• Au #Sénégal, la farine de poisson creuse les ventres et nourrit la rancœur

    À #Kayar, sur la Grande Côte sénégalaise, l’installation d’une usine de #farine_de_poisson, destinée à alimenter les élevages et l’aquaculture en Europe, a bouleversé l’économie locale. Certains sont contraints d’acheter les rebuts de l’usine pour s’alimenter, raconte “Hakai Magazine”.
    “Ils ont volé notre #poisson”, affirme Maty Ndau d’une voix étranglée, seule au milieu d’un site de transformation du poisson, dans le port de pêche de Kayar, au Sénégal. Quatre ans plus tôt, plusieurs centaines de femmes travaillaient ici au séchage, au salage et à la vente de la sardinelle, un petit poisson argenté qui, en wolof, s’appelle yaboi ou “poisson du peuple”. Aujourd’hui, l’effervescence a laissé place au silence.

    (#paywall)

    https://www.courrierinternational.com/article/reportage-au-senegal-la-farine-de-poisson-creuse-les-ventres-

    #élevage #Europe #industrie_agro-alimentaire

    • Un article publié le 26.06.2020 et mis à jour le 23.05.2023 :

      Sénégal : les usines de farines de poisson menacent la sécurité alimentaire

      Au Sénégal, comme dans nombre de pays d’Afrique de l’Ouest, le poisson représente plus de 70 % des apports en protéines. Mais la pêche artisanale, pilier de la sécurité alimentaire, fait face à de nombreuses menaces, dont l’installation d’usines de farine et d’huile de poisson. De Saint-Louis à Kafountine, en passant par Dakar et Kayar… les acteurs du secteur organisent la riposte, avec notre partenaire l’Adepa.

      Boum de la consommation mondiale de poisson, accords de #pêche avec des pays tiers, pirogues plus nombreuses, pêche INN (illicite, non déclarée, non réglementée), manque de moyens de l’État… La pêche sénégalaise a beau bénéficier de l’une des mers les plus poissonneuses du monde, elle fait face aujourd’hui à une rapide #raréfaction de ses #ressources_halieutiques. De quoi mettre en péril les quelque 600 000 personnes qui en vivent : pêcheurs, transformatrices, mareyeurs, micro-mareyeuses, intermédiaires, transporteurs, etc.

      Pourtant, des solutions existent pour préserver les ressources : les aires marines protégées (AMP) et l’implication des acteurs de la pêche dans leur gestion, la création de zones protégées par les pêcheurs eux-mêmes ou encore la surveillance participative… Toutes ces mesures contribuent à la durabilité de la ressource. Et les résultats sont palpables : « En huit ans, nous sommes passés de 49 à 79 espèces de poissons, grâce à la création de l’aire marine protégée de Joal », précise Karim Sall, président de cette AMP.

      Mais ces initiatives seront-elles suffisantes face à la menace que représentent les usines de farine et d’huile de poisson ?

      Depuis une dizaine d’années, des usines chinoises, européennes, russes, fleurissent sur les côtes africaines. Leur raison d’être : transformer les ressources halieutiques en farines destinées à l’#aquaculture, pour répondre à une demande croissante des consommateurs du monde entier.

      Le poisson détourné au profit de l’#export

      Depuis 2014, la proportion de poisson d’élevage, dans nos assiettes, dépasse celle du poisson sauvage. Les farines produites en Afrique de l’Ouest partent d’abord vers la #Chine, premier producteur aquacole mondial, puis vers la #Norvège, l’#Union_européenne et la #Turquie.

      Les impacts négatifs de l’installation de ces #usines sur les côtes sénégalaises sont multiples. Elles pèsent d’abord et surtout sur la #sécurité_alimentaire du pays. Car si la fabrication de ces farines était censée valoriser les #déchets issus de la transformation des produits de la mer, les usines achètent en réalité du poisson directement aux pêcheurs.

      Par ailleurs, ce sont les petits pélagiques (principalement les #sardinelles) qui sont transformés en farine, alors qu’ils constituent l’essentiel de l’#alimentation des Sénégalais. Enfin, les taux de #rendement sont dévastateurs : il faut 3 à 5 kg de ces sardinelles déjà surexploitées [[Selon l’organisation des Nations unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO)]] pour produire 1 kg de farine ! Le poisson disparaît en nombre et, au lieu d’être réservé à la consommation humaine, il part en farine nourrir d’autres poissons… d’élevage !

