• Quand l’IA permet de créer des logements abordables et durables
    https://up-magazine.info/urbanisme-architecture-paysages/121516-quand-lia-permet-de-creer-des-logements-abordables-et-durables

    Un terrain vide situé à West Oakland, en Californie, va renaître en un complexe de 316 logements abordables et durables, The Phoenix, construits par modules en usine, puis transportés par camion sur le site du projet où ils peuvent être assemblés par une grue en deux semaines environ. The Phoenix va devenir un village de l’innovation, avec des flux de travail de conception basés sur les résultats, des approches industrialisées de la construction et des biomatériaux de construction qui réduisent les émissions de carbone. 

    Le secteur de la construction n’est pas étranger aux grands changements. Qu’il s’agisse de la prolifération du BIM, du passage des plans à des documents numériques ou de l’essor de la mobilité et de la collaboration dans le cloud, la transformation fait partie intégrante de l’ADN du secteur au cours des dernières décennies. Chaque grand changement s’accompagne certainement de défis, mais le secteur de la construction a réussi à surmonter ces difficultés pour faire progresser les processus et atteindre de nouveaux niveaux d’efficacité. 
    L’IA est sans conteste la prochaine frontière du progrès technologique pour l’industrie de la construction. La dernière étude State of Design and Make d’Autodesk révèle que 66 % des dirigeants affirment que l’IA deviendra essentielle à leurs activités au cours des deux ou trois prochaines années. En outre, selon les études d’Accenture et de Frontier Economics, le secteur de la construction pourrait connaître une croissance remarquable de ses bénéfices – estimée à 71 % – grâce à l’intégration de l’IA au cours des dix prochaines années.

    à défaut de pendre les urbanistes avec les tripes des technocrates, la dissolution des architectes dans un vernis écolo parait en bonne voie

    #IA #BTP #construction #rationalisation #profit #logement #architectes

  • Florence Sutcliffe-Braithwaite · ‘We’ve messed up, boys’: Bad Blood
    https://www.lrb.co.uk/the-paper/v45/n22/florence-sutcliffe-braithwaite/we-ve-messed-up-boys

    Bayer’s heat-treated Factor VIII product was licensed in the US in February 1984, but it kept making the untreated version until August that year and didn’t stop selling old stock until the following summer. Armour’s parent company was told in October 1985 that its heat-treatment method wasn’t completely effective against HIV, but denied everything; only after two children in Birmingham and four patients in Newcastle were infected with HIV did the company admit to the DHSS that its product was unsafe. If non-heat-treated Factor VIII was banned in one country, the companies just sold it elsewhere. In the first quarter of 1985, #Bayer exported twenty thousand vials – more than five million units – of its old Factor VIII from the US to other parts of the world. Competition between pharmaceutical companies sometimes stimulated innovation, but it could just as easily generate a race to the bottom. The head of the CDC’s Aids taskforce told the companies that their actions ‘ultimately led to not only a lot of death and misery, but a destruction of your customers’. As McGoogan points out, the parallels with the present-day opioid crisis in the US are clear.

    #hémophilie #dérivés_sanguins #profits #grande_Bretagne

  • «Trattenuti. Una radiografia del sistema detentivo per stranieri»
    https://www.meltingpot.org/2023/11/trattenuti-una-radiografia-del-sistema-detentivo-per-stranieri

    Un sistema inumano e costoso, inefficace e ingovernabile, che negli anni ha ottenuto un solo risultato evidente: divenire lo strumento per rimpatri accelerati dei cittadini tunisini, che nel periodo 2018-2021 rappresentano quasi il 50% delle persone in ingresso in un Centro di permanenza per il rimpatrio (CPR) e quasi il 70% dei rimpatri. Ma i migranti tunisini sono stati solo il 18% degli arrivi via mare nel 2018-2023. Quasi il 70% dei rimpatri dai CPR è di soli cittadini tunisini. Sono questi i tratti caratteristici del sistema dei CPR raccolti nel report “Trattenuti. Una radiografia del sistema detentivo per (...)

  • ‘Hamas has created additional demand’: #Wall_Street eyes big #profits from war | Arms trade | The Guardian
    https://www.theguardian.com/world/2023/oct/30/wall-street-morgan-stanley-td-bank-ukraine-israel-hamas-war

    The death toll – which so far includes more than 8,000 Palestinians and over 1,400 Israelis – wasn’t top of mind for TD Cowen’s Cai von Rumohr, managing director and senior research analyst specializing in the aerospace industry. His question was about the upside for General Dynamics, an aerospace and weapons company in which TD Asset Management holds over $16m in stock.

    Joe Biden has asked Congress for $106bn in military and humanitarian aid for Israel and Ukraine and humanitarian assistance for Gaza. The money could be a boon to the aerospace and weapons sector which enjoyed a 7-percentage point jump in value in the immediate aftermath of Hamas’s 7 October attack on Israel and the beginning of Israel’s bombardment of Gaza in response.

    “Hamas has created additional demand, we have this $106bn request from the president,” said Von Rumohr, during General Dynamics’ earnings call on 25 October. “Can you give us some general color in terms of areas where you think you could see incremental acceleration in demand?”

    #bave

  • Grosses marges, ventres vides : le scandale des profits de l’industrie agroalimentaire - Basta !

    L’inflation sur les produits alimentaires est majoritairement nourrie par une hausse des profits des entreprises de l’agroalimentaire, alors que près d’une personne sur trois a du mal en France à se payer trois repas par jour.

    Et dedans
    https://www.60millions-mag.com/2023/08/31/avec-l-inflation-les-aliments-essentiels-deviennent-inaccessibles-21
    https://www.famillesrurales.org/trimestre-antiinflation-consommateurs-perdants

    +50% d’augmentation sur le sucre ! wtf ya plus de limite

    #alimentation #agroalimentaire #inflation (mon cul) #marge #profits #santé #grande_distribution

  • « Les #gestionnaires_d'actifs ont pris possession d’#infrastructures fondamentales de notre vie quotidienne » | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/gestionnaires-dactifs-ont-pris-possession-dinfrastructures-fondament/00108262

    Géographe à l’université Uppsala en Suède, Brett Christophers a étudié ces poids lourds de la #finance dans son dernier livre Our Lives in Their Portfolios. Why Asset Managers Own the World (Verso, 2023, non traduit). Il a constaté notamment leur intérêt croissant pour l’acquisition de logements, de routes, d’antennes-relais, de parcs éoliens ou de réseaux d’eau, en somme pour toutes ces infrastructures dont dépendent les populations, au point que nous vivons, selon le chercheur, dans « une #société de gestionnaires d’actifs ».

    […]

    Cette société, est-elle une utopie ou une #dystopie ?

    B. C :
    En effet, on peut se demander : qu’est-ce que ça peut faire que les propriétaires de ces #infrastructures soient des #gestionnaires_d’actifs ? Ces dernières affirment que c’est mieux pour tout le monde quand les infrastructures sont entre leurs mains plutôt qu’entre celles d’autres propriétaires, notamment les #pouvoirs_publics : les usagers bénéficieraient de meilleurs services, les clients de meilleurs rendements et l’#Etat pourrait se focaliser sur ses missions. En réalité, aucun de ces arguments ne tient. Le livre consiste justement à les déconstruire.

    Concernant les usagers, des reportages ont documenté les dérives des gestionnaires d’actifs. Mais on pourrait se dire que ces histoires sont anecdotiques ou qu’ils ne font pas pire que les autres. Après tout, ce n’est pas parce que ces #infrastructures sont publiques qu’elles sont forcément bien gérées. Je viens du #Royaume-Uni et on ne peut pas dire que quand le gouvernement détient ces infrastructures ce soit un modèle à suivre…

    Mais, en réalité, plusieurs études ont montré que ce n’est pas anecdotique. Par exemple, les taux d’expulsion sont plus élevés pour les logements possédés par des gestionnaires d’actifs que pour ceux appartenant à d’autres propriétaires. De même, les maisons de retraite sont plus chères, alors que le nombre d’heures par patient des infirmières y est plus bas, ce qui explique probablement pourquoi la mortalité y est plus élevée.

    #rentabilité #profits

  • How a #Big_Pharma Company Stalled a Potentially Lifesaving Vaccine in Pursuit of Bigger #Profits — ProPublica
    https://www.propublica.org/article/how-big-pharma-company-stalled-tuberculosis-vaccine-to-pursue-bigger-pro

    A vaccine against tuberculosis, the world’s deadliest infectious disease, has never been closer to reality, with the potential to save millions of lives. But its development slowed after its corporate owner focused on more profitable vaccines.

    #surnuméraires #GSK #vaccins #tuberculose

  • Comment faire face aux revues scientifiques prédatrices ?

    Le système de publication scientifique est sous tension : l’accès aux publications doit être libre et gratuit, mais publier a un coût. Historiquement, ce coût revenait aux lecteurs. Désormais, il incombe souvent aux auteurs, permettant un accès gratuit aux lecteurs, avec en 2019 31 % de tous les articles scientifiques publiés qui étaient accessibles à tous. La note, souvent réglée avec de l’#argent_public, peut atteindre plus de 10 000 euros par article. Ce #marché juteux, avec des marges bénéficiaires pouvant atteindre 40 %, a conduit nombre de scientifiques à ne plus accepter que des maisons d’édition profitent d’un travail intellectuel qu’elles ne financent et ne rémunèrent pas.

    Simultanément, le système d’évaluation conventionnel des scientifiques, fondé notamment sur le nombre de publications en général et dans des périodiques à haut facteur d’impact (IF, correspondant au nombre moyen annuel de citations des articles d’un périodique parus les deux années précédentes) en particulier, est remis en question depuis la Déclaration sur l’évaluation de la recherche de San Francisco (#DORA). DORA est une déclaration collective internationale, initialement élaborée lors d’une réunion annuelle de la Société américaine de biologie cellulaire en 2012, et qui a été progressivement ratifiée par nombre d’universités et d’organismes de recherche, par exemple en France le CNRS et le CEA.

    La collision de ces deux changements débouche sur de nouveaux questionnements :

    - Quels impacts ces transformations ont-elles sur la qualité de la science ?

    – Peut-on raisonner l’usage fait de l’argent public dans la #publication_académique ?

    L’émergence des revues prédatrices

    La transition actuelle du système lecteur-payeur vers le système auteur-payeur s’est accompagnée de l’émergence de maisons d’édition scientifique qualifiées « de prédatrices ». Développant des démarches commerciales agressives, notamment via quantité de numéros spéciaux, leur objectif principal étant de « faire du #profit » en imposant des coûts de publication démesurés (#article-processing_charges ou #APC), et non de promouvoir une #science de qualité.

    En effet, le processus d’évaluation des articles y est souvent médiocre (brefs délais d’évaluation, évaluateurs peu compétents), parfois inexistant, conduisant à une pollution massive de la littérature par des résultats mal, voire pas vérifiés. En 2015, déjà un cinquième de la production scientifique mondiale paraissait dans des maisons d’édition prédatrices.

    Un effet secondaire est l’érosion de la confiance des scientifiques dans le processus d’évaluation par les pairs, pourtant robuste et éprouvé depuis plus d’un siècle.

    À la racine du problème, un cercle vicieux : les chercheurs sont engagés dans une course frénétique à la publication et les évaluateurs disponibles, non rémunérés pour ce travail d’évaluation et devant eux-mêmes publier, deviennent une ressource limitante.

    Quand des périodiques traditionnels s’échinent à dénicher des évaluateurs compétents et disponibles, les prédateurs se contentent d’évaluateurs peu compétents qui, contre des rabais sur des APC futurs, écriront de brefs rapports justifiant d’accepter au plus vite un article. Couper le robinet des évaluateurs et refuser d’y soumettre ses travaux, soit par décision personnelle, soit collectivement, permettrait de contrer l’émergence et le développement de ces maisons d’édition prédatrices.

