region:afrique noire

  • Bab Sebta
    https://www.nova-cinema.org/prog/2019/170-a-fabrica-de-nada/pedro-pinho-terratreme/article/bab-sebta

    Pedro Pinho, 2008, PT, VO ST ANG, 110’

    Marqués par les images sur-médiatisées de ces grappes humaines d’émigrants d’Afrique noire qui tentent de rejoindre l’Europe, Pedro Pinho et Frederico Lobo en ont pris le contre-pied : prendre le temps de la rencontre, remonter le fil de Tanger à Oujda, de Nouhadibou à Nouakchott, autant de lieux qui voient affluer des personnes voulant franchir cette frontière via Bab Sebta ("la porte de Ceuta" en arabe), une des deux enclaves espagnoles situées au nord du Maroc. S’y croisent, des bateaux très convoités pour aller vers le nord, et d’autres qui ramènent des poissons plutôt que des noyés. De longs moments où l’on s’attache aux parcours de quelques-uns. Les portraits d’hommes et de femmes sont filmés dans leur quotidien, sans pathos, dramatisation ni (...)

  • « La pacification de l’Algérie n’a pas été un long fleuve tranquille, bien au contraire » – Salimsellami’s Blog
    https://salimsellami.wordpress.com/2018/11/07/la-pacification-de-lalgerie-na-pas-ete-un-long-fleuve-tranqu

    Mohsen Abdelmoumen : Vous avez écrit « Coloniser. Exterminer ». D’après vous, l’Algérie a-t-elle été un laboratoire colonial ?

    Dr. Olivier Le Cour Grandmaison : Oui, on peut effectivement considérer que l’Algérie a été une sorte de laboratoire pour l’élaboration d’un certain nombre de techniques de la guerre que l’on peut qualifier de guerre contre-révolutionnaire et de techniques répressives, notamment après la nomination de Bugeaud au poste de gouverneur général de l’Algérie en 1840. La nomination a pour objectif de mener à bien ce que les militaires et les responsables politiques de l’époque nomment déjà « la pacification de l’Algérie » et pour ce faire, le général Bugeaud va employer un certain nombre de méthodes de guerre et de techniques répressives parmi lesquelles les razzias dont il faut préciser qu’elles débouchent parfois sur la destruction de villages et d’oasis entiers, l’objectif étant d’expulser les populations « indigènes », comme on le dit à l’époque, et, comme cela se dit aussi très couramment, de procéder ainsi au refoulement des « Arabes », de les chasser des territoires qu’ils occupaient jusqu’à présent de façon à pouvoir faire en sorte que les Européens en général et les Français en particulier, les colons, puissent s’installer dans un environnement « pacifié ». Par ailleurs, on sait, et c’est parfaitement établi, que le général Bugeaud a également contribué à développer des techniques répressives comme l’internement administratif et la responsabilité collective qui vont être utilisés par la suite sous la IIIe République lors de la construction de l’empire entre 1881 et 1912 et enfin lors de la dernière guerre d’Algérie, à partir du 1er Novembre 1954 et jusqu’en 1962. Des officiers supérieurs de l’armée française vont rendre des hommages tout à fait officiels au général Bugeaud qu’ils considèrent comme un père fondateur des guerres coloniales.

    Je trouve qu’il y a une similitude entre le sort du peuple algérien et celui des Amérindiens. Ne pensez-vous pas que les deux ont subi une extermination d’État ?

    Il faut préciser tout d’abord que jusqu’en 1945, le terme « extermination » n’est pas du tout synonyme de « génocide » qui désigne les massacres de masse. Il est utilisé effectivement par des philosophes écrivains et par des écrivains, je pense en particulier à Tocqueville qui parle en effet d’extermination à propos des Indiens d’Amérique. Je pense à Émile Zola qui parle d’extermination à propos de la Commune de Paris. On peut et on doit d’ailleurs établir un parallèle, ce qui ne veut pas dire forcément que tout est similaire, mais effectivement entre les méthodes de conquête coloniale développées par la France en Algérie et le processus d’expansion de la démocratie américaine à l’Ouest des États-Unis, dans les deux cas en effet, les populations autochtones ont été refoulées, exterminées, c’est-à-dire massacrées en masse et privées de tout ou partie de leur territoire.

    Tous vos ouvrages sont extrêmement intéressants et référentiels. Ainsi, dans votre livre La République impériale, vous évoquez le concept d’impérialisation des institutions. Que pouvez-vous nous dire à propos de ce concept ?

    En ce qui concerne le concept d’impérialisation que j’ai forgé, il s’agissait pour moi de rendre compte des effets de la construction de l’empire sur la IIIe République, donc entre 1881 et 1912, sur les institutions à la fois politiques, académiques, et universitaires de la IIIe République, mais aussi sur les différentes sciences qui ont progressivement émergé et notamment ce qui va assez rapidement s’appeler les sciences dites « coloniales ». On s’aperçoit en effet que précisément parce que la France est devenue très rapidement la seconde puissance impériale du monde, il a fallu mettre en place un certain nombre d’institutions politiques et juridiques en métropole, dont la fonction est de gérer les territoires et les populations de l’empire, et il a fallu également développer un droit particulier, le droit colonial, et développer des sciences singulières et spécifiques, les sciences dites coloniales qui sont doublement coloniales, une première fois parce qu’elles prennent pour objet les colonies et les populations qui y vivent, et une seconde fois parce qu’au fond, ces sciences coloniales ont pour objectif d’aider les responsables de la IIIe République de mener à bien la gestion des populations indigènes, comme on le dit à l’époque.

    Ne pensez-vous pas que le Code de l’indigénat est une aberration ?

    Il faut rappeler que le Code de l’indigénat a été mis en place en 1875 et n’a été véritablement aboli qu’à la Libération, et rappeler que c’est un code qui réunit un certain nombre de dispositions d’exception discriminatoires et racistes. C’est évidemment très important de le préciser puisque ce code, comme son nom l’indique d’ailleurs, n’est appliqué qu’aux seuls indigènes algériens, et plus tard aux seuls indigènes de l’empire. Il faut rappeler aussi que son caractère exceptionnel, les contemporains en étaient parfaitement conscients puisque certains d’entre eux, y compris ceux qui étaient favorables à ce code, ont nommé ce Code de l’indigénat « monstre juridique ». Parce qu’effectivement, il contrevient à tous les principes républicains et à tous les principes démocratiques garantis et établis en métropole mais qui, dans les colonies, sont violés de façon substantielle entre autres par ce Code de l’indigénat et un certain nombre d’autres dispositions d’exception du droit colonial.

    Dans votre livre « De l’indigénat : Anatomie d’un monstre juridique », vous introduisez la notion de racisme d’État. Que pouvez-vous nous dire à propos de ce racisme d’État ?

    En ce qui concerne le racisme d’État, il me paraît parfaitement établi d’une part dans le droit colonial qui est un droit de part en part raciste et discriminatoire, qui repose fondamentalement sur une représentation du genre humain hiérarchisée et sur la thèse – partagée par beaucoup – selon laquelle les peuples et les races inférieurs de l’empire ne sauraient être soumis à des dispositions démocratiques et républicaines équivalentes à celles qui sont établies en métropole. Et par ailleurs, pour revenir au Code de l’indigénat, on est parfaitement en droit et l’on peut considérer que l’un des monuments de ce racisme d’État, c’est évidemment le Code de l’indigénat auquel il faut ajouter le principe de la responsabilité collective appliqué jusqu’à la Libération, ainsi que l’internement administratif et toute une série de dispositions qui, une fois encore, sont des dispositions d’exception qui ont été votées par les parlementaires sous la IIIe République et qui ont perduré jusqu’à la Libération et n’ont été abolies qu’à ce moment-là.

    Vous avez aussi écrit « L’empire des hygiénistes » dans lequel vous dites que même la science était mise au service du colonialisme. Pourquoi les scientifiques et les écrivains nous ont-ils refusé d’être des humains et d’avoir une histoire et une civilisation ?

    Effectivement, pour beaucoup de contemporains de la IIIe République, à la fin du XIXe et au début du XXesiècle, qu’ils soient savants, ethnologues, historiens, responsables politiques, tous ou beaucoup d’entre eux partagent une même conviction qui est la suivante : les Arabes et les musulmans appartiennent certes à une civilisation mais à une civilisation qui est considérée non seulement comme inférieure mais également dangereuse, c’est pourquoi il est impossible de lui appliquer des dispositions institutionnelles, politiques et juridiques, équivalentes à celles qui valent en Europe. C’est pourquoi aussi il est nécessaire d’établir un État colonial que l’on peut et que l’on doit qualifier d’état d’exception permanent avec, évidemment, un certain nombre de dispositions juridiques qui sont cohérentes avec cet état d’exception permanent. Et donc, au cœur de l’ensemble de ces représentations et institutions, il y a cette conviction d’un genre humain hiérarchisé, les Arabes et les musulmans se trouvant dans une position intermédiaire, supérieure à ceux que l’on qualifie de « sauvages » – et l’incarnation la plus emblématique du sauvage à l’époque, c’est le noir – et évidemment inférieur aux Européens qui pensent occuper le sommet de la hiérarchie des races, des peuples, et des civilisations.

    L’Algérie revient souvent dans la sémantique pour désigner « l’ennemi ». D’après vous, la France a-t-elle guéri de son passé colonial ?

    Je ne pense pas que la France soit particulièrement guérie de son passé colonial. J’en veux pour preuve notamment, que comparativement à d’autres anciennes puissances coloniales, c’est vrai pour la Grande-Bretagne, c’est vrai pour l’Allemagne, pour une part aussi des États-Unis, du Canada, de la Nouvelle Zélande et de l’Australie, et relativement au sort indigne qui a été réservé aux populations dites autochtones, la France jusqu’à présent, par la voix des plus hautes autorités de l’État, n’a jamais véritablement reconnu les crimes coloniaux commis en Algérie depuis l’occupation d’Alger en 1830, pas plus d’ailleurs que la France n’a reconnu les crimes coloniaux commis dans l’ensemble des territoires de l’empire sous la IIIe République, et de ce point de vue-là, contrairement à l’image que cherchent à donner les responsables politiques de droite comme de gauche, en ces matières, la France n’est pas à l’avant-garde, elle occupe au contraire le dernier wagon de queue.

    La reconnaissance de l’assassinat de Maurice Audin par l’armée française n’est-elle pas une diversion d’Emmanuel Macron pour ne pas reconnaître la souffrance de tout le peuple algérien ?

    En ce qui concerne la reconnaissance par Emmanuel Macron du sort tragique qui a effectivement été réservé à Maurice Audin, arrêté, torturé, et « disparu » par la faute militaire, il faut dire deux choses : d’une part, pour la famille d’Audin, pour la vérité et la justice, c’est évidemment un pas très important, reste effectivement que l’on peut dire qu’il y a, au-delà de la personne de Maurice Audin, des dizaines de milliers, sans doute, de Maurice Audin algériens, français musulmans d’Algérie, pour lesquels, pour le moment, il n’y a aucune déclaration officielle des plus hautes autorités de l’État. Et d’ailleurs, la déclaration d’Emmanuel Macron est tout à la fois contradictoire et oublieuse. Contradictoire justement parce qu’il qualifie la torture en Algérie de systématique, mais si elle est systématique, alors il faut reconnaître qu’elle a été employée bien plus largement et cela exigerait effectivement une déclaration générale relativement à celles et ceux qui ont été arrêtés de façon arbitraire, torturés et qui sont, jusqu’à ce jour, portés disparus. Par ailleurs, cette déclaration est oublieuse aussi parce qu’à aucun moment celles et ceux qui ont rédigé ce texte, et Emmanuel Macron qui en porte la responsabilité politique, n’ont utilisé cette qualification juridique de « crime contre l’humanité » alors même que nous savons que la disparition forcée est bien un crime contre l’humanité. En ce qui me concerne, je pense qu’il ne s’agit pas d’un oubli, il s’agit d’une volonté tout à fait assumée afin d’éviter d’une part un tollé de la droite et de l’extrême-droite, et sans doute aussi d’éviter des actions contre l’État français dans la mesure où l’une des caractéristiques essentielles du crime contre l’humanité, c’est d’être imprescriptible.

    Dans la même semaine où il reconnait l’assassinat de notre camarade Maurice Audin, Emmanuel Macron rend hommage aux harkis. J’ai parlé un jour avec le général Meyer et je lui ai dit que l’affaire des harkis était une affaire franco-française et il m’a concédé que la France avait abandonné ses soldats, les harkis, n’ayant pas l’intention d’embarquer tout le monde. Pourquoi les responsables politiques français nous sortent-ils les harkis – qui ne concernent que la France puisque ce sont des soldats supplétifs qui ont choisi la France – à chaque fois que l’on parle de l’Algérie ?

    Parce que, fondamentalement, ces affaires de reconnaissance, du point de vue d’Emmanuel Macron et des responsables politiques antérieurs, notamment François Hollande, sont moins un souci de vérité qu’un souci politique visant à plaire à une partie de leur électorat et à ne pas s’aliéner certains électeurs français, d’où cette impression effectivement que le chef de l’État satisfait certains à gauche et satisfait ensuite certains à droite.

    Notamment les Pieds noirs.

    Et ce qui en pâtit à chaque fois, c’est évidemment une reconnaissance plus globale et un souci plus précis et particulier de la vérité historique et de la reconnaissance que cette vérité historique impliquerait.

    C’est-à-dire que la victime de cette instrumentalisation électoraliste est la vérité historique ?

    C’est à la fois la vérité historique et à la fois celles et ceux qui ont été victimes des violences coloniales, leurs descendants et les héritiers de l’immigration coloniale et postcoloniale qui sont bien forcés de constater une fois encore qu’ils sont victimes d’une discrimination mémorielle et commémorielle.

    Vous êtes président de l’association 17 Octobre 1961 contre l’oubli, pensez-vous que cette date est connue du peuple français ?

    Cette date commence à être connue plus largement en effet grâce à la mobilisation de très nombreuses associations de partis politiques et d’organisations syndicales qui, à chaque date anniversaire, le 17 octobre, et encore il y a quelques jours le 17 octobre 2018, se réunissent au Pont St Michel, mais il y a également des rassemblements dans plusieurs villes de banlieue et en province qui ne se contentent pas de commémorer mais d’exiger que des reconnaissances soient faites, d’exiger aussi l’ouverture des archives, exiger enfin la construction d’un lieu de mémoire à la mémoire de ceux qui ont été arrêtés, massacrés, torturés et assassinés le 17 octobre 1961, dans les jours précédents et dans les jours qui ont suivi cette date sinistre, ce qui fait qu’effectivement, une partie de l’opinion publique sait ce qui a été perpétré à l’époque par la police française qui agissait sous les ordres du préfet de police de l’époque Maurice Papon.

    Je n’ai jamais compris pourquoi on nous appelait « les musulmans » au lieu de dire « les Algériens ». Pourquoi la France coloniale nous a-t-elle refusé notre algérianité et nous renvoyait-elle vers une confession ?

    Pour des raisons, me semble-t-il, qui ne sont pas forcément simples mais qui sont aisées à comprendre. Qualifier les populations indigènes et les populations autochtones d’Algériens, comme on l’a vu après 1945, entraînait quasiment immédiatement la reconnaissance du peuple algérien. C’est exactement ce que les responsables de la IVe République, qu’ils soient de gauche ou de droite, ne voulaient pas, d’où effectivement l’appellation tout à fait singulière de « Français musulmans d’Algérie », d’autant plus singulière sous la IVeRépublique que celle-ci venait de rappeler qu’elle condamnait toute discrimination de quelque origine que ce soit, or, à l’évidence, l’appellation « Français musulmans d’Algérie » visait à distinguer au sein de celles et ceux qui vivaient en Algérie, une catégorie particulière, de la distinguer des Français venus de métropole et, au fond, de constituer ces Français musulmans d’Algérie comme un corps spécifique d’exception sur lequel va s’appliquer, après le déclenchement de la Guerre d’Algérie, de nouveau, hélas, des dispositions et des principes d’exception, dispositions juridiques et pratiques d’exceptions relatives à la guerre et contre-révolutionnaires.

    Nous sommes là, je pense, au cœur du concept « racisme d’État ».

    C’est l’une des manifestations, effectivement, du racisme d’État et qui va perdurer sous la IVe et sous la VeRépublique au moins jusqu’à 1962.

    Le colonialisme n’est-il pas une aberration ?

    Ce jugement peut être porté de façon rétrospective sans doute, mais du point de vue des contemporains, le colonialisme n’était pas du tout pour eux une aberration, c’était au contraire un moyen absolument essentiel, et notamment pour les fondateurs de la IIIe République et pour la France en particulier, de rétablir la France comme grande puissance européenne parce que grande puissance coloniale et, pour eux, il s’agissait donc d’une entreprise à laquelle ils accordaient la plus grande importance parce qu’ils étaient convaincus que c’était la seule façon d’éviter une décadence à la fois économique, sociale, politique, de la France, comparativement aux autres États européens et de cela, ils étaient extrêmement fiers puisque ce sont les républicains qui ont permis à la France de devenir la seconde puissance impériale du monde. Et donc, d’un point de vue économique, politique, et géopolitique, pour eux et à leurs yeux, ce n’était absolument pas une aberration mais une nécessité nationale, internationale et géopolitique.

