provinceorstate:alsace

  • 31 « événements précurseurs » à la centrale nucléaire de Fessenheim
    https://www.rue89strasbourg.com/31-evenements-precurseurs-a-la-centrale-nucleaire-de-fessenheim-143

    La députée allemande Sylvia Kotting-Uhl est venue présenter en Alsace des informations nouvelles concernant des incidents enregistrés sur le parc nucléaire français entre 2003 et 2014. La centrale de Fessenheim est particulièrement visée. (lire l’article complet : 31 « événements précurseurs » à la centrale nucléaire de Fessenheim)

  • Pour le président du Ceser, Strasbourg ne peut rester capitale du Grand Est avec un département Alsace puissant
    https://www.rue89strasbourg.com/patrick-tassin-president-ceser-strasbourg-capitale-grand-est-depart

    Le président du Conseil économique social et environnemental régional (Ceser), Patrick Tassin, s’inquiète des répercussions à terme d’une demi-fusion du Haut-Rhin et du Bas-Rhin. La place de Strasbourg dans un département alsacien plus puissant que ses équivalents du Grand Est poserait alors question. (lire l’article complet : Pour le président du Ceser, Strasbourg ne peut rester capitale du Grand Est avec un département Alsace puissant)

  • « Bataille du siège » du Parlement européen : Strasbourg perd un point
    https://www.rue89strasbourg.com/bataille-du-siege-du-parlement-europeen-strasbourg-perd-un-point-14

    Nouvel épisode dans la « bataille du siège » du Parlement européen, qui oppose les défenseurs de l’institution à Strasbourg à ceux qui se satisferaient tout à fait d’un siège unique, non pas en Alsace mais à Bruxelles. La Cour de justice de l’Union européenne a rendu mardi un arrêt donnant tort à la France, qui maintenait que le budget européen devait intégralement être voté à Strasbourg. Il n’en fallait pas plus pour relancer un débat déjà houleux. (lire l’article complet : « Bataille du siège » du Parlement européen : Strasbourg perd un point)

  • New status by deylord
    https://mastodon.partipirate.org/users/deylord/statuses/100828059910398583

    « Laurenzaccio » à Saint-Louis (68)
    L’équipe du spectacle « Laurenzaccio » est arrivée à bon port à Saint-Louis (68) pour entamer sa résidence de création du décor.
    https://www.silencecommunity.com/blog/view/46982/« laurenzaccio »-a-saint-louis-68

    #alsace #HautRhin #clown #création #décors #spectacle #sand #musset #gonzalez #pillavoine

  • Trois assos environnementales vont aussi boycotter les commissions de l’État
    https://www.rue89strasbourg.com/associations-ecologistes-boycott-commissions-etat-143039

    La Ligue de protection des oiseaux (LPO), Le Groupe d’étude et de protection des mammifères d’Alsace (Gepma) et l’association pour la protection des amphibiens et reptiles d’Alsace (Bufo) ne vont à leur tour plus participer aux commissions administratives sous l’autorité de l’État en Alsace "jusqu’à nouvel ordre". Les trois associations se calquent sur la récente (lire l’article complet : Trois assos environnementales vont aussi boycotter les commissions de l’État)

  • « Laurenzaccio » à Saint-Louis (68)

    Mario Gonzalez (metteur en scène), Philippe Pillavoine (interprète) et Anne-Marie Laussat (Régisseur Général) seront du 02 au 10 octobre 2018 en résidence de création du décor de Laurenzaccio. « Le Bateau Ivre » porte ce projet de tragédie clownesque depuis 2012.... https://www.silencecommunity.com/events/event/view/46978/« laurenzaccio »-a-saint-louis-68

    #Eléonara_Rossi #Rossi #Mario_Gonzalez #Gonzalez #Philippe_Pillavoine #Pillavoine #Sand #Musset #spectacle #création #adaptation #décor #résidence #alsace #Tragédie #clown #lorenzaccio #Théâtre #La_Coupole #Saint-Louis

  • Le sénateur André Reichardt pour une Alsace hors de la Région Grand-Est
    https://www.rue89strasbourg.com/andre-reichardt-pour-sortir-alsace-grand-est-142668

    Alors que Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, vient de boucler un tour d’Alsace pour voir comment pourrait se créer une nouvelle collectivité alsacienne, le sénateur André Reichardt (Les Républicains) lui a envoyé une lettre l’invitant à réfléchir à la suite. Et la suite, c’est la sortie de la Région Grand Est pour [...] (lire l’article complet : Le sénateur André Reichardt pour une Alsace hors de la Région Grand-Est)

  • Le Leclerc de la Vigie reprend le Leclerc Express à Illkirch, menacé de fermeture
    https://www.rue89strasbourg.com/leclerc-vigie-rachetee-illkirch-139810

    L’hypermarché Leclerc (ex-Coop Alsace) de la Vigie à Geispolsheim a racheté le Leclerc Express (ex-Coop également) à Illkirch-Graffenstaden, dans le quartier Libermann au mois de mai. En mars 2016 ce point de vente menaçait de fermer dès l’été (voir notre article). Pour Laurent Leclercq, le directeur de la société Hypercoop de Leclerc qui avait racheté une partie [...] (lire l’article complet : Le Leclerc de la Vigie reprend le Leclerc Express à Illkirch, menacé de fermeture)

  • Un lanceur d’alerte révèle un grave danger d’explosion d’un site industriel en Alsace
    https://reporterre.net/Un-lanceur-d-alerte-revele-un-grave-danger-d-explosion-d-un-site-industr

    Mais l’ambiance se durcit à son égard au sein de la mutuelle d’assurance. Plutôt que de subir les foudres de ses supérieurs, pour qui il semble poser des questions embarrassantes, l’inspecteur décide de faire profil bas. L’idée lui vient de jouer la montre en attendant que s’applique le décret sur les lanceurs d’alerte implémenté par la loi Sapin II, soit le 1er janvier 2018. Cette date une fois passée, il alerte le déontologue de Groupama Grand Est, et transmet successivement le dossier à l’Agence française anticorruption, au directeur de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et à la Dreal Grand Est. Il ne reçoit pas de réponse.

    Pourtant, la Dreal effectue bien une visite de la coopérative agricole le 9 février 2018, sans toutefois en publier le compte-rendu. Un choix surprenant alors que tous les comptes-rendus de ce genre sont d’ordinaire disponibles en ligne sur le site de l’institution. On peut ainsi lire les rapports antérieurs concernant la CAC, jusqu’à 2014 seulement.

  • Elus, zadistes et la pasteure du village se mobilisent contre une autoroute en #Alsace

    Les travaux préparatoires en vue de la mise en place, par le groupe #Vinci, d’une autoroute de contournement de #Strasbourg ont commencé lundi. Une ZAD a été évacuée, des arbres sont en cours d’abattage. Sur place, les habitants ne décolèrent pas. Ce grand projet, considéré comme inutile et imposé, fédère largement contre lui.


    https://www.mediapart.fr/journal/france/150918/elus-zadistes-et-la-pasteure-du-village-se-mobilisent-contre-une-autoroute
    #résistance #France #autoroute #manifestation #infrastructure_routière

  • Super interview de 2013 : Rachid Taha : « Liberté, égalité, fraternité, c’est devenu un slogan publicitaire »
    Rosa Moussaoui et Marie-José Sirach, L’Humanité, le 22 novembre 2013
    https://www.humanite.fr/culture/rachid-taha-liberte-egalite-fraternite-c-est-deven-553643

    Un reportage sur Carte de Séjour en 1982 :
    https://www.youtube.com/watch?v=9vDc4YuZz1k

    L’Hymne antifasciste de 1993, Voilà Voilà :
    https://www.youtube.com/watch?v=YoUk9ksOKP4

    Ya Rayah en 1997, le clip officiel :
    https://www.youtube.com/watch?v=zp1m0xbkap4

    1,2,3 Soleils, le concert du siècle en 1999, avec Ida :
    https://www.youtube.com/watch?v=vVRsnDo0qcY

    Alliance punk arabe, il était logique qu’il adapte Rock el Casbah en 2004. Il était aussi logique qu’il la chante avec Mick Jones, en 2006 :
    https://www.youtube.com/watch?v=U76JhPVIoIs

    Le dernier morceau de son dernier disque studio en 2013 était une reprise de Voilà Voila, avec Brian Eno, Agnès b., Femi Kuti, Mick Jones, Christian Olivier, Eric Cantona, Camélia Jordana, Oxmo Puccino, Rachida Brachni, Sonia Rolland et Rodolphe Burger, conscient que la lutte contre le fascisme n’était pas terminée, mais sans lui ce sera encore plus difficile :
    https://www.youtube.com/watch?v=A6WIbvwcVUg

    Aussi ici :
    https://seenthis.net/messages/721451
    https://seenthis.net/messages/721454
    https://seenthis.net/messages/721475

    Très triste, encore... après Jacques Higelin et Aretha Franklin

    #Rachid_Taha #Musique #mort_en_2018

    • Lundi 10 septembre, au soir, une manifestation a de nouveau eu lieu contre le projet d’autoroute GCO, près de Strasbourg. Les gendarmes ont fait usage de gaz lacrymogènes contre des élus et des députés européens. Karima Delli, députée écologiste, a été gazée en pleine figure. Alsace nature dénonce une « violence d’Etat inacceptable ». Le matin, la Zad avait été évacuée. Récit.

      Plus de 300 citoyens et élus ont fait face aux forces de l’ordre lundi soir 10 septembre vers 20h dans la Zad de Kolbsheim, près de Strasbourg. Les manifestants avaient participé peu avant à un rassemblement au château de la commune, en compagnie des eurodéputés José Bové et Karima Delli. Les forces de l’ordre ont copieusement aspergé les manifestants de gaz lacrymogènes, manifestants parmi lesquels se trouvaient plusieurs enfants. « Il n’y avait aucune violence de notre part, témoigne Michel Dupont, un militant présent. A ce moment, nous avions les bras levés. » La députée Karima Delli a été sévèrement incommodée et s’est écroulée au sol, en pleurs, prise de difficultés respiratoires. Elle a été secourue par des manifestants, dont un médecin et José Bové, avant d’être évacuée. La tension est restée vive pendant une demi-heure avant que la plupart des manifestants refluent. Selon un communiqué de la préfecture du Bas-Rhin publié mardi 11 septembre, « les gendarmes engagés sur le dispositif de sécurisation ont fait usage de la force de manière strictement proportionnée ».

      Karima Delli est présidente de la Commission des transports au Parlement européen.

      #Violence_d'état

  • Quand les eaux montent – Mise en #patrimoine des #crues et des #inondations

    Cet ouvrage, issu des travaux de la Chaire Capital environnemental et gestion durable des cours d’eau (Géolab/Université de Limoges) présente des études de cas en France, en Europe mais aussi en Inde et au canada et propose une lecture patrimoniale des inondations.

    Si Jamie Linton enseigne la géographie à l’Université de Limoges, Alexis Metzger est associé au centre de formation sur l’environnement et la société de l »ENS-ULM. Tous deux introduisent l’ouvrage qu’il coordonne, organisent les diverses contributions en trois parties : traces et mémoires qui conduisent le lecteur dans le Gers et au Canada, Risques et cultures des rives du Brahmapoutre au Rhin en passant par les bords de Loire, la seine et le Tibre, Transmissions et créations entre Loire et Garonne.

