#résistance

  • "Antiracistes dans la collaboration. Antisémites dans la résistance" par Simon Epstein - Février 2009
    http://www.licra.org/old/memoire-histoire/news/100-antiracistes-dans-la-collaboration-antisemites-dans-la-resistance-

    Le 12 février dernier, Barbara Lefebvre, co-présidente de la commission éducation et Philippe Benassaya, 1er Vice-président et président de la Commission Mémoire Histoire, ont reçu, à la Maison de l’Europe (Paris), l’historien franco-israélien Simon Epstein autour de son dernier ouvrage : Le paradoxe français. Ouvrage au sous-titre évocateur de ce paradoxe : « Antiracistes dans la collaboration. Antisémites dans la résistance ».

    http://www.licra.org/old/attachments/100_LICRA-Conference-Epstein-120209.pdf

    Simon Epstein :

    La signification profonde du phénomène

    Quand la #LICA se constitue à la fin des années 1920, elle recrute des Juifs et des non-Juifs. Quel est le secteur d’opinions français où on trouve le plus facilement de gens qui condamnent l’antisémitisme et qui vont rejoindre à la LICA ? Ce n’est pas l’extrême-droite, c’est la gauche humanitaire. La gauche humanitaire qui est aussi la #gauche #pacifiste. Ils sont près à aller avec Lecache et à dire « on est contre l’antisémitisme ». C’est pourquoi ils sont tellement nombreux. La LICA des années 1930 est une organisation pacifiste avec plusieurs sortes de #pacifismes : le pacifisme modéré, style Luchaire et le pacifisme d’extrême-gauche. Une corrélation très forte existe entre pacifisme et antiracisme. Et les dirigeants de la LICA le disent. Cette harmonie entre pacifisme et #antiracisme se brise en 1933, plaçant la LICA devant un dilemme absolument catastrophique.

    1933, c’est la prise de pouvoir par Hitler en Allemagne. Le pays avec qui on veut faire la paix - car les Français pacifistes veulent faire la paix avec l’Allemagne - cette Allemagne-là est devenue nazie. Pour la première fois, un conflit entre deux ordres de valeur apparaît : l’amour de la #paix et l’amour des Juifs. Une partie choisit l’amour de la paix comme Luchaire qui quitte la LICA, et se fâche avec Lecache. Victor Margueritte aussi quitte la LICA et dit : « C’est peut-être vrai que 600 000 Juifs en Allemagne sont malheureux, mais ce n’est rien comparé à ce qu’impliquerait une nouvelle #guerre franco-allemande, c’est-à-dire des millions de morts en Allemagne, des millions de morts en France. Je dis à mes amis juifs calmez-vous avec votre histoire d’antisémitisme en Allemagne ». C’est un choix délibéré : la paix vaut mieux que l’antiracisme.

    [...]

    Les antisémites dans la Résistance
    J’ai fait ensuite une recherche complémentaire en me posant la question suivante : « si tant d’antiracistes passent le Rubicon, que vont faire les antisémites des années 1930 ? ». J’ai opéré avec la même méthodologie : établir la base documentaire de tous les gens qui disent du mal des Juifs, puis voir ce qu’ils font pendant la guerre. Ma conclusion : beaucoup sont passés dans la #Résistance.

    [...]

    Le poids des antisémites dans la résistance est aussi logique que le poids des antiracistes dans la collaboration. Pourquoi ? Car l’ #antisémitisme français s’est formé parallèlement à l’ #anti-germanisme. On était à la fois contre les Allemands et contre les Juifs, c’est cela le maurrassisme qui caractérise deux ou trois générations d’antisémites français. Une partie de l’extrême-droite va être tentée par le nazisme et ses « aspects positifs », mais une partie de l’extrême-droite va être effrayée par le fait que le nazisme ait reconstitué la puissance allemande. Toute une fraction de l’extrême-droite voit dans le nazisme un ennemi à détruire, non pour des questions idéologiques mais parce que le nazisme redonne à l’Allemagne ce que les Français pensaient lui avoir retiré à Versailles en 1919, à savoir sa puissance militaire, menace obsédante pour la France. Une part significative de l’extrême- droite française des années 1930 est antiallemande et le reste quand les Allemands conquièrent la France. Ces hommes et ces femmes se jettent sans hésiter dans la résistance avec #De_Gaulle. De Gaulle lui-même appartient à cette tendance #nationaliste qui déteste les Allemands.