• L’asile climatique proposé par l’Australie aux habitants des Tuvalu suscite la controverse
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    L’asile climatique proposé par l’Australie aux habitants des Tuvalu suscite la controverse
    Par Isabelle Dellerba(Sydney, correspondance)
    Publié hier à 08h00, modifié hier à 17h06
    Ce pacte aurait pu représenter un modèle de bon voisinage. Vendredi 10 novembre, l’Australie et l’Etat du Tuvalu, dans le Pacifique Sud, ont dévoilé les termes d’un accord historique qui prévoit que Canberra s’engage à offrir l’asile climatique aux 11 000 citoyens du petit archipel à fleur d’eau, menacé d’être englouti par les flots avant la fin du siècle. Mais le texte, qui doit encore être ratifié par les deux parties pour entrer en vigueur, suscite des controverses dans cette région du monde où la crise climatique représente une menace existentielle pour tous les Etats insulaires de faible altitude.
    Son volet migratoire ne pose pas particulièrement question. L’accord prévoit que, chaque année, 280 citoyens tuvaluans se verront offrir un visa spécial qui leur permettra de « vivre, étudier et travailler » en Australie, mais aussi d’« accéder aux systèmes éducatifs, de santé et aux principaux dispositifs de soutien aux revenus et à la famille dès leur arrivée ». Le gouvernement travailliste dirigé par Anthony Albanese a ainsi répondu à la demande de l’Etat polynésien. « Nous voulons négocier des accords d’amitié avec des pays partageant nos valeurs, tels que les Fidji, la Nouvelle-Zélande et l’Australie, pour que nos citoyens puissent y vivre sans renoncer à leur nationalité et y bénéficier des mêmes avantages socio-économiques que le reste de la population », expliquait récemment au Monde le ministre des finances et du changement climatique des Tuvalu, Seve Paeniu.
    Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Kioa, une île refuge pour les habitants des Tuvalu menacés par la montée des eaux
    Il s’agit du premier accord bilatéral conclu spécifiquement axé sur la mobilité climatique. Il a été salué par le chef du gouvernement de l’archipel, Kausea Natano, comme « une véritable lueur d’espoir » pour son pays, composé de récifs coralliens et d’atolls d’une hauteur moyenne de deux mètres au-dessus de la mer et déjà fréquemment inondés par des vagues-submersion. « Pour les Tuvaluans, ce pacte, c’est un peu comme un masque à oxygène dans un avion. Vous espérez qu’il ne tombe jamais, mais si vous en avez besoin, vous êtes très content qu’il soit là », abonde Jane McAdam, directrice du Centre Kaldor pour le droit international des réfugiés, qui évoque un texte « fondateur ».
    Le problème réside dans l’autre volet de l’accord. Après l’article 3, consacré à « la mobilité humaine dans la dignité », l’article 4 porte sur les questions de sécurité. Si l’Australie s’y engage à venir en aide aux îles Tuvalu en cas d’agression militaire, de catastrophe naturelle ou encore de pandémie, elle obtient aussi son mot à dire sur « tout partenariat, accord ou engagement » que l’archipel voudrait conclure avec d’autres Etats ou entités sur les sujets de sécurité et de défense. « Ces questions comprennent, mais ne se limitent pas à, la défense, la police, la protection des frontières, la cybersécurité et les infrastructures critiques, y compris les ports, les télécommunications et les infrastructures énergétiques », énonce le texte.« En échange de ces 280 places par an, l’Australie a obtenu un pouvoir de veto sur nos priorités de sécurité. Elle a abusé de sa position de force, c’est injuste. Et notre population n’a même pas été consultée », déplore notamment Maina Talia, un militant pour le climat tuvaluan reconnu sur la scène régionale. Les pays occidentaux « traitent les nations insulaires comme des pions pour contrer l’influence de la Chine », a dénoncé le Global Times, un quotidien proche du pouvoir chinois, le 14 novembre.
    Dans ce Pacifique Sud, où Pékin et Washington se livrent une lutte d’influence sans merci, Canberra a donné l’impression d’être davantage motivé par ses intérêts stratégiques que par une volonté sincère de soutenir son minuscule voisin rongé par l’océan. Cet accord est d’autant plus critiqué que l’Australie, troisième plus grand exportateur de combustibles fossiles au monde, n’a rien du bon élève en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. « Le nouveau pacte signé par l’Australie avec Tuvalu n’est qu’une solution de fortune qui n’aborde en rien la crise climatique alimentée par les combustibles fossiles », a dénoncé Lagi Seru, membre du bureau régional de Greenpeace, dans un communiqué publié le 11 novembre. Les Etats insulaires demandent à l’Australie, qui souhaite organiser la COP31, de renoncer à accorder de nouvelles licences pour l’exploitation du charbon, du pétrole et du gaz.
    Si ce pacte n’est pas perçu comme un modèle, il n’en demeure pas moins précieux pour le gouvernement des Tuvalu qui, face au risque de disparition, explore toutes les pistes possibles pour assurer l’avenir de sa population. Afin qu’elle puisse rester chez elle, il a élaboré un plan d’adaptation à long terme destiné à créer une terre, élevée et sûre, de 3,6 kilomètres carrés – l’Australie s’est engagée à l’aider sur ce projet. Le gouvernement des Tuvalu a également entrepris des démarches pour que l’ensemble de l’archipel soit reconnu comme un site du patrimoine mondial de l’Unesco et mieux protégé.
    Etant parfaitement conscient que ces efforts pourraient s’avérer insuffisants, il prépare aussi un futur sans terres émergées. Offrir un refuge à ses habitants était l’une de ses priorités. D’autre part, il a engagé des actions, au niveau juridique, pour que son Etat conserve, quoi qu’il arrive, une existence légale et sa souveraineté sur l’ensemble du territoire, y compris maritime. Enfin, il planche sur la création d’un Etat déterritorialisé, dans le monde virtuel, pour sauvegarder ses archives comme son patrimoine culturel, mais aussi pour que ses ressortissants, même s’ils sont dispersés dans des pays tiers, puissent continuer à bénéficier de services étatiques et restent des citoyens tuvaluans à part entière.

    #Covid-19#migrant#migration#australie#ilestuvalu#refugieclimatique#asileclimatique#etat#droit#souverainete

  • L’#errance des habitants de #Gaza dans leur ville transformée en champ de #ruines

    Près de la moitié des bâtiments de la métropole, qui comptait plus d’un million d’habitants avant la guerre, a été détruite ou endommagée par les #bombardements israéliens lancés en #représailles à l’attaque du Hamas le 7 octobre.

    Gaza est une ville brisée. Un géant aveugle semble avoir piétiné des pans entiers de cette métropole de 1,2 million d’habitants. Depuis les massacres commis par le Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël, les bombardements indiscriminés de l’armée israélienne l’ont ruinée pour une bonne part. L’armée cherche un ennemi qui se cache au beau milieu des civils, mais elle punit aussi une cité entière, jugée, dès les premiers jours, coupable des crimes du Hamas par les autorités israéliennes.

    Des lointaines banlieues nord de la #ville de Gaza, il ne reste que des carcasses calcinées, arasées par les frappes qui ont préparé l’invasion terrestre du 28 octobre. En trois semaines, les blindés et l’infanterie se sont rendus maîtres de la moitié ouest de la principale cité de l’enclave, progressant lentement sous un appui aérien serré, qui a percé de nombreux cratères le long des boulevards de Rimal et aux alentours des hôpitaux. Des combats ont encore eu lieu, dimanche 19 novembre, dans le centre-ville de Gaza. L’armée israélienne a affirmé, lundi, continuer « à étendre ses opérations dans de nouveaux quartiers » , notamment à Jabaliya.

    Depuis vendredi 17 novembre, l’#infanterie avance vers les ruelles étroites de la #vieille_ville, le centre et la moitié orientale de Gaza. Qu’en restera-t-il dans quelques semaines, lorsque Israël proclamera que le Hamas en a été chassé ? Dimanche, 25 % des zones habitées de la ville et de sa région nord avaient déjà été détruites, estime le ministère des travaux publics de l’Autorité palestinienne.

    Le Bureau des Nations unies pour la coordination des affaires humanitaires avance qu’au moins 58 % des habitations de l’ensemble de l’enclave sont détruites ou endommagées. L’étude de photographies satellitaires, à l’aide d’un logiciel développé par le site Bellingcat, permet d’estimer, avec prudence, que de 40 % à 50 % du bâti de la ville de Gaza avaient été détruits ou endommagés au 16 novembre – et jusqu’à 70 % du camp de réfugiés d’Al-Chati, sur le front de mer.

    Errance aux quatre coins de la ville

    Les autorités de Ramallah dressent des listes sans fin : elles dénombrent 280 institutions d’éducation et plus de 200 lieux de culte endommagés. Tous les hôpitaux de Gaza sont à l’arrêt, sauf un. Les réseaux de distribution d’eau et d’électricité sont inutilisables. Un quart des routes de l’enclave ont subi des dommages.

    « Gaza est d’ores et déjà détruite. Ce n’est plus qu’une ville fantôme, peuplée de quelques centaines de milliers de déplacés [800 000, selon l’Autorité palestinienne] . Les Israéliens ont voulu punir l’une des plus anciennes cités du monde, en frappant ses universités, ses librairies, ses grands hôtels, son parlement et ses ministères, déplore Ehab Bsaiso, ancien ministre de la culture de l’Autorité palestinienne . Le 13 novembre, une immense professeure de musique, Elham Farah, a été blessée en pleine rue par un éclat de shrapnel. Elle s’est vidée de son sang sur le trottoir, et elle est morte. C’est toute une mosaïque sociale, une culture qu’ils effacent, et bientôt les chars vont avancer vers le Musée archéologique et la vieille église orthodoxe Saint-Porphyre, dont une annexe a été bombardée dès le 19 octobre. » Issu d’une vieille famille gazaouie, ce haut fonctionnaire suit par téléphone, de Bethléem, dans la Cisjordanie occupée, l’errance de ses proches aux quatre coins de leur ville natale et de l’enclave sous blocus, le cœur serré.

    Depuis vendredi, l’armée bombarde puissamment le quartier de Zeitoun, dans le centre-ville. Oum Hassan y est morte ce jour-là. Les trois étages de sa maison se sont écroulés sur ses onze enfants, sur ses petits-enfants et sur des membres des familles de son frère et de son mari. Ils avaient trouvé refuge chez cette parente de 68 ans, après avoir fui des zones pilonnées plus tôt. « Ils sont tous morts. Ma sœur, son mari, leurs enfants, leurs petits-enfants, en plus des voisins qui étaient réfugiés chez eux » , craignait, le 18 novembre, Khaled [un prénom d’emprunt], le frère cadet d’Oum Hassan, exilé en Europe et informé par des voisins qui fouillent les décombres. « On a réussi à extraire deux ou trois corps, des enfants. Les autres sont encore sous les gravats. Il y avait environ 80 personnes dans la maison. Il y a un enfant survivant, peut-être deux. »

    Israël interdit aux journalistes d’entrer dans Gaza pour constater par eux-mêmes ces destructions. Le ministère de la santé de Gaza, contrôlé jusqu’au début de la guerre par le Hamas, n’a pas encore publié lui-même un bilan de cette frappe : les réseaux téléphoniques se rétablissent lentement depuis vendredi, après une énième coupure complète. Depuis le 7 octobre, il estime qu’au moins 13 000 personnes ont péri sous les bombardements.

    « On marche sur nos voisins, sous les décombres »

    Depuis le début de cette guerre, le 7 octobre, Khaled maintient par téléphone un lien ténu entre ses six frères et sœurs encore en vie, éparpillés dans l’archipel de Gaza. Il demande que leurs noms soient modifiés, et que leurs abris ne soient pas identifiables. « Ils m’interrogent : “C’est quoi, les nouvelles ? Tu entends quoi ?” Parfois, je ne sais plus quoi leur dire et j’invente. Je prétends qu’on parle d’un cessez-le-feu imminent, mais je fais attention de ne pas leur donner trop d’espoir. »

    Le centre du monde, pour cette fratrie, c’est la maison de leur défunte mère, dans le quartier de Chajaya. Le fils aîné, Sufyan, vit encore dans un bâtiment mitoyen. A 70 ans, il est incapable de le quitter. Il a subi plusieurs opérations cardiaques : « Son cœur marche sur batterie. Il mourra s’il a une nouvelle crise », craint son cadet, Khaled. Trois de ses enfants ont choisi de demeurer à ses côtés, plutôt que de fuir vers le sud de l’enclave, où les chars israéliens ne sont pas encore déployés.

    D’autres parents les ont rejoints dans ce quartier qui n’est plus que l’ombre de lui-même. Dès les premiers jours, l’armée israélienne a bombardé cette immense banlieue agricole, qui s’étend à l’est de Gaza, jusqu’à la frontière israélienne. Les représentants de ses vieilles familles, les clans Faraj, Jandiya ou Bsaiso, menés par le mokhtar(juge de paix) Hosni Al-Moghani, ont exhorté leurs voisins à évacuer, par textos et en passant de porte en porte.

    Ils craignaient de revivre la précédente invasion terrestre israélienne, en 2014, durant laquelle l’armée avait rasé Chajaya. Au-delà du mur israélien, tout près, s’étendent les kibboutz de Nahal Oz et de Kfar Aza, où le Hamas a semé la mort le 7 octobre. Ces communautés, longtemps agricoles, exploitaient les terres dont les grandes familles de Chajaya ont été expropriées en 1948, à la naissance de l’Etat d’Israël.

    Derrière la maison natale de Khaled, un pâté de maisons a été aplati par les bombes israéliennes, fin octobre. « Le feu et la fumée sont entrés jusque chez nous, la maison a vibré comme dans un tremblement de terre. Les portes et les fenêtres ont été arrachées » , lui a raconté l’une de ses nièces. Les enfants épuisés ne se sont endormis qu’à l’aube. Le lendemain, Sufyan, le patriarche, pleurait : « On marche sur nos voisins, sous les décombres. »Ce vieil homme se désespère de voir ces rues s’évanouir sous ses yeux. Il ressasse ses souvenirs. L’antique mosquée voisine, celle de son enfance, a été endommagée en octobre par une autre frappe, et le vieux pharmacien des environs a plié bagage, après que son échoppe a été détruite.

    Morne succession de blocs d’immeubles

    Dans les années 1970, du temps de l’occupation israélienne, le chemin de fer qui reliait Gaza à l’Egypte courait encore près de ces ruines. « Enfants, on montait sur le toit de la maison quand on entendait arriver les trains israéliens, et on comptait les blindés camouflés qu’ils transportaient vers le Sinaï » , se souvient Khaled. Aujourd’hui, ses petits-neveux regardent passer à pied les cohortes de Gazaouis qui quittent leur ville par milliers. Sur la route Salah Al-Din, chaque jour entre 9 heures et 16 heures depuis le 9 octobre, ils agitent des drapeaux blancs devant les blindés que l’armée israélienne a enterrés dans des trous de sable, dans une vaste zone arasée au sud.

    Début novembre, un second frère, Bassem, a rejoint la maison maternelle, après des semaines d’errance. Cet ancien promoteur immobilier, âgé de 68 ans, vivait à Tel Al-Hawa, une morne succession de blocs d’immeubles aux façades uniformes et poussiéreuses, qui borde la mer à l’extrémité sud-ouest de la ville de Gaza. Dès les premiers jours de bombardements, une frappe a tué son voisin, un avocat. Bassem a quitté immédiatement les lieux, avec sa trentaine d’enfants et de petits-enfants. Ils l’ignoraient alors, mais l’armée préparait son opération terrestre : les blindés qui ont pénétré l’enclave le 28 octobre ont rasé un vaste espace au sud de Tel Al-Hawa, pour en faire leur base arrière.

    Bassem souffre d’un cancer du côlon. Il transporte son « estomac »(un tube de plastique greffé) dans un sac. Marcher lui est difficile. Epaulé par ses enfants, il s’est établi chez des proches, plus près du centre, aux environs du cinéma Nasser, fermé au début des années 1980. A deux rues de son abri, il a retrouvé l’un des plus vieux parcs de Gaza, une merveille fermée le plus clair de l’année, dont seuls de vieux initiés gardent le souvenir. Puis l’armée a progressé jusqu’à la place Al-Saraya, un complexe administratif, une ancienne prison de l’occupant israélien. Bassem et les siens ont quitté les lieux.

    Communauté de pêcheurs

    Le propriétaire d’une vieille camionnette Volkswagen a bien voulu l’embarquer vers la maison de sa mère à Chajaya, avec sa nièce, une jeune photographe qui aurait dû se rendre en Europe, le 10 octobre, invitée pour une résidence d’artiste. Les autres se sont séparés. Plusieurs enfants de Bassem ont gagné le sud de l’enclave. D’autres ont rejoint leur tante, Oum Hassan, dans sa maison de Zeitoun, où ils ont été bombardés le 17 novembre.

    S’il est un lieu aujourd’hui méconnaissable de Gaza, c’est son front de mer. La nuit, les pêcheurs du camp de réfugiés d’Al-Chati ont tremblé sous le roulement des canons des bateaux de guerre israéliens, au large. Parmi eux, selon Musheir El-Farra, un activiste qui tournait un film sur cette communauté de pêcheurs avant la guerre, Madlen Baker fut l’une des premières à quitter ce labyrinthe de ruelles étroites, construit pour des réfugiés chassés de leurs terres en 1948, à la naissance d’Israël, dont les descendants forment 70 % de la population de Gaza.

    Enceinte de sa troisième fille, Madlen a fui la rue Baker, où la famille de son mari, Khaled, installait, avant la guerre, de longues tables mixtes, pour déguster des ragoûts épicés de crevettes aux tomates, les jours de fête. Elle a renoncé à se réfugier dans un village de tentes, dans les cours de l’hôpital Al-Shifa tout proche. Avec une quarantaine de voisins, tous parents, la jeune femme a rejoint Khan Younès, au sud. Elle y a accouché une semaine plus tard, et a juré que sa fillette aurait un sort meilleur que le sien.

    A 31 ans, Madlen est l’unique pêcheuse de la communauté d’Al-Chati, métier d’hommes et de misère. Pour nourrir sa famille, elle a pris charge, à 13 ans, de la barque de son père, gravement malade. Elle a navigué dans les 6 à 15 milles nautiques que la marine israélienne concède aux pêcheurs gazaouis, qui éblouissent et font fuir le poisson à force de serrer les uns contre les autres leurs bateaux et leurs lampes. Elle a craint les courants qui poussaient son embarcation au-delà de cette zone, l’exposant aux tirs de l’armée.

    « Le port a été effacé »

    Elle a envié les grands espaces des pêcheries de l’Atlantique, qu’elle observait sur les réseaux sociaux. « Je courais après les poissons et les Israéliens me couraient après », disait-elle avant la guerre, de sa voix profonde et mélodieuse, devant la caméra de Musheir El-Farra. Ce dernier l’a retrouvée à Khan Younès. Madlen ignore si sa maison est encore debout, mais elle sait que son bateau gît au fond de l’eau, dans les débris du port de Gaza.

    « Même si la guerre finissait, on n’aurait plus une barque pour pêcher. Le port a été effacé. Les bâtiments, le phare, les hangars où nous entreposions nos filets et nos casiers, tout a disparu », énumère son ami et l’un des meneurs de leur communauté, Zakaria Baker, joint par téléphone. Les grands hôtels et les immeubles qui donnent sur le port sont en partie éventrés. L’asphalte de l’interminable boulevard côtier a été arraché par les bulldozers israéliens, comme celui des rues aérées qui, avant la guerre, menaient les promeneurs vers la rive.

    Seule la mer demeure un repère stable pour Zakaria Baker : « Tous mes voisins ont été chassés par les bombardements, qui ont presque détruit Al-Chati, surtout la dernière semaine avant l’invasion du camp. » M. Baker s’est résolu à partir à la veille de l’entrée des chars dans Al-Chati, le 4 novembre. Il a mené un convoi de 250 voisins et parents vers le sud, jusqu’à Khan Younès. Ce fier-à-bras moustachu, plutôt bien en chair avant la guerre, est arrivé émacié, méconnaissable, dans le sud de l’enclave.

    De son refuge de fortune, il assure qu’il retournera à Al-Chati après la guerre. Mais nombre de ses concitoyens n’ont pas sa détermination. « Les gens ont perdu leurs maisons, leurs enfants. Gaza est une âme morte. Beaucoup d’habitants chercheront à émigrer à l’étranger après la guerre. Sauf si une force internationale vient protéger la ville, et prépare le terrain pour que l’Autorité palestinienne en prenne le contrôle. Mais il faudra encore au moins cinq ans et des milliards d’euros pour rendre Gaza de nouveau vivable » , estime l’analyste Reham Owda, consultante auprès des Nations unies.

    « Ce qui a été le plus détruit, ce sont les gens »

    A 43 ans, Mme Owda résidait, avant le conflit, du joli côté d’un boulevard qui sépare le pauvre camp d’Al-Chati du quartier bourgeois de Rimal. Son défunt père, médecin, a fondé le département de chirurgie plastique du grand hôpital voisin Al-Shifa. Il a aussi bâti la maison que Reham a fuie dès le 13 octobre avec sa mère, ses quatre frères et sœurs, et leurs enfants. Sa famille s’est établie durant une semaine à Khan Younès, parmi des milliers de réfugiés, dans les odeurs d’ordures et d’égouts. Manquant de nourriture, ils ont décidé de retourner à Gaza. « Chez nous, nous avions au moins des boîtes de conserve, du gaz et un puits dans le jardin de nos voisins pour l’eau de cuisson » , dit Reham.

    Ils y ont passé dix-sept jours, calfeutrés dans la maison, jusqu’à ce que les chars encerclent l’hôpital. Le 8 novembre, des balles ont ricoché sur leur balcon. « Une boule de feu » , dit-elle, s’est abattue non loin. Un mur d’enceinte s’est écroulé dans leur jardin. La famille a repris le chemin de l’exil, vers le sud. « C’était comme un film de zombies, d’horreur. Des gens erraient sur les boulevards sans savoir où aller. J’ai vu des morceaux de cadavres en décomposition, qui puaient. Mon frère poussait le fauteuil roulant de ma mère, tout en portant son fils et un sac. Quand j’ai voulu m’asseoir au milieu d’un boulevard, pour me reposer, un tir a retenti et je suis repartie. »

    Depuis lors, l’armée israélienne a pris le contrôle de l’hôpital Al-Shifa. Elle a affirmé, dimanche 19 novembre, y avoir découvert un tunnel du Hamas, menant à un centre de commandement. Pressant plusieurs centaines de malades d’évacuer les lieux, elle a aussi permis, dimanche, l’évacuation de 31 nouveau-nés, prématurés en danger de mort – quatre autres étaient décédés auparavant.

    Mme Owda craint d’être bientôt contrainte par l’armée de revenir une seconde fois dans sa ville natale, à Gaza. « Je crois que d’ici à la fin du mois, si Israël contrôle toute la cité, l’armée demandera aux habitants de revenir, puis elle pourra poursuivre son opération terrestre dans le Sud. » Samedi 18 novembre, le ministre de la défense, Yoav Gallant, a indiqué que les soldats s’y lanceraient bientôt à la poursuite des chefs du Hamas.

    « Ce qui a été le plus détruit à Gaza, ce sont les gens. Je ne les reconnais plus. Mon voisin est venu vérifier l’état de sa maison récemment. Il pesait 120 kilos avant la guerre, il en a perdu trente en six semaines » , s’épouvante le photographe Mohammed Al-Hajjar, joint par téléphone le 17 novembre. Ce barbu trentenaire, au rire rocailleux de fumeur, réside dans la rue Al-Jalaa, au nord de chez Owda, avec trente parents : ses frères et leurs familles. Le père de son épouse, Enas, a été tué dans un bombardement au début de la guerre.

    Les trésors du verger

    « Nous mangeons une fois par jour du riz, du pain ou une soupe. Nous, les adultes, nous pouvons survivre avec un biscuit par jour, mais pas nos enfants. Nous espérons que la guerre finisse et de ne pas être forcés de boire de l’eau polluée » , dit-il. Depuis le début de la guerre, Mohammed échange régulièrement sur WhatsApp avec deux amies, l’une à Jérusalem, l’autre, réfugiée dans le sud de Gaza. Mardi 14 novembre au matin, il leur écrivait que la pluie tombait sur Gaza depuis une heure : « Les rues sont pleines de boue, nos fenêtres brisées laissent entrer l’eau, mais je remercie Dieu pour cette pluie bienfaisante. » Il envoyait peu après une photographie de sa cuisine, où des grenades, des clémentines, des citrons et des oranges dégorgeaient de grandes bassines d’aluminium : des taches lumineuses dans l’air gris de Gaza.

    La veille, Mohammed avait tenu une promesse faite à son fils de 7 ans, Majed, et à sa cadette, Majdal, âgée de 2 ans. Il a parcouru la ville à ses risques et périls pour rejoindre un verger qui appartient à sa famille. Il en a rapporté ces fruits, véritables trésors, dans des sacs en plastique gonflés à ras bord. « Nos oliviers et nos goyaviers ont été ravagés par le bombardement d’une maison, en face du jardin. Il y a eu aussi des combats au sol, pas loin. Nos canards et nos moutons en ont profité pour s’échapper » , écrivait-il alors, par texto, à ses deux amies .Mohammed l’a regretté : sa famille aurait eu bien besoin de cette viande.

    Plusieurs fois par semaine, lorsque son téléphone est près de s’éteindre, Mohammed dit un dernier « adieu » à ses amies. Puis il trouve le moyen de le recharger, sur une batterie de voiture à laquelle des voisins branchent une douzaine de mobiles. Il rentre alors embrasser son épouse, dans le salon neuf du rez-de-chaussée, où elle lui interdisait de traîner avant la guerre, de peur qu’il le salisse. Il monte quatre à quatre les escaliers jusqu’au sixième étage, où le réseau téléphonique est meilleur. Là-haut, le jeune homme filme les éclats des bombardements, la nuit, dans une ville sans électricité que seuls les incendies éclairent, et où les blindés israéliens circulent tous feux éteints, lâchant parfois une fusée éclairante.

    Au matin, Mohammed raconte ses rêves à ses amies sur WhatsApp, et leur demande des nouvelles de la progression de l’armée. C’est lui qui leur avait annoncé, les 7 et 8 octobre, la destruction par les bombes israéliennes des grands immeubles du centre-ville, les tours Palestine, Watane, Al-Aklout et Alimane ; celle du plus moderne centre commercial de la ville, Le Capital, et les frappes méthodiques sur les demeures des responsables politiques du Hamas. Mais il sort de moins en moins. Le photographe rassemblait encore son courage afin de photographier, pour le site britannique Middle East Eye, l’hôpital Al-Shifa, avant son invasion par l’armée. Aujourd’hui, il a faim : il envoie des images des épiceries détruites de la rue Al-Jalaa, et d’une longue rangée de réfrigérateurs vides dans un supermarché voisin.

    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/20/l-errance-des-habitants-de-gaza-dans-leur-ville-transformee-en-champ-de-ruin

    #guerre #IDPs #déplacés_internes #réfugiés #destruction #7_octobre_2023 #armée_israélienne #cartographie #visualisation

  • Joint declaration: Commemoration of the 24 November 2021 shipwreck


    EN et FR

    Two years after the shipwreck of 24 November 2021, as injustice and deaths at the border continue, we stand together to call for a world free from border violence.

    On 24 November 2021, at least 33 people in a dinghy tried to reach the United Kingdom from the coast of Dunkirk. The 33 people came mainly from Iraqi Kurdistan, but also from Afghanistan, Ethiopia, Iran, Egypt, Somalia, and Vietnam.

    Three hours into the Channel crossing, the boat found itself in distress. At 1:48 am, passengers managed to make contact with the Gris-Nez Regional Monitoring and Rescue Centre (“CROSS”), which coordinates rescue operations on the French side of the border. Although the boat was located in French territorial waters, the CROSS refused to send help.

    Despite repeated calls from various people on board, between 1:48am and 4:34am, neither British rescue services, nor French rescue services launched any operation to rescue them. Worse still, at 4.16am, the CROSS even went so far as to dissuade a tanker from intervening to rescue the people who were drowning. It was only 12 hours later that the inflatable boat was found by a fishing boat. At least 27 people died that night in the icy waters of the English Channel.

    A few days after the shipwreck, two survivors testified about how the rescue services had abandoned them at sea with impunity. In November 2022, Le Monde revealed the content of the unbearable exchanges between the shipwreck victims and the CROSS. The shipwrecked passengers were treated with cynicism and international laws governing rescue at sea were disregarded. A few weeks after the shipwreck, the organisation Utopia 56, with relatives of people who died, filed a complaint against French authorities for “involuntary manslaughter” and “failure to render assistance”. The nine military personnel from CROSS Gris-Nez and a French patrol boat interviewed as part of the judicial enquiry took responsibility for all the decisions taken on that terrible night, but do not believe they were at fault. Although the French government had promised an internal enquiry following the revelations in Le Monde, it never took place. On the contrary, the defendants have the support of their superiors, who tried to interfere in the judicial investigation, as revealed by telephone taps. An investigation for breach of confidentiality has been opened.

    A report published this month by the UK Department for Transport identified failings that led to the dinghy not being rescued by HM Coastguard that night: poor visibility, lack of aerial surveillance, and a lack of staff in the control room in Dover to process SOS calls… The legal team representing one of the victim’s families described the events as an “overall display of chaos”. The British government also announced an independent inquiry into the shipwreck, after the report was published. However, the report fails to explain why over 30 people were left in distress for 12 hours, while the Coastguard rescued other boats that night, nor why migrants have no other choice but to risk their lives at sea, when every other safe route to the UK is blocked to them.

    Again and again, political and military authorities refuse to take responsibility for their role in this shipwreck and are attempting to cover it up.

    Since 1999, at least 385 people have died trying to reach the UK. Hit by vehicles on the motorway, electrocuted by a live wire on the Eurotunnel site, asphyxiated in the trailers of lorries in Essex in England, died by suicide, drowned in the canal whilst trying to bathe, died due to poor living conditions in the camps, and drowned in the Channel.

    In recent years, the frequency of deaths at the border has only accelerated. Since 24 November 2021, at least 45 migrants have died at this border. The deaths continue to pile up and nothing changes. On the contrary, the French, Belgian and British authorities are stubbornly pursuing their racist and security-focused immigration approaches to make this border area ever more hostile for migrants.

    In France, the new asylum-immigration bill heralds an even more anti-migrant turn by the Macron government. On the northern coast this month, migrants’ rights organisations denounced a “catastrophic situation” for people exiled, who are not receiving shelter during storm Ciaran and the cold, nor access to water or food distributions – while police eviction operations continue. In Belgium, the government continues to deny decent accommodation to people seeking safety, leaving families and children on the streets, despite multiple convictions in court. Furthermore, since 2021, Belgium has been supporting Frontex’s Opal Coast aerial surveillance operation, whose mission is to assist the French and Belgian authorities in detecting and intercepting exiles attempting to cross the Channel to the United Kingdom. On the British side, the government has successively passed increasingly repressive measures against migrants, including a plan to deport people to Rwanda ruled unlawful by the Supreme Court, and a ban on asylum for people arriving in the UK “irregularly”. Lastly, at the last Franco-British summit on 10 March 2023, the UK announced the release of £476 million (543 million euros) over 3 years for the deployment of 500 additional officers, the purchase of new surveillance equipment and drones, helicopters and aircraft, and the opening of a new detention centre in northern France.

    The French, Belgian and British authorities have turned the shared border into a place of death. By refusing to welcome people and by militarising this border with an excessive number of repressive measures (kilometres of barriers, barbed wire, drones, multiple police patrols, Frontex aircraft), they are politically responsible for every single one of these deaths. We know that the increasing militarisation of the border does not stop people taking journeys, but simply makes these journeys more dangerous and life-threatening.

    We, Belgian, British, and French organisations, collectives, and activists, support the actions taken by victims’ relatives and families before the courts, to ensure that the truth on exactly what happened on that murderous night is exposed, and justice is achieved.

    From Dunkirk to Folkestone and from London to Zeebrugge, we stand together to call for an urgent and radical change in the policies pursued at this and other European borders. The rights of migrants must be fully respected and the values and principles of welcome and free movement must replace the racist logic of deadly border violence. We stand in solidarity with all those displaced. They should not face the further trauma of militarised and violent borders when they seek safety in Belgium, France or the UK.

    As long as the Belgian, British, and French governments continue to coordinate simultaneous violence at the shared border and as long as people need and desire to move across borders, our solidarity and work must continue to reach beyond borders. We will continue to work together in solidarity with people on the move, to ensure that their rights are respected – starting with their right to life – and that justice is done when these rights are violated.

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    Deux ans après le naufrage du 24 novembre 2021, alors que l’injustice et les décès aux frontières se poursuivent, nous sommes uni·e·s pour appeler à un monde sans violence aux frontières.

    Le 24 novembre 2021, au moins 33 personnes embarquées à bord d’un zodiac ont tenté de rejoindre le Royaume-Uni, en partant des côtes Dunkerquoises. Ces 33 personnes venaient majoritairement du Kurdistan irakien, mais aussi d’Afghanistan, d’Éthiopie, d’Iran, d’Égypte, de Somalie et du Vietnam.

    Trois heures après le début de la traversée dans la Manche, l’embarcation s’est trouvée en situation de détresse. A 1h48 du matin, les passager·ère·s ont réussi à prendre contact avec le Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) Gris-Nez, qui coordonne les opérations de secours côté français. Alors que l’embarcation est localisée dans les eaux territoriales françaises, le CROSS refuse d’envoyer des secours.

    Malgré des appels répétés de la part de différent·e·s naufragé·e·s, entre 1h48 et 4h34 du matin, ni les secours britanniques, ni les secours français ne lanceront d’opération de secours. Pire, à 4h16 du matin, le CROSS ira même jusqu’à dissuader un tanker d’intervenir pour secourir les personnes en train de se noyer. Ce n’est que 12 heures après, que l’embarcation pneumatique est retrouvée par un bateau de pêche. Au moins 27 personnes sont mortes cette nuit-là dans les eaux glacées de la Manche.

    Quelques jours après le naufrage, deux rescapés témoignent de la manière dont les secours les avaient impunément abandonnés en pleine mer. En novembre 2022, Le Monde a révélé la teneur des échanges – insoutenables – entre les naufragé·es et le CROSS. Les naufragé·es ont été traité·es avec cynisme et les lois internationales qui régissent le sauvetage en mer ont été bafouées. Quelques semaines après le naufrage, l’association Utopia 56 a déposé plainte aux côtés de membres des familles de personnes décédées, contre les autorités françaises pour « homicide involontaire » et « omission de porter secours ». Les neuf militaires du CROSS Gris-Nez et d’un patrouilleur français auditionnés dans le cadre de cette enquête judiciaire, ont assumé toutes les décisions prises lors de cette terrible nuit, mais n’estiment pas avoir commis de faute. Alors que le gouvernement français avait promis une enquête interne, suite aux révélations du journal Le Monde, celle-ci n’a jamais eu lieu. Les prévenus bénéficient au contraire du soutien de leur hiérarchie, laquelle a tenté d’interférer dans l’enquête judiciaire comme le révèlent des écoutes téléphoniques. Une enquête pour violation du secret de l’instruction est ouverte.

    Un rapport publié ce mois-ci par le Ministère des Transports britannique a identifié les défaillances qui ont empêché les garde-côtes britanniques de secourir l’embarcation cette nuit-là : mauvaise visibilité, absence de surveillance aérienne et manque de personnel dans la salle de contrôle de Douvres pour traiter les appels d’urgences… L’équipe juridique représentant l’une des familles de la victime a qualifié les événements de “chaos général”. Le gouvernement britannique a également annoncé l’ouverture d’une enquête indépendante sur le naufrage, après la publication du rapport. Toutefois, le rapport n’explique pas pourquoi plus de 30 personnes ont été laissées en détresse pendant 12 heures, alors que les garde-côtes ont secouru d’autres bateaux cette nuit-là, ni pourquoi les personnes exilées n’ont d’autre choix que de risquer leur vie en mer, alors que toutes les autres routes sûres vers le Royaume-Uni leur sont interdites.

    Encore et encore, les autorités politiques et militaires réfutent la responsabilité qui leur incombe dans ce naufrage et s’efforcent d’étouffer l’affaire.

    Depuis 1999, au moins 385 personnes sont décédées en tentant de rejoindre le Royaume-Uni. Mortes percutées par un véhicule sur l’autoroute, électrocutées par un caténaire sur le site Eurotunnel, asphyxiées dans la remorque d’un poids-lourd dans l’Essex en Angleterre, mortes par suicide, noyées dans le canal en tentant de se laver, décédées suite aux mauvaises conditions de vie sur les campements, et noyées dans la Manche.

    La fréquence des morts à cette frontière ne fait que s’accélérer ces dernières années. Depuis le 24 novembre 2021, ce ne sont pas moins de 45 nouvelles victimes qui ont été recensées. Les mort·e·s continuent de s’accumuler et rien ne change. Au contraire, les autorités françaises, belges, et britanniques s’entêtent dans leur logique raciste et sécuritaire en créant un environnement toujours plus hostile aux personnes exilées.

    En France, le nouveau projet de loi asile-immmigration annonce un tournant encore plus anti-migrant du gouvernement Macron. Sur le littoral nord, ce mois-ci, des associations ont dénoncé une “situation catastrophique” pour les personnes exilées qui ne bénéficient ni d’une mise à l’abri malgré le froid et la tempête Ciaran, ni d’accès à l’eau ou aux distributions alimentaires – alors que les opérations policières d’expulsion continuent. En Belgique, le gouvernement continue de nier le droit d’accueil aux personnes exilées, laissant familles et enfants à la rue, malgré plusieurs condamnations par la justice. De plus, depuis 2021, la Belgique soutient l’opération Opal Coast de surveillance aérienne de Frontex dont la mission est d’assister les autorités françaises et belges pour détecter et intercepter les personnes exilées qui tentent de traverser la Manche pour rejoindre le Royaume-Uni. Du côté britannique, le gouvernement déploie successivement des mesures de plus en plus répressives contre les personnes exilées, y compris un plan d’expulsion vers le Rwanda jugé illégal par la Cour suprême et l’interdiction de demander l’asile aux personnes arrivant de manière “irrégulière” au Royaume-Uni. Enfin, à l’occasion du dernier sommet franco-britannique du 10 mars 2023, le Royaume-Uni a annoncé le déblocage de 543 millions d’euros (£476 millions) sur 3 ans destinés au déploiement de 500 officiers supplémentaires, à l’achat de nouveaux équipements de surveillance et de drones, d’hélicoptères et d’aéronefs, ainsi qu’à l’ouverture d’un nouveau centre de rétention dans le nord de la France.

    Les autorités françaises, belges, et britanniques ont fait de cette frontière un espace de mort. En refusant d’accueillir les personnes exilées et en militarisant cette frontière, via une surenchère de dispositifs de répression (kilomètres de barrières, barbelés, drones, multiples patrouilles de police, avion Frontex), elles sont responsables politiquement depuis des décennies de chaque mort. Nous savons que la militarisation accrue des frontières n’empêche pas les personnes de voyager, mais rend simplement ces voyages plus dangereux et mortels.

    Nous, associations, collectifs, et militant·e·s belges, britanniques, et français·es, nous soutenons les actions menées par les proches et familles des victimes devant les tribunaux afin que la vérité éclate sur le déroulement exact de cette nuit meurtrière et que justice soit faite.

    De Dunkerque à Folkestone et de Londres à Zeebrugge, nous réclamons un changement urgent et radical quant aux politiques menées à cette frontière, ainsi qu’aux autres frontières européennes, afin que les droits des personnes en migration soient pleinement respectés et que les valeurs et principes de l’accueil et de la libre circulation remplacent la logique raciste de violences mortifères aux frontières. Nous sommes solidaires de toutes les personnes exilées. Elles ne devraient pas être confrontées au traumatisme supplémentaire de frontières militarisées et violentes lorsqu’elles cherchent la sécurité en Belgique, en France ou au Royaume-Uni.

    Tant que les gouvernements belge, britannique, et français continueront à coordonner des violences simultanées à la frontière commune et tant que les gens auront le besoin et le désir de traverser les frontières, notre solidarité et notre travail devront continuer à aller au-delà des frontières. Nous continuerons notre travail commun en solidarité avec les personnes exilées, pour le respect de leurs droits – à commencer par leur droit à la vie – et pour que justice soit rendue lorsque ces droits sont bafoués.

    Signatories / signataires:

    African Rainbow Family, United Kingdom

    After Exploitation, United Kingdom

    Alice Thiery, New Calledonia

    All African Women’s Group, London, England

    Amira Elwakil, United Kingdom

    ARACEM, Mali

    BARAC UK, United Kingdom

    Big Leaf Foundation, United Kingdom

    Birmingham City of Sanctuary, United Kingdom

    Birmingham Community Hosting Network (BIRCH), United Kingdom

    Birmingham Schools of Sanctuary, United Kingdom

    Calais Food Collective, France

    Cambridge Convoy Refugee Action Group, United Kingdom

    Camille Louis, France et Grèce

    Captain Support UK, United Kingdom

    Care4Calais, United Kingdom

    Charles Stone, Oxford, England

    Chenu Elisabeth, France

    Choose Love, United Kingdom

    CIRÉ, Belgium

    CNCD-11.11.11, Belgium

    Damien CAREME, France

    Drag Down the Borders, United Kingdom

    Eleanor Glynn, United Kingdom

    Fabienne Augié, France

    Focus on Labour Exploitation (FLEX), United Kingdom

    Freedom from Torture, United Kingdom

    GISTI (Groupe d’information et de soutien des immigré⋅es), France

    Giulia Teufel, Scotland

    Global Women Against Deportations, London, England

    Greater Manchester Immigration Aid Unit (GMIAU), United Kingdom

    Groupe montois de soutien aux sans-papiers, Mons, Belgium

    Haringey Welcome, United Kingdom

    Here for Good, United Kingdom

    Human Rights Observers (HRO), Calais and Grande-Synthe, France

    Humans for Rights Network, United Kingdom

    Inclusive Mosque Initiative, United Kingdom

    Institute of Race Relations, United Kingdon

    Joint Council for the Welfare of Immigrants (JCWI), United Kingdom

    Julie HUOU, Nîmes, France

    Kent Refugee Action Network (KRAN), Kent, United Kingdom

    Kevin Guilbert, Ham en Artois, France

    L’Auberge des Migrants, France

    La Cimade, France

    La Resistencia, United States

    Latin American Women’s Rights Service (LAWRS), United Kingdom

    Legal Action for Women, London, England

    Loraine Masiya Mponela, England

    Louis Fernier, Poitiers, France

    Lu ndu, United Kingdom

    Lucian Dee, London, United Kingdom

    Manchester Migrant Solidarity Manchester, United Kingdom

    Maria Hagan, France

    Medact, United Kingdom

    Médecins du Monde France / Programme nord littoral, France

    Merseyside Solidarity Knows No Borders, United Kingdom

    Migrant Voice, United Kingdom

    Migrants in Culture, United Kingdom

    Migrants Organise, United Kingdom

    Migrants’ Rights Network, United Kingdom

    Migrations Libres, Belgium

    Migreurop, réseau euro-africain

    Morgan Guthrie, United Kingdom

    MRAP-littoral dunkerquois, Dunkerque, France

    NANSEN, the Belgian Refugee Council, Belgium

    Ouvre Porte, France

    Oxford Against Immigration Detention, Oxford, United Kingdom

    Patricia Thiery, France

    Payday men’s network, United Kingdom and United States

    Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés – Belrefugees, Belgium

    Play for Progress, London, United Kingdom

    Project Play, France

    Rainbow Migration, United Kingdom

    Reclaim The Sea, United Kingdom

    RefuAid, London, United Kingdom

    Refugee Action, United Kingdom

    Refugee Legal Support, London and Calais

    Refugee Support Group, Berkshire, United Kingdom

    Refugee Women’s Centre, France

    Remember & Resist, United Kingdom

    Right to Remain, UK

    Safe Passage International, United Kingdom

    Safe Passage International, France

    Social Workers Without Borders, United Kingdom

    Stand For All, United Kingdom

    Stories of Hope and Home, United Kingdom

    Student Action for Refugees (STAR), United Kingdom

    Terre d’errance Norrent-Fontes, France

    The October Club, Oxford, United Kingdom

    The Pickwell Foundation, Devon, United Kingdom

    The Refugee Buddy Project Hastings Rother & Wealden, East Sussex, UK

    The Runnymede Trust, United Kingdom

    Tina Pho, United Kingdom

    Toby Murray, London, United Kingdom

    Tugba Basaran, Cambridge, United Kingdom

    Utopia 56, France

    Valérie Osouf, France

    Vents Contraires, France

    VVIDY (Voice of Voiceless Immigration Detainees-Yorkshire), United Kingdom

    Welsh Refugee Council, Wales

    Young Roots London, United Kingdom

    https://irr.org.uk/article/joint-declaration-commemoration-of-the-24-november-2021-shipwreck

    #commémoration #asile #migrations #réfugiés #morts_aux_frontières #mourir_aux_frontières #mémoire #naufrage #24_novembre_2021

    • Le #Cross_Border_Forum : espace transfrontalier d’échange et de lutte pour la #justice_migratoire

      Ce 24 novembre 2023 marque le deuxième anniversaire du plus important naufrage de personnes migrantes dans la Manche. Ce drame et d’autres précédemment, sont le résultat d’une approche répressive des politiques migratoires européennes et britanniques. Face à cette situation devenue structurelle, s’est constitué un réseau d’associations et de militants britanniques, français et belges : le Cross Border Forum.
      Présentation de ce forum dont le CNCD-11.11.11 est membre et de sa déclaration engagée en mémoire des victimes des violences aux frontières.