    D’après vous, pourquoi le mensonge est-il structurel dans l’histoire coloniale ?

    Il l’est en partie parce qu’un certain nombre de dispositions juridiques et de dispositions répressives, de techniques de répression et de techniques de guerre sont évidemment absolument contraires aux principes républicains et aux principes démocratiques. D’où la nécessité, pour éventuellement occulter ces contradictions, de forger un grand récit impérial républicain qui est évidemment un grand récit mythologique et, dans les cas les plus graves, de forger ce qu’il faut effectivement appeler un véritable mensonge d’État. Je pense à deux événements particulièrement terribles : les massacres du 8 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata et, évidemment, même si les massacres sont beaucoup moins importants, au massacre du 17 octobre 1961 pour lequel va être forgé, effectivement, ce qu’il faut bien appeler un véritable mensonge d’État tendant à accréditer l’idée que ce sont les manifestants pacifiques appelés par le FLN qui portent la responsabilité des morts et à minimiser de façon très spectaculaire le nombre de morts algériens à l’époque, par conséquent, à minimiser aussi la responsabilité de l’État en général et de Maurice Papon en particulier.

    À propos de Maurice Papon, ne pensez-vous pas qu’il est un criminel contre l’humanité ?

    Il faut tout d’abord rappeler que Maurice Papon a effectivement été condamné pour complicité de crimes et de génocide en raison de ses responsabilités pendant la période de Vichy. Relativement au 17 octobre 1961, il faut rappeler et ce sera une façon de lui rendre hommage, qu’un certain nombre d’avocats et notamment Maître Nicole Dreyfus considéraient que les massacres du 17 octobre 1961 étaient constitués d’un crime contre l’humanité et qu’à ce titre, Maurice Papon portait une responsabilité politique, policière et personnelle écrasante et qu’on était en droit effectivement de considérer qu’il avait commis là un crime contre l’humanité.

    La responsabilité de François Mitterrand est aussi établie, notamment dans l’affaire Fernand Iveton, notre camarade qui a été guillotiné. Mitterrand était Ministre de la Justice à l’époque et a refusé sa grâce. N’est-ce pas toute l’administration française qui est impliquée dans la politique répressive ?

    En ce qui concerne le 17 octobre 1961, Mitterrand n’est pas aux affaires. Ceux qui sont impliqués sont le ministre de l’Intérieur Roger Frey, le Premier ministre Michel Debré, mais, vous avez raison, je n’oublie pas les responsabilités de François Mitterrand en tant que ministre sous la IVe République, et qui a déclaré que la France s’étendait de Dunkerque à Tamanrasset et, effectivement, sa responsabilité dans l’exécution d’un certain nombre de militants du FLN et, comme vous l’avez cité précédemment, de Fernand Iveton.

    Aujourd’hui, l’Algérie fait face comme certains autres pays, à un néocolonialisme déchaîné ; je pense à l’attaque de l’OTAN sur la Libye, de la déstabilisation de la Syrie, etc. D’après vous, toutes ces guerres ne sont-elles pas une continuation des guerres coloniales ?

    Il y a effectivement des phénomènes de continuité entre le passé colonial de la France et un certain nombre de ses interventions militaires actuelles assurément, mais il y a aussi des phénomènes de discontinuité et dans un certain nombre d’États africains et anciennes colonies françaises, qui se trouvent dans un état économique, social et financier absolument catastrophique, on ne peut pas exempter les responsables de ces États de leurs responsabilités. Ils portent une responsabilité première et on pourrait ajouter que la France est souvent complice de l’état dans lequel se trouvent ces pays.

    Il y a un courant révisionniste sur les deux rives de la Méditerranée, en France et en Algérie, qui veut blanchir le colonialisme. Ne pensez-vous pas que ces personnalités qui ont pignon sur rue poursuivent l’œuvre de nombreux intellectuels tels que Victor Hugo, par exemple, en prétendant que le colonialisme était un bienfait ? Comment expliquez-vous le retour du révisionnisme en Algérie et en France ?

    Pour ce qui est de la France, il faut rappeler que cette offensive du révisionnisme de l’histoire coloniale débute notamment avec la loi du 23 février 2005, qui est une entreprise politique et juridique de réhabilitation sans précédent du passé colonial français, et rappeler que contrairement à ce que beaucoup pensent encore aujourd’hui, cette loi n’a toujours pas été abrogée et donc, on est en droit de considérer que cette loi est une loi scélérate parce qu’elle porte atteinte à des droits et à des principes démocratiques élémentaires et notamment un principe démocratique élémentaire qui est que l’État, quelle que soit sa nature et à fortiori si c’est un État qui se dit démocratique, ne peut pas et ne doit pas intervenir dans l’Histoire et moins encore chercher à établir une version officielle de l’Histoire en général et de l’histoire coloniale en particulier.

    Que signifie pour vous les insurrections de l’émir Abdelkader, des Bouamama, des Mokrani, etc. et de mes ancêtres, les Abdelmoumen, qui ont tenu le siège de Constantine en 1830 ?

    Contrairement au discours officiel des responsables politiques de l’époque et des militaires, la pacification de l’Algérie n’a pas été un long fleuve tranquille, bien au contraire, puisque, effectivement, les autorités politiques et militaires françaises n’ont pas cessé de se heurter à des résistances, des insurrections, qui prouvent que, contrairement à ce qui est dit parfois, ceux qu’on appelait à l’époque « les indigènes » avec beaucoup de mépris n’étaient pas du tout résignés mais ont cherché, à chaque fois que cela était possible et en dépit des risques qu’ils encourraient pour leur liberté et pour leur vie, à s’opposer à l’entreprise impériale et coloniale française.

    Que signifie pour vous la Révolution algérienne du 1er Novembre 1954 ?

    Cela signifie très clairement que les dirigeants de l’époque ayant acquis la conviction parfaitement établie et légitime que le colonialisme français en Algérie ne céderait pas d’un pouce par la voie pacifique et la voie des négociations, et qu’il était nécessaire de combattre ce colonialisme par la force des armes afin de faire triompher ce qui est pourtant acquis pour cette même république mais refusé aux Algériens, à savoir le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

    Comment expliquez-vous que des résistants au nazisme pendant la guerre 39-45 aient pu commettre, pour certains d’entre eux, les crimes du 8 mai 1945, qu’ils soient de gauche ou de droite ?

    C’est effectivement assez difficile à comprendre aujourd’hui, ceux qui avaient pris les armes contre l’occupant ne considéraient pas moins que pour défendre la France, son autorité européenne et son autorité internationale, il fallait défendre coûte que coûte l’empire colonial français en général et l’Algérie française en particulier. Ce qui permet effectivement de comprendre pourquoi des forces de droite comme de gauche, parti communiste compris, se sont engagées pour défendre l’empire au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, parce que, encore une fois, par la défense de l’empire, il s’agissait de rétablir la France comme grande puissance européenne et mondiale et de rétablir la France dans le camp des vainqueurs.

    La France d’aujourd’hui ne doit-elle pas cesser de soutenir des régimes africains, y compris le pouvoir algérien, pour ses propres intérêts même si cela va à l’encontre de l’intérêt des peuples ?

    Il me semble relativement clair que dans un certain nombre de cas d’anciennes colonies françaises dirigées par des dictateurs ou des régimes autoritaires, la France porte encore aujourd’hui une responsabilité écrasante ne serait-ce que parce que, pour des raisons géopolitiques, économiques, financières, militaires, la France soutient effectivement ces régimes et, une fois encore, se moque des intérêts des peuples concernés.

    Est-ce une continuité de son passé colonial ou est-ce juste par intérêt géopolitique et économique ?

    Je pense qu’il y a des deux en ce sens que la France entretient des relations privilégiées avec un certain nombre d’États au Maghreb et en Afrique noire subsaharienne parce que ce sont des anciennes colonies et donc évidemment ce passé est un passé qui pèse sur les relations franco-africaines, pour le dire très largement, et par ailleurs, il y a aussi des enjeux géopolitiques, économiques, financiers et militaires qui déterminent le maintien de ces relations et le soutien appuyé, y compris militaire, à des régimes notoirement autoritaires et notoirement dictatoriaux.

    Vous êtes un intellectuel engagé et un Juste, je tiens à le préciser, et un porteur de lumière. Ne pensez-vous pas que votre engagement doit être un modèle pour les jeunes générations ? Ne doivent-ils pas s’inspirer des parcours comme le vôtre ?

    Je me garderais bien de conclure en ce sens. Chaque génération doit affronter les problèmes qui sont les siens avec les instruments intellectuels et politiques à sa disposition.

    Avez-vous connu des pressions dans votre travail ?

    Je n’ai eu aucune pression quelconque en ce qui concerne l’élaboration, la rédaction et la publication des ouvrages qui sont les miens.

    En tant qu’anticolonialiste, que pouvez-vous dire à tous les résistants anticolonialistes et anti-impérialistes qui résistent dans le monde ?

    Que la lutte continue pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes contre les dictatures et les régimes autoritaires quels qu’ils soient et pour l’émancipation et contre l’exploitation.

    Interview réalisée par Mohsen Abdelmoumen

    Qui est le Dr. Olivier Le Cour Grandmaison ?

    Olivier Le Cour Grandmaison est un politologue et historien français spécialiste des questions de citoyenneté sous la Révolution française et des questions qui ont trait à l’histoire coloniale. Il est professeur de sciences politiques à l’Université d’Évry-Val d’Essonne et a dirigé et animé plusieurs séminaires au Collège international de philosophie.

    Il est président de l’association « 17 octobre 1961 : contre l’oubli » qui préconise la reconnaissance officielle des crimes commis par la Ve République lors du massacre des manifestants pacifiques algériens le 17 octobre 1961 à Paris.

    Il est aussi juge-assesseur désigné par le Haut Commissariat aux réfugiés de l’ONU (HCR), à la cour nationale du droit d’asile (CNDA). Par ailleurs, il appartient au comité de soutien de l’Association Primo Levi à Paris qui est un centre de soins et de soutien aux personnes victimes de la torture et de la violence politique.

    Le Dr. Le Cour Grandmaison est l’auteur de plusieurs ouvrages parmi lesquels « Les Citoyennetés en Révolution (1789-1794) », Paris, PUF, 1992 ; « Les Constitutions françaises », Paris, La Découverte, 1996, « Haine(s) : Philosophie et politique », avant-propos d’Étienne Balibar, Paris, PUF, 2002 ; « Coloniser, exterminer. Sur la guerre et l’État colonial », Paris, Fayard, 2005 (édité en arabe en 2007, Algérie) ; « Le Retour des camps ? Sangatte, Lampedusa, Guantanamo » avec G. Lhuilier et J. Valluy, Autrement, 2007 ; « La République impériale : politique et racisme d’État », Paris, Fayard, 2009 (édité en arabe en 2009, Algérie) ; « Douce France. Rafles, rétentions, expulsions », collectif, Le Seuil/Resf, 2009 ; « De l’indigénat. Anatomie d’un « monstre » juridique : le droit colonial en Algérie et dans l’empire français », Paris, Zones/La Découverte, 2010 (édité en arabe) ; « L’Empire des hygiénistes. Vivre aux colonies », Paris, Fayard, 2014.

     » » https://mohsenabdelmoumen.wordpress.com/2018/10/28/dr-olivier-le-cour-
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    https://www.legrandsoir.info/la-pacification-de-l-algerie-n-a-pas-ete-un-long-fleuve-tranquille-bie

  • Pourquoi George Soros et sa fondation quittent la Hongrie

    https://www.franceinter.fr/monde/pourquoi-george-soros-et-sa-fondation-quittent-la-hongrie

    George Soros, en 2017 à Bruxelles © AFP / Olivier Hoslet / POOL

    Le milliardaire américain d’origine hongroise George Soros a annoncé mardi qu’il suspendait les activités de sa fondation destinée à mener des programmes d’enseignement pour les réfugiés. La fondation déménage également ses locaux de Budapest à Berlin.

    La fondation de #Georges_Soros ne donnera plus de cours aux réfugiés hongrois : mardi, l’Université d’Europe centrale (CEU), implantée à Budapest, a annoncé qu’elle ne reconduisait pas ses modules d’enseignement destinés aux réfugiés, ni ses activités de bourses de recherche financées par l’UE sur les politiques migratoires.

    « Nous suspendons ces programmes dans l’attente d’une clarification de notre situation fiscale et juridique », explique un communiqué de l’organisation. En cause, une taxe de 25% sur les organisations qui « soutiennent l’immigration ». Adoptée en juin dans le cadre d’un ensemble de lois anti-immigration, elle entre en vigueur ce vendredi.

    #hongrie #berlin #réfugiés

    • @aude_v Soros est avant tout un pillard monstrueux à la tête d’un gang de financiers de haut vol, qui pour s’enrichir détruisent les systèmes sociaux de pays entiers (dont 50 % des habitant.e.s sont des femmes), n’oublions pas les enfants.
      .
      Ses ong servent avant tout ses intérêts, qui paye commande.

      On remarquera qu’elles ont réussi à faire élire Victor Orban.
      (Aux USA, Hillary Clinton a bien réussi à faire la courte échelle pour mettre Donald Trump au pouvoir).

      La société hongroise a toujours été tolérante pour ce qui est de l’homosexualité, voir les bains publics de Budapest.

      Dans les campagnes une pauvreté sans nom, pour ce pays qui n’arrive plus à produire lui même ses pommes de terres.

    • Comment penser que Soros investirai un centime, dans une ONG qui ne lui rapporterai pas beaucoup plus.

      Personnellement, après avoir lu pas mal de choses sur les ONG et leurs résultats, je pense qu’elles remplacent les missionnaires.
      Pour beaucoup, de belles et généreuse promesses, mais quand on regarde ce qu’elles font vraiment, et qui les finance, on y croit plus.
      Il y a de belles paroles, parfois des actes trés généreux, mais dans la réalité . . .

      Exemple d’acte généreux, pour les missionnaires : Ils ont sauvé pas mal d’indiens d’Amérique du Sud au moment de la colonisation espagnoles, Las Casas a fait ce qu’il a pu, pour eux, et l’intérêt de l’église catholique.
      A la même époque, l’Afrique Noire, une mine de bois d’ébène, complètement ignorée des missionnaires.

      WWF :
      https://seenthis.net/messages/718609
      https://seenthis.net/messages/602953
      https://seenthis.net/messages/571110

      Mais pas que : Amnesty International , Journée internationale des disparus.
      https://www.legrandsoir.info/courrier-au-service-de-presse-d-amnesty-international-section-francais
      . . . . .

      S’agissant de l’Amérique latine, on pourrait à juste titre s’étonner de l’absence de la #Colombie, mais, vu la modestie des chiffres, je ne vais pas pinailler ici sur les 45 000 victimes de cette pratique depuis 1985 (d’après la Unidad de Victimas), dont de nombreuses pendant la présence au pouvoir de la faction politique qui vient de revenir à la présidence en la personne de M. Ivan Duque.

      j’ai été très surpris par la prestation, ce matin 1er septembre, au journal de 8 heures de France Culture, présenté par Sophie Delton, de Mme Geneviève Garrigos, qui se présente comme la "porte-parole" d’AI. Sans référence particulière aux communiqués d’AI précédemment cités, elle s’est concentrée sur quatre pays, dont la Corée du Nord et la Syrie, mais a surtout passé la majeure partie de son intervention à dénoncer de façon extravagante « la politique de terreur imposée à l’opposition » à travers les « disparitions » au… Venezuela et au Nicaragua.
      . . . . .

      Par ailleurs, j’ai rencontré des volontaires ayant travaillé pour des ONG en Afrique, elles(ils) sont rentrés démolis par le comportement des dirigeants d’ONG.
      Marqué(e)s à vie.

      La plupart des ONG font un sale travail.

      à part cela Aude, merci pour le ton modéré de ton commentaire

    • Avec un peu de retard : Je voulais parler de mon expérience à la CEU, cette rentrée était chahutée et je n’ai pas eu le temps. Donc rapidement avant de revenir sur le sujet.

      J’ai travaillé sur des projets en coopération très étroite avec les département environnement et géographie de la CEU entre 1995 et 2002, en particulier avec un remarquable prof qui s’appelle Ruben Mnatsakanian. je voulais juste rappeler que la CEU a été un lieu de recherche et de réflexion important sur l’espace post soviétique et les pays ex-socialiste, une formidable opportunité pour des centaines voire des milliers d’étudiantes et d’étudiants d’Asie centrale, du Caucase, des pays de l’Est, d’Ukraine, de Russie, etc... qui sans les programmes de la CEU n’auraient jamais eu les moyens financier d’étudier dans leurs pays. La sélection des dossiers se faisait de manière très sérieuse et transparente. Ruben se déplaçait dans tous les pays pour mener les entretiens, longuement rencontrer les candidats, ensuite les décisions étaient prises de manière collégiales, après de longues discussions, jamais à la légère et surtout sans aucune considération pour les origines sociales ou la « richesse » supposées des candidats... La formation était excellente et je garde encore aujourd’hui - 20 ans après - de très bonnes relations de travail avec certain·es de ces étudiant·es. La nébuleuse des organisations et ong soutenues par Soros, c’est autre chose et je ne préjuge pas ici de ses intentions ou de ses crapuleries, j’ai juste expérimenté en live à quel point cette université a été importante pour toute une génération d’étudiant·es, et plus récemment de réfugiés et migrants qui avaient accès à l’enseignement supérieur.

