Effectivement la situation de rente liée à la position dominante dont bénéficie Microsoft dans l’administration publique française est scandaleuse mais elle s’explique en partie par le fait que Microsoft est également dans la même position dominante dans le reste de la société. Les fichiers de bureautique (en grande partie, de traitement de texte et tableur) s’échangent entre les administrations et les « partenaires » (entreprises, association, etc.) et force est de reconnaitre que l’interopérabilité entre le privateur et le libre n’est pas toujours garantie (et là je n’évoque même pas les macros). Personne n’a envie de s’emmerder donc on continue à débiter du docx et du xlsx comme des bourrins. La bascule vers LibreOffice pourrait être faite mais il faudrait une volonté politique hors du commun pour arriver à l’imposer : fournir un effort d’organisation et de formation à l’échelle nationale qui me semble totalement irréaliste en l’état actuel, même si je suis convaincu qu’il faudrait le faire. J’ai essayé de faire bouger les choses dans la collectivité où je bossais (à l’époque où j’y habitais) en interpellant directement les élus, sur le thème de « zavez pas honte de fourguer de l’accoutumance aux gamins avec vos logiciels Microsoft dans les écoles ? » en brandissant une note du premier ministre (Ayrault) qui préconisait l’usage du libre dans l’administration. Je me suis fait cramer par la DSI (heureusement je ne dépendait pas de cette direction) et les politiques n’ont pas voulu forcer le haut de la hiérarchie de l’administration à étudier la question ; ces derniers estimant qu’ils n’avaient pas envie de s’emmerder avec ces histoires.
Sinon, ce qu’on évoque beaucoup moins et qui est aussi un scandale ce sont tous les logiciels métiers des collectivités locales (crèche, cantine, compta,, etc.) qui n’appartiennent pas à Microsoft mais qui font l’objet aussi de rentes. Il y en a un paquet et, là, par contre, rien n’empêcherait qu’ils passent tout de suite en libre à l’échelle nationale. C’est typiquement le genre de situation idéale pour le libre : il suffirait que quelques collectivités se regroupent à tour de rôle pour financer tel ou tel projet qui pourrait se déployer ensuite dans toutes les collectivités. Là aussi j’ai proposé cette idée (en donnant les docs de l’Aful et d’April), en tant que représentant du personnel, quand j’entendais mon employeur (en fait, la direction générale) se plaindre des fournisseurs informatiques et on m’a dit, en gros, que ce ne serait jamais possible d’arriver à regrouper plusieurs collectivités etc. Chacun pour soi. Alors faut pas pleurer, hein. Le problème c’est que c’est de l’argent public.