    Mais la volonté d’aller dans ce sens est-elle là ? Reconnaître les travers de ce système prédateur est nécessairement lent, en particulier lorsqu’on y a largement contribué.

    Il est difficile de définir le caractère prédateur d’un éditeur et certaines revues vont donc se situer dans une zone grise, à la limite de la prédation. De plus, si l’objectif des revues prédatrices est avant tout le profit, le montant des APC n’est pas une condition suffisante pour qualifier un périodique de prédateur – les APC de revues liées à des sociétés savantes (à but non lucratif) sont parfois élevés, mais tout ou partie de ces APC leur sert à développer leur mission dont l’utilité sociale est avérée.

    Couper les ailes de l’édition prédatrice passe aussi par une évaluation différente de l’activité des scientifiques, en s’écartant d’une évaluation actuellement trop quantitative, car largement fondée sur le nombre d’articles et sur l’IF des revues (une métrique mesurant leur audience et non leur qualité).

    Un appel collectif pour de meilleures pratiques

    DORA et l’appel de Paris vont dans ce sens en proposant la fin de l’utilisation de l’IF, mais aussi du nombre de publications, comme métriques centrales de l’évaluation. Ainsi, des institutions françaises, dont le CNRS, INRAE, l’ANR et l’Hcéres, demandent non pas la liste exhaustive des productions, mais une sélection que la personne évaluée souhaite mettre en avant, avec une explication détaillant les qualités, la signification et la portée de cette sélection dans son projet. Ce changement d’évaluation, simple à mettre en œuvre, permet de limiter une course aux publications faciles et coûteuses. Ces initiatives de réforme du système d’évaluation académique fleurissent dans d’autres pays, par exemple aux Pays-Bas et au Canada, ou encore au niveau européen avec la coalition CoARA.

    Bien entendu, il est peu probable que les chercheurs évaluateurs des dossiers ou des projets de collègues jettent les indicateurs aux orties, IF ou autres, surtout quand l’évaluation, qui prend un temps considérable lorsqu’elle est menée sérieusement, est si mal valorisée en tant qu’activité dans l’évaluation des chercheurs. Mais combiner évaluation quantitative et qualitative à d’autres critères tels le prix des APC, les profits et leurs usages, la durabilité numérique, la transparence des évaluations ou la reproductibilité des résultats publiés, est souhaitable.

    Les comités d’évaluation des chercheurs, par exemple au niveau national le Conseil national des universités et au Comité national de la recherche scientifique, doivent se saisir de ces nouveaux critères, les expliciter et les rendre publics. Il serait aussi souhaitable qu’ils statuent sur les maisons d’édition prédatrices ou semi-prédatrices, ou à la manière de la conférence des Doyens des facultés de médecine, sur les maisons d’édition non prédatrices.

    Ils doivent se saisir au plus vite de la question de l’articulation entre modèles de publication et évaluation des chercheurs, pour ne pas se faire devancer par les maisons d’édition susceptibles de proposer elles-mêmes des outils d’évaluation ou de faire changer les règles du jeu.

    Dans le contexte actuel de pénurie d’évaluateurs, les périodiques à IF élevé et coûteux jouent sur le prestige supposé d’être évaluateur. Un levier permettant d’attaquer cette situation serait l’assurance que les « lignes de CV » concernant l’évaluation des manuscrits ne soient pas appréciées à l’aune du prestige de périodique coûteux par les comités d’évaluation de l’activité des chercheurs. De cette manière, un scientifique aurait a priori autant intérêt à évaluer pour tout périodique qu’il estime de qualité, et non pas prioritairement pour le peloton de tête de l’IF.

    Ainsi, on tarirait l’offre en évaluateurs pour ces périodiques ; ces évaluateurs seraient alors plus disponibles pour des périodiques aussi sérieux, mais moins onéreux. De plus, un processus d’évaluation transparent (c’est-à-dire public) permettrait la valorisation des évaluations, et aux comités de jauger qualitativement l’implication des scientifiques dans ce processus.

    Contre la monétarisation de la publication scientifique, il faut séparer l’impératif de l’accès libre et le système de publications en accès libre avec APC obligatoires : les scientifiques doivent rendre leurs publications accessibles, mais sans payer pour cela. L’utilisation de plates-formes de textes non évalués pour rendre accessibles les travaux est une option possible. Cela permettrait de piéger les éditeurs prédateurs au jeu de leur argument de choc (« rendre accessible une publication sans restriction »). Reste alors à imaginer des modèles alternatifs, tel que Peer Community In, proposant un système d’évaluation transparent, exigeant et gratuit à partir d’articles déposés sur des serveurs en accès libre.

    Nos actions, via le choix d’un support de publication ou de notre modèle d’évaluation, s’inscrivent dans un contexte politique national et européen parfois contradictoire : certains établissements suggèrent aux chercheurs d’éviter les APC tout en prônant l’accès libre à toutes les publications sortant de leurs laboratoires. D’autres initiatives, comme la création de Open Research Europe par l’Union européenne, révèlent en creux le poids de certains lobbys puisque les projets européens pourront de ce fait publier en accès libre tous leurs résultats dans des périodiques ad hoc et financés par l’UE. L’injonction à une « science ouverte » devrait plutôt encourager à l’utilisation des plates-formes de textes non évalués. Elle ne doit pas être un argument pour justifier la publication dans des revues avec APC, souvent prédatrices. Autrement dit : ne sacrifions pas la qualité sur l’autel de l’accès libre, et les plates-formes de textes non évalués sont là pour ça.

    À nous, chercheurs, de retourner le jugement d’Yves Gingras pour démontrer que nous sommes capables d’actions collectives. Avec quelques règles, de la pédagogie et un système de valorisation pluriel de la qualité des périodiques scientifiques, nous pouvons endiguer le phénomène des maisons prédatrices.

    https://theconversation.com/comment-faire-face-aux-revues-scientifiques-predatrices-206639

    #ESR #recherche #université #résistance #revues_prédatrices #édition_scientifique #impact_factor

  • #Propriété_collective des #terres : « Des espaces de résistance face à l’agriculture industrielle et capitaliste »

    basta ! : Dans le secteur agricole, on compte seulement une installation pour deux à trois cessations d’activité, alors qu’un agriculteur sur quatre doit partir à la retraite d’ici 2030. L’accès à la terre est-il le frein principal à l’activité agricole en France ?

    Tanguy Martin : L’accès à la terre est clairement un frein, économique d’abord. La terre, selon les régions, peut coûter assez cher. S’y ajoutent les coûts des bâtiments, du cheptel, des machines, dans un contexte où les fermes n’ont cessé de grandir en taille depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

    Il y a aussi un principe de défiance : c’est plus facile de vendre ses terres, ou de les louer à son voisin qu’on connaît depuis très longtemps, qu’à quelqu’un qu’on ne connaît pas, qui peut vouloir faire différemment, non issu du territoire... Or, 60 % des gens qui veulent s’installer aujourd’hui ne sont pas issus du milieu agricole. Les freins administratifs se combinent à ce parcours du combattant.

    Aujourd’hui l’accès à la terre se fait par le marché : les terres sont allouées aux gens capables de rentabiliser une ressource, et pas forcément aux gens capables de nourrir un territoire ou de préserver un environnement.

    À partir de quel moment la terre agricole est-elle devenue une marchandise ?

    Jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, la terre est restée un bien de prestige et de pouvoir à travers lequel on maîtrise la subsistance de la population. Mais après 1945, l’agriculture est entrée dans le capitalisme : on commence à faire plus de profit avec la terre et la production de nourriture, voire à spéculer sur le prix de la terre.

    La terre est même depuis devenue un actif financier. Aujourd’hui, les sociétés dites à capitaux ouverts (financiarisées), dont le contrôle peut être pris par des non-agriculteurs, ont fait main basse sur 14 % de la surface agricole utile française. C’est plus d’une ferme sur dix en France [1]. Le phénomène a doublé en 20 ans !

    Peut-on vraiment parler de spéculation sur les terres en France alors même que le prix stagne en moyenne à 6000 euros par hectare depuis plusieurs années ? Il est quand même de 90 000 euros par hectare aux Pays-Bas !

    Depuis quelques années, le prix de la terre stagne et on pourrait en conclure qu’il n’y a pas de spéculation. En réalité, le prix de la terre a globalement augmenté en France sur les 20 dernières années.

    Actuellement, ce prix augmente dans certaines régions et baisse dans d’autres. Les endroits où l’on peut spéculer sur la terre sont globalement ceux où l’agriculture s’est industrialisée : les zones céréalières dans le centre de la France, de betteraves en Picardie, de maïs dans le Sud-Ouest... Là, le prix de la terre continue à augmenter.

    En revanche, il y a des endroits en déprise, notamment les zones d’élevage comme le Limousin, où le prix de la terre peut baisser. Les prix augmentent aussi à proximité des villes et des zones touristiques, où la terre risque de devenir constructible.

    En France, ce sont les Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) qui sont en charge de réguler le marché des ventes des terres agricoles. Elles sont très critiquées. Que faut-il faire de ces organisations ?

    Les Safer ont participé à limiter les inégalités d’accès à la terre et un prix de la terre relativement bas en France. C’est vrai, même s’il y a d’autres explications aussi, comme la plus faible valeur ajoutée produite par hectare en France.

    Pour autant, les Safer doivent encore évoluer pour pouvoir répondre aux enjeux alimentaires et agricoles du 21e siècle, il faut arriver à démocratiser leur gouvernance. Celles-ci restent aujourd’hui très liées aux décisions du syndicalisme majoritaire (de la FNSEA, ndlr). Les Safer doivent aussi devenir plus transparentes. Actuellement, les réunions de décision se tiennent à huis clos : c’est censé protéger les gens qui prennent les décisions pour qu’ils soient éloignés de certaines pressions, mais cela crée une opacité très délétère pour l’institution.

    Un autre élément à revoir, c’est la façon dont on fixe les objectifs politiques des Safer. Ces dernières, quand elles achètent une terre, doivent la revendre à la personne qui répond aux objectifs politiques qui sont notamment fixés dans des documents nommés « schémas directeurs régionaux des exploitations agricoles ».

    Ces documents, écrits par l’État et validés par arrêté préfectoral, décrivent quel type d’agriculture vont viser les Safer et d’autres instances de régulation foncière. Or, ces documents, du fait que le syndicat majoritaire est largement consulté, défendent plutôt la prolongation de l’agriculture vers son industrialisation. Il y a donc un enjeu à ce que ces documents soient écrits pour défendre une agriculture du 21e siècle qui défend l’agroécologie, et des paysannes et paysans nombreux sur les territoires. À ces conditions-là, il n’y a pas de raison de vouloir se passer des Safer.

    Le fait que nous ayons un système qui alloue la terre, non pas en fonction de l’offre et de la demande, mais en vertu d’un projet politique censé répondre à l’intérêt général, est un trésor inestimable en France qu’il faut absolument garder.

    En creux de votre ouvrage se pose la question du rapport à la propriété. Est-il possible de dépasser le modèle du paysan propriétaire ?

    Sur le principe, rien ne justifie le fait qu’à un moment, une personne ait pu dire « cette terre m’appartient ». La terre étant à la fois un lieu d’accueil du vivant et le lieu où l’on produit la nourriture, on peut estimer que la propriété de la terre doit être abolie. Sauf que, dans une société très attachée à la propriété privée, cela paraît utopique.

