sostituti procuratori generali hanno condiviso quanto è stato sollevato da noi come difesa di Mimmo Lucano in contrasto con la sentenza di primo grado. Su altri punti non condividiamo sia le richieste di condanna che le motivazioni. Adesso iniziano le difese e noi confidiamo in una sentenza positiva”. “Aspetteremo l’esito della Corte d’Appello”, ha affermato, invece, Daqua che ha comunque apprezzato come la “Procura generale abbia condiviso l’eccezione sulla inutilizzabilità di alcune intercettazioni così come previsto dalla sentenza ‘Cavallo’ della Corte di Cassazione”. “Nel nostro intervento – ha aggiunto – spiegheremo i motivi del nostro appello e chiaramente speriamo in un esito positivo perché abbiamo sempre ritenuto che i reati contestati a Mimmo Lucano sono insussistenti”.

    https://www.ilfattoquotidiano.it/2022/10/26/mimmo-lucano-chiesti-10-anni-e-5-mesi-di-reclusione-in-appello-per-lex-sindaco-di-riace/6852176

    #processo_Xenia #Xenia #procès_Xenia

    #Mimmo_Lucano #Domenico_Lucano #Riace #procès #appel #justice #Italie #Calabre #villes-refuge

    • Vidéo : « Je referais tout ce que j’ai fait », le combat de Domenico Lucano, en première ligne de l’accueil des migrants en Italie

      En Italie, Domenico Lucano, ancien maire du village de Riace connu pour son accueil des migrants, est de nouveau devant la justice. Il avait été condamné en 2021 à 13 ans de prison pour association de malfaiteurs aux fins d’immigration irrégulière, et de détournements de biens publics. InfoMigrants est allé à sa rencontre.

      https://www.youtube.com/watch?v=zdUOM-DS8QM&feature=emb_logo


      http://www.infomigrants.net/fr/post/44276/video--je-referais-tout-ce-que-jai-fait-le-combat-de-domenico-lucano-e

    • Avec Mimmo Lucano à Riace de #Eric_Fassin

      L’ancien maire de Riace, Mimmo Lucano, a été condamné en 2021 à treize ans de prison par la justice italienne. Les motifs n’étaient que des prétextes : si la répression s’abat sur lui, c’est qu’il a réussi – et non échoué. Il a démontré que l’accueil des migrant·es était dans l’intérêt de la Calabre, dépeuplée par la pauvreté. Une autre politique est donc possible : il y a bien une alternative.

      La Caravane de Riace, c’est un mouvement de solidarité avec Mimmo Lucano, l’ancien maire de ce village, poursuivi par la justice italienne pour avoir mené une politique de solidarité, au-delà des frontières, avec les exilé·es qui, depuis des décennies, débarquent sur les côtes de Calabre. Ce collectif vient de France, mais lui aussi traverse les frontières. La caravane prend son départ aujourd’hui à Riace, avant Palerme, Naples, Rome, mais aussi, en France : La Roya, où elle sera accueillie par Cédric Herrou, et enfin Marseille, qui doit attribuer une citoyenneté d’honneur à Mimmo Lucano.

      Le maire de Riace a d’abord été suspendu de son mandat puis arrêté le 1er octobre 2018, et enfin interdit de séjour dans son propre village pendant près d’un an. Il est alors retourné y vivre. Mais le 30 septembre 2021, à l’issue d’un long procès, il a été condamné par la justice italienne à plus de 13 ans de prison et à une lourde amende pour association de malfaiteurs, détournement de fonds publics et abus de pouvoir. En réalité, il est persécuté pour sa politique de solidarité.

      En novembre 2021, à l’invitation de ce même collectif de militantes françaises, nous étions nombreuses et nombreux à venir le soutenir à la Bourse du travail, à Paris : la solidarité n’est pas un délit. Bien sûr, en France, la justice rend la vie dure aux militantes et aux militants, en faisant exister un délit de solidarité juridiquement inexistant. Mais les mobilisations de la vallée de La Roya, autour de Cédric Herrou, ont réussi à faire reconnaître par le Conseil constitutionnel la solidarité : c’est le principe de fraternité, inscrit dans la devise de la République.

      Aujourd’hui, mercredi 26 octobre 2022, s’est ouvert le procès en appel de Mimmo Lucano. Comment manifester notre solidarité ? Et d’abord, où ? Le tribunal siège à Reggio ; c’est donc là que sont ses avocats. Mais Mimmo lui-même a choisi de rester dans son village – et nous avec lui. Pourquoi ? C’est qu’il y a deux réalités : d’un côté, celle de l’État ; de l’autre, la réalité de ce village de Calabre. La première ignore la seconde ; mais la seconde ne peut pas se permettre d’ignorer la première.

      Ce matin, Mimmo nous fait visiter son village ; il y habite depuis toujours ; il y connaît tout le monde. Dans l’école ouverte pour les enfants des réfugié·es, il connaît les prénoms de chaque enfant ; plusieurs garçons ont été appelés Domenico, comme lui. En fait, Riace n’est pas ou n’est plus isolé ; c’est un village global – comme l’annonce une arche de bois dans la rue. Mais l’État veut arracher Mimmo à cette réalité ; c’est une manière de l’arracher de cette réalité, autrement dit, d’essayer d’effacer son empreinte ; car elle est bien visible, non seulement dans ce village, mais dans le monde entier.

      Mimmo Lucano, pour se justifier, a expliqué que « la légalité et la justice sont deux choses différentes. » Pour le dire autrement, il y a deux justices. La justice injuste, qui, sous divers prétextes, condamne la solidarité ; et une autre justice, celle de la solidarité en actes. C’est cette justice juste qui a été saluée par le Haut-Commissariat aux Réfugiés de l’ONU et par le Pape François, mais aussi reconnue par le prix Dresde pour la paix en 2017. C’est donc cette justice alternative qui est poursuivie, et condamnée, par la justice de l’État. Voilà pourquoi nous sommes à Riace, et non pas à Reggio : du côté de cette justice de Justes, du côté de Riace, du côté de Mimmo Lucano.