    L’introduction Mind the floods ! Définit le cadre conceptuel : le patrimoine en relation avec la crue considérée comme utile à l’écosystème de la rivière, une « contrainte à intégrer au développement des territoires »1. Les auteurs rappellent le contexte d’élaboration de l’ouvrage : un colloque tenu à limoges en octobre 2015 et invitent à compléter la lecture par l’écoute d’extraits de communications et proposent une bibliographie générale sur ces thèmes 2

    Traces et mémoires

    Franck David (Université Bretagne -Sud), spécialiste des traces mémorielles des héritages douloureux entre valorisation et oubli, aborde les mémoires d’une crue assez récente à Auch3, une crue dévastatrice pour les habitants de la ville basse épargnant la ville historique en rive gauche.Il pose une série de questions : la mémoire, construction sociale, constitue-telle un patrimoine ? Comment sont conservées ou cachées les traces visuels de la crue ? Les mesures de prévention des risques ne pourraient-elles pas entretenir les traces de hauteurs d’eau pour rappeler le risque ? La loi du 30 juillet 2003 prévoit en effet de matérialiser les repères de PHEC4 alors que rien n’est prévu en ce qui concerne l’étendue spatiale de l’inondation. L’auteur montre que d’autres formes existent : monument ou spectacle vivant. Il analyse deux figurations du sculpteur Jaime Plensa installées en 1992 et le parcours d’interprétation de la ville « chemin de traverse » les associant à une représentation chorégraphique évoquant la crue. Le but de ces œuvres est de réconcilier les habitants avec le rivière de même que les aménagements de rectification des rives et aménagements paysagers avec promenade et parcours sportif pour permettre une réappropriation pacifié du Gers.

    Anne Watelet der l’école de l’environnement de l’Université Laurentienne (Ontario-Canada) entraîne le lecteur sur les rives de la rivière des Ouataouais. Il s’agit d’une rivière liée à l’histoire même du Québéc, patrimoine reconnu officiellement en 2017 mais la mémoire des crues est peu connue. L’étude porte sur deux villages à l’ouest de Montréal, l’un est un point de portage incontournable à, l’aval de rapides fréquentés dès le début du XVIIe siècle par les migrants européens. Les vestiges du canotage ont été largement détruit par la construction d’une centrale hydroélectrique (1962). Comment les habitants vivent-ils aujourd’hui le milieu riverain ? L’auteure décrit l’hydrologie de la rivière et ses crues fréquentes, la mémoire des crues utiles à l’exploitation forestière5 ou à la ^pêche à l’esturgeon. La présentation des effets du barrage sur le sentiment des riverains montre une différence selon qu’ils vivent en amont ou en aval du barrage6. L’auteure constate que l’éloignement de la connaissance et de la crainte des crues amène à une extension des zones bâties en zone inondable en aval et une prise de conscience récente de la collectivité locale.

    Quatre universitaires britanniques : Lindsey McEwen, Joanne Garde-Hansen, Iain Robertson, Andrew Holmes explorent la nature changeante des archives d’inondation, leur relation avec la mémoire et les savoir locaux. Ils définissent les archives et les conditions de leur collecte. Ils montrent le poids ses élites dans la définition de ce qui doit être conservé même si des mémoires plus personnelles ou familiales existent. Les auteurs évoquent la conservation d’archives d’inondation : photographies7, témoignages, repères. Ils concluent sur l’existence d’un patrimoine culturel immatériel et pose la question de sa mise à disposition du public.

    Risques et cultures

    Quatre articles abordent la question sous l’angle risques/ressources.

    Émilie Crémin nous entraîne sur les rives du Brahmapoutre. Elle montre comment les populations y ont vécu en utilisant les différents niveaux d’eau, « jouant » avec les crues tandis que les autorités tentent depuis le XIIe siècle de les maîtriser. Elle présente la culture ancienne du fleuve divinisé, associé à Brahma, les politiques de préservation de l’écosystème de la plaine inondable dans le Parc National de Kaziranga et le « savoir vivre avec les crues des habitants de l’île de Majuli. Elle analyse ensuite un autre patrimoine lié à la longue histoire des digues, les évolution des pratiques agricoles, les critiques de ces politiques de protection. Elle conclut sur l’existence dans cette région d’une culture du risque exprimée par des dessins d’enfants.

    Sylvain rode et Sylvie Servain se penchent sur la Loire moyenne autour de la question : « l’approche en terme de patrimoine ne peut-elle pas aider à donner une visibilité au risque inondation 8 » sur un site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis l’an 2000 ? Il s’agit ici à la fois des paysages naturels de l’eau et des paysages culturels9 et du risque qui véhicule une image négative aux antipodes de la vallée des châteaux. L’interrogation porte sur l’intérêt d’une patrimonialisation de l’inondation pour définir une identité du lieu, un atout de développement notamment touristique et une culture du risque à construire.

    Ce ne sont pas moins de dix auteurs, historiens et géographes, qui analysent la culture du risque dans le fossé rhénan. Ils constatent une méconnaissance largement répandue du risque dans une zone urbanisée et industrielle. Si l’Alsace a un riche patrimoine historique et bien que très marquée par la présence du Rhin la connaissance et la mémoire des inondations sont faibles sans doute en raison, pour les auteurs, de l’histoire des conflits franco-allemands10. Les auteurs évoquent &également les travaux de correction, endiguement des cours d’eau et la rareté des repères de rue. La prise de conscience du risque est récente, peut-être une chance pour une patrimonialisation des inondations omniprésentes dans l’histoire de l’Alsace11. Les auteurs militent pour une géohistoire des inondations.

    Sofiane Saadia (doctorant à l’Université Paris Diderot) compare sur un siècle (des années 1930 au début du XXIe siècle) les stratégies de Paris et Rome face à la crue. Quelle intégration du risque dans les aménagements urbains ? L’auteur amorce sa réflexion autour des ouvrages de protection, leur patrimonialisation et les conséquences : valorisation des berges et mesures de prévention des risques, des rapports parfois antagonistes12. A partir de l’exemple d’aménagement du parc interdépartemental des sports de Choisy-le-Roi il pose ensuite la question : l’inondation peut-elle être considérée comme un patrimoine naturel ?

    Transmissions et créations

    Avec Annie Sigwalt, sociologue, on aborde la question des terres agricoles en zone inondable, les zones humides en Pays de Loire, autrefois élément de l’exploitation agricole, aujourd’hui en perte d’actifs agricoles.Elle présente les travaux de la commission marais de la chambre d’agriculture de Loire atlantique et notamment comment les éleveurs perçoivent leur activité professionnelle en zone humide, confirmant une connaissance réelle du milieu et des savoir à transmettre : formes de valorisation, connaissance du risque, réactions aux mesures agro-environnementales.

    L’exemple de patrimonialisation de la moyenne vallée de la Garonne marmandaise est présenté par Philippe Valette, Philippe Marmiesse et Jean-Michel Moreau. Après une description de la Garonne et son régime de crues les auteurs rappellent quelques données historiques et les caractéristiques d’un bâti traditionnel adapté et mis en valeur à Couthures par la Maison « Gens de Garonne ».

    En guise de conclusion La géographe Nancy Meschinet de Richemond développe bla nécessaire dimension positive de l’inondation pour une patrimonialisation allant au-delà de la dimension économique du patrimoine.

    https://clio-cr.clionautes.org/quand-les-eaux-montent-mise-en-patrimoine-des-crues-et-des-inond
    #mémoire #catastrophe #livre #géographie_culturelle #risques #catastrophes #histoire

  • Aude : un hôtel-restaurant réputé ferme par manque de salariés
    http://www.lefigaro.fr/societes/2018/08/28/20005-20180828ARTFIG00107-aude-un-hotel-restaurant-repute-ferme-par-manque-

    Pendant toute la saison, les trois associés ont vécu ce qu’ils appellent « un enfer ». La faute, selon Jérôme Martres, à un manque de personnel dans le milieu de l’hôtellerie et de la restauration. « Le déséquilibre entre l’offre et la demande fait qu’aujourd’hui les salariés se sentent libres de faire ce que bon leur semble, sans qu’ils soient inquiétés. Ils savent très bien qu’on peut difficilement les licencier tant il est compliqué de leur trouver un remplaçant » dit-il au Figaro. « J’ai retrouvé certains de mes employés en train de fumer de la drogue dans les toilettes de l’établissement. Une autre fois un cuisinier ne rentre pas de week-end, je l’appelle, et il m’annonce qu’il a déménagé dans le nord de la France, sans me prévenir. Manque de chance, je le croise l’après-midi même dans les rues de Castelnaudary ». Vols de bouteilles de vins, pourboires non répartis entre salariés, insultes... les débordements sont nombreux.

    Pour Jérôme Martres, la situation est impossible : « si je licencie un de mes cuisiniers, il retrouvera un travail dans la journée. Par exemplej’ai un de mes employés qui a démissionné pour partir en week-end avec sa fiancée. Car lorsqu’il reviendra de vacances, il n’aura qu’à bouger le petit doigt pour retrouver un emploi. En attendant il touche le chômage ».

    • Vendanges : La France souffre-t-elle d’un manque de main d’oeuvre ?
      https://www.20minutes.fr/economie/emploi/2324119-20180823-vendanges-france-souffre-manque-main-oeuvre

      En Alsace, où les vendanges ont débuté mercredi, Jean-Daniel Hering du domaine éponyme à Barr avance les mêmes causes. Et complète : « Avant on recevait des candidatures spontanées en nombre suffisant dès la mi-juillet. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui : quand elles arrivent, elles arrivent très tard et dans notre logique d’organisation du travail c’est compliqué parce qu’on aime bien préparer et anticiper. Et puis le fait que les vendanges soient précoces, les gens n’ont pas conscience en août que les vendanges sont déjà là… »

      Face à ces difficultés, il a alerté le syndicat des vignerons indépendants et les élus départementaux, avec lesquels il a travaillé au nouveau dispositif mis en place dans le Bas-Rhin. Baptisé « cumul RSA et vendanges », il encourage les bénéficiaires du RSA à faire les vendanges en leur permettant de continuer à toucher leur allocation. Et, dans le même temps, de trouver de nouveaux collaborateurs aux vignerons. Un dispositif similaire existe dans le Haut-Rhin.

    • Face à la pénurie de profs, les futurs enseignants pourraient être recrutés à bac +3
      https://www.sudouest.fr/2018/06/06/face-a-la-penurie-de-profs-les-futurs-enseignants-pourraient-etre-recrutes-

      Le ministère de l’Éducation nationale songe à recruter à partir d’un niveau licence pour attirer davantage d’étudiants vers la profession.

      Le métier de prof ne fait plus rêver : 380 postes n’ont pas trouvé preneur en 2017, selon un rapport de la Cour des comptes. Autre exemple de la pénurie grandissante d’enseignants en France : pour le concours de professeur d’allemand et de lettres classiques, il y a eu moins de candidats admissibles que de postes à pourvoir.

      Pour attirer rapidement davantage de candidats, la Cour des comptes recommande de « pré-recruter » des étudiants en licence.

      Depuis près de dix ans, les aspirants enseignants doivent être titulaires d’une licence (bac +3) pour postuler dans l’une des 32 Écoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE), où ils préparent un master (bac +5) et passent le concours d’enseignant.

    • Le secteur hospitalier en manque de personnel...
      https://www.boursier.com/actualites/economie/le-secteur-hospitalier-en-manque-de-personnel-39038.html

      Cette année, l’hiver a été rude et les températures glaciales ont continué durant le printemps. Des conditions climatiques qui ont également prolongé l’épidémie de grippe et les maladies hivernales habituelles. Une situation difficile à gérer pour les professionnels de la santé qui ont été débordés et ont régulièrement travaillé bien au-delà du temps de travail légal hebdomadaire.

      « Pour les médecins hospitaliers, la moyenne se situe même à 47 heures par semaine », souligne le sondage Odoxa. Un volume horaire qui augmente pour la plupart des praticiens, régulièrement sollicités hors cadre de leur milieu professionnel, par leur entourage notamment.