    Prenons donc le problème d’une autre façon, et voyons ce qu’on peut déjà faire à court terme. Il faut avoir en tête que les agriculteurs ne sont pas majoritairement propriétaires des terres qu’ils travaillent : 60 % de cette surface est louée dans le cadre du fermage. Il y a même des paysan·nes qui décident parfois de ne pas acheter la terre et préfèrent la louer pour éviter de s’endetter.

    D’autre part, on dispose d’une régulation foncière selon laquelle la terre n’est pas une marchandise comme les autres et ne doit pas être uniquement dirigée par le marché. Ces mécanismes juridiques permettent à l’État, aux collectivités locales et aux syndicats agricoles, de définir ensemble qui va accéder à la terre indépendamment du fait que ces personnes soient riches ou pas.

    On a là un embryon qui pourrait faire imaginer un droit de l’accès à la terre en France institué en commun. Il faut renforcer et orienter ces mécanismes – qui ont plein d’écueils ! – vers des enjeux d’alimentation, d’emploi, d’environnement... Chercher à démocratiser la question de l’accès à la terre et « le gouvernement des terres », c’est à la fois une capacité à se prémunir des effets mortifères du capitalisme, et cela permet de penser comment on pourrait gérer les terres autrement.

    Le capitalisme n’est pas une fatalité : il y a d’autres manières d’être au monde, de produire de l’alimentation, de vivre, de sortir d’un monde où le but n’est que la recherche du profit. C’est comme quand on milite pour la sécurité sociale de l’alimentation : la Sécurité sociale en 1946 n’a pas renversé le capitalisme, mais elle a créé des espaces de répits face au capitalisme, extrêmement importants pour que les gens vivent bien et envisagent de transformer la société.

    Le livre dresse un panorama des organisations qui travaillent au rachat des terres pour les mettre à disposition de paysan·nes répondant à des critères socio-environnementaux, avec des règles transparentes d’attribution de l’accès au foncier. Les surfaces acquises restent toutefois modestes. Peut-on uniquement compter sur ce type d’initiatives ?

    Les gens qui s’intéressent à la terre aujourd’hui ont bien compris qu’on n’allait pas abolir la propriété privée demain. Ils ont aussi compris que s’ils voulaient expérimenter d’autres manières de faire de l’agriculture et de l’alimentation, il fallait accéder à la propriété des terres.

    L’idée de la propriété collective, ce n’est pas l’abolition de la propriété privée, mais que des gens se mettent ensemble pour acheter de la terre. C’est ce que fait Terre de Liens en louant ensuite la terre à des paysan·nes qui mettent en œuvre des projets répondant aux enjeux de société, d’emploi, d’environnement, d’entretien du territoire... Mais c’est aussi ce que font d’autres structures de propriété foncière – la Société civile des terres du Larzac, la Terre en commun sur la Zad de Notre-Dame des Landes, Lurzaindia dans le Pays basque, la foncière Antidote, et bien d’autres.

    Tout un tas de gens essaient d’acheter des terres pour en faire des espaces de résistance face à l’agriculture industrielle et capitaliste. Cela permet d’imaginer d’autres rapports à la propriété. Ce sont des lieux d’expérimentation très importants pour susciter de nouveaux imaginaires, apprendre à faire autrement, créer de nouvelles manières d’être au monde.

    Le problème de ces lieux-là, c’est qu’ils ne peuvent pas permettre un changement d’échelle. Cela ne peut pas être la solution de sortie des terres du capitalisme. Comme elles n’abolissent pas la propriété, s’il fallait racheter toutes les terres, cela coûterait des centaines de milliards d’euros.

    Par ailleurs, ces terres ne sont pas à vendre à court terme – une terre se vend en moyenne tous les 75 ans. D’où la nécessité de faire à la fois des expérimentations de propriété collective, tout en ravivant la question de la régulation foncière pour sortir l’agriculture du capitalisme.

    En quoi la lutte de Notre-Dame des Landes, victorieuse en 2018, a reconfiguré les luttes, notamment anticapitalistes, autour des terres ?

    La question agricole et foncière, en France et même en Europe, était très peu investie par les milieux anticapitalistes. L’activisme des gens qui vont s’installer dans la Zad, les coopérations menées avec des syndicats agricoles comme la Confédération paysanne, ont – non sans débats houleux et conflits internes – mené à une lutte assez exemplaire sur un territoire.

    La répression peut être énorme, mais la capacité de résistance aussi. Cette lutte a produit des façons de faire sur le territoire – en termes d’habitat, d’agriculture collective, de vivre ensemble – inspirantes pour toute une génération militant contre le néolibéralisme et le capitalisme. Beaucoup de milieux politiques aujourd’hui parlent de subsistance, d’alimentation, de terres.

    Notre-Dame des Landes marque aussi le fait qu’avec de moins en moins d’agriculteurs dans la société (2,5 % des gens sont des travailleurs de la terre dont 1,9 % sont des agriculteurs au sens légal), les enjeux agricoles ne peuvent être uniquement du ressort des luttes paysannes. La centralité de ces luttes doit être partagée avec d’autres types d’acteurs politiques, notamment des gens qui habitent le territoire sans être forcément paysans.

    La dynamique des Soulèvements de la Terre est-elle un prolongement de Notre-Dame des Landes ?

    En effet, il me semble que Notre-Dame-des-Landes est une inspiration forte de la pensée qui s’agrège autour des Soulèvements, mouvement riche de sa pluralité. Les Soulèvements montrent que les espoirs nés de l’expérimentation à Notre-Dame-des-Landes sont possibles partout et qu’il va falloir faire différemment dans tous les territoires – chaque endroit ayant ses spécificités.

    Les questions de rapport à la terre ont aussi émergé dans l’espace politique des années 1990, avec les luttes au Chiapas, au Mexique, qui continuent d’inspirer les milieux politiques en Europe et en France. Cette circulation des imaginaires de luttes permet de penser des mondes différemment. Les Soulèvements arrivent à fédérer de manière assez importante et repolitisent très clairement ces questions de la terre. Ils portent ces questions sur tous les territoires qui ont envie de s’en emparer en disant : « C’est possible aussi chez vous ».

    Peut-on sortir l’agriculture du capitalisme ? Pour Tanguy Martin, auteur de Cultiver les communs, il faut combiner les expérimentations de propriété collective tout en s’attachant à la régulation foncière.

    https://basta.media/Propriete-collective-des-terres-des-espaces-de-resistance-face-a-l-agricult
    #agriculture #résistance #capitalisme #accès_à_la_terre #terre #financiarisation #spéculation #Sociétés_d’aménagement_foncier_et-d’établissement_rural (#Safer)

  • Détresse pour les précaires, hausse des marges pour les entreprises : à qui profite l’inflation ?
    https://basta.media/detresse-pour-les-precaires-hausse-des-marges-pour-les-entreprises-a-qui-pr


    Loin d’avoir été jugulée, l’inflation s’installe comme pérenne. Elle fait des gagnants, les entreprises qui augmentent indûment leurs profits, et des perdants, les ménages les plus pauvres qui subissent. Ce n’est pas une fatalité.

    Voilà presque deux ans que le gouvernement annonce que l’inflation est « temporaire », qu’elle va finir par « baisser » et qu’elle est plus faible en France que dans les autres pays européens. « Le pic de l’inflation est désormais passé », affirmait encore Élisabeth Borne le 23 août dernier. Mais huit jours plus tard, l’Insee annonçait que l’indice des prix à la consommation avait progressé de 4,8 % sur un an au mois d’août contre seulement 4,3% au mois de juillet. L’inflation en France est dorénavant supérieure à celle de la zone euro et l’une des plus élevées d’Europe. Comment l’expliquer ? Quels sont les perdants ? Les gagnants ?

    L’inflation repart à la hausse

    C’est devenu un jeu sur les réseaux sociaux : répertorier les innombrables interventions publiques du président de la République et des membres du gouvernement promettant une « inflation temporaire » (le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, le 17 novembre 2021), un « pic de l’inflation déjà atteint » (encore Bruno Le Maire, le 27 juin 2022, puis Emmanuel Macron le 27 février 2023 et la Première ministre Élisabeth Borne le 23 août 2023) ou encore une « baisse à venir » (Olivier Véran, porte-parole du gouvernement le 28 juillet 2022).

    Les chiffres disent pourtant le contraire : les prix à la consommation sont durablement orientés à la hausse en France. Sur deux ans, entre août 2021 et août 2023, la hausse est de 10,5 %, et même de 20 % pour les seuls produits alimentaires et de 31 % pour l’énergie.

    Le net rebond de la hausse au mois d’août 2023 s’explique par une inflation pérenne sur les produits alimentaires, et par l’augmentation des prix de l’électricité : après les avoir augmentés de 15 % au 1er février, le gouvernement a décidé d’une deuxième hausse de 10 % au 1er août, en plein cœur de l’été.

    C’est environ 400 euros de plus en moyenne par an et par ménage, auxquels il faut ajouter les prix du pétrole et du gaz repartis eux aussi à la hausse. Selon Eurostat, la France est désormais dans le peloton de tête des pays européens les plus touchés par l’inflation.

    Pouvoir d’achat en baisse

    En parallèle, les salaires augmentent en moyenne bien moins vite. Les salaires dits réels, c’est-à-dire lorsque l’inflation est prise en compte, sont par conséquent, depuis deux ans et en moyenne, orientés à la baisse. Dans le secteur privé, les salaires réels ont même été en recul sept trimestres consécutifs sur les années 2021-2023.

    Selon l’Insee, le niveau de vie des ménages a ainsi reculé en moyenne de 0,3 % en 2022 et de 0,6 % au premier trimestre 2023, avec une stabilisation au second trimestre 2023. Ces chiffres cachent d’énormes disparités. Certains salaires n’ont pas été, ou peu, revalorisés.

    Après avoir vécu sous un régime de (très) faible inflation depuis la fin des années 1980, nous faisons face à une augmentation subite, continue et générale des prix depuis deux ans. Ce qui est source d’angoisses, de privations et d’insécurité. Alors qu’il n’y a jamais eu autant de millionnaires en France, plus d’un tiers des habitant·es du pays affirment ne plus pouvoir se procurer une alimentation saine, lui permettant de faire trois repas par jour, et 45 % ont des difficultés pour payer certains actes médicaux ou leurs dépenses d’énergie. C’est l’inquiétant constat fait par le 17e baromètre d’Ipsos et Secours populaire de la pauvreté et de la précarité.

    Détresse sociale

    Le recours à l’aide alimentaire, qui avait déjà triplé entre 2012 et 2022, concerne toujours plus de familles et d’étudiant·es. De plus en plus de personnes ayant un emploi y recourent aussi. Les Restos du cœur annoncent avoir déjà reçu 18 % de personnes en plus en 2023 que l’année précédente.

    Cette « déconsommation » subie s’observe jusque dans les statistiques générales : la consommation de produits agricoles a baissé, en volume, de plus de 10 % depuis fin 2021. Une baisse aussi rapide est inédite. Va-t-elle se poursuivre ? Quels seront ses effets économiques et sociaux ? Sur la santé de celles et ceux qui doivent se priver ?

    Cette déconsommation subie frappe d’autant plus les ménages qu’ils sont pauvres. Les 9,2 millions de personnes dont les revenus sont situés sous le seuil de pauvreté sont celles dont les dépenses contraintes (loyers, énergie, alimentation) sont déjà les plus importantes : elles doivent faire avec 41 % de dépenses dites « pré-engagées » en moyenne, contre 28 % pour les ménages aisés, selon les données de France stratégie.

    Inflation pour les uns, profit pour les autres

    Tout le monde n’est pas logé à la même enseigne. Les grandes entreprises tirent particulièrement leur épingle du jeu. Pour le troisième trimestre consécutif, leur taux de marge – hors secteur financier – a progressé, pour atteindre 33,2 %, en hausse de 1,5 point par rapport au trimestre précédent. C’est plus qu’en 2018, avant la pandémie de Covid-19.