      Ce 24 novembre 2023 marque le deuxième anniversaire du plus important naufrage de personnes migrantes dans la Manche, qui s’est déroulé en 2021. Ce drame a causé la mort de 27 personnes exilées, femmes, hommes et enfants, originaires majoritairement du Kurdistan irakien, mais aussi d’Afghanistan, d’Éthiopie, d’Iran, d’Égypte, de Somalie et du Vietnam. Outre l’absence de secours malgré les appels répétés des naufragés

      , les raisons de ce drame et d’autres précédemment, sont le résultat d’une approche répressive des politiques migratoires européennes et britanniques. Celles-ci contraignent, non seulement les personnes exilées désireuses de se rendre aux Royaume-Uni à emprunter des voies périlleuses irrégulières faute de possibilités légales de migrations mais aussi à séjourner dans l’irrégularité faute d’accueil. Face à cette situation révoltante devenue structurelle, s’est constitué un réseau d’associations et de militants britanniques, français et belges : le Cross Border Forum. Présentation de ce forum dont le CNCD-11.11.11 est membre.
      Mobilité entravée et encampement à la frontière belgo-franco-britannique

      Les migrations internationales du sol européen vers le Royaume-Uni sont anciennes et multiples. Cependant, ces dernières décennies, à la suite du renforcement de l’approche répressive des politiques migratoires européennes et britanniques, les seules voies possibles de mobilité entre le continent et l’île sont, pour la plupart des personnes exilées, devenues irrégulières, au fur et à mesure que se fermaient les vois légales de migration. Effectuées par route (via le tunnel) et par mer, nécessitant souvent l’intermédiaire de passeurs, ces déplacements sont de plus en plus chers, dangereux et meurtriers. Depuis 1999, selon le Mémorial de Calais, au moins 385 personnes sont décédées en tentant de rejoindre le Royaume-Uni. Mortes percutées par un véhicule sur l’autoroute, électrocutées par un caténaire sur le site Eurotunnel, asphyxiées dans la remorque d’un poids-lourd dans l’Essex en Angleterre, noyées dans la Manche, mortes par suicide et décédées à la suite des mauvaises conditions de vie dans les camps.

      En 2022, la presse belge (RTBF) estime que près de 80.000 personnes ont tenté de passer au Royaume-Uni depuis l’Europe continentale
      . Ces déplacements se font principalement au départ de la France mais également depuis la Belgique. Néanmoins comme le signale Myria dans son rapport de 2020 intitulé La Belgique, une étape vers le Royaume-Uni : « Au vu du manque de chiffres fiables et représentatifs, il est impossible d’évaluer le nombre de migrants en transit présents (en moyenne) en Belgique. Très peu d’informations représentatives sur les caractéristiques démographiques des migrants en transit sont également disponibles

       ».

      En Belgique et en France, en amont de la traversée, de nombreux camps informels se créent et sont aussitôt démantelés par les autorités. Ils sont situés à proximité des plages de la mer du Nord et du tunnel sous la Manche. Le plus médiatisé est sans doute celui de la « jungle de Calais » . Ces zones d’attente et de transit sont localisées également dans les bois, le long des autoroutes et non loin des parkings de camions poids lourds dont la destination est l’Angleterre. Les conditions de vie dans ces camps sont inhumaines car insalubres et insécurisantes, spécialement pour les femmes et les enfants. La survie de leurs occupants est entre autres rendue possible par l’action solidaire de citoyens et associations leur permettant d’avoir un accès modeste à de la nourriture, de l’eau, des vêtements, de l’électricité et des conseils juridiques. Ces camps d’infortune sont régulièrement démantelés

      par les Etats sans aucune réelle proposition de mise à l’abri et d’hébergement durable. Les personnes migrantes y sont régulièrement contrôlées, persécutées et chassées de façon violente par les autorités sous prétexte d’insécurité, de lutte contre le trafic d’êtres humains et d’appel d’air. La criminalisation de ces personnes et de leur soutient solidaire fait partie intégrante de la stratégie répressive et dissuasive voulues par les Etats européens.
      Brexit, pacte européen et externalisation des questions migratoires

      A la différence de plusieurs traités, protocoles et accords franco-britanniques
      relatifs à la gestion de l’accueil

      et du contrôle des frontières, la Belgique n’a pas signé d’accords bilatéraux formels avec le Royaume-Uni. Cependant, elle entretient des relations diplomatiques cordiales et signe des déclarations communes avec lui, les Pays-Bas, l’Allemagne et la France au sujet du contrôle de leurs frontières communes. Depuis 2021, la Belgique soutient l’opération Opal Coast de surveillance aérienne de Frontex dont la mission est d’assister les autorités françaises et belges pour détecter et intercepter les personnes exilées qui tentent de traverser la Manche pour rejoindre le Royaume-Uni. A l’occasion du dernier sommet franco-britannique en mars 2023, le Royaume-Uni a annoncé le déblocage 543 millions d’euros sur 3 ans destinés à l’achat de nouveaux équipements de surveillance et de drones, d’hélicoptères et d’aéronefs, ainsi qu’à l’ouverture d’un nouveau centre de rétention dans le nord de la France. Rappelons qu’en collaborant avec le Royaume-Uni pour empêcher des personnes présentes sur leur territoire de rejoindre ce dernier, la France et la Belgique contreviennent à l’article 13 de la Déclaration universelle des droits de l’homme qui stipule : « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien. »

      Depuis le Brexit en 2018, les mesures liées aux politiques migratoires prises par un Etat membre européen avec le Royaume-Uni peuvent être considérées comme faisant partie de la stratégie d’externalisation des questions migratoires ; cela à l’image des accords entre les États européens avec des pays tiers. Le contesté pacte européen sur la migration et l’asile, qui pourrait être adopté durant la présidence belge de l’UE en 2024, a également pour axe stratégique prioritaire l’externalisation. Le Royaume-Uni n’est pas en reste. Le gouvernement actuel tente de faire passer une loi qui permettrait d’expulser au Rwanda toute personne arrivée sur le sol britannique par voie irrégulière. Ce 15 novembre, le projet a été recalé par la Cour suprême britannique, car il a été jugé illégal. Le Rwanda ne peut en effet être considéré comme un pays tiers sûr. D’autres projets ont vu également le jour sur l’île, tels l’accueil des demandeurs d’asile sur des barges flottantes et une machine à vagues ayant pour effet recherché de dissuader, refouler et donc de ne pas accueillir les personnes exilées.
      Le Cross Border Forum, ensemble, pour et avec les personnes exilées

      Le contexte des migrations et de l’accès à l’asile lié à la frontière du Royaume-Uni avec la France et la Belgique crée une situation intenable pour les personnes migrantes qui transitent par la région frontalière et, par extension, pour les organisations de soutient qui travaillent avec elles. Apporter des réponses aux défis et aux enjeux des migrations transfrontalières implique une bonne connaissance et une bonne compréhension des dynamiques et changements de politique dans les pays respectifs. L’importance d’une collaboration entre les acteurs de la société civile est souvent soulignée aux niveaux national et local, mais une collaboration entre acteurs travaillant des différents côtés de la frontière l’est tout autant. L’expérience vécue de la frontière commune et l’expertise des politiques de migrations des personnes premières concernées par les questions transfrontalières est aussi essentielle. Alors que les gouvernements des deux côtés de la Manche s’engagent dans des négociations multilatérales, la coopération entre la société civile internationale est plus que nécessaire. Cela aura pour conséquence de renforcer l’impact potentiel des efforts respectifs.

      Il existe peu d’espaces permettant d’échanger rapidement et facilement des informations et analyses, afin de répondre à court et à long termes à la situation dans l’un des trois pays. Le Cross Border Forum (CBF) est né de ce besoin. Fin 2020, il a débuté en tant qu’initiative visant à rassembler les acteurs de la société civile des deux côtés de la frontière franco-britannique. Au printemps 2021, des associations belges, dont le CNCD-11.11.11, ont rejoint le Forum

      . En 2022, une coordination basée au Royaume-Uni et hébergée par l’association JCWI a été mise en place pour faire fonctionner durablement le forum. La formalisation du forum (charte d’adhésion des membres, site, financement etc.) sera finalisée d’ici fin 2023.
      Le 24 novembre, date de commémoraction pour mettre fin aux morts aux frontières

      Ce 24 novembre 2023, le CBF publie une déclaration commune [à télécharger ci-dessous] qui rappelle : « De Dunkerque à Folkestone et de Londres à Zeebrugge, nous réclamons un changement urgent et radical quant aux politiques menées à cette frontière, ainsi qu’aux autres frontières européennes, afin que les droits des personnes en migration soient pleinement respectés et que les valeurs et principes de l’accueil et de la libre circulation remplacent la logique raciste de violences mortifères aux frontières. »

      https://twitter.com/CborderForum/status/1721947530798248075

      Au-delà de cette déclaration et de la commémoration annuelle autour de cette date symbolique, le CBF participe depuis deux ans à des rencontres publiques organisées dans les trois pays et organise en plus de ses réunions régulières d’échanges internes, des séances de formations pour ses membres sur la situation transfrontalière. Aujourd’hui, les membres du forum échangent, s’informent et se mobilisent mais certains n’excluent pas, demain, de porter des actions de plaidoyer sur leur frontière commune dans leurs pays respectifs.

      https://www.cncd.be/Le-Cross-Border-Forum-espace

  • #PortesDisparus : au Sénégal, un journaliste rend un nom et un visage à ceux qui sont partis

    Au #Sénégal, alors que chaque semaine les drames de l’émigration clandestine continuent de faire l’actualité, un journaliste, #Ayoba_Faye, a lancé un hashtag « #portés_disparus » pour aider les familles de migrants partis par la mer à avoir des informations sur leur enfant et éviter qu’ils ne tombent dans l’oubli.

    « Ousseynou Ndiaye : disparu depuis 20 jours. Point de départ inconnu », peut-on lire sur le compte X du journaliste sénégalais Ayoba Faye. Depuis une semaine, le rédacteur en chef du média en ligne PressAfrik a listé une dizaine de noms déjà de Sénégalais portés disparus après avoir tenté la traversée par la mer vers l’Espagne.

    https://twitter.com/autruicomoi/status/1727428904036762101

    Une démarche entreprise après que de nombreuses familles l’ont contacté, nous explique Ayoba Faye. « Les parents qui entrent en contact avec moi sont dans le désarroi total. Certains sont restés plus d’un mois sans avoir de nouvelles de leurs enfants. Ils n’ont aucune structure étatique vers qui se tourner. C’est alors que j’ai décidé d’utiliser le peu d’influence que j’ai sur les réseaux sociaux pour aider à mettre un visage sur chaque porté disparu parmi les centaines, voire les milliers, depuis le début des vagues migratoires de cette année 2023. Ce n’étaient pas des personnes anonymes ces jeunes qui ont disparu en mer, ils avaient une vie, ils avaient des rêves, ils avaient une histoire, qui méritent d’être connus. »

    https://twitter.com/autruicomoi/status/1725276632338801028

    À chaque nom listé par le journaliste est associée une photo. Avec ses 34 000 followers, Ayoba Faye espère ainsi aider à retrouver des personnes potentiellement décédées lors de cette traversée extrêmement dangereuse. Une façon aussi de les sortir de l’anonymat et de l’oubli alors que plusieurs acteurs de la société civile sénégalaise demandent l’instauration d’une journée de deuil national pour les migrants.

    https://www.rfi.fr/fr/afrique/20231124-portesdisparus-au-s%C3%A9n%C3%A9gal-un-journaliste-rend-un-nom-et-un-vi

    #hashtag #celleux_qui_restent #asile #migrations #missing #réfugiés #frontières #morts_aux_frontières #mourir_aux_frontière #recherche

  • L’occupazione storica della Palestina e chi la nega: Pappé risponde a Travaglio

    Lo storico israeliano e direttore dello European centre for Palestine studies dell’Università di Exeter ha replicato a un editoriale del direttore de Il Fatto Quotidiano che puntava il dito contro presunti “errori storici” nell’appello degli accademici italiani per un cessate il fuoco immediato nella Striscia di Gaza

    All’inizio di novembre un gruppo di accademiche e accademici italiani ha rivolto un appello al ministro degli Esteri, Antonio Tajani, alla ministra dell’Università e della ricerca, Anna Maria Bernini, e alla Conferenza dei rettori (Crui) per chiedere un’azione urgente per un cessate il fuoco immediato nella Striscia di Gaza e il rispetto del diritto umanitario internazionale. Si chiedeva alle università una forma di boicottaggio accademico: interrompere immediatamente le collaborazioni con istituzioni universitarie e di ricerca israeliane, “fino a quando non sarà ripristinato il rispetto del diritto internazionale e umanitario, cessati i crimini contro la popolazione civile palestinese da parte dell’esercito israeliano e, quindi, fino a quando non saranno attivate azioni volte a porre fine all’occupazione coloniale illegale dei territori palestinesi e all’assedio di Gaza”.

    Un appello cui, a oggi, hanno aderito quasi 4.500 docenti universitari da tutta Italia. Due settimane dopo il direttore de Il Fatto Quotidiano, Marco Travaglio, ha dedicato l’editoriale di prima pagina (dal titolo “Errata corrige“) ai contenuti dell’appello, evidenziando presunti errori nella ricostruzione storica del testo. “Possibile -si è chiesto provocatoriamente Travaglio- che tra i quattromila prof non ce ne sia uno di Storia?”. Critiche a cui i promotori dell’iniziativa hanno deciso di replicare: “Ci ha colpiti e offesi l’accusa di ignoranza storica e logica nel trattare gli eventi del conflitto palestinese -si legge nel testo di replica-. Ironicamente, si chiedeva se tra di noi vi fossero degli storici. Possiamo confermare che tra le persone che hanno firmato vi siano”.

    E per rafforzare ulteriormente la validità dei propri argomenti e delle posizioni sostenute nell’appello, hanno chiesto di commentare le affermazioni di Travaglio a “un illustre collega e storico israeliano”, docente presso l’Università di Exeter, nel Regno Unito, ovvero Ilan Pappé: “Ha fondato e guidato l’Istituto per la Pace a Givat Haviva (Israele) tra il 1992 e il 2000, e ha ricoperto la cattedra dell’Istituto Emil Touma per gli Studi palestinesi di Haifa (2000-2008). Attualmente è direttore dello European centre for Palestine studies a Exeter”. Di seguito, d’accordo con le promotrici e i promotori dell’appello, pubblichiamo la traduzione dell’intervento di replica del professor Ilan Pappé.

    La richiesta di boicottaggio accademico è giunta dalla società civile palestinese, rappresentata da 150 Ong: non si tratta di un’iniziativa italiana. Essa si basa su chiare prove della complicità delle università israeliane nell’oppressione dei palestinesi ed è fortemente ispirata al richiamo al boicottaggio accademico contro l’apartheid in Sudafrica.

    Chiunque voglia organizzare una petizione contro altre istituzioni accademiche è il benvenuto, ma gli Stati menzionati nell’editoriale (da Travaglio, ovvero Iran, Siria, Arabia Saudita e Qatar, ndr) non stanno cercando di presentarsi come democrazie (a differenza di Israele), e quindi c’è un sufficiente dibattito pubblico sulla moralità dei contatti bilaterali con questi Paesi.

    L’Israele riconosciuto nella Risoluzione 181 non includeva le aree assegnate allo Stato arabo in quel documento, che Israele occupò nel 1948. Per 75 anni diverse parti della Palestina storica sono state sottoposte a diverse forme di oppressione in periodi differenti. Come menzionato, una parte della Palestina araba dell’Onu fu presa da Israele. Successivamente, la minoranza palestinese all’interno di Israele fu sottoposta a un regime militare di oppressione. Israele occupò la Cisgiordania e la Striscia di Gaza nel 1967 e trasferì in quei luoghi il brutale regime militare, sostituito nel 1981 da un’amministrazione civile altrettanto spietata, che violò gli Accordi di Oslo del 1993 dando mano libera all’esercito e agli insediamenti per gestire la vita di milioni di palestinesi ogni volta che lo desiderassero.

    Israele ha compiuto una pulizia etnica di 300mila palestinesi durante la guerra del giugno del 1967 e di oltre 600mila da allora fino a oggi, in Cisgiordania e nella Striscia di Gaza. Questo è il contesto storico. A questo possiamo aggiungere l’assedio a Gaza dal 2007, che ha trasformato quel territorio in un ghetto, bombardato quattro volte dall’aria, causando la morte di migliaia di palestinesi, molti dei quali bambini.

    Il più grande crimine israeliano contro l’umanità è la pulizia etnica del 1948 della metà della popolazione della Palestina, la demolizione di metà dei suoi villaggi e della maggior parte delle sue città. Nonostante le Nazioni Unite abbiano ordinato a Israele di permettere ai rifugiati di tornare, questo ha rifiutato di farlo. La lotta palestinese era inizialmente per il ritorno dei rifugiati e dopo il 1967 per la liberazione della loro patria colonizzata e occupata.

    Israele ha reso la Striscia di Gaza un enorme campo profughi nel 1948, ecco perché non l’ha occupata (non si è “ritirata” da Gaza, non l’ha occupata) e ha dato la Cisgiordania alla Giordania in cambio di un ruolo giordano limitato nel tentativo arabo di salvare i palestinesi da ulteriori pulizie etniche.

    È l’Organizzazione per la liberazione dalla Palestina (Olp) che ha fatto una grande concessione volendo negoziare solo sul 22% della Palestina storica, ma la “giudaizzazione” della Cisgiordania e della Striscia di Gaza iniziata nel 1967 e il disonesto desiderio israeliano di continuare a governare su tutta la Palestina storica, offrendo ai palestinesi di vivere in un “bantustan” (termine che nel Sudafrica dell’apartheid indicava i territori in cui furono costretti a trasferirsi diversi gruppi etnici neri, ndr) non poteva essere accettato dal movimento di liberazione palestinese e di conseguenza la lotta continua fino ad oggi.

    Quindi gli oltre quattromila professori conoscono molto bene la storia e dovrebbero essere lodati per rifiutarsi di negare la Nakba del 1948 -farlo è grave tanto quanto negare l’Olocausto- e la Nakba in corso. In realtà, i palestinesi sono stati già oggetto di pulizia etnica negli anni Venti del Novecento, ma sicuramente la loro terra è stata colonizzata, sono stati cacciati, oppressi e negati i diritti fondamentali dal 1948 fino a oggi. Negare ciò è ignoranza o cancellazione intenzionale e cinica della storia.

    https://altreconomia.it/loccupazione-storica-della-palestina-e-chi-la-nega-ilan-pappe-risponde-

    #Ilan_Pappé #Gaza #Palestine #à_lire #7_octobre_2023 #université #ESR #boycott #histoire #Israël #nettoyage_ethnique #1948 #réfugiés #occupation #camp_de_réfugié #encampement #Jordanie #bantustan #apartheid #OLP #Nakba

    L’appel des académicien·nes italien·nes:
    Appel des universitaires italien·nes: cessez-le-feu immédiat et respect du droit humanitaire international à Gaza
    https://academia.hypotheses.org/53494

  • Aux frontières de la forteresse européenne

    Les arrivées de personnes exilées sont régulières en Europe, notamment par voie maritime. Pour toute réponse, les pays de l’Union européenne barricadent toujours plus leurs frontières avec des murs, des patrouilles constantes, des constructions de camps fermés. La journaliste #Elisa_Perrigueur en tient le récit en peintures.

    https://www.mediapart.fr/studio/portfolios/aux-frontieres-de-la-forteresse-europeenne
    http://perrigueur.eu/elisaperrigueur/dessins
    #dessin #frontières #peinture #art_et_politique #migrations #asile #réfugiés

    ping @isskein

  • Un anno di osservazione sul CPR di Via Corelli, Milano

    Il report-denuncia di Naga e Rete Mai più Lager - No ai CPR

    «Al di là di quella porta. Un anno di osservazione dal buco della serratura del Centro di Permanenza per il Rimpatrio di Milano» è il titolo del report 1 realizzato dall’associazione Naga e della Rete Mai Più Lager – No ai CPR (di qui in avanti “Rete”).

    Il risultato di un monitoraggio multi livello 2 durato un anno che tuttavia, lascia l’impressione di aver giusto sbirciato “dal buco della serratura” di quel CPR.

    La diversità di fonti e metodi riflette infatti la difficoltà che si riscontra quando si vuole rompere il muro di oscurità che avvolge via Corelli e tutti gli altri centri d’Italia. La maggior parte delle informazioni raccolte sono infatti il frutto delle segnalazioni arrivate al centralino telefonico “SOS CPR Naga” o alle pagine social di Naga e Rete dai cellulari personali dei trattenuti.

    Un monitoraggio che solleva l’angosciante interrogativo su quanto accade negli altri Centri di permanenza per i rimpatri (CPR) d’Italia.

    Il CPR di Milano infatti è l’unico, insieme a quello di Gradisca d’Isonzo, in cui, grazie a una sentenza sul ricorso ASGI del 20213, i trattenuti possono detenere i propri telefoni cellulari. Questa possibilità, a garanzia del diritto alla libera corrispondenza di fatto negata negli altri CPR, ha plausibilmente l’effetto di limitare gli abusi da parte di forze dell’”ordine” e operatorə del centro, consapevoli inoltre della presenza di associazioni e reti di solidali ben radicate sul territorio.

    Se le atrocità osservate a Milano sono il frutto di un relativo contegno che le autorità si impongono in Via Corelli, qual è invece la realtà quotidiana degli altri CPR, esclusi da un accorto e costante monitoraggio? Il titolo infatti rende perfettamente idea di quanto è nascosto agli occhi quando si cerca di osservare la totalità di una stanza dal piccolo spiraglio della serratura.
    “Accedere al CPR: una lunga storia”

    Naga accede regolarmente alle carceri ordinarie, mentre nei Centri di permanenza per i rimpatri la Prefettura nega l’autorizzazione in modo quasi sistematico e spesso senza neanche fornire una motivazione dettagliata. Eppure la possibilità di accesso è formalmente prevista dalla Direttiva Lamorgese e spesso viene fatta valere solo in seguito a un ricorso al Tribunale Amministrativo Regionale. Non prima, dunque, di spendere tempo, energie e risorse per fare ricorso contro il diniego.

    “La battaglia per visitare il CPR è durata oltre un anno, ha visto impegnati due avvocati e una decina tra attiviste e attivisti. Istanze, memorie, accessi agli atti, un’ordinanza e una sentenza” 4. Tutta questa fatica per due ore di sopralluogo all’interno del centro, in cui la delegazione è stata accompagnata – o, per meglio dire, scortata – lungo tutto il tragitto.
    Gli accessi civici agli atti e i dati quantitativi del report

    Un intero capitolo del dossier è dedicato a dettagliare le richieste di accesso civico generalizzato agli atti 5 che hanno spesso ottenuto dinieghi, risposte glissate, parziali, contraddittorie 6, a volte nessuna risposta affatto. Dalle risposte ottenute il rapporto riesce a ricostruire qualche dato quantitativo.

    In un anno sono state deportate da via Corelli verso il paese d’origine 7 238 persone, ovvero il 44% dei trattenuti (dove la media nazionale si attesta tra il 49 e il 50%).

    “L’82% dei rimpatriati proviene dal nord Africa. Del resto, il 65% dei trattenimenti ha riguardato persone provenienti da Egitto, Marocco e Tunisia. I dati della Prefettura confermano che sono soprattutto tunisini a popolare il CPR.” (Naga, 2023, p.137)

    In assenza di dati ufficiali sui motivi di rilascio diversi dalla deportazione nel paese di origine, Naga e Rete riportano a tal proposito i dati in loro possesso. Dei 24 casi di rilasci ottenuti grazie all’assistenza legale Naga, la maggior parte erano motivati dalle condizioni di salute dei trattenuti.

    Secondo l’ATS (Agenzia di Tutela della Salute), dal 1°marzo 2022 al 28 marzo 2023 sono stati emessi 203 codici STP. (Naga, 2023, p.167).

    A tutti i trattenuti però dovrebbe essere assegnato un codice STP (Straniero Temporaneamente Presente) al momento dell’ingresso. Considerando che il numero di trattenuti per lo stesso periodo è di 544, lo scarto è di ben 341 codici. Sul perché a questi individui non sia stato assegnato alcun codice STP non è dato avere spiegazione.

    Sul numero di trattenuti sottoposti a Trattamento Sanitario Obbligatorio (TSO), l’ATS non ha fornito alcuna risposta. La Prefettura sostiene di non avere tale informazione e, anche avendola, non la comunicherebbe in quanto relativa a dati “sensibilissimi”. Invece il Comune di Milano, che sotto la firma del suo Sindaco Giuseppe Sala dispone i TSO, ha riferito che nel periodo di riferimento dell’istanza ci sono stati due TSO sullo stesso cittadino. Risulta poi che questi trattamenti si riferiscono a due distinti periodi di trattenimento in CPR: questo significa, ancora una volta, che nonostante i gravi problemi psichiatrici è stato dichiarato idoneo al trattenimento ed è finito poi per subire un ulteriore TSO.
    La visita d’idoneità

    Una visita medica deve accertare l’idoneità alla vita in comunità ristretta entro le 48h dall’ingresso della persona in un CPR. Secondo la normativa, la visita d’idoneità deve svolgersi all’esterno del Centro e dev’essere obiettiva. Secondo le raccomandazioni del Garante nazionale dei diritti delle persone private della libertà personale (di qui in avanti abbreviato “Garante Nazionale”), per essere obiettiva la visita dev’essere svolta da medici del Servizio Sanitario Pubblico in una struttura pubblica.

    Invece, sin dalla sua apertura e con l’eccezione di una sola breve parentesi, le visite di idoneità per l’ingresso nel CPR di Via Corelli sono state svolte sempre dagli stessi due medici. Non si tratta di dipendenti dell’ASL, ma di medici in libera professione vincitori di concorsi che sembrano istituiti ad-hoc per affidare loro le visite d’idoneità. Inoltre, nel primo anno di apertura del centro, questi due medici lavoravano anche privatamente per l’ente gestore dell’epoca, la R.T.I. Luna S.c.s. – Versoprobo S.c.s. (oggi a gestire il Centro di Via Corelli è Martinina S.r.l.) in evidente conflitto d’interesse.

    Alcuni trattenuti riferiscono di non essere mai stati visitati al di fuori del centro o di aver svolto la visita in Questura. Tutti ad ogni modo sono stati visitati in presenza di agenti di polizia e le visite consistono nella compilazione di un modulo a crocette, nella somministrazione di un test COVID, nella dichiarazione di assenza di sintomi da Tubercolosi, ma senza disponibilità di strumenti diagnostici né la previsione di esami di approfondimento. Dunque si è idonei solo se si è ritenuti approssimativamente e a vista d’occhio “sani”.

    “Nel periodo tra maggio 2022 e marzo 2023 sono pervenute al centralino SOS CPR del Naga diverse segnalazioni di problematiche sanitarie che potrebbero porre qualche dubbio sulle idoneità rilasciate. Ricordiamo almeno 4 casi di trattenuti affetti da epilessia, 8 con gravi problemi psichiatrici e psicologici, diverse decine di persone che praticavano autolesionismo, 9 portatori di malattie croniche, gravi o comunque difficilmente compatibili con le modalità di trattenimento (sempre che queste si possano considerare compatibili con qualsiasi essere umano)” – Naga, 2023 (p. 84)
    “Il battesimo d’ingresso”

    Una volta all’interno del CPR, i trattenuti sono sottoposti a una seconda “visita”, quella di presa in carico 8. I neo arrivati vengono portati in infermeria, denudati integralmente di fronte a medici e, anche qui, ad agenti di polizia e obbligati a fare flessioni per espellere eventuali oggetti nascosti nell’ano.

    “Un trattamento umiliante dalla dubbia utilità pratica, stigmatizzato in infinite occasioni dai tribunali perché riservato, per legge, ai soggetti più pericolosi solo in caso di estrema necessità. Questo trattamento viene risparmiato solo ai soggetti provenienti direttamente dal carcere, quindi “puliti” in ragione della loro provenienza. A volte neanche a loro.” – Naga, 2023 (p.26)

    Al termine di questa visita viene refertata una scheda medica di ingresso, senza data e con la sezione “anamnesi” quasi sempre barrata. Nessun accertamento dettagliato sulla salute psichica dei trattenuti, seppur previsto dall’offerta tecnica con la quale Martinina S.r.l. vince l’appalto.

    Finita questa umiliante prassi di sottomissione, i trattenuti vengono spogliati anche della loro stessa umanità e identità personale. Viene loro consegnato un cartellino identificativo con un codice numerico progressivo (arrivato il 28 luglio 2023 al numero 1566) che di lì in avanti sostituirà il loro nome nelle interazioni con il personale all’interno del centro.

    Uno spettro agghiacciante dei metodi nazisti, in cui la deumanizzazione degli internati era funzionale al loro soggiogamento e all’annientamento di ogni guizzo di resistenza attiva alle ingiustizie e violenze subite.
    La vita nei blocchi: squallore e “zombizzazione”

    Secondo il monitoraggio di Naga e Rete, nel CPR di Via Corelli risultano agibili solo due moduli abitativi – spesso definiti “blocchi” dai trattenuti – ciascuno per 28 persone.

    “Per ogni trattenuto il gestore percepisce, come da appalto, un compenso di 40,16 euro al giorno. A loro disposizione un “kit di ingresso” (per il quale il gestore percepisce un compenso a parte) miserrimo e un cambio di vestiti (biancheria intima compresa) già usati da altri, che nella maggioranza dei casi vengono rifiutati.” – Naga, 2023 (p. 26)

    Le squallide condizioni di vita all’interno dei CPR sono ormai largamente documentate. Le pagine social della Rete pubblicano quasi quotidianamente foto e video inviati dai trattenuti raffiguranti locali non idonei, sporcizia, degrado, sangue, violenze e sofferenza diffusa.

    Uno scenario post-apocalittico all’interno del quale gli avvocati e le avvocate Naga raccontano di una veloce degenerazione psicofisica dei loro clienti, che colloquio dopo colloquio, vedono progressivamente diventare come zombie.

    “Giovani sani e forti si trasformano in poche settimane in zombie scoloriti e disorientati dagli psicofarmaci, drogati di e per disperazione, o più semplicemente per mantenere l’ordine all’interno del centro senza alcun dispendio di forze, energie e personale: sedandoli” – Naga, 2023 (p.28)
    Mai più distante dalla realtà: il capitolato d’appalto di Martinina S.r.l. tra servizi non erogati e protocolli falsi

    Nel CPR di Milano, come negli altri CPR d’Italia, i trattenuti non hanno la possibilità di svolgere alcuna attività ricreativa. Eppure Martinina S.r.l. avrebbe ottenuto in gestione via Corelli – con un appalto di 1,2 milioni di euro! – sulla base delle “proposte migliorative” dell’offerta tecnica.

    Il rapporto di Naga e Rete documenta dettagliatamente come quanto formalmente previsto dal capitolato non corrisponde a un servizio effettivo e/o di qualità 9. Ma ancor più grave è quanto emerso dalla recente inchiesta di Luca Rondi e Lorenzo Figoni per Altraeconomia: «Inchiesta sul gestore del Cpr di Milano: tra falsi protocolli e servizi non erogati».

    Interpellando le associazioni e Ong iscritte negli accordi che Martinina S.r.l. ha presentato in gara d’appalto hanno scoperto che questi protocolli d’intesa sono falsi. Altri ancora sono siglati con soggetti che non risultano da nessuna parte online, di cui di fatto non è possibile verificare la veridicità. Un accordo è addirittura firmato dal solo ente gestore, Martinina S.r.l. Tra questi le società che dovrebbero provvedere alla realizzazioni di attività ricreative e migliorative del tempo trascorso dai trattenuti all’interno del Centro.

    i trattenuti nei CPR non hanno nemmeno la possibilità di tenersi carta e penna. La giustificazione? La prima perché infiammabile e la seconda perché passibile di uso improprio. Il divieto di circolazione di carta tra i detenuti però inficia gravemente anche sul loro diritto all’informazione legale e di reclamo diretto al Garante Nazionale.

    Secondo l’offerta tecnica, Martinina S.r.l. fornisce consulenti legali interni che dovrebbero consegnare una “carta dei diritti dei trattenuti”, che però non può circolare nel CPR perché, appunto, di carta. Senza carta e penna é inoltre inverosimile che i trattenuti possano scrivere reclami diretti al Garante Nazionale. In occasione dell’accesso fisico la delegazione Naga ha potuto constatare inoltre che il vademecum che dovrebbe informarli sulle modalità di invio riporta informazioni errate: istruiscono per l’invio di reclami al Garante territoriale, che a Milano manca. Esiste un Garante Comunale che tuttavia non segue il CPR di Via Corelli per mancanze di risorse e personale e che consiglia di riferirsi alla Procura della Repubblica o al Garante Nazionale, per cui le modalità d’invio, tuttavia, richiedono procedure differenti. A queste mancanze cercano di sopperire Naga e Rete mandando costanti segnalazioni al Garante. Nel rapporto forniscono qualche dato sulle segnalazioni inviate.

    “Quale difesa?”

    Ai trattenuti viene sistematicamente limitato il diritto alla difesa. La nomina di unə avvocatə di fiducia è condizionata alle risorse economiche disponibili: quando sono scarse o ormai esaurite, non resta che l’avvocatə di ufficio. I detenuti dovrebbero poterne scegliere unə da una lista fornita dall’ente gestore. Questa, in quanto cartacea, non può circolare all’interno del CPR e quindi di fatto l’assegnazione avviene in maniera casuale. Anche quando un detenuto è assistito da unə avvocatə di fiducia, questə viene convocatə in ore serali, tarde o non viene convocatə affatto.

    Lə rappresentante legale spesso non conosce il caso, non ha avuto accesso al fascicolo, non ha nemmeno mai visto o parlato con il trattenuto. Se d’ufficio, poi, il suo incarico si limita a una singola udienza. Le udienze durano in media 6 minuti e sono svolte online: oltre alla pessima connessione internet, l’avvocatə deve decidere se presenziare di fronte al giudice o collegarsi online con la persona assistita, con ulteriori gravi implicazioni sulla qualità della difesa.

    L’impedimento al diritto di difesa viene esercitato anche in occasione dei colloqui individuali. A differenza del carcere ordinario, nei CPR questi avvengono alla presenza degli agenti di polizia. Il rapporto riporta un episodio particolarmente grave del 3 agosto 2023, in cui all’avv. Simona Stefanelli e all’interprete di fiducia che l’accompagnava, é stato inizialmente negato negato l’accesso al CPR, nonostante regolare nomina di incarico per diversi assistiti. È stato poi concesso alla sola avvocata di parlare con un solo assistito e per 30 minuti, dopodiché è stata fatta uscire sul pretesto che ci sarebbero stati altri appuntamenti per i quali doveva essere lasciata libera la stanza. Il direttore avrebbe inoltre sequestrato alcuni documenti dell’assistito impedendole di fatto di preparare un’adeguata difesa.
    L’interprete

    Fino a giugno 2022 l’interprete di fiducia poteva accedere al CPR, previa comunicazione del nominativo all’ente gestore, come anche presenziare alle udienze presso il Giudice di pace. Ora invece serve l’autorizzazione della Prefettura, che oppone dinieghi ostinati e strumentali anche in presenza di professionistə competenti e qualificatə.

    All’interprete che accompagnava l’avv. Stefanelli è stato opposto un diniego perché non aveva presentato documentazione atta a dimostrare la sua qualifica di mediatrice culturale. Quando questa è stata presentata, le si è opposto che la qualifica di per sé non fosse sufficiente, ma doveva dimostrare di svolgere “ordinariamente attività come traduttrice o mediatrice culturale a supporto di studi legali, o comunque in contesti peculiari come quello dei CPR” 10. Nel diniego si aggiungeva inoltre che l’interprete di fiducia risultava superfluo data la presenza di personale di mediazione professionista garantita dall’ente gestore.

    Non solo dal rapporto emerge come l’unico mediatore “professionista” di Martinina S.r.l. mai incontrato abbia candidamente ammesso di essere un autodidatta. In base ai protocolli presentati in gara d’appalto sarebbe Ala Milano Onlus a fornire servizi di mediazione linguistico-culturale nel CPR di Milano. Peccato che il suo presidente, intervistato da Luca Rondi e Lorenzo Figoni nell’ambito della già citata inchiesta su Altraeconomia, dichiara di non aver mai siglato quell’accordo.
    Il diritto alla salute e gli “scheletri nell’armadio”

    Il grosso del dossier riguarda i dati medici e parla di un vero e proprio ostruzionismo da parte di Prefettura ed ente gestore, vinto ancora una volta soltanto in sede di ricorso. L’ostruzionismo viene esercitato su voluti fraintendimenti tra le “cartelle cliniche” e i “diari clinici” dei trattenuti.

    Quando lə avvocatə chiede per iscritto “le cartelle cliniche” dell’assistito, l’ente gestore invia le cartelle cliniche refertate da ospedali qualora si siano verificati dei ricoveri, ma non quello che loro chiamano il “diario clinico”. Quest’ultimo è un fascicolo che l’ente gestore dovrebbe aggiornare lungo tutto il periodo di trattenimento, tra l’altro avvalendosi di un software gestionale online che comunicherebbe alla prefettura ogni aggiornamento su base quotidiana. Questo diario non viene rilasciato, come ricostruisce dettagliatamente il rapporto, neanche quando esplicitamente ordinato da sentenza del giudice su ricorso.

    Non è chiaro poi se questo software gestionale esista davvero: la documentazione ottenuta risulta scritta a mano, spesso in maniera illeggibile; inoltre anche il “registro degli eventi critici”, che da offerta tecnica dovrebbero essere registrati e comunicati informaticamente, è un quaderno da cartoleria ad anelli, “dal quale possono essere agilmente strappati fogli scomodi, non numerati né tanto meno vidimati” – Naga, 2023 (p.147)

    Quando si è riusciti ad ottenere la documentazione sanitaria di alcuni trattenuti sono emersi dei veri e propri “scheletri nell’armadio”. Ne è un esempio la storia di J.M., dettagliata nel rapporto.

    Lamentando gravi mal di testa, J.M. viene visitato in ospedale perché non era disponibile un medico nel centro; il suo referto medico viene sequestrato al rientro nel centro e il suo compagno di stanza chiama il centralino del Naga perché lo vede fortemente turbato. Lə attivistə di Naga e Rete riescono a risalire all’Ospedale dov’era stato ricoverato e scoprono che una TAC aveva rilevato una neoplasia cerebrale. Viene invece dimesso con diagnosi di crisi da verosimile astinenza da cocaina e riportato nel CPR come se nulla fosse. Il legale fa allora richiesta ufficiale della sua cartella clinica e soltanto allora J.M. viene rilasciato dal centro: più precisamente, viene abbandonato in mezzo alla strada, nonostante non fosse nemmeno in grado di camminare, e senza ricevere la sua cartella clinica.
    La non-assistenza psico-sociale in Via Corelli

    L’offerta tecnica di Martinina S.r.l prevede personale e locali adibiti ai colloqui psicologici, che però si svolgono in presenza degli agenti di polizia, in totale violazione della privacy necessaria. Nell’accesso fisico alla struttura, la delegazione Naga ha constatato che a tale servizio sarebbero incaricate due persone, di cui una si è presentata come coordinatrice del servizio. Interrogata su tecniche e modalità impiegate nel suo lavoro dimostrava gravi mancanze e ammetteva di non affiancarsi di personale di mediazione linguistico-culturale.

    Il suo nome é stato poi nominato da svariati trattenuti, che però la identificavano come l’operatrice che si occupa dei cartellini identificativi con il numero progressivo. Lə avvocatə che collaborano con Naga riportano inoltre che sarebbe sempre lei a rispondere alle email di nomina di legali di fiducia. Mansioni che non sembrano c’entrare nulla con l’incarico di psicologa.

    In assenza di un supporto psicologico adeguato la prassi è una diffusa somministrazione di psicofarmaci a fini sedativi 11, così che le condizioni psicofisiche dei trattenuti deteriorano progressivamente e velocemente. Uno non-luogo di abbandono e brutalizzazione costante.
    La storia di H.B.

    Nessuna legge vieta un ulteriore periodo di detenzione, rendendone i “termini massimi” stabiliti per legge meno effettivi. Dalle testimonianze delle persone che si sono rivolte al centralino “SOS CPR Naga”, è evidente poi che il trattenimento viene imposto e reiterato anche quando la deportazione non è attuabile, in completa violazione del Testo Unico Immigrazione 12. Inoltre, spesso vengono trasferite da un CPR a un altro in ottica punitiva e strumentale.

    Tutte queste dimensioni discriminanti possono verificarsi per una stessa persona con effetti devastanti, come esemplificato nella storia di H.B., dettagliata nel report di Naga e Rete.

    H.B. non è registrato all’anagrafe del paese di origine e dunque, poiché quest’ultimo non lo riconosce come proprio cittadino, non è deportabile. Per questo stesso motivo era stato rilasciato dal suo primo trattenimento nel CPT di Bologna, salvo poi venir messo dentro a Via Corelli a Milano. Da qui, salito sul tetto in atto di protesta contro la convocazione di un avvocato sconosciuto per la sua udienza 13, viene trasferito per punizione al CPR di Ponte Galeria a Roma, ma solo dopo due episodi di violenza da parte di almeno 6 agenti di polizia, che gli causano una ferita aperta in testa, perdite di sangue e siero da orecchie e bocca, vista offuscata e torsione del braccio.