      Pourquoi persécuter Mimmo Lucano ? Pourquoi l’État italien s’acharne-t-il avec une telle violence contre cet homme ? Pourquoi vouloir anéantir cette justice alternative ? C’est précisément parce que Mimmo Lucano en est, non seulement le symbole, mais aussi l’incarnation. Depuis Margaret Thatcher, on nous répète : « Il n’y a pas d’alternative ». « There is no alternative », ou TINA. Il n’y a pas de « plan B », nous dit-on encore. Il y aurait donc d’un côté le réalisme, qui se contente de refléter la réalité ; de l’autre, l’utopie, forcément irréaliste. Ainsi, on taxe d’angélisme quiconque défend les droits humains. C’est vrai en matière de politique économique ; mais c’est vrai aussi en matière de politique migratoire. Et les deux se confondent : « on ne peut pas accueillir toute la misère du monde », nous explique-t-on : la réalité économique nous obligerait à renoncer à nos idéaux politiques. Opposer ainsi la réalité à l’idéologie, c’est donc renoncer à la politique.

      Que reproche-t-on à Mimmo Lucano ? D’avoir démontré, en pratique, qu’il n’y a pas à choisir entre le cœur et la raison : la xénophobie n’est pas dans l’intérêt de Riace. Les migrant·es kurdes, d’Afrique subsaharienne ou d’Afghanistan, ont redonné vie à ce village vieillissant, dans une région pauvre, victime de l’exode rural. Ce n’est donc pas un hasard si la droite italienne s’est radicalisée : elle a converti sa politique de stigmatisation du Sud rural du pays, qui définissait la Ligue du Nord, en une politique de stigmatisation xénophobe, de Matteo Salvini à Giorgia Meloni.

      En visitant Riace, on comprend qu’une autre politique est possible. La xénophobie politique est coûteuse ; en revanche, une politique de solidarité permet d’utiliser les financements publics, non pour la répression des migrant·es, ce qui est une dépense radicalement inutile, mais pour utiliser leur compétence – qu’il s’agisse d’agriculture ou d’accompagnement des vieillards, d’artisanat ou de ramassage des ordures. Mimmo Lucano n’était-il pas allé jusqu’à imaginer une monnaie virtuelle en attendant l’arrivée des fonds publics ? Bref, la question n’est pas de savoir s’il y a, ou non, de l’argent public, mais de décider de ce qu’on en fait. Or c’est précisément sur ce point que l’ancien maire est attaqué.

      C’est ce choix politique que Mimmo Lucano a rendu visible et audible. Il a fait de Riace un laboratoire – un lieu d’expérimentation sociale, économique et politique. Bref, c’est une utopie réaliste. Voilà ce que veulent rendre impensable les politiques de la droite radicalisée, en tentant de faire converger la logique de la justice d’État et celle des mafias que combattait l’ancien maire, et qui continuent de le combattre. Mimmo Lucano n’est pas condamné pour avoir échoué ; il est persécuté par la justice politique en raison même de son succès.

      S’il n’y a pas d’alternative, alors, il n’y a pas de politique démocratique. Et que reste-t-il d’une démocratie qui ne croit pas à la politique ? Nous le savons bien : c’est le néofascisme qui finit par l’emporter, de Donald Trump à Jair Bolsonaro, et de Giorgia Meloni à Marine Le Pen. Si nous sommes ici à Riace, c’est parce qu’avec le sort d’un homme, dans le tribunal de Reggio, ce qui est en jeu, c’est donc la démocratie elle-même. Une autre politique est possible, nous dit l’expérience de Riace ; autrement dit, la politique reste possible. À nous de l’entendre, et de le faire entendre, au-delà des frontières. Voilà pourquoi nous sommes ici, à Riace, avec Mimmo Lucano.

      https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/261022/avec-mimmo-lucano-riace

    • Accoglienza alla sbarra, in appello chiesti più di 10 anni per Lucano

      La Pg di Reggio Calabria attenua le accuse ma conferma l’impianto di primo grado per l’ex sindaco di Riace. La sentenza in dicembre.

      Alla lettura della richiesta della procura generale, lui non era in aula. Aveva disertato l’udienza in cui si celebrava la requisitoria della pubblica accusa. Aveva lasciato ai suoi legali – gli avvocati Andrea Daqua e Giuliano Pisapia – il compito di rappresentarlo. Mimmo Lucano non era a Reggio Calabria ieri e non sedeva tra i banchi degli imputati in corte d’appello. Era rimasto a Riace. Dove, proprio alla ripresa del processo, e non per puro caso, passava la Carovane solidaire partita in suo onore da Parigi il 17 settembre.

      IN UN LUNGO GIRO TRA ITALIA e Francia, con tappe a Palermo, Napoli, Roma, Torino, La Roya e Marsiglia, terminerà il suo viaggio il 5 novembre. Quel giorno a Marsiglia il sindaco socialista Benoit Payan, alla presenza degli eurodeputati Damien Carême e Pietro Bartolo, ma anche di artisti, avvocati, associazioni in difesa dei rifugiati, conferirà la cittadinanza onoraria all’ex sindaco di Riace. E ieri gli attivisti del collettivo hanno ribadito il loro appello all’intera Europa: «la solidarietà non può essere un crimine, il Mediterraneo non può divenire un simbolo di morte, l’accoglienza è una ricchezza e territori come Palermo, Riace, Crotone, La Roya, Briançon hanno mostrato l’esempio».