    Selon l’Insee, près des trois quarts de cette hausse s’expliquent par l’envolée des prix de leurs produits. Par l’inflation donc. L’industrie agroalimentaire affiche ainsi des marges historiques. La hausse des prix des produits alimentaires qui frappe si fortement les ménages, notamment les plus pauvres, font ainsi grossir les profits de l’agro-industrie.

    Une publication du Fonds monétaire international montre que l’augmentation des bénéfices des entreprises, qui ne peut s’expliquer par une hausse de leur productivité, est désormais « à l’origine de près de la moitié de la hausse de l’inflation des deux dernières années en Europe ».

    Les entreprises ont été et se sont mieux protégées de l’augmentation du prix des matières premières que les populations. En plus du soutien organisé par les pouvoirs publics, elles ont joué sur les prix pour augmenter leurs marges et leurs profits. Une publication de l’Insee montre par exemple que les entreprises répercutent sur leurs prix de vente l’équivalent de 127 % des hausses de prix de l’énergie auxquelles elles sont confrontées.

    En revanche, quand les prix de l’énergie baissent, comme au printemps, les entreprises ne répercutent sur leurs prix que 58% de cette baisse. L’écart entre les deux, payé par les consommateurs, alimente directement les profits sans que cela soit justifié. Les économistes ont appelé ce phénomène la « profitflation », une inflation tirée par les profits.

    Aucune mesure contre les profits

    Aucune politique publique n’a pourtant été décidée pour juguler l’inflation tirée par les profits. Du côté de la Banque centrale européenne, dont la mission est de maintenir l’inflation à 2 % en Europe, on fait comme si la #profitflation n’existait pas. La BCE vient en effet d’augmenter pour la dixième fois consécutive ses taux directeurs, risquant de paralyser l’économie, plutôt que de restreindre la capacité des (grandes) entreprises à augmenter leurs profits.

    Le FMI montre pourtant que les profits des entreprises doivent être réduits très significativement pour que l’inflation revienne dans les clous des objectifs de la BCE. Selon les hypothèses retenues, il faudrait qu’ils soient ramenés à un niveau compris entre celui qui était le leur dans les années 1990 et celui d’avant la pandémie. En tout cas bien plus bas qu’aujourd’hui. La BCE pourrait donc conditionner son soutien aux très grandes entreprises au fait que celles-ci réduisent très sensiblement leurs prix ou les dividendes versés ou investissent massivement dans la transition écologique. Ce n’est pas le chemin choisi.

    Le gouvernement protège les entreprises

    L’exécutif français, de son côté, s’est démultiplié pour éviter une augmentation générale des salaires et des prestations sociales, comme s’il craignait l’enclenchement d’une improbable spirale prix-salaire. Les experts sont pourtant formels. Il n’y a pas de hausse autoentretenue entre les prix et les salaires, puisque les seconds sont peu revalorisés et, lorsqu’ils le sont, c’est avec un délai conséquent.

    Les salaires sont donc en retard. Pour juguler la profitflation, l’exécutif aurait donc pu œuvrer pour que les entreprises privilégient une augmentation des salaires plutôt que des profits. Mais au printemps, le gouvernement fait tout le contraire en préconisant via le projet de loi sur le partage de la valeur ajoutée une augmentation des primes plutôt que des salaires, encourageant de fait une augmentation des profits.

    Sur l’autre versant, l’exécutif pourrait décider d’encadrer plus strictement les prix, afin que ceux-ci ne soient pas maintenus artificiellement plus haut que nécessaire par les entreprises. Mais le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est pour l’instant limité à demander aux entreprises en général, et aux enseignes alimentaires en particulier, de contenir les hausses de prix. Les inviter à mettre sur pied des paniers anti-inflation garantit de laisser inchangé leur pouvoir de marché et faire comme si les pouvoirs publics étaient impuissants.

    Nous l’avions un peu oublié avec la disparition de l’inflation depuis les années 1980, mais tout épisode inflationniste place en général les entreprises dans le camp des gagnants et les personnes les plus précaires dans le camp des perdants.

    Lutter contre l’inflation par des mesures de contrôles des prix et des profits d’un côté, et de hausse des revenus de l’autre, dessine en creux une politique qui permettrait de réduire les inégalités fasse à l’inflation et les terribles souffrances qui l’accompagne.

    Maxime Combes

  • La persistance de l’inflation relance le débat sur les gagnants de la hausse des prix
    https://archive.li/2023.09.17-082518/https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/09/17/la-persistance-de-l-inflation-relance-le-debat-sur-les-gagnants-de-la-hausse

    Le débat sur les gagnants et les perdants d’une inflation attendue à 5 % en 2023 (4,9 % en août, selon les chiffres publiés vendredi 15 septembre) apparaît d’autant plus légitime que le fossé entre une France en forme et l’autre qui peine s’élargit continûment.

    Côté pile, l’indice CAC 40, en hausse de près de 15 % sur un an, tutoie les sommets, et les dividendes versés au second trimestre (environ 50 milliards d’euros) sont au plus haut.

    Côté face, de plus en plus de Français se serrent la ceinture. En 2022, les salaires ont augmenté de 3,8 %, quand l’inflation atteignait 5,9 %, selon la Banque de France. Cette baisse du pouvoir d’achat s’est traduite par un recul de la consommation, notamment de produits alimentaires. Une étude de l’Insee publiée le 20 juillet révèle que 9 millions de personnes sur le territoire métropolitain étaient en « privation matérielle et sociale » en 2022, « soit le plus haut niveau depuis 2013, première année où elle a été mesurée ». D’où l’appel au secours lancé par les Restos du cœur : entre 2022 et 2023, l’association a distribué 170 millions de repas, soit 30 millions de plus que l’année précédente.
    Face à cela, la question fondamentale n’est plus seulement de savoir qui bénéficie de la crise, mais de déterminer qui l’aggrave. Ces derniers mois, des institutions françaises et internationales ont blâmé les entreprises, et notamment européennes, pour avoir augmenté leurs prix au-delà de la hausse des coûts qu’elles subissaient en amont. Avant d’accuser toutefois les LVMH, L’Oréal, TotalEnergies et autres multinationales de faire leur pelote sur le dos des Français, il faut préciser que les sociétés du CAC 40 ont réalisé en moyenne en 2022 moins de 22 % de leur chiffre d’affaires en France, et probablement un pourcentage bien moindre de leurs bénéfices.

    L’Insee, elle, donne des indications sur les secteurs où des effets d’aubaine ont pu être observés dans l’Hexagone. « Si l’on regarde sur la durée, entre le second trimestre 2019 et le second trimestre 2023, il y a bien une hausse des marges brutes unitaires dans l’industrie (+ 7,11 %) supérieure à celle des salaires (+ 2,37 %). C’est vrai surtout dans les secteurs de l’énergie et de l’agroalimentaire, mais ce n’est pas le cas dans les services », souligne Eric Dor, directeur des études économiques à l’IESEG School of Management.

    « Certains de nos tarifs ont augmenté de plus de 20 % mais, non, on ne s’en met pas plein les poches », réagit Gérald de Nanteuil, président des Boulangers bretons, une PME d’une quarantaine de personnes située dans le Finistère, qui fabrique petits pains frais et viennoiseries pour les écoles ou les Ehpad. « Quand les prix des emballages ou du blé ont flambé, à partir de 2021, nous avons mis du temps à répercuter ces hausses sur nos tarifs, et cela nous a coûté très cher, en rentabilité et en trésorerie », raconte-t-il.

    Rapports de force trop déséquilibrés

    « A présent que les prix des matières premières refluent, nous essayons de reconstituer notre trésorerie, pour revenir à peu près au niveau d’avant-crise, explique-t-il. Mais nous sommes liés par des contrats sur l’énergie ou sur la farine qui créent une latence avant que nous puissions bénéficier des baisses. Et dans le même temps, nous augmentons nos grilles salariales tous les six mois ». Et d’insister : « Nous ne sommes pas seuls. Si nos prix ne sont pas bons, des concurrents vont chercher à reprendre nos clients. De même, nous demandons à nos fournisseurs de nous traiter décemment. Bruno Le Maire a beau réclamer des baisses, les prix, ce n’est pas de la politique, c’est le marché. »

    Parfois, cependant, les rapports de force semblent trop déséquilibrés. « La décennie qui précède cette crise a été marquée par deux phénomènes : la concentration des entreprises et la baisse du pouvoir de négociation des salariés, liée à la fois à l’affaiblissement des syndicats et à la disparition des grandes usines, qui étaient des lieux importants de négociation », analyse Sarah Guillou, directrice du département de recherche innovation et concurrence à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE Sciences Po), qui ajoute : « Cela crée des inégalités au sein même de la chaîne de valeur. »

    Le consommateur final n’est pas le seul à souffrir. « Une surenchère persiste sur les tarifs de certains matériaux, comme le verre ou le métal, qui n’est pas justifiée. On se demande même si certaines pénuries ne sont pas organisées ici et là pour créer du stress. J’ai dû batailler avec un fournisseur de sanitaires qui exigeait une hausse de près de 15 % par rapport au prix que j’avais sécurisé. Entre la baisse des prix de l’énergie et celle des matières premières intervenues depuis, comment voulez-vous comprendre une telle augmentation ? », s’indigne Serge Wermelinger, un promoteur immobilier du Haut-Rhin, qui dénonce les « surmarges d’industriels très puissants » : « Ils sont en train de scier la branche sur laquelle nous sommes tous assis », prévient-il, rappelant que l’inflation des coûts de construction se conjugue à la montée des taxes et à l’inflation liée aux objectifs de zéro artificialisation nette.

    A ce stade, le gouvernement cherche à peser pour assurer un meilleur partage de la valeur en faveur des salariés. Jeudi 7 septembre, Emmanuel Macron a confirmé la tenue d’une « conférence sociale » sur les bas salaires. Le projet de loi qui vise à élargir l’intéressement et la participation aux entreprises employant jusqu’à 50 collaborateurs sera examiné au Sénat en octobre.
    « L’inflation marque la confrontation entre des salariés qui veulent protéger leur pouvoir d’achat et des entreprises qui tiennent à préserver leurs marges. En France, le partage des revenus est d’autant plus sensible que la baisse inquiétante de la productivité constitue un appauvrissement collectif », déplore Patrick Artus, conseiller économique de Natixis. Avant de prévenir : « Au regard des investissements colossaux nécessaires pour la transition énergétique, il demeure préférable de privilégier l’investissement par rapport à la consommation des ménages. Sous réserve que les plus modestes soient protégés et que les marges de manœuvre dégagées par les entreprises ne se retrouvent pas dans les rachats d’actions et les dividendes. »

    Isabelle Chaperon

    • DINGUE !
      ➡️ Quand les prix de l’énergie augmentent, les entreprises répercutent 127% de cette hausse sur le prix des produits
      ➡️ Quand ils baissent, elles répercutent seulement 58%

      La différence alimente leurs marges, et leurs profits
      Voilà d’où vient l’inflation : #ProfitFlation

      La transmission directe des coûts des intrants importés et de l’énergie aux prix de production : un impact très variable d’une entreprise à l’autre : https://www.insee.fr/fr/statistiques/7616072

      Deux rappels :
      ➡️ une étude publiée par le FMI a montré qu’environ la moitié de l’inflation en Europe est tirée par l’augmentation des profits des entreprises
      ➡️ les taux de marge des entreprises s’envolent : 33,2% en août, l’essentiel (73%) provenant de la hausse de leurs prix

      autoriser la vente à pertes sur les carburants est une politique d’affichage, d’improvisation, qui ne répond pas structurellement à l’inflation ; deux ans qu’on leur explique qu’une inflation nourrie par les coûts de l’énergie & par les profits impose plus de régulation sur les prix et marges des entreprises.