      Ce qui inquiète le personnel soignant, c’est que ses conditions ne s’améliorent pas, et 90% trouvent que la charge de travail s’intensifie, et que la direction ne prend pas conscience du problème.

      (Au niveau de la direction c’est claire que c’est pas cette ordure de Martin Hirsch qui va amélioré les choses.)

  • La dette, l’arme française de la conquête de la Tunisie Éric Toussaint - 7 juillet 2016 - Orient XXI
    https://orientxxi.info/magazine/la-dette-l-arme-qui-a-permis-a-la-france-de-s-approprier-la-tunisie,1395

    Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, la Tunisie a expérimenté à son détriment le mécanisme de la dette extérieure comme instrument de domination et d’aliénation de la souveraineté d’un État. Livrée pieds et poings liés à ses créanciers extérieurs, la régence de Tunis perdra son autonomie pour devenir un protectorat français.


    Avant 1881, date de sa conquête par la France qui la transforme en protectorat, la régence de Tunis, province de l’empire ottoman, disposait d’une importante autonomie sous l’autorité d’un bey. Jusqu’en 1863, elle n’emprunte pas à l’étranger : la production agricole assure bon an mal an l’indépendance alimentaire du pays. Mais avec l’accession au trône de Mohammed el-Sadik Bey (Sadok Bey) en 1859, l’influence des puissances européennes, en particulier de leurs banquiers, grandit. Le premier emprunt de la Tunisie à l’étranger cette année-là constituera une véritable arnaque qui débouchera dix-huit ans plus tard sur la conquête de la Tunisie par la France.

    Les banquiers parisiens, comme leurs collègues londoniens, disposent de liquidités abondantes et cherchent des placements à l’étranger plus rémunérateurs que chez eux. Quand, début 1863, le bey fait savoir qu’il souhaite emprunter 25 millions de francs, plusieurs banquiers et courtiers de Londres et de Paris proposent leurs services. Finalement, c’est Émile Erlanger qui emporte le « contrat ». Selon le consul britannique, il lui aurait proposé 500 000 francs afin d’obtenir son soutien. Erlanger, associé à d’autres, obtient également l’autorisation du gouvernement français de vendre à la bourse de Paris des titres tunisiens.

    Une escroquerie à grande échelle
    Selon un rapport établi en 1872-1873 par Victor Villet, un inspecteur français des finances, l’emprunt est une pure escroquerie. D’après le banquier Erlanger, 78 692 obligations tunisiennes sont émises, chacune d’une valeur nominale de 500 francs. L’emprunteur (la Tunisie) doit recevoir environ 37,7 millions de francs (78 692 obligations vendues à 480 francs, soit 37,77 millions) et rembourser à terme 65,1 millions. Selon l’enquête de Villet, Erlanger a prélevé un peu plus de 5 millions de francs de commission (soit environ 13 % du total), plus 2,7 millions détournés, certainement par le premier ministre du bey et le banquier. Donc, pour disposer de 30 millions, le gouvernement tunisien s’engage à rembourser plus du double (65,1 millions).

    Cet emprunt extérieur doit servir à restructurer la dette interne évaluée à l’équivalent de 30 millions de francs français. Il s’agit concrètement de rembourser les bons du trésor beylical ou « teskérés », ce qui est fait, mais les autorités en émettent de nouveau pour un montant équivalent. Victor Villet raconte : « En même temps que dans les bureaux du représentant de la maison Erlanger à Tunis on remboursait les anciens titres..., un courtier du gouvernement (M. Guttierez) installé dans le voisinage reprenait du public l’argent que celui-ci venait de recevoir, en échange de nouveaux teskérés émis au taux de 91 %. À la faveur de cette comédie de remboursement, la dette se trouva simplement... augmentée de 15 millions à peu près ».

    En moins d’un an, l’emprunt est dilapidé. Dans le même temps, l’État se retrouve, pour la première fois de son histoire, endetté vis-à-vis de l’étranger pour un montant très élevé. La dette interne qui aurait dû être remboursée par l’emprunt extérieur a été multipliée par deux. Le bey choisit, sous la pression de ses créanciers, de transférer la facture vers le peuple en augmentant de 100 % la mejba, l’impôt personnel.

    Des profits juteux grâce aux « valeurs à turban »
    La mesure provoque en 1864 une rébellion générale. Les insurgés accusent le gouvernement d’avoir vendu le pays aux Français. Le bey tente par la force d’extorquer un maximum d’impôts et d’amendes à la population. Son échec l’oblige à monter avec le banquier Erlanger un nouvel emprunt en mars 1865 d’un montant de 36,78 millions de francs à des conditions encore plus mauvaises et scandaleuses qu’en 1863. Cette fois, un titre de 500 francs vendu 480 francs en 1863 ne l’est plus qu’à 380 francs, à peine 76 % de sa valeur faciale. Résultat, l’emprunteur s’endette pour 36,78 millions, cependant il ne reçoit qu’un peu moins de 20 millions. Les frais de courtage et les commissions prélevées par le banquier Erlanger et ses associés Morpurgo-Oppenheim s’élèvent à 18 %, plus près de 3 millions détournés directement par moitié par les banquiers et par moitié par le premier ministre et ses associés. La somme à rembourser en 15 ans s’élève à 75,4 millions de francs.

    Les banquiers ont réalisé une très bonne affaire : ils ont prélevé à l’émission environ 6,5 millions de francs sous forme de commissions, de frais de courtage et de vol pur et simple. Tous les titres ont été vendus en quelques jours. Il règne à Paris une euphorie à propos des titres des pays musulmans (Tunisie, empire ottoman, Égypte), désignés comme les « valeurs à turban », les banquiers payant la presse pour publier des informations rassurantes sur les réalités locales.

    À la merci des créanciers
    Les nouvelles dettes accumulées au cours des années 1863-1865 mettent la Tunisie à la merci de ses créanciers extérieurs ainsi que de la France. Il lui est tout simplement impossible de rembourser les échéances. L’année 1867 est une très mauvaise année agricole. Pressé de se procurer des devises, le bey privilégie l’exportation des produits agricoles au détriment du marché intérieur, avec à la clef d’abord la disette dans plusieurs provinces de la régence, puis une épidémie de choléra.

    En avril 1868, sous la dictée des représentants de la France, le bey établit la Commission internationale financière. Le texte du décret du 5 juillet 1869 constitue un véritable acte de soumission aux créanciers. L’article 9, particulièrement important, indique très clairement que la Commission percevra tous les revenus de l’État sans exception. L’article 10, décisif pour les banquiers, prévoit qu’ils y auront deux représentants. L’une des tâches principales de la commission — la plus urgente — est de restructurer la dette. Aucune réduction de dette n’est accordée à la Tunisie. Au contraire, les banquiers obtiennent qu’elle soit portée à 125 millions de francs. C’est une victoire totale pour ces derniers, représentés par les délégués d’Alphonse Pinard et d’Émile Erlanger qui ont racheté en bourse des obligations de 1863 ou de 1865 à 135 ou 150 francs. Ils obtiennent grâce à la restructuration de 1870 un échange de titres quasiment au prix de 500 francs.

    Les autorités tunisiennes sont complices de ce pillage. Le premier ministre Mustapha Khaznadar, d’autres dignitaires du régime — sans oublier d’autres Tunisiens fortunés qui détenaient également des titres de la dette interne —font d’énormes profits lors de la restructuration.

    Indemnisés et largement satisfaits, Pinard et Erlanger se retirent alors de Tunisie. Émile Erlanger construit un empire financier, notamment grâce à ses opérations tunisiennes, met la main sur le Crédit mobilier de Paris et, quelques années plus tard, sur la grande agence de presse Havas. De son côté, Alphonse Pinard poursuit ses activités en France et dans le monde, participe à la création de la Société générale (l’une des trois principales banques françaises aujourd’hui) ainsi qu’à une autre banque qui s’est transformée au cours du temps en BNP Paribas (la principale banque française actuelle).

    Mise sous tutelle
    Depuis la conquête de l’Algérie à partir de 1830, Paris considère que la France a plus qu’un droit de regard sur la Tunisie. Encore faut-il trouver le prétexte et le moment opportun. Dans la région, l’Égypte a la priorité pour des raisons géostratégiques : la possibilité d’avoir un accès direct à l’Asie avec l’ouverture du canal de Suez entre la Méditerranée et la mer Rouge en 1869 ; l’accès à l’Afrique noire par le Nil ; la proximité de l’Orient par voie terrestre ; le potentiel agricole de l’Égypte ; la concurrence entre le Royaume-Uni et la France (celui des deux pays qui contrôlera l’Égypte aura un avantage stratégique sur l’autre).

    Lors du Congrès de Berlin en juin 1878 qui partage l’Afrique, tant l’Allemagne que l’Angleterre abandonnent à la France la Tunisie — qui ne présente aucun attrait pour l’Allemagne. Pour le chancelier allemand Otto von Bismarck, si la France se concentre sur la conquête de la Tunisie avec son accord, elle sera moins encline à récupérer l’Alsace-Lorraine. Le Royaume-Uni, qui donne la priorité à la Méditerranée orientale (Chypre, Égypte, Syrie…), voit aussi d’un bon œil que la France soit occupée à l’ouest en Tunisie.

    La diplomatie française n’a de cesse de provoquer un incident ou de trouver un prétexte qui justifie une intervention de la France. Le conflit entre la tribu algérienne des Ouled Nahd et les Kroumirs tunisiens est l’occasion de lancer une intervention militaire française de grande ampleur. Vingt-quatre mille soldats sont envoyés contre les Kroumirs. Le traité du 12 mai 1881 signé entre le bey de Tunis et le gouvernement français instaure un protectorat français en Tunisie. La leçon ne doit pas être oubliée.
    #Éric_Toussaint

    #Tunisie #dette #havas #Émile_Erlanger #diplomatie #Alphonse_Pinard #BNP_Paribas #banquiers #bourse

  • Racisme dans le foot en Alsace : une audience, et toujours le statu quo - Libération
    http://www.liberation.fr/france/2018/08/24/racisme-dans-le-foot-en-alsace-une-audience-et-toujours-le-statu-quo_1674

    Jeudi à Strasbourg, la ligue du Grand Est a réexaminé les conditions dans lesquelles le 6 mai, un joueur noir de Benfeld, club de D3, a été passé à tabac après un tombereau d’insultes racistes. Kerfalla Sissoko est ressorti de cette réunion conforté dans son sentiment d’injustice.

    Il est à nouveau convoqué par les instances du foot. Kerfalla Sissoko est là, comme les autres fois, silencieux et discret. Kerfalla Sissoko, c’est ce joueur noir de l’AS Benfeld, club alsacien de D3, qui, lors d’un match à Mackenheim le 6 mai, a été menacé d’un couteau de cuisine après avoir essuyé des injures racistes. Il a ensuite été passé à tabac jusqu’à perdre connaissance sur la pelouse, son visage en porte les séquelles. Pourtant, en première instance, fin mai, la commission de discipline du District d’Alsace de football l’a sanctionné, lui et son coéquipier noir Moudi #Laouali, victime également de coups. Dix matchs de suspension. Même tarif que pour deux agresseurs, joueurs de l’AS Mackenheim. Le président de la commission avait conclu : « Dans cette affaire, le racisme est accessoire. » Les sanctions avaient été confirmées en appel début juillet. Cette fois, le dossier est remonté au niveau régional. La ligue du Grand Est prend la main et va tout réexaminer.