    Perché a Ponte Galeria? Per recidere i suoi rapporti e contatti con lə attivistə di Milano, non potendo nel CPR di Roma tenere il suo cellulare personale. Invece lə avvocatə NAGA hanno continuato a seguirlo, e l’hanno poi fatto rilasciare da Ponte Galeria, proprio perché le gravi lesioni inflittegli in Via Corelli lo rendevano evidentemente inidoneo al trattenimento in CPR 14.

    Anche nel caso di H.B. il rilascio ha equivalso a un abbandono in mezzo alla strada. Lə attivistə NAGA perdono le sue tracce per un certo periodo e lo ritrovano nuovamente rinchiuso, questa volta al CPR di Gradisca d’Isonzo. Non sapendo che fare, era tornato a Bologna dove si era presentato in Questura per domandare protezione internazionale in ragione della sua apolidia. Qui non solo gli viene negato l’accesso alla domanda 15, ma nuovamente lo rinchiudono nel Centro nonostante l’ingessatura al braccio per la quale doveva risultare inidoneo. Nuovamente lə avvocatə NAGA ottengono il suo rilascio, questa volta sulla base del comprovato tentativo di domandare la protezione internazionale e presentano una denuncia per tortura, lesioni, omissione di soccorso e falso nei confronti di agenti, direttore e medico del CPR di Milano e Roma, di cui seguiamo con ansia gli esiti.
    Pratiche di deportazione, morti di Stato e morti invisibili

    Sulla base delle testimonianze di ex-trattenuti deportati e dell’ultima relazione del Garante Nazionale 16, le modalità di esecuzione delle deportazioni implicano regolarmente l’uso della violenza e dell’inganno.

    Le forze di polizia fanno irruzione nella stanza di notte, mentre tutti dormono; immobilizzano e prelevano di forza il deportando, se serve lo sedano contro la sua volontà o a sua insaputa. In alternativa usano la “trappola dell’infermeria” 17, la bugia del trasferimento in un altro centro, o ancora si fa loro credere che verranno portati dal console a cui in ultimo spetta la decisione, quando invece tutto è ormai definitivo.

    Lo stesso Garante Nazionale evidenzia gli abusi della forza da parte degli agenti, in media tre per ogni deportato: a prescindere dall’eventuale resistenza opposta dai deportandi, questi vengono immobilizzati con fascette di velcro o altri dispositivi “con modalità considerate eccezionali anche nell’ambito del regime penitenziario con il rischio di incidere fortemente sulla dignità delle persone straniere” (…) “In talune occasioni i monitor hanno constatato che i dispositivi non sono stati levati nemmeno per consentire la consumazione del pasto e durante la fruizione dei servizi igienici” 18.

    Di questo sistema di violenza e razzismo istituzionale, amministrativa e fisica le persone ci muoiono: nascosti negli impenetrabili CPR o lontano dagli occhi e dai confini territoriali.

    Naga ha domandato al Dipartimento di Pubblica Sicurezza, che fa capo al Ministero dell’Interno, quante morti fossero avventue nei CPR d’Italia negli ultimi 5 anni: sono 14, età media di 33 anni.

    Vittime immolate in nome del culto dei confini, del razzismo, del profitto senza scrupoli che riduce le persone in corpi senza storia e senza identità, solo numeri.

    Numeri a cui Naga cerca di dare un nome, che qui riportiamo per rispetto della loro dignità, confidando che ci legge non ce ne vorrà se anche il resoconto del rapporto risulta molto lungo.

    • Donna – 46 anni – Ucraina – CPR di Ponte Galeria (Roma) il 13 novembre 2018. Di lei il Naga e la Rete Mai più Lager – No ai CPR non sanno nulla, nemmeno il suo nome.

    • Harry – 20 anni – Nigeria – CPR di Brindisi Restinco – 2 giugno 2019

    • Hossain Faisal – 31 anni – Bangladesh – CPR di Torino – 8 luglio 2019

    • Ayman Mekni – 33 anni – Tunisia – CPR di Pian del Lago – Caltanissetta – 12 gennaio 2020

    • Vakthange Enukidze – 39 anni – Georgia – CPR di Gradisca d’Isonzo – gennaio 2020

    • Orgest Turia – 29 anni – Albania – CPR di Gradisca d’Isonzo – 14 luglio 2020

    • Moussa Balde – 23 anni – Nuova Guinea – CPR di Torino – maggio 2021

    • Wissem Abdel Latif – 26 anni – Tunisia – CPR di Ponte Galeria – 28 novembre 2021

    • Ezzedine Anani – 41 anni – Marocco – CPR di Gradisca di Isonzo – 6 dicembre 2021

    • Uomo: – 36 anni – Nigeria – CPR di Brindisi Restinco – 4 agosto 2022.

    • Uomo – 34 anni – Bangladesh – CPR di Ponte Galeria – 22 agosto 2022.

    • Arshad Jahangir – 28 anni – Pakistan- CPR di Gradisca d’Isonzo – 31 agosto 2022

    • Uomo – 44 anni – Nigeria – CPR di Palazzo San Gervasio – 7 ottobre 2022.

    • Nome non trapelato – 38 anni – Marocco – CPR di Brindisi Restinco – 19 dicembre 2022 (Naga, 2023, pp.175-176)

    Di questi 14 morti di stato, 5 rimangono senza nome. Morti invisibili, o meglio invisibilizzate. Le loro morti come anche le loro vite: costrette, negate, taciute. Così nella depredazione dell’Occidente a danno dei paesi resi a basso reddito, ma in realtà di estremo valore estrattivo e umano; così nel Mar Mediterraneo, ormai stabilmente rotta migratoria più mortale sul pianeta; così anche sul territorio italiano, nei campi di sfruttamento, nelle carceri, nei CPR. E di quanti morti ancora non è dato sapere, una volta che queste persone vengono espulse e allontanate dagli occhi e dalla nostra coscienza.

    Vite di cui Naga, come le altre realtà sul territorio italiano, cercano di ricostruire l’identità, per rispetto, per dignità, ma anche per offrire un’occasione a eventuali familiari delle vittime di reclamare giustizia – se davvero così può essere chiamata – sistematicamente violata nel sistema CPR d’Italia.

    https://www.meltingpot.org/2023/11/un-anno-di-osservazione-sul-cpr-di-via-corelli-milano

    #détention_administrative #rétention #asile #migrations #réfugiés #Italie #CPR #décès #morts #mourir_en_rétention #via_Corelli #Milan #rapport

    • Firme false e assistenza inesistente per i reclusi: la Procura indaga sul Cpr di Milano

      Il primo dicembre la Guardia di Finanza ha perquisito la struttura per acquisire documentazione. Il reato ipotizzato per l’ente gestore #Martinina è frode in atto pubblico. Un’inchiesta di Altreconomia aveva svelato le “false promesse” della società alla prefettura di Milano

      Servizi di mediazione e assistenza sanitaria “gravemente deficitari”, ausilio psicologico e psichiatrico “largamente insufficiente” e poi cibo “spesso maleodorante, avariato e scaduto”, mancanza di medicinali e informativa legale. Sono queste le basi su cui la Procura di Milano ha dato mandato alla Guardia di Finanza per l’ispezione dei locali del Cpr di via Corelli del primo dicembre. I reati ipotizzati per i rappresentanti della Martinina Srl, la società che si è aggiudicata l’appalto da 1,2 milioni di euro per la gestione del centro nell’ottobre 2022, sarebbero frode nelle pubbliche forniture e turbata libertà degli incanti. Le prime informazioni confermerebbero quanto emerso dalle inchieste di Altreconomia sulle presunte “false promesse” della società alla prefettura e sull’abuso di psicofarmaci.

      Sono due, infatti, i profili al vaglio degli inquirenti. Da un lato c’è la turbativa d’asta legata ai servizi promessi da Martina Srl e mai realizzati. Alessandro Forlenza, gestore del centro e Consiglia Caruso, amministratrice unica della società, avrebbero commesso “frode nell’esecuzione del contratto di appalto” ponendo in essere “espedienti maliziosi e ingannevoli idonei a far apparire l’esecuzione del contratto conforme agli obblighi assunti”. Da un lato quindi i servizi, come detto, “gravemente deficitari” riguardanti mediazione culturale e assistenza sanitaria e informativa legale e poi, in sede di aggiudicazione dell’appalto pubblicato dalla prefettura di Milano, la presenza di protocolli falsi siglati da Consiglia Caruso, all’epoca rappresentante legale della società, con organizzazioni della società civile (ignare) per migliorare l’offerta tecnica al fine di vincere la gara.

      “In concorso con persone non identificate mediante la presentazione documentazione contraffatta e apocrifa turbava la gara d’appalto”, si legge nel decreto con cui il pubblico ministero ha chiesto la possibilità di ispezionare il Corelli. I protocolli, come raccontato anche su Altreconomia, sarebbero dieci in totale. Addirittura due riguarderebbero contratti d’acquisto per distributori di tabacchi e snack. “Servizi mai resi”, sempre secondo l’accusa. Protocolli forniti ovviamente in sede di gara ed esaminati dalla Commissione giudicatrice della prefettura, la quale, nella decisione di assegnare l’appalto alla società domiciliata in provincia di Salerno, sottolineava l’importanza del “valore delle proposte migliorative dell’offerta tecnica”.

      C’è poi il capitolo sanitario. Nell’inchiesta “Rinchiusi e sedati” avevamo dato conto di un acquisto spropositato di psicofarmaci destinati al Cpr di Milano. Il pubblico ministero scrive di “visite di idoneità alla vita in comunità ristretta assolutamente carenti” con ospiti trattenuti affetti da “epatite, gravi patologie psichiatriche, tossicodipendenti, persone con tumori al cervello” a cui si aggiungono servizi di ausilio psichiatrico e psicologico “largamente insufficienti” con colloqui svolti senza i mediatori culturali. “Con le persone trattenute si capiva sulla base del feeling”, avrebbe spiegato la psicologa del centro. Sono state acquisite “copie delle cartelle cliniche e della documentazione sanitaria (attuali e passati)”.

      Martinina Srl ha attualmente altre due sedi attive: una a Palazzo San Gervasio, a Potenza, dove è arrivata seconda nella gara di assegnazione della nuova gestione del Cpr precedentemente dalla Engel, vinto da Officine Solidali nel marzo 2023, un’altra a Taranto, per la gestione del Cas Mondelli che accoglie minori stranieri non accompagnati. L’ultimo bilancio disponibile è del 31 dicembre 2021 con importi ridottissimi: appena 2.327 euro di utili “portati a nuovo”. A quella data ancora non era attivo il Cpr di via Corelli. C’è un terzo soggetto, però, nella “sfera Martinina” con ben altri risultati: si tratta della Engel Family Srl nata nell’ottobre 2020 con in “dotazione” 250mila euro derivanti da Engel Srl. Paola Cianciulli è nuovamente amministratrice e socia unica della società che si occupa di “locazione immobiliare di beni propri o in leasing” che al 31 dicembre 2021 (l’ultimo disponibile) conta un valore della produzione complessivo di poco superiore a 372mila euro.

      Anche l’avvicendamento delle società gestite dall’imprenditore Alessandro Forlenza è rilevante. Lui, nel 2012 fonda la Engel Italia Srl, ex gestore del “Corelli” di Milano e del Cpr di Palazzo San Gervasio a Potenza: oggi quella società non esiste più perché il 20 ottobre 2023 è stata definitivamente “inglobata” nella Martinina Srl, a cui inizialmente era stato ceduto il ramo d’azienda che si occupava della detenzione amministrativa. La società è formalmente in mano a Paola Cianciulli, moglie di Forlenza, che è attualmente l’amministratrice unica dopo l’uscita di scena di Consiglia Caruso (la firmataria di tutti i protocolli d’intesa sopra citati), che il 31 agosto 2023 ha ceduto i mille euro di capitale sociale. A lei restano intestate due società con sede a Milano: l’Edil Coranimo Srl, che si occupa di costruzioni, e dal febbraio 2023 l’Allupo Srl che ha sede proprio in via Corelli, nel numero civico successivo al Centro per il rimpatrio. Una dinamica che desta interesse: l’oggetto sociale della Allupo Srl è molto diversificato e oltre alla ristorazione in diverse forme (da asporto o somministrazione diretta) è inclusa anche la possibilità di “gestione di case di riposo per anziani, case famiglia per minori, Cas, Sprar, Cara e Cpr”. Forse nel tentativo di togliere di mezzo il nome di Martinina per altri eventuali bandi.

      In questo quadro c’è poi il problematico ruolo giocato dalla prefettura. In una nota rilanciata da diverse agenzie di stampa, l’ufficio territoriale del Viminale ha fatto sapere che “aveva già avviato un procedimento amministrativo per la contestazione di condotte ritenute contrarie agli obblighi contrattuali a seguito di alcune criticità gestionali emerse nei mesi scorsi” che si sarebbe concluso con “l’irrogazione della massima sanzione prevista”. Non è chiaro a quando risalgano queste contestazioni. Ma ci sono alcuni elementi noti. Secondo i dati consultati da Altreconomia il primo settembre 2023, tre mesi fa, quando l’indagine della Procura era presumibilmente già in corso, la stessa prefettura ha bonificato a Martinina 80mila euro come rimborso per la gestione della struttura di marzo 2023, una cifra in linea con quelle riconosciute per i mesi precedenti per un totale di quasi un milione di euro dall’inizio del contratto (943mila euro).

      Il 10 novembre poi, quattro giorni prima dell’uscita della nostra inchiesta su Martinina, la prefettura ha pubblicato tutta la documentazione relativa al contratto aggiudicato da Engel nel 2021, sempre per la gestione del Cpr, da cui emerge che già in quell’offerta alcuni dei protocolli d’intesa sono siglati con le stesse realtà che dichiarano di non aver mai avuto rapporti né con l’ente gestore né con il Cpr. Un eccesso di trasparenza -mai vista quando si tratta di Cpr (per ottenere l’attuale contratto d’appalto è stato necessario un ricorso al Tar da parte dell’associazione Naga)- che nei fatti si è tradotto in un’autodenuncia. “La prefettura ha provveduto a informare ‘immediatamente’ gli uffici della locale Procura sugli esiti della propria attività, ‘trasmettendole’ anche la relativa documentazione e fornendo la propria massima collaborazione”, hanno spiegato da corso Monforte.

      Dai verbali delle ispezioni prefettizie consultati da Altreconomia, però, non emergerebbe una verifica dettagliata di quanto avviene nella struttura. In uno di questi, per esempio, alla domanda “La fornitura degli effetti letterecci avviene regolarmente e secondo le tempistiche e modalità previste dallo Schema di Capitolato vigente?”, il funzionario della prefettura barra “Sì”. Ma nella nota integrativa sottostante, riportata in calce al verbale, si legge che “ai 25 trattenuti non viene richiesto di firmare la consegna/ritiro degli effetti letterecci”. Risultano perciò incomprensibili le basi su cui viene affermata l’effettiva consegna di questi oggetti. La condizione dei reclusi e l’assistenza inesistenti dell’ente gestore non sono certo una notizia di attualità, così come i protocolli falsi, chiusi nei cassetti della prefettura da più di un anno.

      https://altreconomia.it/firme-false-e-assistenza-inesistente-per-i-reclusi-la-procura-indaga-su
      #fraude #Alessandro_Forlenza #Consiglia_Caruso #Engel_Family #Engel #Paola_Cianciulli #Alessandro_Forlenza #Engel_Italia #business #Edil_Coranimo #Allupo

    • Il CPR di via Corelli a Milano sotto indagine della Procura

      Indagati gli amministratori di Martinina srl, Consiglia Caruso e Alessandro Forlenza

      La gestione del CPR di via Corelli è ufficialmente sotto inchiesta della Procura di Milano, che venerdì 1 dicembre ha disposto un’ispezione a sorpresa nel centro da parte degli agenti della Guardia di Finanza. Perquisita la documentazione dell’ente gestore all’interno della struttura e acquisite immagini e video delle condizioni del centro.

      Locali sporchi, “bagni in condizioni vergognose”, cibo “maleodorante, avariato, scaduto”. I servizi, pur previsti dal capitolato d’appalto con i quali la società si è aggiudicata ben 4,4 milioni di euro, risultano carenti o del tutto assenti. Mancate cure e visite specialistiche necessarie ai trattenuti “per il rifiuto del gestore di pagare”. Gli stessi dipendenti del centro hanno segnalato agli inquirenti mancati pagamenti del Tfr, dello stipendio e pagamenti tardivi. Visite di idoneità sommarie che hanno dichiarato idonei anche individui “affetti da epilessia, epatite, tumore al cervello, patologie psichiatriche, tossicodipendenti”. Assistenza psicologica inadeguata, assenza di informativa legale ai trattenuti, nessuna attività ricreativa né luoghi di culto.

      È quanto osservato dagli inquirenti e contenuto nel decreto di ispezione della Procura, che ipotizza i reati di frode nelle pubbliche forniture e turbativa d’asta. Tra gli indagati, oltre alla società stessa, Consiglia Caruso, firmataria di tutti i protocolli d’intesa scoperti falsi nell’inchiesta pubblicata da Altraeconomia 1, e il figlio, Alessandro Forlenza, gestore della struttura di via Corelli.

      Una “gestione familiare” (l’attuale amministratrice di via Corelli 28 è infatti Paola Cianciulli, moglie di Forlenza) già al centro delle denunce di giornalisti e associazioni presenti sul territorio, che adesso trovano seguito nelle verifiche della Procura.

      Quanto riportato dalla Procura descrive infatti lo stesso quadro dettagliato nel report-denuncia recentemente pubblicato dall’associazione Naga in collaborazione con la Rete Mai più lager – No ai CPR 2, che ha dedicato ampio spazio alle incongruenze tra capitolato d’appalto e servizi erogati, nonché alle grave mancanze del presidio sanitario. Contestualmente, tra la documentazione perquisita dagli inquirenti nel centro figurerebbero anche le cartelle cliniche dei trattenuti, che di fatto vengono sequestrate dall’ente gestore che rifiuta sistematicamente di consegnarle ai diretti interessati o ai loro rappresentanti legali.

      L’inchiesta della Procura sembra dunque una buona notizia, che ripaga almeno in parte gli sforzi, le energie e delle risorse impegnate in inchieste, impervie azioni di monitoraggio e denuncia. Che accende la speranza che responsabilità e colpe vengano finalmente stabilite e sanzionate, arginando l’impunità dilagante in cui si muovono gli enti gestori con beneplacito delle Prefetture.

      Come espresso dall’avvocato ASGI, Nicola Datena ai giornalisti di Altraeconomia, “Il monitoraggio da parte della società civile si conferma essere uno strumento fondamentale. Se quanto emerso verrà confermato nelle sedi opportune viene da chiedersi chi controlla i controllori”.

      La Prefettura di Milano, preso atto dell’ispezione nel centro da parte della Procura, ha tempestivamente emesso un comunicato per chiarire che “aveva avviato a carico dell’ente gestore un procedimento amministrativo per la contestazione di talune condotte ritenute contrarie agli obblighi contrattuali”. Un tentativo di migliorare la propria posizione di fronte alle gravi irregolarità sulle quali non ha vegliato o ha soprasseduto. Irregolarità che poi si osservano da parte della Prefettura stessa, che, tra le altre, non ha ancora formalizzato alcuna proroga dell’incarico di gestione di Martinina s.r.l., nonostante l’appalto sia formalmente scaduto il 31 di ottobre.

      “Come Rete Mai più Lager – No ai CPR teniamo a ricordare che la situazione di Corelli non è isolata, e che questo tipo di controlli andrebbe fatto a tappeto in tutti i centri che purtroppo sono ancora aperti in Italia. Ma soprattutto, teniamo a ricordare che le responsabilità vanno ricercate a tutti i livelli. E quindi non solo nei disservizi causati dagli inadempimenti dei gestori, ma anche nelle Prefetture che selezionano i candidati vittoriosi dei bandi e dovrebbero monitorarne l’attività, come anche in chi, sapendo e vedendo, tace”, scrive la Rete in un comunicato pubblicato sulle sue pagine social 3.

      Quanto emerge dalle inchieste su via Corelli non può essere ridotto a un semplice caso di malagestione e oltre alle responsabilità penali vanno messe in luce anche quelle politiche. Perché non si tratta solo di illeciti amministrativi nelle gare d’appalto, ma di gravissime e sistematiche violazioni di diritti fondamentali e della dignità delle persone.

      Quanto emerge sulla gestione del CPR di Milano non riflette un caso isolato. É un esempio di quanto accade in tutti i luoghi di detenzione amministrativa in Italia, che oggi si vogliono rafforzare e ampliare sul territorio. In tutti i CPR d’Italia le persone si ammalano, si aggravano, soffrono, si intossicano, subiscono abusi e violenze indicibili. Nei CPR d’Italia le persone muoiono. Morti di Stato e morti invisibilizzate che rimangono senza giustizia.

      I CPR vanno chiusi non perché gestiti male, ma perché sono illegittime istituzioni totali che investono risorse pubbliche nella produzione di marginalizzazione, violenza e oppressione; perché sono incarnazione di una pericolosa sospensione di principi fondamentali, che mette a rischio diritti e libertà di tuttə; perché sono massima espressione di un razzismo istituzionale e di una necropolitica che si accanisce sulle persone straniere razzializzate, martoriandone corpo, spirito e dignità.
      Un sistema di violenza razziale inaccettabile, che va superato e che chiama in causa la responsabilità politica, sociale e storica dell’intera comunità.

      https://www.meltingpot.org/2023/12/il-cpr-di-via-corelli-a-milano-sotto-indagine-della-procura

    • Milano: la vergogna del Cpr di via Corelli. Niente cure e cibo scaduto

      L’ispezione della Guardia di finanza al cpr di via Corelli a Milano nell’ambito dell’indagine per frode in pubblica fornitura. Sotto accusa la società salernitana La Martinina srl che gestisce il centro per conto della Prefettura di Milano e del ministero dell’Interno. L’inchiesta della Procura di Milano parte anche dalle segnalazioni dell’ex senatore De Falco che fece due ispezioni: «Il gestore del centro ha tutto l’interesse a trattenere il maggior numero di persone perché è pagato per quello. Se nessuno controlla può succedere qualsiasi cosa, e infatti succede»

      Ora si accende anche il faro della Procura sul Cpr di via Corelli a Milano. A far scattare l’indagine dei magistrati hanno contribuito le innumerevoli denunce pubbliche fatte in questi anni da attivisti antirazzisti, giornalisti e alcuni politici.

      Nelle carte infatti c’è tutto il corollario di cose dette in questi anni da coloro che si sono occupati dei centri di permanenza per il rimpatrio: trattamenti disumani, cibo scadente, abuso di farmaci, impossibilità di comunicare con l’esterno, assistenza sanitaria negata. I Cpr sono questo e ora su quello di Milano c’è anche la parola dei magistrati.

      NELL’INCHIESTA VIENE citata la visita effettuata dall’associazione Naga e dalla rete Mai Più Lager-No ai Cpr il 2 marzo 2023 e l’ispezione del 29 maggio 2022 dell’ex senatore del M5S Gregorio de Falco.

      L’indagine è dei pm Giovanna Cavalleri e Paolo Storari che ieri mattina hanno mandato i militari della Guardia di finanza a perquisire il centro. L’ipotesi di reato è frode in pubbliche forniture e turbativa d’asta nei confronti degli amministratore della società La Martinina srl che gestisce il Cpr per conto della Prefettura di Milano e del ministero dell’Interno. A ottobre 2022 la società aveva vinto la gara d’appalto da 4,4 milioni di euro per gestire il centro per un anno dopo alcuni passaggi societari sui cui i magistrati vogliono fare chiarezza.

      A settembre 2021 il bando era stato vinto dalla Engel Italia di Salerno, il 10 ottobre 2022 era passato alla Martinina di Pontecagnano, sempre con sede a Salerno. A novembre 2022 la Engel Italia finiva in concordato e si fondeva nella Martinina srl. Le quote delle due società fanno capo alla stessa persona, Paola Cianciulli, moglie del gestore del Cpr milanese Alessandro Forlenza, figlio dell’amministratrice della Martinina srl Consiglia Caruso.

      Dall’indagine emerge che la società vincitrice del bando aveva promesso di tutto per aggiudicarsi l’appalto: dal cibo biologico ai mediatori culturali, dall’assistenza sanitaria di qualità alle attività religiose, sociali e ricreative. E invece nulla di tutto ciò è stato fatto. Nell’assenza di controlli e di occhi indipendenti, in quei luoghi di segregazione può avvenire di tutto. E avviene.

      Da oggi però sappiamo che, almeno qui a Milano, le denunce pubbliche fatte da attivisti, associazioni e da quei pochi parlamentari che ispezionano i centri non sono cadute nel vuoto.

      SCRIVONO I PM che «il presidio sanitario con medici e infermieri era assolutamente inadeguato», mancavano medicinali e visite di idoneità alla vita nel centro per chi aveva «epilessia, epatite, tumore al cervello» e altre gravi patologie. Il supporto psicologico e psichiatrico era «largamente insufficiente e fornito da personale che non conosceva la lingua» degli immigrati trattenuti. Le camere erano «sporche», i bagni «in condizioni vergognose», il cibo «maleodorante, avariato e scaduto».

      La Martinina srl avrebbe anche prodotto documenti «contraffatti». Dagli esponenti della maggioranza di governo, che vorrebbe moltiplicare e esternalizzare oltre i confini nazionali i Cpr, non sono arrivati commenti.

      SI DIRÀ CHE QUESTI gestori di via Corelli sono delle mele marce e si proverà a difendere l’indifendibile. Dal centrosinistra in tanti hanno chiesto la chiusura del centro o la riconversione in struttura d’accoglienza, dal Pd, all’Alleanza Verdi Sinistra, a Rifondazione Comunista, al Patto Civico lombardo.

      «Da tempo chiedo la chiusura del Cpr di via Corelli, come peraltro ha fatto mesi fa il consiglio comunale di Milano» ha commentato il responsabile nazionale del Pd per le politiche migratorie Pierfrancesco Majorino.

      Quando era assessore al welfare a Milano Majorino era riuscito a convincere l’allora governo a convertire il Cpr in centro d’accoglienza. Per gli attivisti e le associazioni che si oppongono ai Cpr il problema è politico e riguarda tutte le strutture aperte in Italia.

      Dice Riccardo Tromba del Naga: «Ci aspettiamo che i magistrati abbiano trovato quello che denunciamo da tempo, in quel centro non c’era nulla di quanto promesso dal gestore. Noi ci opponiamo da sempre al trattenimento dei migranti, dal 1998 quando li istituì un governo di centrosinistra».

      Per la rete Mai Più Lager-No ai Cpr «la situazione di Corelli non è isolata, questo tipo di controlli andrebbero fatti a tappeto in tutti i centri che purtroppo sono ancora aperti in Italia. Le responsabilità vanno ricercate a tutti i livelli, quindi non solo nei disservizi causati dagli inadempimenti dei gestori, ma anche nelle prefetture che selezionano i candidati vittoriosi dei bandi e dovrebbero monitorarne l’attività, come anche in chi, sapendo e vedendo, tace».

      RESPINGE LE ACCUSE la Prefettura di Milano: «Nei mesi scorsi erano emerse criticità gestionali, era quindi stato avviato a carico dell’ente gestore un procedimento amministrativo ed era stata informata la Procura».

      De Falco: «Nel cpr vidi il degrado, colpa della gestione privata e dello Stato che nasconde»

      Gregorio De Falco, quando è stato senatore del M5S nel Cpr di via Corelli ha fatto due ispezioni. L’inchiesta della Procura di Milano parte anche dalle sue segnalazioni, cos’ha pensato questa mattina?

      Finalmente. Perché fin dall’esito della prima ispezione, quella del 5-6 giugno 2021, avendo fatto un esposto alla Procura della Repubblica mi aspettavo che qualcosa succedesse. Poi c’è stata la seconda ispezione, quella del 29 maggio 2022. Era chiara la condizione di assoluto abbandono nella quale vivevano e vivono tutt’ora le persone trattenute all’interno e mi aspettavo che qualcuno avviasse indagini. Oggi quindi dico: finalmente la giustizia si muove.

      Qual era l’obbiettivo delle sue ispezioni?

      Era quello di verificare le condizioni di vita dei trattenuti e quindi se lo Stato, attraverso le sue funzioni amministrative come la Prefettura, esercitasse il trattenimento con criteri minimi di dignità e umanità. Quello che abbiamo visto è stata invece una condizione diffusa di degrado. Le persone vengono trattenute in modo brutale perché senza aver commesso reati sono costrette a stare in un centro equivalente al carcere, ma a differenza dei carcerati a loro non è concesso il diritto di difesa, non possono fare nulla. Spesso le visite mediche sono fatte da operatori pagati dalle società di gestione, non va bene. Il gestore del centro ha tutto l’interesse a trattenere il maggior numero di persone perché è pagato per quello. Se nessuno controlla può succedere qualsiasi cosa, e infatti succede. Dal cibo avariato, all’abuso di farmaci, all’impedimento a comunicare con l’esterno. E lo Stato tiene nascosto tutto ciò.

      Il controllo del lavoro delle società che vincono gli appalti di gestione dei Cpr spetterebbe al ministero dell’Interno e alle prefetture. Avviene?

      Guardi, in quegli anni ho fatto interrogazioni parlamentari all’allora ministra dell’Interno Luciana Lamorgese e le risposte che ho avuto sono sempre state sconfortanti. Una volta avevo chiesto di entrare nel Cpr di Roma insieme a una mia collaboratrice. All’epoca il prefetto di Roma era Matteo Piantedosi. Bene, mi fu negato il permesso perché Piantedosi aveva fatto fare delle indagini sulla mia collaboratrice e non risultava essere la mia assistente legislativa parlamentare. Ma io avevo chiesto proprio a lei di accompagnarmi perché era una persona che parlava l’arabo e si occupava di immigrazione. E invece no, Piantedosi impiegò il suo tempo per fare indagini sulla mia collaboratrice e negarmi l’ingresso al Cpr.

      Oggi Piantedosi è ministro dell’Interno di un governo che i Cpr li vuole moltiplicare, persino fuori dai confini nazionali…

      Moltiplicare ed esternalizzare. Con l’idea di costruire Cpr fuori dal territorio nazionale vogliono evitare che i parlamentari possano esercitare la loro funzione di controllo su queste strutture. È gravissimo, ma penso che il piano del governo sia fallimentare perché ancora c’è una Costituzione che anche loro devono rispettare. Il livello di civiltà non può tornare indietro.

      https://www.osservatoriorepressione.info/milano-la-vergogna-del-cpr-via-corelli-niente-cure-cibo-sc

    • Condizioni disumane nel Cpr di Milano ma la Prefettura rinnova il contratto a Martinina

      La Procura di Milano ha chiesto il sequestro preventivo d’urgenza della struttura per il concreto rischio che i gravissimi reati ipotizzati continuino. L’ha fatto anche perché l’attuale gestore si era visto prolungare di un altro anno l’incarico dalla prefettura. Alle violazioni dei diritti umani si affianca l’opacità dell’impianto amministrativo

      “Era un vero e proprio lager, neanche i cani sono trattati così nei canili: gli psicofarmaci vengono dati come fossero caramelle, in alti dosaggi, con uno smodato uso di Rivotril. I medici erano razzisti: ‘meglio che muori, torna al tuo Paese’, dicevano. La pulizia? Erano posti pieni di piccioni, nutriti dagli stessi trattenuti e, com’è noto, i piccioni portano malattie. Vi era spazzatura ovunque, le stanze erano lorde, piene di mozziconi, le lenzuola erano sporche, fatte di tessuto non tessuto e non venivano ovviamente cambiate tutti i giorni. Durante l’estate poteva capitare che il sapone, pur presente, non veniva dato ai trattenuti per cui di fatto le docce non venivano fatte”.

      Questo era ed è il Cpr di via Corelli a Milano nelle parole di un lavoratore di Martinina Srl, società che gestisce la struttura dall’ottobre 2022 grazie a “promesse” false di servizi forniti ai reclusi, come anticipato nell’inchiesta di Altreconomia. Non è una dichiarazione isolata: leggere le 164 pagine con cui i sostituti procuratori Giovanna Cavalleri e Paolo Storari, il 13 dicembre 2023, hanno argomentato la richiesta di sequestro preventivo d’urgenza del ramo d’azienda che gestisce il centro, permette di ricostruire nel dettaglio l’orrore del “Corelli”. Sono gli stessi magistrati a scrivere che i reclusi “sono ridotti in condizioni che non pare esagerato definire disumane”.

      “Secondo te questi animali meritano una visita medica? Devono tornare alla giungla”. Lo avrebbe detto un medico del centro rivolgendosi a un operatore che accompagnava in ambulatorio un recluso. Il diritto alla salute sarebbe stato calpestato su più fronti. Per la necessità del gestore di risparmiare, Abdul, nome di fantasia, “non ha potuto effettuare una gastroscopia perché il gestore non pagava il ticket”; Amin, invece, pur avendo il piede fratturato non sarebbe stato visitato “per il rifiuto del gestore di pagare”.

      C’è poi, come abbiamo già raccontato, l’abuso di psicofarmaci. “Al centro ho visto dare quantità da 75 milligrammi a 300 milligrammi per tre volte al giorno di Lyrica, c’era una persona che assumeva circa 300 milligrammi di Lyrica per tre volte al giorno, cioè quasi un grammo, dose sostanzialmente fuori dosaggio”, racconta un’operatrice. “Vi era un uso smodato di Rivotril -racconta un’altra- Alcune volte venivano somministrati ad alcuni pazienti 100 gocce, io sono arrivata a diluire la boccetta con l’acqua per evitare effetti collaterali negativi”. “L’unico modo per gestire le criticità sanitarie era o lo psicofarmaco o la chiamata al 118”, ha dichiarato agli inquirenti Nicola Cocco, medico esperto di detenzione amministrativa.

      Nel centro c’erano persone che non avrebbero potuto esserci: gli inquirenti hanno ricostruito che le visite di idoneità alla comunità ristretta sono “assolutamente carenti”. Lo dimostrano la presenza all’interno del Centro di “ospiti affetti da epilessia, epatite, tumore al cervello, gravi patologie psichiatriche, tossicodipendenti” e, al momento della visita del primo dicembre, la presenza di una persona “cui sarebbe stata asportata la milza nel 2018”. “Vi erano numerosi malati psichiatrici all’interno”, racconta un’altra operatrice.

      Persone che vivevano in luoghi sudici. “Gli ambienti erano sporchi, c’erano anche dei topi all’interno delle diverse aree: le pulizie venivano svolte molto superficialmente, tanto che molti ospiti hanno avuto delle malattie epidermiche dovute alle scarse condizioni igieniche -racconta un dipendente-. Ci sono stati anche episodi di scabbia su più ospiti. Agli ospiti non è stato mai consegnato il kit per l’igiene personale, né saponi, né le lenzuola, dovevano arrangiarsi con quello che trovavano all’interno”. Ancora. “Gli ospiti vestivano sempre con la stessa tuta per l’intera giornata, sia di notte sia di giorno. Una volta a settimana avveniva il lavaggio della tuta e se qualcuno non aveva la possibilità di un cambio, restava seminudo fino a quando non venivano riconsegnata la tuta pulita”.

      E poi il cibo avariato: “Poiché erano avanzate delle vaschette di pasta, erano state offerte a noi dipendenti -si legge in una delle dichiarazioni rilasciate agli inquirenti-. A me sembrava pasta con il gorgonzola, in quanto aveva un odore rancido, poi mi sono accorta invece che era pasta con le zucchine andata a male. Ho cercato di evitare che venisse mangiata dai trattenuti, ma non sono arrivata in tempo, 40 persone hanno avuto un’intossicazione alimentare. Quasi tutti i giorni il cibo era scaduto o avariato”.

      Questo è il quadro, questo è il Cpr di via Corelli. L’Associazione per gli studi giuridici sull’immigrazione (Asgi) ha pubblicato la scorsa settimana un dettagliato report sulle lacune nella gestione del Cpr, evidenziando anche l’immobilismo della prefettura di Milano. “Dai verbali trasmessi all’Asgi a seguito di accesso civico generalizzato riguardante i verbali delle visite di controllo effettuate dalla prefettura non emerge tuttavia alcuna verifica sul rispetto dei diritti fondamentali delle persone trattenute nel Cpr, né alcun rilievo da parte dell’amministrazione riguardo della corretta erogazione dei servizi previsti in offerta tecnica”, scrive l’associazione a margine del report. Un paradosso, a cui se ne aggiunge un altro.

      La richiesta dei Pm di sequestrare la struttura arrivata a sorpresa il 13 dicembre 2023 nasce da un motivo ben preciso. Il 17 novembre 2023 la società Martinina, gestita da Alessandro Forlenza (amministratore di fatto), accusato di frode insieme alla madre Consiglia Caruso (fino al 31 agosto amministratrice unica sostituita poi dalla moglie di Forlenza, Paola Cianciulli), si è vista rinnovare il contratto siglato con la prefettura di Milano per la gestione della struttura per un altro anno. La firma di Caruso sul rinnovo è del primo dicembre, il pomeriggio di quando la Gdf ha fatto l’accesso in struttura. Il “nuovo” contratto, pubblicato sul sito della Prefettura, ricalca quello precedente. Non si menziona nessuno dei problemi di gestione da parte di Martinina.

      Un paradosso. Anche perché, dall’ufficio territoriale del Viminale, in seguito alla perquisizione della Guardia di Finanza al centro del primo dicembre, avevano fatto sapere di aver “già avviato un procedimento amministrativo per la contestazione di condotte ritenute contrarie agli obblighi contrattuali a seguito di alcune criticità gestionali emerse nei mesi scorsi” che si sarebbe concluso con “l’irrogazione della massima sanzione prevista”. Ma il contratto è stato rinnovato, come detto, come se tutto fosse normale.

      A quali criticità potrebbe riferirsi la Prefettura? “Il verbale dell’ispezione del 18 aprile 2023 -si legge però nel report di Asgi- non viene trasmesso sostenendo di non volere compromettere le verifiche tutt’ora in corso, essendo in corso istruttoria in merito alle spese sostenute per il personale”. Una presunta “massima sanzione” quindi che potrebbe essere riferita a questo specifico punto. Anche perché il 13 novembre il contratto è stato rinnovato. Ecco perché i procuratori Storari e Cavalleri hanno sequestrato la struttura. “Gli elementi testimoniano una situazione di frode non soltanto a oggi in atto ma destinata a proseguire nel prossimo futuro -scrivono- tale situazione di illegalità non potrà prevedibilmente che protrarsi almeno per un ulteriore intero anno”.

      C’è poi un’altra stranezza: dopo che l’Asgi ha inviato il report all’Autorità nazionale anticorruzione, il 10 novembre 2023 la prefettura ha pubblicato il contratto del precedente appalto di gestione del Cpr (all’epoca la società gestita di fatto da Forlenza era la Engel Italia). Le associazioni Dianova, BeFree, l’organizzazione “Musica e Teatro” vengono citate tra i firmatari dei protocolli di intesa presentati anche nell’offerta tecnica di Engel Srl formulata il 26 maggio 2021 per l’aggiudicazione del bando precedente a quello in essere.

      La richiesta della Procura è quella, come detto, del sequestro del ramo d’azienda che gestisce la struttura “senza però determinare la cessazione del Cpr, con l’immissione in possesso di un amministratore”. I magistrati non stanno quindi chiedendo la chiusura del Centro -almeno per ora- ma non è chiaro che cosa succederà e come verrà gestita la struttura. Nel frattempo, venerdì 15 dicembre, si è svolta l’udienza di fronte al giudice per le indagini preliminari per decidere se Martinina potrà in futuro partecipare a bandi pubblici.

      Al di là dell’esito giudiziario della vicenda, si ha un’altra prova dell’orrore di quello che succede nel Corelli, come denunciano da anni diverse associazioni, dalla rete Mai più lager – No ai Cpr al Naga. E non solo. “Emerge il fallimento del sistema Cpr, incluso il caso di Milano -spiega Giulia Vicini, avvocata Asgi-. Si tratta di un fallimento che non riguarda solo le ormai croniche e documentate violazioni dei diritti fondamentali e l’inefficienza, ma anche l’opacità dell’impianto burocratico-amministrativo che concede in appalto la vita delle persone a società private”. “Si entra come persona -ha raccontato un’operatrice agli inquirenti-. Poi viene assegnato un tesserino di riconoscimento con un numero, e a quel punto si diventa numeri e si esce da zombie imbottiti di psicofarmaci”.

      https://altreconomia.it/la-disumanita-nel-cpr-di-milano-e-la-prefettura-rinnova-il-contratto-a-

    • Freddo, cibo scadente e nuovi ingressi. Al Cpr di Milano nulla è cambiato

      Da fine dicembre il centro di via Corelli è gestito da un amministratore giudiziario dopo l’inchiesta della Procura sui mancati servizi erogati dalla Martinina Srl. Un mese dopo manca un direttore e la condizione dei reclusi resta precaria. I nuovi ingressi, inoltre, non si fermano. Un appello chiede ai sanitari coinvolti di prendere posizione

      Riscaldamento rotto, mancanza di coperte, lenzuola di carta velina, cibo ancora scadente: il Cpr di Milano sembra essere lo stesso di sempre a un mese dalla nomina dell’amministratore giudiziario subentrato alla Martinina Srl, l’ente gestore sotto indagine della Procura per aver “promesso” servizi non erogati. “Ho constatato in prima persona che la società resta di fatto ancora alla guida della struttura -spiega Paolo Romano, consigliere regionale del Partito democratico che ha fatto visita al ‘Corelli’ il 17 gennaio- nonostante le accuse relative alla scarsa qualità del cibo, alla mancanza dei servizi psicologici e delle visite mediche. L’unica soluzione a questo punto è la chiusura”.

      Secondo diverse testimonianze raccolte da Altreconomia la situazione sarebbe ancora peggiore di prima. Gli stessi funzionari di polizia non saprebbero a chi rivolgersi quando ci sono problematiche nella struttura anche perché, fino al 17 gennaio, non era ancora stato nominato un direttore. I dipendenti operativi nella struttura sarebbero invece gli stessi. Inoltre, Martinina Srl non avrebbe liquidità per garantire i servizi basilari per le persone ristrette.

      Questa situazione non fermerebbe però i nuovi ingressi: anche perché, per le “regole di appalto”, al di sotto di un certo numero di ospiti, la gestione del centro è in perdita. Un settore della struttura rimane chiuso e di conseguenza la capienza massima è ridotta: una gestione che non vada in perdita taglierà là dove è possibile farlo. “L’affidamento del Cpr al ribasso a soggetti privati fa sì che si perdano anche i pochi servizi che dovrebbero essere garantiti e si aggravino così le violazioni dei diritti umani”, riprende il consigliere Romano.

      Il 29 dicembre 2023 la prefettura di Milano vista “l’assoluta urgenza ed ineluttabilità dell’intervento connesso alle esigenza di sicurezza ed igiene del Centro di accoglienza” ha affidato alla Sfhera Srl, azienda di Milano, lavori per più di 30mila euro destinati a “servizi di manutenzione ordinaria e obbligatoria della centrale termica, degli impianti di raffrescamento e dei presidi antincendio” per garantire “l’efficienza della struttura”. Un’urgenza tale che i lavori vengono affidati “anche nelle more dell’accreditamento dei fondi”. Ma le persone sarebbero ancora al freddo.