      Que font-ils ? L’inverse : moins de régulation au risque d’une loi de la jungle qui favorisera les plus gros.

      Vente à perte des carburants : « L’inflation des énergies fossiles se joue sur les marchés internationaux »
      https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-lundi-18-septembre-2023-3515869
      Essence : le gouvernement veut autoriser la vente à perte sur les carburants, pour faire baisser les prix pendant quelques mois. Maxime Combes, économiste à l’Observatoire des multinationales est l’invité de 6h20.

      « Il faudra voir si les distributeurs de carburant s’emparent de cette mesure ou pas », tempère l’économiste. « Ce n’est pas certain. En tout cas, c’est une mesure de distorsion de concurrence, qui va favoriser les gros distributeurs de carburants, comme TotalEnergies, et les très grandes surfaces qui peuvent assumer de perdre sur la vente de carburant. Ceci a pour implication de faire disparaître les plus petits acteurs du marché. »

      Du point de vue du consommateur, ce sera plus bénéfique... à court terme : « Comme ce genre de dispositifs permet aux grands acteurs du marché d’écarter les plus petits : plus généralement, l’interdiction de la vente à perte permet justement de s’assurer que les prix à court, moyen et long terme resteront bas pour tout le monde, puisqu’il y a de la concurrence sur le secteur. Là, le gouvernement fait tout l’inverse. »

      « Tous les six mois, le gouvernement change de mesure »

      « Globalement, sur la distribution de carburant, les marges sont extrêmement faibles », précise Maxime Combes. « Ce n’est pas du tout là-dessus qu’ils font leur bénéfice. Les plus grosses marges dans la production et la distribution se font à l’extraction. Quand le produit final arrive à la pompe, les marges sont relativement limitée. Penser qu’on va juguler l’inflation des énergies fossiles, qui se joue sur les marchés internationaux, c’est de l’improvisation. »

      Pour l’économiste, les mesures d’urgence devraient au contraire avoir pour priorité de « s’attaquer de manière structurelle à l’inflation ». « Des mesures qui passent par un contrôle des prix, qu’on pourrait maintenir sur du long terme. Cela peut aller jusqu’à bloquer les prix. On peut envisager que les populations qui ont le plus de mal aujourd’hui à payer du carburant reçoivent un chèque ou soient aider, mais pas l’ensemble de nos concitoyens. Ça fait deux ans qu’on est touchés par l’inflation, et tous les six mois le gouvernement change de mesure... »

      Et l’étude évoquée et publiée par le FMI est ici : https://imf.org/en/Blogs/Artic

      https://twitter.com/MaximCombes/status/1703630011478036506

    • Autorisation de la vente à pertes sur les carburants : les 8 erreurs de l’exécutif
      https://blogs.mediapart.fr/maxime-combes/blog/180923/autorisation-de-la-vente-pertes-sur-les-carburants-les-8-erreurs-de-

      Le concours des fausses-bonnes idées pour juguler l’inflation n’a manifestement pas de limite : après les inefficaces paniers anti-inflation de Bruno Le Maire, la nouvelle trouvaille d’Elisabeth Borne consiste à autoriser la vente à pertes des carburants. Voilà une mesure en trompe l’oeil injuste socialement, écologiquement discutable et favorable aux gros distributeurs pétroliers. Explications.

  • 🛑 La faim justifie les moyens... - Contre Attaque

    Se nourrir coûte 25% de plus qu’en janvier 2022 selon l’UFC Que Choisir. Dans le même temps, les salaires n’ont quasiment pas augmenté. L’argument du gouvernement pour ne pas rehausser les salaires était que cela risquait d’accélérer l’inflation. L’inflation est là, et les salaires stagnent. Cela veut dire qu’en valeur réelle, les salaires ont massivement baissé. C’est comme si tous les patrons avaient amputé massivement toutes les paies ! (...)

    ⚡️ #capitalisme #CAC40 #patronat #profits #bénéfices #milliardaires
    #anticapitalisme #inégalité #précarité #pauvreté #faim...

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    ▶️ https://contre-attaque.net/2023/09/03/la-faim-justifie-les-moyens-2

  • 🛑 Les dividendes continuent d’augmenter dans le monde, et encore plus en France...

    Les plus grandes entreprises dans le monde ont versé plus de 560 milliards de dollars de dividendes au deuxième trimestre, un record sur cette période, avec une tendance encore plus accentuée en France.
    Entre avril et juin, les 1 200 plus importantes entreprises cotées en Bourse, recensées par le gestionnaire d’actifs Janus Henderson, ont redistribué 568,1 milliards de dollars en dividendes à leurs actionnaires (...)

    #capitalisme #profits #dividendes... #anticapitalisme

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    ▶️ https://www.nouvelobs.com/economie/20230830.OBS77496/les-dividendes-continuent-d-augmenter-dans-le-monde-et-encore-plus-en-fra

  • Écopâturage : la guerre des moutons | Mediapart | 20.08.23

    https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/200823/ecopaturage-la-guerre-des-moutons

    De TotalEnergies à Amazon, en passant par des collectivités locales de toute taille, les centrales nucléaires ou encore les parcs de panneaux photovoltaïques, tout le monde veut ses moutons pour remplacer les bruyantes et polluantes tondeuses à gazon.

    Spécialiste du pastoralisme à l’université de Toulouse, la géographe Corinne Eychenne a fini par se pencher sur la question : « Un véritable marché a émergé depuis une dizaine d’années, confirme-t-elle. Cet engouement s’inscrit dans un contexte réglementaire avec l’interdiction des produits phytosanitaires pour l’entretien des espaces verts et plus généralement d’une volonté de “retour à la nature”. »

    Sur le papier, il n’y a que des avantages : la « tonte écologique est moins bruyante, moins chère et plus durable, vante l’un des leaders du marché, Ecomouton. Les moutons sont discrets : ils mangent et ils dorment ». Aucune « gêne ». Le meilleur plan du « greenwashing » bien que l’intérêt écologique de la pratique soit encore peu documenté.

    Ecomouton, créée en 2012 par le gérant d’un entrepôt logistique, a vite grossi. Une levée de fonds fructueuse, un chiffre d’affaires en croissance à deux chiffres qui a dépassé la barre du million en 2017 et a encore doublé depuis. Ecomouton est désormais à la tête d’un cheptel de près de six mille moutons répartis sur environ cinq cents sites aux quatre coins de la France. Facturé aux clients entre trois mille et six mille euros l’hectare tondu par an, le business plan est rentable mais les coulisses ne sont pas toujours reluisantes selon des salarié·es et ex-salarié·es qui ont témoigné auprès de Mediapart.

    • « De nouveaux sites sont installés quasiment chaque semaine et des centaines de moutons se retrouvent lâchés dans des prés sans surveillance et sans plus de soin qu’une tondeuse à gazon », dénonce B., salarié qui a souhaité garder l’anonymat (voir boîte noire).

      Dans les faits, chaque site d’Ecomouton est géré par un « berger » chargé de passer deux fois par mois pour compter les moutons, contrôler les clôtures, la disponibilité de l’eau et de la nourriture dans le pré. Certains signent de micro-temps partiels en CDI pour un revenu complémentaire de 100 à 150 euros par mois. D’autres cumulent plusieurs sites et travaillent à temps plein. Aucune formation n’est requise par la loi ni l’entreprise qui milite, assure-t-elle, pour la création d’un diplôme d’« écopâtureur ». « “Berger”, c’est juste pour la pub, ironise S., une salariée en poste depuis peu. Sur nos contrats, on est “ouvrier paysagiste”. »

      « La plupart de nos bergers sont des éleveurs professionnels qui font ça à côté de leur activité agricole, on cherche des gens avec de l’expérience », précise le dirigeant d’Ecomouton, Sylvain Gérard. Mais certains, interrogés par Mediapart, sont des profanes. « Je n’avais jamais fait ça avant donc au départ, je ne savais pas comment m’y prendre simplement pour regrouper et compter les moutons. Il faut savoir un milliard de trucs pour comprendre ce qui passe dans la tête d’un troupeau, j’étais dépassée », poursuit S., la nouvelle bergère.
      [...]
      « À la base, les animaux de ferme sont animaux de rentes ou des produits. Avec l’écopâturage, il y a une troisième catégorie : le mouton de service qui est là pour tondre et divertir », explique la bergère Julie Lou Dubreuilh. Installée en Seine-Saint-Denis, elle milite pour tenir tous les bouts : le pâturage pour ses intérêts paysagers, écologiques, sociaux, pédagogiques mais aussi la production de viande, l’utilisation de la laine des moutons, de la graisse, du lait de brebis…
      [...]
      Pour le berger urbain lyonnais, Bastien Boyer, « si les moutons, qui émettent naturellement du méthane en digérant, sont juste des tondeuses déplacées de site en site en fonction des besoins, ils polluent pour pas grand-chose. L’écopâturage sans raison nourricière, ce n’est pas écolo, c’est du greenwashing. »

    • Dans les corbières on a un ancien flic reconvertit en berger qui a raflé le maximum de terres quand il a été un temps conseiller municipal. Il a réussi à les avoir en baux emphytéotiques de 99 ans au grand dam de celleux qui voulaient des chemins et des terres communales réellement communes et pas cédé à ce crétin gourmand. Ensuite il a obtenu les aides diverses, par hectares et par têtes de mouton qui l’ont rendu riche. Sa story telling de ferme inexistante et de berger devant sa télé pendant que les clôtures maintiennent les bêtes dans les espaces circonscrits lui permet également de vendre des chiots de borders.
      #profiteurs #berger

  • ★ Les libertaires ont-ils perdu la bataille des idées ? - GLJD Le Libertaire

    (...) Si l’on prend le terme anglo-américain woke (« éveillé ») et qui désigne le fait d’être conscient des problèmes liés à la justice sociale et à l’égalité raciale, les anarchistes peuvent être considérés comme partisans du wokisme.
    Cela fait longtemps que les libertaires sont conscients des injustices subies par les minorités ethniques, sexuelles, religieuses, ou de toutes formes de discrimination. Cela recoupe souvent l’exploitation capitaliste. Prenons l’exemple des catholiques irlandais en Ulster, ces derniers ne trouvaient du travail qu’après les protestants dans les années 1970. Dire aujourd’hui que les musulmans sont discriminés, ce n’est un scoop pour personne. Lucy Parson connaissait parfaitement les discriminations raciales. Emma Goldman parla dans ses meetings de l’homosexualité…
    (...) Dire que l’on ne peut pas écrire sur l’Islam car c’est la religion des opprimés, c’est un non-sens pour un anarchiste car toute religion opprime. La religion est liberticide ; elle opprime les hommes, les femmes, les enfants, les animaux. Elle opprime souvent bien plus les femmes ; c’est un constat intemporel. Et les islamistes ainsi que leurs séides, idiots utiles ou pas, peuvent toujours nous traiter d’islamophobes, cela ne changera pas notre conception de la liberté. Et Dieu et l’Etat de Bakounine est un ouvrage qui restera d’actualité tant que les Etats et les religions existeront. Et nous souhaitons à l’Islam et aux autres religions, le sort de l’église catholique qui périclite d’année en année (...)
    Grâce au wokisme, il existe maintenant un véritable clivage dans le féminisme. S’il y a toujours consensus contre le patriarcat, les viols, les féminicides, le harcèlement… ça se déchire sur le port du voile par exemple, les Trans…. Parallèlement à aucun moment le wokisme analyse la domination des femmes aux postes de pouvoir. Elles y exercent aussi tyranniquement que les hommes. De mémoire, Margaret Thatcher en Grande-Bretagne. Aujourd’hui, c’est la Méloni en Italie et peut-être demain Marine Le Pen en France. Elles font aussi bien le travail que les hommes pour ce que le capital exige (...)