      Le reste plus tard.

  • La dette, l’arme française de la conquête de la Tunisie Éric Toussaint - 7 juillet 2016 - Orient XXI
    https://orientxxi.info/magazine/la-dette-l-arme-qui-a-permis-a-la-france-de-s-approprier-la-tunisie,1395

    Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, la Tunisie a expérimenté à son détriment le mécanisme de la dette extérieure comme instrument de domination et d’aliénation de la souveraineté d’un État. Livrée pieds et poings liés à ses créanciers extérieurs, la régence de Tunis perdra son autonomie pour devenir un protectorat français.


    Avant 1881, date de sa conquête par la France qui la transforme en protectorat, la régence de Tunis, province de l’empire ottoman, disposait d’une importante autonomie sous l’autorité d’un bey. Jusqu’en 1863, elle n’emprunte pas à l’étranger : la production agricole assure bon an mal an l’indépendance alimentaire du pays. Mais avec l’accession au trône de Mohammed el-Sadik Bey (Sadok Bey) en 1859, l’influence des puissances européennes, en particulier de leurs banquiers, grandit. Le premier emprunt de la Tunisie à l’étranger cette année-là constituera une véritable arnaque qui débouchera dix-huit ans plus tard sur la conquête de la Tunisie par la France.

    Les banquiers parisiens, comme leurs collègues londoniens, disposent de liquidités abondantes et cherchent des placements à l’étranger plus rémunérateurs que chez eux. Quand, début 1863, le bey fait savoir qu’il souhaite emprunter 25 millions de francs, plusieurs banquiers et courtiers de Londres et de Paris proposent leurs services. Finalement, c’est Émile Erlanger qui emporte le « contrat ». Selon le consul britannique, il lui aurait proposé 500 000 francs afin d’obtenir son soutien. Erlanger, associé à d’autres, obtient également l’autorisation du gouvernement français de vendre à la bourse de Paris des titres tunisiens.

    Une escroquerie à grande échelle
    Selon un rapport établi en 1872-1873 par Victor Villet, un inspecteur français des finances, l’emprunt est une pure escroquerie. D’après le banquier Erlanger, 78 692 obligations tunisiennes sont émises, chacune d’une valeur nominale de 500 francs. L’emprunteur (la Tunisie) doit recevoir environ 37,7 millions de francs (78 692 obligations vendues à 480 francs, soit 37,77 millions) et rembourser à terme 65,1 millions. Selon l’enquête de Villet, Erlanger a prélevé un peu plus de 5 millions de francs de commission (soit environ 13 % du total), plus 2,7 millions détournés, certainement par le premier ministre du bey et le banquier. Donc, pour disposer de 30 millions, le gouvernement tunisien s’engage à rembourser plus du double (65,1 millions).

    Cet emprunt extérieur doit servir à restructurer la dette interne évaluée à l’équivalent de 30 millions de francs français. Il s’agit concrètement de rembourser les bons du trésor beylical ou « teskérés », ce qui est fait, mais les autorités en émettent de nouveau pour un montant équivalent. Victor Villet raconte : « En même temps que dans les bureaux du représentant de la maison Erlanger à Tunis on remboursait les anciens titres..., un courtier du gouvernement (M. Guttierez) installé dans le voisinage reprenait du public l’argent que celui-ci venait de recevoir, en échange de nouveaux teskérés émis au taux de 91 %. À la faveur de cette comédie de remboursement, la dette se trouva simplement... augmentée de 15 millions à peu près ».

    En moins d’un an, l’emprunt est dilapidé. Dans le même temps, l’État se retrouve, pour la première fois de son histoire, endetté vis-à-vis de l’étranger pour un montant très élevé. La dette interne qui aurait dû être remboursée par l’emprunt extérieur a été multipliée par deux. Le bey choisit, sous la pression de ses créanciers, de transférer la facture vers le peuple en augmentant de 100 % la mejba, l’impôt personnel.

    Des profits juteux grâce aux « valeurs à turban »
    La mesure provoque en 1864 une rébellion générale. Les insurgés accusent le gouvernement d’avoir vendu le pays aux Français. Le bey tente par la force d’extorquer un maximum d’impôts et d’amendes à la population. Son échec l’oblige à monter avec le banquier Erlanger un nouvel emprunt en mars 1865 d’un montant de 36,78 millions de francs à des conditions encore plus mauvaises et scandaleuses qu’en 1863. Cette fois, un titre de 500 francs vendu 480 francs en 1863 ne l’est plus qu’à 380 francs, à peine 76 % de sa valeur faciale. Résultat, l’emprunteur s’endette pour 36,78 millions, cependant il ne reçoit qu’un peu moins de 20 millions. Les frais de courtage et les commissions prélevées par le banquier Erlanger et ses associés Morpurgo-Oppenheim s’élèvent à 18 %, plus près de 3 millions détournés directement par moitié par les banquiers et par moitié par le premier ministre et ses associés. La somme à rembourser en 15 ans s’élève à 75,4 millions de francs.

    Les banquiers ont réalisé une très bonne affaire : ils ont prélevé à l’émission environ 6,5 millions de francs sous forme de commissions, de frais de courtage et de vol pur et simple. Tous les titres ont été vendus en quelques jours. Il règne à Paris une euphorie à propos des titres des pays musulmans (Tunisie, empire ottoman, Égypte), désignés comme les « valeurs à turban », les banquiers payant la presse pour publier des informations rassurantes sur les réalités locales.

    À la merci des créanciers
    Les nouvelles dettes accumulées au cours des années 1863-1865 mettent la Tunisie à la merci de ses créanciers extérieurs ainsi que de la France. Il lui est tout simplement impossible de rembourser les échéances. L’année 1867 est une très mauvaise année agricole. Pressé de se procurer des devises, le bey privilégie l’exportation des produits agricoles au détriment du marché intérieur, avec à la clef d’abord la disette dans plusieurs provinces de la régence, puis une épidémie de choléra.

    En avril 1868, sous la dictée des représentants de la France, le bey établit la Commission internationale financière. Le texte du décret du 5 juillet 1869 constitue un véritable acte de soumission aux créanciers. L’article 9, particulièrement important, indique très clairement que la Commission percevra tous les revenus de l’État sans exception. L’article 10, décisif pour les banquiers, prévoit qu’ils y auront deux représentants. L’une des tâches principales de la commission — la plus urgente — est de restructurer la dette. Aucune réduction de dette n’est accordée à la Tunisie. Au contraire, les banquiers obtiennent qu’elle soit portée à 125 millions de francs. C’est une victoire totale pour ces derniers, représentés par les délégués d’Alphonse Pinard et d’Émile Erlanger qui ont racheté en bourse des obligations de 1863 ou de 1865 à 135 ou 150 francs. Ils obtiennent grâce à la restructuration de 1870 un échange de titres quasiment au prix de 500 francs.

    Les autorités tunisiennes sont complices de ce pillage. Le premier ministre Mustapha Khaznadar, d’autres dignitaires du régime — sans oublier d’autres Tunisiens fortunés qui détenaient également des titres de la dette interne —font d’énormes profits lors de la restructuration.

    Indemnisés et largement satisfaits, Pinard et Erlanger se retirent alors de Tunisie. Émile Erlanger construit un empire financier, notamment grâce à ses opérations tunisiennes, met la main sur le Crédit mobilier de Paris et, quelques années plus tard, sur la grande agence de presse Havas. De son côté, Alphonse Pinard poursuit ses activités en France et dans le monde, participe à la création de la Société générale (l’une des trois principales banques françaises aujourd’hui) ainsi qu’à une autre banque qui s’est transformée au cours du temps en BNP Paribas (la principale banque française actuelle).

    Mise sous tutelle
    Depuis la conquête de l’Algérie à partir de 1830, Paris considère que la France a plus qu’un droit de regard sur la Tunisie. Encore faut-il trouver le prétexte et le moment opportun. Dans la région, l’Égypte a la priorité pour des raisons géostratégiques : la possibilité d’avoir un accès direct à l’Asie avec l’ouverture du canal de Suez entre la Méditerranée et la mer Rouge en 1869 ; l’accès à l’Afrique noire par le Nil ; la proximité de l’Orient par voie terrestre ; le potentiel agricole de l’Égypte ; la concurrence entre le Royaume-Uni et la France (celui des deux pays qui contrôlera l’Égypte aura un avantage stratégique sur l’autre).

    Lors du Congrès de Berlin en juin 1878 qui partage l’Afrique, tant l’Allemagne que l’Angleterre abandonnent à la France la Tunisie — qui ne présente aucun attrait pour l’Allemagne. Pour le chancelier allemand Otto von Bismarck, si la France se concentre sur la conquête de la Tunisie avec son accord, elle sera moins encline à récupérer l’Alsace-Lorraine. Le Royaume-Uni, qui donne la priorité à la Méditerranée orientale (Chypre, Égypte, Syrie…), voit aussi d’un bon œil que la France soit occupée à l’ouest en Tunisie.

    La diplomatie française n’a de cesse de provoquer un incident ou de trouver un prétexte qui justifie une intervention de la France. Le conflit entre la tribu algérienne des Ouled Nahd et les Kroumirs tunisiens est l’occasion de lancer une intervention militaire française de grande ampleur. Vingt-quatre mille soldats sont envoyés contre les Kroumirs. Le traité du 12 mai 1881 signé entre le bey de Tunis et le gouvernement français instaure un protectorat français en Tunisie. La leçon ne doit pas être oubliée.
    #Éric_Toussaint

    #Tunisie #dette #havas #Émile_Erlanger #diplomatie #Alphonse_Pinard #BNP_Paribas #banquiers #bourse

  • Une plongée dans l’Afrique antique
    https://lejournal.cnrs.fr/diaporamas/une-plongee-dans-lafrique-antique

    Le site archéologique de Sedeinga, dans le nord du Soudan, offre un témoignage inédit des rites funéraires des royaumes de Napata et de Méroé qui régnèrent sur cette région du VIIe siècle avant notre ère jusqu’au IVe siècle. Depuis près de dix ans, une équipe internationale dirigée par des chercheurs du CNRS et de Sorbonne Université en fouille la nécropole. Les dernières campagnes ont permis de mettre au jour l’une des plus riches collections de textes en méroïtique, la plus ancienne langue connue d’Afrique noire.

  • #metoo : le long calvaire des employées d’une entreprise de nettoyage sous-traitante de la SNCF | Slate.fr
    http://www.slate.fr/story/153986/metoo-cris-de-detresse

    Vous avez peut-être déjà pris le train et râlé devant la saleté des toilettes. Et puis, après l’arrivée en gare, vous n’y avez plus pensé. Pendant que vous traversiez le hall, une femme est montée dans le train pour nettoyer ces toilettes répugnantes. Elle n’a pas beaucoup de temps, la cadence de nettoyage est élevée, les produits qu’elle doit manipuler souvent toxiques. Si votre train était à Paris Gare du Nord, la femme qui s’est occupée de nettoyer les jets d’urine parce que pisser dans un train en marche est parfois une opération délicate, ne supportait pas seulement un boulot pénible et socialement ingrat, en prime, pendant qu’elle était penchée sur la cuvette des toilettes, son chef d’équipe l’a peut-être coincée en collant son sexe contre ses fesses pour mimer un acte sexuel.

    Ce n’était ni la première ni la dernière fois. Il lui a aussi attrapé la main pour y fourrer son doigt sur lequel il avait craché afin de simuler un coït. Il y a eu des agressions sexuelles dans les toilettes, porte fermée. Une autre s’est fait embrasser dans le cou. Les mains aux fesses. Les mains sur les seins

    C’est ce qu’ont vécu des employées d’une entreprise de nettoyage, sous-traitante de la SNCF. Pendant longtemps, elles n’ont rien dit parce qu’« on ne savait même pas ce que c’était le harcèlement sexuel. On croyait que c’était plus grave, que c’était forcer à des relations sexuelles ». En 2012, elles sont quatre à parler. Les autres préfèrent se taire.
    « Les femmes de nettoyage, c’est toutes des putes »

    Comme l’explique un excellent article de Mediapart, dans cette entreprise de nettoyage « la hiérarchie est à la fois sexuelle et ethnique ». Aux hommes, le nettoyage des tablettes et l’aspirateur, aux femmes originaires du Maghreb les tâches plus ingrates et aux femmes originaires d’Afrique noire les boulots les plus ingrats parmi les plus ingrats. Ces femmes-là, bien qu’elles aient raconté à l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) ce qu’elles enduraient, n’ont pas porté plainte.

    Au final, elles sont quatre à oser dénoncer les deux chefs d’équipe qui les harcèlent. Elles parlent à leur direction de ces hommes qui clament haut et fort que « les femmes de nettoyage, c’est toutes des putes ». La plus âgée a 59 ans. Elle craint qu’à son âge, on ne croit pas son histoire de harcèlement sexuel (les harceleurs ont 39 et 44 ans). Mais à plusieurs, elles sont plus fortes. Espèrent-elles… Sauf que la direction s’en fout. (Le directeur évoquera « des blagues un peu salaces ».) L’enquête interne ne donne rien. Les hommes mis en cause restent à leurs postes.
    Et comme ils sont délégués syndicaux Sud, elles se retrouvent dans une situation professionnelle où leurs patrons ne les écoutent pas et ceux qui devraient les aider sont précisément leurs harceleurs. Pire, quelques semaines plus tard, l’une d’entre elle est convoquée pour un entretien en vue d’une sanction disciplinaire. Dans les mois suivants, elles subiront des brimades, des signalements, des sanctions et même pour deux d’entre elles des licenciements. Elles portent plainte aux prud’hommes. En 2015, l’affaire passe devant le tribunal. Fait exceptionnel, le défenseur des droits mène une enquête approfondie, qui valide les témoignages des plaignantes et qui est remise aux juges.
    Aux origines du #metoo

    Le 10 novembre dernier, les juges ont rendu leur verdict. Les plaignantes ont gagné. (L’affaire n’est cependant pas terminée puisqu’elles ont également porté plainte au pénal pour harcèlement sexuel.) Mais même si elles ont gagné, ce n’est pas une belle histoire. C’est une histoire sordide, ce sont des années de galère au milieu de la galère du quotidien.

    C’est aussi un exemple des « metoo » qu’on n’entend pas. Vous saviez que le #metoo existait depuis dix ans ? Il a été lancé par Tarana Burke et il s’adressait avant tout aux jeunes femmes « de couleur ». À l’époque, on n’en pas entendu parler. C’est bien évident qu’il fallait que des stars –majoritairement blanches– s’en emparent pour que cela existe. On sait que le système fonctionne comme ça mais il est toujours utile de le rappeler.

    Et puis, il y a toutes ces femmes qui n’écriront jamais sur internet ce qu’elles vivent. Et qui, du coup, n’existent pas dans l’espace médiatique. Quand on est une femme, non-blanche, sans diplôme, mère célibataire, pauvre, qu’on se trouve tout en bas de la hiérarchie sociale, si bas qu’on nous voit à peine, si bas qu’on peut s’amuser à nous écraser un peu plus et qu’il faut encaisser.

    Je ne veux pas relativiser le mouvement actuel de libération de la parole des femmes. J’aimerais seulement qu’on n’oublie pas que ce mouvement ne concerne, pas encore, toutes les femmes. Parce que ces femmes sont invisibles. Littéralement. Ces employées et employés du nettoyage travaillent avec des horaires décalés pour précisément qu’on ne les voit pas. C’est quand il fait nuit qu’elles et ils viennent nettoyer les bureaux, les lieux publics.

    Le féminisme est une lutte pour l’égalité. Il se trahirait s’il oubliait des femmes et les laissait sur le côté. C’est pour ça qu’il faut aussi parler d’elles, donner de la lumière aux luttes comme celles qu’ont menées ces employées.

  • TV : « Jean Rouch, cinéaste aventurier »
    http://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2017/08/23/tv-jean-rouch-cineaste-aventurier_5175687_1655027.html

    Si l’on s’intéresse à Jean Rouch et à son cinéma, il est impossible d’ignorer que l’on célèbre le centenaire de sa naissance, le 31 mai 1917, à force de rééditions, en salle et en DVD, de rencontres et d’expositions. On croule sous une matière connue ou inédite (la Mostra de Venise s’apprête à présenter Jean Rouch à Turin, chronique d’un film raté, dont le titre aurait sans doute amusé le cinéaste). Les non-initiés pourront regarder Jean Rouch,cinéaste aventurier, de Laurent Védrine, introduction au parcours et à l’œuvre de l’ingénieur parisien des Ponts et Chaussées devenu ethnologue, cinéaste et nigérien.

    https://www.arte.tv/fr/videos/073083-000-A/jean-rouch

    • Les maîtres fous

      Venus de la brousse aux villes de l’Afrique Noire, de jeunes hommes se heurtent à la civilisation mécanique. Ainsi naissent des conflits et des religions nouvelles. Ainsi s’est formée, vers 1927, la secte des Haouka.

      À dix heures, les hommes attendent un chien. « C’est un interdit alimentaire total. Si les Haouka tuent et mangent un chien, ils montreront qu’ils sont plus forts que les autres hommes, noirs ou blancs. » .