      IN FRANCIA LA CAUSA di Lucano gode del sostegno di cittadini e associazioni. In Italia, invece, nell’aura di criminalizzazione generalizzata dei soccorsi in mare, dell’operato delle Ong e dell’immigrazione, tornata in auge con il nuovo governo Meloni, la musica è ben altra. E anche ieri se ne è avuta conferma. La Pg ha chiesto la condanna a 10 anni e 5 mesi di carcere per l’ex sindaco di Riace e principale imputato del processo Xenia nato da un’inchiesta della guardia di finanza sulla gestione dei progetti di accoglienza dei migranti nel borgo della Locride.

      DAVANTI ALLA CORTE, presieduta da Giancarlo Bianchi, è durata 3 ore la requisitoria dei sostituti procuratori generali Adriana Fimiani e Antonio Giuttari. La riformulazione della pena richiesta è pura cosmesi giuridica. Poco cambia rispetto alla pena inflitta dal tribunale di Locri che lo aveva condannato a 13 anni e 2 mesi di reclusione. E’ vero che c’è una riduzione di 3 anni. Ma lo spirito rimane identico. E’ un processo politico costruito ad hoc per demolire il cosiddetto «modello Riace». E’ quel che Pietro Calamandrei, definiva «il rovesciamento di senso», nell’arringa difensiva per Danilo Dolci, altro perseguitato di Stato: non ci sono fatti ma idee, sparisce il contesto, l’identità dell’inquisito viene capovolta. Nel caso di Lucano, l’accoglienza diventa così sistema clientelare per l’accaparramento dei voti, il volontariato si trasforma in peculato, la trasparenza amministrativa in corruzione. Nello specifico, la Procura generale ha chiesto l’assoluzione per un capo di imputazione e la prescrizione per due capi.

      A LUCANO, CHE NEL 2018 trascorse un breve periodo agli arresti domiciliari e circa un anno con il divieto di dimora, vengono contestati i reati di associazione per delinquere, truffa, peculato, falso e abusi d’ufficio. Dopo aver ricostruito gli elementi di prova e dopo aver ritenuto inutilizzabili alcune intercettazioni telefoniche, i due sostituti pg hanno chiesto la condanna anche per altri 15 imputati. Per due è stata chiesta l’assoluzione. La pubblica accusa ha considerato in continuazione i reati per cui era chiamato a rispondere l’ex primo cittadino. La condanna inflitta a Lucano nel processo di prime cure era stata quasi il doppio rispetto alla richiesta del pubblico ministero di Locri, per il quale all’ex sindaco andavano comminati 7 anni e 11 mesi.

      I legali di Lucano si dicono comunque fiduciosi in vista della sentenza. Pisapia e Daqua avevano presentato ricorso, sostenendo che nelle motivazioni ci fosse una ricostruzione della realtà «macroscopicamente deforme rispetto a quanto emerso in udienza», ma soprattutto viziata da un approccio «aspro, polemico, al limite dell’insulto» e dalla preoccupazione di trovare Lucano «colpevole ad ogni costo». E la decisione della corte di riaprire l’istruttoria per una intercettazione del 2017 aveva riacceso le speranze. Si tratta di una registrazione chiave, silenziata in primo grado.

      LA SENTENZA È PREVISTA per dicembre, preceduta dalle arringhe difensive. Nell’attesa, la scelta dell’ex sindaco è quella della disobbedienza civile: non intende pagare la provvisionale da 750 mila euro poiché sarebbe «un’ammissione di colpevolezza e in appello non mi aspetto l’attenuazione della pena, non accetto neanche un giorno in meno, voglio l’assoluzione piena. Voglio la riabilitazione del nostro lavoro. Voglio la luce della verità».

      https://ilmanifesto.it/accoglienza-alla-sbarra-in-appello-chiesti-piu-di-10-anni-per-lucano
      #désobéissance_civile #accueil #modèle_Riace #rovesciamento_di_senso

    • Lucano, colpevole ad ogni costo

      La preoccupazione degli avvocati difensori #Andrea_Daqua e #Giuliano_Pisapia, per cui la Procura Generale di Reggio Calabria voglia Mimmo Lucano “colpevole ad ogni costo”, da sentore si fa fetore nauseabondo. A seguito della condanna in primo grado e della riapertura della prima istruttoria, la pena di oltre 13 anni si è ridotta a 10 anni e 5 mesi. Uno sconto effimero che non conosce riguardo

      Abuso d’ufficio, truffa, concussione, peculato, turbativa d’asta, falsità ideologica e favoreggiamento dell’immigrazione clandestina, è ciò per cui il “processo Xenia” identifica Lucano come colpevole.
      È proprio il concetto di ospitalità ad essere racchiuso e raccontato dal termine “Xenia”. Questo deriva dal greco antico e dei Greci conserva un’anima preziosa quanto rara. Lo spirito per cui accogliere tutti coloro che chiedono ospitalità rappresenta un dovere morale, una legge emblematica anche se non scritta.
      Prescrizione e consuetudine, le stesse per cui Antigone nella celebre opera, scelse di dare sepoltura al cadavere del fratello Polinice. Opponendosi rigidamente all’espressa volontà del re Creonte, che la vietò con un decreto.
      L’ “Agrapta nomina” forte di valori radicati che non vuole piegarsi al “corpus delle ordinanze scritte” è l’analogo perno su cui si reggono la rabbia di Antigone e la tenacia di Mimmo.

      «Non mi spaventa la condanna, ma la delegittimazione morale della mia persona e del mio operato», agire a cui sarebbe impossibile e ingiusto non attribuire riconoscenza. Gratitudine per aver cercato e trovato un percorso contrapposto alla retorica di sterili dibattiti circa la chiusura dei porti e la concentrazione in centri di accoglienza.
      Per ben tre volte sindaco di Riace, Mimmo Lucano optò per l’integrazione anche quando era ancora solo un libero cittadino. Assieme ad altri riacesi accoglie, nel Luglio 1998, alcuni curdi che sbarcano sulle coste di Riace.