    Car les deux clubs ont à nouveau fait appel. Le club de #Benfeld veut réhabiliter ses joueurs noirs. Quant au club de Mackenheim, il conteste la suspension de terrain pour quatre matchs. Le District a privé le club de Mackenheim de sa pelouse, ayant estimé qu’il y avait eu infraction à la police du terrain et aux règles de sécurité (envahissement de la pelouse par les spectateurs qui traquent les joueurs d’origine africaine avec des couteaux). Mackenheim doit disputer les quatre prochaines rencontres en dehors d’un rayon de 30 km, sans compter l’amende de 160 euros… Le Comité directeur lui-même a fait appel des décisions prises dans cette affaire. A première vue, on s’est dit que les autorités footballistiques ont senti qu’elles étaient peut-être passées à côté de quelque chose… D’autant qu’entre-temps Libé a consacré sa une à l’affaire, en détaillant la violence extraordinaire d’un racisme ordinaire qui gangrène le foot amateur dans les patelins.

    Cette fois, le débat à la ligue du Grand Est est public. Il a lieu à Strasbourg, sur le coup de 18 heures. Plusieurs représentants d’associations qui luttent contre l’exclusion et les discriminations sont venues épauler le club de Benfeld et ses joueurs : le collectif Ubuntu, La Maison des adolescents, D’ailleurs nous sommes d’ici… Tout le monde s’engouffre dans la salle, face aux six membres blancs de la commission d’appel régional présidée par Gérard #Baumann qui prévient : « C’est le dernier recours. »

    « L’arbitre n’a jamais sifflé »

    La parole est à l’AS Benfeld. Jean-Michel Dietrich, président du club, raconte la tension, ses trois joueurs noirs, et eux seulement, pris pour cible, les coups, l’arbitre qui siffle la fin à la 43e minute, Moudi Laouali piétiné, Kerfalla #Sissoko « qui se fait massacrer », qui convulse, le chaos, les spectateurs partout, sa secrétaire qui appelle les secours puisque personne ne sort son téléphone… Le lendemain, il sonde l’équipe. Les joueurs blancs, qui n’ont jamais été auditionnés en tant que témoins, décrivent, comme leur coéquipiers noirs, l’ambiance de la première mi-temps : « Retourne dans ta brousse », « Sale nègre », « On n’en pas encore fini avec vous » etc. Kerfalla Sissoko confirme : « Je me faisais traiter tout le match ». Question de la commission : « L’arbitre a-t-il entendu les propos racistes ? » L’arbitre n’est pas là. Donc, selon une logique qui nous échappe, on interroge Kerfalla Sissoko. « Non », répond-il. Il poursuit, explique qu’avant la curée finale, il avait déjà reçu des coups. Il est au sol, crie, l’arbitre est à côté, « il n’a jamais sifflé ». La commission ne bronche pas. Kerfalla Sissoko aurait dû se plaindre à son capitaine, qui aurait fait remonter à l’arbitre. Et qu’importe si le capitaine est gardien de but et ne peut déserter sa cage à l’envi.

    Une question revient en boucle. « Quel a été l’élément déclencheur ? » La commission veut comprendre « la raison des tensions », le « pourquoi », ce qui a fait « basculer ce match sans enjeu dans la violence », imagine que « quelque chose a dû se passer en amont » parce que « d’habitude, ça monte crescendo ». Ils s’interrogent sincèrement face à cette salle divisée en deux : quelques blancs d’un côté (Mackenheim), les noirs de l’autre (Benfeld et ses soutiens). Mais à aucun moment, il n’est question de couleur de peau. « Et côté gendarmerie ? » s’enquièrent les juges du foot. Aucune nouvelle des plaintes, aucune audition. Coup de théâtre, une vidéo a été versée au dossier par Mackenheim qui a fourni une clé USB. Un ado dans les tribunes a filmé. Ils visionnent, l’écran passe de main en main, ils tournent l’ordinateur, penchent la tête, n’écoutant plus que d’une oreille distraite les débats qui n’ont pas été interrompus, on entend un court brouhaha recommencé sans cesse, des rires. « Est-ce qu’on pourrait voir ? », finit par demander Kerfalla Sissoko. Réponse de la commisssion : « Inutile, on ne voit rien. » Si ce n’est qu’il y avait bien plus de quatre spectateurs à envahir le terrain comme le prétendait Mackenheim. L’ordinateur portable est replié.

    Carton rouge en pleine agonie

    Au tour de Mackenheim. La commission : « Et sur le propos raciste, vous n’avez rien entendu ? » La réponse est dans la question. « Et donc vous ne connaissez pas ceux qui sont venus avec des couteaux ? » Idem. Les dirigeants du club de Mackenheim affirment que Kerfalla Sissoko a donné le premier coup. « Je me suis défendu, ils étaient plusieurs sur moi », explique inlassablement le jeune homme. Les joueurs de Mackenheim mis en cause et convoqués ne sont pas présents. Bref, Sissoko a bel et bien porté un coup et « c’est pour ça qu’[il] a eu un carton rouge », lui explique la commission. Lui, il voudrait savoir si c’est bien légal d’avoir un carton rouge « quand on est en train de mourir ». Pas de réponse. Mackenheim rebondit, « Monsieur Sissoko n’a jamais été en danger de mort. » Ils le savent bien : un membre du club est infirmier. « Donc il est intervenu », suppose un membre de la ligue. « Non », dit Mackenheim. La commission se tourne vers Kerfalla Sissoko : « Combien de temps êtes-vous resté couché sur le terrain ? » « J’étais dans les pommes… », bredouille le jeune homme. Une heure déjà que l’audience a débuté. Un membre de la commission fait part de son appréciation à Kerfalla Sissoko : « Donc, vous vous êtes fait tabasser. » Triple fracture au visage, trauma crânien, dix jours d’ITT. Le certificat est dans le dossier.

    L’AS #Mackenheim est assisté d’un avocat. L’homme parle bien, longtemps. C’est son job. La maîtrise du verbe. Il rappelle qu’une procédure juridique en diffamation est engagée contre ceux qui dénoncent le racisme, avec passage en correctionnelle le 22 octobre, et il construit sa plaidoirie en prenant le contre-pied de l’enquête de Libé. « Le racisme dans le foot amateur ne peut pas être illustré par le match du 6 mai 2018 », il faut distinguer « ce qui est avéré et ce qui est fantasmé » : personne n’a rien entendu du racisme. Il réclame l’indulgence de la ligue, les suspensions de terrain, c’est un coup dur pour le club de Mackenheim. La commission aimerait connaître les actions mises en place pour que les faits ne se reproduisent plus ? Ils vont « faire du relationnel avec les joueurs et supporters » (sic)…

    « Nous avons même un cimetière juif »

    Le maire de la commune, Jean-Claude Spielmann, s’est fait inviter. Le président du club de foot est son ami de trente ans. Deux jours qu’ils passent des coups de fil à d’autres communes pour trouver un terrain. Personne ne veut les accueillir, ils essuient des « réponses parfois très désobligeantes ». Et s’ils trouvent, il lui faudra emmener les équipements et les employés communaux là-bas, pour s’occuper de la préparation pelouse, et ça, ça va « peser sur les finances municipales », s’émeut-il. L’élu s’indigne, l’image de sa commune a pris un coup à cause de l’affaire, alors que « Mackenheim n’est pas un terreau de racistes ». La preuve, selon lui : « On est un des rares villages à accueillir une famille de Syriens et nous avons même un cimetière juif. » Puis il en profite pour rappeler à ligue qu’il a déposé une demande de financement pour refaire l’éclairage du club-house. Le président de la commission lui sourit d’un air entendu.

    La séance est levée, la décision sera rendue dans quelques jours. « Au moins, j’ai pu parler un peu plus », lâche Kerfalla Sissoko à la sortie. « Mais c’est toujours moi le fautif. » Sur le parvis de la ligue, les associations imaginent des actions conjointes pour faire reculer le racisme que l’on ne veut pas voir autour du ballon rond. Dimanche dernier, la saison a repris en Alsace. L’AS Mackenheim s’est déplacé à Ebersmunster et l’a emporté 4 à 3. Mais « l’arbitre sifflera la fin du match avant les arrêts de jeu, avant que ça ne dégénère », indique le FC Ebersmunster sur sa page web qui déplore le comportement agressif des visiteurs. L’équipe de Mackenheim, redoutée par les autres clubs pour les dérapages violents qui émaillent souvent les rencontres, a terminé la saison dernière quatrième du championnat. Et elle a obtenu de la ligue de monter en division supérieure.
    Noémie Rousseau

    Le 1er article se trouve ici : https://seenthis.net/messages/711327
    J’aimerais quand même qu’on m’explique pourquoi les assos anti racistes ne sont pas foutues de faire en sorte que Sissoko ait un avocat (comme la partie adverse) pour une convocation aussi importante que celle-ci.
    C’est bien beau de faire des petits badges contre le racisme pour faire beau sur les survêts mais ça fait avancer quoi ?
    Il est où le Lilian Thuram avec sa fondation là ? Il se la joue donneur de leçon en disant que Pelé n’a jamais rien fait par égoïsme (https://www.lequipe.fr/Football/Actualites/Lilian-thuram-critique-le-manque-d-engagement-de-pele-contre-le-racisme/881819) mais lui, à part passer à la télé il faut quoi purée !
    Et puis l’argument du cimetière juif, on dirait une blague de Desproges tellement c’est dingue !

    #football #violence #agression #racisme #Alsace #arbitrage

  • « C’est la première fois qu’on voit ça » : en Alsace, les viticulteurs en manque de main-d’œuvre, Jérémie Lamothe
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/08/18/c-est-la-premiere-fois-qu-on-voit-ca-en-alsace-les-viticulteurs-en-manque-de

    « C’est la première fois qu’on voit ça » : en Alsace, les viticulteurs en manque de main-d’œuvre
    Alors que le début des vendanges approche dans le Haut-Rhin, les viticulteurs peinent à constituer leur équipe de récolteurs pour les prochaines semaines.

    A l’approche des vendanges, Jean-Luc Galliath, crâne dégarni et lunettes sur le nez, l’avoue : il commence à « stresser ». A la tête d’une propriété viticole de 10 ha dans le village de Bergholtz (Haut-Rhin) depuis 1984, il n’en est pourtant pas à ses premières récoltes. Mais celles de 2018, dont la date de départ sera décidée lundi 20 août par l’assemblée générale de l’Association des viticulteurs d’Alsace (AVA), l’inquiètent particulièrement. Et pour cause : son équipe de vendangeurs n’est toujours pas constituée.

    Des récoltes précoces en pleine période de vacances, pour un emploi saisonnier moins lucratif qu’auparavant… Pour nombre de viticulteurs dans la plupart des régions françaises, la difficulté à recruter de la main-d’œuvre est particulièrement forte. « J’ai besoin de quatorze personnes pour le premier jour, mais il m’en manque encore deux, explique M. Galliath, 58 ans, qui préside la sous-région de Guebwiller pour l’AVA. En tout, pour les six semaines de vendanges, il me faut vingt-cinq à trente personnes. »

    Il a pourtant rappelé ses anciens vendangeurs, mis des petites annonces dans les commerces locaux ou encore fait appel à Pôle emploi. A ses côtés, son épouse, Anny, acquiesce : « C’est la première fois qu’on voit ça… » D’habitude, le couple avait tellement de volontaires qu’il pouvait constituer une liste d’attente en cas de désistement de dernière minute. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, même sur la célèbre route des vins d’Alsace.

    « Avant, les vendangeurs venaient spontanément »

    Le phénomène, qui s’amplifie, n’est pas nouveau. Pour venir en aide aux agriculteurs, Pôle emploi a mis en place, depuis 1995, Alsace vendanges, une cellule spéciale qui met en relation viticulteurs et vendangeurs potentiels. Plus de deux cents vignerons y ont fait appel cette année, un chiffre en hausse par rapport à 2017.

