#rayon_cosmique

  • On sait désormais d’où viennent les rayons cosmiques

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/09/24/on-sait-desormais-d-ou-viennent-les-rayons-cosmiques_5190466_1650684.html

    En Argentine, les 1 600 piscines de l’Observatoire Pierre-Auger ont capté des pluies de particules de très haute énergie. Leur origine extra-galactique a pu être prouvée.

    Curieuse installation scientifique que ce laboratoire Pierre-Auger : 1 600 piscines installées selon un motif régulier dans l’ouest de l’Argentine. Répartis sur 3 000 km2, ces bassins d’eau pure et les détecteurs qui les équipent attendent des visiteurs célestes, les rayons cosmiques. Et en particulier les plus rares et les plus mystérieux d’entre eux, ceux qui disposent d’une énergie si phénoménale que le plus performant accélérateur de particules créé par l’homme, le LHC, fait figure de générateur de pichenettes à côté de ces puncheurs de l’espace, un million de fois plus puissants. Lorsqu’une de ces particules (protons ou noyaux d’atomes légers), voyageant à une vitesse proche de celle de la lumière, arrive sur Terre, sa collision avec les atomes de l’atmosphère produit une cascade de particules secondaires, un véritable Niagara car des milliards de particules finissent par doucher le sol.


    Dans la Pampa Amarilla argentine, une des 1600 « piscines » de l’observatoire Pierre-Auger, servant de détecteur de rayons cosmiques.

    Ce sont ces témoins indirects du rayonnement cosmique que guette depuis 2004 le laboratoire Pierre-Auger – qui porte le nom du scientifique français qui décrivit le premier ces gerbes en 1939. Dans une étude publiée le 22 septembre par Science, les quelque 400 chercheurs de 18 pays qui collaborent à ce projet livrent le résultat de treize ans d’observations et lèvent le coin du voile sur les mystères des rayons cosmiques à haute énergie dont on ignore tant l’origine – galactique ou extra-galactique – que le mécanisme qui les engendre. Etant électriquement chargées, ces particules sont en effet déviées en traversant le champ magnétique naturel qui baigne la Voie lactée, au point que déterminer d’où elles sont apparues revient un peu à vouloir deviner où est le Soleil quand on tâtonne en plein brouillard.

    Pourtant, en cumulant les données de 30 000 événements, les auteurs de l’étude ont fini par découvrir une sorte de direction préférentielle dans le ciel, une zone où le flux de rayons cosmiques est de 6 % plus élevé que si l’origine de ces particules était complètement uniforme. Surtout, comme l’explique l’un des co-auteurs de l’article, Antoine Letessier-Selvon, directeur de recherches au Laboratoire de physique nucléaire et des hautes énergies (CNRS-universités Paris-VI et Paris-VII), « la direction dans laquelle le flux est le plus intense se trouve quasiment à l’opposé du centre de la Voie lactée. C’est une preuve assez forte que ces rayons cosmiques ne proviennent pas de notre galaxie », ce qui tranche une longue bataille de plusieurs décennies entre astrophysiciens.


    Schéma décrivant la détection d’une pluie de particules engendrée par des rayons cosmiques par quatre « piscines » de l’observatoire Pierre-Auger.

    Reste encore à déterminer de quelle(s) galaxie(s) ces particules proviennent. Pour y parvenir, les bassins du laboratoire Pierre-Auger sont en train d’être équipés de nouveaux détecteurs. Mais cela ne résoudra pas pour autant le cœur de l’énigme : déterminer par quels mécanismes astrophysiques ces particules assez lourdes ont pu être accélérées au point d’approcher la vitesse de la lumière. Antoine Letessier-Selvon énumère les suspects : « fusions d’étoiles, collisions de galaxies, hypernovae... Quelles qu’elles soient, les sources sont des choses extrêmement violentes ».