      “Io non avevo studiato per essere un esperto dei temi dell’immigrazione o per essere sindaco… Stavo cercando di capire come dare un contributo per dare un’opportunità alla mia terra in un contesto di declino demografico, di spopolamento… “

      #Città_Futura” nasce un anno dopo, per recuperare le abitazioni abbandonate di Riace superiore e risvegliare antichi mestieri. Aprono nuovi laboratori di tessitura, ceramica, vetro e confetture. Con il primo mandato di Mimmo nasce il suo sistema di accoglienza, giornalisticamente definito “Modello Riace” di efficacia ed efficienza innegabili.
      Fu allora che il borgo divenne esempio di un’alternativa al respingimento violento, e il mondo intero guardò.

      Nel 2010 Lucano è al 40º posto nella lista dei leader più influenti dalla rivista americana Fortune, si è posizionato terzo nella World Mayor per i migliori sindaci del mondo. Nel 2017 riceve il premio per la Pace Dresda e il Los Angeles Times redigerà un intero articolo sul paese.

      Gli anni hanno però trasformano lo sguardo: Mimmo da virtuoso diviene un criminale

      «La mia vicenda giudiziaria inizia con l’arrivo del nuovo prefetto di Reggio Calabria. Da subito il suo atteggiamento fu molto sospettoso: cercava di contrastare ciò che avevamo fatto fino ad allora a Riace»

      Nel 2016 i verbali della relazione del prefetto di Locri riferiscono anomalie nel funzionamento del sistema, è lo stesso anno in cui scatta l’indagine della magistratura per truffa e concussione. Dal 2017 al comune furono negati fondi, bonus e borse lavoro.
      Il processo culmina nel settembre 2021 con la condanna di Lucano in primo grado a tredici anni e due mesi con l’accusa di far parte di associazione a delinquere. Punizione esemplare ignara della solidarietà movente.

      “Pensavo di contribuire al riscatto della mia terra da un’immagine negativa. È una cosa pesantissima. Non so se per i delitti di mafia ci sono sentenze simili”

      Oggi la riduzione di soli tre anni della pena riporta ai sensi l’odore di una deformazione della realtà. Un approccio viziato definito dagli avvocati di Mimmo “aspro, polemico, al limite dell’insulto”.

      Nel mentre la Giustizia segue il suo corso perché le leggi siano sempre rispettate, a noi resta la riflessione.
      Dubbi e domande, mai così vicine all’Antigone di Sofocle.

      https://www.ultimavoce.it/lucano-colpevole-ad-ogni-costo

    • Mimmo Lucano, De Magistris: «Non può andare in carcere per aver aperto il cuore»

      Mimmo Lucano, De Magistris: «Non può andare in carcere per aver aperto il cuore»

      Padre Zanotelli: «E’ un esempio di accoglienza per questo Paese»

      (Napoli). Tappa a Napoli dell’evento «Carovana d’amore» in sostegno a Mimmo Lucano presso l’Istituto Italiano per gli Studi Filosofici. Interviene Luigi De Magistris: «Spero che la magistratura agisca con buon senso. Non riesco ad immaginare che Mimmo possa andare in carcere per aver aperto il suo comune e il suo cuore». Padre Zanotelli: «E’ un esempio di accoglienza per questo Paese, nostra Carovana messaggio importante». (Raffaele Accetta/alanews)

      https://www.youtube.com/watch?v=X4dTGctuuqQ

  • Le gouvernement veut dissoudre un groupe militant pour des intentions supposées, une procédure arbitraire contre la liberté d’expression
    https://ricochets.cc/Le-gouvernement-veut-dissoudre-un-groupe-militant-pour-des-intentions-supp

    La loi séparatisme permet une extension arbitraire de la répression des contestations des pouvoirs. Après entre autres la procédure avortée contre le média Nantes Révoltée et les menaces contre Alternatiba (et aussi envers un groupe antifasciste, des associations musulmanes dissoutes...), nouvelle illustration du régime autoritaire en vigueur et de ses sinistres oeuvres en Lorraine. C’est fou comme cette supposée « démocratie » ressemble souvent furieusement à une forme de dictature. 🔴 LE GOUVERNEMENT (...) #Les_Articles

    / #Procès,_justice,_répression_policière_ou_judiciaire, Autoritarisme, régime policier, démocrature...

    #Autoritarisme,_régime_policier,_démocrature...

  • Airline hired for UK’s #Rwanda deportations pulls out of scheme

    Exclusive: #Privilege_Style causes problem for Home Office as it bows to pressure from campaigners

    A charter airline hired to remove people seeking refuge in the UK to Rwanda has pulled out of the scheme after pressure from campaigners.

    A plane operated by Privilege Style first attempted to fly asylum seekers to the east African country in June but was grounded by an 11th hour ruling by the European court of human rights.

    The Mallorca-based carrier had become known as the UK government’s “airline of last resort” for its willingness to conduct deportation flights that other airlines refused.

    But after an email campaign by torture survivors and refugee organisations, Privilege Style has said it will no longer operate flights to Rwanda.

    The development will leave the UK government in a fix. Two other charter airlines that previously conducted deportation flights, Titan Airways and AirTanker, have already ruled themselves out of the scheme.

    In a letter to the charity Freedom from Torture, which has led the campaign under the hashtag #StopTheFlights, Privilege Style said it “hereby wishes to communicate the following: that it will not operate flights to Rwanda in the future. That it has never flown to Rwanda since the one flight scheduled for June 2022 (which is the reason for this controversy) was suspended.”

    The UK signed a £120m deal with the Rwandan government in April to outsource the UK’s asylum system as it sought to find a solution to a growing number of refugees entering the UK via small boats in the Channel.

    The deal meant people who had arrived in the UK by irregular means, such as by small boat, could be forced on to charter planes and flown to the east African country.

    It was criticised by human rights organisations because of Rwanda’s record as an authoritarian state that repeatedly imprisons, tortures and murders alleged political opponents.