      Une augmentation des #prix

      Au-delà de cette prédation ravageuse des sardinelles, chaque installation d’usine induit une cascade d’autres conséquences. En premier lieu pour les mareyeurs et mareyeuses mais aussi les #femmes transformatrices, qui achetaient le poisson directement aux pêcheurs, et se voient aujourd’hui concurrencées par des usines en capacité d’acheter à un meilleur prix. Comme l’explique Seynabou Sene, transformatrice depuis plus de trente ans et trésorière du GIE (groupement d’intérêt économique) de Kayar qui regroupe 350 femmes transformatrices : « Avant, nous n’avions pas assez de #claies de #séchage, tant la ressource était importante. Aujourd’hui, nos claies sont vides, même pendant la saison de pêche. Depuis 2010, quatre usines étrangères se sont implantées à Kayar, pour transformer, congeler et exporter le poisson hors d’Afrique, mais elles créent peu d’#emploi. Et nous sommes obligées de payer le poisson plus cher, car les usines d’#exportation l’achètent à un meilleur prix que nous. Si l’usine de farine de poisson ouvre, les prix vont exploser. »

      Cette industrie de transformation en farine et en huile ne pourvoit par ailleurs que peu d’emplois, comparée à la filière traditionnelle de revente et de transformation artisanale. Elle représente certes un débouché commercial lucratif à court terme pour les pêcheurs, mais favorise aussi une surexploitation de ressources déjà raréfiées. Autre dommage collatéral enfin, elle engendre une pollution de l’eau et de l’air, contraire au code de l’environnement.

      La riposte s’organise

      Face à l’absence de mesures gouvernementales en faveur des acteurs du secteur, l’#Adepa [[L’Adepa est une association ouest-africaine pour le développement de la #pêche_artisanale.]] tente, avec d’autres, d’organiser des actions de #mobilisation citoyenne et de #plaidoyer auprès des autorités. « Il nous a fallu procéder par étapes, partir de la base, recueillir des preuves », explique Moussa Mbengue, le secrétaire exécutif de l’Adepa.

      Études de terrain, ateliers participatifs, mise en place d’une coalition avec différents acteurs. Ces actions ont permis d’organiser, en juin 2019, une grande conférence nationale, présidée par l’ancienne ministre des Pêches, Aminata Mbengue : « Nous y avons informé l’État et les médias de problèmes majeurs, résume Moussa Mbengue. D’abord, le manque de moyens de la recherche qui empêche d’avoir une connaissance précise de l’état actuel des ressources. Ensuite, le peu de transparence dans la gestion d’activités censées impliquer les acteurs de la pêche, comme le processus d’implantation des usines. Enfin, l’absence de statistiques fiables sur les effectifs des femmes dans la pêche artisanale et leur contribution socioéconomique. »

      Parallèlement, l’association organise des réunions publiques dans les ports concernés par l’implantation d’usines de farines et d’huile de poisson. « À Saint-Louis, à Kayar, à Mbour… nos leaders expliquent à leurs pairs combien le manque de transparence dans la gestion de la pêche nuit à leur activité et à la souveraineté alimentaire du pays. »

      Mais Moussa Mbengue en a conscience : organiser un plaidoyer efficace, porté par le plus grand nombre, est un travail de longue haleine. Il n’en est pas à sa première action. L’Adepa a déjà remporté de nombreux combats, comme celui pour la reconnaissance de l’expertise des pêcheurs dans la gestion des ressources ou pour leur implication dans la gestion des aires marines protégées. « Nous voulons aussi que les professionnels du secteur, conclut son secrétaire exécutif, soient impliqués dans les processus d’implantation de ces usines. »

      On en compte aujourd’hui cinq en activité au Sénégal. Bientôt huit si les projets en cours aboutissent.

      https://ccfd-terresolidaire.org/senegal-les-usines-de-farines-de-poisson-menacent-la-securite-a

      #extractivisme #résistance

  • #État_d'urgence dans la #plaine_du_Pô

    Le Pô, le plus long fleuve d’Italie, approche des niveaux d’étiage records après des mois sans #précipitations significatives.