      Peu à peu, chacun entre dans la danse. La possession commence. Les derniers possédés arrivent enfin ; une conférence de la table ronde décide de manger le chien. Le rite accompli, tout le monde se sépare, car il faut libérer les taxis loués pour la journée. Le lendemain, chacun a repris sa place au coeur des activités économiques de la ville...

      https://www.youtube.com/watch?v=podpwdMDGWo

  • Emmanuel #Macron veut créer des « hotspots » pour gérer les demandes d’asile en #Libye

    « La France va créer dès cet été en Libye des #hotspots », des centres d’examen pour les candidats à l’asile, a annoncé le président Emmanuel Macron ce matin en marge d’une visite d’un centre d’hébergement de réfugiés à Orléans (Loiret). « L’idée est de créer en Libye des hotspots afin d’éviter aux gens de prendre des risques fous alors qu’ils ne sont pas tous éligibles à l’asile. Les gens, on va aller les chercher. Je compte le faire dès cet été », avec ou sans l’Europe, a-t-il ajouté.

    http://www.liberation.fr/direct/element/emmanuel-macron-veut-creer-des-hotspots-pour-gerer-les-demandes-dasile-en
    #hotspot #externalisation #asile #migrations #réfugiés #France

    cc @i_s_

    –---

    voir la métaliste sur les tentatives de certains pays européens d’externaliser la #procédure_d'asile :
    https://seenthis.net/messages/900122

    • Ah bon ?!?

      La mise en place de Hotspots en Libye n’est finalement « pas possible » cet été comme l’avait annoncé Emmanuel Macron

      La mise en place en Libye de centres pour examiner les demandes d’asile n’est « pas possible aujourd’hui », a jugé l’Elysée, jeudi 27 juillet, dans la soirée. Plus tôt dans la journée, Emmanuel Macron avait annoncé la création, cet été, de « hotspots » dans ce pays devenu un lieu de passage pour des milliers de migrants tentant de traverser la Méditerranée vers l’Europe.

      http://mobile.francetvinfo.fr/monde/europe/migrants/la-mise-en-place-de-hotspots-en-libye-n-est-finalement-pas-possible-cet-ete-comme-l-avait-annonce-emmanuel-macron_2302719.html#xtref=http://m.facebook.com

    • Migrants : « Trier les gens avant leur arrivée en France serait intolérable »

      Identifier les personnes vulnérables, comme cela se fait au Liban ou en Grèce sous la supervision du HCR, est une option -bien que ce n’est qu’une goutte dans l’océan. Mais si l’objectif est de trier les gens -entre migrants économiques et réfugiés- avant leur arrivée en France, c’est intolérable. Pouvoir déposer sa demande d’asile avant d’arriver sur le territoire ne doit pas déboucher sur une restriction du droit de venir en France, que ce soit pour des raisons d’asile ou de migration économique. Ce serait contraire à la convention de Genève qui impose aux signataires d’assurer l’accueil des réfugiés.

      http://www.lexpress.fr/actualite/societe/migrants-trier-les-gens-avant-leur-arrivee-en-france-serait-intolerable_193

    • Déclaration de Filippo #Grandi, chef du #HCR, sur la réunion de Paris le 28 août

      Je me félicite de l’annonce d’un plan d’action complet pour l’appui à des solutions à long terme au problème complexe de la migration mixte ainsi que la résolution de ses causes profondes, en étroite coopération avec les pays d’origine et de transit, et conformément au droit international.

      http://www.unhcr.org/fr/news/press/2017/8/59a55689a/declaration-filippo-grandi-chef-hcr-reunion-paris-28-ao-t.html

      Le HCR se félicite... sic

    • Parigi e i migranti: quale idea di Europa? Ascolta la puntata

      Dal vertice di Parigi sembrano arrivare novità importanti sul grande tema dei nostri giorni, quello dei migranti. Italia, Spagna, Germania e Francia, insieme a Ciad, Niger e Libia, sono forse arrivati a un punto di svolta nella gestione dei flussi migratori. Una strategia complessa dal punto di vista politico e soprattutto umanitario, che mette di fronte l’aspetto della sicurezza e quello morale. Gli sbarchi nel mese di agosto sono diminuiti, ma cosa succede a chi rimane dall’altra parte del mare? L’Italia sembra finalmente non essere più sola, ma qual è l’Europa che viene fuori da questo accordo?

      http://lacittadiradio3.blog.rai.it/2017/08/29/19762

    • Parigi: l’accordo che “li ferma a casa loro”

      L’accordo è raggiunto (per il momento), la strategia definita: teniamoli lontani da noi, costi quello che costi: in termini di risorse pubbliche (le nostre), ma soprattutto in termini di vite e diritti umani, calpestati. Cosa succederà alle persone che resteranno intrappolate nei loro paesi o in quelli di transito? Non sembra preoccupare i Capi di Stato e di Governo che oggi si sono riuniti a Parigi.

      http://www.cronachediordinariorazzismo.org/parigi-laccordo-li-ferma-casa

    • Au Niger, les rescapés du nouveau poste-frontière de l’Europe

      Pour éviter les traversées périlleuses, décourager les réseaux de passeurs et rendre moins visible le flux de migrants, des dizaines de demandes d’asile sont examinées au Sahel depuis octobre. A Niamey, Moussa et Eden font partie des rares personnes acceptées. Loin des 10 000 qu’Emmanuel Macron a promis d’accueillir d’ici fin 2019.

      Au Niger, les rescapés du nouveau poste-frontière de l’Europe
      « Bonjour », articule Moussa, sourire un peu crispé, un sourcil levé en signe d’hésitation. Dans sa bouche, ces deux syllabes résonnent comme celles d’un mot-valise qui porterait tous ses espoirs et ses incertitudes. Le seul mot de français qu’il connaît. De la France, ce père de famille érythréen de 43 ans, à la petite moustache bien taillée et aux yeux fatigués, a « vu quelques photos », entendu parler de « la tour Eiffel ». Dans quelques jours ou quelques semaines, c’est sur cette terre européenne, aussi inconnue que fantasmée, qu’il sera « relocalisé », selon le terme employé par l’Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
      Moussa est l’un des rares gagnants de la loterie de l’asile, désormais mise en place bien loin de l’Europe : à Niamey, au Niger. Avec le récit d’une vie pour seul laissez-passer, Moussa a convaincu les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), venus l’interroger dans le même conteneur préfabriqué où nous le rencontrons. Une enceinte sécurisée gérée par le HCR, au fond d’une ruelle poussiéreuse de cette capitale poussiéreuse, située au cœur du Sahel. Après deux entretiens, de nombreuses questions et vérifications, Moussa a obtenu le sésame auquel il n’osait plus croire : sa demande d’asile a été approuvée. « Je leur ai simplement dit la vérité, dit-il. J’ai beaucoup souffert. »
      Que font des fonctionnaires français chargés de l’examen des demandes d’asile loin de leurs locaux du Val-de-Marne, sur le sol africain ? Depuis octobre, l’Ofpra a effectué trois « missions de protection » au Sahel, deux au Niger et une au Tchad, pour une durée d’environ une semaine à chaque fois. L’objectif affiché : la réinstallation de réfugiés africains en France, après les avoir évalués dans ces « pays sûrs ». En principe, pour leur éviter « de prendre des risques inconsidérés » en traversant la Méditerranée. Mais il s’agit aussi de décourager les réseaux de passeurs clandestins qui ont longtemps prospéré dans ce pays au carrefour de l’Afrique noire et de l’Afrique du Nord.
      Sans laisser de traces

      Depuis deux ans, d’importants financements versés par l’Union européenne ont persuadé le gouvernement nigérien d’accepter de devenir de facto un de ses postes-frontières. Une loi criminalise désormais les passeurs : transporter des migrants au-delà d’Agadez, la « porte du désert » au nord du pays, est passible d’emprisonnement. Avec la mise en place de mesures répressives dans les pays qu’ils traversent, le nombre de migrants qui atteignent l’Europe a diminué, même si beaucoup empruntent à présent des routes plus dangereuses, à travers le désert, où ils disparaissent sans laisser de traces. Mais pour les gouvernements de l’UE, l’objectif est accompli, avec des migrants moins nombreux et en tout cas moins visibles. Reste en échange à accepter d’en accueillir quelques-uns pour que la logique de cette nouvelle plateforme en terre africaine fonctionne. L’an dernier, Emmanuel Macron s’est engagé à accueillir en France 10 000 réfugiés supplémentaires d’ici la fin de l’année 2019, dont 3 000 personnes en provenance du Tchad et du Niger.
      « Je n’ai absolument aucun doute que nous atteindrons ce nombre », affirme Pascal Brice, directeur de l’Ofpra. Pour l’instant, on est loin du compte. Environ 160 personnes, présélectionnées par le HCR, ont été vues par les agents de l’Ofpra lors de ces deux missions à Niamey. Après ces entretiens, 114 hommes, femmes et enfants - majoritairement érythréens, soudanais et somaliens - sont partis en France. Le nombre est dérisoire, mais le message politique est fort : ceux qui ont des revendications justifiées à l’asile ont une alternative légale et sûre à la dangereuse traversée de la Méditerranée, qui engloutit chaque année des milliers de personnes et leurs espoirs. Si la France leur ouvre ses portes, ils se verront offrir un billet d’avion, un titre de séjour et des mesures d’accompagnement pour faciliter leur intégration, telles qu’une aide au logement ou des cours de langue. Tous les autres devraient rebrousser chemin.
      « La rhétorique qui vise à tracer une distinction claire entre migrants et réfugiés recouvre des enjeux d’ordre politique majeurs, constate Jocelyne Streiff-Fénart, sociologue et directrice de recherche émérite au CNRS, spécialiste des migrations. L’opposition entre le réfugié, qui aurait des raisons légitimes de fuir et pour cela doit être accueilli, et le migrant économique, qui doit être repoussé, est devenue un élément essentiel d’une politique migratoire qui est clairement configurée comme une entreprise de triage. » Cette distinction entre « les bons et les mauvais migrants », qui appartiendraient à deux catégories imperméables, apparaît pour la chercheuse comme « une tentative de légitimation » de mesures de plus en plus restrictives, « voire brutales ».
      A Niamey, dans l’attente de son départ, Moussa fait les cent pas dans sa tête. Il a envie de parler. Les agents de l’Ofpra voulaient avant tout s’assurer de sa nationalité. Ce qui le prend aux tripes, qu’il régurgite d’une voix monocorde, ce sont les épreuves qu’il a traversées. La ligne de front lors de la guerre contre l’Ethiopie, la pauvreté, ses enfants qu’il ne voit qu’une fois par an, les frustrations, et le service militaire, quasi esclavagiste, qui n’en finit pas. En Erythrée, petit pays de la corne de l’Afrique dirigé par un régime autoritaire, celui-ci est obligatoire pour tous les citoyens. Sa durée est indéterminée. Moussa a passé douze ans sous les drapeaux. Puis, en 2011, il a craqué. « Une nuit, je me suis enfui, raconte-t-il. Je n’ai rien dit à ma femme. J’ai pris un chemin peu fréquenté, et j’ai traversé la frontière, dans l’obscurité. » Il part d’abord au Soudan puis au Soudan du Sud, à Juba, où il se fait embaucher dans un hôtel par un compatriote. Mais la guerre le rattrape. Avec ses économies, et un peu d’aide d’un beau-frère au pays, il prend finalement la décision qui le taraude depuis qu’il est parti : aller en Europe.
      Cul-de-sac libyen

      Une éprouvante traversée du désert le mène jusqu’en Libye, le principal point de départ pour les côtes italiennes. Un pays en plein chaos depuis la chute de Kadhafi, en 2011, où les migrants sont devenus une marchandise à capturer, à vendre et à exploiter. « Nous étions plusieurs centaines, peut-être 500, dans un hangar, raconte Moussa dans un anglais presque impeccable. J’y ai passé plusieurs mois, puis on nous a déplacés dans un autre endroit, puis encore un autre. Chaque fois, nous étions gardés par des hommes en armes. » Trafiquants, miliciens, gardes-côtes, bandits… tout se mêle et devient flou. Les geôliers aboient des ordres en arabe, une langue que la plupart des migrants ne comprennent pas. « Ils nous ont menacés, frappés avec des bâtons de bois ou des câbles. Quand ils étaient nerveux, ou défoncés, ils tiraient à nos pieds. Juste parce que ça les amusait, raconte-t-il. Mais, le pire c’était la faim. »
      Un soir, deux hommes s’emparent d’une jeune femme et l’emmènent à l’écart. « Quand ils l’ont ramenée, elle a pleuré toute la nuit. Que pouvait-on faire ? » dit-il, le regard sombre. Ceux qui peinent à rassembler l’argent dû pour le voyage sont maltraités avec une brutalité systématique, torturés, forcés de rester debout sous le soleil pendant des heures. Par téléphone, ils supplient leurs proches d’envoyer de l’argent, de les sortir de là. Moussa, lui, a déjà versé 3 500 dollars (environ 2 900 euros), mais son départ se fait attendre. La collaboration controversée de l’UE et de la Libye pour endiguer la venue de migrants africains en Europe, y compris par la détention de ces derniers et l’interception des bateaux en mer, a rendu la traversée plus compliquée. Elle a aussi accru la clandestinité dans laquelle opèrent les migrants et leur dépendance aux réseaux organisés de trafiquants.
      Parmi les milliers de personnes bloquées dans le cul-de-sac libyen, dans des conditions abominables, quelques centaines, comme Moussa, peuvent prétendre au statut de réfugiés. Le HCR travaille à les identifier et les faire relâcher. L’an dernier, l’agence onusienne a initié une procédure unique : l’évacuation par avion des demandeurs d’asile jugés les plus vulnérables vers un pays de transit où ils seraient en sécurité, le Niger. Un retour en arrière censé être temporaire, en vue de leur réinstallation, selon le bon vouloir de quelques pays occidentaux. L’enveloppe d’aide européenne ne venant pas sans contrepartie, les autorités nigériennes ont donné leur feu vert non sans émettre quelques craintes de voir leur pays devenir un « hotspot » où tous les recalés à l’examen de l’asile se retrouveraient coincés. « Nous avons environ 1 000 personnes sous notre protection en ce moment sur le territoire nigérien, dit Alessandra Morelli, représentante du HCR au Niger. Nous attendons que ces personnes puissent être accueillies par des pays tiers. Le succès de la démarche dépend de l’engagement des Etats membres de l’UE et de la communauté internationale. C’est seulement à travers cette solidarité que ces gens peuvent avoir l’espoir de reconstruire leur vie. »
      « On sait ce qui nous attend »

      L’initiative lancée par la France suscite l’intérêt d’autres pays. La Suisse et les Pays-Bas ont récemment effectué une mission au Niger. La Finlande, le Canada, l’Allemagne et le Royaume-Uni pourraient prochainement faire de même. Eden, 22 ans, doit bientôt être accueillie en Suisse. Avec ses traits fins, ses yeux brun profond soulignés d’un trait d’eye-liner et ses petites boucles d’oreilles mauves assorties à son vernis à ongles, la jeune Erythréenne mêle la coquetterie d’une adolescente à l’assurance de celles qui en ont déjà trop vu pour se laisser impressionner. Elle raconte son calvaire, parle de ses rêves d’avenir, son envie de « devenir esthéticienne. Ou médecin, si je peux aller à l’université ». La détermination ponctue chacun de ses mots. « Bien sûr qu’on sait ce qui nous attend lorsqu’on part », dit-elle en amharique, qu’une interprète traduit. Sur les réseaux sociaux, des photos circulent de ceux, tout sourire, qui ont réussi à atteindre le mythe européen. Mais les récits d’horreur, d’abandons dans le désert, de bateaux qui sombrent au milieu des vagues, de tortures dans les camps libyens, ont aussi fait leur chemin jusque dans les villages de la corne de l’Afrique. Dans leur bagage, certaines femmes emportent des contraceptifs parce qu’elles s’attendent à être violées. « Ça ne veut pas dire que l’on sait comment on va réagir, si l’on tiendra le coup, mais on sait que ce sera horrible. De toute façon, quelles sont les autres options ? »
      Pour quelques élus, extraits du flux migratoire au terme d’un processus de sélection en entonnoir, le voyage prend bientôt fin, à leur grand soulagement. A son arrivée en France, Moussa devrait obtenir la protection subsidiaire, un statut un cran en dessous de celui de réfugié. Il pourra le renouveler au bout d’un an, si ses raisons de ne pas rentrer en Erythrée sont toujours jugées légitimes. Aux yeux des autorités européennes, l’espoir d’une vie meilleure ne suffit pas.

      *Les prénoms ont été changés

      http://www.liberation.fr/planete/2018/05/03/au-niger-les-rescapes-du-nouveau-poste-frontiere-de-l-europe_1647600

    • EU to consider plans for migrant processing centres in north Africa

      Leaked draft document says idea could ‘reduce incentive for perilous journeys’

      The EU is to consider the idea of building migrant processing centres in north Africa in an attempt to deter people from making life-threatening journeys to Europe across the Mediterranean, according to a leaked document.

      The European council of EU leaders “supports the development of the concept of regional disembarkation platforms”, according to the draft conclusions of an EU summit due to take place next week.