    Privilege Style’s statement followed an escalation in public protests against it by campaigners. Last week, activists from Freedom from Torture presented the firm with “worst airline of the year” award at the carrier’s headquarters in Palma in front of the media.

    According to the carrier, its VIP customers include several Spanish companies and top Spanish football clubs.

    Campaigners targeted Privilege Style outside the Real Madrid v Barcelona match last week in Madrid, holding banners reading: “Don’t fly with Privilege Style while they profit from refugees’ pain.”

    No flights have taken off yet to Rwanda because of legal challenges in the high court.

    On 14 June, a Privilege Style Boeing 767 was due to take seven asylum seekers to Kigali from a military airport at Boscombe Down, Wiltshire. The day before it had taken tourists from Tenerife, Spain, to Düsseldorf.

    But the flight, which cost the UK taxpayer about £500,000, was cancelled at the last minute following a decision by the European court.

    Liz Truss, the outgoing prime minister, had pledged to continue the scheme. Candidates considering running to be prime minister – including Rishi Sunak, Penny Mordaunt and Boris Johnson – are expected to support the deportations.

    Last month, a detailed review by the charity Medical Justice found many asylum seekers threatened with removal to Rwanda may have been tortured or trafficked into the UK.

    Kolbassia Haoussou, a torture survivor and a director at Freedom from Torture, said: “This is a victory for people power – for thousands who took action and for the torture survivors who stood up against the UK government’s cruel ‘cash for humans’ Rwanda scheme.

    “When I fled torture and persecution in central Africa, the UK gave me sanctuary and a chance to rebuild my life. It breaks my heart to see the government turning their back on people like me in their hour of need, and that private companies are profiting from their suffering.

    “Privilege Style’s decision to no longer fly torture survivors to Rwanda sends a message to the aviation industry: if you try and cash in on the pain of refugees, you will be held to account.”

    A Home Office spokesperson said: “We remain committed to our world-leading Migration Partnership with Rwanda, which will see those who come to the UK through dangerous, illegal and unnecessary routes relocated to Rwanda to rebuild their lives there.

    “Rwanda is a safe and secure country with a strong track record of supporting asylum seekers and we will continue to robustly defend the partnership in the courts. We do not comment on operational matters.”

    https://www.theguardian.com/uk-news/2022/oct/21/airline-hired-uk-rwanda-deportations-pulls-out-privilege-style
    #UK #Angleterre #procédure_d'asile #externalisation_de_la_procédure #pays_tiers #Rwanda #asile #migrations #réfugiés
    #avions #compagnie_aérienne

    –—

    ajouté à la métaliste sur la mise en place de l’#externalisation des #procédures_d'asile au #Rwanda par l’#Angleterre :
    https://seenthis.net/messages/966443

  • Victoire du Kangoo lors d’une farce ubuesque
    https://ricochets.cc/VICTOIRE-DU-KANGOO-LORS-D-UNE-FARCE-UBUESQUE.html

    LE PROCÈS Frustré de ne pas avoir pu identifier le conducteur ou conductrice du Kangoo, le Procureur de la Ripoublique s’est lamenté hier devant la Juge comme l’aurait fait le Père Ubu, « capitaine des dragons, docteur en pataphysique et grand Maître de l’Ordre de Gidouille ». Déjà, le procès-verbal fut signalé électroniquement au mois de mars, c’est-à-dire trois mois après la manif du 24 janvier 2020. Autrement dit, le gradé derrière la caméra n’a pas eu l’idée d’ordonner un subordonné sur place d’aller (...) #Les_Articles

    / #Valence, #Procès,_justice,_répression_policière_ou_judiciaire, Autoritarisme, régime policier, (...)

    #Autoritarisme,_régime_policier,_démocrature...

  • Patrick Drahi ne nous fera pas taire !
    https://disclose.ngo/fr/article/patrick-drahi-ne-nous-fera-pas-taire

    Disclose dénonce aux côté de 73 médias indépendants et organisations de journaliste, la décision de justice obtenue par le milliardaire et son groupe Altice contre nos collègues de Reflets-info. Lire l’article

  • Harcèlement moral : ce que change le verdict du procès France Télécom
    https://theconversation.com/harcelement-moral-ce-que-change-le-verdict-du-proces-france-telecom

    Par ailleurs, selon une source syndicale, les honoraires des avocats des prévenus se seraient élevés à près de 20 millions d’euros, entièrement pris en charge par les « assurances dirigeants ». Par contraste, l’arrêt ne prévoit pas, pour les parties civiles syndicales, le remboursement des honoraires de leurs avocats à la hauteur des dépenses engagées. Une telle décision fragilise la capacité des organisations syndicales à défendre les salariés par la mobilisation du droit devant les juridictions. L’égalité des armes entre les protagonistes des procès reste à réaliser.

    Et les criminels vont encore dépenser l’argent des autres pour se pourvoir en cassation.

  • La justice interdit à Reflets de publier des informations sur Altice | Reflets.info
    https://reflets.info/articles/la-justice-interdit-a-reflets-de-publier-des-informations-sur-altice

    Ce que toute la presse craignait lors de la transposition en droit français de la directive européenne sur le secret des affaires s’est concrétisé ce jeudi 6 octobre 2022. C’est Reflets.info qui ouvre le bal avec une décision du Juge des référés du Tribunal de commerce de Nanterre. Altice et son président Patrick Drahi étaient passablement énervés par nos articles qui détaillent les montages financiers, les dépenses colossales, l’optimisation fiscale à outrance, révélés dans des documents publiés sur Internet par le groupe de ransomware Hive. Aux motifs de la violation du secret des affaires, une société pourrait obtenir une décision de justice interdisant à un journal de traiter un sujet d’intérêt général.

    C’est désormais chose faite : à compter de ce jour, il nous est interdit de publier de nouvelles informations.