    S’étendant des Alpes au nord-ouest à la mer Adriatique sur la côte est, le Pô est une source d’eau vitale pour de nombreuses régions. Il est utilisé pour l’#eau potable, pour irriguer de grandes zones agricoles et pour produire de l’énergie hydroélectrique dans tout le nord de l’Italie.

    Les #niveaux_d'eau dans la vallée du Pô ont désormais chuté à des niveaux records : cela est dû en premier lieu au déficit de précipitations dans tout le nord de l’Italie depuis cet hiver, mais également aux températures élevées depuis juin ainsi que au manque de neige en montagne, dont la fonte alimente généralement le fleuve au printemps et en début d’été. Selon l’Observatoire du Pô , bon nombre des régions traversées n’ont pas connu de pluie depuis plus de 110 jours.

    Un #fleuve quasiment à sec

    Le Pô est normalement une large étendue d’eau, mais il s’est maintenant asséché en partie, laissant émerger de grandes étendues de sable comme le montre l’animation ci-dessous :

    La plaine du Pô est la zone agricole la plus importante d’Italie. Elle produit environ 40 % des aliments de la péninsule, notamment le #blé, le #riz et les #tomates. Avec la #sécheresse actuelle, les agriculteurs ont du mal à maintenir les cultures irriguées et de nombreuses villes du nord de l’Italie ont été invitées à rationner l’eau pendant la nuit.

    Benjamin Koetz, chef du bureau des initiatives durables de l’ESA (agence spatiale européenne), a déclaré : "Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO ), l’#agriculture consomme jusqu’à 70 % de l’#eau_douce. Compte tenu de la #raréfaction de cette ressource essentielle, l’utilisation de l’eau doit être rationnalisée dans ce secteur. À cette fin, l’ESA prépare une mission de surveillance de la température de surface de la Terre, laquelle permettra de surveiller l’évapotranspiration des cultures et de soutenir ainsi des pratiques d’#irrigation durables.

    Etat d’urgence

    Récemment, le gouvernement italien a déclaré l’état d’urgence dans cinq régions du nord de l’Italie et annoncé le déblocage d’un fonds de 36,5 millions d’euros pour faire face à la pire sécheresse depuis 70 ans. L’état d’urgence vise à accorder « des moyens et des pouvoirs extraordinaires » afin d’assurer la mise en oeuvre des interventions urgentes nécessaires pour garantir la sécurité publique, la réparation des dommages subis par les biens publics et privés et les conditions de vie normales de la population.

    Le projet #CAREheat

    Selon les nouveaux résultats d’un projet financé par l’ESA appelé CAREHeat , la mer Méditerranée connaît actuellement une vague de chaleur, avec des températures en mai 2022 dépassant de 4°C la moyenne 1985-2005. Selon ces résultats, les températures des eaux de surface ont atteint des pics de plus de 23°C.

    Le projet - auquel participent des organismes de recherche italiens tels que l’Agence nationale pour les nouvelles technologies, l’énergie et le développement économique durable (ENEA) et le Conseil national de la recherche (CNR) - vise à élaborer des stratégies pour identifier les vagues de chaleur marines et déterminer leurs effets sur les écosystèmes marins et les activités économiques telles que la pêche.

    https://www.meteosuisse.admin.ch/home/actualite/meteosuisse-blog.subpage.html/fr/data/blogs/2022/7/un-po---tanto--in-secca.html
    # #rivière #Italie #sécheresse

  • A #Volvic, #Danone puise et épuise l’eau

    À Volvic, Danone assure « ne pas prendre à la nature plus que ce qu’elle est capable de nous donner ». En réalité, la multinationale augmente ses prélèvements pendant les mois les plus chauds, portant atteinte aux riverains et aux eaux de surface. En toute connaissance de cause et sous le regard bienveillant des autorités.

    Tapie derrière l’image verte de son « eau des volcans », la #Société_des_eaux_de_Volvic (#SEV) se targue d’« encourager des pratiques d’hydratation plus saines et durables dans le respect de notre écosystème ». Cette communication cache pourtant une vérité dérangeante : la SEV a augmenté le débit de ses forages en pleine période de sécheresse, en 2015, 2017 et 2018, comme le montrent des documents confidentiels que Mediapart a pu obtenir. Loin de porter le fer contre la multinationale, les services de l’État ont fermé les yeux sur ces pratiques et permis à l’entreprise de doubler ses prélèvements en vingt ans. L’entreprise consomme aujourd’hui dix fois plus d’eau que la population locale.