    #Anarchisme #émancipation...
    🛑 #wokisme #discrimination #oppression #injustice #capitalisme #extrêmedroite #étatisme #pouvoir #luttedesclasses #féminisme #patriarcat #femmes #marchandisation #profits #GPA #homophobie #validisme... ...

    ⏩ Lire l’article complet...
    ▶️ https://le-libertaire.net/7807-2
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  • Carbon cash machine

    As the world burns, shareholders are getting record cash pay outs from their fossil fuel investments. Cash earnings made by shareholders in the UK’s two largest oil companies BP and Shell are now triple the amount they were when the Paris Agreement was signed in December 2015.

    This is the headline finding of our new report written and researched in collaboration with Corporate Watch.

    The report uses a unique analysis of financial data to calculate the combined earnings of shareholders derived from dividend pay outs and share buybacks.

    We found that shareholders in BP and Shell have earned a total of £131 billion in dividends and share buybacks combined since the Paris Agreement was signed. And this is just the value of cash earnings; the value of their shares has risen significantly in this period.

    In the same period, the top 8 shareholders have significantly expanded their holdings in BP and Shell; those 8 companies alone have raked in a total of £28.7bn in cash earnings from both BP and Shell. The report analyses the environmental and social strategies of those top eight shareholders in BP and Shell and raises major questions about the failure of fossil fuel divestment strategies and market solutions to climate change.

    Those shareholders are not likely to be influenced by campaigners demanding divestment since they all use passive investment strategies. Passive investing is the strategy of buying and holding stocks and based on sector and market benchmarks, such as stock market indices such as Dow Jones, S&P 500 or Nasdaq. Passive investment strategies therefore involve fewer judgement calls and are more automated, making them less responsible to non-financial considerations.

    Asset management firms deploying passive investment strategies have ensured that the tidal wave of fossil fuel investment has not abated, despite growing demands for divestment. While some investors have decreased their shareholding in Shell and BP since 2016, a large majority have retained or increased their stakes in the two companies.

    The report concludes that we will not be able to stem the flow of oil unless we stem the flow of cash to rich investors. The report therefore raises fundamental questions about the limits facing divestment campaigns. While investment and divestment patterns will be explored in more detail in a follow-up report next month, the analysis we present here demonstrates that a move away from fossil fuels at a pace necessary to abate climate change is simply not possible while power is becoming even more concentrated in the hands of asset managers.

    https://ccccjustice.org/2023/08/08/carbon-cash-machine

    Pour télécharger le #rapport :
    https://ccccjustice.org/wp-content/uploads/2023/08/Carbon-Cash-Machine.pdf

    #énergies_fossiles #investissement #pétrole #combustibles_fossiles #énergie_fossile #BP #Shell #profits #dividendes #business

  • We Get What We Pay For : The Cycle of Military Spending, Industry Power, and Economic Dependence | Costs of War
    https://watson.brown.edu/costsofwar/papers/2023/WhatWePayFor

    Decades of high levels of military spending have changed U.S. government and society — strengthening its ability to fight wars, while weakening its capacities to perform other core functions. Investments in infrastructure, healthcare, education, and emergency preparedness, for instance, have all suffered as military spending and industry have crowded them out. Increased resources channeled to the military further increase the political power of military industries, ensuring that the cycle of economic dependence continues — militarized sectors of the economy see perpetual increases in funding and manpower while other human needs go unmet.

    […]

    This report further shows that reducing military funding and increasing funding to areas like healthcare, education, infrastructure, or clean energy, will create jobs. Dollar for dollar, these alternative areas of federal spending create between 9 percent and 250 percent more jobs than the military . And a “Just Transition” is possible in order to ease the transition for workers and communities that are dependent on military spending, as investments are made and jobs are created in other industries.

    #états-unis
    #leadership #milliers_de_milliards

    Ce qui n’est pas discuté, comme quasiment toujours, ce sont les gigantissimes #profits engrangés par une minorité grâce aux moindres investissements publics dans les domaines de l’éducation, de la santé et autres secteurs nécessaires au plus grand nombre.

  • Le retour du travail des enfants est le dernier signe du déclin des Etats-Unis Steve Fraser

    En 1906, un vieux chef amérindien visitait New York pour la première fois. Il était curieux de la ville et la ville était intéressée à lui. Un journaliste d’un magazine demande au chef amérindien ce qui l’a le plus surpris dans ses déplacements en ville. « Les petits enfants qui travaillent », répondit le visiteur.

    Le travail des enfants aurait pu choquer cet étranger, mais il n’était que trop banal à l’époque dans les Etats-Unis urbains et industriels (et dans les fermes où il était habituel depuis fort longtemps). Plus récemment, cependant, il est devenu beaucoup plus rare. La loi et la pratique l’ont presque fait disparaître, supposent la plupart d’entre nous. Et notre réaction face à sa réapparition pourrait ressembler à celle de ce chef : choc, incrédulité.


    Mais nous ferions mieux de nous y habituer, car le travail des enfants revient en force. Un nombre impressionnant d’élus entreprennent des efforts concertés ( The New Yorker , « Child Labor is on the Rise », 4 juin 2023 sur le site) pour affaiblir ou abroger les lois qui ont longtemps empêché (ou du moins sérieusement freiné) la possibilité d’exploiter les enfants.

    Reprenez votre souffle et considérez ceci : le nombre d’enfants au travail aux Etats-Unis a augmenté de 37% entre 2015 et 2022. Au cours des deux dernières années, 14 États ont introduit ou promulgué des lois annulant les réglementations qui régissaient le nombre d’heures pendant lesquelles les enfants pouvaient être employés, réduisaient les restrictions sur les travaux dangereux et légalisaient les salaires minimums pour les jeunes.

    L’État de l’Iowa autorise désormais les jeunes de 14 ans à travailler dans des blanchisseries industrielles. A l’âge de 16 ans, ils peuvent occuper des emplois dans les domaines de la toiture, de la construction, de l’excavation et de la démolition et peuvent utiliser des machines à moteur. Les jeunes de 14 ans peuvent même travailler de nuit et, dès l’âge de 15 ans, ils peuvent travailler sur des chaînes de montage. Tout cela était bien sûr interdit il n’y a pas si longtemps.
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    Les élus donnent des justifications absurdes à ces entorses à des pratiques établies de longue date. Le travail, nous disent-ils, éloignera les enfants de leur ordinateur, de leurs jeux vidéo ou de la télévision. Ou encore, il privera le gouvernement du pouvoir de dicter ce que les enfants peuvent ou ne peuvent pas faire, laissant aux parents le contrôle – une affirmation déjà transformée en fantasme par les efforts visant à supprimer la législation sociale protectrice et à permettre aux enfants de 14 ans de travailler sans autorisation parentale formelle.

    En 2014, l’Institut Cato, un groupe de réflexion de droite, a publié « A Case Against Child Labor Prohibitions » (Un cas contre les interdictions du travail des enfants), arguant que de telles lois étouffaient les perspectives pour l’avenir des enfants pauvres, et en particulier les enfants noirs. La Foundation for Government Accountability (Fondation pour l’obligation du gouvernement de rendre des comptes), un groupe de réflexion financé par une série de riches donateurs conservateurs, dont la famille DeVos [Betsy DeVos, secrétaire d’Etat à l’Education sous l’administration Trump], a été le fer de lance des efforts visant à affaiblir les lois sur le travail des enfants, et Americans for Prosperity, la fondation milliardaire des frères Koch [très engagés dans les investissements pétroliers], s’est jointe à eux.

    Ces attaques ne se limitent pas aux États rouges (républicains) comme l’Iowa ou ceux du Sud. La Californie, le Maine, le Michigan, le Minnesota et le New Hampshire, ainsi que la Géorgie et l’Ohio, ont également été l’objet d’interventions dans ce sens. Au cours des années de pandémie, même le New Jersey a adopté une loi, augmentant temporairement les heures de travail autorisées pour les jeunes de 16 à 18 ans.


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    La vérité toute crue est que le travail des enfants est rentable et qu’il est en train de devenir remarquablement omniprésent. C’est un secret de Polichinelle que les chaînes de restauration rapide emploient des mineurs depuis des années et considèrent simplement les amendes occasionnelles comme faisant partie du coût de fonctionnement. Dans le Kentucky, des enfants d’à peine 10 ans ont travaillé dans de tels centres de restauration et d’autres, plus âgés, ont dépassé les limites horaires prescrites par la loi. En Floride et au Tennessee, les couvreurs peuvent désormais avoir 12 ans.

    Récemment, le Département du Travail a découvert plus de 100 enfants âgés de 13 à 17 ans travaillant dans des usines de conditionnement de viande et des abattoirs du Minnesota et du Nebraska. Et il ne s’agissait pas d’opérations véreuses. Des entreprises comme Tyson Foods et Packer Sanitation Services – qui appartient au fonds d’investissement BlackRock, la plus grande société de gestion d’actifs au monde [voir l’article sur ces fonds publié sur ce site le 7 juillet 2023] – figuraient également sur la liste.

    A ce stade, la quasi-totalité de l’économie est remarquablement ouverte au travail des enfants. Les usines de vêtements et les fabricants de pièces automobiles (qui fournissent Ford et General Motors) emploient des enfants immigrés, parfois pendant des journées de travail de 12 heures. Nombre d’entre eux sont contraints d’abandonner l’école pour ne pas être pénalisés. De la même manière, les chaînes d’approvisionnement de Hyundai et de Kia dépendent des enfants qui travaillent en Alabama.

    Comme l’a rapporté le New York Times en février dernier (« Alone and Exploited, Migrant Children Work Brutal Jobs Across the U.S. » par Hannah Dreier, 25 février 2023) – contribuant à faire connaître le nouveau marché du travail des enfants – des enfants mineurs, en particulier des migrants, travaillent dans des usines d’emballage de céréales et des usines de transformation alimentaire. Dans le Vermont, des « illégaux » (parce qu’ils sont trop jeunes pour travailler) font fonctionner des machines à traire. Certains enfants participent à la confection de chemises J. Crew [grande firme de prêt-à-porter] à Los Angeles, préparent des petits pains pour Walmart [le plus grand distributeur des Etats-Unis] ou travaillent à la production de chaussettes Fruit of the Loom [firme très connue]. Le danger guette. Les Etats-Unis sont un environnement de travail notoirement dangereux et le taux d’accidents chez les enfants travailleurs est particulièrement élevé, avec un inventaire effrayant de colonnes vertébrales brisées, d’amputations, d’empoisonnements et de brûlures défigurantes.

    La journaliste Hannah Dreier a parlé d’une « nouvelle économie de l’exploitation », en particulier lorsqu’il s’agit d’enfants migrants. Un instituteur de Grand Rapids, dans le Michigan, observant la même situation difficile, a fait la remarque suivante : « Vous prenez des enfants d’un autre pays et vous les mettez presque en servitude industrielle. »

    Il y a longtemps, aujourd’hui
    Aujourd’hui, nous pouvons être aussi stupéfaits par ce spectacle déplorable que l’était ce chef amérindien au tournant du XXe siècle. Nos ancêtres, eux, ne l’auraient pas été. Pour eux, le travail des enfants allait de soi.

    En outre, les membres des classes supérieures britanniques qui n’étaient pas obligés de travailler dur ont longtemps considéré le travail comme un tonique spirituel capable de réfréner les impulsions indisciplinées des classes inférieures. Une loi élisabéthaine de 1575 prévoyait l’affectation de fonds publics à l’emploi d’enfants en tant que « prophylaxie contre les vagabonds et les indigents ».