      The EU wants to look at the feasibility of setting up such centres in north Africa, where most migrant journeys to Europe begin. “Such platforms should provide for rapid processing to distinguish between economic migrants and those in need of international protection, and reduce the incentive to embark on perilous journeys,” says the document seen by the Guardian.

      Although the plan is winning influential support, it faces political and practical hurdles, with one expert saying it is not clear how the EU would get foreign countries to agree to be “vassal states”.

      Migration is high on the agenda of the two-day summit, which opens on 28 June. EU leaders will attempt to reach a consensus on how to manage the thousands of refugees and migrants arriving each month.

      The German and French leaders, Angela Merkel and Emmanuel Macron, met near Berlin on Tuesday to agree on a common approach, amid fears in their camps that the European project is unravelling.

      Before the meeting France’s finance minister, Bruno Le Maire, said Europe was “in a process of disintegration. We see states that are turning inward, trying to find national solutions to problems that require European solutions.”

      He called for “a new European project” on immigration, as well as economic and financial issues, “to consolidate Europe in a world where you have the United States on one side, China on the other and we are trapped in the middle”.

      At the end of the meeting, which was dominated by eurozone reform, Macron said the EU would “work with countries of origin and transit” to cut off illegal people-smuggling routes, and build “solidarity mechanisms, both externally and internally”. The EU border and coastguard agency Frontex would be expanded to become “a true European border police”.

      Merkel is under pressure from her hardline interior minister, Horst Seehofer, to come up with a European plan by the end of the month. Germany continues to receive more applications for asylum than any other EU member state. Seehofer wants German border guards to start turning people away if there is no EU-wide progress.

      It was not immediately clear how the EU document’s proposal for “regional disembarkation platforms” would work, or where they might be set up.

      Elizabeth Collett, the director of the Migration Policy Institute in Brussels, said it was a “watered-down version” of Austrian-Danish proposals that had called for arrivals in Europe to be sent back to their point of departure to have their claims processed.

      “What has clearly changed is the level of political backing for this,” she said.

      The plan prompted questions about how it would work and the cost involved, she said. “It looks great on paper, but can you get countries to sign up from outside Europe and basically be vassal states?”

      The other big problem was ensuring the centres met EU standards, she said. “The conditions, the processing, all of the things that require a high degree of knowledge and are quite hard to manage within the EU, these are big questions.”

      The plan, however, appears to be helping unite EU countries that are deeply divided on migration.

      Italy and France support the idea of asylum centres outside EU territory, an idea that helped defuse diplomatic tensions after the two countries clashed when the new populist government in Rome refused to allow the docking of a ship carrying 630 migrants.

      Macron, who has previously raised the idea, proposed it when he met the Italian prime minister, Giuseppe Conte, last week.

      The EU struck a deal with Turkey in 2016 that drastically reduced migrant flows, but the bloc has found it harder to work with north African governments, especially Libya, from where most sea crossings begin.

      The European commission has rejected a Turkey-style deal with Libya because of instability in the country. But Italy’s previous government struck deals with Libyan militia and tribes and helped relaunch the Libyan coastguard. These actions contributed to a sharp reduction in the number of people crossing the central Mediterranean, but critics reported an increase in human rights violations.

      According to the draft document, the EU would like to set up the centres in collaboration with the UN refugee agency and the International Organization for Migration, a UN-related body that has previously criticised the paucity of legal routes for African migrants to travel to Europe.

      Dimitris Avramopoulos, the EU migration commissioner, is expected to spell out details of the disembarkation centres later this week.

      https://www.theguardian.com/world/2018/jun/19/eu-migrant-processing-centres-north-africa-refugees?CMP=share_btn_tw
      #Afrique_du_nord

  • Découverte de la « cité des géants » en Éthiopie - Afrik.com : l’actualité de l’Afrique noire et du Maghreb
    samedi 17 juin 2017 / par Ali Attar
    http://www.afrik.com/../decouverte-de-la-cite-des-geants-en-ethiopie

    Les archéologues britanniques ont découvert à Harlaa, à l’Est de l’Éthiopie, une ville disparue, la « citée des géants », qui date du 10ème siècle après JC. La fouille a mis à jour une mosquée du XIIe siècle, un atelier de bijouterie et des témoignages de sépultures et de pierres tombales islamiques, mais aussi des traces d’échanges avec Madagascar et la Chine.

    Des experts de l’Université d’Exeter et du ministère culturel de l’Éthiopie ont également trouvé des poteries de Madagascar, du Yémen et de la Chine, ainsi que des pièces en bronze et en argent provenant de l’Egypte du 13ème siècle.

    La découverte suggère que la ville de l’est de l’Éthiopie était autrefois un centre commercial prospère pour les communautés islamiques et que les liens commerciaux du pays sont arrivés beaucoup plus loin que prévu.

    Le professeur Timothy Insoll, de l’Institut d’études arabes et islamiques de l’université, a salué les résultats comme « révolutionnaires ». « Les résidents de Harlaa étaient une communauté mixte d’étrangers et de personnes locales qui ont échangé avec d’autres personnes dans la mer Rouge, l’océan Indien et peut-être aussi loin que le golfe Arabe », a-t-il déclaré.(...)

  • Agriculture en Afrique : les investissements privés aggravent l’insécurité alimentaire - Afrik.com : l’actualité de l’Afrique noire et du Maghreb
    http://www.afrik.com/agriculture-en-afrique-les-investissements-prives-aggravent-l-insecurite-alim

    « Avec des régimes douaniers et fiscaux particulièrement avantageux, destinés à attirer les investisseurs privés, ces pôles de croissances ont vocation à devenir de véritables « #paradis_fiscaux_agricoles ». Ces avantages créent à court terme une concurrence déloyale entre #multinationales et petits producteurs. A moyen terme, ce sont autant de ressources qui échappent aux Etats africains, minant leur capacité à investir eux-mêmes, dans l’#agriculture pour nourrir leurs populations », dénonce Maureen Jorand du CCFD-Terre Solidaire.

    « Les #pôles_de_croissance_agricoles entretiennent une mécompréhension des enjeux de sécurité alimentaire et nutritionnelle. Sans évaluation possible de leurs impacts environnementaux et sociaux, ils continueront d’aggraver dans les prochaines années la vulnérabilité des populations d’#Afrique subsaharienne. », prévient Clara Jamart d’Oxfam France.

  • La guerre du Cameroun - L’invention de la Françafrique
    http://www.canalsud.net/?Thomas-Deltombe-La-guerre-du

    Thomas Deltombe était à Terra Nova le 14 février 2017 pour présenter son livre écrit avec Jacob Tatsitsa et Manuel Domergue. La légende veut que la France, « patrie des droits de l’homme », ait généreusement amené ses anciennes colonies d’Afrique noire à l’indépendance en 1960. Une décolonisation pacifique en somme qui se serait faite dans la compréhension mutuelle et l’intérêt partagé de la France et de l’Afrique. Ce livre raconte une tout autre histoire : celle d’une guerre brutale, violente, meurtrière, qui a permis à Paris d’inventer un nouveau système de domination : la Françafrique. Cette guerre secrète a pour théâtre le Cameroun des années 1950 et 1960. Durée : 1h43. Source : Canal (...)

    http://www.canalsud.net/IMG/mp3/radiolivres03-thomasdeltombe.mp3

  • Vendredi 3 février : Projection-débat « FRANÇAFRIQUE, 50 années sous le sceau du secret » 2e partie : L’argent roi documentaire de Patrick Benquet-Marseille Infos Autonomes
    https://mars-infos.org/projection-debat-francafrique-50-2034

    @Ad Nauseam - « Françafrique » est le nom donné au système néo-colonialiste mis en place par la France à la fin des années 50 pour garder le contrôle de ces anciennes colonies d’Afrique Noire. Ce documentaire historique, riche de nombreux témoignages des principaux protagonistes, raconte l’histoire de ce système : (...)

    #Marseille_Infos_Autonomes / #Mediarezo

  • #panafricanisme et communisme : entretien avec Hakim Adi
    http://revueperiode.net/panafricanisme-et-communisme-entretien-avec-hakim-adi

    À côté de l’histoire dominante des parti communistes européens, centrée sur la classe ouvrière métropolitaine, il est possible de retracer la trajectoire souterraine de ces militants communistes et panafricains, minoritaires dans leurs partis, mais activement soutenus par Moscou dans l’entre-deux-guerres. Il s’agit d’une époque où les jeunes partis communistes sont dominés par des Blancs, des métropolitains, ou par des colons aux colonies. Pour combattre l’opportunisme, le chauvinisme implicite ou explicite de ces militants, l’Internationale communiste a procédé à la structuration d’une série d’organisations transnationales, chargées de coordonner l’activité révolutionnaire autour de la « question noire » : Afrique du Sud, colonies d’Afrique noire, ségrégation aux États-Unis, etc. Hakim Adi raconte ici (...)

    #Uncategorized #race

  • Haïti : le choléra ravage l’île après l’ouragan Matthew
    https://www.crashdebug.fr/international/12529-haiti-le-cholera-ravage-l-ile-apres-l-ouragan-matthew-2

    Ne croyez vous pas que ce drame soit évitable, n’a ton pas les moyens, en 2016, d’envoyer massivement de l’aide aux Haïtiens ?

    Tous les médias en parlent pour vous vendre l’horreur de ce qui ce passe là-bas, mais si les pays développés n’aident pas Haïti, c’est vraisemblablement par ce que comme pour l’Afrique noire, ces gens n’ont pas les moyens de consommer, aussi ils les laissent crever.

    1,4 million de personnes auraient besoin d’une assistance médicale selon l’OMS. Photo d’illustration prise

    en Haïti le 18 octobre 2016. REUTERS/Carlos Garcia Rawlins

    Près de 800 cas de choléra ont été recensés sur l’île. Depuis 2010, une épidémie touche Haïti et le passage de l’ouragan l’a encore accentuée.

    Sur place, la situation est alarmante. Le passage de l’Ouragan Matthew a non seulement (...)

    #En_vedette #Ça_s'est_dit_par_là... #International

  • « Aucun ménagement à garder » : pour une autre histoire de la Mission Congo-Nil | Olivier Favier
    http://dormirajamais.org/marchand

    Entre juillet 1896 et mai 1899, la mission Congo-Nil a mené le capitaine Marchand, treize militaires français ainsi que cent-cinquante tirailleurs africains, de Loango sur la côte Atlantique à Djibouti au bord de la Mer Rouge. Pour appréhender la violence coloniale et son acceptation, la mission Marchand s’avère un terrain doublement pertinent : célèbre, elle n’a pas donné lieu à une dénonciation de grande ampleur sur ce plan, richement documentée, elle offre des données précises sur la nature et l’ampleur des exactions. Source : Dormira jamais

    • [LDH-Toulon] la colonne infernale de Voulet-Chanoine
      http://ldh-toulon.net/la-colonne-infernale-de-Voulet.html

      Y a-t-il eu d’autres affaires Voulet-Chanoine oubliées par la suite ?

      Il y en a "un paquet". Au traité de Versailles (1919), les Allemands ont été jugés indignes de coloniser : on les a privés de colonies. Mais les autres nations aussi ont été très dures. Côté français, durant l’époque terrible de la colonisation (1890-1905), il y eut au Congo, qui était exploité en "concessions", l’affaire Gaud et Toqué. Ces deux administrateurs s’étaient amusés, un 14 juillet, à mettre des grenades au cou d’un Noir et à le faire sauter. Ce fut un énorme scandale. De telles violences étaient constitutives du système colonial. C’est vrai, on était ou on pouvait devenir "fou" en Afrique (la "soudanite"), mais le système encourageait les dérives.

      – La colonne Voulet-Chanoine ne compte que huit Blancs...

      C’est le même schéma partout. Il y a une division du travail. Aux officiers blancs, la "gloire" de la conquête. On dit, en France, "nos" soldats mais 90 % à 99 % d’entre eux sont africains, recrutés au départ au Sénégal comme "tirailleurs", puis sur place au fur et à mesure que la conquête avance, et chargés du "sale boulot" (pillage, destruction de récoltes). C’est pourquoi l’intégration africaine pose des problèmes encore aujourd’hui. De la colonisation, nous avons hérité la balkanisation territoriale, mais aussi psychologique : l’ennemi, c’est aussi, et même plus, l’autre Africain.

      Existe-t-il des textes exterminatoires ?

      Pas dans la colonisation française, ni léopoldienne, à ma connaissance. Mais dans l’Allemagne de Guillaume II, il y a des discours enflammés qui évoquent la destruction d’une race : nous sommes dans la problématique du génocide.

      – Aimé Césaire parle de la violence coloniale comme d’un "poison instillé dans les veines de l’Europe". Est-elle à la source des totalitarismes du XXe siècle ?

      Une école historique, au temps de la RDA, s’est penchée sur les origines des hauts gradés de l’armée nazie. Elle a constaté que certains de ces hommes, issus des milieux prussiens, avaient eu un père, un oncle, directement associés à des crimes commis dans le Sud-Ouest africain et au Tanganyika. » En Afrique même, nous n’avons pas fini de payer le prix des violences coloniales. Une culture de l’armée s’est installée. Idi Amin Dada a été soldat de l’armée anglaise qui écrasa la révolte des Mau Mau dans les années 50. Et, dans l’armée qui réprime à Madagascar en 1947, puis en Indochine, il y a peu d’officiers français et beaucoup de troupes coloniales. Des hommes comme Bokassa ou Eyadema ont ensuite développé dans leur pays un instinct de mort. L’horreur actuelle au Sierra Leone, au Liberia, les mains et les bras coupés, rappellent 1890. Le système dans lequel on tue les gens en les faisant souffrir découle de ces années terribles de la colonisation, époque appelée au Congo le "temps des exterminations".

      – Pourquoi cette violence extrême du colonisateur ?

      Les idées racialistes ont forcément joué. Un théoricien disait : il faut expulser [de la métropole] la violence des classes "dangereuses" et lui permettre de se débrider ailleurs. Là-bas, l’individu, livré à lui-même, transgresse tous les interdits. C’est le thème d’ Au coeur des ténèbres de Conrad (1899). En Europe, au XXe siècle, on osera transgresser parce qu’on l’a déjà fait en Afrique. »

    • « En 1884-1885, à la conférence de Berlin, quatorze puissances ont répondu à l’appel du chancelier allemand Otto von Bismarck, pour décider du partage de l’Afrique. Sept sont destinées à en devenir les propriétaires effectifs dans un avenir proche. » http://dormirajamais.org/voulet

      –-
      « La conférence de Berlin marqua l’organisation et la collaboration européenne pour le partage et la division de l’Afrique. Aussi connue comme la conférence de l’Afrique de l’Ouest1, elle commença le 15 novembre 1884 à Berlin et finit le 26 février 1885. À l’initiative du Portugal et organisée par Bismarck, l’Allemagne, l’Autriche-Hongrie, la Belgique, le Danemark, l’Empire ottoman, l’Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, les Pays-Bas, le Portugal, la Russie, la Suède-Norvège ainsi que les États-Unis y participèrent. Une conférence antérieure2 fit commencer le débat sur la conquête des Congo3 et amorça ainsi le début des luttes coloniales. La conférence de Berlin aboutit donc à édicter les règles officielles de colonisation. L’impact direct sur les colonies fut une vague européenne de signature de traités. »
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Conf%C3%A9rence_de_Berlin

      Ressources GALICA :

      « Compte rendu de la XXVe conférence tenue à Berlin du 23 au 28 août 1928 / publié par le bureau interparlementaire - 1928 » http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k54482074.r=Conference%20de%20Berlin%20%281884%20%201885%29?rk=21459

      « L’Afrique noire depuis la conférence de Berlin-extraits »
      http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k3324908h.r=Conference%20de%20Berlin%20%281884%20%201885%29?rk=42918

      « L’Occupation des territoires sans maître » http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5629483f.r=Conference%20de%20Berlin%20%281884%20%201885%29?rk=64378

  • GÉOGRAPHIE DES MARGES

    Autour de la question "La France des marges" au programme des Capes d’histoire-géographie et agrégations externes d’histoire et de géographie (et, à partir de l’an prochain, pour l’agrégation interne d’histoire-géographie) http://www.scoop.it/t/la-france-des-marges-analyse-geographique, petite sélection de ressources sur le concept de marges en géographie http://www.scoop.it/t/geographie-des-marges (citées par date de parution, pour comprendre l’ordre dans lequel se sont construits, souvent en miroir, ces pensées, de la notion de la marginalité qui est débattue à partir des années 1980 principalement à la notion de marges qui prend de l’ampleur dans les années 2000). Cette sélection peut constituer un "outil" pour préparer la question, mais aussi pour tout curieux de l’approche spatiale !