    « En 2017, on s’était déjà retrouvé coincé par la précocité des vendanges, explique le pilote de cette cellule installée à Colmar, Grégory Weitz. Cette année, on a commencé plus tôt et on a expliqué aux viticulteurs, dès juin, qu’ils devaient nous envoyer leurs besoins avant de partir en vacances. » Résultat, « on a 1 900 postes à pourvoir, contre 1 000 l’année dernière ». Un signe que pour ces employeurs, le recrutement est de plus en plus difficile.

    « Avant, le recrutement se faisait naturellement, explique M. Weitz, les vendangeurs venaient spontanément. Mais maintenant c’est fini, les viticulteurs doivent prendre le temps de chercher des personnes. » Etudiants, salariés à la recherche d’un complément de revenu, chômeurs, retraités… le profil des vendangeurs, qui en général habitent la région, reste varié. Mais M. Weitz tente de mobiliser les plus jeunes, les vendanges commençant avant la rentrée universitaire :

    « Les viticulteurs ont souvent des vendangeurs fidèles, mais vieillissants. Or à 65 ans ou 70 ans, ça devient compliqué physiquement. On a donc renforcé notre communication auprès des étudiants via le centre régional des œuvres universitaires et scolaires [CROUS], les réseaux sociaux ou les médias locaux. »
    D’ailleurs M. Galliath a vu de nombreux étudiants affluer en fin de semaine pour candidater et peut donc espérer trouver son équipe à temps.

    « Mais qui va vouloir venir ? »

    Certains viticulteurs parviennent tout de même à constituer leur équipe. C’est le cas d’Eric Debenath, 39 ans, installé à Soultzmatt (Haut-Rhin). Il n’a pas eu trop de mal à recruter une vingtaine de personnes en quelques jours parmi son noyau dur d’habitués. Mais autour de lui, il constate que ses collègues ont de plus en plus de mal à trouver des volontaires. Lui-même ressent chaque année une grosse pression à l’arrivée des vendanges :

    « On se demande toujours : “Mais qui va vouloir venir ?” Il m’arrive de me réveiller en pleine nuit et de me poser plein de questions. »

    Parmi les facteurs qui expliquent cette pénurie de main-d’œuvre, Jean-Luc Galliath regrette notamment la suppression de l’exonération des cotisations salariales sur les « contrats vendanges », décidée en 2014, et qui a rendu moins attractif l’emploi saisonnier dans les vignes. « Cela représente environ 40 à 50 euros par semaine en moins, donc environ 200 euros sur un mois de vendanges », a expliqué Bernard Farges, président de la Confédération nationale des producteurs de vins à appellations d’origine contrôlée. Une somme significative pour des vendangeurs payés au smic horaire, soit 9,88 euros brut.

    « Je n’ai pas compris cette mesure, regrette, amer, M. Galliath. Les revenus ont baissé sur les fiches de paye, les vendangeurs l’ont vu. On tente de compenser en augmentant un peu le salaire mais ça alourdit le coût de la main-d’œuvre. »

    Incertitude et précarité

    Pour attirer de nouveaux volontaires et leur éviter de perdre du pouvoir d’achat, le conseil départemental du Haut-Rhin a décidé, cette année, de donner un coup de pouce aux bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) qui participent aux récoltes, en leur permettant de conserver leur allocation, contrairement aux années précédentes. « C’est un gros effort fait par le département, salue M. Debenath. On est devant une telle pénurie de main-d’œuvre que c’était obligatoire… »

    D’autant qu’en Alsace, les vendanges sont saccadées. Il peut y avoir plusieurs jours sans travail entre le début des récoltes pour les crémants et celles des vins tranquilles. Tout se fait au jour le jour. Une incertitude et une précarité qui compliquent le recrutement, les vendangeurs devant être particulièrement flexibles.

    La précocité des vendanges, causée par le réchauffement climatique, explique aussi cette pénurie. « Il y a dix ou quinze ans, les vendanges débutaient à la mi-septembre. Et quand j’ai commencé, au début des années 1980, on débutait en octobre et ça se terminait après la Toussaint, se souvient M. Galliath. C’était plus facile pour trouver des vendangeurs. Là, beaucoup sont encore en vacances et n’ont pas en tête que les récoltes vont commencer. »

    Le viticulteur de Bergholtz redoute que ces difficultés poussent les agriculteurs à utiliser davantage les machines à vendanger, alors que les récoltes se font encore majoritairement manuellement dans le département. « J’ai peur que certains se disent “il faut passer à la mécanisation”. Mais il ne faut pas tout industrialiser, au risque de perdre nos convictions et la bonne image qu’on a. »

    #travail_saisonnier #smic_horaire #pénurie_de_main_d'oeuvre

  • En Alsace, le football amateur en flagrant déni - Libération
    http://www.liberation.fr/sports/2018/07/27/en-alsace-le-football-amateur-en-flagrant-deni_1669395

    Victime de graves violences pendant un match, le joueur d’origine africaine Kerfalla Sissoko a pourtant été suspendu par une commission qui dément tout acte raciste. « Libération » a enquêté.

    « Si Kerfalla était mort, ils auraient donné son nom à un tournoi. » Cette phrase, terrible, est de l’entraîneur de Kerfalla #Sissoko. A mesure qu’on s’immergeait dans le contexte, elle devenait une ritournelle lancinante. Le contexte ? Sympathique, a priori : le foot des patelins, le foot à la bonne franquette. Quand le village se retrouve le dimanche au match, assis sur des chaises en plastique dépareillées, à prendre des nouvelles des voisins, de la famille, du boulot. Kerfalla Sissoko, joueur amateur de l’équipe de #Benfeld, a failli y laisser sa peau début mai. Sa peau noire, sur le terrain de #Mackenheim, village alsacien de 800 habitants, qui a placé Marine Le Pen en tête au second tour de la présidentielle avec 54 % des suffrages. C’est l’histoire d’un racisme ordinaire, d’une violence extraordinaire. Un #racisme qui se murmure, qui se banalise, qui s’institutionnalise. Kerfalla Sissoko a été coursé avec un couteau de cuisine, roué de coups… puis suspendu par les instances du football.

    Coups de crampons

    Fin mai, sur le parvis du District de football d’Alsace à Strasbourg, Kerfalla Sissoko, 25 ans, est silencieux. Il est convoqué en commission de discipline. Lui et son coéquipier Moudi Laouali, aussi victime de coups et d’injures racistes, ont été suspendus à titre conservatoire. A leurs côtés, les membres de leur club, l’AS Benfeld, petite ville de 6 000 habitants située à 30 kilomètres au sud de Strasbourg, sont plutôt confiants. Là, ils vont avoir l’opportunité de refaire ce match chaotique à tête reposée. En attendant leur tour, ils nous livrent le récit de ce dimanche 6 mai.

    Le match oppose deux équipes de D3, la plus basse division en football amateur. L’enjeu pour Benfeld est quasi nul. Tout ce qu’ils peuvent décrocher, c’est le titre du fair-play : ils n’ont reçu aucun carton rouge de la saison. Dès le coup d’envoi, la tension est palpable. « Nos trois joueurs d’origine africaine sont tout de suite pris pour cible par l’équipe adverse, qui les avait repérés au match aller, et leur a réservé un traitement de faveur au retour », raconte l’entraîneur Gérald Cimolaï. Sur le terrain, les contacts sont de plus en plus violents, assortis d’insultes et de menaces chuchotées : « On en a encore pour toi », « ça ne fait que commencer ». L’autorité de l’arbitre est continuellement mise à l’épreuve. « Ça pouvait dégénérer à tout moment. Et il a suffi d’une toute petite étincelle », ajoute le coach. Elle se produit à la 43e minute. Alors que Mackenheim mène 1 à 0, Kerfalla Sissoko, milieu défensif, est sifflé. Faute, carton jaune. Le jeu reprend jusqu’au choc entre Moudi Laouali et un joueur de Mackenheim. Immédiatement, les supporteurs descendent des gradins, envahissent le terrain pour se ruer sur les joueurs noirs. Kerfalla Sissoko et Loïc Huinan, le troisième joueur d’origine africaine, dégagent Moudi, qui s’en sort avec des blessures superficielles. Ils essuient des coups, s’échappent en courant. Tentant de fuir vers les vestiaires, au pied de la tribune, Kerfalla Sissoko se retrouve nez à nez avec un grand couteau de cuisine. Le supporteur armé le prend en chasse, ainsi que Moudi Laouali qui parviendra finalement à se réfugier au vestiaire. Kerfalla Sissoko, lui, fait demi-tour, traverse le terrain dans l’autre sens. Mais un autre groupe l’attend, mêlant joueurs et supporteurs. Là aussi, il y a un couteau. Traqué, piégé, Sissoko retourne au centre. Il est frappé au visage. Il s’effondre et reçoit encore des coups de crampons dans le dos et les côtes. « Ils sont à quatre ou cinq sur lui », se souvient le coach, qui se précipite à son secours avec le capitaine, Guillaume Paris. Sissoko convulse. Paris plonge ses mains dans la bouche du joueur qui est en train d’avaler sa langue. Il le met en position latérale de sécurité. C’est « le seul moment » où il s’est « senti en danger », « parce qu’agenouillé à côté de Kerfalla », dit-il. L’arbitre distribue les cartons, deux pour Benfeld, deux pour Mackenheim. Sissoko, inconscient, reçoit le premier carton rouge de sa vie de footballeur. A la 45e minute, la fin du match est sifflée. « Les gars en face enlevaient leurs maillots pour ne pas être reconnus », se souvient Gérald Cimolaï, qui les fait reculer en dégainant son portable pour filmer.

    Le président du club, Jean-Michel Dietrich, accourt sur le rond central, demande que quelqu’un appelle les secours. Personne ne bouge au club-house. C’est la secrétaire de l’AS Benfeld, venue assister à la rencontre, qui passera l’appel depuis son portable. Quand les secours arrivent, « les supporteurs s’évaporent dans la nature tandis que le staff de Mackenheim discute avec l’arbitre », observe le coach, aussitôt entraîné à l’écart par trois hommes. Encerclé, il doit montrer son téléphone. « J’ai dû effacer toutes les vidéos devant eux, sinon je ne repartais pas », dit-il. Les gendarmes, arrivés avec les pompiers, n’embarquent personne. Kerfalla Sissoko est évacué en urgence. Il a une fracture ouverte de la tempe, trois autres au niveau de la pommette, un traumatisme crânien, la mâchoire déplacée, des hématomes dans le dos, sur les côtés… Le lendemain, le président de l’AS Benfeld publie sur son compte Facebook une lettre adressée au District d’Alsace de football, « pour le mettre face à ses responsabilités ». Les médias relaient. Kerfalla Sissoko et ses deux coéquipiers noirs ont déposé plainte à la gendarmerie de Marckolsheim pour violences et injures racistes.

    Le dimanche suivant, Jean-Michel Dietrich est convoqué à la gendarmerie. Pour témoigner, pense-t-il. Il emmène son fils, cela ne devrait pas être long. Finalement, il y passera la matinée. Le club de Mackenheim, qui n’a jamais formulé d’excuses ni pris des nouvelles des joueurs blessés, l’attaque pour diffamation. En cause, une menace de mort. Pas sur le terrain de foot. Non, dans un commentaire sur Facebook. Jean-Michel Dietrich doit retirer le texte, se plier au relevé d’empreintes, aux photos. Pendant qu’il est fiché, un gendarme promène le fils, histoire de faire diversion. « Je me suis senti humilié », dit-il. Il a « honte », envie de tout arrêter.