    Au XVIIe siècle, le philosophe John Locke [1632-1704, auteur de l’ Essai sur l’entendement humain , un des principaux acteurs de la Royal African Company, pilier de la traite négrière], alors célèbre « défenseur de la liberté », soutenait que les enfants de trois ans devaient être inclus dans la force de travail. Daniel Defoe, auteur de Robinson Crusoé , se réjouissait que « les enfants de quatre ou cinq ans puissent tous gagner leur propre pain ». Plus tard, Jeremy Bentham [1748-1832, précurseur du libéralisme], le père de l’utilitarisme, optera pour quatre ans, car sinon, la société souffrirait de la perte de « précieuses années pendant lesquelles rien n’est fait ! Rien pour l’industrie ! Rien pour l’amélioration, morale ou intellectuelle. »

    Le rapport sur l’industrie manufacturière publié en 1791 par le « père fondateur » états-unien Alexander Hamilton [1757-1804, secrétaire au Trésor de 1789 à 1795] notait que les enfants « qui seraient autrement oisifs » pourraient au contraire devenir une source de main-d’œuvre bon marché. L’affirmation selon laquelle le travail à un âge précoce éloigne les dangers sociaux de « l’oisiveté et de la dégénérescence » est restée une constante de l’idéologie des élites jusqu’à l’ère moderne. De toute évidence, c’est encore le cas aujourd’hui.


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    Lorsque l’industrialisation a effectivement commencé au cours de la première moitié du XIXe siècle, les observateurs ont noté que le travail dans les nouvelles usines (en particulier les usines textiles) était « mieux fait par les petites filles de 6 à 12 ans ». En 1820, les enfants représentaient 40% des travailleurs des usines dans trois Etats de la Nouvelle-Angleterre. La même année, les enfants de moins de 15 ans représentaient 23% de la main-d’œuvre manufacturière et jusqu’à 50% de la production de textiles de coton (« Child Labor in the United States », Robert Whaples, Wake Forest University).

    Et ces chiffres ne feront qu’augmenter après la guerre de Sécession [1861-1865]. En fait, les enfants d’anciens esclaves ont été ré-esclavagisés par le biais d’accords d’apprentissage très contraignants. Pendant ce temps, à New York et dans d’autres centres urbains, les padroni italiens ont accéléré l’exploitation des enfants immigrés tout en les traitant avec brutalité. Même le New York Times s’est offusqué : « Le monde a renoncé à voler des hommes sur les côtes africaines pour kidnapper des enfants en Italie. »

    Entre 1890 et 1910, 18% des enfants âgés de 10 à 15 ans, soit environ deux millions de jeunes, ont travaillé, souvent 12 heures par jour, six jours par semaine.Leurs emplois couvraient le front de mer – trop littéralement puisque, sous la supervision des padroni , des milliers d’enfants écaillaient les huîtres et ramassaient les crevettes. Les enfants étaient également des crieurs de rue et des vendeurs de journaux. Ils travaillaient dans des bureaux et des usines, des banques et des maisons closes. Ils étaient « casseurs » et « ouvreurs de portes en bois permettant l’accès d’air » dans les mines de charbon mal ventilées, des emplois particulièrement dangereux et insalubres. En 1900, sur les 100 000 ouvriers des usines textiles du Sud, 20 000 avaient moins de 12 ans.

    Les orphelins des villes sont envoyés travailler dans les verreries du Midwest. Des milliers d’enfants sont restés à la maison et ont aidé leur famille à confectionner des vêtements pour des ateliers clandestins. D’autres emballent des fleurs dans des tentes mal ventilées. Un enfant de sept ans expliquait : « Je préfère l’école à la maison. Je n’aime pas la maison. Il y a trop de fleurs. » A la ferme, la situation n’est pas moins sombre : des enfants de trois ans travaillent à décortiquer des baies.

    Dans la famille
    Il est clair que, jusqu’au XXe siècle, le capitalisme industriel dépendait de l’exploitation des enfants, moins chers à employer, moins capables de résister et, jusqu’à l’avènement de technologies plus sophistiquées, bien adaptés aux machines relativement simples en place à l’époque.


    En outre, l’autorité exercée par le patron était conforme aux principes patriarcaux de l’époque, que ce soit au sein de la famille ou même dans les plus grandes des nouvelles entreprises industrielles de l’époque, détenues en grande majorité par des familles, comme les aciéries d’Andrew Carnegie. Ce capitalisme familial a donné naissance à une alliance perverse entre patron et sous-traitants qui a transformé les enfants en travailleurs salariés miniatures.

    Pendant ce temps, les familles de la classe ouvrière étaient si gravement exploitées qu’elles avaient désespérément besoin des revenus de leurs enfants. En conséquence, à Philadelphie, au tournant du siècle, le travail des enfants représentait entre 28% et 33% du revenu des familles biparentales nées dans le pays Monthly Labor Review, « History of child labor in the United States—part 1 : little children working », January 2017) . Pour les immigrés irlandais et allemands, les chiffres étaient respectivement de 46% et 35%. Il n’est donc pas surprenant que les parents de la classe ouvrière se soient souvent opposés aux propositions de lois sur le travail des enfants. Comme l’a noté Karl Marx, le travailleur n’étant plus en mesure de subvenir à ses besoins, « il vend maintenant sa femme et son enfant, il devient un marchand d’esclaves ».

    Néanmoins, la résistance commence à s’organiser. Le sociologue et photographe Lewis Hine a scandalisé le pays avec des photos déchirantes d’enfants travaillant dans les usines et dans les mines. (Il put accéder à à ces lieux de travail en prétendant qu’il était un vendeur de bibles.) Mother Jones [1837-1930], la militante syndicaliste, a mené une « croisade des enfants » en 1903 au nom des 46 000 ouvriers du textile en grève à Philadelphie. Deux cents délégués des enfants travailleurs se sont rendus à la résidence du président Teddy Roosevelt [1901-1909] à Oyster Bay, Long Island, pour protester, mais le président s’est contenté de renvoyer la balle, affirmant que le travail des enfants relevait de la compétence des Etats et non de celle du gouvernement fédéral.

    Ici et là, des enfants tentent de s’enfuir. En réaction, les propriétaires ont commencé à entourer leurs usines de barbelés ou à faire travailler les enfants la nuit, lorsque leur peur de l’obscurité pouvait les empêcher de s’enfuir. Certaines des 146 femmes qui ont péri dans le tristement célèbre incendie de la Triangle Shirtwaist Factory en 1911 dans le Greenwich Village de Manhattan – les propriétaires de cette usine de confection avaient verrouillé les portes, obligeant les ouvrières prises au piège à sauter vers la mort depuis les fenêtres des étages supérieurs – n’avaient pas plus de 15 ans. Cette tragédie n’a fait que renforcer la colère grandissante à l’égard du travail des enfants.
    +++
    Un comité national sur le travail des enfants a été créé en 1904. Pendant des années, il a fait pression sur les Etats pour qu’ils interdisent, ou du moins limitent, le travail des enfants. Les victoires, cependant, étaient souvent à la Pyrrhus, car les lois promulguées étaient invariablement faibles, comportaient des dizaines d’exemptions et étaient mal appliquées. Finalement, en 1916, une loi fédérale a été adoptée qui interdisait le travail des enfants partout. En 1918, cependant, la Cour suprême l’a déclarée inconstitutionnelle.

    En fait, ce n’est que dans les années 1930, après la Grande Dépression, que les conditions ont commencé à s’améliorer. Compte tenu de la dévastation économique, on pourrait supposer que la main-d’œuvre enfantine bon marché aurait été très prisée. Cependant, face à la pénurie d’emplois, les adultes, et en particulier les hommes, ont pris le dessus et ont commencé à effectuer des tâches autrefois réservées aux enfants. Au cours de ces mêmes années, le travail industriel a commencé à incorporer des machines de plus en plus complexes qui s’avéraient trop difficiles pour les jeunes enfants. Dans le même temps, l’âge de la scolarité obligatoire ne cessait de s’élever, limitant encore davantage le nombre d’enfants travailleurs disponibles.
    +++
    Plus important encore, l’air du temps a changé. Le mouvement ouvrier insurrectionnel des années 1930 détestait l’idée même du travail des enfants. Les usines syndiquées et les industries entières étaient des zones interdites aux capitalistes qui cherchaient à exploiter les enfants. En 1938, avec le soutien des syndicats, l’administration du New Deal du président Franklin Roosevelt a finalement adopté la Fair Labor Standards Act qui, du moins en théorie, a mis fin au travail des enfants (bien qu’elle ait exempté le secteur agricole dans lequel ce type de main-d’œuvre restait courant).

    En outre, le New Deal de Roosevelt a transformé les mentalités à l’échelle du pays. Un sentiment d’égalitarisme économique, un nouveau respect pour la classe ouvrière et une méfiance sans bornes à l’égard de la caste des entreprises ont rendu le travail des enfants particulièrement répugnant. En outre, le New Deal a inauguré une longue ère de prospérité, avec notamment l’amélioration du niveau de vie de millions de travailleurs et travailleuses qui n’avaient plus besoin du travail de leurs enfants pour joindre les deux bouts.

    Retour vers le passé
    Il est d’autant plus étonnant de découvrir qu’un fléau, que l’on croyait banni, revit. Le capitalisme états-unien est un système internationalisé, ses réseaux s’étendent pratiquement partout. Aujourd’hui, on estime à 152 millions le nombre d’enfants au travail dans le monde. Bien sûr, tous ne sont pas employés directement ou même indirectement par des entreprises états-uniennes. Mais ces millions devraient certainement nous rappeler à quel point le capitalisme est redevenu profondément rétrograde, tant chez nous qu’ailleurs sur la planète.

    Les vantardises sur la puissance et la richesse de l’économie des Etats-Unis font partie du système de croyances et de la rhétorique des élites. Cependant, l’espérance de vie aux Etats-Unis, mesure fondamentale de la régression sociale, ne cesse de diminuer depuis des années. Les soins de santé sont non seulement inabordables pour des millions de personnes, mais leur qualité est devenue au mieux médiocre si l’on n’appartient pas au 1% supérieur. De même, les infrastructures du pays sont depuis longtemps en déclin, en raison de leur âge et de décennies de négligence.

    Il faut donc considérer les Etats-Unis comme un pays « développé » en proie au sous-développement et, dans ce contexte, le retour du travail des enfants est profondément symptomatique. Même avant la grande récession qui a suivi la crise financière de 2008, le niveau de vie avait baissé, en particulier pour des millions de travailleurs mis à mal par un tsunami de désindustrialisation qui a duré des décennies. Cette récession, qui a officiellement duré jusqu’en 2011, n’a fait qu’aggraver la situation. Elle a exercé une pression supplémentaire sur les coûts de la main-d’œuvre, tandis que le travail devenait de plus en plus précaire, de plus en plus dépourvu d’avantages sociaux et non syndiqué. Dans ces conditions, pourquoi ne pas se tourner vers une autre source de main-d’œuvre bon marché : les enfants ?

    Les plus vulnérables d’entre eux viennent de l’étranger, des migrants du Sud, fuyant des économies défaillantes souvent liées à l’exploitation et à la domination économiques états-uniennes. Si ce pays connaît aujourd’hui une crise frontalière – et c’est le cas – ses origines se trouvent de ce côté-ci de la frontière [et non pas avant tout en Amérique centrale ou au Mexique].