    BAILLY, Antoine, Philippe AYDALOT, Jacques GODBOUT, Charles HUSSY, Claude RAFFESTIN et Angelo TURCO, 1983, "La marginalité : réflexions conceptuelles et perspectives en géographie, sociologie et économie", Géotopiques, n°1, pp. 73-115, en ligne : https://archive-ouverte.unige.ch/unige:4332
    –> Partant du constat (étonnant) de la relative absence du terme de la marginalité en géographie (du fait de la prédominance du couple centre/périphérie), Antoine Bailly et al. confrontent périphérie et marginalité au prisme de la question des minorités, puis observent le concept de la marginalité dans les géographies anglo-saxonnes et allemande où le modèle centre/périphérie n’a pas pris la même importance que dans la géographie française. Une phrase-clef dans cet article : "Il n’existe pas de lien nécessaire entre la périphérie, la minorité et la marginalité, pas plus qu’entre le centre, la majorité et la centralité".
    –> Un autre texte aux thèmes proches mais bien plus récent (12 ans plus tard) d’Antoine Bailly revient sur cette réflexion : BAILLy, Antoine, 1995, "La marginalité, une approche historique et épistémologique", Anales de Geografia de la Universidad Complutense, n°15, pp. 109-117, en ligne : https://archive-ouverte.unige.ch/unige:6486

    COURADE, Georges, 1985, "Jalons pour une géographie de la marginalité en Afrique Noire", L’Espace géographique, n°2/1985, pp. 139-150, en ligne : http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers07/04106.pdf
    –> Georges Courade propose de réfléchir à la notion de marginalité au prisme de l’Afrique Noire. Il revient notamment sur les différentes acceptions et mobilisations de la marginalité comme notion dans différentes approches géographiques (approche fonctionnaliste, approche culturaliste, approche "tropicalisée", etc.).

    DE RUFFRAY, Sophie, 2000, "De la marginalité territoriale à la recomposition territoriale « marginale »", –Revue Géographique de l’Est–, vol. 40, n°4/2000, en ligne : https://rge.revues.org/4061
    –> Particulièrement utile aux candidats en proposant de nombreux schémas sur la manière de penser les marges par l’approche spatiale, Sophie de Ruffray s’intéresse aux marges spatiales, à leur dynamique interne et leurs recompositions territoriales.

    Dans le contexte des dynamiques spatiales actuelles, cet article propose une réflexion sur la notion de recomposition territoriale dans les espaces de marges. Il a pour objectif de présenter des modèles de recomposition « marginale », fondés sur des interfaces particulières, sous la forme de réseaux de villes pour répondre aux propriétés particulières des territoires de marges. L’application concerne l’espace interrégional, constituant l’interface entre les confins orientaux de la Moselle et nord-occidentaux du Bas-Rhin.

    PROST, Brigitte, 2004, "Marge et dynamique territoriale", Géocarrefour, vol. 79, n°2/2004, pp. 175-182, en ligne : https://geocarrefour.revues.org/695
    –> Brigitte Prost propose de décrypter le concept de marge spatial au prisme des discontinuités, de leur place dans un système territorial et de leur rôle dans l’organisation de l’espace.

    Le concept de marge, riche mais flou, mérite d’être explicité car il est susceptible d’alimenter une réflexion féconde. Conçue comme un élément en disfonctionnement du système territorial, la marge est un vrai objet géographique et a une place particulière dans l’organisation spatio-temporelle dans laquelle nous la repérons. Sa dynamique la rend plus ou moins évidente à l’observation, plus ou moins réelle, mais capter sa réalité, comprendre sa place et son rôle peut permettre de pénétrer au cœur de l’analyse territoriale.

    SIERRA, Alexis et Jérôme TADIÉ, 2008, "Introduction. La ville face à ses marges", Autrepart, n°45, n°1/2008, pp. 1-45, en ligne : https://www.cairn.info/revue-autrepart-2008-1-page-3.htm
    –> Considérant à la fois les marges spatiales et les marges sociales de la ville, cette introduction "montre combien les marges font partie intégrante de la ville", en "partant d’une définition large de la marge, comme situation de mise à l’écart issue d’une représentation officielle et majoritaire, intégrée par les acteurs urbains dominants, nous avons voulu en observer diverses déclinaisons". Les marges spatiales et sociales ne sont pas "hors" de la ville, mais "en marge" de celle-ci, c’est-à-dire qu’elles "s’établissent dans une relation – voire une tension – parfois dichotomique, entre formel et informel, pouvoirs et contrepouvoirs, entre reconnaissance et déni".

    MORELLE, Marie, 2016, "Marginalité", Géoconfluences, rubrique Notions à la une, 12 juillet 2016, en ligne : http://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/a-la-une/notion-a-la-une/notion-a-la-une-marginalite
    –> Directement liée à la préparation de la question "La France des marges" aux concours de l’enseignement, cette "Notion à la une" de Marie Morelle revient, avec synthèse, sur les évolutions de la notion de marginalité dans la géographie, depuis les travaux fondateurs de l’Ecole de sociologie de Chicago (avec, par exemple, l’étude du hobo par Nels Anderson dans les années 1920) à aujourd’hui.

    La géographie n’a pas été la première discipline à discuter de la notion de marginalité. Il convient d’en faire une brève généalogie afin de voir les contextes dans lesquels la notion se déploie, les approches géographiques qui s’en saisissent, pour construire quels objets de recherche, sans perdre de vue les débats qui accompagnent son existence dans le champ de la géographie et des sciences sociales.

    #Géographie #LaFranceDesMarges #Géographie_des_Marges

  • #Guerre_asymétrique

    Les guerres coloniales ont été couronnées de succès pendant plusieurs siècles. La supériorité de l’armement ne suffit pas, à elle seule, à l’expliquer. Sinon, pourquoi aujourd’hui n’en irait-il pas de même ? La guerre en milieu colonial ou post-colonial est une guerre asymétrique, opposant un « fort » et un « faible ». C’est une « guerre irrégulière », et non une « guerre frontale classique ». #Gérard_Chaliand, dans “Pourquoi perd-on la guerre ?” présente, sur la base d’un argumentaire solide, un point de vue quelque peu iconoclaste, dont l’intérêt est d’ouvrir la discussion sur des sujets qui, habituellement, font l’objet d’un fort « manque-à-penser ». Nous reprenons ici quelques unes des grandes lignes qu’il développe, sachant que deux pages ne sauraient suffire à résumer cet ouvrage. Les lecteurs intéressés sont donc invités à s’y reporter. Comme toujours, nous rappelons que la recension d’un ouvrage dans nos colonnes est faite sur la base de l’intérêt qu’il présente pour le débat d’idées – que nous espérons bien poursuivre sous une forme ou une autre – et non d’une adhésion à l’ensemble des propos tenus.

    Les clefs du succès des guerres coloniales

    La conquête du Mexique (1519-1521) contient déjà tous les éléments importants du succès des guerres coloniales. C’est d’abord un exemple de guerre asymétrique (victorieuse) puisque l’envahisseur espagnol ne compta que, tout au plus, 2 000 individus « face » à des centaines de milliers d’autochtones.

    Prédateurs sûrs de leur bon droit, les représentants du roi d’Espagne étaient déterminés et motivés par l’or, la gloire et les honneurs.
    La rencontre sur place d’un ancien naufragé espagnol parlant une des langues locales puis l’union de Cortès avec une esclave Aztèque (qui apprit rapidement l’espagnol) leur permit de suffisamment bien connaître les Indiens pour avoir l’audace de s’y attaquer. Connaître la conception du monde des Aztèques – l’incontestable puissance régionale – et, surtout constater, leur désarroi face à ces étrangers qui avaient une apparence et des armes qui les impressionnaient, mais aussi des chevaux (animal qu’ils ne connaissaient pas) et des canons dont le son et l’effet les remplissaient d’effroi fut décisif.

    La conception de la guerre des uns et des autres s’avéra également déterminante, car conduite dans des buts et selon des méthodes différentes. La nature de la guerre, pour les autochtones, proche d’un rituel, était courte et destinée à faire des captures en vue de sacrifices humains. Pour les espagnols, il s’agissait d’être opiniâtres et d’anéantir l’ennemi dans un combat à mort, sans faire de quartier. Ils utilisaient la surprise, le combat de nuit, la terreur ; et leurs chevaux leur conféraient une force de choc inconnue des Aztèques.
    Les conquistadors frappèrent à la tête, profitèrent des divisions, surent s’allier à des tribus hostiles aux Aztèques. Les Aztèques, affamés et minés par la variole, capitulèrent face à cette poignée de bandits.

    Une fois frappées à la tête, des sociétés fortement hiérarchisées, sombrent rapidement dans le désarroi. C’est la leçon qu’ont déjà tirée les conquistadors qui arrivent au Pérou (1532) en pleine guerre civile. En conquérants avertis, ils mettent à genoux ce pays avec moins de 200 hommes.

    La colonisation de l’Asie sera plus lente. Mais, le colonisateur (Etats portugais, hollandais, ...) disposera à peu près des mêmes avantages. Dès le XVIIIème ; la révolution industrielle entraînant des progrès militaires – dont l’armement – permettra aux Etats européens d’investir les terres intérieures au détriment de sociétés régionales dépassées. C’est en jouant des divisions locales et en misant sur la révolution industrielle que la Grande-Bretagne s’imposera en Inde.

    Le contournement de l’Afrique puis la découverte de l’Amérique se font sous l’impulsion d’un besoin des puissances européennes de sortir de l’isolement imposé par les Ottomans qui se retrouvent sur le Danube, assiègent Vienne (1529) et détiennent le contrôle sur l’Océan Indien, voie traditionnelle des échanges.

    Ces guerres asymétriques du passé sont menées par des forces peu nombreuses mais avec des résultats considérables, tout en apportant humiliations et exploitation. Les innovations technologiques ont permis aux Etats européens d’augmenter les échanges mais ont, aussi, apporté des idées nouvelles dont le nationalisme moderne_ : le spectacle d’une contestation perpétuelle chez les oppresseurs dévoilait aux colonisés qu’une lutte pour un monde meilleur était possible.

    Le retournement

    L’appel aux valeurs religieuses ne fut pas suffisant aux colonisés pour apporter une réponse adéquate contre l’envahisseur. Lors du partage de l’Afrique entre puissances européennes (XIX° siècle), l’Islam était présent en Afrique noire depuis longtemps. Bien que dès la fin du XVIIIème siècle, l’islam soit en marche et s’impose – souvent par la force – dans toute l’Afrique, il n’est pas en mesure de s’opposer à la pénétration européenne de l’Afrique noire. Bien, au contraire, le colonisateur comprend que l’islam est un formidable outil d’oppression et d’exploitation des populations, et il saura l’instrumentaliser à son profit (voir dans notre n°149 l’article sur l’invention de l’islamophobie http://seenthis.net/messages/480782 ).

    Le premier désaveu vient du Japon qui, se mettant à l’école de l’Europe et apprenant à la connaître, sut se réorganiser en modernisant son armée et ses méthodes. C’est par l’intégration des valeurs de l’oppresseur que les conquis sont capables de leur opposer une véritable résistance. Toutefois, le cas du Japon est particulier, car la société japonaise était fortement hiérarchisée et disciplinée. Cela permit d’imposer une « révolution » par le haut au profit de ses classes dominantes.

    Après avoir compris et intégré les aspects « institutionnels » des pouvoirs occidentaux, les anciens colonisés finirent par aussi comprendre l’intérêt de l’idéologie ; le marxisme, le nationalisme moderne, parfois un mélange des deux.

    En Asie orientale, les répercussions du bolchevisme éveillent un écho et produisent des soulèvements ouvriers (années 20’ – Shangaï, Canton). La version léniniste envoie une image simplifiée facilement compréhensible et constituera un catalyseur de mobilisation en masse.

    Le cas de l’Inde montre l’importance que va prendre l’opinion publique. La nouvelle que la troupe avait tiré contre une foule pacifique (400 morts) provoqua de vives protestations en Grande-Bretagne, tout en mettant en évidence une contestation de l’ordre établi de plus en plus efficace qui retourne déjà l’idéologie nationaliste contre l’envahisseur.

    La défaite cuisante qu’Abdelkrim infligea aux troupes espagnoles, à Anoual en 1922, imposa aux Etats occidentaux de mettre en oeuvre des moyens très importants pour briser la révolte (1926) ; signe que les choses avaient changé. Lors du dépeçage de l’empire Ottoman, Mustafa Kemal qui s’opposait au diktat des Etats européens dans le partage du califat à l’agonie, renversa la situation par les armes et installa un État séculier calqué sur le modèle européen, condamnant tous les séparatistes à l’assimilation ou à la révolte (Kurdes et Arméniens, notamment).

    Le désordre suscité par la 2° Guerre mondiale va stimuler les nationalistes et les marxistes dans des guerres de libération armées. Dans la guerre révolutionnaire, Mao reprend les méthodes de la guérilla (surprise, mobilité et harcèlement). C’est, d’ailleurs, en s’inspirant de la doctrine militaire de Mao que le Viet-Minh infligera une lourde défaite aux forces coloniales françaises. La doctrine de Mao mêle aspects politiques et militaires. Il s’agit de mobiliser la population grâce à des cadres organisés en infrastructure politique clandestine_ ; transformer sa faiblesse en force par une guerre d’usure_ ; gagner à sa cause les prisonniers pour en faire des propagandistes_ ; user de tactiques défensives dans le cadre d’une stratégie offensive dont le but final est l’anéantissement de l’ennemi. La stratégie de Mao est de mettre une pression permanente sur l’ennemi afin de lui briser le moral par une alternance de guérilla et d’opérations militaires classiques. La guerre irrégulière ne se gagne pas sur un plan strictement militaire, mais par un contrôle administratif des populations. L’importance de l’idéologie pour mobiliser en masse et obtenir l’adhésion enthousiaste est un aspect fondamental de la politique maoïste.

    Dans les colonies, l’oppresseur va perdre sa légitimité en même temps que son prestige. Les colonisés, outre la connaissance acquise sur leurs maîtres, ont compris que ceux-ci étaient vulnérables ; battus par les japonais, puis battus en Indochine, etc. En 1948, après la défaite du nazisme, la Déclaration Universelle des droits de l’Homme est proclamée. Avec l’écrasement d’une idéologie fondée sur la supériorité d’une supposée « race germanique », qui encore aurait pu soutenir une supériorité raciale du colonisateur face aux populations des colonies ?

    Après la défaite d’Indochine, l’état français tente de conserver son rang et ne cédera en Algérie qu’après un autre conflit meurtrier. Malgré une maîtrise militaire de la situation, le mythe de l’Algérie française, creuset d’un statut discriminatoire envers les autochtones, est rejeté par ces derniers qui manifestent en masse pour l’indépendance. La désaffection de la population signait une défaite politique de la France dont l’opinion publique était favorable à l’indépendance.

    Entre-temps, les USA ont pris le relais au Viet-nam. La force du Viet-công résidait dans sa capacité à gagner l’adhésion de la population qui participa à la logistique de guerre. Mais, plus encore, ce sont les erreurs commises par l’oppresseur qui vont coûter cher. La mise en place de Diêm (un catholique) qui va s’aliéner la population va permettre au Viet-Công de se poser en défenseur et de justifier sa présence partout. L’augmentation du nombre de conseillers US, l’équipement de l’armée sud-vietnamienne et un déluge de feu et d’acier n’auront pas le dessus sur la volonté du Viet-Công et de la population. Les opérations coup de poing au cœur même du dispositif US mettront l’opinion publique US en effervescence rappelant les pertes nombreuses du contingent US et l’inutilité de cette guerre. En gagnant l’opinion publique, le Viet-công gagnait politiquement la guerre.

    La leçon à tirer, dans ce type de conflits, c’est que la victoire tient plus à la motivation que procure une idéologie, c’est-à-dire au facteur moral, qu’au préjugé qui suppose que la technologie peut tout « résoudre ».

    Nous pouvons ajouter, aussi, que rien ne peut se faire sans l’adhésion active de l’ensemble d’une population.

    L’ouvrage de G. Chaliand aborde ensuite des conflits qui font l’actualité. La question palestinienne bien sûr, mais aussi, le rôle de l’Arabie Saoudite qui a profité pleinement de la crise pétrolière pour entreprendre une ré-islamisation militante des sociétés, la transformation de l’Iran en un État théocratique chiite (1979)... Sont abordés aussi les conséquences de l’entrée des troupes de l’Etat communiste russe en Afghanistan et le rôle de l’opinion publique dans l’échec de cette attaque. Viennent ensuite une analyse de la 1ère guerre du Golfe, des représailles qu’elle entraîne (comme le 11 septembre 2001) et du renforcement des néo-conservateurs (partisans d’une « guerre préventive » et du « Patriot Act »), la chute de Saddam, le recrutement par l’Etat US de véritables « armées privées », le scandale de Guantanamo,… la perte de crédibilité des Etats occidentaux dont les discours se révèlent aux yeux de tous n’être que des slogans vides de sens… et les mensonges constants des « alliés » à leur propres populations pour justifier leurs politiques désastreuses constituent autant de sujets de débat.

    Article d’@Anarchosyndicalisme ! n°150 été 2016
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article817

  • Entretien intéressant de Keny Arkana sur Reporterre.net
    https://www.reporterre.net/Sans-un-effort-de-bienveillance-la-guerre-civile-nous-attend

    Réalisé par @vslonskamalvaud et Barnabé Binctin

    Mais que faire face aux violences policières  ?