    « Reste dans ta brousse »

    A Strasbourg, le jour décline. Une petite agitation sur le parvis du siège du District indique que notre présence dérange. Kerfalla Sissoko, convoqué par la commission de discipline, est appelé à se présenter. Le groupe s’engouffre dans le bâtiment. Nous nous sommes procuré un enregistrement sonore de l’audience. Le président ouvre la séance en affirmant que le dossier est vide, qu’il n’y a aucun élément concret. L’avocate de Sissoko produit les plaintes, les certificats médicaux, les dix jours d’ITT. Le capitaine de l’équipe de Mackenheim, récidiviste, déjà suspendu pour violences, reconnaît avoir porté des coups mais parle de légitime défense et nie les propos racistes. Comment pourraient-ils être racistes puisqu’eux-mêmes ont des joueurs d’origine étrangère ? Les membres du district se penchent sur la liste de noms, ils n’ont pas que des consonances alsaciennes, effectivement. L’argument semble convaincre. L’arbitre a vu le couteau de cuisine dans la main d’un homme à capuche. Mackenheim ne sait pas de qui il s’agit. Mais sait que ce n’est pas un licencié. Sissoko tente d’expliquer sa version des faits. On lui coupe la parole. Idem pour le témoignage de la secrétaire du club qui a entendu une dame marteler : « Mettez les Noirs dehors, ils n’ont rien à faire sur le terrain. »

    Du racisme, l’arbitre n’a rien entendu. Kerfalla Sissoko explique que ce sont des insultes qui fusent dans un contact ou quand l’arbitre tourne le dos. « Reste dans ta brousse, c’est chez toi », lui lance-t-on, par exemple, alors qu’il va chercher un ballon sorti du terrain. Sissoko aurait dû aller se plaindre à l’arbitre, lui dit-on. Il objecte que s’il allait se plaindre à chaque fois, il ne toucherait plus le ballon… Parce que « c’est tout le temps ». Et puis, seul le capitaine est en droit de s’adresser à l’arbitre et le capitaine de Benfeld est gardien de but… Qu’importe. Kerfalla Sissoko est sommé de s’expliquer. Parce que les insultes, finalement, il n’y a « que lui qui les a entendues », résume le président de la commission de discipline, qui balance : « Le racisme est devenu accessoire dans cette affaire. » A la sortie, une heure plus tard, les membres de l’AS Benfeld sont sidérés par tant de « légèreté ». « Ce sont des juges qui décident de tout, même de ce qu’ils veulent entendre, s’étrangle Gérald Cimolaï. Et c’est à nous de prouver le racisme. Si on ne peut pas, c’est que cela n’existe pas. » C’est alors que l’entraîneur prononce cette phrase terrible, mais plausible : « Si Kerfalla était mort, ils auraient donné son nom à un tournoi. » Kerfalla Sissoko, lui, paraît hagard, sonné par ce « racisme accessoire ». « Comme si le racisme, on pouvait le porter sur soi, l’enlever, selon les jours… » se désole-t-il.

    On le retrouve début juin, au bord du terrain, à Benfeld (ses copains disputent le ballon aux joueurs d’Hipsheim). L’équipe est convalescente. Kerfalla Sissoko ne les regarde pas vraiment. Il explique être sans cesse assailli par les images de son agression, ce moment où il s’est vu mourir. Il n’arrive pas à rechausser les crampons. De toute façon, il a interdiction de jouer. Le District vient de rendre son verdict. Kerfalla Sissoko a été sanctionné, comme son coéquipier Moudi Laouali, comme les deux joueurs de Mackenheim. Même tarif, pour tous : dix matchs de suspension, pour le banal motif de « brutalité à l’égard d’un joueur ». Tout le monde au piquet, en somme comme pour une chamaillerie de cour d’école. Le club de Mackenheim a été condamné pour l’envahissement du terrain : « menace avec arme de la part d’un spectateur ». Il devra payer une amende de 60 euros. Jean-Marie Dietrich a fait appel, pour « sortir du déni de racisme », pour réhabiliter ses joueurs. Peine perdue. Le 5 juillet, le District a maintenu les sanctions contre eux, se fondant sur « les conclusions de l’instructeur », un membre du District, envoyé enquêter sur place. Elles « permettent d’écarter la notion de comportement collectif systématique à caractère raciste ou discriminatoire de la part du club de l’AS Mackenheim », et si « des propos de cette nature ont pu être tenus, ils l’ont été par des personnes isolées », indique le PV de la commission. Quant à « l’agression subie par le Kerfalla Sissoko »,elle trouve « son explication dans le comportement violent de ce dernier qui asséné le premier un coup-de-poing ». Mot pour mot les arguments de l’AS Mackenheim, inlassablement démentis par l’AS Benfeld. Le traumatisme crânien, les multiples fractures au visage ne sont que les séquelles d’une légitime défense. Affaire classée. Circulez, il n’y a rien à voir. Seul changement, pour manquement à la sécurité, l’AS Mackenheim est suspendue de terrain pour quatre matchs, son amende relevée à 100 euros… « Ils ne veulent pas parler de racisme de peur que cela les salisse », estime Jean-Michel Dietrich. L’essentiel des débats s’est d’ailleurs concentré sur lui, le District estimant « particulièrement regrettable » qu’il « se permette de dénoncer médiatiquement » les faits. Assigné en justice pour diffamation, le président de l’AS Benfeld passera en correctionnelle le 31 juillet.

    « Le foot c’est un système féodal, c’est de la politique, des discours, des réunions organisées par des carriéristes avides de pouvoir qui nous ridiculisent, méprisent la réalité, déplore Jean-Michel Dietrich. Ce sport doit se poser des questions, avoir le courage de sanctionner une équipe pour son comportement, même si elle gagne. » Pour Gérald Cimolaï, il y a deux poids, deux mesures, entre foot des villes et foot des champs : « Ils crachent sur les clubs des quartiers, mais dans les villages, rien n’est grave. »

    Le « foot des champs », c’est pourtant là que se concentrent désormais les problèmes, assure un ancien arbitre. « Longtemps, les clubs des quartiers faisaient peur quand ils venaient jouer dans les patelins. Maintenant, c’est l’inverse. Ce sont ces clubs qui ont peur d’aller à la campagne, parce qu’ils vont être provoqués, poussés à bout, jusqu’au basculement dans la violence. »Du coup, « les noms de villages chauds circulent », ceux où l’ambiance autour des matchs est connue pour être raciste, indique un entraîneur d’origine africaine. « Des villages où soit tu te bats, soit tu pleures », résume un joueur. Zone urbaine ou rurale, le racisme est partout, d’après Jean-Marie Dietrich. Mais il a différents visages : « En ville, le foot est un prétexte pour un affrontement entre communautés. On se mesure, on se fait peur. A l’écart, c’est la xénophobie, la peur de l’autre qui s’exprime. Le foot des campagnes, c’est la guerre des clochers. Ne pas être du village, c’est déjà compliqué… »

    Equipes monochromes

    Outre le contexte de chaque village, sa coloration plus ou moins frontiste, pourquoi l’ambiance sur les terrains est-elle devenue si délétère ces dernières années ? « Les joueurs qui posent problème dans les grands clubs saturés des villes sont virés. Ils échouent dans les basses divisions qu’ils gangrènent », explique le président du FC Hipsheim, Nicolas Smargiassi. Malgré leur comportement agressif, comme ils ont plutôt un bon niveau et la peau plutôt claire, ils atterrissent là où on veut bien d’eux, là où on est même parfois prêt à les rémunérer, souvent dans les petits villages qui peinent à trouver suffisamment de jeunes pour constituer une équipe. Des clubs ruraux qui ne sont pas trop regardants, puisqu’il en va de leur survie même. D’autres clubs, pourtant confrontés au même déficit de jeunes, ont une autre réponse : ils fusionnent avec le club voisin, choisissent la mixité… A la campagne, il y a donc les équipes monochromes, et les autres. Quand elles se rencontrent, ce ne sont pas seulement des profils de joueurs différents qui se font face, mais deux visions du foot qui s’affrontent.

    A Benfeld, « le ménage a été fait », affirment plusieurs dirigeants de club du même groupe (G de la troisième division). Quand Jean-Michel Dietrich a repris le club voilà deux ans, il avait mauvaise réputation. « Un petit groupe de jeunes du coin se l’accaparait, les autres ne pouvaient pas évoluer », assure-t-il. Il monte alors un nouveau projet, qui prône la diversité, l’acceptation de l’autre, va chercher des joueurs de toutes origines, crée une équipe féminine. Ceux qui ne voulaient pas se mélanger ont été invités à prendre une licence ailleurs. Voilà pourquoi Kerfalla Sissoko, technicien d’usinage à Strasbourg, est prêt à quitter le quartier populaire de Cronenbourg, où il vit avec ses parents, et à faire trente minutes de voiture pour venir s’entraîner le soir. A Benfeld, il s’est senti « bien accueilli ». Aujourd’hui, le club fait corps autour de lui, monte au créneau pour le défendre.

    Dans les clubs urbains, saturés, les places sont plus chères. « En ville, ça devient le business », confirme un autre joueur noir. A la campagne, ce n’est pourtant pas toujours la panacée. Certains clubs de village ont des équipes colorées mais cela résulte davantage d’une mixité concédée, non encouragée. « Mal classées, les équipes sont boudées par les jeunes blancs du village qui préfèrent jouer ailleurs, alors elles prennent des joueurs noirs par défaut. Ils ont besoin de nous pour constituer une équipe mais, en même temps, on les dérange », remarque un entraîneur.

    Seul joueur noir dans un club rural, Francis Mante dit des autres joueurs et des habitants du village qu’il « croyai[t] qu’ils [l]’aimaient ». Jusqu’au jour où, ayant changé de formation, il est revenu dans le village disputer un match sous d’autres couleurs : « A chaque coin du terrain, des supporteurs sifflaient et m’insultaient… » Dans sa nouvelle équipe, il est de nouveau le seul noir. Un coéquipier l’a traité de « sale singe » lors d’un match, devant l’entraîneur et le président. Francis Mante a déposé plainte, le club lui a demandé de la retirer, sans quoi ils ne pouvaient pas le garder. « Je l’ai retirée et je me suis fait jeter », assure-t-il. Il a arrêté le foot.

    Aujourd’hui, la parole des joueurs, entraîneurs, arbitres noirs se libère si on garantit leur anonymat. Autour et sur le terrain, « sale nègre » et sa variante « sale noir », demeurent des grands classiques avec « sale bougnoule ». On entend parfois des « Elsass frei » (« Alsace libre », slogan autonomiste régulièrement repris par l’extrême droite identitaire), ou « retournez chez vous, ici c’est le FN ». Un joueur d’un club de la banlieue de Strasbourg raconte qu’un jour, son équipe a été accueillie par « la musique de Hitler », le Horst Wessel Lied, l’hymne officiel nazi. C’était il y a dix ans. Aucun des joueurs de cette équipe métissée n’a oublié.

    « Le racisme, c’est courant », soupire un arbitre d’origine somalienne, habitant de Strasbourg, qui a officié sur des matchs amateurs dans tout le Bas-Rhin pendant sept ans. L’histoire de Kerfalla Sissoko l’épouvante. Lui-même craint de se retrouver face à un semblable déchaînement de violences, sans personne pour le défendre, sans vestiaire pour se replier… L’arbitre est seul. Et quand il est noir, il se retrouve souvent soupçonné d’incompétence : « C’est la première fois que vous arbitrez ? » « Vous êtes sûr que vous en êtes capable ? » entend-t-il souvent. Ou, venant des supporteurs : « Vous êtes chez nous », quand ce n’est pas juste des « bananes » qui fusent. Il a fini par raccrocher, « par lassitude ». Même son fils ne fait plus de foot. Sa mère l’a inscrit au karaté, « là où on apprend le respect », a-t-elle dit.