    En plein mois de juillet 2015, alors que la sécheresse ravage le Puy-de-Dôme, obligeant la préfecture à constituer une mission d’enquête sur l’étendue des dégâts, le minéralier français appuie sur l’accélérateur. Plus de 250 millions de litres d’eau sont extraits de la nappe en quatre semaines, soit 15 % de plus que la moyenne annuelle. De quoi continuer à remplir plusieurs millions de bouteilles par jour, exportées ensuite vers des dizaines de pays à travers le monde.

    Ce comportement, en contradiction totale avec toutes les affirmations de la multinationale, se reproduit en juillet et en août 2017. Dans un compte-rendu du comité de suivi de « l’aquifère de Volvic », qui réunit services de l’État, syndicat des eaux et représentants de la multinationale, il est question de « légère augmentation » des prélèvements pendant ces deux mois. Sans que les représentants de l’État présents n’y trouvent à redire. L’été 2017 est pourtant une période particulièrement chaude qui pousse la préfecture à prendre des mesures drastiques de réduction de la consommation d’eau pour tous les usagers du département… à l’exception notable de la SEV*.

    Interrogé sur cette pratique, Danone nie en bloc. « Dans le contexte de sécheresse, depuis 2017, nous réduisons chaque année nos prélèvements lors des mois d’été », affirme une agence spécialisée dans la communication de crise, au nom du géant de l’agroalimentaire, avançant même le chiffre invérifiable de « 500 millions de litres d’eau économisés entre 2017 et 2020 ». Une affirmation contredite par les chiffres en possession de Mediapart.

    En 2018, c’est bien en janvier, puis de juin à août, que les forages de Danone ont été les plus performants, comme le montre un document confidentiel de la Direction départementale des territoires du Puy-de-Dôme. Encore une fois, cette augmentation des prélèvements intervient pendant un été particulièrement aride, au point que la préfecture du Puy-de-Dôme reconnaît l’état de catastrophe naturelle sécheresse pour 75 communes du département. Et, encore une fois, les services de l’État en sont informés et ne réagissent pas, ces prélèvements respectant de justesse les limites autorisées par la préfecture. « Les prélèvements sont plafonnés mensuellement, dans l’arrêté d’autorisation. Chaque année le service police de l’eau s’assure du respect de l’intégralité de l’arrêté, notamment des prélèvements réalisés en été », se contente de préciser la préfecture.

    Pour Jacky Massy, de l’association environnementale Preva*, l’appétit du géant français de l’eau met directement en danger les cours d’eau qui dépendent de la nappe exploitée, dont le Gargouilloux. « Tout type de prélèvements opérés sur la nappe impacte l’aval (et les cours d’eau) », explique-t-il. Pour réduire son empreinte écologique, l’activiste aimerait que Danone se limite « au marché national » et ne produise plus que des bouteilles en verre. « Aujourd’hui, avec cinq forages, il est clair qu’ils [Danone] ajoutent aux ennuis qu’on rencontre », conclut-il.

    Massy n’est pas le seul à s’inquiéter des méthodes de la multinationale et de l’attitude de l’État. Le ruisseau du Gargouilloux passe sur le domaine d’Édouard de Féligonde, situé à quelques encablures en aval de l’usine de Volvic. En cette mi-septembre, il n’est plus qu’un mince filet d’eau et les dizaines de bassins de pisciculture du propriétaire des lieux sont quasiment tous à sec. Pour Édouard de Féligonde, qui a d’abord pris la parole dans les colonnes du Monde, c’est bien l’activité de la multinationale qui est à l’origine de la pénurie. « Le comité de suivi de l’aquifère ne suit que les intérêts de Danone », cingle-t-il à propos de l’organe réunissant, depuis 2016, des représentants publics et de Danone afin de surveiller les prélèvements en eau. S’estimant lésé, Féligonde réclame plusieurs millions d’euros à la SEV, dont huit millions d’euros pour la seule remise en état de la partie de sa pisciculture classée monument historique.