    J’en ai parfois parlé avec mes amis militants, qui me traitent d’ailleurs de grosse naïve, mais je pense qu’il faudrait faire des actions de sensibilisation dans les commissariats. Sensibiliser les policiers et leur expliquer pourquoi nos luttes sont justes, et pourquoi elles les concernent eux et leurs enfants. Aller dans les commissariats et discuter, parce que, face aux barricades, chacun est dans son rôle, ça devient compliqué. T’imagines si demain, en pleine manifestation, un CRS décidait, devant ses collègues, d’arrêter, de poser son casque et de passer de notre côté  ? Ça casserait une division à laquelle on veut nous faire croire. C’est le truc qui ferait le plus peur au gouvernement.

    Mais j’espère juste qu’à ce moment-là, il n’y aurait pas un lâche qui en profiterait pour aller savater le flic. Parce qu’à un moment, la lutte n’est pas seulement politique et sociale, elle est aussi humaine. Et il faut savoir où est vraiment ton ennemi et où est vraiment ton camarade. Bien sûr qu’on a toutes les raisons d’avoir la haine des flics surtout lorsqu’on a subi ses violences — moi, j’avais 13 ans lors de mon premier passage à tabac, ils m’ont frappée pendant des heures et j’avais la rage. Mais veut-on se venger ou veut-on changer les choses  ? Il faut savoir avaler sa rancœur, la transmuter, pour l’intérêt général et collectif.

    De toute façon, on ne gagnera pas dans le rapport de force d’aujourd’hui. Et même si on y arrivait, on reproduirait les mêmes schémas après. Parce que, malheureusement, la plupart des gens n’ont pas fait ce travail intérieur de changement de conscience, au service de la bienveillance.

    (…) Pour moi, le meilleur moyen de se faire entendre dans le rapport de force, c’est de bloquer l’économie. C’est l’exemple des piqueteros en Argentine : ils ont réussi à le faire dans un pays qui fait huit fois la France. La France, c’est petit : il y a cinq autoroutes principales… C’est Vinci, l’ennemi : on pourrait faire une action « péages gratuits », des concerts et des teufs sur les autoroutes pour les bloquer. Si tu bloques ne serait-ce qu’une journée, tu bloques toute l’économie du pays, et tu fais perdre des millions à Vinci  ! Il y a de vraies actions à faire, et quand tu touches au nerf de la guerre, on t’écoute un peu plus.

    (…)

    La grande difficulté des mouvements de contestation aujourd’hui, c’est de toucher les classes populaires…

    C’est compliqué. Un mec de quartier a toujours été exclu, pourquoi il se sentirait concerné ? Qui est là pour lutter à ses cotés contre la discrimination, la ghettoïsation, les abus policiers et toutes les portes qu’on lui ferme à la gueule ? En voyant les manifs, il peut se dire que c’est les bourgeois contre les bourgeois, que ces mêmes gens qui militent n’en ont jamais rien eu à faire de lui. Il y a un désintérêt du fait de l’exclusion. Le manque d’humanité pousse au manque d’humanité, c’est un cercle infernal. Et puis, il y a aussi toute cette pression capitaliste, dans les quartiers, une sorte de culte de l’argent. Quand ta famille a tout sacrifié, qu’elle a quitté son pays, ses proches, pour pouvoir t’offrir une situation et un certain confort de vie, c’est difficile de mettre une croix sur toute cette douleur et tout cet espoir sous prétexte qu’il faut faire la « révolution ». C’est dans les quartiers qu’on subi toutes les pires galères dans ce pays. Quand ton grand-père s’est battu pour la France et que, trois générations après, on te parle encore de rentrer chez toi, il y a de quoi cultiver quelques rancœurs. Ça rend la convergence beaucoup plus compliquée. Je pense qu’il va falloir une génération ou deux encore, pour faire évoluer cette situation.

    Forcément, ceux qui viennent de la classe moyenne n’ont pas tout cet héritage, ils sont forcément plus libres. Et puis, en France, il y a toujours eu ce côté élitiste chez les militants. Leurs brochures, c’est pas donné à tout le monde de les lire. Quand tu vas en Grèce, il y a un truc beaucoup plus populaire dans le militantisme. Il n’y a pas la même histoire d’immigration aussi, parce qu’il n’y a pas toute cette histoire des colonies. C’est compliqué, la France, et c’est pour ça que, tant qu’il n’y aura pas eu des guérisons entre les gens, j’ai peur que pousser à la révolte ne rapporte que la guerre civile. Et ne fasse le jeu des identitaires, qui prennent à fond du galon depuis quelques années.

    Certains mouvements d’extrême droite noyautent les quartiers populaires, autour de Dieudonné ou de Soral, par exemple. Le FN a déjà tenté à certains moments de récupérer tes chansons. Que fait-on face à cela  ?

    Je suis pour l’humain et donc pour le débat. Pas avec des Marine Le Pen, parce que c’est des manipulateurs, ces gens-là. Mais avec les petites gens. Souvent, les gens qui ont les idéologies et les pensées les plus nauséabondes ont aussi des blessures de ouf. Est-ce qu’on continue à alimenter cette blessure  ? Je veux que les gens comprennent bien mon discours, sans faire d’amalgame, parce que c’est subtil ce que je raconte. Je pense qu’on se trompe à faire des camps. L’exclusion ne fait que renforcer les fractures.

    Franchement, si demain, avec mes potes du quartier, on voit débarquer des fachos, plutôt que d’aller se «  fighter  », je préférerais dire : « Venez, on se pose et on discute, c’est quoi le problème en fait  ? Elle vient d’où, toute cette haine  ? Pourquoi  ? Tu connais l’histoire  ? La France, si c’est un pays riche, c’est grâce aux minerais de l’Afrique noire, encore aujourd’hui. Vous êtes sûrs de vouloir faire chacun chez soi  ? Parce que c’est vous les perdants  ! »

    Dans l’histoire de la France, on ne peut pas enlever la colonisation. S’il y a une dette, c’est les pays coloniaux qui doivent beaucoup… Je me dis qu’il faut parler, aller au fond des choses, mettre les mecs face à leur contradiction. Alors que dans le rejet, tu donnes raison à l’autre. On est semblable dans nos cœurs. Tu vois, même le raciste, peut-être que si tu connais son histoire et que tu as un peu de compassion, tu peux te dire : «  Ah, okay, il en est arrivé là, pour ça, il a eu telle expérience de vie.  » La compassion, c’est important pour notre guérison générale. Parce que vraiment, on est tous un peu malade. Il faut être tolérant. Et ne pas être comme ceux que l’on combat.

    • Keny Arkana ou la vie sauvage | StreetPress via @baroug
      http://www.streetpress.com/sujet/1466331150-keny-arkana-interview-lacrim-marcos-zad

      Oui. A partir de 15 ans, j’ai voyagé dans toute l’Europe. Les premiers endroits militants que j’ai fréquenté, c’était en Italie, avant Berlusconi. Je dormais dans des gros centres sociaux autonomes. Au moment du contre-sommet de Gênes, j’étais à Rome. Il y avait des convois qui partaient du centre où j’étais. Moi je rapportais de l’argent que je prenais tranquillement en karaté karaté dans les bus. Je mettais la main à la pâte avec ce que je savais faire. Et puis c’est facile à Rome, dans les bus tout le monde est collé. En fait, il n’y avait même pas besoin de faire karaté.

      Quand je faisais ça, je donnais souvent plus de la moitié de ce que j’avais pris à un mec dehors. Ça me déculpabilisait. Même s’il n’y avait pas d’agression, je savais que ce n’était pas bien. Et en même temps, j’étais à la rue, j’avais faim. Donner, c’était histoire de dire au bon Dieu que je faisais quelque chose de bien.

    • Par contre, je ne crois vraiment pas à la convergence des luttes. Pour moi les quartiers ne s’engageront jamais avec les étudiants ou les syndicats. Quand tu fais partie des vrais exclus et qu’on a jamais lutté pour toi, c’est difficile de rejoindre un mouvement comme celui-là, qui peut paraître bobo ou bourgeois. Dans les quartiers, beaucoup de jeunes sont aussi hyper capitalistes. Quand tes parents ont pris des risques pour t’offrir une vie meilleure, c’est difficile de renier tout ça. Et quand un militant vient t’expliquer que tout ça, le capitalisme, c’est de la merde, ça passe mal.

    • Est-ce que tu es allée à Nuit Debout ?

      J’y suis allée un peu en scred’ (elle fait mine de se cacher sous sa capuche, ndlr.). Ça m’a mis du baume au cœur de voir une assemblée de 600 personnes qui veulent s’engager sans entrer dans un syndicat ou un parti politique. C’est puissant comme truc quand même : place de la République, en plein Paname. Je devais jouer pour le 1er mai mais ça ne s’est pas fait. Beaucoup de ceux qui militent là-bas sont aussi des gens que je côtoie depuis des années : les BDS, les désobéissants…

  • [Vidéo] Mal-logés : le mouvement à Paris (1986 –1990)
    http://www.etatdexception.net/video-mal-loges-le-mouvement-a-paris-1986-1990

    Paris, automne 1986 : 19 personnes, dont huit enfants, meurent dans une série d’incendies criminels qui ravage plusieurs immeubles de l’est parisien, hôtels meublés ou bâtiments laissés à l’abandon par des propriétaires spéculateurs. Parmi les quelque 150 familles rescapées, en grande majorité composées d’immigrés originaires d’Afrique noire et du Maghreb, seule une vingtaine sera relogée par la mairie RPR pour la plupart dans d’autres hôtels, immeubles insalubres ou en lointaine banlieue. Cependant, les mal-logés affirment haut et fort qu’ils ne quémandent pas l’aumône, et ne veulent pas de solutions transitoires tels les « foyers pour clochards » ! On assiste alors à une velléité de généralisation de la lutte. Durée : 11 min. Source : Etat (...)

  • L’islamophobie, une invention du colonialisme français
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article810

    « #Islamophobie », le terme a envahi le discours politique. Sa datation a été l’occasion d’une belle polémique. Observatrice attentive des dynamiques religieuses actuelles, Caroline Fourest avait cru qu’il était apparu fin année 70 / début années 80. En fait, il avait été forgé au tout début du XXe siècle. Cette erreur de datation, les islamobaratineurs n’ont pas manqué d’en faire des gorges-chaudes. Fouillant les archives (plusieurs sont universitaires et donc payés pour ça), ils ont en effet fini par découvrir que c’est vers 1910 qu’un certain #Alain_Quellien avait forgé ce néologisme (1). Ensuite, le terme a été repris vers 1912 par d’autres auteurs, il aurait circulé quelque peu jusqu’au milieu des années 1920, avant semble-t-il, de disparaître totalement de la circulation.

    Dans les années 1980, quand C. Fourest l’observe, ce n’est donc pas «  d’apparition » qu’elle aurait du parler mais de « réapparition ». Donnons sur ce point toute la raison aux islamobaratineurs et rendons-leur grâce de nous avoir fait découvrir Quellien dont la lecture est bien intéressante : elle montre toute la perversité du concept d’islamophobie.

    La personnalité même du fondateur du concept d’islamophobie est finalement, bien embarrassante pour ceux qui l’on exhumé. Aussi, le présentent-ils tantôt comme membre d’une sorte d’amicale d’ «  administrateurs-ethnologues  » (2) – amusant concept qui sent le bricolage – tantôt comme un « orientaliste français spécialiste de l’islam ouest-africain » (3). « Ah, qu’en termes galants ces choses là sont dites » se serait écrié Molière !

    Quellien, et on comprend tout de suite ce qui gêne les enfumeurs, était en réalité un cadre supérieur du Ministère des colonies, en lien avec l’officier « qui dirige avec compétence et distinction, le service des informations islamiques au Ministère des colonies » (4). Foin donc « d’administrateur-ethnologue » ou de sympathique « orientaliste » , Quellien est un Attaché du ministère des colonies qui fait son travail : conseiller la meilleure stratégie de colonisation possible. C’est bien là tout l’objectif de son ouvrage « La Politique musulmane dans l’Afrique occidentale française » (5).

    C’est dans cet objectif, qu’après une réflexion bien nourrie et mûrie, il crée le concept « d’islamophobie » , une «  islamophobie » que Quellien pourfend avec force dans tout un long chapitre.

    Qu’un fonctionnaire totalement dévoué à la cause de la colonisation en arrive à créer le terme d’islamophobie dans le but de dénoncer les islamophobes avec beaucoup de vigueur, paraît, à première vue étonnant. En fait, c’est une conséquence logique de sa position raciste et de son soutien à la colonisation.

    A la base, Quellien fait un constat : le colonisateur ne « tire » pas tout le bénéfice qu’il pourrait de sa colonisation. Par exemple la partie du

    « Soudan, demeurant aux fétichistes (…) est une riche contrée vouée à l’immobilité, sans commerce, sans industrie, sans culture, sans aucun progrès dans l’avenir ».

    Chacun perçoit tout de suite la profondeur du drame : le pays est « une riche contrée » , mais le colonisateur n’en tire rien ; ses habitants n’ont pas envie de l’exploiter (et de se faire exploiter) au sens capitaliste du terme. Et ils n’ont pas plus envie d’être asservi par un Etat.

    Or, toujours au Soudan, une partie est islamisée. Quelle différence ! Et Quellien de citer un de ses contemporains :

    « Le Soudan, accaparé par l’Islam, c’est la discipline et l’organisation de masses d’hommes, jusqu’ici isolés et farouches ;(…) [qui va vers] la formation d’une société, d’un Etat (…) Avec le temps, on arrivera à faire de l’Islam (…) le plus précieux auxiliaire des intérêts français en Afrique » (6).

    Voici donc, en quelques lignes tout le raisonnement : l’autochtone non islamisé (Quellien et autres « orientalistes » et « administrateurs-ethnologues » ne se gênent pas pour écrire « le nègre » , le «  fétichiste » et laisser libre court à leur racisme…) n’obéit pas et est improductif (au goût du maître) ; par contre le «  nègre » islamisé devient obéissant et accepte de travailler davantage.

    La diffusion de l’Islam en Afrique noire sert donc les intérêts du colonisateur français. C’est un « précieux auxiliaire » . S’attaquer à la propagande islamique, être « islamophobe » comme le sont les colonialistes les plus stupides, c’est nuire aux intérêts coloniaux de la France (7).

    Reste à justifier le raisonnement, car tous ses contemporains sont loin d’être convaincus.

    La première étape est de persuader tout un chacun de « l’infériorité » des noirs. Et là, Quellien, plutôt cauteleux par ailleurs, n’y va pas avec le dos de la cuillère, soit qu’il cite d’autres auteurs, soit qu’il se « lâche » lui-même. Petit florilège :

    « Le noir comprend difficilement les idées abstraites »

    « Son intellectualité [est] très restreinte et son indolence naturelle le [pousse] vers le moindre effort… »

    « … comme l’esprit d’imitation existe à haute dose chez le nègre, celui-ci sera porté tout naturellement à répéter les gestes qu’il a vus et à prononcer les paroles qu’il a entendues, même s’il ne les comprend pas »

    « ... le système de famille chez les nègres n’est pas le patriarcat, comme chez les sémites [dont les arabes], c’est une forme plus animale, le matriarcat,… »

    « Un abîme profond, …, sépare les noirs des chrétiens, dans l’ordre intellectuel, moral, social et religieux », « Cela tient à ce que la race noire est une race inférieure à qui ne peuvent convenir les subtilités complexes de notre civilisation »

    Bref, d’après l’inventeur du terme «  islamophobie » , le « nègre » n’ayant qu’une intellectualité restreinte ne saisirait pas les idées abstraites, tout au plus pourrait-il imiter des gestes et répéter des paroles qu’il ne comprend pas. Son organisation familiale serait même animale.

    Et, pour ceux qui ne seraient pas, malgré ces « arguments » convaincus, de cette infériorité, voici l’argument massue : le « nègre » serait, nécessairement, cannibale :

    « … le fétichisme obéit toujours à des pratiques hideuses, il tue souvent et dévore son ennemi vaincu » (8).

    L’étalage de ces affirmations aussi fausses qu’humiliantes est à proprement parler écœurant. Oui, mais il est indispensable à la construction du concept d’islamophobie.

    Car c’est cette « infériorité » supposée du « nègre » qui justifie son islamisation, présentée comme un « progrès » . En effet, toujours d’après le pourfendeur de l’islamophobie, le noir malgré ses insuffisances intellectuelles serait tout de même conscient de la supériorité de l’Européen. Il voudrait bien l’imiter, mais il ne peut y parvenir. Par contre

    «  (…) il a, tout à côté de lui, le musulman dont l’exemple est facile à suivre… » car « La distance qui sépare (…) [le noir] du musulman n’est pas si considérable ». Le noir, avec un petit effort, peut devenir musulman et, alors il « (…) a presque immédiatement conscience de s’être élevé dans la hiérarchie humaine  ».

    Surtout, et ce n’est pas pour rien que Quellien rappelle qu’Islam veut dire soumission et que sa pratique exige des efforts, le noir islamisé devient un bon petit colonisé :

    « Au point de vue pratique, il [l’Islam] a l’avantage de constituer des tribus plus facilement gouvernables et administrables que les tribus restées fétichises, à cause … de leur obéissance à l’égard de leurs chefs. ». «  L’action du mahométisme s’est également exercée dans les manifestations économiques et commerciales. La vie commerciale et industrielle s’est développée et à vu naître des industries… ».