    Raccrocher les crampons, Francis Mante aussi l’a fait, voilà deux ans. Devenu arbitre, il s’est fait alpaguer à la fin d’un match début mai par une dame lui reprochant d’avoir mal sifflé. Le mari de celle-ci surenchérit et balance « va manger ta banane ». L’arbitre lui demande de répéter. L’homme blanc le fait, devant tout le monde. Francis Mante le gifle. Deux joueurs s’en mêlent, l’insultent et lui donnent un coup. « C’est la première fois que j’en venais aux mains… Hélas, mais il faut un acte, sinon c’est parole contre parole, improuvable. » Francis Mante apprendra plus tard que l’homme giflé s’avère être le président du club, qui avait appelé le District d’Alsace pour demander qu’on ne lui envoie plus d’arbitres noirs. Après l’incident, il porte plainte contre Francis Mante, qui est suspendu. Devant la commission de discipline, l’homme tutoie Francis Mante (le PV l’atteste), reconnaît ses propos mais ne voit pas le problème. « Je rigolais », a-t-il déclaré, faisait « de l’humour ». La Commission l’a suspendu dix mois de ses fonctions. Les joueurs qui s’en sont pris à Francis ont, eux, été privés de quelques matchs.

    Vent de révolte

    Un dimanche de juin, on a rendez-vous pour une rencontre dans un patelin figurant sur la fameuse « liste des villages chauds ». L’entraîneur est noir, une bonne partie de l’équipe aussi. Il les a « briefés » toute la semaine. Il leur a répété de « faire profil bas », quoi qu’il arrive. L’entraîneur de l’équipe adverse les avait traités de « négros » au match aller. Ambiance. Alors ils ont rempli des voitures de supporteurs. Les gens du village sont venus encourager leurs joueurs et empêcher tout dérapage. Du système D, qui fonctionne. « Des délégués représentant le district assistent parfois aux matchs, explique le coach, mais ils ne réagissent jamais aux insultes racistes. Ils s’assurent juste que les arbitres sont payés, les cotisations à jour. Dans le foot pro, il y a un peu plus de réactions, parce qu’il y a beaucoup d’argent en jeu. Si un club est connoté raciste, il vendra moins de maillots. Nous, on peut crever. »

    Un vent de révolte souffle contre le district. « On va prendre les mesures qui s’imposent puisqu’ils ne font rien », lâche le président du FC Hipsheim, Nicolas Smargiassi. Plusieurs clubs du groupe ont décidé de boycotter Mackenheim. Ils lui donneront leurs points, mais n’iront plus. Les joueurs d’Hipsheim ne veulent plus y mettre les pieds de toute façon, tant le match aller fut houleux : insultes et crachats. Le président a écrit au district pour dénoncer le climat d’insécurité. Lettre morte. Pour son match retour face à Mackenheim, le club de Duppigheim n’a pas hésité à payer deux juges de touche supplémentaires, pour protéger ses joueurs. Plusieurs dirigeants de club s’indignent : « Le District aurait dû rayer Mackenheim de la carte. »

    Le président du District d’Alsace, René Marbach, le plus grand de France avec 80 000 licenciés, est bien embêté avec cette affaire : « Cela défraye la chronique parce que c’est croustillant. Mais cela fout en l’air tout le travail ! » Ce qui l’ennuie surtout, c’est « le buzz ». Alors qu’il y a « 2 000 matchs chaque week-end en Alsace, et [que] tout va bien », même si « ce printemps a été le plus chaud qu’[il] ait connu », admet-il. « Il n’y a pas que des blessés physiques dans cette affaire. Il faut penser aussi à tous ces blessés moraux, ces milliers de bénévoles, d’éducateurs, qui œuvrent et se battent pour des valeurs », poursuit-il, dépité. Rayer des clubs de la carte semble impensable alors que le foot amateur est en voie d’extinction dans les campagnes. René Marbach pronostique « la disparition de 200 clubs sur les 600 que compte l’Alsace d’ici cinq ans ». « Voilà le vrai problème », d’après lui.

    Concernant les incidents du 6 mai, « les sanctions n’ont été prononcées que pour les choses avérées », insiste René Marbach. Le racisme n’en fait pas partie. De son côté, la gendarmerie de Marckolsheim, chargée de l’enquête préliminaire suite aux plaintes des joueurs noirs, renvoie vers la compagnie de Sélestat, qui gère la communication pour le secteur. Au bout du fil, un gendarme soupire. L’enquête sera bientôt bouclée. Les principaux intéressés, les joueurs, n’ont toujours pas été entendus. Le gendarme nous prévient que « quand tout sera fini, va falloir débriefer avec les journalistes, parce qu’il y a eu de l’emballement ». Quand l’avocate de Kerfalla Sissoko a tenté d’obtenir des nouvelles, le son de cloche a été similaire : « Ça se dégonfle comme un soufflé cette affaire », aurait lâché un gendarme. Me Caroline Bolla s’inquiète que l’enquête de la gendarmerie, comme l’instruction conduite par le district, repose entièrement sur le rapport d’arbitrage, rédigé par l’arbitre, « un ancien gendarme », précise-t-elle, sous-entendant que puisqu’il s’agit d’un ex-collègue, qui dit n’avoir rien entendu, sa parole pourrait ne pas être mise en doute. Une insinuation qui irrite l’avocat du club de Mackenheim, Me Grégoire Mehl, qui rétorque : « L’arbitre est la seule personne neutre dans l’histoire. » D’autant que « c’est déjà monté quand même très haut, à partir d’éléments non avérés », insiste-t-il.

    Le président du club de Mackenheim, qui n’a pas voulu répondre à nos questions, a reçu fin mai une lettre de Frédéric Potier, le délégué interministériel à la lutte contre le racisme. Il le prie de préciser son point de vue sur les faits et les mesures qu’il compte prendre. Du côté de Kerfalla Sissoko, ça ne va pas fort. Il va devoir être opéré de la tempe et du tympan.
    Noémie Rousseau correspondante à Strasbourg. Photo Pascal Bastien pour Libération.

    Cette histoire est scandaleuse du début à la fin. Ça en dit long sur le racisme profond qui gangrène toutes les institutions, y compris dans le sport. Une déclaration de soutien de la part des joueurs noirs champions du monde de foot serait bienvenue à minima, mais bon…

    #football #agression #impunité

    • Suite de l’affaire :
      Racisme dans le foot en Alsace : une audience, et toujours le statu quo
      http://www.liberation.fr/france/2018/08/24/racisme-dans-le-foot-en-alsace-une-audience-et-toujours-le-statu-quo_1674

      Une question revient en boucle. « Quel a été l’élément déclencheur ? » La commission veut comprendre « la raison des tensions », le « pourquoi », ce qui a fait « basculer ce match sans enjeu dans la violence », imagine que « quelque chose a dû se passer en amont » parce que « d’habitude, ça monte crescendo ». Ils s’interrogent sincèrement face à cette salle divisée en deux : quelques blancs d’un côté (Mackenheim), les noirs de l’autre (Benfeld et ses soutiens). Mais à aucun moment, il n’est question de couleur de peau. « Et côté gendarmerie ? » s’enquièrent les juges du foot. Aucune nouvelle des plaintes, aucune audition. Coup de théâtre, une vidéo a été versée au dossier par Mackenheim qui a fourni une clé USB. Un ado dans les tribunes a filmé. Ils visionnent, l’écran passe de main en main, ils tournent l’ordinateur, penchent la tête, n’écoutant plus que d’une oreille distraite les débats qui n’ont pas été interrompus, on entend un court brouhaha recommencé sans cesse, des rires. « Est-ce qu’on pourrait voir ? », finit par demander Kerfalla Sissoko. Réponse de la commisssion : « Inutile, on ne voit rien. » Si ce n’est qu’il y avait bien plus de quatre spectateurs à envahir le terrain comme le prétendait Mackenheim. L’ordinateur portable est replié.
      Carton rouge en pleine agonie

      Au tour de Mackenheim. La commission : « Et sur le propos raciste, vous n’avez rien entendu ? » La réponse est dans la question. « Et donc vous ne connaissez pas ceux qui sont venus avec des couteaux ? » Idem. Les dirigeants du club de Mackenheim affirment que Kerfalla Sissoko a donné le premier coup. « Je me suis défendu, ils étaient plusieurs sur moi », explique inlassablement le jeune homme. Les joueurs de Mackenheim mis en cause et convoqués ne sont pas présents. Bref, Sissoko a bel et bien porté un coup et « c’est pour ça qu’[il] a eu un carton rouge », lui explique la commission. Lui, il voudrait savoir si c’est bien légal d’avoir un carton rouge « quand on est en train de mourir ». Pas de réponse. Mackenheim rebondit, « Monsieur Sissoko n’a jamais été en danger de mort. » Ils le savent bien : un membre du club est infirmier. « Donc il est intervenu », suppose un membre de la ligue. « Non », dit Mackenheim. La commission se tourne vers Kerfalla Sissoko : « Combien de temps êtes-vous resté couché sur le terrain ? » « J’étais dans les pommes… », bredouille le jeune homme. Une heure déjà que l’audience a débuté. Un membre de la commission fait part de son appréciation à Kerfalla Sissoko : « Donc, vous vous êtes fait tabasser. » Triple fracture au visage, trauma crânien, dix jours d’ITT. Le certificat est dans le dossier.

      L’AS Mackenheim est assisté d’un avocat. L’homme parle bien, longtemps. C’est son job. La maîtrise du verbe. Il rappelle qu’ une procédure juridique en diffamation est engagée contre ceux qui dénoncent le racisme, avec passage en correctionnelle le 22 octobre , et il construit sa plaidoirie en prenant le contre-pied de l’enquête de Libé. « Le racisme dans le foot amateur ne peut pas être illustré par le match du 6 mai 2018 », il faut distinguer « ce qui est avéré et ce qui est fantasmé » : personne n’a rien entendu du racisme. Il réclame l’indulgence de la ligue, les suspensions de terrain, c’est un coup dur pour le club de Mackenheim. La commission aimerait connaître les actions mises en place pour que les faits ne se reproduisent plus ? Ils vont « faire du relationnel avec les joueurs et supporters » (sic)…
      « Nous avons même un cimetière juif »

      Le maire de la commune, Jean-Claude Spielmann, s’est fait inviter. Le président du club de foot est son ami de trente ans. Deux jours qu’ils passent des coups de fil à d’autres communes pour trouver un terrain. Personne ne veut les accueillir, ils essuient des « réponses parfois très désobligeantes ». Et s’ils trouvent, il lui faudra emmener les équipements et les employés communaux là-bas, pour s’occuper de la préparation pelouse, et ça, ça va « peser sur les finances municipales », s’émeut-il. L’élu s’indigne, l’image de sa commune a pris un coup à cause de l’affaire, alors que « Mackenheim n’est pas un terreau de racistes ». La preuve, selon lui : « On est un des rares villages à accueillir une famille de Syriens et nous avons même un cimetière juif. » Puis il en profite pour rappeler à ligue qu’il a déposé une demande de financement pour refaire l’éclairage du club-house. Le président de la commission lui sourit d’un air entendu.