      Nel frattempo, l’azienda guidata dall’imprenditore Alessandro Forlenza ha fatto ricorso a inizio gennaio 2024 contro la decisione del Giudice per le indagini preliminari di metà dicembre 2023 di commissariare il Cpr, dandolo in gestione al commercialista Giovanni Falconieri e impedire così alla “sua” Martinina Srl di partecipare a bandi pubblici per un anno. Un provvedimento che si è reso necessario perché, nonostante le indagini e le gravi accuse rivolte alla “gestione” del centro, l’azienda si era vista rinnovare di un anno il contratto da parte della prefettura di Milano il 17 novembre 2023. A quel punto i pubblici ministeri titolari dell’indagine, Paolo Storari e Giovanna Cavalleri, avevano chiesto il sequestro preventivo d’urgenza, poi accolto dal gip Livio Cristofano, perché “gli elementi testimoniano una situazione di frode non soltanto a oggi in atto ma destinata a proseguire nel prossimo futuro -scrivevano- tale situazione di illegalità non potrà prevedibilmente che protrarsi almeno per un ulteriore intero anno”.

      Tra il 2021 e il 2022 in cinque mesi la spesa in psicofarmaci è superiore al 60% del totale, di cui oltre la metà ha riguardato il Rivotril (196 scatole)

      Il Cpr nelle parole delle persone sentite dalla Procura di Milano è stato descritto come “un vero e proprio lager” in cui “gli psicofarmaci vengono dati “come fossero caramelle, in alti dosaggi, con uno smodato uso di Rivotril”, come già documentato da Altreconomia nell’aprile 2023. E proprio il tema della salute resta un elemento centrale. Anche per questo motivo, a metà gennaio 2024 la Società italiana di medicina delle migrazioni (Simm), “Mai più lager – No ai Cpr” e l’Associazione per gli studi giuridici sull’Immigrazione (Asgi) hanno rivolto a tutto il personale sanitario un appello per una “presa di coscienza sulle condizioni e sui rischi per la salute delle persone migranti sottoposte a detenzione amministrativa”. Soprattutto per quanto riguarda la valutazione dell’idoneità a fare ingresso nel centro: un “compito” che spetterebbe ai medici del Servizio sanitario nazionale, con diversi profili problematici.

      Da un lato, si chiede ai medici “di attestare in pochi minuti lo stato di salute di persone di cui non conoscono la vita né il percorso migratorio, per l’invio in luoghi che non conoscono, in cui la salute è gestita da enti privati e che molteplici fonti attendibili hanno ormai certificato essere patogeni e rischiosi per la salute delle persone che vi vengono detenute”. Ma non solo. Entra in gioco anche il rispetto del codice di deontologia medica rispetto su diversi profili, tra cui l’obbligo per il medico di “protezione del soggetto vulnerabile” quando ritiene che l’ambiente in cui vive non sia idoneo a proteggere la sua salute, dignità e qualità di vita “come di fatto si può configurare il contesto dei Cpr”.

      “I Cpr rinchiudono senza diritti e senza motivazioni persone che non hanno commesso un reato con il solo risultato di togliere loro dignità e renderle vere e proprie bombe sociali. E l’attuale situazione di Milano è insostenibile” – Paolo Romano

      “Secondo te questi animali meritano una visita medica? Devono tornare alla giungla”. Lo avrebbe detto un medico del Cpr di Milano rivolgendosi a un operatore che accompagnava in ambulatorio un recluso. Il diritto alla salute sarebbe stato calpestato su più fronti. Per la necessità del gestore di risparmiare -sempre secondo le ricostruzioni delle persone sentite dalla Procura di Milano- un recluso “non ha potuto effettuare una gastroscopia perché il gestore non pagava il ticket”; un altro, invece, pur avendo il piede fratturato non sarebbe stato visitato “per il rifiuto del gestore di pagare”. Un contesto da tenere conto nel momento in cui si dà l’idoneità alla persona per far ingresso nel Cpr.

      Nel caso di Milano, come denunciato dalla rete “Mai più lager – No ai Cpr” a inizio gennaio di quest’anno, le visite sarebbero svolte da due medici che nel 2021 “comparivano non solo a libro paga di Ats ma anche operanti in questura e soprattutto collaboratori a partita Iva del gestore del Cpr”. Un altro cortocircuito. E con delibera del 29 dicembre 2023, denuncia sempre la rete di attivisti e attiviste, l’Ats di Milano ha nuovamente incaricato i due dottori fino a febbraio con un compenso di 30 euro all’ora. “Se redatta come superficiale nulla osta potrebbe essere contestata e il medico che l’ha firmato coinvolto in sede giudiziaria”, scrivono le organizzazioni nell’appello rivolto agli operatori sanitari. “In coscienza e con cognizione di causa -sottolineano- tenendo presenti i principi fondamentali dell’ordinamento e della deontologia professionale medica, nessuno può essere considerato idoneo ad esservi rinchiuso”. Invece al “Corelli” di Milano si continua ad entrare. Come se niente fosse.

      Il 29 dicembre 2023 la Prefettura di Milano ha saldato un pagamento di 170mila euro alla Martinina Srl che comprende anche un “acconto per l’amministratore giudiziario”. Non è però specificato a quanti e quali mesi di gestione si riferiscono e quindi è impossibile, ricostruire a quanto ammonta la “massima sanzione” che l’ufficio milanese del Viminale, a inizio dicembre, ha dichiarato di aver applicato per la “malagestione” del Cpr. “Va chiuso, lo ribadisco -conclude il consigliere Romano-. I Cpr rinchiudono senza diritti e senza motivazioni persone che non hanno commesso un reato con il solo risultato di togliere loro dignità e renderle vere e proprie bombe sociali. E l’attuale situazione di Milano è insostenibile”.

      https://altreconomia.it/freddo-cibo-scadente-e-nuovi-ingressi-al-cpr-di-milano-nulla-e-cambiato

    • Milano: Ancora violenze poliziesche nel cpr di via Corelli

      Ancora violenze di polizia contro i migranti reclusi nel Cpr di via Corelli, il centro permanenza e rimpatri finito sotto sequestro dopo un’inchiesta della procura di Milano che aveva certificato le condizioni disumane dei migranti all’interno. Nella serata di sabato una protesta contro le condizioni di reclusione, che nonostante il commissariamento avviato dopo l’azione della Procura non sono migliorate, ha preso vita nel cortile del centro, dove due persone si sono spogliate.

      Una volta rientrate nelle stanze è giunta la rappresaglia da parte di alcuni agenti della guardia di finanza che in assetto antisommossa, hanno punito a suon di manganellate i due migranti protagonisti della protesta che sono poi stati portati in infermeria: “uno con una gamba visibilmente rotta e l’altro, il più giovane, quasi esanime , in braccio”, afferma pubblicando un video la rete “Mai più lager – No ai Cpr” (https://www.facebook.com/watch/?v=1114485583309953). I due sono stati anche denunciati per resistenza a pubblico ufficiale.

      https://www.osservatoriorepressione.info/milano-ancora-violenze-poliziesche-nel-cpr-via-corelli

  • La Corte europea condanna l’Italia a pagare per i maltrattamenti ai migranti : costretti a denudarsi, privati della libertà e malnutriti

    La causa avviata da quattro esuli sudanesi: dovranno ricevere in tutto 36 mila euro dallo Stato

    VENTIMIGLIA. Spogliati «senza alcuna ragione convincente». Maltrattati e «arbitrariamente privati della libertà». Ecco perché, la Corte Europea per i Diritti dell’Uomo ha condannato l’Italia a risarcire quattro migranti sudanesi con cifre che vanno dagli 8 ai diecimila euro ciascuno. La sentenza della prima sezione della Corte (presieduta da Marko Bošnjak) è datata 16 novembre, ma riguarda episodi accaduti nell’estate del 2016. Dopo aver avviato le pratiche per far attribuire ai loro clienti lo status di rifugiato, nel febbraio 2017 gli avvocati (Nicoletta Masuelli, Gianluca Vitale e Donatella Bava, tutti di Torino) avevano deciso di rivolgersi alla Corte di Strasburgo.
    I quattro erano arrivati in Italia in momenti diversi: due «in un giorno imprecisato di luglio» del 2016 a Cagliari, un altro il 14 luglio a Reggio Calabria, uno il 6 agosto sempre a Reggio Calabria e l’ultimo l’8 agosto «in un luogo imprecisato della costa siciliana». Il più giovane ha 30 anni, il più vecchio 43.

    In comune, i quattro hanno che sono stati tutti trasferiti nello stesso centro di accoglienza gestito dalla Croce Rossa a Ventimiglia. Sono stati «costretti a salire su un furgone della polizia», trasportati in una caserma dove sono stati «perquisiti», obbligati a consegnare «i telefoni, i lacci delle scarpe e le cinture» e poi «è stato chiesto loro di spogliarsi». Sono rimasti nudi dieci minuti, in attesa che gli agenti rilevassero le loro impronte digitali.
    Concluse le procedure, la polizia ha fatto salire i quattro (assieme a una ventina di connazionali) su un pullman. Destinazione: l’hotspot di Taranto. Secondo quanto ricostruito nella sentenza, i migranti sono stati «costretti a rimanere seduti per l’intero viaggio» e potevano andare in bagno soltanto scortati e lasciando la porta spalancata, rimanendo «esposti alla vista degli agenti e degli altri migranti».
    Il 23 agosto, i quattro (con un gruppo di compatrioti) sono risaliti su un pullman diretti a Ventimiglia, dove hanno incontrato un rappresentante del governo sudanese che li ha riconosciuti come cittadini del suo Paese. A quel punto, è stata avviata la procedura per il rimpatrio. In aereo, dall’aeroporto di Torino Caselle. Ma sul velivolo c’era posto soltanto per sette migranti, così il questore aveva firmato un provvedimento di trattenimento e i quattro sono stati accompagnati al Centro di identificazione ed espulsione di Torino.
    Uno, però, è stato prelevato pochi giorni dopo dalla polizia. Per lui, era pronto un posto sull’aereo per il rimpatrio. Lui non voleva, arrivato a bordo ha incominciato a dare in escandescenze assieme a un altro migrante finché il comandante del velivolo ha deciso di chiedere alla polizia di farli sbarcare entrambi, per problemi di sicurezza. Appena rientrato al Cie, l’uomo ha ribadito la sua intenzione di ottenere la protezione internazionale. Lo stesso hanno fatto gli altri tre. Tutti hanno ottenuto lo status di rifugiato.

    La sentenza della Corte condanna l’Italia a pagare per varie violazioni. Una riguarda «la procedura di spogliazione forzata da parte della polizia», che «può costituire una misura talmente invasiva e potenzialmente degradante da non poter essere applicata senza un motivo imperativo». E per i giudici di Strasburgo «il governo non ha fornito alcuna ragione convincente» per giustificare quel comportamento. Poi, ci sono le accuse dei quattro di essere rimasti senz’acqua e cibo nel trasferimento Ventimiglia-Taranto e ritorno. Il governo aveva ribattuto fornendo «le copie delle richieste della questura di Imperia a una società di catering», che però «riguardavano altri migranti». Per la Corte, quella situazione «esaminata nel contesto generale degli eventi era chiaramente di natura tale da provocare stress mentale». E ancora, le condizioni vissute in quei giorni «hanno causato ai ricorrenti un notevole disagio e un sentimento di umiliazione a un livello tale da equivalere a un trattamento degradante», vietato dalla legge. I giudici di Strasburgo ritengono, poi, che i quattro siano «stati arbitrariamente privati della libertà», pur se in una situazione di «vuoto legislativo dovuto alla mancanza di una normativa specifica in materia di hotspot», già denunciata nel 2016 dal garante nazionale dei detenuti.

    Per la Corte, ce n’è abbastanza per condannate l’Italia a risarcire i quattro: uno dovrà ricevere 8 mila euro, un altro 9 mila e altri due diecimila «a titolo di danno morale».

    https://www.lastampa.it/cronaca/2023/11/18/news/litalia_condannata_a_pagare_per_i_maltrattamenti_ai_migranti-13871399

    Le périple des 4 Soudanais en résumé :
    – 4 personnes concernées, ressortissants soudanais
    – 2 arrivés à Cagliari en juillet 2016, un le 14 juillet à Reggio Calabria, un le 16 août 2016
    – Transfert des 4 au centre d’accueil de la Croix-Rouge à Vintimille avec un fourgon de la police —> dénudés, humiliés
    – Transfert (avec 20 autres) vers l’hotspot de Taranto
    – 23 août —> transfert à Vintimille par bus, RV avec un représentant du gouvernement soudanais qui a reconnu leur nationalité soudanaise, début procédure de renvoi vers Soudan en avion
    – Transfert à l’aéroport de Torino Caselle, mais pas de place pour les 4 dans l’avion
    – Transfert au centre de rétention de Turin
    – Personne ne part, les 4 arrivent à demander l’asile et obtenir le statut de réfugié
    – Novembre 2023 : Italie condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme

    #justice #condamnation #Italie #frontières #frontière_sud-alpine #CEDH #cour_européenne_des_droits_de_l'homme #mauvais_traitements #privation_de_liberté #nudité #violences_policières #Taranto #hotspot #CPR #rétention #détention_administrative #réfugiés_soudanais #Turin #migrerrance #humiliation

    voir aussi ce fil de discussion sur les transferts frontière_sud-alpine - hotspot de Taranto :
    Migranti come (costosi) pacchi postali


    https://seenthis.net/messages/613202

    • Denudati, maltrattati e privati della libertà: la CEDU condanna nuovamente l’Italia

      Le persone migranti denunciarono i rastrellamenti avvenuti a Ventimiglia nell’estate 2016

      La Corte Europea per i Diritti dell’Uomo (CEDU) ha nuovamente condannato l’Italia a risarcire con un totale di 27mila euro (più 4.000 euro di costi e spese legali) quattro cittadini sudanesi per averli denudati, maltrattati e privati della libertà nell’estate 2016 durante le cosiddette operazioni per “alleggerire la pressione alla frontiera” di Ventimiglia, quando centinaia di persone migranti venivano coattivamente trasferite negli hotspot del sud Italia 1 e, in alcuni casi, trasferiti nei CIE e quindi rimpatriati nel paese di origine 2.

      C’è da dire che la Corte avrebbe potuto condannare l’Italia con maggiore severità, soprattutto per quanto riguarda le deportazioni in un paese non sicuro come il Sudan. Tuttavia, si tratta dell’ennesima conferma che l’Italia nega i diritti fondamentali alle persone migranti e che i governi portano avanti operazioni nei quali gli abusi e i maltrattamenti delle forze dell’ordine non sono delle eccezioni o degli eccessi di un singolo agente, ma qualcosa di strutturale e quindi sistemico. E quando queste violazioni sono denunciate, nemmeno vengono condotte indagini per fare luce sulle responsabilità e indagare i colpevoli.

      La sentenza della CEDU pubblicata il 16 novembre 3 riguarda nove cittadini sudanesi arrivati in Italia nell’estate del 2016 i quali hanno denunciato diversi abusi subiti dalle autorità italiane, un tentativo di rimpatrio forzato e uno portato a termine.

      Nel primo caso i ricorrenti hanno avanzato denunce in merito al loro arresto, trasporto e detenzione in Italia, uno di loro ha anche affermato di essere stato maltrattato.

      I quattro ricorrenti del primo caso hanno ottenuto la protezione internazionale, mentre i cinque ricorrenti del secondo caso hanno affermato di aver fatto parte di un gruppo di 40 persone migranti che erano state espulse subito dopo il loro arrivo in Italia.

      Le persone sono state difese dall’avv. Gianluca Vitale e dell’avv.te Nicoletta Masuelli e Donatella Bava, tutte del foro di Torino.
      I fatti riportati nella sintesi

      I quattro ricorrenti nel primo caso sono nati tra il 1980 e il 1994. Vivono tutti a Torino, tranne uno che vive in Germania. I ricorrenti nel secondo caso sono nati tra il 1989 e il 1996. Uno vive in Egitto, uno in Niger e tre in Sudan.

      Tutti e nove i richiedenti sono arrivati in Italia nell’estate del 2016. I primi quattro hanno raggiunto le coste italiane in barca, mentre gli altri cinque sono stati salvati in mare dalla Marina italiana. Alcuni sono transitati attraverso vari hotspot e tutti sono finiti a Ventimiglia presso il centro della Croce Rossa.

      Secondo i ricorrenti nel primo caso, il 17 e il 19 agosto 2016 sono stati arrestati, costretti a salire su un furgone della polizia e portati in quella che hanno capito essere una stazione di polizia. Sono stati perquisiti, è stato chiesto loro di spogliarsi e sono stati lasciati nudi per circa dieci minuti prima che venissero prese le loro impronte digitali.

      Sono stati poi costretti a salire su un autobus, scortati da numerosi agenti di polizia, senza conoscere la loro destinazione e senza ricevere alcun documento sulle ragioni del loro trasferimento o della loro privazione di libertà. In seguito hanno scoperto di essere stati trasferiti da Ventimiglia all’hotspot di Taranto.

      Nell’hotspot di Taranto, dal quale non avrebbero potuto uscire, sostengono di aver ricevuto un provvedimento di respingimento il 22 agosto 2016. Il giorno successivo sono stati riportati a Ventimiglia in autobus.

      Secondo i ricorrenti, le condizioni all’hotspot erano difficili come lo erano durante ciascuno dei trasferimenti in autobus durati 15 ore. Erano sotto il costante controllo della polizia, in un clima di violenza e minacce, senza cibo o acqua sufficienti in piena estate.

      Sostengono di non aver incontrato un avvocato o un giudice durante quel periodo e di non aver capito cosa stesse succedendo. Il 24 agosto 2016 sono stati trasferiti da Ventimiglia all’aeroporto di Torino per essere imbarcati su un volo per il Sudan. Poiché non c’erano abbastanza posti sull’aereo, il loro trasferimento è stato posticipato. Sono stati quindi trasferiti al CIE (Centro di identificazione ed espulsione) di Torino e il Questore ha emesso per ciascuno di loro un provvedimento di trattenimento.

      Uno dei ricorrenti (T.B.) sostiene che le autorità hanno tentato di espellerlo nuovamente il 1° settembre 2016. Ha protestato e la polizia lo ha colpito al volto e allo stomaco. Lo hanno poi costretto a salire sull’aereo e lo hanno legato. Tuttavia, il pilota si è rifiutato di decollare a causa del suo stato di agitazione. È stato riportato al CIE di Torino.

      Tutti e quattro i richiedenti hanno ottenuto la protezione internazionale, essenzialmente sulla base della loro storia personale in Sudan e del conseguente rischio di vita in caso di rimpatrio.

      Secondo i ricorrenti del secondo caso, invece, non sono mai stati informati in nessun momento della possibilità di chiedere protezione internazionale. Sostengono inoltre di aver fatto parte di un gruppo di circa 40 migranti per i quali è stato trovato posto sul volo in partenza il 24 agosto 2016 e di essere stati rimpatriati a Khartoum lo stesso giorno.

      Il governo italiano ha contestato tale affermazione, sostenendo che i ricorrenti non sono mai stati sul territorio italiano. Hanno fornito alla Corte le fotografie identificative delle persone rimpatriate in Sudan il 24 agosto 2016, sostenendo che non presentavano una stretta somiglianza con i ricorrenti. Ha sostenuto inoltre che i nomi delle persone allontanate non corrispondevano a quelli dei ricorrenti. In considerazione del disaccordo delle parti, la Corte ha nominato un esperto di comparazione facciale della polizia belga (articolo A1, paragrafi 1 e 2, del Regolamento della Corte – atti istruttori) che, il 5 ottobre 2022, ha presentato una relazione per valutare se le persone rappresentate nelle fotografie e nei filmati forniti dai rappresentanti dei ricorrenti corrispondessero a quelle raffigurate nelle fotografie identificative presentate dal Governo.

      Il rapporto ha concluso, per quanto riguarda uno dei ricorrenti nel caso, W.A., che i due individui raffigurati in tali fonti corrispondevano al massimo livello di affidabilità. Per quanto riguarda gli altri quattro richiedenti, non vi era alcuna corrispondenza affidabile.
      La decisione della Corte

      Le sentenze sono state emesse da una Camera di sette giudici, composta da: Marko Bošnjak (Slovenia), Presidente, Alena Poláčková (Slovacchia), Krzysztof Wojtyczek (Polonia), Péter Paczolay (Ungheria), Ivana Jelić (Montenegro), Erik Wennerström (Svezia), Raffaele Sabato (Italia), e anche Liv Tigerstedt, Vice Cancelliere di Sezione.

      La Corte, ha ritenuto, all’unanimità, che vi è stata:

      1) una violazione dell’articolo 3 per quanto riguarda l’assenza di una ragione sufficientemente convincente per giustificare il fatto che i ricorrenti siano stati lasciati nudi insieme a molti altri migranti, senza privacy e sorvegliati dalla polizia e le condizioni dei loro successivi trasferimenti in autobus da e verso un hotspot, sotto il costante controllo della polizia, senza sapere dove stessero andando;

      2) una violazione dell’articolo 3, in quanto non è stata svolta alcuna indagine in merito alle accuse del ricorrente di essere stato picchiato da agenti di polizia durante un tentativo di rimpatrio;

      3) la violazione dell’articolo 5, paragrafi 1, 2 e 4 (diritto alla libertà e alla sicurezza) per quanto riguarda tre dei quattro ricorrenti in relazione al loro fermo, trasporto e detenzione arbitrari.

      La Corte ha stabilito che l’Italia deve pagare ai ricorrenti nel caso A.E. e T.B. contro Italia 27.000 euro per danni morali e 4.000 euro, congiuntamente, per costi e spese.

      In particolare:

      Per quanto riguarda i restanti reclami dei ricorrenti in A.E. e T.B. contro l’Italia, la Corte ha riscontrato che le condizioni del loro arresto e del trasferimento in autobus, considerate nel loro insieme, devono aver causato un notevole disagio e umiliazione, equivalenti a un trattamento degradante, in violazione dell’Articolo 3.

      Inoltre, i successivi lunghi trasferimenti in autobus dei ricorrenti sono avvenuti in un breve lasso di tempo e in un periodo dell’anno molto caldo, senza cibo o acqua sufficienti e senza che sapessero dove erano diretti o perché. Erano sotto il costante controllo della polizia, in un clima di violenza e di minacce. Queste condizioni, nel complesso, devono essere state fonte di angoscia.

      Infine, la Corte ha riscontrato una violazione dell’Articolo 3 per quanto riguarda il richiedente (T.B.) che ha affermato di essere stato picchiato durante un altro tentativo di allontanamento. Due degli altri richiedenti hanno confermato il suo racconto durante i colloqui relativi alle loro richieste di protezione internazionale; uno ha dichiarato in particolare di aver visto un altro migrante che veniva riportato dalla polizia dall’aeroporto con il volto tumefatto. Anche se T.B. aveva detto, durante un colloquio con le autorità, di essere in grado di identificare i tre agenti di polizia responsabili dei suoi maltrattamenti, non è stata condotta alcuna indagine.

      La Corte ha notato che il Governo le aveva fornito una copia di un’ordinanza di refusal-of-entry nei confronti di uno dei richiedenti, A.E., datata 1 agosto 2016, e la Corte ha quindi dichiarato inammissibile il suo reclamo sulla sua detenzione. D’altra parte, ha rilevato che gli altri tre ricorrenti nel caso, ai quali non erano stati notificati ordini di refusal-of-entry fino al 22 agosto 2016, erano stati arrestati e trasferiti senza alcuna documentazione e senza che potessero lasciare l’hotspot di Taranto. Ciò ha comportato una privazione arbitraria della loro libertà, in violazione dell’Articolo 5 § 1.

      Inoltre, era assente una legislazione chiara e accessibile relativa agli hotspot e la Corte non ha avuto alcuna prova di come le autorità avrebbero potuto informare i richiedenti delle ragioni legali della loro privazione di libertà o dare loro l’opportunità di contestare in tribunale i motivi della loro detenzione de facto.

      La Corte ha però respinto come inammissibili tutti i reclami dei nove ricorrenti, tranne uno, in merito al fatto che le autorità italiane non avevano preso in considerazione il rischio di trattamenti inumani se fossero stati rimpatriati in Sudan. In A.E. e T.B. contro Italia, i richiedenti, che avevano ottenuto la protezione internazionale, non erano più a rischio di deportazione e non potevano quindi affermare di essere vittime di una violazione dell’Articolo 3. In W.A. e altri c. Italia, la Corte ha ritenuto che quattro dei cinque ricorrenti, per i quali il rapporto della polizia belga del 2022 non aveva stabilito una corrispondenza affidabile tra le fotografie fornite dalle parti, non avessero sufficientemente motivato i loro reclami.

      La Corte ha dichiarato ammissibile il reclamo del ricorrente, W.A.. Ha osservato che i documenti disponibili erano sufficienti per concludere che si trattava di una delle persone indicate nelle fotografie identificative fornite dal Governo. Ha quindi ritenuto che fosse tra i cittadini sudanesi allontanati in Sudan il 24 agosto 2016. Tuttavia, la Corte ha continuato a ritenere che non vi fosse stata alcuna violazione dell’Articolo 3 nel caso di W.A. .

      In particolare, ha notato che c’erano state delle imprecisioni nel suo modulo di richiesta alla Corte e che, sebbene fosse stato assistito da un avvocato in diversi momenti della procedura di espulsione, aveva esplicitamente dichiarato di non voler chiedere la protezione internazionale e di essere semplicemente in transito in Italia. Inoltre, a differenza dei richiedenti nel caso A.E. e T.B. contro l’Italia, che avevano ottenuto la protezione internazionale sulla base delle loro esperienze personali, W.A. aveva sostenuto di appartenere a una tribù perseguitata dal Governo sudanese solo dopo aver presentato la domanda alla Corte europea. Questa informazione non era quindi disponibile per le autorità italiane al momento rilevante e la Corte ha concluso che il Governo italiano non ha violato il suo dovere di fornire garanzie effettive per proteggere W.A. dal respingimento arbitrario nel suo Paese d’origine.

      – Guerra al desiderio migrante. Deportazioni da Ventimiglia e Como verso gli hotspot, di Francesco Ferri (https://www.meltingpot.org/2016/08/guerra-al-desiderio-migrante-deportazioni-da-ventimiglia-e-como-verso-gl) – 17 agosto 2026
      – Rimpatrio forzato dei cittadini sudanesi: l’Italia ha violato i diritti. Rapporto giuridico sul memorandum d’intesa Italia-Sudan a cura della Clinica Dipartimento di Giurisprudenza di Torino (https://www.meltingpot.org/2017/10/rimpatrio-forzato-dei-cittadini-sudanesi-litalia-ha-violato-i-diritti-um) – 31 ottobre 2017.
      - The cases of A.E. and T.B. v. Italy (application nos. 18911/17, 18941/17, and 18959/17, https://hudoc.echr.coe.int/?i=001-228836) and W.A. and Others v. Italy (no. 18787/17, https://hudoc.echr.coe.int/?i=001-228835)

      https://www.meltingpot.org/2023/11/denudati-maltrattati-e-privati-della-liberta-la-cedu-condanna-nuovamente

  • Violences

    Dans sa nouvelle création qui prend le titre de « Violences », Léa Drouet s’attache surtout à nous faire passer de l’autre côté des gros intitulés. Le long d’une écriture sensible qui se compose au croisement du corps, du son et de la scénographie, elle nous conduit sur le bord des images de la violence telles qu’elles sont agencées pour nous choquer et, nous sidérant, nous empêcher non seulement d’agir mais déjà de sentir.

    Résister à l’assignation à la passivité commence peut-être ici : pouvoir éprouver et expérimenter. Reprendre l’expérience de la violence non plus seulement en tant qu’elle est subie par les uns et exercée par les autres, mais en tant qu’elle nous traverse tous et chacun. La violence n’est pas que le lot d’un pouvoir qui nous rend impuissants. Elle est aussi une puissance que nous pouvons déployer pour reprendre des capacités de voir, d’agir et de vivre autrement. Seule en scène, Léa Drouet commence par suivre le parcours de sa grand-mère Mado qui, petite fille, dut traverser des champs et des routes pour échapper à la rafle du Vél d’Hiv’. À partir de là, la metteuse en scène retrace la traversée des frontières qui conduit aujourd’hui d’autres enfants à perdre la vie. Dans les interstices qui séparent les morts que l’on compte de toutes les morts qui ne comptent pas, elle tente de recomposer des mémoires ainsi que des histoires pour l’avenir. L’artiste agit sur un espace principalement composé de sables, évoquant des territoires fracturés, séparés par des frontières ou abîmés par des tours. Si le sable sait parfaitement recouvrir les traces et effacer les marques de violence, il est aussi porteur d’empreintes. Léa Drouet façonne ce paysage où le corps engagé passe du témoin à l’actrice et de l’actrice à la narratrice, comme si les lignes de rupture permettaient surtout des rencontres nouvelles. Alors émergent peu à peu d’autres positionnements, d’autres possibilités d’action et d’autres attentions au détail et au petit. Car c’est peut-être dans la fragilité des grains de sable que se distinguent les fondements, friables et solides à la fois, d’un monde capable d’assumer ses conflits autrement que sous la forme du champ de bataille et de l’État de guerre généralisé.

    -- Camille Louis, Dramaturge

    https://vimeo.com/504326442

    https://vaisseau-leadrouet.com/projet/violences

    #frontières #morts_aux_frontières #mourir_aux_frontières #asile #migrations #réfugiés #violence #art_et_politique #art #théâtre #impuissance #puissance #Léa_Drouet #mémoire #traces #sable #empreintes #conflits

  • En Bretagne, l’embauche des réfugiés plus polémique que jamais
    https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2023/11/18/en-bretagne-l-embauche-des-refugies-plus-polemique-que-jamais_6200951_450005

    En Bretagne, l’embauche des réfugiés plus polémique que jamais
    Touchées par les pénuries de main-d’œuvre, les entreprises régionales n’ont pas attendu l’adoption du projet de loi « immigration » pour former des réfugiés aux métiers en tension. Mais en toute discrétion.
    Par Manon Boquen
    Un temps, Le ministre délégué chargé de l’industrie, Roland Lescure, a envisagé d’organiser une visite, en octobre, de la conserverie La Belle-Iloise, à Quiberon (Morbihan), au bout de la presqu’île du même nom. L’examen du projet de loi « immigration » débutait au Sénat et il souhaitait ainsi démontrer la pertinence du fameux article 3, qui prévoyait la régularisation des sans-papiers dans des métiers en tension, convaincu, comme il le déclarait le 12 septembre, que « la réindustrialisation de la France ne se ferait pas sans immigration ».La Belle-Iloise était a priori un bon exemple : l’entreprise a formé, de 2019 à 2021, des groupes d’une dizaine de réfugiés – qui avaient déjà obtenu des papiers – au métier d’opérateur de production. Apprentissage du français et stage immersif ont permis à la majeure partie d’entre eux de travailler comme saisonniers, voire de poursuivre en contrat plus long. Mais, de visite ministérielle, il n’y aura finalement pas. La Belle-Iloise refusera d’expliquer pourquoi, se contentant de répondre que le sujet est « brûlant ».
    L’entreprise ne le dira pas officiellement, mais un article de Ouest-France daté de 2021 lui a laissé de très mauvais souvenirs. Il décrivait pourtant en des termes bienveillants son programme d’insertion modèle. Sauf que la publication a entraîné des centaines de commentaires haineux sur les réseaux sociaux. « On en fait moins pour les SDF », « Combien de chômeur francais [sic] on a formé ? », « Avec 10 millions de pauvres en France, n’importe quoi »… Un florilège qui a marqué les acteurs proches du dossier : la mission locale comme le centre de formation.
    Le cas de La Belle-Iloise n’est pas unique : de plus en plus d’industriels bretons recourent à la formation de migrants pour pallier le manque de main-d’œuvre, mais refusent d’en parler ouvertement par peur de soulever des réactions violentes. Avec un taux de chômage de 5,8 % au second trimestre 2023 – le deuxième taux régional le plus faible de France –, la région est particulièrement touchée par les pénuries de main-d’œuvre : 462 000 postes seraient à pourvoir dans la région d’ici à 2030 dans tous les secteurs, selon le ministère de l’économie. Kodiko, Sésame, Melting Breizh… Les dispositifs d’intégration par le travail ont essaimé sur le territoire au fil des années, portés par des institutions variées : missions locales, Pôle emploi, associations pour l’emploi. Responsable du programme HOPE de l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes de Bretagne et de Loire-Atlantique, Lionel Frein met en relation entreprises en tension et réfugiés pour des formations professionnalisantes avec des cours de langue. « A son lancement, en 2017, c’était une expérimentation, avant tout pour libérer des places d’hébergement », relève-t-il.
    Depuis, plusieurs secteurs, comme ceux du bâtiment, de la propreté, de l’automobile, ont formé en interne près de mille stagiaires de Brest (Finistère) à Loudéac (Côtes-d’Armor) en passant par Rennes (Ille-et-Vilaine). « Quatre-vingt-neuf pour cent d’entre eux ont un logement et 72 % un emploi », se réjouit le responsable régional du dispositif. La situation s’est généralisée depuis le Covid. « Toutes les entreprises ont des difficultés à recruter. Et donc beaucoup se sont adaptées au public des personnes réfugiées », confirme Damien Robic, responsable de l’Institut breton d’éducation permanente (IBEP) de Lorient (Morbihan), un organisme de formation pour adultes, où cinq formateurs de français pour les étrangers travaillent maintenant, au lieu de deux dix ans auparavant. L’IBEP de Lorient, avec l’aide de la région Bretagne, a en outre créé des ­programmes avec plusieurs employeurs, dont La Belle-Iloise et, avant elle, le fabricant de plats à base de poisson Cité marine, implanté à Kervignac (Morbihan).
    Des partenariats inédits sont même en train de voir le jour, comme celui entre le Medef d’Ille-et-Vilaine, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment 35 et Territoires accueillants 35, un collectif pour l’accueil des migrants. Ils espèrent lancer dans les mois à venir une expérimentation locale qui permettrait de simplifier les démarches d’embauche des migrants en attente de papiers. « Les besoins des entreprises sont là, avec des personnes extrêmement motivées qui veulent s’intégrer », argumente Willy Patsouris, de Territoires accueillants 35, tout en regrettant « des débats électoralistes » à l’échelle nationale.
    Le trio d’organisations communiquera-t-il sur son opération si elle aboutit ? Willy Patsouris se fait prudent : « Pour ma part, je suis pour la transparence, mais je ne suis pas le seul à décider. » Les manifestations d’extrême droite à Callac (Côtes-d’Armor) contre le projet de centre d’accueil pour réfugiés et la progression du vote Rassemblement national font dire à Forough Dadkhah, vice-présidente de gauche chargée de l’emploi, de la formation et de l’orientation à la région Bretagne : « Nous devons continuer les actions pour les réfugiés, mais peut-être en communiquant moins. »
    Pour autant, le groupement d’économie solidaire Néo 56 a organisé, le 14 octobre, la soirée dégustation du Fest in Food, un programme d’insertion dans la restauration de personnes réfugiées. « Nous voulions ­favoriser la cohabitation de tous en nous appuyant sur la cuisine », explique sa directrice générale, Marie-Laurence Gautier. Trois cents curieux ont répondu présents, sans incident.

    #Covid-19#migrant#migration#france#bretagne#immigration#emploi#economie#integration#refugie#politiquemigratoire#extremedroite

  • Tra i respinti dalla Croazia. La violenza è ancora la prassi lungo le rotte balcaniche

    Ritorno sulla frontiera tra Bosnia ed Erzegovina e Unione europea, a quasi tre anni dall’incendio che distrusse il campo di #Lipa. Le persone incontrate denunciano i respingimenti illegali e le vessazioni delle polizie. Tra gennaio e ottobre 2023 i passaggi nei Balcani occidentali sono stati quasi 100mila. Il videoreportage

    È notte fonda ma la luna piena illumina tutta la valle del fiume Sava. Non è l’ideale per le persone che nell’ombra provano a passare da un confine all’altro, dal Nord della Bosnia ed Erzegovina alla Croazia. “A qualcuno la luna piena dà sicurezza -racconta un ragazzo che arriva dal Sudan- perché vedi bene la strada. Ad altri non piace, perché le guardie ti vedono lontano un miglio”.

    Bosanska Gradiška è uno degli snodi chiave per i migranti che dal Nord della Bosnia tentano di attraversare il fiume per entrare in Croazia, nell’Unione europea. In tanti sono morti nelle acque della Sava, affogati a poche bracciate dalla riva, ma i più giovani, soprattutto in estate, provano ancora a nuotare da una sponda all’altra, da un confine all’altro. I segni del passaggio sono evidenti, ci sono persino tracce di pneumatici e di trascinamento. Sembra la scia di una piccola imbarcazione. Nei villaggi lunga la Sava, da Gradiška in poi, alcuni residenti della zona “noleggiano” le loro barchette per accompagnare i migranti dall’altro lato, per 20 o 30 marchi.

    Si cammina in silenzio, tutto tace, la frontiera ufficiale, quella presidiata dalla polizia, è a pochissimi chilometri. “Ultimamente i migranti si vedono poco in giro -spiega un’attivista della zona- ma ci sono eccome. Adesso si nascondono di più ma si muovono e tanto”. I numeri confermano i “flussi” lungo le rotte negli ultimi mesi. Secondo i dati di Frontex, da gennaio a ottobre gli “attraversamenti” nei Balcani occidentali hanno superato quota 97.300, soprattutto afghani, siriani e turchi. I volontari della zona, però, registrano la presenza anche di persone provenienti dal Nord Africa e dall’Africa sub-sahariana.

    “Tanti arrivano direttamente in Serbia con l’aereo e poi cominciano il viaggio. Altri, invece, arrivano a piedi dalla Turchia o dalla Grecia”. Il cammino, in ogni caso, è faticoso e pericoloso. Il rischio è quello di morire di freddo in inverno o di essere picchiati, di perdere anche quel poco che si ha, di rimanere bloccati per mesi. Cosa che sta accadendo di nuovo, nell’autunno del 2023, lontano dai riflettori un tempo più accesi.

    “Mi hanno spaccato uno zigomo -racconta un ventenne iraniano incontrato nei boschi bosniaci a fine ottobre- è successo l’altra sera. Adesso aspetto qualche giorno prima di ritentare. La polizia croata è la peggiore”. “I miei amici un mese fa sono passati senza problemi”, aggiunge un altro ragazzo, che non dice di dov’è. “E invece a noi ci fanno sputare sangue, letteralmente”. Qualcosa è successo. Fino a qualche settimana fa le autorità croate lasciavano “passare” con più facilità, e per i migranti era diventato relativamente semplice arrivare fino Zagabria o a Fiume, per poi proseguire verso la Slovenia. Poi, però, la protesta dei residenti di alcune cittadine sul confine hanno spinto il governo croato a cambiare ancora una volta politica. Riprendendo così i respingimenti violenti. I metodi brutali della polizia croata sono noti da tempo. I racconti raccolti in questi giorni in Bosnia ed Erzegovina confermano invece che tutte le pratiche più disumane utilizzate in questi anni sono tornare prepotentemente “di moda”.

    https://www.youtube.com/watch?v=IRgHN1sh8ZQ&embeds_referring_euri=https%3A%2F%2Faltreconomia.it%2F&

    I respingimenti della polizia croata hanno avuto un immediato contraccolpo sulle presenze al campo di Lipa, a 25 chilometri da Bihać. Siamo arrivati al campo di mattina con un permesso per entrare e svolgere una visita guidata della struttura. L’unico dato di cui siamo certi è il numero delle presenze. A novembre ci sono all’incirca 1.500 persone, accampate insieme nonostante le condizioni non siano delle migliori. I ragazzi sono spesso costretti a spendere i propri soldi per comprare all’esterno sapone e dentifricio, perché raramente sono a disposizione. “Compriamo anche qualcosa da mangiare -racconta Adam, dalla Siria- perché spesso abbiamo fame, ma è anche l’occasione per fare una pausa e per uscire dal recinto”. Ci spostiamo al negozietto che è stato allestito proprio di fronte all’ingresso del campo. Prendiamo un the mentre i ragazzi si avvicinano numerosi. Due euro per un bicchierino. I prezzi sono alti. Un solo rotolo di carta igienica costa quasi un euro. “Lo compriamo perché non c’è mai nei bagni”, spiega un ragazzo con il sacchetto in mano. Le guardie del campo intanto ci osservano, non gradiscono molto che si parli con i loro “ospiti”, e allora ci spostiamo verso il bosco.

    Mentre siamo nella jungle, poco fuori Lipa, incontriamo tre ragazzi siriani che tornano verso il campo dopo essere stati respinti. Hanno l’aria stanca e affranta, anche perché a due di loro la polizia ha sequestrato e spaccato il telefono. Si fermano qualche minuto a raccontare ma poi proseguono, perché hanno bisogno di riposare, bere un po’ d’acqua, riordinare le idee. Nel pomeriggio raggiungiamo il campo Borići, dedicato alle famiglie e ai minori non accompagnati, dove ci sono poco più di 800 persone. Un numero non elevatissimo ma comunque superiore a quello della media degli ultimi mesi. Tra loro ci sono molte persone in arrivo dall’Africa sub-sahariana ma anche diverse famiglie dal Bangladesh. “A volte restano a lungo -spiega uno dei coordinatori del centro, dove abbiamo il permesso di entrare-. E infatti ai bambini facciamo anche da scuola. È un modo per insegnargli la lingua, per trascorrere del tempo sereno e magari fargli ritrovare il sorriso”. L’atmosfera qui è migliore e anche l’accoglienza è meno militaresca, più informale. Finché c’è la luce del sole il clima resta sereno, ma appena fa buio il fermento aumenta.

    Ogni sera i migranti cercano di attraversare il confine arrivando il più vicino possibile con i taxi o con gli autobus e sperano di non incontrare la polizia croata. Di recente, però, succede quasi sempre. Lo raccontano a più riprese le tantissime persone incontrate in questi giorni d’autunno. Grecia, Turchia, Bulgaria, Serbia. Tra i ragazzi che hanno il desiderio di far sapere cosa gli è successo c’è Mohammed, dal Marocco, che ha provato ad attraversare il confine croato sette volte e ha subito maltrattamenti feroci dalla polizia di Zagabria. Poi c’è Samir, 18 anni, dall’Afghanistan, in fuga dai Talebani. E poi c’è Alì, dal Ghana, che ha perso i documenti e non è riuscito a rientrare in Italia dal suo Paese. Tre storie racchiuse in questo video, anche se ci vorrebbero ore e ore di testimonianze. Ore e ore di immagini e denunce, perché quel che accade sotto i nostri occhi fa vergognare.

    https://altreconomia.it/tra-i-respinti-dalla-croazia-la-violenza-e-ancora-la-prassi-lungo-le-ro
    #Balkans #route_des_balkans #asile #migrations #réfugiés #frontières #refoulements #push-backs #Croatie #Bosnie-Herzégovine #Bosanska_Gradiška #Sava #rivière_Sava #rivière #violence #violences_policières #Bihać #Borići

  • Briançon, une zone frontière à bout de souffle

    À Briançon, commune des Hautes-Alpes, près de sept ans après l’ouverture de cette voie de passage par les personnes migrantes venues d’Italie, la situation ne cesse de se détériorer. En dépit des renforts policiers et de l’arrivée des premières neiges, les exilés continuent de passer.