    Si l’on s’en tient à la rédaction de la décision, nous ne pouvons d’ailleurs plus exercer notre métier du tout : « ordonnons à la société Rebuild.sh de ne pas publier sur le site de son journal en ligne « reflets.info » de nouvelles informations. »

  • Même l’association non-violente Alternatiba est accusée de séparatisme par un préfet ! Dissolution en vue ?
    https://ricochets.cc/Meme-l-association-non-violente-Alternatiba-est-accusee-de-separatisme-par

    Dans la série « application liberticide de loi liberticide » que les régimes autoritaires nous envient : application de la loi « séparatisme » pour dissoudre Alternatiba. A ce stade, le gouvernement et ses sbires extrême droitisés vont bientôt accuser de séparatisme les français qui apprécient le houmos, le borscht, la moussaka ou le couscous ! Malheureusement le ridicule stratosphérique ne tue pas, lol Si j’entends encore quelqu’un dire « notre démocratie » à propos de la france je « sors mon revolver » ! lol (...) #Les_Articles

    / #Procès,_justice,_répression_policière_ou_judiciaire, Autoritarisme, régime policier, démocrature...

    #Autoritarisme,_régime_policier,_démocrature...
    https://basta.media/l-obsolescence-des-smartphones-et-la-collecte-massive-de-donnees-impact-eco

  • La critique des espaces publics : quels projets de #paysage ?
    https://metropolitiques.eu/La-critique-des-espaces-publics-quels-projets-de-paysage.html

    Comment se transforme un #espace_public, au-delà des intentions de ses concepteurs ? Un ouvrage du paysagiste Denis Delbaere propose des outils critiques afin d’interroger, de manière concrète et située, la fabrique des espaces publics. Dans Altérations paysagères, Denis Delbaere élabore un cadre critique propre aux projets d’espaces publics qui repose sur la mécanique altérative (l’évolution d’un projet dans le temps). À ce titre, il puise dans ses 20 années d’expérience de paysagiste maître d’œuvre et #Commentaires

    / espace public, paysage, #projet_de_paysage, #altération, #démarche_réflexive, #processus_circulaire, archives de (...)

    #archives_de_projet

  • #Mimmo_Lucano, condamné mais libre à la Fête

    L’ancien maire de #Riace fait l’objet d’une cabale judiciaire en Italie. Il a été condamné à treize ans de prison. Son crime : une politique innovante d’accueil des migrants.

    Quand il vient en France, c’est toujours dans de beaux endroits. En novembre 2021, l’Italien Domenico Lucano était à la bourse du travail de Paris. Fin juin, il a participé à une soirée de solidarité dans la ville communiste de Bobigny, qui l’a fait citoyen d’honneur. Samedi, il sera à la #Fête_de_l'Humanité. De solidarité, l’ancien maire de Riace (2004-2018) en a toujours eu à revendre. Désormais, c’est lui qui en a besoin, condamné à treize ans de prison, dans une terre où les pires mafieux ne le sont pas à de telles peines.

    Son crime ? Avoir développé dans sa cité de Calabre, dans le sud de l’Italie, une politique innovante d’accueil des migrants. Tout commence un jour de 1998. Celui qui n’est pas encore maire voit débarquer sur la plage des exilés. « Il y avait là plus de 200 personnes, venues du Kurdistan irakien, turc et syrien. C’était l’un des premiers débarquements en Calabre », se souvenait-il le 18 octobre 2021 dans un entretien à l’Humanité. Ces femmes et hommes sont alors conduits à la maison des Pèlerins.

    Cet été de 1998, il passe de longues journées dans le centre de réfugiés. En septembre arrivait la fête des saints Côme et Damien, médecins venus d’Arabie au IVe siècle et qui ne se faisaient pas payer par les pauvres. Ils auraient rejoint Riace à la nage. Pour la célébration de cette fête, la maison des Pèlerins devait retrouver sa vocation et accueillir les Roms qui viennent nombreux honorer les patrons de la ville. Un Kurde iranien souffle alors une idée à l’évêque et à Domenico Lucano : « Nous sommes un peuple en exil qui cherche un lieu d’accueil. Et nous avons trouvé un village rempli de maisons inhabitées. » Avec l’évêque, il contacte les propriétaires, qui à Buenos Aires, qui au Canada, qui dans le nord de l’Italie, tous partis ailleurs chercher un travail. Peu à peu, les migrants s’installent ; ils vivent à Riace mieux que dans les bidonvilles des faubourgs des villes calabraises, où les incendies mafieux contre les abris de ces travailleurs bon marché sont légion. C’est la résurrection du bourg ; les « autochtones » y trouvent leur compte.

    « Montrer l’exemple est le seul moyen de convaincre »

    En 2004, Mimmo Lucano est élu maire. Il utilise alors la subvention de 30 euros par jour accordée par l’État aux villes qui accueillent des exilés pour développer les services publics. Par exemple, le ramassage des déchets - avec un âne et une carriole dans les rues escarpées - est confié à une coopérative. Une monnaie locale est créée pour faire face aux retards de paiements... Plusieurs fois, il est réélu.

    Pour l’ancien maire de Grande-Synthe, dans le Nord, le député européen Damien Carême, qui instaura lui aussi une politique d’accueil, une phrase de Gandhi s’applique à Mimmo Lucano : « Montrer l’exemple n’est pas le meilleur moyen de convaincre, c’est le seul. » Pour l’élu EELV, son ancien collègue italien est « un de ces combattants qui a assumé ses responsabilités face à la faillite de l’Europe. Il n’y a pas eu de soulèvement de foules contre la politique d’accueil, grâce aux talents de pédagogue de Domenico Lucano. Quand on accueille correctement, les choses se passent extrêmement bien ». Même tonalité du côté de la vice-présidente de la Ligue des droits de l’homme, Marie-Christine Vergiat : « Par son engagement comme simple citoyen puis élu, Mimmo Lucano a montré que l’accueil des exilés pouvait au contraire redonner l’espoir, en l’espèce à tout un village, ce qui lui vaut les foudres de l’extrême droite. »

    Vite, Matteo Salvini, ministre de l’Intérieur de la Ligue qui cherche à fermer les ports aux migrants, le prend en grippe. Et pour cause : les rapports administratifs sont laudateurs sur l’action municipale, et Mimmo Lucano, qui n’est que maire d’une ville de 2 300 habitants, figure en 2016 dans le classement de Forbes des 50 personnes les plus influentes au monde . À partir de 2015, la justice s’intéresse à l’élu de Riace. Elle déniche des irrégularités : les appels d’offres n’auraient pas été passés en bonne et due forme. Comme si la cabale judiciaire ne suffisait pas, une chape de plomb s’abat sur cette expérience. Un documentaire de la Rai est censuré ; il n’a toujours pas été diffusé.