      La séance est levée, la décision sera rendue dans quelques jours. « Au moins, j’ai pu parler un peu plus », lâche Kerfalla Sissoko à la sortie. « Mais c’est toujours moi le fautif. » Sur le parvis de la ligue, les associations imaginent des actions conjointes pour faire reculer le racisme que l’on ne veut pas voir autour du ballon rond. Dimanche dernier, la saison a repris en Alsace. L’AS Mackenheim s’est déplacé à Ebersmunster et l’a emporté 4 à 3. Mais « l’arbitre sifflera la fin du match avant les arrêts de jeu, avant que ça ne dégénère », indique le FC Ebersmunster sur sa page web qui déplore le comportement agressif des visiteurs. L’équipe de Mackenheim, redoutée par les autres clubs pour les dérapages violents qui émaillent souvent les rencontres, a terminé la saison dernière quatrième du championnat. Et elle a obtenu de la ligue de monter en division supérieure.

    • https://www.liberation.fr/france/2019/03/19/racisme-dans-le-foot-amateur-la-mediatisation-des-faits-interesse-plus-qu

      Racisme dans le foot amateur : la médiatisation des faits intéresse plus que les faits eux-mêmes
      Par Noémie Rousseau, correspondante à Strasbourg — 19 mars 2019 à 18:42
      Kerfalla Sissoko à Strasbourg, le 24 mai 2018. Photo Pascal Bastien pour Libération
      Lors d’une audience mardi au tribunal correctionnel de Strasbourg, le président du petit club de Benfeld, dont les joueurs noirs ont été agressés en mai 2018, comparaissait pour diffamation.

      Racisme dans le foot amateur : la médiatisation des faits intéresse plus que les faits eux-mêmes

      L’accusé qui s’avance ce mardi à la barre du tribunal correctionnel de Strasbourg est Jean-Michel Dietrich, pull fin et catogan haut. Président du petit club de foot amateur de Benfeld (Bas-Rhin), il a vu le 6 mai 2018 ses joueurs noirs « pris pour cible », « coursés avec des couteaux de cuisine », objets d’un « déchaînement de violence » lors d’une rencontre à Mackenheim. Jean-Michel Dietrich répond au juge, raconte la foule envahissant le terrain, la fin du match sifflée, et son fils de 8 ans qui lui demande si Kerfalla Sissoko va mourir. Evacué inconscient, le joueur d’origine guinéenne s’en sortira avec un traumatisme crânien et une triple fracture au visage. Dix jours d’interruption de travail.

      Mais ce qui intéresse la justice, c’est le jour d’après. Pas la plainte qu’ont déposée les footballeurs noirs à la gendarmerie le lendemain mais la lettre adressée par Jean-Michel Dietrich au District d’Alsace de football, dans laquelle il explique comment ses joueurs ont été « victimes d’actes racistes », lettre rendue publique sur Facebook et qui constitue un délit de diffamation selon le club de Mackenheim. Eux, se sont constitués partie civile et leur avocat, Me Grégoire Mehl, demande à ce que soient rendus à Mackenheim « son honneur et sa réputation ». Car la lettre de Dietrich a entraîné une « large médiatisation des faits », nationale et internationale, pointe Me Mehl qui brandit à l’audience la une de Libération, la lit, cite le New York Times, alors qu’affirme-t-il, « la circonstance de racisme n’est pas établie ».
      « Du Tartuffe »

      Il fonde sa plaidoirie sur la distinction entre ce qui est « avéré » et ce qui est « allégué » : la violence oui, le racisme non. Il en veut pour preuve que le racisme, personne ne l’a entendu, sauf les victimes. Même les instances du football ont sanctionné à égalité victimes et agresseurs. Kerfalla Sissoko a été suspendu pour dix matchs. Alors, le juge aimerait savoir si Libération a aussi été poursuivi en diffamation, si les gendarmes ont enquêté, si des sanctions ont été prises contre les joueurs accusés d’agression… A chaque fois, l’avocat de Mackenheim répond par la négative.

      En charge du dossier, le parquet de Colmar (Haut-Rhin) ne dit rien, ni aux victimes-accusées de diffamation ni aux accusés-victimes de racisme. Me Lahcène Drici (paradoxalement connu pour être aussi le conseil d’Alain Soral) commence sa plaidoirie par la longue liste des stars du ballon rond qui ont subi « cris de singe » et « jets de banane », « jouer en amateur, ne met pas à l’abri du racisme ». En guise d’« indice », il rappelle que la commune de Mackenheim a placé Le Pen en tête au deuxième tour de 2017 à 54%, « cela ne transpire pas le gauchisme ni le droit-de-l’hommisme ». Quant aux instances du foot, elles font selon lui « du Tartuffe », « cachez ce racisme que je ne saurais voir », défendant son client qui, lui, n’a pas « eu cette hypocrisie et cette lâcheté », « en refusant de tout mettre sous le boisseau pour que le foot reste populaire, beau, propre ». Personne, ni à la Ligue de foot, ni à Mackenheim n’a pris de nouvelle des joueurs blessés, aussi l’avocat estime-t-il que si l’honneur du club a été atteint, de toute façon, « il n’y a pas beaucoup d’honneur à défendre ». La décision a été mise en délibéré au 23 mai.

      Kerfalla Sissoko est pour sa part convoqué. Il devrait être enfin entendu par les gendarmes. « Mais pour des faits de violence aggravée, qu’il aurait commis alors qu’il agonisait sur le terrain ! » s’étrangle son avocate, Me Caroline Bolla. Le 6 mai, le délai de prescription pour les injures à caractère raciste sera écoulé.

    • https://www.liberation.fr/france/2019/03/19/racisme-dans-le-foot-amateur-la-mediatisation-des-faits-interesse-plus-qu

      Racisme dans le foot amateur : la médiatisation des faits intéresse plus que les faits eux-mêmes
      Par Noémie Rousseau, correspondante à Strasbourg — 19 mars 2019 à 18:42
      Kerfalla Sissoko à Strasbourg, le 24 mai 2018. Photo Pascal Bastien pour Libération
      Lors d’une audience mardi au tribunal correctionnel de Strasbourg, le président du petit club de Benfeld, dont les joueurs noirs ont été agressés en mai 2018, comparaissait pour diffamation.

      Racisme dans le foot amateur : la médiatisation des faits intéresse plus que les faits eux-mêmes

      L’accusé qui s’avance ce mardi à la barre du tribunal correctionnel de Strasbourg est Jean-Michel Dietrich, pull fin et catogan haut. Président du petit club de foot amateur de Benfeld (Bas-Rhin), il a vu le 6 mai 2018 ses joueurs noirs « pris pour cible », « coursés avec des couteaux de cuisine », objets d’un « déchaînement de violence » lors d’une rencontre à Mackenheim. Jean-Michel Dietrich répond au juge, raconte la foule envahissant le terrain, la fin du match sifflée, et son fils de 8 ans qui lui demande si Kerfalla Sissoko va mourir. Evacué inconscient, le joueur d’origine guinéenne s’en sortira avec un traumatisme crânien et une triple fracture au visage. Dix jours d’interruption de travail.

      Mais ce qui intéresse la justice, c’est le jour d’après. Pas la plainte qu’ont déposée les footballeurs noirs à la gendarmerie le lendemain mais la lettre adressée par Jean-Michel Dietrich au District d’Alsace de football, dans laquelle il explique comment ses joueurs ont été « victimes d’actes racistes », lettre rendue publique sur Facebook et qui constitue un délit de diffamation selon le club de Mackenheim. Eux, se sont constitués partie civile et leur avocat, Me Grégoire Mehl, demande à ce que soient rendus à Mackenheim « son honneur et sa réputation ». Car la lettre de Dietrich a entraîné une « large médiatisation des faits », nationale et internationale, pointe Me Mehl qui brandit à l’audience la une de Libération, la lit, cite le New York Times, alors qu’affirme-t-il, « la circonstance de racisme n’est pas établie ».
      « Du Tartuffe »

      Il fonde sa plaidoirie sur la distinction entre ce qui est « avéré » et ce qui est « allégué » : la violence oui, le racisme non. Il en veut pour preuve que le racisme, personne ne l’a entendu, sauf les victimes. Même les instances du football ont sanctionné à égalité victimes et agresseurs. Kerfalla Sissoko a été suspendu pour dix matchs. Alors, le juge aimerait savoir si Libération a aussi été poursuivi en diffamation, si les gendarmes ont enquêté, si des sanctions ont été prises contre les joueurs accusés d’agression… A chaque fois, l’avocat de Mackenheim répond par la négative.

      En charge du dossier, le parquet de Colmar (Haut-Rhin) ne dit rien, ni aux victimes-accusées de diffamation ni aux accusés-victimes de racisme. Me Lahcène Drici (paradoxalement connu pour être aussi le conseil d’Alain Soral) commence sa plaidoirie par la longue liste des stars du ballon rond qui ont subi « cris de singe » et « jets de banane », « jouer en amateur, ne met pas à l’abri du racisme ». En guise d’« indice », il rappelle que la commune de Mackenheim a placé Le Pen en tête au deuxième tour de 2017 à 54%, « cela ne transpire pas le gauchisme ni le droit-de-l’hommisme ». Quant aux instances du foot, elles font selon lui « du Tartuffe », « cachez ce racisme que je ne saurais voir », défendant son client qui, lui, n’a pas « eu cette hypocrisie et cette lâcheté », « en refusant de tout mettre sous le boisseau pour que le foot reste populaire, beau, propre ». Personne, ni à la Ligue de foot, ni à Mackenheim n’a pris de nouvelle des joueurs blessés, aussi l’avocat estime-t-il que si l’honneur du club a été atteint, de toute façon, « il n’y a pas beaucoup d’honneur à défendre ». La décision a été mise en délibéré au 23 mai.

      Kerfalla Sissoko est pour sa part convoqué. Il devrait être enfin entendu par les gendarmes. « Mais pour des faits de violence aggravée, qu’il aurait commis alors qu’il agonisait sur le terrain ! » s’étrangle son avocate, Me Caroline Bolla. Le 6 mai, le délai de prescription pour les injures à caractère raciste sera écoulé.

    • Droit de suite
      Racisme dans le foot en Alsace : relaxe pour le président de l’AS Benfeld accusé de diffamation
      https://www.liberation.fr/france/2019/05/23/racisme-dans-le-foot-en-alsace-relaxe-pour-le-president-de-l-as-benfeld-a

      Poursuivi en diffamation pour avoir dénoncé publiquement des agressions et injures racistes, Jean-Michel Dietrich, président du club de foot amateur l’AS Benfeld, a été relaxé ce matin. Il était attaqué par le club de l’AS Mackenheim qui lui reprochait d’avoir rendu publique la lettre adressée à la ligue d’Alsace de foot après le match qui opposait les deux équipes le 6 mai 2018. Dans son texte posté sur Facebook, il rapportait les violences dont avaient été victimes ses joueurs noirs, pris pour cible, coursés avec des couteaux de cuisine par des supporteurs ayant envahi le terrain, passés à tabac. Kerfalla Sissoko s’était effondré inconscient sur le terrain, souffrant d’une triple fracture du visage et d’un traumatisme crânien. Un an après les faits, le joueur tout comme ses deux coéquipiers agressés n’a pas rechaussé les crampons.

      Si Jean-Michel Dietrich s’est dit « soulagé » à l’annonce du verdict, il a martelé qu’il se « battrait jusqu’au bout pour [ses] joueurs, le combat doit continuer pour eux, pour leur rendre leur honneur ». Car sur le fond de l’affaire, rien n’a avancé. Fin avril, Kerfalla Sissoko a enfin été auditionné par les gendarmes, pour avoir participé à des faits de violence aggravée. Un appel aux dons va être lancé par le club de Benfeld, afin de permettre au joueur, qui s’est constitué partie civile, de faire face aux frais de justice. Quant aux instances du football, elles avaient sanctionné à égalité victimes et agresseurs.