    Des accusations confirmées par un document confidentiel de la Société des eaux de Volvic datant de 2017, que Mediapart a pu consulter. Il y est écrit que « l’impact des prélèvements au captage du Gargouilloux » a pu être mis « en évidence » en 2015. Sur le plus long terme, et avec l’aval des autorités, l’embouteilleur a quasiment doublé ses prélèvements depuis 1998, passant de 1,5 million de m3 à 2,7 millions en 2018 (page 29 sur 89 du document). Soit dix fois plus que la consommation annuelle d’eau potable des quelque 4 500 habitants de Volvic (page 5 sur 6 du rapport 2018 de la commune de Volvic). Parallèlement à cette explosion des prélèvements, le débit du Gargouilloux, situé à proximité immédiate du site industriel, a été divisé par sept entre 2013 et 2019, selon les chiffres de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) d’Auvergne.

    Danone continue pourtant de relativiser : « Nos analyses mettent en évidence le fait que la modification du débit s’explique essentiellement par des facteurs naturels », fait savoir l’entreprise. Sur son site, elle se veut encore plus rassurante : « L’Auvergne subit depuis plusieurs années un phénomène de sécheresse. Cela renforce les interrogations des citoyens, que nous comprenons aisément, sur la pérennité des ressources en eau. » Afin de préserver cette « ressource essentielle », Danone explique faire toute confiance à ses « experts [qui] veillent à sa gestion raisonnée ». Concernant l’eau pompée par ses soins, Danone se contente de renvoyer aux autorisations préfectorales en vigueur, sans évoquer les variations estivales : « Les quantités prélevées sont toujours en deçà des quantités autorisées par notre arrêté préfectoral. »

    Hasard malheureux du calendrier, c’est en plein bras de fer autour de la gestion de l’eau, et alors que la préfecture a annoncé pour la première fois dans la presse envisager une « baisse » des autorisations accordées à Danone, que l’État vient de valider en catimini, par un arrêté du 26 août 2020, « l’augmentation temporaire des débits » de forage de l’entreprise. Une autorisation qui intervient en pleine période de « vigilance sécheresse » et qui reste valable six mois, renouvelable une fois. « Les eaux du forage pompées durant les phases d’essai seront réinjectées dans l’aquifère en aval », précise l’arrêté, laissant à Danone le soin de réaliser lui-même le « bilan global » de cette opération, sans en préciser les modalités.

    Le but de cette dérogation ? Permettre à la firme de mener à bien la phase test de son tout nouveau forage, supposé remplacer un autre ouvrage, datant de 1968. Une opération qui ne devrait donc pas modifier les quantités globales prélevées par la SEV au cours de l’année, mais qui pourrait bien raviver les tensions, à quelques semaines d’une réunion entre les associations environnementales et le préfet. Malgré ce couac, la préfecture assure être consciente des enjeux. « Une approche globale est nécessaire et nous examinons depuis plusieurs mois, suite notamment à la sécheresse exceptionnelle de 2019, comment l’eau est consommée pour dégager des solutions à différents niveaux, expliquent les services préfectoraux du Puy-de-Dôme. L’approche doit concerner l’ensemble des prélèvements. »

    Si Danone continue de mettre en doute le lien direct entre ses prélèvements et la baisse des nappes souterraines, la corrélation a été confirmée en 2012 par une thèse de l’Institut de sciences et technologie de Paris. Mediapart a pu consulter ce document scientifique, classé confidentiel jusqu’au 31 décembre 2022. Une confidentialité à la demande du commanditaire des travaux, la Société des eaux de Volvic. L’auteur, Simon Rouquet, est formel : « On peut donc penser que le débit pompé au niveau du forage de Clairval [appartenant à Danone – ndlr] a une incidence sur le débit de la galerie du Goulet sur une durée de quelques jours. »

    Cette « galerie du Goulet » alimente plusieurs cours d’eau ainsi qu’une source utilisés pour alimenter les communes alentour en eau potable. Des données que Jean-François Béraud, expert hydrogéologue mandaté par les avocats de Féligonde, résume ainsi : « Quand on pompe davantage en haut, il y a moins d’eau en bas. »

    Une analyse que Danone réfute, préférant voir le verre à moitié plein. « Il ressort de nos études auprès des plus grands scientifiques hydrogéologues que la cause essentielle de la réduction du débit en aval consiste en des facteurs naturels (climat principalement, couvert forestier, etc.) », avance la firme. Avant de conclure : « Nos prélèvements en amont n’ont pas d’impacts significatifs sur le débit des sources de front de coulée en aval et permettent à l’aquifère de se renouveler. »

    Depuis la parution de la thèse de Simon Rouquet, il y a près de huit années, et en dépit de la communication récurrente du minéralier français, le lien entre les prélèvements de Danone et les ressources en eau de la région est clairement prouvé. Et bien connu des services de l’État, qui ont accordé une nouvelle autorisation de pomper à Danone, valable jusqu’en 2032, seulement deux ans après la publication doctorale.