    La pandémie de Covid-19 de 2020-2022 a créé une brève pénurie de main-d’œuvre, qui est devenue un prétexte pour remettre les enfants au travail (même si le retour du travail des enfants est en fait antérieur à la pandémie). Il faut considérer ces enfants travailleurs au XXIe siècle comme un signe distinct de la pathologie sociale présente. Les Etats-Unis peuvent encore tyranniser certaines parties du monde, tout en faisant sans cesse étalage de leur puissance militaire. Mais chez eux, ils sont malades.

    #capitalisme #profits #travail des #enfants #exploitation #usa #Etats-Unis #élites #esclavage #ouvrières #ouvriers #migrants #Lewis_Hine

    Source originale : Tom Dispatch https://tomdispatch.com/caution-children-at-work
    Traduit de l’anglais par A l’encontre https://alencontre.org/ameriques/americnord/usa/le-retour-du-travail-des-enfants-est-le-dernier-signe-du-declin-des-etat

  • 🛑 Moins on mange, plus ils encaissent : l’inflation gave les bourgeois - Frustration

    C’est à n’y rien comprendre. C’est la crise, l’inflation reste très élevée, l’économie n’est ni remise du Covid ni de la guerre en Ukraine qui se poursuit. Et pourtant, les profits atteignent des records, les dividendes sont plus hauts que le ciel, et les milliardaires n’ont jamais accumulé autant de milliards. Si on n’y regarde pas de plus près, on pourrait considérer comme paradoxale une situation qui est parfaitement logique. Pour accumuler les milliards, il faut accumuler les dividendes. Pour accumuler les dividendes, il faut accumuler les profits. Pour accumuler les profits, il faut appauvrir la population en augmentant les prix et en baissant les salaires réels. Ça vous parait simpliste ? Alors, regardons de plus près les chiffres (...)

    #inflation #capitalisme #profits #bourgeoisie... #anticapitalisme !

    ▶️ via @frustration1

    ⏩ Lire l’article complet…

    ▶️ https://www.frustrationmagazine.fr/inflation-bourgeois

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  • Moins on mange, plus ils encaissent : l’inflation gave les bourgeois
    https://www.frustrationmagazine.fr/inflation-bourgeois

    C’est à n’y rien comprendre. C’est la crise, l’inflation reste très élevée, l’économie n’est ni remise du Covid ni de la guerre en Ukraine qui se poursuit. Et pourtant, les profits atteignent des records, les dividendes sont plus hauts que le ciel, et les milliardaires n’ont jamais accumulé autant de milliards. Si on n’y regarde […]

    • Moins on mange, plus ils encaissent : l’#inflation gave les bourgeois

      C’est à n’y rien comprendre. C’est la crise, l’inflation reste très élevée, l’économie n’est ni remise du Covid ni de la guerre en Ukraine qui se poursuit. Et pourtant, les profits atteignent des records, les #dividendes sont plus hauts que le ciel, et les #milliardaires n’ont jamais accumulé autant de milliards. Si on n’y regarde pas de plus près, on pourrait considérer comme paradoxale une situation qui est parfaitement logique. Pour accumuler les milliards, il faut accumuler les dividendes. Pour accumuler les dividendes, il faut accumuler les profits. Pour accumuler les profits, il faut appauvrir la population en augmentant les #prix et en baissant les #salaires réels. Ça vous parait simpliste ? Alors, regardons de plus près les chiffres.

      Selon l’INSEE, au premier trimestre de cette année, l’#excédent_brut_d’exploitation (#EBE) des entreprises de l’#industrie_agro-alimentaire (c’est-à-dire le niveau de profit que leur activité génère) a progressé de 18%, pour ainsi s’établir à 7 milliards d’euros. Les industriels se font donc de plus en plus d’argent sur le dos de leurs salariés et, plus globalement, sur celui des Français qui galèrent pour se nourrir correctement : les ventes en volume dans la #grande_distribution alimentaire ont baissé de 9% au premier trimestre 2023 par rapport à la même période l’année précédente. La #consommation en France est ainsi tombée en-dessous du niveau de 2019, alors que la population a grossi depuis de 0,3%. Selon François Geerolf, économiste à l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques), cette baisse de la #consommation_alimentaire n’a aucun précédent dans les données compilées par l’Insee depuis 1980. Dans le détail, sur un an, on constate des baisses de volumes vendus de -6% l’épicerie, -3% sur la crèmerie, -1,6% pour les liquides, etc. Cela a des conséquences concrètes et inquiétantes : en avril dernier, l’IFOP montrait que presque la moitié des personnes gagnants autour du SMIC se privait d’un repas par jour en raison de l’inflation.

      Une baisse de la consommation pilotée par les industriels

      Comment les entreprises peuvent-elles se faire autant d’argent, alors que nous achetons de moins en moins leurs produits ? Tout simplement, car cette baisse de la consommation est pilotée par les industriels. Ils choisissent d’augmenter massivement leurs prix, en sachant que la majorité des gens accepteront malgré eux cette hausse, car ils considéreront qu’elle est mécaniquement liée à l’inflation ou tout simplement, car ces industriels sont en situation de quasi-monopole et imposent donc les prix qu’ils veulent (ce qu’on appelle le #pricing_power dans le jargon financier). Ils savent très bien que beaucoup de personnes n’auront par contre plus les moyens d’acheter ce qui leur est nécessaire, et donc que les volumes globaux qu’ils vont vendre seront plus bas, mais cette baisse de volume sera très largement compensée par la hausse des prix.

      Sur le premier trimestre 2023, en Europe, #Unilever et #Nestlé ont ainsi augmenté leurs prix de 10,7%, #Bonduelle de 12,7% et #Danone de 10,3 %, alors que l’inflation tout secteur confondu passait sous la barre des 7%. La quasi-totalité d’entre eux voient leurs volumes vendus chuter dans la même période. Les plus pauvres, pour lesquels la part de l’alimentaire dans la consommation est mécaniquement la plus élevée, ne peuvent plus se nourrir comme ils le souhaiteraient : la #viande et les #céréales sont particulièrement touchés par la baisse des volumes vendus. Certains foyers sautent même une partie des repas. Les #vols se multiplient, portés par le désespoir et les grandes enseignes poussent le cynisme jusqu’à placer des #antivols sur la viande et le poisson.

      Les hausse des profits expliquent 70% de la hausse des prix de l’alimentaire

      Comme nous avons déjà eu l’occasion de l’écrire, les hausses de profit des #multinationales sont déterminantes dans l’inflation que nous traversons. Même le FMI le dit : selon une étude publiée le mois dernier, au niveau mondial depuis 2022, la hausse des profits est responsable de 45 % de l’inflation. Le reste de l’inflation vient principalement des coûts de l’#énergie et des #matières_premières. Plus spécifiquement sur les produits alimentaires en France, d’après les calculs de l’institut La Boétie, « la hausse des prix de #production_alimentaire par rapport à fin 2022 s’explique à plus de 70 % par celle des profits bruts ». Et cela ne va faire qu’empirer : en ce début d’année, les prix des matières premières chutent fortement, mais les prix pratiqués par les multinationales poursuivent leur progression, l’appétit des actionnaires étant sans limites. L’autorité de la concurrence s’en inquiète : « Nous avons un certain nombre d’indices très clairs et même plus que des indices, des faits, qui montrent que la persistance de l’inflation est en partie due aux profits excessifs des entreprises qui profitent de la situation actuelle pour maintenir des prix élevés. Et ça, même la Banque centrale européenne le dit. », affirme Benoît Cœuré, président de l’Autorité de la concurrence, au Parisien.

      La stratégie des multinationales est bien rodée : augmenter massivement les prix, mais aussi bloquer les salaires, ainsi non seulement leur #chiffre_d’affaires progresse fortement, mais ils génèrent de plus en plus de profits grâce à la compression de la #masse_salariale. Les calculs sur longue période de l’Institut La Boétie donnent le vertige : « entre 2010 et 2023, le salaire brut horaire réel (c’est-à-dire corrigé de l’inflation) a baissé de 3,7 %, tandis que les profits bruts réels, eux, ont augmenté de 45,6 % ». Augmenter massivement les prix tout en maintenant les salaires au ras du sol permet d’augmenter le vol légal que les #actionnaires commettent sur les salariés : ce qu’ils produisent est vendu de plus en plus cher, et les patrons ne les payent par contre pas davantage.

      La Belgique a le plus bas taux d’inflation alors que les salaires y sont indexés

      L’une des solutions à cela est bien connue, et était en vigueur en France jusqu’en 1983 : indexer les salaires sur les prix. Aujourd’hui seul le SMIC est indexé sur l’inflation et la diffusion des hausses du SMIC sur les salaires plus élevés est quasi inexistante. Les bourgeois s’opposent à cette mesure en affirmant que cela risque de favoriser encore davantage l’inflation. Les statistiques prouvent pourtant le contraire : la Belgique est le pays affichant le plus bas taux d’inflation en avril 2023 (moins de 5% tandis qu’elle atteint 6,6% en France) alors que là-bas les salaires s’alignent automatiquement sur les prix. Il est urgent de mettre en œuvre ce genre de solutions en France. En effet, la situation devient de plus en plus intenable : la chute des #conditions_de_vies de la majorité de la population s’accélère, tandis que les bourgeois accumulent de plus en plus de richesses.

      Cela dépasse l’entendement : selon le magazine Challenges, le patrimoine professionnel des 500 plus grandes fortunes de France a progressé de 17 % en un an pour s’établir à 1 170 milliards d’euros cette année ! En 2009, c’était 194 milliards d’euros… Les 500 plus riches détiennent donc en #patrimoine_professionnel l’équivalent de presque la moitié de la #richesse créée en France par an, mesurée par le PIB. Et on ne parle ici que de la valeur des actions qu’ils détiennent, il faudrait ajouter à cela leurs placements financiers hors du marché d’actions, leurs placements immobiliers, leurs voitures, leurs œuvres d’art, etc.

      La #France au top dans le classement des gros bourges

      La fortune de #Bernard_Arnault, l’homme le plus riche du monde, est désormais équivalente à celle cumulée de près de 20 millions de Français et Françaises d’après l’ONG Oxfam. Sa fortune a augmenté de 40 milliards d’euros sur un an pour s’établir à 203 milliards d’euros. Ce type a passé sa vie à exploiter des gens, ça paye bien (à peine sorti de polytechnique, Bernard Jean Étienne avait pris la direction de l’entreprise de son papa). Au classement des plus grands bourges du monde, la France est donc toujours au top, puisque non seulement on a l’homme le plus riche, mais aussi la femme, en la personne de #Françoise_Bettencourt_Meyers (patronne de L’Oréal, 77 milliards d’euros de patrimoine professionnel). Mais il n’y a pas que le luxe de représenté dans ce classement, la grande distribution est en bonne place avec ce cher #Gérard_Mulliez (propriotaire des #Auchans notamment) qui détient 20 milliards d’euros de patrimoine ou #Emmanuel_Besnier, propriétaire de #Lactalis, le 1er groupe mondial de produits laitiers, qui émarge à 13,5 milliards.

      Les chiffres sont vertigineux, mais il ne faut pas se limiter à une posture morale se choquant de ces #inégalités sociales et appelant, au mieux, à davantage les taxer. Ces fortunes ont été bâties, et progressent de plus en plus rapidement, grâce à l’exploitation du travail. L’augmentation de valeur de leurs entreprises est due au travail des salariés, seul créateur de valeur. Tout ce qu’ils détiennent est ainsi volé légalement aux salariés. Ils doivent donc être pris pour cible des mobilisations sociales futures, non pas principalement parce qu’ils sont #riches, mais parce qu’ils sont les plus gros voleurs du monde : ils s’emparent de tout ce qui nous appartient, notre travail, notre vie, notre monde. Il est temps de récupérer ce qui nous est dû.

      https://www.frustrationmagazine.fr/inflation-bourgeois

      #profit #économie #alimentation #chiffres #statistiques