    Col de Montgenèvre. Il neige. Entre un télésiège à l’arrêt et un centre de vacances, deux policiers se tiennent en faction sur un promontoire qui domine la frontière franco-italienne. Ils suivent à la jumelle un groupe de cinq exilés venus d’Italie. Ils sont poursuivis par un de leurs collègues de la Police aux Frontières (PAF). Michel Rousseau, bénévole de l’association de défense des exilés Tous migrants est témoin de la scène. Il interpelle les deux gendarmes :

    « Voilà typiquement ce qu’il ne faut pas faire : poursuivre des gens dans une pente raide et enneigée avec un torrent en contrebas ! C’est comme ça que les accidents surviennent ! »

    Il s’approche des deux gendarmes, les salue tout en fouillant dans la poche latérale de son pantalon en gore tex. Il en sort deux exemplaires d’un petit livret que son association a édité à l’attention des forces de l’ordre. Les gendarmes hésitent. Michel Rousseau tente de les rassurer :

    « Ne vous inquiétez pas, ça fait plusieurs années qu’on dialogue avec les forces de l’ordre et votre hiérarchie a été informée de notre démarche. On leur a déjà distribué ce livret. Prenez-le. On l’a fait pour vous. C’est un petit document qui rappelle le droit qui s’applique à la frontière mais qui malheureusement ne correspond pas aux ordres de ce gouvernement qui vient d’être condamné par la Cour de Justice de l’Union Européenne par rapport à ce qu’il se passe à la frontière : les refoulements systématiques, les pratiques de refus d’entrée et de pseudo réadmissions, les pratiques d’enfermement sans parler de la non prise en compte des demandeurs d’asile. »

    Les deux agents acceptent finalement les fascicules qu’ils rangent rapidement dans leurs poches revolver. Et Michel Rousseau de leur rappeler qu’ils ont droit de désobéir à un ordre illégal. Pendant ce temps, les personnes migrantes qui tentaient de fuir ont été interpellées par les forces de l’ordre. Elles marchent dans la neige, en file indienne, précédées et suivies par des gendarmes mobiles qui le conduisent jusqu’à des fourgonnettes dépêchées pour les emmener dans les locaux de la Police aux frontières de Montgenèvre. Là, elles sont enfermées dans un Algeco jusqu’à leur remise à la police italienne qui les ramènera en Italie.
    10 personnes sont mortes, d’épuisement, d’hypothermie, de noyade ou de chute

    Mamadou Alpha Diallo, un jeune guinéen de 16 ans rencontré dans le refuge d’Oulx en Italie a tenté par trois fois de passer :

    « Après avoir pris le bus jusqu’à Clavières (dernier village italien avant la France), on marche dans la montagne pour éviter la police. Quand on les voit, on se cache. Des fois comme hier, ils utilisent des drones. Quand on entend le drone, on court se cacher sous un sapin et on attend, dans la neige, deux heures, trois heures parfois. Malheureusement pour moi, les semelles de mes chaussures se sont décollées et j’ai dû rejoindre la route nationale pour ne pas avoir les pieds gelés. C’est là que la police m’a arrêté alors que je touchais au but après 8h de marche. »

    Le jeune guinéen parviendra à passer le surlendemain au bout de la quatrième tentative. À quelques exceptions près, tout le monde passe au prix de plus grands risques encourus et des blessures spécifiques à l’environnement montagneux méconnu pour la plupart des exilés. Depuis près de sept ans que cette voie de passage a été ouverte, 10 personnes sont mortes, d’épuisement, d’hypothermie, de noyade ou de chute.

    Isabelle Lorre, coordinatrice de l’ONG Médecins du monde à Briançon impute ce bilan a une présence toujours plus importante des forces de l’ordre dans la montagne :

    « Le problème principal est lié au fait qu’il y ait une militarisation de la frontière. Ça affecte directement la santé des personnes et leur traversée de la frontière. Ca veut dire que les personnes vont se faire interpeller par surprise, il y a des courses poursuites dans la montagne, et toute une stratégie d’évitement des forces de l’ordre par ces personnes. Ce qui implique de passer par des chemins beaucoup plus détournés et périlleux et de se cacher. On est très vigilants sur la période hivernale, il faut savoir qu’il fait jusqu’à -20 degrés sur le col autour de Montgenèvre donc les personnes peuvent rester cachés dans la neige un certain temps avec des risques assez forts d’hypothermie et de gelures.
    On questionne aussi les risques psychiques des personnes, ça reste des traversées qui sont très éprouvantes suite à un parcours migratoire déjà compliqué en amont. »

    Dominique Dufour, préfet des Hautes-Alpes réfute ces allégations :

    « L’ensemble des policiers, des gendarmes, des dignitaires qui sont engagés dans la lutte contre l’immigration clandestine prennent particulièrement soin à ne pas intervenir sur des zones à risque. Nous savons pertinemment que nous sommes sur un terrain qui est compliqué et en plus de la dissuasion que constitue la seule présence d’un policier, les interventions ne se font que lorsque nous sommes en terrain sécurisé. Maintenant, disons les choses comme elles sont, il y a une prise de risque inconsidérée de la part des migrants qui souhaitent passer, parfois encouragés par un certain nombre d’organisations. Et donc cette prise de risque est à bannir et à proscrire et c’est le message que nous nous faisons passer en permanence ».

    Malgré les renforts en gendarmes mobiles ou militaires de l’opération sentinelle, les associations d’aide aux migrants de la région de Briançon estiment qu’entre 20 et 30 000 personnes migrantes sont parvenues à passer la frontière depuis 2016. Face à ce qui semble signer l’échec de la stratégie répressive des gouvernements successifs pour « assurer l’intégrité de la frontière » Dominique Dufour rétorque que 5 000 refoulements ont été effectués cette année à Montgenèvre sachant qu’une personne migrante peut être refoulée jusqu’à quatre, cinq voire six fois avant de parvenir à passer la frontière. Au Refuge solidaire de Briançon, on regrette que les dizaines de millions d’euros employés pour empêcher les personnes migrantes de passer la frontière ne soient pas dévolues à un accueil digne qui est à la charge, et depuis sept ans, des seuls bénévoles briançonnais. Joël Giraud, député des Hautes Alpes (PR, apparenté renaissance) assure avoir alerté le gouvernement sur la situation à Briançon sans se faire trop d’illusions :

    « Pour l’instant, je n’ai pas de réponse. Et le climat effectivement ne prête pas à une grande écoute sur ce plan-là, mais pour autant au moment où nous allons aborder le texte qui va être un énième texte sur les questions de migration, je pense que c’est le moment ou jamais de tenter d’obtenir un écho à des choses qui ne sont ni plus ni moins de demander une régulation par l’Etat et un accueil par l’Etat sur des territoires où de toute façon, de part la géomorphologie locale, il passera toujours des gens. »

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-grand-reportage/briancon-une-zone-frontiere-a-bout-de-souffle-9498707

    #Briançon #frontières #frontière_sud-alpine #asile #migrations #réfugiés #PAF #audio #podcast #Hautes-Alpes #Italie #France

  • Un Paese Di Resistenza

    Riace, Calabre. Après 20 ans d’harmonie, ce village qui faisait de l’accueil des migrants son avenir, devint la cible de la vague populiste qui ronge l’Italie. Le venin s’est répandu. Après des mois d’une minutieuse destruction, Riace sort d’un long cauchemar avec un dilemme : Résister ou disparaître.

    https://www.wbimages.be/films/film/un-paese-di-resistenza

    #Italie #Riace #Lucano #Mimmo_Lucano #film #documentaire #film_documentaire #accueil #réfugiés #résistance #migrations #Calabre

  • Supreme court rejects Rishi Sunak’s plan to send asylum seekers to #Rwanda

    Judges uphold appeal court ruling over risk to deported refugees and deals blow to PM’s ‘stop the boats’ strategy

    Rishi Sunak’s key immigration policy has been dealt a blow after the UK’s highest court rejected the government’s plans to deport people seeking asylum to Rwanda.

    Five judges at the supreme court unanimously upheld an appeal court ruling that found there was a real risk of deported refugees having their claims in the east African country wrongly assessed or being returned to their country of origin to face persecution.

    The ruling undermines one of the prime minister’s key pledges: to “stop the boats”. The government claimed that the £140m Rwanda scheme would be a key deterrent for growing numbers of asylum seekers reaching the UK via small boats travelling across the Channel, a claim that refugee charities have rejected.

    Reading out the judgment, Lord Reed, the president of the supreme court, said the judges agreed unanimously with the court of appeal ruling that there was a real risk of claims being wrongly determined in Rwanda, resulting in asylum seekers being wrongly returned to their country of origin.

    He pointed to crucial evidence from the United Nations’ refugee agency, the UNHCR, which highlighted the failure of a similar deportation agreement between Israel and Rwanda.

    The ruling came the day after the sacked home secretary, Suella Braverman, released an incendiary letter accusing the prime minister of breaking an agreement to insert clauses into UK law that would have “blocked off” legal challenges under the European convention on human rights (ECHR) and the Human Rights Act.

    Braverman said Sunak had no “credible plan B” and added: “If we lose in the supreme court, an outcome that I have consistently argued we must be prepared for, you will have wasted a year and an act of parliament, only to arrive back at square one.”

    A meeting of hard-right Conservative MPs on Wednesday morning to consider the judgment was expected to back calls to leave the ECHR.

    Sir John Hayes, a close ally of Braverman, said on Tuesday that in the event of losing, ministers should table a narrow piece of legislation to enact the Rwanda plan before Christmas, and later include withdrawing from the ECHR in the Tory election manifesto.

    Reacting to the ruling, Sunak said the government would consider its next steps and claimed there was a “plan B”, despite Braverman’s criticisms.

    He said: “This was not the outcome we wanted, but we have spent the last few months planning for all eventualities and we remain completely committed to stopping the boats.

    “Crucially, the supreme court – like the court of appeal and the high court before it – has confirmed that the principle of sending illegal migrants to a safe third country for processing is lawful.”

    The home secretary, James Cleverly, said: “Our partnership with Rwanda, while bold and ambitious, is just one part of a vehicle of measures to stop the boats and tackle illegal migration.

    “But clearly there is an appetite for this concept. Across Europe, illegal migration is increasing and governments are following our lead: Italy, Germany and Austria are all exploring models similar to our partnership with Rwanda.”

    The judgment will raise serious questions about expenditure on the scheme. More than £140m has already been paid to the Rwandan government. The government has refused to disclose a further breakdown of costs on the scheme and on legal fees.

    A spokesperson for the Rwandan government said: “The money has been already allocated to a number of government projects.”

    Reed said the legal test in the case was whether there were substantial grounds for believing that asylum seekers sent to Rwanda would be at real risk of being sent back to the countries they came from, where they could face ill treatment.

    “In the light of the evidence which I have summarised, the court of appeal concluded that there were such grounds. We are unanimously of the view that they were entitled to reach that conclusion. Indeed, having been taken through the evidence ourselves, we agree with their conclusion,” he said.

    Enver Solomon, the chief executive of the Refugee Council, said it was a victory for men, women and children who simply wanted to be safe.

    He said: “The plan goes against who we are as a country that stands up for those less fortunate than us and for the values of compassion, fairness and humanity. The government should be focusing on creating a functioning asylum system that allows people who seek safety in the UK a fair hearing on our soil and provides safe routes so they don’t have to take dangerous journeys.”

    Toufique Hossain of Duncan Lewis solicitors, one of the lawyers representing asylum seekers who brought the legal challenge, said: “This is a victory for our brave clients who stood up to an inhumane policy. It is also a victory for the rule of law itself and the separation of powers, despite the noise. It is a timely reminder that governments must operate within the law. We hope that now our clients are able to dream of a better, safer future.”

    Sonya Sceats, the chief executive of Freedom from Torture, said: “This is a victory for reason and compassion. We are delighted that the supreme court has affirmed what caring people already knew: the UK government’s ‘cash for humans’ deal with Rwanda is not only deeply immoral, but it also flies in the face of the laws of this country.

    “The stakes of this case could not have been higher. Every day in our therapy rooms we see the terror that this scheme has inflicted on survivors of torture who have come to the UK seeking sanctuary.”

    Steve Smith, the chief executive of the refugee charity Care4Calais, a claimant in the initial legal challenge, said the judgment was “a victory for humanity”.

    He added: “This grubby, cash-for-people deal was always cruel and immoral but, most importantly, it is unlawful. Hundreds of millions of pounds have been spent on this cruel policy, and the only receipts the government has are the pain and torment inflicted on the thousands of survivors of war, torture and modern slavery they have targeted with it.

    “Today’s judgment should bring this shameful mark on the UK’s history to a close. Never again should our government seek to shirk our country’s responsibility to offer sanctuary to those caught up in horrors around the world.”

    Care4Calais continues to support claimants in the case.

    https://www.theguardian.com/uk-news/2023/nov/15/supreme-court-rejects-rishi-sunak-plan-to-deport-asylum-seekers-to-rwan

    #justice #cour_suprême #asile #migrtions #réfugiés #externalisation #UK

    –-

    ajouté à cette métaliste sur la mise en place de l’#externalisation des #procédures_d'asile au #Rwanda par l’#Angleterre
    https://seenthis.net/messages/966443

    • Supreme Court rules Rwanda asylum policy unlawful

      The government’s Rwanda asylum policy, which it says is needed to tackle small boats, is in disarray, after the UK’s highest court ruled it is unlawful.

      The Supreme Court upheld a Court of Appeal ruling, which said the policy leaves people sent to Rwanda open to human rights breaches.

      It means the policy cannot be implemented in its current form.

      Rishi Sunak said the government would work on a new treaty with Rwanda and said he was prepared to change UK laws.

      The controversial plan to fly asylum seekers to Rwanda and ban them from returning to the UK has been subject to legal challenges since it was first announced by Boris Johnson in April 2022.

      The government has already spent £140m on the scheme but flights were prevented from taking off in June last year after the Court of Appeal ruled the approach was unlawful due to a lack of human rights safeguards.

      Now that the UK’s most senior court has agreed, the policy’s chances of being realised without major revisions are effectively ended.

      But Mr Sunak told MPs at Prime Minister’s Questions that he was ready to finalise a formal treaty with Rwanda and would be “prepared to revisit our domestic legal frameworks” in a bid to revive the plan.

      A treaty - which Downing Street has said it will publish in the “coming days” - would upgrade the agreement between the UK and Rwanda from its current status as a “memorandum of understanding”, which the government believes would put the arrangement on a stronger legal footing.

      The new text would provide the necessary “reassurances” the Supreme Court has asked for, the prime minister’s official spokesman said.

      LIVE: Reaction to Supreme Court Rwanda ruling
      Chris Mason: Ruling leaves Rwanda policy in tatters
      How many people cross the Channel in small boats?
      What was the UK’s plan to send asylum seekers to Rwanda?

      Ministers have been forced to reconsider their flagship immigration policy after 10 claimants in the Supreme Court case argued that ministers had ignored clear evidence that Rwanda’s asylum system was unfair and arbitrary.

      The legal case against the policy hinges on the principle of “non-refoulement” - that a person seeking asylum should not be returned to their country of origin if doing so would put them at risk of harm - which is established under both UK and international human rights law.

      In a unanimous decision, the court’s five justices agreed with the Court of Appeal that there had not been a proper assessment of whether Rwanda was safe.

      The judgement does not ban sending migrants to another country, but it leaves the Rwanda scheme in tatters - and it is not clear which other nations are prepared to do a similar deal with the UK.

      The Supreme Court justices said there were “substantial grounds” to believe people deported to Rwanda could then be sent, by the Rwandan government, to places where they would be unsafe.

      It said the Rwandan government had entered into the agreement in “good faith” but the evidence cast doubt on its “practical ability to fulfil its assurances, at least in the short term”, to fix “deficiencies” in its asylum system and see through “the scale of the changes in procedure, understanding and culture which are required”.

      A spokesman for the Rwandan government said the policy’s legality was “ultimately a decision for the UK’s judicial system”, but added “we do take issue with the ruling that Rwanda is not a safe third country”.

      It leaves Mr Sunak - who has made tackling illegal immigration a central focus his government - looking for a way to salvage the policy.

      In a statement issued after the ruling, the prime minister said the government had been “planning for all eventualities and we remain completely committed to stopping the boats”.

      He continued: “Crucially, the Supreme Court - like the Court of Appeal and the High Court before it - has confirmed that the principle of sending illegal migrants to a safe third country for processing is lawful. This confirms the government’s clear view from the outset.”

      Mr Sunak is expected to hold a televised press conference in Downing Street at 16:45 GMT on Wednesday.

      The Supreme Court decision comes amid the political fallout from the sacking of Suella Braverman on Monday, who, as home secretary had championed the Rwanda policy.

      In a highly critical letter, published after her sacking and the day before the ruling, she said the prime minister had “failed to prepare any sort of credible Plan B” in the event the Supreme Court halts the policy.

      Newly appointed Home Secretary James Cleverly told the Commons on Wednesday the government had been “working on a plan to provide the certainty that the court demands” for “the last few months”.

      He said upgrading the agreement to a treaty “will make it absolutely clear to our courts and to Strasbourg that the risks laid out by the court today have been responded to, will be consistent with international law”.

      Lee Anderson MP, the deputy chairman of the Conservative Party, urged the government to ignore the Supreme Court and “put planes in the air” anyway.

      Natalie Elphicke, Conservative MP for Dover, the landing point for many of the small boats, said the Rwanda policy is “at an end” and “we now need to move forward”.

      “With winter coming the timing of this decision couldn’t be worse. Be in no doubt, this will embolden the people smugglers and put more lives at risk,” she continued.

      But charity Asylum Aid said the government must “abandon the idea of forcibly removing people seeking asylum to third countries”, describing the policy as “cruel and ineffective”.

      More than 100,000 people have arrived in the UK via illegal crossings since 2018, though the number appears to be falling this year.

      In 2022, 45,000 people reached the UK in small boats. The total is on course to be lower for 2023, with the total for the year so far below 28,000 as of November 12.

      https://www.bbc.com/news/uk-67423745

    • Supreme court rules Rwanda plan unlawful: a legal expert explains the judgment, and what happens next

      The UK supreme court has unanimously ruled that the government’s plan to send asylum seekers to Rwanda is unlawful.

      Upholding an earlier decision by the court of appeal, the supreme court found that asylum seekers sent to Rwanda may be at risk of refoulement – being sent back to a country where they may be persecuted, tortured or killed.

      The courts cited extensive evidence from the UN refugee agency (UNHCR) that Rwanda does not respect the principle of non-refoulement – a legal obligation. The UNHCR’s evidence questioned the ability of Rwandan authorities to fairly assess asylum claims. It also raised concerns about human rights violations by Rwandan authorities, including not respecting non-refoulement with other asylum seekers.

      It is important to note that the supreme court’s decision is not a comment on the political viability of the Rwanda plan, or on the concept of offshoring asylum processes generally. The ruling focused only on the legal principle of non-refoulement, and determined that in this respect, Rwanda is not a “safe third country” to send asylum seekers.

      The ruling is another blow to the government’s promise to “stop the boats”. And since the Rwanda plan is at the heart of its new Illegal Migration Act, the government will need to reconsider its asylum policies. This is further complicated by Conservative party infighting and the firing of home secretary Suella Braverman, just two days before the ruling.
      How did we get here?

      For years, the UK government has been seeking to reduce small boat arrivals to the UK. In April 2022, the UK and Rwanda signed an agreement making it possible for the UK to deport some people seeking asylum in Britain to Rwanda, without their cases being heard in the UK. Instead, they would have their cases decided by Rwandan authorities, to be granted (or rejected) asylum in Rwanda.

      While the Rwanda plan specifically was found to be unlawful, the government could, in theory, replicate this in other countries so long as they are considered “safe” for asylum seekers.

      The government has not yet sent anyone to Rwanda. The first flight was prevented from taking off by the European court of human rights in June 2022, which said that British courts needed to consider all human rights issues before starting deportations.

      A UK high court then decided in December 2022 that the Rwanda plan was lawful.

      Ten asylum seekers from Syria, Iraq, Iran, Vietnam, Sudan and Albania challenged the high court ruling, with the support of the charity Asylum Aid. Their claim was about whether Rwanda meets the legal threshold for being a safe country for asylum seekers.

      The court of appeal said it was not and that asylum seekers risked being sent back to their home countries (where they could face persecution), when in fact they may have a good claim for asylum.

      The government has since passed the Illegal Migration Act. The law now states that all asylum seekers arriving irregularly (for example, in small boats) must be removed to a safe third country. But now that the Rwanda deal has been ruled unlawful, there are no other countries that have said they would take asylum seekers from the UK.

      What happens next?

      It is clear that the government’s asylum policies will need rethinking. Should another country now be designated as a safe country and different arrangements put in place, these will probably be subject to further legal challenges, including in the European court of human rights and in British courts.

      This ruling is likely to revive discussion about the UK leaving the European convention on human rights (ECHR), which holds the UK to the non-refoulement obligation. Some Conservatives, including the former home secretary Suella Braverman, have argued that leaving the convention would make it easier to pass stronger immigration laws.

      But while handing down the supreme court judgment, Lord Reed emphasised that there are obligations towards asylum seekers that go beyond the ECHR. The duty of non-refoulement is part of many other international conventions, and domestic law as well. In other words, exiting the ECHR would not automatically make the Rwanda plan lawful or easier to implement.

      The prime minister, Rishi Sunak, has said that he is working on a new treaty with Rwanda and is prepared to change domestic laws to “do whatever it takes to stop the boats”.

      The UK is not the only country to attempt to off-shore asylum processing. Germany and Italy have recently been considering finding new safe third countries to accept asylum seekers as well.

      But ensuring these measures comply with human rights obligations is complicated. International law requires states to provide sanctuary to those fleeing persecution or risk to their lives. As this ruling shows, the UK is not going to find an easy way out of these obligations.

      https://theconversation.com/supreme-court-rules-rwanda-plan-unlawful-a-legal-expert-explains-th

    • La décision:
      R (on the application of AAA and others) (Respondents/Cross Appellants) v Secretary of State for the Home Department (Appellant/Cross Respondent)

      Case ID: #2023/0093
      Case summary
      Issues

      The Supreme Court is asked to decide the following legal questions:

      Did the Divisional Court apply the wrong test when determining whether removal to Rwanda would breach article 3?
      If the Divisional Court applied the right test, was the Court of Appeal entitled to interfere with its conclusion that Rwanda was a safe third country?
      If the Divisional Court applied the wrong test or there was another basis for interfering with its conclusion, was the Court of Appeal right to conclude that Rwanda was not a safe third country because asylum seekers would face a real risk of refoulement?
      Did the Home Secretary fail to discharge her procedural obligation under article 3 to undertake a thorough examination of Rwanda’s asylum procedures to determine whether they adequately protect asylum seekers against the risk of refoulement?
      Were there substantial grounds for believing that asylum seekers sent to Rwanda will face a real risk of treatment contrary to article 3 in Rwanda itself, in addition to the risk of refoulement?
      Does the Asylum Procedures Directive continue to have effect as retained EU law? This is relevant because the Directive only permits asylum seekers to be removed to a safe third country if they have some connection to it. None of the claimants has any connection to Rwanda.

      Facts

      These appeals arise out of claims brought by individual asylum seekers ("the claimants") who travelled to the UK in small boats (or, in one case, by lorry). The Home Secretary declared the claimants’ claims for asylum to be inadmissible, intending that they should be removed to Rwanda where their asylum claims would be decided by the Rwandan authorities. Her decisions were made in accordance with the Migration and Economic Development Partnership ("MEDP") between the UK and Rwanda, recorded in a Memorandum of Understanding and a series of diplomatic “Notes Verbales”.

      Under paragraphs 345A to 345D of the Immigration Rules, if the Home Secretary decides that an asylum claim is inadmissible, she is permitted to remove the person who has made the claim to any safe third country that agrees to accept the asylum claimant. On the basis of the arrangements made in the MEDP, the Home Secretary decided that Rwanda was a safe third country for these purposes. This is “the Rwanda policy”.

      The claimants (and other affected asylum seekers) challenged both the lawfulness of the Rwanda policy generally, and the Home Secretary’s decisions to remove each claimant to Rwanda. The Divisional Court held that the Rwanda policy was, in principle, lawful. However, the way in which the Home Secretary had implemented the policy in the claimants’ individual cases was procedurally flawed. Accordingly, her decisions in those cases would be quashed and remitted to her for reconsideration.

      The appeal to the Court of Appeal concerned only the challenges to the lawfulness of the Rwanda policy generally. By a majority, the Court allowed the claimants’ appeal on the ground that the deficiencies in the asylum system in Rwanda were such that there were substantial reasons for believing that there is a real risk of refoulement. That is, a real risk that persons sent to Rwanda would be returned to their home countries where they face persecution or other inhumane treatment, when, in fact, they have a good claim for asylum. In that sense Rwanda was not a safe third country. Accordingly, unless and until the deficiencies in its asylum processes are corrected, removal of asylum seekers to Rwanda will be unlawful under section 6 of the Human Rights Act 1998. This is because it would breach article 3 of the European Convention on Human Rights, which prohibits torture and inhuman or degrading treatment. The Court of Appeal unanimously rejected the claimants’ other grounds of appeal.

      The Home Secretary now appeals to the Supreme Court on issues (1) to (3) below. AAA (Syria) and others and HTN (Vietnam) cross appeal on issues (4) and (5). AS (Iran) also cross appeals on issue (4). ASM (Iraq) appeals on issue (6).

      https://www.supremecourt.uk/cases/uksc-2023-0093.html

    • Alasdair Mackenzie sur X:

      Here’s my take on the Rwanda judgment in the Supreme Court today.

      It’s a longish one, but tl;dr: it’s a disaster for the Home Office and also for the Rwandans, & surely leaves the idea of outsourcing refugee protection to other countries in tatters, perhaps permanently sunk 1/
      First up, it’s extremely interesting that the Supreme Court was keen to dispel the idea that the problem with the Rwanda policy is only that it’s contrary to the European Convention on Human Rights 2/
      The SC points out that the principle of non-refoulement (not returning people directly or indirectly to face risks of human rights abuses) is also prohibited by other international conventions & by UK law – a clear attempt to defuse criticism of the ECHR 3/
      (Whether that will stop the usual suspects from calling for the UK to leave the ECHR is of course doubtful, but they’d have said that anyway – indeed Braverman’s letter yesterday seems to have been setting herself up to do so whichever way this judgment went.) 4/
      Second, the Divisional Court (High Court) – the only court to have upheld the Rwanda policy – comes in for sharp criticism.
      It’s said to be unclear that it understood its own function properly, ie to assess risk in Rwanda, not to review the Home Office’s assessment 5/
      The High Court also failed to engage with the evidence before it of “serious and systemic defects in Rwanda’s procedures and institutions for processing asylum claims” 6/
      The High Court also took “a mistaken approach” to a key plank of the govt’s case, ie that it was for the govt itself to assess diplomatic assurances given by Rwanda – in fact it shd’ve been for the Court to do so.
      (The last sentence has a nice little barb towards ministers.) 7/
      The High Court also failed to address crucial evidence, including evidence of how asylum seekers transferred from Israel to Rwanda under an earlier deal had been treated, despite its (you might have thought) obvious implications for how those sent by the UK would fare in Rw 8/
      The High Court is particularly criticised for dealing “dismissively” with the crucial evidence of the UN High Commissioner for Refugees, which was largely uncontradicted and should have been given “particular importance” 9/
      The High Court was of course the court which primarily refused to stop the removals of people on 14 June last year, meaning that people had to apply to the European Court at the last minute. 10/
      So having disposed of the High Ct, the next Q for the Supreme Ct was whether to uphold the Court of Appeal’s decision that the Rwanda policy was unlawful.

      The SC strikingly doesn’t limit itself (as it cdve) to saying the CA’s view was lawful, but strongly agrees with it. 11/
      The SC, again strikingly, dives straight in with this devastating summary of Rwanda’s abject human rights record, including its threats to kill dissidents on the streets of the UK (the point about the first line here is to show that the Home Office knew about this very well) 12/
      The SC summarises numerous problems with Rwanda’s asylum processes (set out in more detail by the Court of Appeal), incl lack of training, “ingrained scepticism” towards some groups, lack of understanding of the Refugee Convention, lack of judicial independence etc 13/
      Why, you might ask by now, didn’t the Home Office know all this? Well, they shdve done, but it seems officials, under pressure (implicitly from ministers) did inadequate & one-sided research into Rwandan asylum processes, something which ultimately undermined the whole policy 14/
      The HO’s fallback argument was basically: “well, even if the Rwandan system is a mess, people won’t be going anywhere anyway”. The SC is as contemptuous as can be of this (to translate for non-legal folk, “somewhat surprising” is as dismissive as it gets) 15/
      Now we move to the Israel-Rwanda deal, a catastrophe for Rwanda’s credibility & thus for the HO case – and ofc a total disaster for those affected, who were routinely secretly expelled from Rwanda (some were also left without documents, effectively forced out, trafficked etc) 16/
      The HO, again, knew about this but wasn’t deflected from potentially repeating the same mistakes: its lame answer was that the Israel-Rw deal wasn’t even relevant bc the UK-Rw one was new. You might think that was also a “surprising” submission and so, it seems, did the SC 17/
      However sadly – if only because it would’ve been what we lawyers call “the ultimate banter outcome” – the Rwanda scheme is found not to be contrary to retained EU law [aspects of EU law which remain part of UK law], bc in fact the relevant provisions were abolished in 2020 18/
      It’s important to note that the SC doesn’t rule out that the Rwandan system could be improved, & it hasn’t found that the idea of a scheme like this is prohibited (it wasn’t asked to decide that). 19/
      But what are the prospects of that happening? The Court of Appeal previously pointed to a real need for thorough culture change in the Rwandan civil service & judiciary, & to an absence of any sort of roadmap for achieving it (in a state ofc uninterested in the rule of law). 20/
      For all the govt’s attempts to put a brave face on it & claim it’ll upgrade the Rwandan system, personally I don’t think flights will go soon, if ever (NB the idea that it would make a difference if there was a treaty w Rwanda is pie in the sky imho) 21/
      And whilst this decision is a disaster for Patel, Braverman, Johnson & Sunak & all else who supported the policy, it’s surely a catastrophe for Rwanda, whose record has been pored over in detail in the most public way. (I’ve never understood why they didn’t predict that.) 22/
      For the same reason I can’t personally see any other state wanting to line up to replace Rwanda, whatever ££ incentives are offered (and remember we still don’t know the full extent of these in respect of Rwanda). 23/
      Any attempt to amend or replicate this policy will almost certainly be scrutinised with great care & intensity by the courts, inspired by the example of the Court of Appeal and Supreme Court in this case.

      The government will not get an easy ride. 24/
      At the heart of this of course have been the asylum seekers left in a state of fear & anxiety by this appalling policy – principally those like our client who were actually on the June 2022 flight until the last minute – but also others directly or indirectly affected. 25/
      Let this, please, be a turning point in how we treat refugees, and the catalyst for working towards humane, non-racist immigration policies more broadly.

      Refugees welcome here, always. 26/
      Finally, tributes: the team at @Refugees
      – UNHCR – put together compelling evidence about Rwanda which formed the basis for this outcome. Its legal team presented that evidence with awesome clarity & force. 27/
      The legal team for the lead group of claimants (AAA etc) have been outstanding and although it’s invidious to single out anyone, I’m going to anyway, as no praise can be too high for the skill, dedication & humanity of the leading counsel for the AAA team, @RazaHusainQC 28/
      I was privileged to play a small part in this case, representing one of the co-claimants, “RM”, instructed by Daniel Merriman & Tim Davies of Wilsons LLP, alongside David Sellwood & Rosa Polaschek, led initially by Richard Drabble KC & in the SC by Phillippa Kaufmann KC 29/

      https://twitter.com/AlasdairMack66/status/1724776723160748310

    • La Cour suprême britannique juge illégal de renvoyer des demandeurs d’asile au Rwanda

      La Cour suprême britannique a confirmé mercredi 15 novembre l’illégalité du projet hautement controversé du gouvernement d’expulser vers le Rwanda les demandeurs d’asile, d’où qu’ils viennent, arrivés illégalement sur le sol britannique.

      Les hauts magistrats ont ainsi rejeté l’appel du gouvernement du Premier ministre Rishi Sunak et jugé que c’est à juste titre que la cour d’appel avait conclu que le Rwanda ne pouvait être considéré comme un pays tiers sûr.

      Le projet avait été rejeté par une cour d’appel britannique en juin dernier.

      La Cour suprême a rendu son jugement à l’unanimité.

      Pour justifier leur décision, les juges s’appuient sur le bilan rwandais en matière de droits de l’Homme et de traitement des demandeurs d’asile, rapporte notre correspondante à Londres, Émeline Vin. Selon eux, le Rwanda ne respecte pas ses obligations internationales, il rejette 100 % des demandes d’asile venant de Syriens, de Yéménites ou d’Afghans - qui fuient des zones de conflit.

      Ils reprochent aussi au pays de renvoyer des demandeurs voire des réfugiés dans leur pays d’origine, une pratique contraire à la Convention des Nations unies.

      Ce partenariat ferait courir des risques aux demandeurs d’asile et enfreint les lois britanniques.

      Cette décision est un coup dur pour le Premier ministre Rishi Sunak, qui doit faire face aux pressions de son parti conservateur et d’une partie de l’opinion publique sur la question de l’immigration, à moins d’un an des prochaines élections législatives.

      Même s’il avait hérité le projet de ses prédécesseurs, Rishi Sunak en avait fait le pilier de sa promesse de faire baisser l’immigration. Le gouvernement fraîchement remanié n’a pas encore dévoilé son « plan B » ; des sources ministérielles rejettent la possibilité de quitter la Convention européenne des droits de l’Homme.
      Kigali « conteste » la décision, Londres affiche vouloir poursuivre le projet

      Malgré ce revers juridique, Londres a affiché sa volonté de poursuivre le projet en question. Devant les députés, Rishi Sunak a indiqué que son gouvernement travaillait déjà à un « nouveau traité » avec Kigali. « S’il apparaît clairement que nos cadres juridiques nationaux ou nos conventions internationales continuent de nous entraver, je suis prêt à modifier nos lois et à réexaminer ces relations internationales », a-t-il ajouté, alors que certains élus de sa majorité réclament un retrait de la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH).

      Après l’annonce, Kigali aussi a immédiatement annoncé « contester » la décision juridique. « Nous contestons la décision selon laquelle le Rwanda n’est pas un pays tiers sûr pour les demandeurs d’asile et les réfugiés », a déclaré la porte-parole de la présidence rwandaise Yolande Makolo.

      Lors d’un entretien téléphonique, le Premier ministre britannique Rishi Sunak et le président rwandais Paul Kagame « ont réitéré leur ferme engagement à faire fonctionner (leur) partenariat en matière d’immigration et ont convenu de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer que cette politique soit solide et légale », a indiqué Downing Street dans un communiqué.

      https://www.rfi.fr/fr/afrique/20231115-la-cour-supr%C3%AAme-britannique-juge-ill%C3%A9gal-de-renvoyer-des-dema

    • Devant les députés, Rishi Sunak a indiqué que son gouvernement travaillait déjà à un « nouveau traité » avec Kigali. « S’il apparaît clairement que nos cadres juridiques nationaux ou nos conventions internationales continuent de nous entraver, je suis prêt à modifier nos lois et à réexaminer ces relations internationales », a-t-il ajouté, alors que certains élus de sa majorité réclament un retrait de la Cour européenne des droits de l’Homme (#CEDH).

      Darmanin, fais gaffe ! il est possible que les anglais tirent les premiers.
      Et, cela se lit le jour où l’on apprend que « Une directive en préparation sur les violences faites aux femmes prévoit de caractériser le viol par l’absence de consentement. L’objectif est de faire converger les législations européennes. Plusieurs Etats, dont la France, s’y opposent. »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/15/emmanuel-macron-refuse-que-bruxelles-intervienne-dans-la-definition-du-viol_

      souveraineté en crise, chauvinisme en essor.

    • Envoyer les demandeurs d’asile au Rwanda ? La Cour suprême du Royaume-Uni dit non

      Dans une décision rendue mercredi 15 novembre, la plus haute juridiction britannique s’est prononcée sur le projet du gouvernement visant à expédier les migrants au Rwanda le temps de l’examen de leur demande de protection. Il n’en sera pas question pour l’instant.

      La décision était très attendue. Voilà près de deux ans que le Royaume-Uni avait signé un accord – informel – avec le Rwanda pour y expédier ses demandeurs et demandeuses d’asile, dans un contexte où les arrivées de migrant·es par la Manche atteignaient des niveaux records

      La nouvelle s’inscrivait dans un contexte de surenchère politique nauséabonde s’agissant de l’immigration, après que le gouvernement eut envisagé les pires scénarios possible pour repousser les exilé·es en mer et les empêcher d’atteindre les côtes anglaises.

      Mercredi 15 novembre, la Cour suprême s’est enfin prononcée, plusieurs mois après avoir été saisie. Cinq juges ont estimé, à l’unanimité, que le risque d’envoyer des demandeurs et demandeuses d’asile au Rwanda était trop grand : non seulement cela pourrait créer des inégalités de traitement dans les requêtes formulées par les exilé·es, mais ces personnes pourraient être renvoyées dans leur pays d’origine en cas de rejet de leur demande, alors même qu’elles pourraient y encourir un danger.

      Une pratique qui violerait le principe de « non-refoulement », qui interdit aux États d’expulser, « de quelque manière que ce soit », un·e réfugié·e « sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté seraient menacées en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ».

      Dans sa prise de parole, le président de la Cour suprême a rappelé l’importance de la Convention de Genève relative aux réfugié·es, dont le Royaume-Uni est signataire, de même que la Convention européenne des droits de l’homme et le droit international de manière générale, qui interdit de renvoyer des personnes en quête de protection dans leur pays d’origine sans qu’un examen sérieux de leur demande n’ait été réalisé au préalable.

      Le juge, Robert Reed, a également pris soin de souligner qu’il ne s’agissait pas d’une « décision politique » mais bien d’une question de droit, relevant de ce qui est légal ou non.
      Un risque trop grand pour les réfugié·es

      « Nous avons conclu qu’il existait des raisons sérieuses de croire qu’un risque réel de refoulement existait. Un changement est nécessaire pour éliminer ce risque, mais il n’a pas été démontré qu’il était en place actuellement », a-t-il justifié, rappelant les violations de droits humains régulièrement dénoncées au Rwanda, ainsi que les effets concrets déjà observés à l’occasion d’un autre accord similaire, signé entre le Rwanda et Israël, ayant mené à des refoulements réguliers de personnes exilées.

      « Si le Rwanda ne dispose pas d’un système adéquat pour traiter les demandes d’asile, les véritables réfugiés pourraient être renvoyés dans leur pays d’origine. En d’autres termes, ils feraient l’objet d’un refoulement », a complété le juge dans son propos.

      La requête du ministère de l’intérieur, qui contestait une décision antérieure de la cour d’appel, a ainsi été rejetée. Récemment, une grande campagne de communication lancée par le premier ministre Rishi Sunak ambitionnait d’« arrêter les bateaux » (stop the boats, en anglais), en s’appuyant notamment sur ce projet d’accord avec le Rwanda, qui devait avoir un effet « dissuasif » pour les personnes migrantes aspirant à rejoindre le Royaume-Uni.

      « J’ai promis de réformer non pas seulement notre système d’asile mais aussi nos lois. Nous avons donc introduit une législation sans précédent pour faire en sorte que les personnes arrivant illégalement soient placées en détention et expulsées en quelques semaines, soit vers le pays d’origine, soit vers un pays tiers sûr comme le Rwanda », avait déclaré le premier ministre lors d’un point organisé le 5 juin.

      La décision de la Cour suprême représente donc un sérieux camouflet pour le gouvernement britannique dans ce contexte, à l’heure où celui-ci faisait de la sous-traitance de l’asile une solution miracle.

      Mercredi, Rishi Sunak n’a pas tardé à réagir sur les réseaux sociaux, rappelant que lorsqu’il avait promis d’arrêter les bateaux, il « le pensait sérieusement ». « Il faut mettre fin à ce manège. Nous travaillons sur un nouveau traité international avec le Rwanda et nous le ratifierons sans tarder. Nous fournirons une garantie légale que ceux qui seront relocalisés vers le Rwanda seront protégés d’une éventuelle expulsion », a-t-il réaffirmé.

      En juin dernier, le premier ministre vantait également la possibilité de placer les demandeurs et demandeuses d’asile sur une barge, surnommée le « Bibby Stockholm » et installée dans le port de Portland, dans le sud de l’Angleterre. Celle-ci devait permettre, selon le gouvernement, de réaliser des économies en cessant d’héberger les demandeurs et demandeuses d’asile à l’hôtel : elle a finalement fait polémique.

      À peine installé·es à bord, les occupant·es ont alerté sur les conditions d’hygiène avant d’être évacué·es à la suite de la découverte d’une bactérie sur place. Le 26 octobre, un jeune Nigérian a tenté de mettre fin à ses jours lorsqu’il a appris qu’il serait transféré sur cette barge. Selon le quotidien The Guardian, deux décès « récents » s’apparentant à des suicides ont été répertoriés dans les hôtels hébergeant des exilé·es au Royaume-Uni cette année.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/161123/envoyer-les-demandeurs-d-asile-au-rwanda-la-cour-supreme-du-royaume-uni-di

    • La Corte Suprema del Regno Unito giudica illegale l’accordo con il Ruanda

      Il Ruanda non è un paese sicuro dove trasferire i richiedenti asilo

      Mercoledì 15 novembre la più alta Corte del Regno Unito ha bloccato almeno per un periodo la volontà politica del governo di deportare i richiedenti asilo in paesi dell’Africa o in paesi extra Ue che non possono garantire per diversi motivi le tutele previste dal diritto internazionale.

      La Corte ha infatti stabilito che il Ruanda non è un Paese terzo sicuro in cui inviare i richiedenti asilo. Secondo tutte le organizzazioni che si battono per i diritti dei rifugiati e per i diritti fondamentali si tratta di un’enorme vittoria, un risultato ottenuto anche per merito della mobilitazione diffusa e che proteggerà i diritti di innumerevoli persone giunte nel Regno Unito in cerca di sicurezza e accoglienza.

      L’accordo tra Regno Unito e Ruanda era stato fortemente voluto nell’aprile del 2022 dall’allora primo ministro Boris Johnson (dimessosi poi il 9 giugno 2023 per aver mentito alla Camera dei Comuni in relazione ai festini a Downing street nel corso del lockdown). Nella pomposa conferenza stampa del 14 aprile 2022 l’ex premier disse: «Tutti coloro che raggiungono illegalmente il Regno Unito, così come coloro che sono arrivati illegalmente dal primo gennaio, possono essere trasferiti in Ruanda. […] Ciò significa che i migranti economici che approfittano del sistema d’asilo non potranno rimanere nel Regno Unito, mentre quelli che ne hanno veramente bisogno avranno […] l’opportunità di costruirsi una nuova vita in un paese dinamico».

      Quel giorno il Segretario di Stato per gli Affari Interni e il Ministro Ruandese per gli Affari Esteri e la Cooperazione Internazionale illustrarono l’accordo di cooperazione in materia di sviluppo economico e migrazioni, utilizzando la solita retorica – tanto cara anche al governo italiano – del contrasto all’immigrazione illegale, della necessità di controllare le frontiere e di reprimere le organizzazioni di trafficanti.

      Tuttavia, solo due mesi dopo, il 16 giugno 2022, la Corte europea dei diritti dell’uomo (CEDU) bloccò, insieme alla proteste di diverse organizzazioni, il volo che avrebbe dovuto deportare i primi sette richiedenti asilo verso il paese africano.