    C’est un fonctionnaire d’une agence environnementale publique qui fut, à l’époque, rapporteur de la thèse de Simon Rouquet. Ce haut fonctionnaire est, entre-temps, passé avec armes et bagages chez… #Danone_Waters.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/250920/volvic-danone-puise-et-epuise-l-eau
    #eau #eau_potable #France #multinationales #extractivisme #forages #sécheresse #Puy-de-Dôme #eau_minérale #Gargouilloux #pisciculture #pénurie_d'eau #dérogation #Clairval #galerie_du_Goulet

    Une enquête signée @wereport

    • Wasser marsch !

      In der Werbung wirkt das Land bei Volvic wie eine grüne Idylle. Uralte Vulkane prägen die Landschaft rund um die kleine Gemeinde in der zentralfranzösischen Auvergne, aus der das Volvic-Mineralwasser stammt. Der Konzern Danone lässt es hier fördern, in Flaschen füllen und verspricht dabei, stets „nur so viel Wasser zu entnehmen, wie es die Natur erlaubt“.

      Viele Bewohner der Gegend bezweifeln das. Seit Jahren beobachten Bürger und Bauern, dass die Bäche weniger Wasser führen. An nur einem Tag, so hat eine Bürgerinitiative gezählt, hätten mehr als 200 Lastwagen und einige Dutzend Güterzüge die Abfüllanlage von Danone in Volvic verlassen. Ihre Ladung: Mineralwasser in Plastikflaschen für die Supermärkte der Welt.

      https://www.wereport.fr/articles/wasser-marsch-die-zeit

      #paywall, mais...

      Notre enquête #Volvic avec @dergrenzgaenger est l’article le plus lu et le plus partagé de la journée sur @zeitonline avec près de 150 000 vues

      https://twitter.com/alexabdelilah/status/1310231866499366914

    • À Volvic, la justice s’interroge sur les prélèvements d’eau de Danone

      L’État a-t-il accordé trop de droits de pompage à Danone sur les eaux de Volvic ? Ce 25 mai, la #justice a demandé de nouvelles expertises pour déterminer la #responsabilité de l’État dans l’asséchement d’une #pisciculture à Volvic.

      La justice demande des investigations supplémentaires. À Volvic, la #multinationale Danone est accusée d’avoir asséché une des plus vieilles piscicultures d’Europe pour remplir ses bouteilles. Mercredi 25 mai, le #tribunal_administratif de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) a ordonné une première expertise en géologie et hydrologie, pour déterminer si, oui ou non, il y a eu une réduction du débit des sources de l’élevage de poissons — et si cela est lié aux prélèvements de Danone. Une seconde expertise, économique celle-ci, devrait évaluer le préjudice lié à la perte d’exploitation et à la détérioration de la pisciculture.

      Petit retour en arrière. Les #eaux_souterraines de Volvic surgissent en surface à #Saint-Genès-l’Enfant, là où se situe le domaine de la famille d’#Édouard_de_Féligonde. « Les Romains nommaient cet endroit “les sources du dragon”, tant l’eau jaillissait dans un vacarme assourdissant », raconte le notable, propriétaire d’élevage de poissons. En 1927, date des premières mesures, le débit s’établissait à 470 litres par seconde. Mais depuis quelques années, la ressource s’est amoindrie, jusqu’à se tarir. À l’été 2017, les gérants de la pisciculture ont vu les bassins se vider et des centaines de poissons mourir. L’élevage a fermé en octobre 2018.