    Bref, comme le note un autre auteur  :

    « Avec une sécurité plus grande sur les parcours commerciaux, il a provoqué une consommation plus intense, la circulation d’une monnaie fiduciaire et le change. Enfin l’Islam n’a pas été un obstacle au recrutement de nos troupes et de nos marins… (…) Il faut ajouter encore que dans l’ordre économique, à côté de la propriété commune qu’il a laissé subsister, l’élévation sociale s’est manifestée aussi par la constitution d’une propriété individuelle et dans le respect de l’autorité » (9).

    L’Islam est là, et enfin, le colonisateur respire ! Les tribus deviennent gouvernables, une vie commerciale démarre, la monnaie fiduciaire circule, le change se développe, la propriété collective disparait progressivement au profit de la propriété individuelle, et tout cela sans affecter le recrutement de nos soldats et marins (dont des milliers, une fois convertis à l’Islam, viendront gentiment se faire exterminer dans les tranchées en 14/18). Et tout ça grâce à quoi ? Grâce à l’islamisation de l’Afrique noire. En un mot comme en cent, la colonisation et l’islamisation marchent la main dans la main, chacune tirant bénéfice des progrès de l’autre. C’est la conclusion à laquelle parvient, après sa longue étude, Quellien. C’est pourquoi, a contrario, il comprend qu’un des obstacles qui peuvent bloquer les « progrès » de la colonisation, c’est… la critique de l’Islam. C’est pour lutter contre cette possibilité d’entraver la colonisation que Quellien crée le terme « islamophobie » (10) et c’est pourquoi aussi il pourfend cette « islamophobie » dans tout un long chapitre.

    Cependant, s’il accorde une « valeur » à l’Islam (celle de constituer un palier bien utile entre « le nègre » et l’Européen et de faciliter ainsi grandement la colonisation), Quellien affiche un certain mépris pour cette religion dont le

    « … dogme est simple, [qui] manque d’originalité et de sacerdoce… [qui] traite de la vie matérielle et des occupations sensuelles chères aux noirs, dont il flatte les instincts. L’islam est en harmonie avec les idées du milieu, car il tolère l’esclavage et admet la polygamie et la croyance aux génies et aux amulettes… ».

    Bien plus, le créateur du concept d’islamophobie affirme qu’ « Il importe avant tout de réprimer, immédiatement et énergiquement, toutes les tentatives de soulèvement qui revêtent un caractère plus ou moins religieux » des islamistes. Des positions qui, aujourd’hui, le feraient taxer « d’islamophobe » !

    Le concept « d’islamophobie » est donc, depuis son invention, un concept pervers. Il a été inventé pour servir les intérêts du colonialisme français. Aujourd’hui il sert les intérêts du capitalisme international. Sûrement aurons-nous l’occasion de revenir sur ce dernier point…

    1.- Ainsi, Wikipédia écrit : « En fait, le terme « islamophobie » était apparu en 1910 dans l’ouvrage d’Alain Quellien La Politique musulmane dans l’Afrique occidentale française » . Les autres ouvrages cités sont plus tardifs d’une paire d’année.

    2.- Ainsi, dans l’article «  Islamophobie : une invention française  »
    (mai 2012) de Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed, le terme « administrateurs-ethnologues » est utilisé plusieurs fois. C’est seulement dans une note de bas de page que les véritables fonctions de Quellien sont indiquées. L’article, s’il souligne que c’est un français qui a inventé le terme se garde bien de dénoncer le racisme de ses écrits et sa volonté colonialiste affirmée.

    3.- http://www.humanite.fr/que-recouvre-le-terme-dislamophobie-568608

    4.- Termes des remerciements que Quellien lui adresse dans son ouvrage.

    5.- Facilement consultable en fac-similé sur le site de la bibliothèque Gallica. Toutes les citations de l’ouvrage sont extraites de cette édition.

    6.- Edouard Viard. Au Bas-Niger. Q. trouve cette opinion trop tranchée.

    7.- Plus prudent en cela que les politiciens actuels – car s’étant donné la peine de bien étudier le sujet – Quellien est plus réservé sur les conséquences, à terme, de cette islamisation.

    8.- E.-L. Bonnefon. L’Afrique politique en 1900.

    9.- Qu’il définit très clairement comme un : « préjugé contre l’Islam  » , définition actuelle.

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    CITATION
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    « D’une manière générale, l’islamisme politique propage une idéologie conservatrice et libérale, favorable aux intérêts capitalistes (...). Relayant historiquement les fascismes occidentaux (...) sa devise pourrait être ‘Religion, ordre, autorité, morale et communauté’. Comme les fascismes, il dénonce la ‘pourriture’ et la ‘décadence’ des mœurs. Il professe une idéologie, réfractaire au pluralisme, remettant en cause l’individualisme non des fortunes et de la propriété, mais des opinions et des mœurs. Il préconise une société organique de la communauté des fidèles, offrant une perspective intégrative à ceux qui se sentent exclus, et, parfois, au nom de la morale, dénonce les formes les plus criantes de l’injustice sociale. A part l’ajout d’Allah, c’est une copie conforme des fascismes historiques européens. (...) Lorsqu’il se converti à la violence armée, l’islamisme ‘théo-fasciste’ ne la dirige jamais contre les intérêts capitalistes ou les patrons. (...) Il est un allié objectif des régimes politiques en place et des intérêts capitalistes qu’il n’attaque pas. Les peuples, ainsi neutralisés, au lieu de songe à défendre ou conquérir de nouveaux acquis sociaux, sont embrigadés dans d’interminables croisades religieuses qui durent depuis 2001 et dont on ne voit pas la fin. Pendant ce temps, le capitalisme se porte de mieux en mieux. »

    Extraits de : «  Terrorisme néo-fasciste islamiste, généalogisme et mondialisation capitaliste  » , Ahmed Henni, Raison présente n° 197, 1er trimestre 2016

    Article d’@anarchosyndicalisme ! n°149 Avril-Mai 2016
    http://www.cntaittoulouse.lautre.net/spip.php?article810

  • Offensive et guerre mémorielle.

    L’autre esclavage : un aperçu de la traite arabo-musulmane - outre-mer 1ère
    http://la1ere.francetvinfo.fr/2014/04/29/l-autre-esclavage-un-apercu-de-la-traite-arabo-musulmane-147531.

    "Bien qu’il n’existe pas de degrés dans l’horreur ni de monopole de la cruauté, l’on peut soutenir sans risque de se tromper, que le commerce négrier et les expéditions guerrières provoquées par les Arabo-musulmans, furent pour l’Afrique noire et tout au long des siècles, bien plus dévastateurs que la traite transatlantique. De même que l’islamisation de nombreux peuples négro-africains et tout ce que cela a engendré, comme les jihads, n’en fut pas moins à la source d’innombrables implosions.

    Pour la traite transatlantique, en dépit de la monstruosité des traitements, des humiliations et autres calamités, un esclave avait une valeur vénale. Le maître le voulait productif et rentable à long terme. Le but n’était donc pas l’extermination d’un peuple malgré la querelle sémantique opposant certains chercheurs à ceux qui veulent qualifier ce crime contre l’humanité de génocide. Alors que pour ce qui est de la traite arabo-musulmane, plus que le crime des occidentaux, les Arabes ont razzié l’Afrique subsaharienne pendant treize siècles. La plupart des millions d’hommes qu’ils ont déportés, ont presque tous disparu du fait des traitements inhumains, de l’infanticide et de la castration généralisée, pour qu’ils ne fassent pas souche dans le monde arabo-musulman. Il faut dire qu’à partir du moment où l’Afrique noire devenait leur principale source d’approvisionnement en esclaves, dans l’inconscient collectif des Arabes, l’homme noir devenait aussi symbole ou synonyme de servitude.❞
    #islamophobie

  • FRANTZ FANON, L’INDEPENDANCE DANS LA CHAIR | Montray Kréyol
    http://www.montraykreyol.org/article/frantz-fanon-lindependance-dans-la-chair

    Né aux Antilles, psychiatre et militant aux côtés du FLN algérien, #Frantz_Fanon a décrypté dès les années 1950 les effets de la colonisation. Son œuvre, cinquante ans après sa mort, se révèle d’une troublante actualité.

    La mère patrie a trahi son fils noir. Celui-ci la trahira en retour. Frantz Fanon, né antillais en 1925, est mort algérien le 6 décembre 1961, à l’âge encore tendre de 36 ans. Une courte vie qui lui aura laissé le temps de combattre le nazisme au sein des Forces françaises libres, d’étudier la médecine à Lyon – et de suivre les cours du philosophe Maurice Merleau-Ponty –, puis d’exercer, à partir de 1953, son métier de psychiatre en Algérie. Expulsé en 1956 car engagé aux côtés du FLN, il rejoint la Tunisie et sillonne l’Afrique noire à son tour lancée sur la voie de l’indépendance, en tant qu’ambassadeur du gouvernement provisoire algérien, chantre d’une solidarité panafricaine. « Il a choisi. Il est devenu algérien. Il n’est pas facile de se souvenir d’un homme comme celui-là en France », résumait sobrement Aimé Césaire il y a tout juste cinquante ans.

  • « Typique du racisme à la française : le rapport race/frivolité/exotisme/humanitarisme » - Achille Mbembe

    http://mouvements.info/decoloniser-les-structures-psychiques-du-pouvoir

    Le statut de la « race » en France et dans les anciennes colonies et possessions françaises n’est pas le même que dans les pays anglo-saxons. De même le racisme à la française ne fonctionne pas sur le même modèle que le racisme anglo-saxon. Ceci s’explique sans doute par des raisons d’ordre historiques, mais aussi philosophiques et politiques. (...)

    Prenons l’histoire. Qui, aujourd’hui, sait qu’entre les deux guerres, le public français fut abreuvé d’images et d’objets en provenance des possessions françaises d’Afrique noire et du Maghreb, d’Asie du Sud-est et des Antilles ? Ces images et objets étaient partout et il était presque impossible de ne pas les voir puisqu’ils pénétraient la plupart des sphères de la vie publique et privée. Qu’il s’agisse de livres, de films, de la publicité ou des expositions, tout était fait pour rendre visible l’emprise de la France outre-Mer. Ainsi, le Musée de l’Homme, inauguré en 1937, contenait le tribut amassé par la fameuse Mission Dakar-Djibouti dont rend compte Michel Leiris dans son Afrique fantôme.

    Le film documentaire Le Voyage au Congo de Marc Allégret était projeté à peu près partout. Dans « l’Appel du silence », en 1936, un hommage cinématique était adressé à la mission civilisatrice de Foucauld, tandis que l’Anthologie nègre de Blaise Cendrar, déjà en 1921, enregistrait un énorme succès. René Maran gagnait le Prix Goncourt pour son roman Batouala – première consécration d’un auteur d’origine nègre par cette prestigieuse institution. Bien avant la déification de « Zizou » (Zinedine Zidane), Joséphine Baker avait déjà popularisé Zouzou. Une énorme fascination s’était emparée des Français en rapport à toutes choses coloniales. Les enfants lisaient les aventures de Tintin au Congo et les gens de tous âges avaient leur petit-déjeuner au goût de « Y’a bon Banania » dont la mascotte était un tirailleur sénégalais.

    On aurait de la peine aujourd’hui à croire qu’il y eut un moment en France, dans les années 1920, où l’intérêt pour la culture nègre n’était pas seulement une mode, mais où être au fait de cette culture constituait le signe même de la modernité. Mais il y a une différence entre les images que l’on montre de l’autre, ce que l’ont dit au sujet de l’autre et ce que cet autre dit de lui-même (auto-récit). Je veux dire que ce qui, historiquement, caractérise le racisme à la française, c’est l’intimité des images de l’Autre que l’on fabrique et la distance humaine d’avec ceux et celles que ces images représentent. Ceux et celles qui sont mis(es) en images constituent, à la vérité, des objets d’un dessein qui ne les concerne pas au premier chef.

    Ainsi fonctionne historiquement le racisme à la française. Toujours il évoque un signe qui, à peine né sous le regard, doit aussitôt glisser sous le même regard ; doit être aussitôt rendu à l’invisible soit parce que voir, dans ce cas, c’est montrer plus qu’on ne voit ; ou encore parce que voir, dans ce cas, c’est toujours voir moins que cela qui est montré. L’objet du voir, c’est précisément de rendre superflue la nécessité d’une pensée critique. Le corps noir, juif, ou arabe que l’on voit pré-existe, en quelque sorte et idéalement, dans l’imagination. Avant d’être vu, il est déjà subordonné à la volonté de celui qui est appelé à le voir. Il y a une loi du regard qui lui donne forme avant même qu’il n’ait été vu. Voilà, à mon avis, une première manière de fonctionnement du racisme à la française.

    Typique également du racisme à la française est le rapport entre race, frivolité et exotisme. Ce qui se passe dans les années 1920 à Paris est, à cet égard, très significatif, et nous vivons toujours sur cet héritage. À cette époque, la culture nègre devient, du moins dans les milieux avant-gardistes, l’étalon même de la modernité. Un puissant mouvement d’appropriation de ce que l’on pourrait appeler les formes nègres s’opère dans des domaines aussi variés que la publicité, la peinture, la sculpture, la photographie, la musique populaire, la danse et le théâtre, la littérature, le journalisme, le design, la mode. L’avant-garde parisienne, consciente de bousculer les valeurs bourgeoises d’alors, se réclame alors de la négrophilie. Mais loin d’être un amour pur et simple porté à l’endroit d’un semblable, la négrophilie devient en effet le miroir des ambiguïtés que la France d’alors entretient par rapport à la question de la race.

    Dans une large mesure, l’exotisme est la langue privilégiée du racisme à la française. Mais l’un des canons de l’exotisme est la frivolité. L’attraction a lieu non pas du fait des similarités, mais précisément parce que les différences subjectivées, une fois mises en branle, permettent de produire des fantasmes. La mise en acte de ces fantasmes constitue une dimension centrale de l’exotisme et du racisme à la française. Dans cette pratique fantasmatique, les Noirs, par exemple, sont loués pour leur vitalité et énergie primitive, leur naïveté, leurs passions musculaires et leur puissance sexuelle, leurs danses et musiques.

    Mais il n’y a pas que l’exotisme. Il y a également une tradition humanitarianiste dont les origines remontent à la Révolution. Dans le domaine artistique, il suffit de voir la peinture d’Anne-Louis Girodet, Portrait du citoyen Belley, qui porte précisément sur l’égalité raciale, au lendemain de la première abolition de l’esclavage. Mais c’est une tendance qui s’affermit notamment au cours de la première moitié du XIXe siècle avec les peintures de Théodore Géricault (Le radeau de la Méduse, 1819), Eugène Delacroix (La mort de Sardanapalus, 1827), ou Jean-Auguste-Dominique Ingres (Odalisque avec une esclave, 1839).

    Le travail consiste ici à produire la race et à en faire une valeur d’usage que l’on consomme soit directement, soit par le biais d’artefacts que l’on investit d’une valeur psychique. Pour parler comme Marx, je dirais qu’il est du racisme à la française de toujours chercher à faire de la race à la fois une substance principale et une matière auxiliaire. Peu importent les circonstances où une de ces qualités prévaut sur l’autre. L’important est que l’une peut être convertie en l’autre. Par ailleurs, la race est susceptible de former la matière première de multiples autres produits. Elle doit alors subir toute une série de remaniements et de mutations dans lesquels, sous une forme modifiée, elle fonctionne toujours comme matière première jusqu’à la dernière opération qui l’institue comme objet de consommation de masse.

  • Nantes : Huit militants tentant d’ouvrir un squat interpellés. Info - Nantes.maville.com
    http://www.nantes.maville.com/actu/actudet_-nantes-huit-militants-tentant-d-ouvrir-un-squat-interpelles

    Huit militants du collectif de soutien aux #mineurs_isolés_étrangers ont été interpellés ce mardi matin alors qu’ils tentaient d’ouvrir un #squat pour des #migrants, à Nantes.(...) « Comment faire autrement, alors que tant de gamins en exil sont dehors, à Nantes ? Les deux squats déjà ouverts pour eux, dans la ville, sont archi plein. Il n’y avait pas d’autres choix aujourd’hui que d’en ouvrir un troisième. »

    Il était autour de 10 heures ce mardi matin lorsque les policiers ont débarqué, mettant un coup d’arrêt à l’ouverture du 9, rue des Girondins, quartier Chantenay, à Nantes. Un local de bureau désaffecté, convoité par le collectif pour y héberger les adolescents migrants venus d’Afrique noire, du Pakistan, du Bangladesh, et d’ailleurs. 

    Plusieurs dizaines d’entre eux ont échoué ici, perdus, errants. Le collectif tâche de leur fournir de quoi les nourrir. Et de quoi les abriter, quitte à recourir faute de mieux à l’occupation illégale de locaux inoccupés.

    Les huit militants ont été placés en garde à vue à l’hôtel de police pour dégradations, ayant tenté d’entrer par effraction dans ce bâtiment appartenant à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM).

    Rassemblement mercredi
    Cet incident a lieu la veille du rassemblement, mercredi 27, à midi, du collectif Uni-e-s contre une immigration jetable devant le palais de justice, pour exiger la création de structures adaptées pour pouvoir accueillir et accompagner les mineurs isolés étrangers, et la mise en place d’un suivi éducatif pour touts ces adolescents migrants, mineurs ou jeunes majeurs. Entre autres revendications.