• « Il faut prendre en compte les réalités de l’économie de la culture fondée sur la contribution des artistes-auteurs faiblement rémunérés »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/03/25/il-faut-prendre-en-compte-les-realites-de-l-economie-de-la-culture-fondee-su

    Un collectif rassemblant plusieurs milliers de personnalités du monde culturel, dont la réalisatrice Agnès Jaoui, l’écrivain Nicolas Mathieu et la dessinatrice de bandes dessinées Pénélope Bagieu, demande, dans une tribune au « Monde », l’adoption d’une proposition de loi visant à intégrer les #artistes-auteurs dans la caisse commune de l’#assurance-chômage.

    Aucun livre, film, spectacle vivant, aucune création visuelle, plastique, graphique ou sonore ne peut exister sans le #travail initial d’un ou d’une artiste, ou d’un auteur ou d’une autrice. Nous, les artistes-auteurs, sommes à l’origine de toute œuvre. Nous sommes la condition sine qua non de la création contemporaine, l’élément moteur de la vie culturelle et intellectuelle de notre pays. Notre travail génère une activité économique qui fait vivre les secteurs de la musique, de l’art contemporain, de l’édition, du design ou du cinéma.

    Environ 720 700 emplois dépendaient directement de nos créations en 2019, selon l’analyse conjoncturelle du chiffre d’affaires de la culture au quatrième trimestre 2022. En 2022, les secteurs de l’art et de la #culture représentaient plus de 90 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Un montant colossal, mais sans rapport avec nos conditions de vie.
    En 2021, nous étions plus de 300 000 à avoir déclaré des revenus au régime des artistes-auteurs. Parmi nous, des écrivains, des compositeurs, des réalisateurs, des scénaristes, des photographes, des graphistes, des peintres, des sculpteurs, des illustrateurs, des designers ou encore des traducteurs.

    Une précarité structurelle

    Malgré la diversité de nos professions, nous partageons un statut offrant une faible protection sociale. Contrairement aux artistes-interprètes, nous ne bénéficions pas des #droits_sociaux fondamentaux que sont la reconnaissance des accidents du travail ou des maladies professionnelles. Nous n’avons pas non plus accès à l’assurance-chômage, en dépit de nos #emplois_précaires et discontinus.

    Pourtant, nous sommes aussi des travailleurs et prétendons à une couverture sociale digne de ce nom. La situation sociale des métiers de la création est bien documentée : en 2017, 53 % des artistes graphiques et plastiques ont perçu moins de 8 703 euros de revenus artistiques annuels, selon le rapport d’activité 2018 de la Maison des artistes. Si toutes nos professions ne sont pas égales face à la #pauvreté, tous les artistes-auteurs partagent une précarité structurelle qui les empêche de se projeter et d’envisager l’avenir sereinement.

    La situation est également bien connue du Parlement européen, qui, dans sa résolution du 21 novembre 2023, alerte sur les droits des artistes-auteurs, soulignant qu’ils devraient, comme tous les travailleurs, bénéficier « du droit à un salaire minimum, à la négociation collective, à une protection en ce qui concerne le temps de travail et la santé, à des congés payés et à un accès amélioré à la protection contre les accidents du travail, aux prestations de chômage et de maladie, ainsi qu’aux pensions de vieillesse contributives ».

    Intégrer la caisse commune de l’assurance-chômage

    Il est temps de prendre en compte les réalités d’une économie fondée sur la contribution de travailleurs faiblement rémunérés, soumis à une concurrence féroce et relégués dans des dispositifs inadaptés comme le RSA [revenu de solidarité active] et l’ASS [allocation de solidarité spécifique]. Les réformes en cours menacent d’ailleurs d’en priver nombre d’artistes-auteurs, qui risquent alors de devoir renoncer à leur métier.

    C’est pourquoi, avec Pierre Dharréville, député (Gauche démocrate et républicaine) des Hauts-de-Seine, et la commission culture du Parti communiste français, des syndicats et associations (SNAP CGT, STAA CNT-SO, La Buse, la SRF, l’AFD) ont rédigé, sous l’œil attentif de la majorité des organisations professionnelles, une proposition de loi visant à intégrer les artistes-auteurs dans la caisse commune de l’assurance-chômage.

    Son adoption serait une avancée historique s’inscrivant dans la continuité des dispositifs en place. Car, depuis le milieu des années 1970, nous sommes adossés au régime général de la Sécurité sociale et bénéficions des droits de salariés en ce qui concerne la retraite, la maladie et la famille. Il s’agira ici d’étendre ces prestations au chômage, conformément aux recommandations du Parlement européen.