      Pour Édouard de Féligonde, le responsable est tout indiqué : « Le débit de ma source a été divisé par dix. Dans le même temps, les prélèvements de Danone n’ont fait qu’augmenter. » En 1965, la Société des eaux de Volvic puisait 15,6 litres par seconde. Depuis 2014, l’entreprise, rachetée par Danone, est autorisée par l’État à pomper 88,6 litres par seconde, soit 2,7 millions de mètres cubes par an. Le groupe agroalimentaire assure limiter ses prélèvements — 2,33 millions de mètres cubes en 2020 —, et économiser l’eau au maximum. « Nous avons investi 25 millions d’euros pour réduire notre consommation de 350 millions de litres, nous affirme le service presse du groupe. Volvic prend le sujet avec beaucoup d’attention. »

      « Après l’État, j’attaquerai Danone »

      Insuffisant, selon Édouard de Féligonde, qui a donc attaqué les #autorisations_préfectorales. Il est soutenu dans sa démarche par le collectif Eau bien commun 63 : « Danone et #Limagrain, les deux plus gros “préleveurs” privés du département, ne sont quasiment pas limités dans leurs #prélèvements en période de #sécheresse », dénonce Laurent Campos-Hugueney, porte-parole du collectif et maraîcher près de Volvic. Le préfet a en effet délivré une #autorisation_annuelle : Danone peut ainsi, en théorie, pomper autant qu’il veut en #été, tant qu’il ne dépasse pas la limite annuelle de 2,7 millions de mètres cubes. Les consommateurs s’hydratant plus en période chaude, le groupe embouteille effectivement plus en été qu’en hiver.

      Pour l’État, le coupable n’est pas Danone, mais le #changement_climatique : « Les conditions environnementales, et notamment la sécheresse, ont conduit à une baisse de la recharge de l’#aquifère sans qu’elle puisse être imputée à notre sens aux prélèvements réalisés en aval par la Société des eaux de Volvic », indiquait le préfet lors de son audition par des députés, en 2021. Autrement dit : s’il y a moins d’eau sous Volvic, c’est avant tout parce qu’il a moins plu et fait plus chaud. La température moyenne à l’année dans le Puy-de-Dôme a ainsi augmenté de 2,2 °C depuis les années 1980, diminuant la capacité de la nappe phréatique de 30 %.

      « On est dans une situation de #raréfaction de l’eau liée au changement climatique, dit Laurent Campos-Hugueney. Avant, les prélèvements massifs de Danone passaient inaperçus, maintenant, ce n’est plus le cas. » Pour le maraîcher, il est donc grand temps que la multinationale se sert la ceinture. « On défend des intérêts citoyens pour un usage de l’eau vraiment partagé, souligne-t-il. Mais cette revendication, pourtant légale, n’est pas prise en compte par l’État, il faut aller au tribunal pour espérer se faire entendre. » La mobilisation des citoyens semble avoir porté ses premiers fruits : en septembre dernier, le directeur du groupe à Volvic et le préfet du Puy-de-Dôme ont signé un « plan d’utilisation rationnelle de l’eau ». Volvic s’est engagé à prélever 10 % d’eau en moins sur l’année, avec une attention particulière en cas de sécheresse.

      Comme M. de Féligonde, le collectif #Eau_bien_commun_63 espère que la décision du tribunal de Clermont-Ferrand permettra d’ouvrir le débat sur l’avenir de l’eau sur le territoire. « Avec l’eau de Volvic, on pourrait remettre en culture 3 600 hectares de terres, qui étaient jadis couvertes de potagers et de vergers, dit M. Campos-Hugueney. Plutôt que de profiter aux #multinationales, cette eau pourrait permettre de créer des emplois paysans et de soutenir notre résilience alimentaire. »

      Le propriétaire d’élevage de poissons, Édouard de Féligonde, s’est dit déterminé à ne pas en rester là : « Mon nom provient de “felix onda”, l’eau féconde... autant vous dire que je n’accepte pas de me retrouver à marée basse, soutient-il à Reporterre. Après l’État, j’attaquerai Danone. »

      https://reporterre.net/A-Volvic-la-justice-s-interroge-sur-les-prelevements-d-eau-de-Danone

  • #polinisation #abeilles
    Le #miel #authentique, un aliment en voie de #raréfaction
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2019/05/29/le-miel-authentique-un-aliment-en-voie-de-rarefaction_5469237_4355770.html

    « En France, on est passés d’une production de 32 000-33 000 tonnes en 1995 à 9000 tonnes en 2016, affirme Henri Clément, porte-parole de l’Union nationale de l’#apiculture française (UNAF). Depuis 1995 et l’apparition des insecticides néoticotinoïdes, environ 300 000 ruches périssent chaque année et doivent être reconstituées. Les #mortalités sont passées de 5 à 30 % de nos jours. »