      Le motivazioni alla base di quella decisione solo le stesse riprese mercoledì dalla Corte Suprema e prima ancora dalla Corte di Appello: ci sono motivi sostanziali per ritenere che i richiedenti asilo deportati in Ruanda corrano il rischio reale di essere rimpatriati nel loro Paese d’origine dove potrebbero subire trattamenti inumani e degradanti. Ciò porterebbe il Regno Unito a violare gli obblighi di non respingimento (non-refoulement) previsti dal diritto internazionale e nazionale.

      Emilie McDonnell di Human Rights Watch spiega che «la Corte Suprema ha richiamato l’attenzione sulla pessima situazione del Ruanda in materia di diritti umani, tra cui le minacce ai ruandesi che vivono nel Regno Unito, oltre alle esecuzioni extragiudiziali, alle morti in custodia, alle sparizioni forzate, alla tortura e alle restrizioni ai media e alle libertà politiche».

      L’esperta di diritti umani e diritto internazionale ricorda che nel 2022 Human Rights Watch scrisse al Ministro degli Interni del Regno Unito, chiarendo che il Ruanda non poteva essere considerato un Paese terzo sicuro, date le continue violazioni dei diritti umani. «L’Alto Commissariato delle Nazioni Unite per i Rifugiati (UNHCR) ha fornito prove schiaccianti dei problemi sistemici del sistema di asilo ruandese, della potenziale mancanza di indipendenza della magistratura e degli avvocati e del tasso di rifiuto del 100% per le persone provenienti da zone di conflitto, in particolare Afghanistan, Siria e Yemen, probabili Paesi di origine dei richiedenti asilo trasferiti dal Regno Unito. L’UNHCR ha inoltre presentato almeno 100 accuse di respingimento, una pratica che è continuata anche dopo la conclusione dell’accordo con il Regno Unito».

      La linea del governo inglese è stata bocciata in tutto e per tutto dalla Corte Suprema, anche nella parte relativa al monitoraggio dell’accordo: il tribunale ha dichiarato che “le intenzioni e le aspirazioni non corrispondono necessariamente alla realtà“.

      «La Corte ha ritenuto che il Ruanda non abbia la capacità pratica di determinare correttamente le richieste di asilo e di proteggere le persone dal respingimento», aggiunge Emilie McDonnell. «Questo dovrebbe essere un monito per gli altri governi che stanno pensando di esternalizzare e spostare le proprie responsabilità in materia di asilo su altri Paesi».

      Di sicuro questa sentenza metterà in difficoltà anche il governo austriaco che sta pensando di stringere un accordo simile con il Ruanda, ma anche lo stesso governo italiano che circa 10 giorni fa ha stipulato un protocollo illegale e disumano con l’Albania.

      https://www.meltingpot.org/2023/11/la-corte-suprema-del-regno-unito-giudica-illegale-laccordo-con-il-ruanda

    • L’asilo è un diritto, la Gran Bretagna deve rispettarlo: è un dovere

      La sua spregiudicata strategia di esternalizzazione ha subito un duro colpo ma molte questioni restano aperte. A partire dal tentativo del Regno Unito di disfarsi di ogni responsabilità sui rifugiati

      Con sentenza del 15 novembre 2023 la Corte Suprema del Regno Unito ha confermato “la conclusione della Corte d’Appello secondo cui la politica sul Ruanda è illegittima. Ciò in quanto ci sono motivi sostanziali per ritenere che i richiedenti asilo affronterebbero un rischio reale di maltrattamenti a causa del respingimento nel loro Paese d’origine se fossero trasferiti in Ruanda” afferma la Corte.

      Il Memorandum siglato tra il Regno Unito e il Ruanda il 6 aprile 2022 prevedeva che le domande di asilo presentate da chi arriva in modo irregolare nel Regno Unito, specie se attraverso il canale della Manica, sarebbero state tutte dichiarate inammissibili.

      Nel Memorandum si conveniva infatti di dare avvio ad un «meccanismo per la ricollocazione dei richiedenti asilo le cui richieste non sono state prese in considerazione dal Regno Unito, in Ruanda, che esaminerà le loro richieste e sistemerà o espellerà (a seconda dei casi) le persone dopo che la loro richiesta è stata decisa, in conformità con il diritto interno ruandese».

      Subito dopo si precisava altresì che «gli impegni indicati in questo Memorandum sono presi tra il Regno Unito e il Ruanda e viceversa e non creano o conferiscono alcun diritto a nessun individuo, né il rispetto di questo accordo può essere oggetto di ricorso in qualsiasi tribunale da parte di terzi o individui».

      Sarebbe stato il Regno Unito a determinare «i tempi di una richiesta di ricollocamento (in inglese il termine usato è relocation n.d.r.) di individui in base a questi accordi e il numero di richieste di ricollocazione da inoltrare» al Ruanda il quale sarebbe divenuto il solo Paese responsabile ad occuparsi della sorte dei richiedenti anche se con esso i richiedenti non hanno alcun legame.

      Anche in caso di accoglimento della loro domanda di asilo, non veniva prevista per i rifugiati alcuna possibilità di rientro verso la Gran Bretagna, nonostante si tratti del Paese al quale inizialmente avevano chiesto asilo. Nel valutare come illegale il Memorandum tra UK e il Ruanda, l’U.N.H.C.R. (Alto Commissariato delle Nazioni Unite per i Rifugiati) aveva sottolineato come “Gli accordi di trasferimento non sarebbero appropriati se rappresentassero un tentativo, in tutto o in parte, da parte di uno Stato parte della Convenzione del 1951 di liberarsi dalle proprie responsabilità”.

      Le sole inquietanti parole del Memorandum laddove precisa che le misure adottate “non creano o conferiscono alcun diritto a nessun individuo” sono sufficienti a far comprendere il livello di estremismo politico che caratterizzava il Memorandum nel quale l’individuo veniva spogliato dei suoi diritti fondamentali e veniva ridotto a mero oggetto passivo del potere esecutivo.

      Già la Corte Europea per i Diritti dell’Uomo aveva ritenuto, con misura di urgenza (caso N.S.K. v. Regno Unito del 14.06.22) di bloccare tutte le operazioni di trasferimento coatto dal Regno Unito al Ruanda per due principali ragioni: la prima è che il Ruanda non è in grado di garantire una effettiva applicazione della Convenzione di Ginevra e che quindi detto rinvio violerebbe l’art. 3 della CEDU che prescrive che «Nessuno può essere sottoposto a tortura né a pene o trattamenti inumani o degradanti».

      La seconda ragione riguarda l’impossibilità legale di contestare la decisione di trasferimento coatto verso il Ruanda; come sopra richiamato infatti, non solo non sarebbe stato possibile garantire alcuna effettività al ricorso, ma veniva negato alla radice lo stesso diritto di agire in giudizio.

      Nel rigettare il ricorso presentato dal premier Sunak la Corte Suprema del Regno Unito si è concentrata principalmente su due motivi di ricorso: a) il rischio di violazione del divieto di non respingimento; 2) la violazione del diritto dell’UE in materia di asilo. Sotto quest’ultimo profilo la Corte Suprema ha rigettato il ricorso correttamente evidenziando che, a seguito della Brexit, le disposizioni del diritto dell’Unione “hanno cessato di avere effetto nel diritto interno del Regno Unito quando il periodo di transizione è terminato il 31.12.2020”.

      Tanto il diritto interno che la Convenzione Europea sui Diritti dell’Uomo e le libertà fondamentali (CEDU), e in particolare l’art. 3, vanno però rispettati, e ad avviso della Corte “ le prove dimostrano che ci sono motivi sostanziali per ritenere che vi sia un rischio reale che le richieste di asilo non vengano esaminate correttamente e che i richiedenti asilo rischino quindi di essere rimpatriati direttamente o indirettamente nel loro Paese d’origine”.

      In un passaggio della sentenza la Corte afferma che “i cambiamenti strutturali e il rafforzamento delle capacità necessarie per eliminare tale rischio (il rischio che i rifugiati subiscano respingimenti illegali in Ruanda ndr) possono essere realizzati in futuro” (paragrafo 105). Tale espressione rinvia a un futuro ipotetico e non rappresenta alcuna apertura di credito verso le scelte del Governo.

      Nonostante ciò il Premier Sunak, per il quale la decisione finale assunta dalla Suprema Corte rappresenta una catastrofe politica, ha cercato di piegare a suo vantaggio tale passaggio della sentenza dichiarando in Parlamento che la Suprema Corte ha chiesto in realtà solo maggiori garanzie sul rispetto dei diritti dei richiedenti asilo in Ruanda e che il governo sta già lavorando a un nuovo trattato con il Ruanda e che esso sarà finalizzato alla luce della sentenza odierna.

      Probabilmente Sunak vende fumo per prendere tempo perché sa bene che i richiesti cambiamenti strutturali non sono realizzabili. Tuttavia la politica del governo inglese, almeno al momento, non sembra avviata verso un serio ripensamento e alcuni osservatori non escludono la possibilità che vengano adottate scelte ancora più estremiste come l’uscita unilaterale del Regno Unito dal Consiglio d’Europa, cessando dunque di essere parte contraente della Convenzione Europea dei Diritti dell’Uomo (come avvenuto per la Russia nel 2022).

      Uno scenario destinato ad incidere sui diritti dei migranti come su quelli dei cittadini britannici, che può apparire degno di uno scadente romanzo di fantapolitica, ma che in realtà non può essere escluso. Come non mi stancherò mai di ricordare, le violente politiche di esternalizzazione dei confini e l’attacco al diritto d’asilo stanno causando una profonda crisi a quel sistema giuridico di tutela dei diritti umani in Europa che fino a poco tempo fa tutti ritenevano inscalfibile.

      La Corte Suprema ha precisato nella sentenza che “in questo appello, la Corte deve decidere se la politica del Ruanda è legittima”. Rimane dunque irrisolta la più generale e scottante questione della legittimità o meno della politica del Governo inglese, di potersi disfare, completamente e ogni volta che lo desidera, della responsabilità giuridica del Regno Unito di esaminare le domande di asilo che pur vengono presentate sul suo territorio, delegando a tal fine, dietro pagamento, un compiacente paese terzo (sperando di poterne trovare, prima o poi, uno che non presenti gli aspetti critici del Ruanda).

      Si tratta dell’obiettivo generale che sta alla base della recentissima controversa legge approvata dal Parlamento inglese a nel luglio 2023 (Illegal Migration Act), successivamente quindi al Memorandum con il Ruanda, che all’art. 1.1 afferma che “scopo della presente legge è prevenire e scoraggiare la migrazione illegale, in particolare la migrazione per rotte non sicure e illegali, richiedendo la rimozione (“the removal” nel testo originale) dal Regno Unito di alcune persone che entrano o arrivano nel Regno Unito in violazione del controllo dell’immigrazione”.

      In una dichiarazione congiunta resa il 18.07.23 da UNHCR e dall’Ufficio delle Nazioni Unite per i Diritti Umani al momento dell’approvazione della legge, entrambe le agenzie delle Nazioni Unite hanno sostenuto che la nuova legge “è in contrasto con gli obblighi del paese ai sensi della legge internazionale sui diritti umani e dei rifugiati (….) la legge estingue l’accesso all’asilo nel Regno Unito per chiunque arrivi irregolarmente, essendo passato attraverso un paese – per quanto brevemente – dove non ha affrontato persecuzioni. Gli impedisce di presentare la protezione dei rifugiati o altre rivendicazioni sui diritti umani, indipendentemente da quanto siano convincenti le loro circostanze. Inoltre, richiede la loro rimozione in un altro paese, senza alcuna garanzia che saranno necessariamente in grado di accedere alla protezione. Crea nuovi poteri di detenzione, con una limitata supervisione giudiziaria”.

      La spregiudicata strategia della esternalizzazione del diritto d’asilo condotta dal governo del Regno Unito ha subito un duro colpo con la cancellazione del Memorandum con il Ruanda, ma moltissimi scenari problematici rimangono ancora aperti.

      Nel frattempo, come messo in luce dalle associazioni inglesi che operano nel campo della protezione dei rifugiati, il sistema inglese d’asilo sta collassando a causa della paralisi amministrativa prodotto dalle continue tentate riforme, e l’arretrato nella definizione delle domande di asilo ha superato i centomila casi pendenti.

      https://www.unita.it/2023/11/17/lasilo-e-un-diritto-la-gran-bretagna-deve-rispettarlo-e-un-dovere

  • Programme de retour volontaire (?) pas si volontaire que ça

    Le #Maroc figure au Top 5 des pays hôtes accueillant les migrants en retour en 2022. Il occupe la 3ème place avec l’assistance de 2457 migrants. Il est devancé par la Libye (11.200) et le Yémen (4.080). La Tunisie et l’Algérie arrivent respectivement en 4ème et 5ème positions avec 1.607 et 1.306 migrants assistés. Le Maroc fait partie également du Top 5 des pays d’origine avec 627 migrants assistés. Le Soudan arrive en tête avec 2.539 migrants assistés, suivi de l’Irak (1907). L’Algérie occupe la 4ème place (627) devant la Tunisie (232), précise un rapport sur le retour et la réintégration, publié récemment par l’OIM.

    Hausse

    En détail, 3.552 migrants (2.097 hommes, 916 femmes, 277 garçons et 262 filles) ont demandé une #assistance au retour volontaire à partir du Maroc vers 26 pays d’origine. Le rapport annuel 2022 sur l’assistance au retour volontaire et à la réintégration (https://morocco.iom.int/sites/g/files/tmzbdl936/files/documents/2023-03/Rapport_Annuel_FR_AVRR_20230310.pdf) précise que « la cadence des retours volontaires en 2022 a augmenté légèrement par rapport à 2021, et a triplé par rapport au nombre de migrants assistés en 2020. Cette hausse est due, principalement, à l’augmentation des fonds disponibles en 2022 pour répondre aux demandes de retour volontaire et au fait de compenser le retard cumulé suite aux restrictions de mobilité décrétées par les autorités compétentes pour endiguer la propagation de la pandémie de Covid-19 ».

    La majorité des migrants ayant bénéficié du retour volontaire étaient de jeunes hommes dont l’âge variait entre 19 et 35 ans et qui sont retournés seuls dans leur pays d’origine. Tandis que le ratio femmes/hommes est resté inchangé depuis 2017 (trois bénéficiaires sur quatre étaient des hommes), en 2022, le programme a connu une augmentation de 7% du nombre de femmes voulant retourner. 61% des migrants interrogés ont déclaré qu’ils sont rentrés en raison du manque de ressources financières, les empêchant de maintenir un niveau de subsistance suffisant au Maroc, tandis que 15% ont déclaré avoir choisi de rentrer car ils n’ont pas pu poursuivre leur parcours migratoire vers leur pays de destination.
    L’année 2022 a enregistré également le retour volontaire de 639 Marocains au pays.

    Sachant que le nombre de retours a considérablement augmenté cette année-là, en raison de la crise socioéconomique en Europe suite à la pandémie de Covid-19, d’événements tels que la guerre en Ukraine et la levée des restrictions de mobilité imposées pour endiguer la propagation de ladite pandémie.

    Les tendances de retour se sont progressivement étendues au-delà des pays de l’Union européenne, notamment avec l’augmentation du nombre de demandes d’aide au retour en provenance de la Turquie (+5229%) et de la Tunisie (+25%), par rapport aux chiffres de 2021. L’OIM s’attend à ce que cette tendance à la hausse se poursuive au cours des prochaines années.

    Changement

    Sur un autre registre, le rapport de l’OIM révèle que le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ont dépassé l’Espace économique européen (EEE) en tant que principale région d’accueil, représentant 33% du nombre total de cas. Le Niger était le principal pays d’accueil avec un nombre total de 15.097 migrants aidés à rentrer, confirmant la tendance des années précédentes avec une augmentation des retours depuis les pays de transit dans d’autres régions d’accueil en dehors de l’Espace économique européen.

    « Cela peut s’expliquer en partie par une hausse du nombre de retours humanitaires, facilités dans le cadre des programmes de retour humanitaire volontaire de l’OIM en Libye et au Yémen, en combinaison avec le nombre croissant de parties prenantes facilitant le retour et la réintégration, en particulier dans l’EEE. Malgré ce changement, certaines tendances sont restées les mêmes. Les trois principaux pays d’accueil à partir desquels le retour volontaire a été facilité en 2022 étaient le Niger, la Libye et l’Allemagne. De même, l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale sont restées la principale région d’origine, représentant 47% du nombre total de migrants bénéficiant d’une aide au retour en 2022. Le Mali est devenu le premier pays d’origine des migrants en 2022, dépassant la Guinée, suivie de l’Ethiopie en troisième position », précise ledit rapport.

    Préoccupation

    Cependant, nombreux sont les ONG et les chercheurs qui doutent du caractère véritablement « volontaire » des programmes RVA (retour volontaire assisté). Tel est le cas de l’Ordre de Malte, qui estime qu’”en réalité, peu de personnes souhaitaient réellement repartir. Les déboutés du droit d’asile, en particulier, [ont] de multiples raisons pour ne pas vouloir rentrer (éventuelles menaces dans le pays d’origine, perte de l’accès aux soins en France, raisons économiques). Il y a aussi cette question paradoxale ou ambivalente du retour : repartir au pays d’origine est vécu comme l’échec d’un projet d’émigration (pas de régularisation, échec de projets personnels ou familiaux). Comment serait-il alors possible de transformer ce sentiment d’échec en projet de vie ?”.

    Dans son article, « Le retour volontaire assisté  : Ses implications sur les femmes et les enfants » datant de 2016, Monica Encinas affirme que « les programmes de rapatriement sont organisés en partenariat étroit avec les gouvernements nationaux qui ont un intérêt manifeste à limiter le nombre de migrants et de réfugiés qui tentent d’entrer sur leur territoire chaque année ». Elle ajoute que « certaines ONG ont le sentiment que de nombreux réfugiés participent uniquement à ces programmes parce qu’ils y sont poussés une fois que les gouvernements leur ont stratégiquement retiré l’accès aux services essentiels et les ont menacés d’expulsion ». Et « elles ne sont pas les seules à avoir cette impression », poursuivit-elle. Anne Koch, chargée de recherche, suggère que les programmes de RVA lancés par l’UNHCR et l’OIM doivent être considérés comme « provoqués par les Etats » dans la mesure où ils permettent aux gouvernements occidentaux d’externaliser l’expulsion et d’en confier la responsabilité à l’UNHCR et à l’OIM.

    Elle signale en outre que dès que « les retours forcés et les retours volontaires sont organisés de manière conjointe, la notion de volontariat n’est plus garantie ». En 2013, une autre étude a montré que des fonctionnaires gouvernementaux ont admis qu’ils utilisaient la menace de l’expulsion afin d’augmenter la participation aux programmes de RVA ».

    En outre, Monica Encinas explique que la majorité des demandeurs d’asile qui participent à des programmes de RVA retournent dans des zones où le conflit est encore actif (comme en Afghanistan et en Somalie) et où les chances de réintégration à long terme et en toute sécurité sont pratiquement inexistantes. « Un rapport de l’UNHCR datant de juillet 2013 sur l’autoévaluation de son programme de retour d’Afghans en Afghanistan – le programme le plus important de rapatriement jamais mis en œuvre par l’UNHCR – soulignait les difficultés auxquelles l’agence devait faire face en vue de parvenir à apporter un soutien à la réintégration sociale et économique en Afghanistan.

    Plus tard la même année, Human Rights Watch a recommandé à l’UNHCR et à l’OIM de cesser de se concentrer sur les programmes de RVA au vu de l’insécurité croissante et de l’incapacité des deux agences à fournir des services d’appui adéquats suite au retour des réfugiés », écrit-elle avant de noter que certaines implications juridiques, jugées potentiellement dangereuses, selon elle, accompagnent la participation à des programmes de RVA. « Tous ceux qui y participent doivent signer une « déclaration de retour volontaire ».

    Cette dernière raison suscite de vives préoccupations dans la mesure où une demande d’asile est axée sur un facteur principal : pouvoir faire la preuve d’une crainte légitime de persécution dans le pays que vous fuyez. Le fait de signer une déclaration de retour volontaire dans le cadre d’un RVA implique que vous n’avez plus de motifs de craindre des persécutions et il est probable qu’une demande subséquente – en cas de changement pour le pire des conditions dans le pays de retour – perde toute crédibilité au regard de la loi. Une nouvelle demande d’asile risque donc de se heurter à des obstacles juridiques sérieux parce que le requérant a déjà effectué un retour dans son pays par le passé », a-t-elle fait savoir.

    Disproportion

    Des considérations juridiques et humanistes qui ne semblent pas être prises en considération par les décideurs politiques à Bruxelles qui misent trop sur cette stratégie qui coûte moins cher que les expulsions. Le Conseil européen pour les réfugiés et les exilés (CERE) a déjà dénoncé une politique européenne “disproportionnément concentrée sur les retours et ne portant pas assez l’effort sur la politique d’accueil en elle-même ou sur l’amélioration du processus de traitement des demandes d’asile”. Autrement dit, l’UE s’occupe trop des conditions de retour des migrants irréguliers alors qu’elle devrait consacrer son énergie à améliorer l’accueil de ceux qui peuvent légitimement prétendre à l’asile. Pour l’UE, ces retours coûtent moins cher que les expulsions. Selon les estimations du service de recherche du Parlement européen, un retour forcé – qui nécessite bien souvent un passage en centre de rétention – coûte en moyenne 3.414 euros, contre seulement 560 pour un retour dit “volontaire”. A souligner, cependant, que les retours volontaires ne représentent que 27% des départs depuis le territoire de l’Union et sont aujourd’hui trop rarement effectifs.

    « La Commission européenne estime qu’en 2019, sur les 490.000 ordres de retour passés sur le territoire de l’Union, seuls 140.000 ont effectivement été appliqués. Soit un peu moins d’un tiers du total. Il n’est, en effet, pas rare qu’une personne ayant accepté la procédure de retour volontaire disparaisse peu avant de devoir prendre l’avion, pour différentes raisons : crainte pour son intégrité physique une fois rentrée dans son pays d’origine, honte de devoir assumer l’échec du processus migratoire aux yeux de ses proches… », observe le site Touteleurop.eu.

    Désenchantement

    Une enquête, menée en 2020 par la chaîne d’information européenne Euronews, a révélé que « des dizaines de migrants ayant participé au programme RVA ont déclaré qu’une fois rentrés chez eux, ils ne recevaient aucune aide. Et ceux qui ont reçu une aide financière ont déclaré qu’elle était insuffisante ». L’enquête a indiqué également que « nombreux sont ceux qui envisagent de tenter à nouveau de se rendre en Europe dès que l’occasion se présente ». Mais Kwaku Arhin-Sam, spécialiste des projets de développement et directeur de l’Institut d’évaluation Friedensau, estime de manière plus générale que la moitié des programmes de réintégration de l’OIM échouent.

    Les journalistes d’Euronews expliquent qu’« entre mai 2017 et février 2019, l’OIM a aidé plus de 12.000 personnes à rentrer au Nigeria. Parmi elles, 9.000 étaient "joignables" lorsqu’elles sont rentrées chez elles, 5.000 ont reçu une formation professionnelle et 4.300 ont bénéficié d’une "aide à la réintégration". Si l’on inclut l’accès aux services de conseil ou de santé, selon l’OIM Nigeria, un total de 7.000 sur 12.000 rapatriés – soit 58% – ont reçu une aide à la réintégration. Mais le nombre de personnes classées comme ayant terminé le programme d’aide à la réintégration n’était que de 1.289. De plus, les recherches de Jill Alpes, experte en migration et chercheuse associée au Centre de recherche sur les frontières de Nimègue, ont révélé que des enquêtes visant à vérifier l’efficacité de ces programmes n’ont été menées qu’auprès de 136 rapatriés ».

    Parallèlement, ajoute Euronews, une étude de Harvard sur les Nigérians de retour de Libye estime que 61,3% des personnes interrogées ne travaillaient pas après leur retour, et qu’environ 16,8% supplémentaires ne travaillaient que pendant une courte période, pas assez longue pour générer une source de revenus stable. A leur retour, la grande majorité des rapatriés, 98,3%, ne suivaient aucune forme d’enseignement régulier.

    Dans certains cas, l’argent que les migrants reçoivent est utilisé pour financer une nouvelle tentative de rejoindre l’Europe. « Dans un des cas, une douzaine de personnes qui avaient atteint l’Europe et avaient été renvoyées chez elles ont été découvertes parmi les survivants du naufrage d’un bateau en 2019 qui se dirigeait vers les Iles Canaries », rapportent les journalistes d’Euronews.

    Insuffisances

    Pour certains spécialistes, les programmes RVA renvoient à une autre problématique, celle du travail de l’OIM. Selon Loren Landau, professeur spécialiste des migrations et du développement au Département du développement international d’Oxford, interrogé par Euronews, ce travail de l’OIM souffre en plus d’un manque de supervision indépendante. "Il y a très peu de recherches indépendantes et beaucoup de rapports. Mais ce sont tous des rapports écrits par l’OIM. Ils commandent eux-mêmes leur propre évaluation, et ce depuis des années", détaille le professeur.

    Pour sa part, le Dr. Arhin-Sam, spécialiste de l’évaluation des programmes de développement, interrogé également par Euronews, remet en question la responsabilité et la redevabilité de l’ensemble de la structure, arguant que les institutions et agences locales dépendent financièrement de l’OIM. "Cela a créé un haut niveau de dépendance pour les agences nationales qui doivent évaluer le travail des agences internationales comme l’OIM : elles ne peuvent pas être critiques envers l’OIM. Alors que font-elles ? Elles continuent à dire dans leurs rapports que l’OIM fonctionne bien. De cette façon, l’OIM peut ensuite se tourner vers l’UE et dire que tout va bien".

    Pour M. Arhin-Sam, les ONG locales et les agences qui aident les rapatriés "sont dans une compétition très dangereuse entre elles" pour obtenir le plus de travail possible des agences des Nations unies et entrer dans leurs bonnes grâces. "Si l’OIM travaille avec une ONG locale, celle-ci ne peut plus travailler avec le HCR. Elle se considère alors chanceuse d’être financée par l’OIM et ne peut donc pas la critiquer", affirme-t-il. A noter, par ailleurs, que l’UE participe en tant qu’observateur aux organes de décision du HCR et de l’OIM, sans droit de vote, et tous les Etats membres de l’UE sont également membres de l’OIM. "Le principal bailleur de fonds de l’OIM est l’UE, et ils doivent se soumettre aux exigences de leur client. Cela rend le partenariat très suspect", souligne M. Arhin-Sam. Et de conclure : « [Lorsque les fonctionnaires européens] viennent évaluer les projets, ils vérifient si tout ce qui est écrit dans le contrat a été fourni. Mais que cela corresponde à la volonté des gens et aux complexités de la réalité sur le terrain, c’est une autre histoire ».

    https://www.libe.ma/Programme-de-retour-volontaire-pas-si-volontaire-que-ca_a141240.html
    #retour_volontaire #IOM #OIM #migrations #asile #réfugiés #statistiques #chiffres #réintégration

    • Quelque 900 migrants irréguliers marocains s’apprêteraient à regagner le pays

      Le Maroc s’apprête à accueillir 900 migrants marocains en situation irrégulière en Allemagne. La ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a obtenu, lors de sa récente visite au Maroc, l’aval des autorités marocaines concernant ce refoulement.
      Selon frankfurter allgemeine zeitung, le Royaume aurait consenti à reprendre les ressortissants marocains ayant fait l’objet de décisions d’expulsion. Une décision critiquée par l’Organisation démocratique du travail (ODT) qui rejette l’expulsion forcée des migrants marocains, sans que ces derniers ne puissent exprimer leur désir de retour volontaire dans leur pays, dans le plein respect des conditions de réintégration et d’insertion.
      En effet, nombreux sont les ONG et les chercheurs qui doutent du caractère véritablement « volontaire » des programmes de RVA (retour volontaire assisté). En réalité, peu de personnes souhaitaient réellement repartir. Les déboutés du droit d’asile, en particulier, ont de multiples raisons de ne pas vouloir rentrer (éventuelles menaces dans le pays d’origine, perte de l’accès aux soins, raisons économiques).
      Il y a aussi cette question paradoxale ou ambivalente du retour : repartir au pays d’origine est vécu comme l’échec d’un projet d’émigration (pas de régularisation, échec de projets personnels ou familiaux).
      A noter, cependant, que le Maroc figure au Top 5 des pays hôtes accueillant les migrants en retour en 2022. Il occupe la 3ème place avec l’assistance de 2.457 migrants. Il est devancé par la Libye (11.200) et le Yémen (4080). La Tunisie et l’Algérie arrivent respectivement en 4ème et 5ème positions avec 1.607 et 1.306 migrants assistés. Le Maroc fait partie également du Top 5 des pays d’origine avec 627 migrants assistés. Décryptage.

      L’Organisation démocratique du travail (ODT) dit non aux expulsions des migrants marocains en Allemagne. Elle rejette, en effet, l’expulsion forcée des migrants marocains, sans exprimer leur désir de retour volontaire dans leur pays et dans le plein respect des conditions de réintégration et d’insertion.

      Elle appelle également au respect des droits humains et fondamentaux des migrants et des réfugiés et demandeurs d’asile, à s’abstenir d’expulsions forcées et répressives pour des motifs politiques et électoralistes, et à ce que la priorité soit donnée aux solutions alternatives centrées sur les droits de l’Homme, fondées sur un règlement global de leur situation, accordant un statut légal aux immigrés marocains et mettant fin au phénomène de détention des enfants.

      Deux poids deux mesures

      Dans un communiqué publié récemment, cette organisation syndicale considère que « tous les migrants, réfugiés et demandeurs d’asile doivent être protégés et traités avec dignité, en respectant pleinement leurs droits, quels que soient leurs statuts, conformément au droit international ».

      A ce propos, l’ODT critique la décision allemande visant à renvoyer 900 immigrés marocains irréguliers dans leur pays d’origine. Selon elle, Berlin et les autres pays européens poursuivent leur politique hypocrite de migration basée sur les expulsions des migrants irréguliers et l’accueil des compétences pour lesquelles « le Royaume du Maroc dépense chaque année des millions de dirhams pour leur formation pour ensuite les livrer sur un plateau d’or à l’Allemagne ou à d’autres pays européens, au Canada, aux Etats-Unis d’Amérique... »

      Le communiqué en question précise, en outre, que « le nouveau projet d’expulsions allemand cible particulièrement les Arabes, les musulmans et les Africains en général » en expliquant que « les migrants de ces pays sont souvent expulsés d’une manière qui viole les principes des droits de l’Homme et les normes internationales interdisant l’expulsion collective et le principe de non-refoulement sans motif valable ».

      En effet, ajoute le document, les expulsions se font selon le procédé de « recourir de plus en plus à la détention des migrants et à leur renvoi dans leur pays d’origine, sur la base de justifications avancées non fondées, voire même la conclusion d’accords bilatéraux avec leurs pays d’origine, moyennant une aide financière misérable notamment avec certains pays africains, du Maghreb, la Syrie, le Soudan, le Yémen et la Libye ».

      Mettre fin aux expulsions

      Pour l’ODT, il est temps d’abandonner « tout accord visant à expulser abusivement les Marocains en situation irrégulière contre leur gré, avec l’obligation de respect des droits des migrants et de leurs familles conformément aux conventions internationales, tout en envisageant un retour volontaire et sûr dans le cadre de la réintégration dans leur pays d’origine ».

      L’Organisation démocratique du travail exige aussi de « mettre fin aux violations des droits humains des migrants réguliers et irréguliers et à toutes les formes de discrimination et d’exclusion dans tous les domaines économiques et sociaux, en respectant les instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme et les conventions sur la migration et en mettant en œuvre la Charte de Marrakech pour des « migrations sûres, ordonnées et régulières » ainsi que la résolution adoptée par l’Assemblée générale le 19 décembre 2018.

      « Il faut garantir l’accès aux services de base, notamment la santé, l’éducation et le soutien social, sans discrimination ; éliminer la discrimination, combattre les discours de haine et la traite des êtres humains, interdire les expulsions collectives et les refoulements de tous les migrants, et garantir que le retour soit sûr, digne et que la réintégration soit durable », a conclu le bureau exécutif de l’ODT.

      Déclaration d’intention

      A rappeler que la ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a obtenu, lors de sa récente visite au Maroc, l’aval des autorités marocaines concernant le refoulement des migrants illégaux. Selon frankfurter allgemeine zeitung, le Royaume aurait consenti à reprendre les ressortissants marocains ayant fait l’objet de décisions d’expulsion. Il s’agit de près d’un millier de personnes qui ont déposé des demandes d’asile. La même source a révélé qu’au cours de l’année dernière, environ un millier de Marocains ont demandé l’asile en Allemagne, en ajoutant que le taux de reconnaissance reste faible.

      Lors de cette visite, il y a eu la signature d’une déclaration d’intention commune entre les ministères de l’Intérieur des deux pays visant à renforcer la coopération dans les domaines de la sécurité, de la migration, de la protection civile et de la lutte contre les différentes formes de crime transfrontalier, sur la base de l’égalité, du traitement d’égal à égal, de l’intérêt commun et de l’estime mutuelle. La ministre allemande n’a pas caché la volonté de son gouvernement de signer un accord migratoire bilatéral plus large.

      https://www.libe.ma/Quelque-900-migrants-irreguliers-marocains-s-appreteraient-a-regagner-le-pays_a
      #Allemagne #retour_volontaire_assisté

  • Au #Darfour, la terreur à huis clos : « Ils veulent nous rayer de la carte »

    Depuis le 15 avril et le début de la #guerre au #Soudan, plus de 420 000 personnes se sont réfugiées dans l’est du #Tchad. Principalement issues des communautés non arabes du Darfour, elles témoignent d’attaques délibérées contre les civils, de multiples #crimes_de_guerre, et dénoncent un #nettoyage_ethnique.

    Un mélange de boue et de sang. Des corps emportés par le courant. Des cris de détresse et le sifflement des balles transperçant l’eau marronasse. C’est la dernière image qui hante Abdelmoneim Adam. Le soleil se levait à l’aube du 15 juin sur l’oued Kaja – la rivière saisonnière gonflée par les pluies qui traverse #El-Geneina, capitale du Darfour occidental – et des milliers de personnes tentaient de fuir la ville.

    Partout, des barrages de soldats leur coupaient la route. « Ils tiraient dans le tas, parfois à bout portant sur des enfants, des vieillards », se souvient Abdelmoneim, qui s’est jeté dans l’eau pour échapper à la mort. Des dizaines d’autres l’ont suivi. Une poignée d’entre eux seulement sont arrivés indemnes sur l’autre rive. Lui ne s’est plus jamais retourné.

    Ses sandales ont été emportées par les flots, l’obligeant à poursuivre sa route pieds nus, à la merci des épines. Attendant le crépuscule, il a coupé à travers champs, sous une pluie battante, évitant une dizaine de check-points tenus par les paramilitaires et slalomant entre les furgan, les campements militaires des miliciens arabes qui encerclaient El-Geneina. Il lui a fallu 13 heures pour parcourir la vingtaine de kilomètres qui le séparait du Tchad.

    Le Darfour s’est embrasé dans le sillage de la guerre amorcée le 15 avril à Khartoum entre l’armée régulière dirigée par le général Abdel Fattah al-Bourhane et les #Forces_paramilitaires_de_soutien_rapide (#FSR) du général Hemetti. Dans cette région à l’ouest du pays, meurtrie par les violences depuis 2003, le #conflit a pris une tournure ethnique, ravivant des cicatrices jamais refermées entre communautés.

    Dans la province du Darfour occidental qui borde le Tchad, l’armée régulière s’est retranchée dans ses quartiers généraux, délaissant le contrôle de la région aux FSR. Ces dernières ont assis leur domination en mobilisant derrière elles de nombreuses #milices issues des #tribus_arabes de la région.

    À El-Geneina, bastion historique des #Massalit, une communauté non arabe du Darfour à cheval entre le Soudan et le Tchad, environ 2 000 volontaires ont pris les armes pour défendre leur communauté. Ces groupes d’autodéfense, qui se battent aux côtés d’un ancien groupe rebelle sous les ordres du gouverneur Khamis Abakar, ont rapidement été dépassés en nombre et sont arrivés à court de munitions.

    Après avoir accusé à la télévision les FSR et leurs milices alliées de perpétrer un « génocide », le gouverneur massalit Khamis Abakar a été arrêté le 14 juin par des soldats du général Hemetti. Quelques heures plus tard, sa dépouille mutilée était exhibée sur les réseaux sociaux. Son assassinat a marqué un point de non-retour, le début d’une hémorragie.
    Démons à cheval

    En trois jours, les 15, 16 et 17 juin, El-Geneina a été le théâtre de massacres sanglants perpétrés à huis clos. La ville s’est vidée de plus de 70 % de ses habitant·es. Des colonnes de civils se pressaient à la frontière tchadienne, à pied, à dos d’âne, certains poussant des charrettes transportant des corps inertes. En 72 heures, plus de 850 blessés de guerre, la plupart par balles, ont déferlé sur le petit hôpital d’Adré. « Du jamais-vu », confie le médecin en chef du district. En six mois, plus de 420 000 personnes, principalement massalit, ont trouvé refuge au Tchad.

    Depuis le début du mois de septembre, les affrontements ont baissé en intensité mais quelques centaines de réfugié·es traversent encore chaque jour le poste-frontière, bringuebalé·es sur des charrettes tirées par des chevaux faméliques. Les familles, assises par grappes sur les carrioles, s’accrochent aux sangles qui retiennent les tas d’affaires qu’elles ont pu emporter : un peu de vaisselle, des sacs de jute remplis de quelques kilos d’oignons ou de patates, des bidons qui s’entrechoquent dans un écho régulier, des chaises en plastique qui s’amoncellent.

    Les regards disent les longues semaines à affronter des violences quotidiennes. « Les milices arabes faisaient paître leurs dromadaires sur nos terres. Nous n’avions plus rien à manger. Ils nous imposaient des taxes chaque semaine », témoigne Mariam Idriss, dont la ferme a été prise d’assaut. Son mari a été fauché par une balle. Dans l’immense campement qui entoure la bourgade tchadienne d’Adré, où que se tourne le regard, il y a peu d’hommes.

    « Les tribus arabes et les forces de Hemetti se déchaînent contre les Massalit et plus largement contre tous ceux qui ont la #peau_noire, ceux qu’ils appellent “#ambay”, les “esclaves” », dénonce Mohammed Idriss, un ancien bibliothécaire dont la librairie a été incendiée durant les attaques. Le vieil homme, collier de barbe blanche encadrant son visage, est allongé sur un lit en fer dans l’obscurité d’une salle de classe désaffectée. « On fait face à de vieux démons. Les événements d’El-Geneina sont la continuation d’une opération de nettoyage ethnique amorcée en 2003. Les #Janjawid veulent nous rayer de la carte », poursuit-il, le corps prostré mais la voix claquant comme un coup de tonnerre.

    Les « Janjawid », « les démons à cheval » en arabe. Ce nom, souvent prononcé avec effroi, désigne les milices essentiellement composées de combattants issus des tribus arabes nomades qui ont été instrumentalisées en 2003 par le régime d’Omar al-Bachir dans sa guerre contre des groupes rebelles du Darfour qui s’estimaient marginalisés par le pouvoir central. En 2013, ces milices sont devenues des unités officielles du régime, baptisées Forces de soutien rapide (FSR) et placées sous le commandement du général Mohammed Hamdan Dagalo, alias Hemetti.

    À la chute du dictateur Omar al-Bachir en avril 2019, Hemetti a connu une ascension fulgurante à la tête de l’État soudanais jusqu’à devenir vice-président du Conseil souverain. Partageant un temps le pouvoir avec le chef de l’armée régulière, le général Bourhane, il est désormais engagé dans une lutte à mort pour le pouvoir.
    Un baril de poudre prêt à exploser

    Assis sur des milliards de dollars amassés grâce à l’exploitation de multiples #mines d’#or, et grâce à la manne financière liée à l’envoi de troupes au Yémen pour y combattre comme mercenaires, Hemetti est parvenu en quelques années à faire des FSR une #milice_paramilitaire, bien équipée et entraînée, forte de plus de 100 000 combattants, capable de concurrencer l’armée régulière soudanaise. Ses troupes gardent la haute main sur le Darfour. Sa région natale, aux confins de la Libye, du Tchad et de la Centrafrique, est un carrefour stratégique pour les #ressources, l’or notamment, mais surtout, en temps de guerre, pour les #armes qui transitent par les frontières poreuses et pour le flux de combattants recrutés dans certaines tribus nomades du Sahel, jusqu’au Niger et au Mali.

    Depuis la chute d’Al-Bachir, les milices arabes du Darfour, galvanisées par l’ascension fulgurante de l’un des leurs à la tête du pouvoir, avaient poursuivi leurs raids meurtriers sur les villages et les camps de déplacé·es non arabes du Darfour, dans le but de pérenniser l’occupation de la terre. Avant même le début de la guerre, les communautés à l’ouest du Darfour étaient à couteaux tirés.

    La ville d’El-Geneina était segmentée entre quartiers arabes et non arabes. Les kalachnikovs se refourguaient pour quelques liasses de billets derrière les étalages du souk. La ville était peuplée d’un demi-million d’habitant·es à la suite des exodes successifs des dizaines de milliers de déplacé·es, principalement des Massalit. El-Geneina était devenue un baril de poudre prêt à exploser. L’étincelle est venue de loin, le 15 avril, à Khartoum, servant de prétexte au déchaînement de violence à plus de mille kilomètres à l’ouest.

    Mediapart a rencontré une trentaine de témoins ayant fui les violences à l’ouest du Darfour. Parmi eux, des médecins, des commerçants, des activistes, des agriculteurs, des avocats, des chefs traditionnels, des fonctionnaires, des travailleurs sociaux. Au moment d’évoquer « al-ahdath », « les événements » en arabe, les rescapés marquent un temps de silence. Souvent, les yeux s’embuent, les mains s’entortillent et les premiers mots sont bredouillés, presque chuchotés.

    « Madares, El-Ghaba, Thaoura, Jamarek, Imtidad, Zuhur, Tadamon » : Taha Abdallah énumère les quartiers d’El-Geneina anciennement peuplés de Massalit qui ont aujourd’hui été vidés de leurs habitant·es. Les maisons historiques, le musée, l’administration du registre civil, les archives, les camps de déplacé·es ont été détruits. « Il n’y a plus de trace, ils ont tout effacé. Tout a été nettoyé et les débris ramassés avec des pelleteuses », déplore le membre de l’association Juzur, une organisation qui enquêtait sur les crimes commis à l’ouest du Darfour.

    Sur son téléphone, l’un de ses camarades, Arbab Ali, regarde des selfies pris avec ses amis. Sur chaque photo, l’un d’entre eux manque à l’appel. « Ils ne sont jamais arrivés ici. » Sur l’écran, son doigt fait défiler des images de mortiers, de débris de missiles antiaériens tirés à l’horizontale vers des quartiers résidentiels. « J’ai retrouvé la dépouille d’un garçon de 20 ans, le corps presque coupé en deux », s’étouffe le jeune homme assis à l’ombre d’un rakuba, un préau de paille.

    Ce petit groupe de militants des droits humains dénonce une opération d’élimination systématique ciblant les élites intellectuelles et politiques de la communauté massalit, médecins, avocats, professeurs, ingénieurs ou activistes. À chaque check-point, les soldats des FSR ou des miliciens sortaient leur téléphone et faisaient défiler le nom et les photos des personnes recherchées. « S’ils trouvent ton nom sur la liste, c’est fini pour toi. »

    L’avocat Jamal Abdallah Khamis, également membre de l’association Juzur, tient quant à lui une autre liste. Sur des feuilles volantes, il a soigneusement recopié les milliers de noms des personnes blessées, mortes ou disparues au cours des événements à El-Geneina. Parmi ces noms, se trouve notamment celui de son mentor, l’avocat Khamis Arbab, qui avait constitué un dossier documentant les attaques répétées des milices arabes sur un camp de déplacé·es bordant la ville. Il a été enlevé à son domicile, torturé, puis son corps a été jeté. Les yeux lui avaient été arrachés.