    Quand Domenico Lucano passera par l’Agora de la Fête de l’Humanité, au meeting du samedi ou au Village du monde, ce sera un répit pour lui, alors que son procès en appel se déroule en ce moment même. La solidarité est importante, rappelle l’antifasciste Paola Vallatta, responsable de l’Association nationale des partisans italiens de Paris. « J’étais à Bobigny. C’était magnifique de voir dans les yeux de Mimmo Lucano qu’il est toujours émerveillé par l’intérêt de la population française pour son histoire », souligne-t-elle. À la Fête de l’Humanité, ce grand rassemblement de la solidarité, de l’émerveiller à nouveau.

    https://www.humanite.fr/monde/domenico-lucano/italie-mimmo-lucano-condamne-mais-libre-la-fete-de-l-humanite-762725
    #processo_Xenia #Xenia #procès_Xenia

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    voir aussi ce fil de discussion :
    #IoStoConMimmo
    https://seenthis.net/messages/931476

    • #Domenico_Lucano : « Le peuple retrouvera sa dignité en conquérant l’égalité pour tous »

      Il a revitalisé un village de Calabre par une ambitieuse politique d’accueil des exilés. Domenico Lucano est l’ancien maire emblématique de Riace. Son #procès en #appel débute le 26 octobre, il risque 13 ans de prison pour avoir tendu la main aux réfugiés. En pleine vague brune en Italie, il défend haut et fort son utopie communale.

      Ce fut l’un des invités d’honneur de la dernière édition de la Fête de l’Humanité. Domenico Lucano, dit Mimmo, est une figure de la lutte pour les droits des immigrés. Enseignant de profession, compagnon de route des communistes italiens, il a été élu maire du village calabrais de Riace en 2004. Il subit depuis 2018, dans un contexte de nouvelle poussée des partis populistes et d’extrême droite en Italie, une véritable cabale judiciaire. D’abord interdit de séjour, onze mois durant, dans le village qu’il a administré quatorze ans, il a été condamné, en septembre 2021, à treize ans de prison. Son crime : avoir tendu la main aux exilés et redynamisé, socialement et économiquement, son village et sa région.

      Pour de nombreux acteurs de la solidarité, ce maire militant est un exemple. Mimmo a notamment reçu le prix Dresde pour la paix en 2017. Il est également devenu citoyen d’honneur de plusieurs villes françaises, par exemple des municipalités communistes de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, et de Chazemais, dans l’Allier.

      (#paywall)

      https://www.humanite.fr/monde/domenico-lucano/domenico-lucano-le-peuple-retrouvera-sa-dignite-en-conquerant-l-egalite-pou

  • Rwanda asylum deal not legally binding : Law Society

    The UK ‘asylum partnership’ with Rwanda is not legally binding, has not been scrutinised by parliament and does not protect the rights of asylum-seekers, the Law Society has said in evidence to the House of Lords on the memorandum of understanding (MoU) for the provision of an asylum arrangement.

    Law Society president I. Stephanie Boyce said: ’This partnership would make profound and irreversible changes to the lives of refugees and migrants sent to Rwanda. But the safeguards in the deal are not binding or enforceable – domestic and international law requirements do not apply to them.

    ’If an asylum-seeker’s human rights were breached in Rwanda they would have no way of seeking justice in the UK. They wouldn’t be able to appeal to British courts and there is nothing the UK could do to enforce their rights under the terms of the agreement.’

    The deal potentially puts the UK in breach of international law, she added. ’For instance, if categories of people were in practice prevented from claiming asylum in the UK, or if the government were to effectively pre-judge asylum claims from groups of people.

    ’The Law Society believes people will be given insufficient notice or time to get legal advice about their removal to Rwanda under the MoU – just 14 days, or seven days if they are in immigration detention. Anyone subject to such a life-changing order must be able to challenge the decision, and to have their case processed fairly and transparently.’

    The UN Refugee Convention prohibits ‘refoulement’ – returning a refugee to a place where they would face persecution. This applies not only to their country of origin but also to a third country, such as Rwanda, the Society said.

    ’The UN special rapporteur on trafficking in persons has raised concerns we echo that asylum seekers removed by the UK might face persecution in Rwanda,’ Boyce said. ’There is a further risk of them being subsequently removed from Rwanda to their country of origin and facing persecution there. Both eventualities could contravene the principle of non-refoulement.’

    She said that monitoring bodies referred to in the agreement have not been set up and there are insufficient details to determine whether they would provide effective oversight.

    Boyce concluded: ’The government has failed utterly to put in place any legally binding safeguards or enforcement mechanisms to protect the rights of people it intends to send to Rwanda. In addition to the consequences for individuals, this has potential consequences for the UK’s international standing, which is underpinned by our reputation for upholding the rule of law.