    « Tous ceux qui tentaient de faire s’élever les consciences, qui prêchaient pour un changement démocratique et une coexistence pacifique entre tribus, étaient dans le viseur », résume Jamal Abdallah Khamis. Les femmes n’ont pas échappé à la règle. Zahra Adam était engagée depuis une quinzaine d’années dans une association de lutte contre les violences faites aux femmes. Son nom apparaissait sur les listes des miliciens. Elle était recherchée pour son travail de documentation des viols commis dans la région. Rien qu’entre le 24 avril et le 20 mai, elle a recensé 60 cas de viols à El-Geneina. « Ensuite, on a dû arrêter de compter. L’avocat chargé du dossier a été éliminé. Au total, il y a des centaines de victimes, ici, dans le camp. Mais la plupart se terrent dans le silence », relate-t-elle.

    De nombreuses militantes ont été ciblées. Rabab*, une étudiante de 23 ans engagée dans un comité de quartier, avait été invitée sur le plateau d’une radio locale quelques jours avant le début de la guerre. Sur les ondes, elle avait alerté sur le risque imminent de confrontations entre communautés. Début juin, elle a été enlevée dans le dortoir de l’université par des soldats enturbannés, puis embarquée de force, les yeux bandés, vers un compound où une soixantaine de filles étaient retenues captives. « Ils disaient : “Vous ne reverrez jamais vos familles.” Ils vendaient des filles à d’autres miliciens, parfois se les échangeaient contre un tuk-tuk », témoigne-t-elle d’une voix éteinte, drapée d’un niqab noir, de larges cernes soulignant ses yeux.

    Depuis 2003, au Darfour, le corps des femmes est devenu un des champs de bataille. « Le viol est un outil du nettoyage ethnique. Ils violent pour humilier, pour marquer dans la chair leur domination. Ils sont fiers de violer une communauté qu’ils considèrent comme inférieure », poursuit Zahra, ajoutant que même des fillettes ont été violées au canon de kalachnikov.

    Selon plusieurs témoins rencontrés par Mediapart, dans les jours qui ont suivi les massacres de la mi-juin, plusieurs chefs de milices arabes, en coordination avec les Forces de soutien rapide, ont entrepris de dissimuler les traces du carnage. Les équipes du Croissant-Rouge soudanais ont été chargées par un « comité sanitaire » de ramasser les corps qui jonchaient les avenues.

    « L’odeur était pestilentielle. Les cadavres pourrissaient au soleil, parfois déchiquetés par les chiens », souffle Mohammed*, le regard vide. « Chaque jour, on remplissait la benne d’un camion à ras bord. Elle pouvait contenir plus d’une cinquantaine de corps et les camions faisaient plusieurs allers-retours », détaille Ahmed*, un autre témoin forcé de jouer les fossoyeurs pendant dix jours, « de 8 à 14 heures ». Les équipes avaient interdiction de prendre des photos et de décompter le nombre de morts. Il leur était impossible de savoir où les camions se rendaient.
    Une enquête de la Cour pénale internationale

    Échappant aux regards des soldats, l’étudiant de 28 ans s’est glissé entre la cabine et la benne de l’un des camions. Le chauffeur a pris la direction d’un site appelé Turab El-Ahmar, à l’ouest de la ville. « Les trous étaient déjà creusés. À plusieurs reprises, un camion arrivait, levait la benne et déversait les corps », se souvient-il. Puis une pelleteuse venait reboucher la fosse.

    Quartier par quartier, maison par maison, ils ont ratissé la ville d’El-Geneina. « En tout, il y a eu au moins 4 000 corps enterrés », estime Mohammed. Début septembre, le Commissariat des Nations unies pour les droits de l’homme a annoncé avoir reçu des informations crédibles sur l’existence de treize fosses communes.

    Les paramilitaires nient toute responsabilité dans ce qu’ils dépeignent comme un conflit ethnique entre communautés de l’ouest du Darfour. Malgré les demandes de Mediapart, la zone reste inaccessible pour les journalistes.

    « Entre le discours des FSR et celui des victimes, la justice tranchera », conteste Arbab Ali avec une once d’optimisme. Le 13 juillet, la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé l’ouverture d’une nouvelle enquête pour « crimes de guerre » au Darfour. Elle vient s’ajouter aux investigations démarrées en 2005 à la suite de la guerre qui, sous le régime d’Omar al-Bachir, avait déjà fait plus de 300 000 morts dans la région.

    Pourtant, il règne chez les rescapé·es du Darfour un sentiment de déjà-vu. À ceci près que la guerre actuelle ne soulève pas la même indignation internationale qu’en 2003. Beaucoup de réfugié·es n’attendent plus rien de la justice internationale. Vingt ans après les premières enquêtes de la CPI, aucune condamnation n’a encore été prononcée.

    Alors, dans les travées du camp, le choc du déplacement forcé laisse place à une volonté de revanche. Certains leaders massalit ont pris langue avec l’armée régulière. Une contre-offensive se prépare. Le camp bruisse de rumeurs sur des mouvements de troupes et des livraisons d’armes au Darfour. Côté tchadien, les humanitaires et les autorités s’attendent à ce que la situation dégénère à nouveau.

    Au Soudan, le conflit ne se résume plus seulement en un affrontement entre deux armées. Aujourd’hui, chaque clan et chaque tribu joue sa survie au milieu de la désintégration de l’État. Les voix dissidentes, opposées à une guerre absurde, sont criminalisées par les belligérants et souvent emprisonnées. La guerre est partie pour durer. Et les civils, prisonniers d’un engrenage meurtrier, en payent le prix.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/131123/au-darfour-la-terreur-huis-clos-ils-veulent-nous-rayer-de-la-carte
    #réfugiés_soudanais #génocide

  • Les pratiques de la France à la frontière franco-italienne jugées non conformes par Luxembourg

    Pour télécharger le communiqué : https://www.ldh-france.org/wp-content/uploads/2023/11/CP-interasso-Les-pratiques-de-la-France-a-la-frontiere-franco-italienne-

    Alors que le gouvernement soumet au Sénat son projet de loi sur l’asile et l’immigration, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de Luxembourg vient de rendre un arrêt, en réponse à une question préjudicielle du Conseil d’Etat, qui oblige la France à mettre ses pratiques aux frontières et notamment à la frontière franco-italienne en conformité avec le droit de l’Union européenne.

    Depuis 2015, la France a rétabli les contrôles à ses frontières intérieures, par dérogation au principe de libre circulation dans l’espace Schengen. Et depuis cette date, elle enferme dans des bâtiments de fortune et refoule des personnes étrangères à qui elle refuse l’entrée sur le territoire, notamment à la frontière franco-italienne, comme c’est le cas, en ce moment même, à Menton ou à Montgenèvre. En prévision de l’augmentation des arrivées en provenance d’Italie à la mi septembre, les dispositifs de surveillance ont été renforcés et les baraquements dits de « mise à l’abri » se sont multipliés. Pour enfermer et expulser en toute illégalité, car les constats sur le terrain démontrent que ces contrôles débouchent sur de l’enfermement et des refoulements de personnes en dehors d’un cadre juridique défini.

    À de multiples reprises, depuis plusieurs années, nos associations ont protesté contre cette situation et ont saisi, en vain, les tribunaux français pour obtenir qu’il soit mis fin à ces pratiques en conséquence desquelles, au fil des années, des milliers de personnes ont été privées de liberté et expulsées, sans pouvoir accéder à leurs droits fondamentaux (accès à une procédure, accès au droit d’asile, recours effectif). Nos associations ayant contesté la conformité au droit européen de la disposition du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda) qui permet à l’administration de prononcer des « refus d’entrée » aux frontières intérieures sans respecter les normes prévues par la directive européenne 2008/115/CE, dite directive « Retour », le Conseil d’État a saisi la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’une question préjudicielle sur ce point.

    Dans sa décision du 21 septembre 2023, la CJUE a répondu à cette question en retenant le raisonnement juridique défendu par nos organisations. Elle estime que lorsqu’un État membre a réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures, les « normes et procédures prévues par cette directive » sont applicables aux personnes qui, se présentant à un point de passage frontalier situé sur son territoire, se voient opposer un refus d’entrer.

    Par cette décision, la CJUE rappelle à tous les Etats membres de l’UE leurs obligations lorsqu’ils rétablissent des contrôles à leurs frontières intérieures :
    – notifier à la personne à qui elle refuse l’entrée une décision de retour vers un pays tiers ainsi qu’une voie de recours effective (autrement dit on ne peut pas se contenter de refouler en la remettant aux autorités de l’État membre de provenance) ;
    – lui accorder un délai de départ volontaire (vers le pays tiers désigné dans la notification) ;
    – n’imposer une privation de liberté à cette personne, dans l’attente de son éloignement, que dans les cas et conditions de la rétention prévus par la directive « Retour ».

    Depuis fin septembre, nos associations organisent de manière régulière des observations des pratiques des forces de l’ordre à la gare de Menton Garavan et aux postes de la police aux frontières de Montgenèvre (Hautes-Alpes) et de Menton pont Saint-Louis (Alpes-Maritimes). Force est de constater que les pratiques à la frontière intérieure n’ont pas évolué. Les contrôles au faciès aux points de passage autorisés (PPA), ainsi que dans d’autres zones frontalières, sont quotidiens, les procédures de « refus d’entrée » sont toujours réalisées à la va-vite, sur le quai de la gare, devant le poste de police ou parfois à l’intérieur de celui-ci, sans interprète et sans examen individuel de la situation des personnes. Des majeurs comme des mineurs sont refoulés, des personnes à qui l’entrée sur le territoire est refusée sont privées de liberté, sans pouvoir demander l’asile ou contester la mesure d’enfermement à laquelle elles sont soumises, et sans accès à un avocat à ou une association.

    Interrogée par des élus qui, pour certains, se sont vu opposer des refus d’accès au locaux dits « de mise à l’abri », la police aux frontières a précisé qu’aucune directive ne lui avait été transmise depuis la décision de la CJUE.

    Parce que la France persiste dans son refus de se conformer au droit de l’UE, les pratiques illégales perdurent et des dizaines de personnes continuent, quotidiennement, à être victimes de la violation de leurs droits fondamentaux.

    Il revient désormais au Conseil d’État de tirer les enseignements de la décision de la CJUE et de mettre fin aux pratiques d’enfermement et de refoulement aux frontières, hors du cadre juridique approprié, notamment à la frontière franco-italienne.

    Organisations signataires : ADDE ; Anafé (Association nationale d’assistance pour les personnes étrangères) ; Emmaüs Roya ; Gisti ; Groupe accueil solidarité ; La Cimade ; LDH (Ligue des droits de l’Homme) ; Roya Citoyenne ; Syndicat de la Magistrature ; Syndicat des avocats de France ; Tous migrant.

    Paris, le 13 novembre 2023

    https://www.ldh-france.org/les-pratiques-de-la-france-a-la-frontiere-franco-italienne-jugees-non-co
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    • ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

      21 septembre 2023 (*)

      « Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Contrôle aux frontières, asile et immigration – Règlement (UE) 2016/399 – Article 32 – Réintroduction temporaire par un État membre du contrôle à ses frontières intérieures – Article 14 – Décision de refus d’entrée – Assimilation des frontières intérieures aux frontières extérieures – Directive 2008/115/CE – Champ d’application – Article 2, paragraphe 2, sous a) »

      Dans l’affaire C‑143/22,

      ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Conseil d’État (France), par décision du 24 février 2022, parvenue à la Cour le 1er mars 2022, dans la procédure

      Association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE),

      Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE),

      Association de recherche, de communication et d’action pour l’accès aux traitements (ARCAT),

      Comité inter-mouvements auprès des évacués (Cimade),

      Fédération des associations de solidarité avec tou.te.s les immigré.e.s (FASTI),

      Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI),

      Ligue des droits de l’homme (LDH),

      Le paria,

      Syndicat des avocats de France (SAF),

      SOS – Hépatites Fédération

      contre

      Ministre de l’Intérieur,

      en présence de :

      Défenseur des droits,

      LA COUR (quatrième chambre),

      composée de M. C. Lycourgos (rapporteur), président de chambre, Mme L. S. Rossi, MM. J.‑C. Bonichot, S. Rodin et Mme O. Spineanu‑Matei, juges,

      avocat général : M. A. Rantos,

      greffier : Mme M. Krausenböck, administratrice,

      vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 janvier 2023,

      considérant les observations présentées :

      – pour l’Association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), l’Association de recherche, de communication et d’action pour l’accès aux traitements (ARCAT), le Comité inter-mouvements auprès des évacués (Cimade), la Fédération des associations de solidarité avec tou.te.s les immigré.e.s (FASTI), le Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), la Ligue des droits de l’homme (LDH), Le paria, le Syndicat des avocats de France (SAF) et SOS – Hépatites Fédération, par Me P. Spinosi, avocat,

      – pour le Défenseur des droits, par Mme C. Hédon, Défenseure des droits, Mmes M. Cauvin et A. Guitton, conseillères, assistées de Me I. Zribi, avocate,

      – pour le gouvernement français, par Mme A.-L. Desjonquères et M. J. Illouz, en qualité d’agents,

      – pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, Mmes E. Borawska-Kędzierska et A. Siwek-Ślusarek, en qualité d’agents,

      – pour la Commission européenne, par Mmes A. Azéma, A. Katsimerou, MM. T. Lilamand et J. Tomkin, en qualité d’agents,

      ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 30 mars 2023,

      rend le présent

      Arrêt

      1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 14 du règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO 2016, L 77, p. 1, ci-après le « code frontières Schengen »), ainsi que de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98).

      2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE), l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE), l’Association de recherche, de communication et d’action pour l’accès aux traitements (ARCAT), le Comité inter-mouvements auprès des évacués (Cimade), la Fédération des associations de solidarité avec tou.te.s les immigré.e.s (FASTI), le Groupe d’information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), la Ligue des droits de l’homme (LDH), Le paria, le Syndicat des avocats de France (SAF) et SOS – Hépatites Fédération, au ministre de l’Intérieur (France) au sujet de la légalité de l’ordonnance no 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (JORF du 30 décembre 2020, texte no 41).

      Le cadre juridique

      Le droit de l’Union

      Le code frontières Schengen

      3 Aux termes de l’article 2 du code frontières Schengen :

      « Aux fins du présent règlement, on entend par :

      1) “frontières intérieures” :

      a) les frontières terrestres communes, y compris fluviales et lacustres, des États membres ;

      b) les aéroports des États membres pour les vols intérieurs ;

      c) les ports maritimes, fluviaux et lacustres des États membres pour les liaisons régulières intérieures par transbordeur ;

      2) “frontières extérieures” : les frontières terrestres des États membres, y compris les frontières fluviales et lacustres, les frontières maritimes, ainsi que leurs aéroports, ports fluviaux, ports maritimes et ports lacustres, pour autant qu’ils ne soient pas des frontières intérieures ;

      [...] »

      4 Le titre II de ce code, relatif aux « frontières extérieures », comprend les articles 5 à 21 de celui-ci.

      5 L’article 14 dudit code, intitulé « Refus d’entrée », prévoit :

      « 1. L’entrée sur le territoire des États membres est refusée au ressortissant de pays tiers qui ne remplit pas l’ensemble des conditions d’entrée énoncées à l’article 6, paragraphe 1, et qui n’appartient pas à l’une des catégories de personnes visées à l’article 6, paragraphe 5. Cette disposition est sans préjudice de l’application des dispositions particulières relatives au droit d’asile et à la protection internationale ou à la délivrance de visas de long séjour.

      2. L’entrée ne peut être refusée qu’au moyen d’une décision motivée indiquant les raisons précises du refus. La décision est prise par une autorité compétente habilitée à ce titre par le droit national. Elle prend effet immédiatement.

      La décision motivée indiquant les raisons précises du refus est notifiée au moyen d’un formulaire uniforme tel que celui figurant à l’annexe V, partie B, et rempli par l’autorité compétente habilitée par le droit national à refuser l’entrée. Le formulaire uniforme ainsi complété est remis au ressortissant de pays tiers concerné, qui accuse réception de la décision de refus au moyen dudit formulaire.

      Les données relatives aux ressortissants de pays tiers auxquels l’entrée pour un court séjour a été refusée sont enregistrées dans l’EES conformément à l’article 6 bis, paragraphe 2, du présent règlement et à l’article 18 du règlement (UE) 2017/2226 [du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2017 portant création d’un système d’entrée/de sortie (EES) pour enregistrer les données relatives aux entrées, aux sorties et aux refus d’entrée concernant les ressortissants de pays tiers qui franchissent les frontières extérieures des États membres et portant détermination des conditions d’accès à l’EES à des fins répressives, et modifiant la convention d’application de l’accord de Schengen et les règlements (CE) no 767/2008 et (UE) no 1077/2011 (JO 2017, L 327, p. 20)].

      3. Les personnes ayant fait l’objet d’une décision de refus d’entrée ont le droit de former un recours contre cette décision. Les recours sont formés conformément au droit national. Des indications écrites sont également mises à la disposition du ressortissant de pays tiers en ce qui concerne des points de contact en mesure de communiquer des informations sur des représentants compétents pour agir au nom du ressortissant de pays tiers conformément au droit national.

      L’introduction d’un tel recours n’a pas d’effet suspensif à l’égard de la décision de refus d’entrée.

      Sans préjudice de toute éventuelle compensation accordée conformément au droit national, le ressortissant de pays tiers concerné a le droit à la rectification des données introduites dans l’ESS ou du cachet d’entrée annulé, ou les deux, ainsi qu’à la rectification de toute autre annulation ou ajout qui ont été apportés, de la part de l’État membre qui a refusé l’entrée, si, dans le cadre du recours, la décision de refus d’entrée est déclarée non fondée.

      4. Les gardes-frontières veillent à ce qu’un ressortissant de pays tiers ayant fait l’objet d’une décision de refus d’entrée ne pénètre pas sur le territoire de l’État membre concerné.

      5. Les États membres établissent un relevé statistique sur le nombre de personnes ayant fait l’objet d’une décision de refus d’entrée, les motifs du refus, la nationalité des personnes auxquelles l’entrée a été refusée et le type de frontière (terrestre, aérienne, maritime) auquel l’entrée leur a été refusée, et le transmettent chaque année à la Commission (Eurostat) conformément au règlement (CE) no 862/2007 du Parlement européen et du Conseil[, du 11 juillet 2007, relatif aux statistiques communautaires sur la migration et la protection internationale, et abrogeant le règlement (CEE) no 311/76 du Conseil relatif à l’établissement de statistiques concernant les travailleurs étrangers (JO 2007, L 199, p. 23)].

      6. Les modalités du refus d’entrée sont décrites à l’annexe V, partie A. »

      6 Le titre III du code frontières Schengen, relatif aux « frontières intérieures », comprend les articles 22 à 35 de celui-ci.

      7 L’article 25 dudit code, intitulé « Cadre général pour la réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures », dispose, à son paragraphe 1 :

      « En cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure d’un État membre dans l’espace sans contrôle aux frontières intérieures, cet État membre peut exceptionnellement réintroduire le contrôle aux frontières sur tous les tronçons ou sur certains tronçons spécifiques de ses frontières intérieures pendant une période limitée d’une durée maximale de trente jours ou pour la durée prévisible de la menace grave si elle est supérieure à trente jours. La portée et la durée de la réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures ne doivent pas excéder ce qui est strictement nécessaire pour répondre à la menace grave. »

      8 L’article 32 du même code, intitulé « Dispositions s’appliquant en cas de réintroduction du contrôle aux frontières intérieures », énonce :

      « Lorsque le contrôle aux frontières intérieures est réintroduit, les dispositions pertinentes du titre II s’appliquent mutatis mutandis. »

      9 L’annexe V, partie A, du code frontières Schengen prévoit :

      « 1. En cas de refus d’entrée, le garde-frontière compétent :

      a) remplit le formulaire uniforme de refus d’entrée figurant dans la partie B. Le ressortissant de pays tiers concerné signe le formulaire et en reçoit une copie après signature. Si le ressortissant de pays tiers refuse de signer, le garde-frontière indique ce refus dans le formulaire, sous la rubrique “observations” ;

      b) en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers dont l’entrée pour un court séjour a été refusée, enregistre dans l’EES les données relatives au refus d’entrée conformément à l’article 6 bis, paragraphe 2, du présent règlement et à l’article 18 du règlement (UE) 2017/2226 ;

      c) procède à l’annulation ou à la révocation du visa, le cas échéant, conformément aux conditions fixées à l’article 34 du règlement (CE) no 810/2009 [du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, établissant un code communautaire des visas (code des visas) (JO 2009, L 243, p. 1)] ;

      d) en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers dont le refus d’entrée n’est pas enregistré dans l’EES, appose sur le passeport un cachet d’entrée, barré d’une croix à l’encre noire indélébile, et inscrit en regard, à droite, également à l’encre indélébile, la ou les lettres correspondant au(x) motif(s) du refus d’entrée, dont la liste figure dans le formulaire uniforme de refus d’entrée comme indiqué dans la partie B de la présente annexe. En outre, pour ces catégories de personnes, le garde-frontière enregistre tout refus d’entrée dans un registre ou sur une liste, qui mentionne l’identité et la nationalité du ressortissant de pays tiers concerné, les références du document autorisant le franchissement de la frontière par ce ressortissant du pays tiers, ainsi que le motif et la date de refus d’entrée.

      Les modalités pratiques de l’apposition du cachet sont décrites à l’annexe IV.

      2. Si le ressortissant de pays tiers frappé d’une décision de refus d’entrée a été acheminé à la frontière par un transporteur, l’autorité localement responsable :

      a) ordonne à ce transporteur de reprendre en charge le ressortissant de pays tiers sans tarder et de l’acheminer soit vers le pays tiers d’où il a été transporté, soit vers le pays tiers qui a délivré le document permettant le franchissement de la frontière, soit vers tout autre pays tiers dans lequel son admission est garantie, ou de trouver un moyen de réacheminement conformément à l’article 26 de la convention de Schengen et aux dispositions de la directive 2001/51/CE du Conseil[, du 28 juin 2001, visant à compléter les dispositions de l’article 26 de la convention d’application de l’accord de Schengen du 14 juin 1985 (JO 2001, L 187, p. 45)] ;

      b) en attendant le réacheminement, prend, dans le respect du droit national et compte tenu des circonstances locales, les mesures appropriées afin d’éviter l’entrée illégale des ressortissants de pays tiers frappés d’une décision de refus d’entrée.

      [...] »

      10 Aux termes de l’article 44 de ce code, intitulé « Abrogation » :

      « Le règlement (CE) no 562/2006 [du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) (JO 2006, L 105, p. 1)] est abrogé.

      Les références faites au règlement abrogé s’entendent comme faites au présent règlement et sont à lire selon le tableau de correspondance figurant à l’annexe X. »

      11 Conformément à ce tableau de correspondance, l’article 14 du code frontières Schengen correspond à l’article 13 du règlement no 562/2006.

      La directive 2008/115

      12 L’article 2, paragraphes 1 et 2, de la directive 2008/115 dispose :

      « 1. La présente directive s’applique aux ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre.

      2. Les États membres peuvent décider de ne pas appliquer la présente directive aux ressortissants de pays tiers :

      a) faisant l’objet d’une décision de refus d’entrée conformément à l’article 13 du [règlement no 562/2006], ou arrêtés ou interceptés par les autorités compétentes à l’occasion du franchissement irrégulier par voie terrestre, maritime ou aérienne de la frontière extérieure d’un État membre et qui n’ont pas obtenu par la suite l’autorisation ou le droit de séjourner dans ledit État membre ;

      b) faisant l’objet d’une sanction pénale prévoyant ou ayant pour conséquence leur retour, conformément au droit national, ou faisant l’objet de procédures d’extradition. »

      13 Aux termes de l’article 3 de cette directive :

      « Aux fins de la présente directive, on entend par :

      [...]

      2) “séjour irrégulier” : la présence sur le territoire d’un État membre d’un ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas, ou ne remplit plus, les conditions d’entrée énoncées à l’article 5 du [règlement no 562/2006], ou d’autres conditions d’entrée, de séjour ou de résidence dans cet État membre ;

      3) “retour” : le fait, pour le ressortissant d’un pays tiers, de rentrer – que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé – dans :

      – son pays d’origine, ou

      – un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou

      – un autre pays tiers dans lequel le ressortissant concerné d’un pays tiers décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis ;

      [...] »

      14 L’article 4, paragraphe 4, de ladite directive prévoit :

      « En ce qui concerne les ressortissants de pays tiers exclus du champ d’application de la présente directive conformément à l’article 2, paragraphe 2, point a), les États membres :

      a) veillent à ce que le traitement et le niveau de protection qui leur sont accordés ne soient pas moins favorables que ceux prévus à l’article 8, paragraphes 4 et 5 (limitations du recours aux mesures coercitives), à l’article 9, paragraphe 2, point a) (report de l’éloignement), à l’article 14, paragraphe 1, points b) et d) (soins médicaux d’urgence et prise en considération des besoins des personnes vulnérables), ainsi qu’aux articles 16 et 17 (conditions de rétention), et

      b) respectent le principe de non-refoulement. »

      15 L’article 5 de la directive 2008/115 dispose :

      « Lorsqu’ils mettent en œuvre la présente directive, les États membres tiennent dûment compte :

      a) de l’intérêt supérieur de l’enfant,

      b) de la vie familiale,

      c) de l’état de santé du ressortissant concerné d’un pays tiers,

      et respectent le principe de non-refoulement. »

      16 L’article 6 de cette directive dispose :

      « 1. Les État membres prennent une décision de retour à l’encontre de tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5.

      2. Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre et titulaires d’un titre de séjour valable ou d’une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. En cas de non-respect de cette obligation par le ressortissant concerné d’un pays tiers ou lorsque le départ immédiat du ressortissant d’un pays tiers est requis pour des motifs relevant de l’ordre public ou de la sécurité nationale, le paragraphe 1 s’applique.

      3. Les État membres peuvent s’abstenir de prendre une décision de retour à l’encontre d’un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire si le ressortissant concerné d’un pays tiers est repris par un autre État membre en vertu d’accords ou d’arrangements bilatéraux existant à la date d’entrée en vigueur de la présente directive. Dans ce cas, l’État membre qui a repris le ressortissant concerné d’un pays tiers applique le paragraphe 1.

      [...] »

      17 L’article 7, paragraphe 1, premier alinéa, de ladite directive prévoit :

      « La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n’est accordé qu’à la suite d’une demande du ressortissant concerné d’un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. »

      18 L’article 15, paragraphe 1, de la même directive énonce :

      « À moins que d’autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l’éloignement, en particulier lorsque :

      a) il existe un risque de fuite, ou

      b) le ressortissant concerné d’un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d’éloignement.

      Toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. »

      Le droit français

      19 L’article L. 213-3-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, dans sa version issue de la loi no 2018-778, du 10 septembre 2018, pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie (JORF du 11 septembre 2018, texte no 1) (ci-après le « Ceseda ancien »), énonçait :

      « En cas de réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures prévue au chapitre II du titre III du [code frontières Schengen], les décisions mentionnées à l’article L. 213-2 peuvent être prises à l’égard de l’étranger qui, en provenance directe du territoire d’un État partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, a pénétré sur le territoire métropolitain en franchissant une frontière intérieure terrestre sans y être autorisé et a été contrôlé dans une zone comprise entre cette frontière et une ligne tracée à dix kilomètres en deçà. Les modalités de ces contrôles sont définies par décret en Conseil d’État. »

      20 L’ordonnance no 2020-1733 a procédé à la refonte de la partie législative du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. L’article L. 332-2 de ce code ainsi modifié (ci-après le « Ceseda modifié ») dispose :

      « La décision de refus d’entrée, qui est écrite et motivée, est prise par un agent relevant d’une catégorie fixée par voie réglementaire.

      La notification de la décision de refus d’entrée mentionne le droit de l’étranger d’avertir ou de faire avertir la personne chez laquelle il a indiqué qu’il devait se rendre, son consulat ou le conseil de son choix. Elle mentionne le droit de l’étranger de refuser d’être rapatrié avant l’expiration du délai d’un jour franc dans les conditions prévues à l’article L. 333-2.

      La décision et la notification des droits qui l’accompagne lui sont communiquées dans une langue qu’il comprend.

      Une attention particulière est accordée aux personnes vulnérables, notamment aux mineurs accompagnés ou non d’un adulte. »

      21 L’article L. 332-3 du Ceseda modifié prévoit :

      « La procédure prévue à l’article L. 332-2 est applicable à la décision de refus d’entrée prise à l’encontre de l’étranger en application de l’article 6 du [code frontières Schengen]. Elle est également applicable lors de vérifications effectuées à une frontière intérieure en cas de réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures dans les conditions prévues au chapitre II du titre III du [code frontières Schengen]. »

      Le litige au principal et la question préjudicielle

      22 Les associations visées au point 2 du présent arrêt contestent devant le Conseil d’État (France), dans le cadre d’un recours en annulation de l’ordonnance no 2020‑1733, la validité de celle-ci au motif, notamment, que l’article L. 332-3 du Ceseda modifié qui en est issu méconnaît la directive 2008/115 en ce qu’il permet l’adoption de décisions de refus d’entrée aux frontières intérieures sur lesquelles des contrôles ont été réintroduits.

      23 Cette juridiction explique, en effet, que, dans son arrêt du 19 mars 2019, Arib e.a. (C‑444/17, EU:C:2019:220), la Cour a jugé que l’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/115, lu en combinaison avec l’article 32 du code frontières Schengen, ne s’applique pas à la situation d’un ressortissant d’un pays tiers arrêté à proximité immédiate d’une frontière intérieure et en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre, même lorsque cet État membre a réintroduit, en vertu de l’article 25 de ce code, le contrôle à cette frontière en raison d’une menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure dudit État membre.

      24 Le Conseil d’État souligne que, dans sa décision no 428175 du 27 novembre 2020, il a jugé contraires à la directive 2008/115, telle qu’interprétée par la Cour, les dispositions de l’article L. 213-3-1 du Ceseda ancien, qui prévoyaient que, en cas de réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures, l’étranger en provenance directe du territoire d’un État partie à la convention d’application de l’accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l’Union économique Benelux, de la République fédérale d’Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990 et entrée en vigueur le 26 mars 1995 (JO 2000, L 239, p. 19, ci-après la « convention de Schengen »), pouvait faire l’objet d’une décision de refus d’entrée dans les conditions de l’article L. 213-2 du Ceseda ancien lorsqu’il avait pénétré sur le territoire métropolitain en franchissant une frontière intérieure terrestre sans y être autorisé et avait été contrôlé dans une zone comprise entre cette frontière et une ligne tracée à dix kilomètres en deçà.

      25 Certes, selon le Conseil d’État, l’article L. 332-3 du Ceseda modifié ne reprend pas les dispositions de l’article L. 213-3-1 du Ceseda ancien. Toutefois, l’article L. 332-3 du Ceseda modifié prévoirait encore qu’une décision de refus d’entrée peut être prise à l’occasion de vérifications effectuées aux frontières intérieures, en cas de réintroduction temporaire du contrôle à ces frontières, dans les conditions prévues au chapitre II du titre III du code frontières Schengen.

      26 Cette juridiction estime, dès lors, qu’il convient de déterminer si, dans un tel cas, le ressortissant d’un pays tiers, en provenance directe du territoire d’un État partie à la convention de Schengen et qui se présente à un point de passage frontalier autorisé sans être en possession des documents permettant de justifier d’une autorisation d’entrée ou du droit de séjourner en France peut se voir opposer une décision de refus d’entrée, sur le fondement de l’article 14 du code frontières Schengen, sans que soit applicable la directive 2008/115.

      27 Dans ces conditions, le Conseil d’État a décidé de surseoir à statuer et de poser la question préjudicielle suivante :

      « En cas de réintroduction temporaire du contrôle aux frontières intérieures, dans les conditions prévues au chapitre II du titre III du [code frontières Schengen], l’étranger en provenance directe du territoire d’un État partie à la [convention de Schengen] peut-il se voir opposer une décision de refus d’entrée, lors des vérifications effectuées à cette frontière, sur le fondement de l’article 14 de ce [code], sans que soit applicable la directive [2008/115] ? »

      Sur la question préjudicielle

      28 Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi demande en substance si le code frontières Schengen et la directive 2008/115 doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un État membre a réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures, il peut adopter, à l’égard d’un ressortissant d’un pays tiers qui se présente à un point de passage frontalier autorisé où s’exercent de tels contrôles, une décision de refus d’entrée, au sens de l’article 14 de ce code, sans être soumis au respect de cette directive.

      29 L’article 25 du code frontières Schengen autorise, à titre exceptionnel et dans certaines conditions, un État membre à réintroduire temporairement un contrôle aux frontières sur tous les tronçons ou certains tronçons spécifiques de ses frontières intérieures en cas de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure de cet État membre. Selon l’article 32 de ce code, lorsqu’un contrôle aux frontières intérieures est réintroduit, les dispositions pertinentes du titre II dudit code, titre qui porte sur les frontières extérieures, s’appliquent mutatis mutandis.

      30 Tel est le cas de l’article 14 du code frontières Schengen, qui prévoit que l’entrée sur le territoire des États membres est refusée au ressortissant d’un pays tiers qui ne remplit pas l’ensemble des conditions d’entrée énoncées à l’article 6, paragraphe 1, de ce code et qui n’appartient pas à l’une des catégories de personnes visées à l’article 6, paragraphe 5, du même code.

      31 Il importe toutefois de rappeler qu’un ressortissant d’un pays tiers qui, à la suite de son entrée irrégulière sur le territoire d’un État membre, est présent sur ce territoire sans remplir les conditions d’entrée, de séjour ou de résidence, se trouve, de ce fait, en séjour irrégulier, au sens de la directive 2008/115. Ce ressortissant relève, donc, conformément à l’article 2, paragraphe 1, de cette directive et sous réserve de l’article 2, paragraphe 2, de celle-ci, du champ d’application de ladite directive, sans que cette présence sur le territoire de l’État membre concerné soit soumise à une condition de durée minimale ou d’intention de rester sur ce territoire. Il doit donc, en principe, être soumis aux normes et aux procédures communes prévues par la même directive en vue de son éloignement et cela tant que son séjour n’a pas été, le cas échéant, régularisé (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2019, Arib e.a., C‑444/17, EU:C:2019:220, points 37 et 39 ainsi que jurisprudence citée).

      32 Il en va ainsi y compris lorsque ce ressortissant d’un pays tiers a été appréhendé à un point de passage frontalier, pour autant que ce point de passage frontalier se situe sur le territoire dudit État membre. À cet égard, il convient, en effet, de relever qu’une personne peut être entrée sur le territoire d’un État membre avant même d’avoir franchi un point de passage frontalier [voir, par analogie, arrêt du 5 février 2020, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Enrôlement des marins dans le port de Rotterdam), C‑341/18, EU:C:2020:76, point 45].

      33 Il convient encore de préciser, à titre d’exemple, que, lorsqu’il est procédé à des vérifications à bord d’un train entre le moment où ce train quitte la dernière gare, située sur le territoire d’un État membre partageant une frontière intérieure avec un État membre ayant réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures, et le moment où ledit train entre dans la première gare située sur le territoire de ce dernier État membre, le contrôle à bord de ce même train doit, sauf accord en sens contraire passé entre ces deux États membres, être considéré comme un contrôle réalisé à un point de passage frontalier situé sur le territoire de l’État membre ayant réintroduit de tels contrôles. En effet, le ressortissant d’un pays tiers ayant été contrôlé à bord de ce train séjournera nécessairement, à la suite de ce contrôle, sur le territoire de ce dernier État membre, au sens de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 2008/115.

      34 Cela étant, il convient encore de relever que l’article 2, paragraphe 2, de la directive 2008/115 permet aux États membres d’exclure, à titre exceptionnel et sous certaines conditions, les ressortissants de pays tiers qui séjournent irrégulièrement sur leur territoire du champ d’application de cette directive.

      35 Ainsi, d’une part, cet article 2, paragraphe 2, de la directive 2008/115 permet, à son point a), aux États membres de ne pas appliquer cette dernière, sous réserve des prescriptions contenues à l’article 4, paragraphe 4, de celle-ci, dans deux situations particulières, à savoir celle de ressortissants de pays tiers qui font l’objet d’une décision de refus d’entrée à une frontière extérieure d’un État membre, conformément à l’article 14 du code frontières Schengen, ou celle de ressortissants de pays tiers qui sont arrêtés ou interceptés à l’occasion du franchissement irrégulier d’une telle frontière extérieure et qui n’ont pas obtenu par la suite l’autorisation ou le droit de séjourner dans ledit État membre.

      36 Cela étant, il ressort de la jurisprudence de la Cour que ces deux situations se rapportent exclusivement au franchissement d’une frontière extérieure d’un État membre, telle que définie à l’article 2 du code frontières Schengen, et ne concernent donc pas le franchissement d’une frontière commune à des États membres faisant partie de l’espace Schengen, même lorsque des contrôles ont été réintroduits à cette frontière, en vertu de l’article 25 de ce code, en raison d’une menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure de cet État membre (voir, en ce sens, arrêt du 19 mars 2019, Arib e.a., C‑444/17, EU:C:2019:220, points 45 et 67).

      37 Il s’ensuit, comme M. l’avocat général l’a relevé au point 35 de ses conclusions, que l’article 2, paragraphe 2, sous a), de la directive 2008/115 n’autorise pas un État membre ayant réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures à déroger aux normes et aux procédures communes prévues par cette directive afin d’éloigner le ressortissant d’un pays tiers qui a été intercepté, sans titre de séjour valable, à l’un des points de passage frontaliers situés sur le territoire de cet État membre et où s’exercent de tels contrôles.

      38 D’autre part, si l’article 2, paragraphe 2, de la directive 2008/115 autorise, à son point b), les États membres à ne pas appliquer cette directive aux ressortissants de pays tiers faisant l’objet d’une sanction pénale prévoyant ou ayant pour conséquence leur retour, conformément au droit national, ou faisant l’objet de procédures d’extradition, force est de constater qu’un tel cas de figure n’est pas celui qui est visé par la disposition en cause dans le litige au principal.

      39 Il résulte de tout ce qui précède, d’une part, qu’un État membre ayant réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures peut appliquer, mutatis mutandis, l’article 14 du code frontières Schengen ainsi que l’annexe V, partie A, point 1, de ce code à l’égard d’un ressortissant d’un pays tiers qui est intercepté, sans titre de séjour régulier, à un point de passage frontalier autorisé où s’exercent de tels contrôles.

      40 D’autre part, lorsque ce point de passage frontalier est situé sur le territoire de l’État membre concerné, ce dernier doit toutefois veiller à ce que les conséquences d’une telle application, mutatis mutandis, des dispositions citées au point précédent n’aboutissent pas à méconnaître les normes et les procédures communes prévues par la directive 2008/115. La circonstance que cette obligation qui pèse sur l’État membre concerné est susceptible de priver d’une large partie de son effectivité l’éventuelle adoption d’une décision de refus d’entrée à l’égard d’un ressortissant d’un pays tiers se présentant à l’une de ses frontières intérieures n’est pas de nature à modifier un tel constat.

      41 Concernant les dispositions pertinentes de cette directive, il convient de rappeler, notamment, qu’il résulte de l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2008/115 que tout ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d’un État membre doit, sans préjudice des exceptions prévues aux paragraphes 2 à 5 de cet article et dans le strict respect des exigences fixées à l’article 5 de cette directive, faire l’objet d’une décision de retour, laquelle doit identifier, parmi les pays tiers visés à l’article 3, point 3, de ladite directive, celui vers lequel il doit être éloigné [arrêt du 22 novembre 2022, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Éloignement – Cannabis thérapeutique), C‑69/21, EU:C:2022:913, point 53].

      42 Par ailleurs, le ressortissant d’un pays tiers qui fait l’objet d’une telle décision de retour doit encore, en principe, bénéficier, en vertu de l’article 7 de la directive 2008/115, d’un certain délai pour quitter volontairement le territoire de l’État membre concerné. L’éloignement forcé n’intervient qu’en dernier recours, conformément à l’article 8 de cette directive, et sous réserve de l’article 9 de celle-ci, qui impose aux États membres de reporter l’éloignement dans les cas qu’il énonce [arrêt du 17 décembre 2020, Commission/Hongrie (Accueil des demandeurs de protection internationale), C‑808/18, EU:C:2020:1029, point 252].

      43 En outre, il découle de l’article 15 de la directive 2008/115 que la rétention d’un ressortissant d’un pays tiers en séjour irrégulier ne peut être imposée que dans certains cas déterminés. Cela étant, comme M. l’avocat général l’a relevé, en substance, au point 46 de ses conclusions, cet article ne s’oppose pas à ce que, lorsqu’il représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure, ce ressortissant fasse l’objet d’une mesure de rétention, dans l’attente de son éloignement, pour autant que cette rétention respecte les conditions énoncées aux articles 15 à 18 de cette directive (voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 2020, Stadt Frankfurt am Main, C‑18/19, EU:C:2020:511, points 41 à 48).

      44 Par ailleurs, la directive 2008/115 n’exclut pas la faculté pour les États membres de réprimer d’une peine d’emprisonnement la commission de délits autres que ceux tenant à la seule circonstance d’une entrée irrégulière, y compris dans des situations où la procédure de retour établie par cette directive n’a pas encore été menée à son terme. Dès lors, ladite directive ne s’oppose pas davantage à l’arrestation ou au placement en garde à vue d’un ressortissant de pays tiers en séjour irrégulier lorsque de telles mesures sont adoptées au motif que ledit ressortissant est soupçonné d’avoir commis un délit autre que sa simple entrée irrégulière sur le territoire national, et notamment un délit susceptible de menacer l’ordre public ou la sécurité intérieure de l’État membre concerné (arrêt du 19 mars 2019, Arib e.a., C‑444/17, EU:C:2019:220, point 66).

      45 Il s’ensuit que, contrairement à ce que le gouvernement français soutient, l’application, dans un cas tel que celui visé par la demande de décision préjudicielle, des normes et des procédures communes prévues par la directive 2008/115 n’est pas de nature à rendre impossible le maintien de l’ordre public et la sauvegarde de la sécurité intérieure, au sens de l’article 72 TFUE.

      46 En égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question préjudicielle que le code frontières Schengen et la directive 2008/115 doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un État membre a réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures, il peut adopter, à l’égard d’un ressortissant d’un pays tiers qui se présente à un point de passage frontalier autorisé situé sur son territoire et où s’exercent de tels contrôles, une décision de refus d’entrée, en vertu d’une application mutatis mutandis de l’article 14 de ce code, pour autant que les normes et les procédures communes prévues par cette directive soient appliquées à ce ressortissant en vue de son éloignement.

      Sur les dépens

      47 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

      Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

      Le règlement (UE) 2016/399 du Parlement européen et du Conseil, du 9 mars 2016, concernant un code de l’Union relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), et la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier,

      doivent être interprétés en ce sens que :

      lorsqu’un État membre a réintroduit des contrôles à ses frontières intérieures, il peut adopter, à l’égard d’un ressortissant d’un pays tiers qui se présente à un point de passage frontalier autorisé situé sur son territoire et où s’exercent de tels contrôles, une décision de refus d’entrée, en vertu d’une application mutatis mutandis de l’article 14 de ce règlement, pour autant que les normes et les procédures communes prévues par cette directive soient appliquées à ce ressortissant en vue de son éloignement.

      https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?docid=277630&doclang=FR

  • Les « traces fragiles » des #rescapés arméniens du #génocide

    L’historienne #Anouche_Kunth publie « Au bord de l’effacement », une enquête délicate sur la marque du passé génocidaire dans les formalités administratives accomplies par les exilés arméniens en France, dans l’entre-deux-guerres.

    Des documents qui racontent « par en dessous » un génocide attesté, quoique toujours nié par les puissances qui l’ont perpétré. Voilà la matière première des recherches de notre invitée, Anouche Kunth, chargée de recherche au CNRS et autrice d’Au bord de l’effacement. Sur les pas d’exilés arméniens dans l’entre-deux-guerres (La Découverte).

    Dans ce livre, l’historienne part de duplicatas de certificats d’identité, autrefois délivrés par l’Office des réfugiés arméniens, et aujourd’hui conservés à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Sous les apparences d’un style bureaucratique, ils offrent aussi, à qui les étudie patiemment, des marques, des ratures et des remarques annexes, qui font écho aux violences, aux spoliations et aux déplacements subis par une population entière, en raison de ses origines.

    Parce que ces documents étaient nécessaires à des unions ou à des départs pour d’autres contrées, ils témoignent aussi des vies reconstruites, et transmises, par les personnes exilées. En ce sens, le travail d’Anouche Kunth contribue à conjurer, sur le plan mémoriel, une « guerre d’extermination de cent ans » dénoncée dans nos colonnes par l’historien Vincent Duclert, auteur d’Arménie. Un génocide sans fin et le monde qui s’éteint (Les Belles Lettres).

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/101123/les-traces-fragiles-des-rescapes-armeniens-du-genocide
    #arméniens #livre #histoire #traces

    • Au bord de l’effacement. Sur les pas d’exilés arméniens dans l’entre-deux-guerres

      Nom, prénom, date et lieu de naissance : trop peu de mots, sur ces certificats administratifs, pour écrire l’histoire de chaque personne épinglée à son état civil, enfoncée dans le sillon de ses empreintes digitales. À mieux les regarder cependant, ces #documents_d'identité portent les marques de bifurcations multiples, de ruptures radicales survenues dans les trajectoires d’Arméniens originaires de l’Empire ottoman et #réfugiés en France au lendemain de la Première Guerre mondiale. La paix, en effet, n’a pas permis aux survivants du génocide (1915-1916) de retourner vivre en Turquie, à la suite des politiques d’exclusion mises en œuvre par le régime kémaliste.
      L’étonnant, ici, n’est pas que l’exil soit affaire de routes, de maisons détruites ou spoliées, de naissances en chemin, de contrats de travail signés à distance, de débarquements à Marseille, de morts précoces et de nouveaux départs vers les Amériques. Mais que d’infimes #traces de ces vies déplacées se soient déposées au détour de formalités ordinaires. Par petites touches, le passé étend ses ombres à travers les liasses.
      Le travail d’Anouche Kunth, d’une rare délicatesse, conjure la #violence de l’#effacement.

      https://www.editionsladecouverte.fr/au_bord_de_l_effacement-9782348057908

  • « Les autorités n’ont pas de places pour eux » : à Mayotte, des centaines de demandeurs d’asile occupent un stade faute de mieux - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/53160/les-autorites-nont-pas-de-places-pour-eux--a-mayotte-des-centaines-de-

    Grand angle. Plus de 200 migrants, dont des femmes et des enfants, occupent depuis cet été le stade Cavani, à Mayotte, dans des conditions insalubres. Ces demandeurs d’asile, originaires d’Afrique des Grands Lacs, n’ont accès ni à l’eau ni à l’électricité. Leur statut de demandeurs d’asile leur permet pourtant de prétendre à un logement, le temps du traitement de leur dossier.
    Autour du stade Cavani, à Mamoudzou, des dizaines de tentes se dressent sur les talus qui surplombent le terrain. Des abris de fortune faits de bâches usées, de tissus troués et de morceaux de pagne délabrés, ramassés dans les poubelles de Mayotte. Un peu plus bas, des vêtements sont suspendus sur les grillages qui délimitent le terrain.
    C’est ici que depuis cet été des migrants ont élu domicile. Au fil des semaines, le camp de fortune n’a cessé de grossir : d’une dizaine au départ, ils sont aujourd’hui plus de 200 à dormir dans ce stade. Parmi eux, une soixantaine d’enfants et de femmes, dont certaines enceintes, selon la presse locale. L’une d’entre elles, croisée jeudi 9 novembre par le référent de la Ligue des droits de l’Homme (LDH) sur l’île , Daniel Gros, arrive presque à terme. La majorité de ces exilés sont arrivés à Mayotte ces derniers mois et attendent la réponse à leur demande d’asile. Ils sont originaires de la République démocratique du Congo (RDC), du Rwanda ou encore de Somalie.
    (...) L’accès à l’eau est aussi une gageure dans ce département français confronté depuis des mois à une pénurie d’eau potable. « J’essaye de trouver de l’aide mais je n’y arrive pas », souffle Salma. « Et puis, tout est cher ici ». Les demandeurs d’asile bénéficient chaque mois d’un bon de 30 euros par personne (et 10 euros pour chaque enfant), une somme dérisoire au vu des prix élevés à Mayotte. Pour se procurer de l’eau, les migrants en récupèrent à même le sol, dans les caniveaux et les cours d’eau. Pour se nourrir, ils fouillent les poubelles, mais ne parviennent pas tous les jours à manger à leur faim. Le manque d’hygiène est criant : les exilés font leur besoin dans des sacs plastiques et les jettent à la poubelle. Le lieu n’est pas équipé de latrines, de douches ou encore d’électricité.
    (...) Selon Daniel Gros de la LDH, une centaine de migrants s’agglutinent là, au bord de la route. Le stade de Cavani est en fait l’extension de ce campement informel. « Dans le stade, on a plus de place et on est protégés des violences », témoigne Ferdinand. « Alors que dans la rue, les voitures passent juste à côté de nos tentes, on risque d’avoir des accidents. Et puis, certains habitants nous agressent dans la nuit : ils prennent notre nourriture, arrachent les téléphones, nous frappent et fouillent nos affaires. Ils nous disent qu’on n’est pas les bienvenus et qu’on doit rentrer chez nous. Au stade, on est un peu plus cachés ». Ces centaines de demandeurs d’asile n’ont pas d’autres choix que de vivre dehors : ils n’ont pas obtenu de logement au sein du réseau d’accueil de l’île, malgré leur statut qui leur donne droit à un hébergement le temps de la procédure. Solidarité Mayotte dispose de 400 places, en appartement, pour loger cette population. Un nombre insuffisant, d’après les associations. « Il y a tellement de monde que les autorités n’ont pas de places pour eux », déplore Daniel Gros.
    Toutes les personnes interrogées s’accordent à dire que ces campements n’ont « aucun lien » avec l’opération Wuhambushu du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin. Lancée en avril dernier, cette grande action vise à détruire 1 000 bangas – les cases en tôles qui constituent les bidonvilles – d’ici la fin de l’année. Mais les exilés du stade ne constituent pas, d’après les humanitaires et les officiels, la même population que les habitants de ces bidonvilles.
    Début novembre, le ministre délégué chargé des Outre-Mer, Philippe Vigier, s’est rendu à Cavani, que la presse locale qualifie de premier camp de migrants à Mayotte. « La situation ne peut pas durer. Les gens en situation irrégulière n’ont pas vocation à rester sur le sol français », a-t-il déclaré aux journalistes présents lors de la visite. « Pour les autres, il faudra voir comment on trouvera des solutions d’hébergement. Mais on ne peut pas laisser s’instaurer au milieu de la commune une zone de non-droit ». Reste que pour Charline Ferrand-Pinet, si l’accès à l’hébergement est une problématique majeure, elle n’est pas la seule. « On peut ouvrir des centaines de places supplémentaires mais si on accélère par le traitement des demandes d’asile et l’obtention de document d’identité pour les réfugiés, et qu’on n’intègre pas mieux les statutaires, le problème ne sera pas réglé », insiste-t-elle. En effet, parmi les migrants qui vivent dans les rues de Mamoudzou, on compte de plus en plus de personnes ayant obtenu une protection, mais qui ne trouvent pas de logements dans le parc privé.

    #Covid-19#migrant#migration#france#mayotte#refugie#camp#hebergement#migrationirreguliere#accueil#sante#droit

  • Analyse : « Projet de loi Darmanin : Vérités et contrevérités » — #François_Héran

    Le projet de loi Immigration et asile, présenté au Conseil des ministres en février 2023 par Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, et amendé par la Commission des lois du Sénat en mars 2023, doit être finalement débattu par les sénateurs le 6 décembre 2023. Or les #débats et #controverses autour de ce projet manient sans cesse des arguments chiffrés, qui interpellent les chercheurs en statistique sociale et en #économie. Leur devoir est de vérifier les assertions chiffrées de la sphère politique. Ce faisant, ils ne sortent pas de leur neutralité pour investir le champ politique : ce sont les politiques qui multiplient les incursions dans la sphère des chiffres. C’est une bonne chose que les politiques argumentent sur des #données. Encore doivent-ils respecter les règles de méthode les plus élémentaires et tenir compte des données comparatives collectées en Europe.

    D’où la #vérification, proposée ici, d’une série de faits majeurs en matière d’immigration complétée en annexe par un fact-checking juridique sur la portée réelle de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme.

    Le but poursuivi ici est simple : nourrir le débat en essayant de raison garder.

    Plan :

    - VRAI ou FAUX : « Nous avons perdu la maîtrise de l’immigration »
    - VRAI ou FAUX : « Le #regroupement_familial, pompe aspirante de l’immigration »
    - VRAI ou FAUX : « La France championne d’Europe de la demande d’asile »
    - VRAI ou FAUX : La France, du moins, « a pris sa part » dans l’accueil des exilés
    - VRAI ou FAUX : « Nous avons rendu la France particulièrement attractive pour les migrants »
    - Pour un débat rationnel sur le projet de loi Darmanin
    – Annexe : L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme

    https://www.icmigrations.cnrs.fr/2023/10/31/projet-loi-darmanin-verites-et-contreverites
    #loi_immigration #France #chiffres #statistiques #fact-checking #attractivité #migrations #asile #réfugiés

  • Over 30,000 Refugees Resettled from Rwanda
    https://mailchi.mp/5b3ecee1e18b/over-30000-refugees-resettled-from-rwanda?e=e777d31e35

    Over 30,000 Refugees Resettled from Rwanda
    One of the refugees departing for Canada embraces family and friends prior to leaving. Photo: IOM 2023/ Robert Kovacs
    Geneva/ Kigali – With the departure of 13 refugees on a flight to Toronto, Canada, today (8/11), the International Organization for Migration (IOM) has safely assisted the resettlement of more than 30,000 refugees from Rwanda since 2010.
    The most recent departure marks a milestone achievement for the Organization and reaffirms its commitment to finding durable solutions for refugees and people in need of international protection. Throughout the resettlement programme, the Organization facilitates interviews by resettlement countries, health assessments, screening and referral, pre-departure cultural orientation, and the safe transport and reception in the country of final destination. This allows IOM to care for migrants and refugees throughout their entire journey as they restart their lives in their new home.
    “Resettlement provides international protection for the most vulnerable people in our world, as well as a chance for them to build new lives,” states IOM Rwanda Chief of Mission, Ash Carl. “We will continue to work closely with the Government and our partners in Rwanda, as well as the governments of the countries of destination, to ensure refugees and migrants have safe and dignified pathways to successfully integrate into their new communities.”
    According to the United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR), Rwanda currently hosts over 135,000 refugees and asylum seekers as of 30 September 2023. When other solutions for refugees are unattainable, resettlement may be the only feasible option to provide effective protection and meet the needs of refugees whose fundamental rights are at grave risk.To meet this enormous need, IOM continues to grow in scope and complexity in Rwanda. So far over 6,600 people have received resettlement assistance this year. Among those resettled, are 1,288 persons who were first evacuated from Libya to Rwanda, through the Emergency Transit Mechanism (ETM).Durable solutions such as resettlement help to facilitate regular migration pathways for migrants and refugees in line with target 10.7 of the Sustainable Development Goals “to facilitate orderly, safe, and responsible migration and mobility of people” and objective five of the Global Compact for Safe, Orderly and Regular Migration.

    #covid-19#migrant#migration#rwanda#canada#oim#hcr#refugie#droit#sante#reinstallation

  • Le tante sofferenze della fuga: le donne ucraine a rischio tratta e sfruttamento sessuale
    https://www.meltingpot.org/2023/11/le-tante-sofferenze-della-fuga-le-donne-ucraine-a-rischio-tratta-e-sfrut

    Dall’inizio della guerra in Ucraina, sono aumentati vertiginosamente i casi di adescamento segnalati lungo le rotte migratorie e sui social network. Per le donne ucraine il rischio di tratta passa soprattutto da chi offre loro trasporto e alloggio gratuito. Vika ha 21 anni. Nel caos che segue lo scoppio del conflitto in Ucraina, sale sull’auto di uno sconosciuto che le offre un passaggio verso il nord della Slovacchia. Accetta, non ha altra scelta. L’uomo le promette un lavoro ben pagato e un alloggio sicuro. Qualche giorno dopo, però, senza nessuna spiegazione, viene accompagnata nel sud della Slovacchia, a lavorare (...)

  • #AME, #regroupement_familial, #quotas : le Sénat s’acharne contre l’immigration

    Alors que le projet de loi sur l’immigration est examiné au #Sénat cette semaine, plusieurs amendements sont venus durcir encore un peu plus le texte, notamment sur l’#aide_médicale_d’État, les quotas migratoires ou le regroupement familial. Avec l’assentiment du ministre de l’intérieur.

    Peu après 19 heures, mardi 7 novembre, le Sénat a voté la suppression de l’aide médicale d’État (AME). Les élu·es de la chambre haute ont ainsi voté, par 191 voix contre 140, contre les amendements de suppression de l’AMU, l’aide médicale d’urgence, qui avait remplacé l’aide médicale d’État en commission des lois au Palais du Luxembourg au printemps dernier.

    Si le dispositif initial de l’AME devrait toutefois réapparaître à la faveur de l’examen du projet de loi sur l’immigration lorsque celui-ci arrivera à l’Assemblée nationale, début décembre, il a donné lieu à d’intenses discussions au Palais du Luxembourg.

    D’un côté, une droite sénatoriale tout à son obsession de dénoncer le supposé « appel d’air » créé par le dispositif. De l’autre, une gauche, pour une fois alliée au groupe macroniste - lequel a voté pour la suppression de l’AMU et a même déposé un amendement en ce sens - qui a tenté, en vain, de sauver l’AME au nom de la solidarité, mais aussi, et surtout, de la santé publique.

    Le tout, sous le regard marmoréen du ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, qui s’est contenté de donner un « avis de sagesse » (ni pour ni contre) aux amendements de la gauche et du groupe macroniste. Quelques minutes plus tard, il s’est vu publiquement contredit par la ministre déléguée à la santé, Agnès Firmin-Le Bodo, qui a martelé que « le gouvernement [était] attaché à l’AME, qui est un dispositif de santé publique que le gouvernement porte de façon constante depuis 2017 ».

    Un peu plus tôt, la tension était palpable dans l’hémicycle. Le communiste Ian Brossat a dénoncé les « arguments aberrants » de la droite, la socialiste Laurence Rossignol a exhorté ses collègues à « cesse[r] de travailler pour l’extrême droite » et à se comporter « en républicains », la sénatrice écologiste Mélanie Vogel s’est emportée contre cet « article de la honte » : « Au nom de votre haine des Français, vous être prêts à mettre en cause la santé des Français ! », a-t-elle lancé.
    Méconnaissance du dispositif

    « Nous n’avons aucune leçon à recevoir », a rétorqué le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, avant de pointer avec une certaine gourmandise les divergences de vues entre le ministre de l’intérieur et celui de la santé. De même que son homologue socialiste, Patrick Kanner, qui a lui aussi raillé cet avis de sagesse délivré par un gouvernement ne pouvant que compter sur des troupes clairsemées au Sénat, et destiné, selon lui, à offrir des gages à LR pour s’assurer une majorité sur l’ensemble du texte.

    Dans un récent rapport consacré à cette aide et à l’« instrumentalisation » qui en est faite par la droite et l’extrême droite, l’association Médecins du monde affirmait que huit étrangers et étrangères sur dix se présentant dans l’un de ses centres d’accueil, de soins et d’orientation n’étaient pas couvert·es, le plus souvent par méconnaissance du dispositif, manque d’information ou par complexité administrative. De manière plus globale, près d’une personne étrangère sur deux (49 %) n’a pas recours à l’AME tout en y étant éligible, selon une étude de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) datant de 2019.

    Contre l’avis de toutes les associations spécialisées dans la santé, mais aussi de chercheurs et chercheuses reconnues, Gérald Darmanin a assez vite accepté l’idée d’abandonner l’AME pour répondre aux attentes de la droite sénatoriale. L’inclination du ministre de l’intérieur en faveur de la disposition n’est pas une surprise. « À titre personnel, je suis favorable à la proposition faite par les LR, déclarait-il déjà dans Le Parisien début octobre. C’est un bon compromis qui allie fermeté et humanité, et je le dirai sur le banc du Sénat. »
    Un rapport venant couper court à tous les fantasmes

    Gérald Darmanin l’a dit mais il n’a pas pu aller jusqu’à en faire la position du gouvernement. Et pour cause : le ministre se sait minoritaire au sein de l’exécutif. La première ministre, Élisabeth Borne, a redit sur France Inter lundi qu’elle n’était « pas favorable à une suppression de l’AME », tout en renvoyant la réflexion au rapport commandé sur le sujet à deux personnalités, Patrick Stefanini et Claude Évin.

    Prévue en décembre, la remise de leur rapport devrait conforter la cheffe du gouvernement dans sa position. Selon les conclusions intermédiaires des deux experts missionnés, l’AME peut inciter ses bénéficiaires à rester dans la clandestinité mais elle ne fait pas l’objet d’un recours excessif, n’est pas un motif de migration en France et est particulièrement contrôlée par les services de l’État.

    Des arguments également avancés par le ministre de la santé, Aurélien Rousseau, qui mène la bataille en interne contre la suppression de l’AME. « Ça serait du perdant-perdant », fait savoir son entourage à la presse. L’ancien directeur de cabinet d’Élisabeth Borne a également envoyé une note au président de la République pour défendre l’AME sous sa forme actuelle.

    Dans le camp présidentiel, la position d’Aurélien Rousseau est largement partagée. « Je suis à 200 % avec lui, affirme un ministre issu de la gauche. C’est une énorme connerie ! On parle d’êtres humains, c’est notre rôle de les soigner. Et ça protège, par ailleurs, la population dans son ensemble. Ce genre de proposition n’est vraiment pas à la hauteur. »

    À l’Assemblée nationale aussi les rangs macronistes n’ont que peu goûté la main tendue à la droite de Gérald Darmanin. Avant l’été, le groupe Renaissance s’est accordé pour défendre le dispositif de façon unitaire. Une position toujours en vigueur, selon Sylvain Maillard, devenu président du groupe entre-temps : « Nous défendons évidemment l’AME », confirme-t-il à Mediapart.

    Lundi 6 novembre, les premières discussions sur le projet de loi immigration ont débuté au Sénat après le discours général de Gérald Darmanin. Le texte « repose sur deux mots », a-t-il avancé, prônant la « fermeté » et la « simplification ».

    Fermeté à l’endroit des étrangers « délinquants » – une expression qui désormais se retrouve dans chacune de ses prises de parole s’agissant d’immigration –, mais aussi à l’endroit des détenteurs d’une carte de séjour qui ne respecteraient pas les principes de la République, des passeurs qu’il assimile à des « criminels » ou encore des patrons voyous, dont il faudrait fermer administrativement l’entreprise lorsqu’ils embauchent « sciemment » des travailleurs sans papiers.

    Sur la simplification, le ministre a « plaidé le plagiat » et dit s’être inspiré du rapport du sénateur François-Noël Buffet en voulant réduire le nombre de procédures liées au droit du contentieux. Prenant l’exemple d’une personne déboutée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), Gérald Darmanin déroule les possibilités de recours qui s’offrent à elle, de la Cour nationale du droit d’asile (chargée d’examiner les recours des personnes ayant vu leur demande d’asile rejetée en premier lieu) au tribunal administratif, jusqu’au Conseil d’État. « Nous ne sommes pas laxistes », s’est enorgueilli le ministre.

    70 % des demandes d’asile sont rejetées par la France, soit l’un des taux les plus élevés d’Europe. Dans son envolée lyrique, Gérald Darmanin s’est fourvoyé en insinuant que les juges de l’asile pourraient être sous influence : tout en vantant ce taux élevé de refus, il a déclaré avoir « des juges [de la Cour nationale du droit d’asile] qui en général écoutent la demande du ministère de l’intérieur », laissant entendre qu’une politique du chiffre pourrait leur être dictée quand ces derniers doivent faire preuve d’indépendance et d’impartialité.

    À propos des juges de la liberté et de la détention, le ministre a suggéré vouloir leur imposer de ne pas libérer les personnes placées en rétention pour des raisons de forme (irrégularité ou vice de procédure) mais selon la dangerosité de la personne. Une disposition qui existe déjà dans le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, comme l’a fait remarquer Paul Chiron, juriste et membre de la Cimade, sur Twitter.

    Parmi les amendements adoptés dans la soirée lundi, l’un concernait les quotas migratoires (sauf pour les demandeurs et demandeuses d’asile), auxquels Gérald Darmanin ne s’est pas opposé. Ils permettraient, a avancé Muriel Jourda, sénatrice LR et rapporteure du texte, de « dire autant que faire se peut qui va rentrer sur le territoire français ». « Les titres de séjour étranger malade ou étudiant doivent être contrôlés aujourd’hui », a-t-elle asséné.
    Durcir l’accès au regroupement familial

    Plusieurs sénateurs et sénatrices LR ont ainsi pointé la hausse du nombre de titres de séjour étudiant délivrés en France en 2022, passés de 88 617 à 101 250 ; tandis que d’autres, comme Mélanie Vogel ou Ian Brossat, ont souligné l’importance de l’attractivité de la France pour les étudiantes et étudiants étrangers.

    La droite sénatoriale s’est aussi attaquée au regroupement familial, en cherchant à en durcir l’accès. Un amendement – adopté au Sénat – vise à imposer une assurance-maladie aux personnes ayant formulé une demande de regroupement familial ainsi qu’à leurs proches qui aspireraient à les rejoindre la France. Il faudrait aussi justifier de vingt-quatre mois de présence en France pour pouvoir déposer une demande (au lieu de dix-huit actuellement) et de la maîtrise du français pour les regroupés familiaux, avant leur venue en France.

    Un nouvel article entend compliquer ce même processus pour les étrangères et étrangers : dans le schéma actuel, le maire, qui est chargé de vérifier les bonnes conditions d’accueil du ou des proches concernés en organisant par exemple la visite du logement du demandeur ou de la demandeuse, doit rendre un avis à la préfecture, qui instruit ensuite la demande. Jusqu’ici, au-delà de deux mois sans réponse du maire, l’avis était automatiquement favorable. Celui-ci pourrait désormais être défavorable en cas de non-retour de l’élu·e local·e, sans aucune forme de « sanction » à l’égard de l’élu·e, sauf peut-être pour les étrangères et étrangers eux-mêmes, comme l’a fait remarquer Guy Benarroche (Europe Écologie-Les Verts).

    Autant de mesures qui viendraient compliquer encore un peu plus le parcours du combattant s’agissant des demandes de regroupement familial, dont les procédures dépassent largement les délais officiels, brisant parfois des vies de famille. Les amendements visant à supprimer cet article et son aspect « injuste » ont tous été écartés. La sénatrice LR Jacqueline Eustache Brinio a proposé d’ajouter un caractère « automatique » à cet avis, de manière à « engager » le maire sur les personnes qu’il accueillerait sur sa commune ; mais l’amendement n’a pas été adopté.

    Interrogé à ce sujet mardi sur la chaîne Public Sénat, le sénateur Ian Brossat a rappelé l’importance de la famille pour la bonne « intégration » des personnes étrangères en France, faisant notamment référence aux chibanis – les immigrés maghrébins – ayant vécu toute leur vie seuls à l’hôtel. « Est-ce que c’est ça, notre modèle d’intégration ? Ce n’est pas le mien », a-t-il affirmé, expliquant ne pas être favorable à ce qu’on limite le regroupement familial. « Le droit de vivre en famille est un droit fondamental. Si on souhaite que les gens s’intègrent, on a intérêt à ce qu’ils aient leur famille avec eux. »

    Mardi après-midi, les discussions se sont étirées en séance sur l’accès au soin des étrangers et étrangères, par exemple sur le durcissement de l’accès au titre de séjour « étranger malade ». « Là, on est vraiment en train de toucher le fond en termes de dureté du texte, qui porte une vision extrêmement déshumanisée », a déploré le président des sénateurs socialistes, Patrick Kanner, qui s’est dit fier que la France accueille des « milliers de personnes qui demandent à être soignées avec des traitements qui n’existent pas dans leur pays ». « On est face à des gens qui ont besoin de traitements coûteux car ils sont gravement malades, du VIH ou en stade terminal de cancer. C’est pour cela qu’on fait des visas », a plaidé l’écologiste Mélanie Vogel.

    « Si on commence à dire qu’on peut accepter en France, dans l’élite de nos hôpitaux, des gens de pays parfaitement développés, parce qu’ils n’ont pas des hôpitaux au même niveau qu’en France, ça n’a plus de sens », a rétorqué, déplaçant le débat, Roger Karoutchi, le « Monsieur Immigration » du groupe LR au Sénat, à l’unisson avec le rapporteur du texte, le centriste Philippe Bonnecarrère, qui a expliqué que « quand un étranger demande à bénéficier d’une dialyse, la suite c’est la greffe rénale, vous voyez bien le sujet qui se pose…. ». Tous les amendements de suppression de la gauche ont reçu un avis défavorable du ministre de l’intérieur et ont été balayés.

    Dans les couloirs du Palais du Luxembourg, on ne se faisait pas d’illusion sur le sort qui serait réservé, un peu plus tard dans la soirée, à l’AME, transformée en commission en AMU. « Nous voterons pour son rétablissement, mais nous allons perdre. En réalité, c’est à l’Assemblée nationale [où le texte arrive le 6 décembre prochain – ndlr] que ça va se jouer et que l’AME sera rétablie », glissait le patron des sénateurs et sénatrices macronistes, François Patriat.

    https://www.mediapart.fr/journal/politique/071123/ame-regroupement-familial-quotas-le-senat-s-acharne-contre-l-immigration
    #loi_immigration #France #asile #migrations #réfugiés

    • Projet de loi immigration au Sénat : comment rendre l’inacceptable un peu plus tolérable

      De nombreuses mesures aux conséquences dévastatrices ont été votées cette semaine, sous le regard bienveillant de Gérald Darmanin. Si certains espèrent qu’elles « tomberont » à l’Assemblée nationale, elles auront au moins eu le temps d’infuser dans le débat public.

      « Alors« Alors, cette semaine ? » Lorsque l’on interroge les sénatrices et sénateurs de gauche au Sénat, ils lâchent un soupir exaspéré… Ce n’est pas tant la fatigue ou la longueur des débats autour de la loi « immigration » qui expliquent leur désarroi. C’est plutôt « l’air » qu’ils respirent au quotidien : « parce qu’on prend cher, cette semaine », admet Yannick Jadot (Les Écologistes, ex-Europe Écologie-Les Verts), entre deux amendements, dans la salle des conférences au Sénat.

      « Au départ, Gérald Darmanin voulait être gentil avec les gentils, méchant avec les méchants. Finalement, il est méchant avec tout le monde », tacle de son côté Ian Brossat, sénateur communiste de Paris. Et pour cause : la droite sénatoriale a voté, cette semaine, de nombreuses mesures dont les conséquences pourraient être dévastatrices pour les étrangers et étrangères. Gérald Darmanin ne s’y est peu ou pas opposé, obnubilé par l’idée de se rallier la droite pour faire passer son texte à tout prix.

      Mardi soir, les sénateurs et sénatrices ont choisi de rétablir le délit du séjour irrégulier : le simple fait d’être étranger, en situation irrégulière en France, pourrait constituer un délit et valoir aux intéressé·es une amende d’un montant de 3 750 euros, une interdiction de territoire français de trois ans et la possibilité d’être placé·e en garde à vue (et non plus en retenue administrative). Ce délit avait pourtant été supprimé par la loi du 31 décembre 2012.

      La mesure, qui serait contraire au droit européen, a de quoi effrayer. « Si on commence à remettre en question des directives européennes qui sont protectrices, c’est grave », soulève Anna Sibley, du Groupe d’information et de soutien des immigrés (Gisti). Cela reviendrait à placer des personnes étrangères en prison, simplement parce qu’elles n’ont pas de papiers français. « C’est comme la double peine, on va diviser des familles, pénaliser des personnes qui vivent en France depuis longtemps », poursuit celle qui est également juriste.

      Cela fait d’ailleurs partie des spécificités de ce projet de loi porté par Gérald Darmanin. « Il remet en question le droit au séjour des personnes qui sont depuis très longtemps en France. » Il s’attaque, aussi, à des catégories jusqu’ici relativement protégées, comme les étudiantes et étudiants étrangers, les étrangers et étrangères malades ou les proches d’étrangers et étrangères venant en France dans le cadre du regroupement familial. Pour justifier de la nécessité des quotas migratoires, votés dès les premiers jours sans aucun détail ni cadre réglementaire, la sénatrice Les Républicains (LR) Muriel Jourda (également rapporteure du texte) n’a pas hésité à évoquer les titres de séjour « étudiant ».
      Droit du sol, déchéance de nationalité, expulsions

      « À quel titre donne-t-on la nationalité française à quelqu’un uniquement par le hasard de son lieu de naissance ? Un veau qui est né dans une écurie ne fera jamais de lui un cheval », a osé fièrement Stéphane Ravier (sénateur non inscrit mais membre de Reconquête).

      Dans la nuit de mercredi à jeudi, le Sénat a voté la suppression de l’automaticité du droit du sol pour les jeunes nés en France de parents étrangers ; de même qu’il a approuvé, sur la base d’un amendement proposé par Valérie Boyer (LR), la déchéance de nationalité pour les binationaux ayant acquis la nationalité française lorsque ces derniers ont fait l’objet d’une condamnation pour « homicide » ou « tentative d’homicide » à l’encontre des forces de l’ordre.

      Le texte s’inscrit ainsi dans un contexte « gravissime de xénophobie » porté par une partie de la classe politique, qui contribue à banaliser la haine de l’étranger sans en être inquiétée. « Il y a l’idée de surfer sur des faits divers pour légiférer, sauf qu’on va toucher des milliers d’autres personnes qui n’y sont pour rien », regrette Anna Sibley. Il y a une « zemmourisation de la droite », abonde Ian Brossat, un brin agacé par la tournure des événements. « On fait face à une extrême-droitisation du spectre politique, avec une suspicion généralisée à l’égard des personnes étrangères, dont l’écrasante majorité respecte pourtant nos valeurs et nos principes républicains. »

      La suppression de l’aide médicale d’État (AME) mardi soir en est l’une des démonstrations les plus criantes. Le Sénat assume de vouloir abandonner ce dispositif pourtant essentiel, au profit d’une aide médicale d’urgence (AMU), pour laquelle il faudrait cotiser chaque année. Malgré l’ire des associations et le désaccord majeur d’Élisabeth Borne, qui a d’ailleurs commandé un rapport à ce sujet, Gérald Darmanin ne s’y est pas opposé. « À titre personnel, je suis favorable à la proposition faite par Les Républicains, annonçait-il dans Le Parisien en amont des débats dans la chambre haute. C’est un bon compromis qui allie fermeté et humanité, et je le dirai sur le banc du Sénat. »

      Dans la même veine, il a été approuvé que les personnes étrangères en situation régulière ne pourraient plus prétendre aux prestations familiales ou à l’aide personnalisée au logement (APL) si elles n’ont pas au moins cinq ans de présence en France. Un étudiant ou une étudiante étrangère – dont les frais d’inscription ont été parfois multipliés par dix, selon les universités, sous le précédent quinquennat d’Emmanuel Macron – ne pourrait ainsi plus bénéficier de l’aide au logement, creusant encore un peu plus un budget déjà très serré.

      « Qu’on ne vienne pas nous parler de stratégie de lutte contre la pauvreté ou de fluidité du parc d’hébergement social ensuite », a réagi Delphine Rouilleault, directrice générale de France terre d’asile. « Qu’on ne soit pas surpris de voir les Restos du cœur crouler sous les demandes ou le nombre d’enfants à la rue augmenter. [C’est] affligeant et grave. »

      « Ça a été la semaine de l’enfer », résume vendredi la sénatrice écologiste Mélanie Vogel, qui a tenté, à maintes reprises lors de ses prises de parole, de ramener les sénateurs et sénatrices à la raison, tout comme Marie-Pierre de la Gontrie (Parti socialiste). En vain. Yannick Jadot dénonce une « course à l’échalote » entre les LR et Darmanin, « qui se fait sur le dos des immigrés » et au détriment de la constitutionnalité et du pragmatisme.

      Un gros volet du texte a été étudié jeudi après-midi, sous l’impatience de Gérald Darmanin, qui trépignait à l’idée de pouvoir faciliter l’expulsion de France des étrangers et étrangères. Il l’avait déjà annoncé au lendemain de l’attentat d’Arras, perpétré par un jeune originaire d’Ingouchie (une petite république du Caucase du Nord), dont la famille avait frôlé l’expulsion en 2014. « Aujourd’hui, je peux expulser 2 500 étrangers, a expliqué le ministre de l’intérieur à la tribune, face aux sénatrices et sénateurs. Mais pour 4 000 d’entre eux, je n’arrive pas à les expulser, non pas pour une question de laissez-passer consulaire mais parce que la loi m’en empêche. »

      L’information est en partie fausse ; mais partout dans les médias, l’idée que des catégories d’étrangers et étrangères bénéficient d’une « protection absolue » a circulé, notamment pour les jeunes arrivé·es avant l’âge de 13 ans en France – c’était le cas de l’assaillant d’Arras. Mais dans le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda), cette même catégorie peut en réalité être éloignée du territoire en cas d’activités à caractère terroriste ou de menace pour les intérêts fondamentaux de l’État.

      « S’il y a protection importante, c’est qu’à un moment donné, le législateur et le ministre de l’époque ont jugé qu’il fallait protéger. Vous déplacez le curseur et c’est particulièrement inquiétant », a alerté l’écologiste Guy Benarroche.
      Un texte considérablement durci pour l’Assemblée

      Ce dernier a demandé la suppression de l’article 9, quand Gérald Darmanin l’a au contraire estimé « très important ». « Il sera certainement scruté par le Conseil constitutionnel. La mesure vise à ouvrir la possibilités d’expulsion pour davantage de personnes qui le mériteraient du point de vue du ministère de l’intérieur. »

      Le sénateur LR Bruno Retailleau s’en est réjoui, rappelant la « sidération » des Français et des Françaises au lendemain de l’attentat d’Arras. « Les exceptions ont tué la règle et ces exceptions menacent désormais les Français. Progressivement, nous avons organisé, parfois nous-mêmes, notre propre impuissance », a-t-il asséné sous les acquiescements de sa collègue Valérie Boyer, assise derrière lui.

      Pour pouvoir expulser toujours davantage, le Sénat a enfin acté la possibilité de placer en rétention d’éventuels demandeurs d’asile qui n’auraient pas encore déposé leur demande, validant un amendement déposé par le gouvernement, ainsi que la possibilité de délivrer une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) de manière automatique aux déboutés du droit d’asile.

      Jeudi soir, alors que les LR étaient minoritaires dans l’hémicycle, ces derniers ont réclamé le scrutin public de façon à pouvoir voter pour l’ensemble de leur groupe et à garder leur influence malgré leur nombre restreint ; tandis que certain·es, à gauche, ont marqué leur mécontentement.

      Un festival d’inhumanités en matière d’immigration. C’est ce que beaucoup retiendront de cette semaine d’examen du projet de loi « immigration » au Sénat, avant que celui-ci ne rejoigne l’Assemblée nationale début décembre. La droite sénatoriale a tenté de montrer, coûte que coûte, qu’elle avait encore un rôle à jouer et qu’elle existait, face à une extrême droite plus puissante que jamais en France, quitte à lui faire de l’ombre sur certaines des mesures qu’elle a votées.

      « Ce qui est effrayant, c’est que pour des raisons principalement politiciennes, qui tiennent au besoin existentiel de LR de montrer qu’ils sont plus à droite que le gouvernement et au besoin du gouvernement de montrer qu’ils peuvent se mettre d’accord avec LR, le Sénat a balayé des aspects fondamentaux des droits humains en France », regrette Mélanie Vogel, qui estime que la valeur cardinale de la droite est devenue « la haine des étrangers ».

      Reste à savoir ce qu’il restera de ces mesures en décembre prochain. Dans les couloirs du Sénat comme chez les associatifs, certains redoutent que celles-ci, par leur nombre, ne conduisent à graver dans le marbre une poignée de ces mesures abusives.

      « Certes, poursuit la sénatrice écologiste, on va sans doute polir le texte à l’Assemblée. Mais j’ai peu d’espoir qu’on arrive à quelque chose de décent. » Il y a des sujets, estime Yannick Jadot, sur lesquels les sénateurs et sénatrices ont sans doute « travaillé pour du beurre ». « L’AME ou le délit de séjour irrégulier en font partie. Mais quand on voit comment Darmanin cède sur tout, on peut aussi se demander si le pire ne nous attend pas à l’Assemblée, avec en plus un front anti-immigrés constitué par les LR et l’extrême droite. »

      Même inquiétude chez Anna Sibley, du Gisti, qui pointe une surenchère des sénatrices et sénateurs de droite. « C’est le musée des horreurs. Et plus vous mettez de mesures qui détricotent les droits, plus vous avez de chances que certaines passent. » C’est cela que recherchent la stratégie et le jeu politiciens. « On n’est plus du tout dans une politique réfléchie qui viserait à améliorer nos politiques d’accueil en France, mais dans des considérations électoralistes », conclut-elle.

      https://www.mediapart.fr/journal/politique/111123/projet-de-loi-immigration-au-senat-comment-rendre-l-inacceptable-un-peu-pl

    • Épisode 8 “Des voix et des droits”, le podcast de la LDH, avec #Marie-Christine_Vergiat, Vice-Présidente de la #LDH

      Depuis aout 2022, Gérald Darmanin annonce un nouveau projet de loi sur l’immigration et l’asile, qui sera débattu au Sénat à partir du 6 novembre.

      Aujourd’hui, Des Voix et des droits accueille Marie-Christine Vergiat, vice-présidente de la LDH, pour mieux comprendre ce que recouvre réellement ce projet de loi.

      https://www.vodio.fr/vodiotheque/i/13289/episode-8-des-voix-et-des-droits-le-podcast-de-la-ldh-avec-marie-christine-ver

      #audio #podcast

    • Projet de loi asile et immigration : la palme de l’#inhumanité et de la #déraison revient à la majorité sénatoriale

      Le projet de loi « Pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration » sera adopté en première lecture par un vote solennel du Sénat ce mardi 14 novembre avant sa transmission à l’Assemblée nationale dans les prochains jours. Alors que la majorité sénatoriale a considérablement accentué la gravité d’un texte déjà très préoccupant, plus de 30 associations, collectifs et syndicats appellent à un sursaut général des forces citoyennes et politiques pour la défense de l’État de droit et de la dignité humaine.

      Engagées depuis plus d’un an dans le suivi de cet énième projet de loi « asile et immigration », nos organisations redoutaient fortement l’examen de ce texte par le Sénat. Alors que nous avions compris depuis longtemps que ce texte n’avait plus de prise avec la réalité du fait migratoire et des conditions de vie des personnes exilées dans notre pays, un nouveau pallier de la déraison a été franchi lors de l’examen par le Sénat.

      La majorité à la chambre haute a déposé et adopté un grand nombre d’amendements, tous plus répressifs les uns que les autres, tout en multipliant les outrances et propos stigmatisants à l’égard des personnes migrantes. Aucune mesure pouvant « rendre la vie impossible » aux personnes exilées n’a été épargnée, conformément aux ambitions de longue date du ministre de l’Intérieur.

      La suppression de l’aide médicale d’Etat (AME), l’une des maigres aides sociales à laquelle les personnes « sans-papiers » ont droit, en est bien sûr un des exemples les plus aberrants et consternants. Mais l’exclusion des personnes sans titre de séjour du droit à l’hébergement d’urgence et du droit à la réduction tarifaire des transports est tout aussi brutale. Bien d’autres barrières rendant plus difficiles l’accès à un séjour digne dans notre pays ont été méticuleusement édifiées : attaques contre le droit à la vie familiale via le regroupement, la réunification ou les titres de séjour pour ce motif ; contrôle accru de l’immigration étudiante ; nouveaux motifs pour refuser ou retirer un titre de séjour ; instauration de quotas migratoires ; rétablissement du délit de « séjour irrégulier ». Même chose pour le passage à cinq ans de résidence stable et régulière pour l’obtention de prestations sociales, qui ne fera que freiner l’insertion, en particulier des familles et des femmes.

      La droite sénatoriale, avec le soutien des centristes, a augmenté de manière draconienne les exigences pour accéder au séjour et à la nationalité : niveau de maîtrise de la langue française accru, « assimilation à la communauté française », respect des principes de la République, limitation des renouvellements de carte de séjour temporaire, etc. Même les arguments les plus utilitaristes, tels que les besoins de main d’œuvre dans les métiers dits en tension, n’auront pas suffi à faire flancher leurs positions.

      Leur acharnement, ainsi que celui du gouvernement, a été sans pareil concernant l’enfermement et l’expulsion des personnes exilées, pourtant déjà largement facilités par le projet de loi initial. L’intervention du juge des libertés et de la détention a ainsi été reculée de deux à quatre jours en rétention, permettant dès lors l’expulsion de personnes sans une décision judiciaire sur la légalité de l’interpellation et le respect des droits. Le texte a sanctuarisé « la double peine », poursuivi le travail de mise à mal des catégories protégées contre les mesures d’expulsion et est même allé jusqu’à mettre fin aux protections contre les obligations de quitter le territoire français. Les demandeurs d’asile pourront eux aussi se retrouver en rétention avant l’enregistrement de leur demande selon ce texte. Malgré une minorité parlementaire soucieuse du respect de la dignité des personnes exilées dans notre pays, l’examen du Sénat a fait sauter des digues que nous pensions jusque-là infranchissables. Loin d’empêcher ce défouloir répressif, le gouvernement l’a tantôt encouragé en déposant lui-même certains amendements déshumanisants, tantôt laissé faire par des mal-nommés avis de « sagesse » qui ont permis un déferlement de restrictions des droits existants.

      Nos associations, collectifs et syndicats ne peuvent se résoudre à ce qu’une partie de la représentation nationale se prête à un acharnement aussi déraisonné que dangereux pour les personnes exilées. Face aux fantasmes auxquels une majorité de sénateurs et sénatrices a donné libre cours, nous appelons les citoyens et citoyennes à se mobiliser et les député·es à un sursaut de lucidité pour que le seul cap à tenir soit celui de l’humanité, de la dignité et de l’égalité des droits.

      https://www.gisti.org/spip.php?article7133