    ’The deal outsources the UK’s international obligations onto Rwanda. There is a real risk this could set a precedent.’

    https://www.lawgazette.co.uk/law/rwanda-asylum-deal-not-legally-binding-law-society/5113506.article

    #UK #Angleterre #procédure_d'asile #externalisation_de_la_procédure #pays_tiers #Rwanda #asile #migrations #réfugiés

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    ajouté à la métaliste sur la mise en place de l’#externalisation des #procédures_d'asile au #Rwanda par l’#Angleterre :
    https://seenthis.net/messages/966443

  • Femmes dans la procédure d’asile suisse. « Livrées à leur sort plutôt qu’accueillies »

    Avec sa campagne « Livrées à leur sort plutôt qu’accueillies ! » et ses revendications politiques, TERRE DES FEMMES Suisse demande justice et protection pour les réfugiées en Suisse. Dans son rapport de campagne, l’organisation répond à une publication de la Confédération et des cantons au sujet d’une analyse de la situation des femmes réfugiées dans le système d’asile, qui met l’accent sur les femmes réfugiées. La Confédération et les cantons reconnaissent pour la première fois qu’une perspective de genre et des mesures appropriées sont nécessaires dans le système d’asile pour prévenir la violence contre les femmes et pour soutenir les personnes concernées. Toutefois, l’organisation regrette que les mesures prévues par la Confédération et les cantons soient toujours incomplètes et non systématiques, en dépit des obligations qui leur incombent en vertu de la Convention d’Istanbul. Une position également soutenue par d’autres organisations.

    Le rapport Terre des femmes Suisse a été publié en octobre 2019. Il est disponible sur le site de l’organisation ou téléchargeable ici : « Livrées à leur sort plutôt qu’accueillies. Les femmes réfugiées ne sont pas en sécurité dans le système de l’asile », octobre 2019 (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwjkse2ausP5). Nous reproduisons ci-dessous leurs principales revendications.

    L’association Terre des femmes suisse se bat depuis des années pour qu’une analyse de la situation des femmes réfugiées soit faite et que l’accent soit mis sur la situation de ces femmes dans le système de l’asile en Suisse. En 2016, la conseillère nationale socialiste Yvonne Feri a déposé une motion « Analyse de la situation des réfugiées » qui demandait à la Confédération deux choses. D’une part une analyse de l’encadrement, du traitement et du soutien qu’offre la Suisse aux femmes et aux filles qui relèvent du domaine de l’asile et qui ont été victimes de violence ou d’exploitation sexuelle. D’autre part, elle questionne la nécessité d’agir dans le domaine de l’hébergement et de l’encadrement généraux de requérantes d’asile majeures ou mineures. Depuis, en 2017, la Suisse a ratifié la Convention d’Istanbul visant à prévenir et à lutter contre la violence à l’égard de toutes les femmes et la violence domestique, quel que soit le statut ou le pays de provenance. Le 25 septembre 2019, le Conseil fédéral et le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) publient deux rapports sur la base de l’étude mandatée suite au dépôt de la motion Feri et publiée en mars 2019 par le Centre de compétence pour les Droits Humains (CSDH).

    L’association Terre des femmes suisse salue la publication récente des rapports portant sur les structures d’asile existantes au niveau tant fédéral que cantonal. L’organisation regrette toutefois que les mesures prévues par la Confédération et les cantons soient toujours incomplètes et non systématiques, en dépit des obligations qui leur incombent en vertu de la Convention d’Istanbul. Parmi une liste de revendications politiques listées dans le rapport, Terre des femmes regrette que les mesures envisagées dans les rapports du SEM et du Conseil fédéral manquent de prendre en considération la diversité des femmes et des formes de violences qui s’exercent sur elles. Elle estime essentiel que le soutien et la protection de ces femmes se fasse sans considération du stade de la procédure d’asile ou de leur statut de séjour. Elle rappelle la nécessité de collaborer avec des services spécialisés et d’intégrer les dimensions du genre dans toute le système de l’asile. Elle souligne l’importance de former le personnel qui interagit au quotidien avec ces femmes. De même, elle demande, tel que l’avait fait la motion Feri, qu’une reconnaissance des violences puisse être effectuée même si ces actes ont été perpétré à l’étranger, avant leur arrivée en Suisse. Le rapport précité donne davantage d’explications sur ces points et en relève d’autres tout aussi relevant.

    De son côté, le Haut Commissariat pour les Réfugiés (HCR) salue également l’adoption de ces rapports. L’adoption de ces trois rapports successifs au Postulat Feri apporte, pour le HCR, une contribution importante à la reconnaissance et à la prise en compte des besoins spécifiques aux femmes réfugiées et aux victimes de violence sexuelle dans le système d’asile suisse. Il souligne toutefois le besoin de mettre en place des mesures additionnelles adaptées aux femmes ainsi que d’assurer une mise en œuvre des rapports impliquant tous les acteurs concernés et portant sur l’ensemble des domaines d’activités analysés.

    L’Organisation Suisse d’Aide aux Réfugiés (OSAR) critique entre autres le fait que le SEM a évalué lui-même la situation des femmes dans les CFA, au lieu de confier cette analyse à un acteur externe.

    Les différentes prises de position démontrent que les autorités gagneraient à se faire accompagner dans leur volonté d’amélioration par les différents acteurs mobilisés depuis de nombreuses années auprès des femmes exilées. De par le lien de confiance tissé, ces associations de terrain permettraient notamment de faire entendre la voix de celles concernées. Ensemble, alors peut-être, elles pourront prendre soin de cette question bien trop longtemps invisibilisée.

    https://asile.ch/2019/10/18/terre-des-femmes-livrees-a-leur-sort-plutot-quaccueillies

    #rapport #femmes #asile #migrations #réfugiés #réfugiées #genre #violence #procédure_d'asile #Suisse #Convention_d'Istanbul #Terre_des_femmes

  • Le numéro 33-34 de la revue #Nunatak (version italophone)


    Sommaire :

    La revue est disponible en ligne :
    https://nunatak.noblogs.org/files/2020/05/n.33.34.inv_.prim2014.interni.pdf

    Je mettrai ci-dessous des mots-clés et citations des articles...

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    métaliste des numéros recensés sur seenthis :
    https://seenthis.net/messages/969908