    Une usure physique et psychique

    Ce progrès social majeur serait financé par une augmentation des cotisations payées par les diffuseurs, qui passeraient de 1,1 % à 5,15 % – les artistes-auteurs s’acquittant déjà d’une part salariale de la contribution chômage via la CSG [contribution sociale généralisée].

    La liberté, au cœur de la création, ne peut exister qu’à l’abri de logiques ultra-concurrentielles qui favorisent les violences systémiques. Contre l’incertitude des règles du marché, qui conduisent à obéir plutôt qu’à inventer, nous devons construire des droits qui changent la donne. S’il est émancipateur, le travail de création génère aussi du stress, des angoisses, amplifiés par l’absence de protection sociale. Cette précarité provoque de l’usure physique et psychique.

    Une rémunération archaïque héritée du XIXe siècle

    L’effet immédiat de ce dispositif de continuité du revenu sera de sortir de la #précarité économique nombre d’entre nous, qui pourront ainsi se maintenir en activité. Nous aurons plus d’aisance pour négocier nos contrats, et serons en meilleure position dans les rapports de force, forcément inégaux, instaurés par les diffuseurs et les commanditaires.
    Moins #précaires, nous n’aurons plus à choisir entre une vie de famille et la poursuite de notre carrière. Nous pourrons envisager plus sereinement des situations de vie extrêmement banales qui sont particulièrement complexes pour nombre d’entre nous (location, emprunts bancaires, etc.).

    La sécurisation des conditions de travail des artistes-auteurs est essentielle pour que continuent d’éclore des talents qui font l’attractivité de la France et contribuent à son rayonnement. Nous demandons aux parlementaires, députés et sénateurs, de défendre et de voter ce texte qui mettrait fin à un mode de rémunération archaïque hérité du XIXe siècle.

    Les premiers signataires de cette tribune : Pénélope Bagieu (dessinatrice de bandes dessinées), Lucas Belvaux (réalisateur), Philippe Faucon (réalisateur et producteur), Gisèle Vienne (chorégraphe et metteuse en scène), Arthur Harari (cinéaste), Agnès Jaoui (actrice et cinéaste), Ange Leccia (artiste plasticien), Nicolas Mathieu (écrivain), Catherine Meurisse (illustratrice et dessinatrice), Usul (vidéaste) et Jean-Luc Verna (artiste plasticien).

    Liste complète des signataires https://continuite-revenus.fr/tribune

  • Report: Arlington’s first guaranteed income pilot boosted quality of life for poorest residents

    –—

    En résumé:
    Employment INCREASED by 16%, and their incomes from paid work INCREASED by 37%. The control group saw no such gains.
    https://hachyderm.io/@scottsantens/111890582659889973

    –—

    Results from Arlington’s first guaranteed income pilot reveal that an additional $500 per month significantly enhanced the quality of life for impoverished families.

    Parents with children under 18, earning less than $46,600 annually, reported that the additional $500 monthly helped them obtain better-paying jobs, address basic needs and improve their overall well-being, according to a new report by the Arlington Community Foundation (ACF), the local nonprofit that oversaw the pilot.

    Moreover, the monthly payments enabled individuals to invest in certifications and educational advancement and tackle their medical bills, credit card debt and student loans.

    Between September 2021 and last December, ACF provided the monthly stipend to families earning 30% of the area median income so they could continue living in Arlington, which is known for having some of the highest living costs in the nation.

    The pilot sought to challenge the stigma associated with guaranteed income, which grants a minimum income to those who do not earn enough to support themselves. It drew inspiration from similar programs in Stockton, California, and Jackson, Mississippi.

    In the long term, Arlington’s Guarantee is meant to persuade state and federal lawmakers to implement some form of guaranteed income. This is not to be confused with universal basic income, another touted policy reform that guarantees income to people regardless of their eligibility for government assistance or their ability to work.

    Findings from the pilot come on the heels of a separate report, which found that more than half of families living in South Arlington cannot afford basic food, housing, medical and childcare expenses, compared to just 15% of families in North Arlington. ACF noted that most guaranteed income pilot participants reside in South Arlington.

    While private donations and philanthropy fully funded the $2 million program, Arlington County’s Department of Human Services (DHS) helped select, track and evaluate participants.

    DHS randomly chose 200 households to receive $500 a month and created a control group with similar demographics and income levels, which did not receive stipends, to compare the results. Most (53%) of participants identified as Black or African-American, followed by people who identify as white (23%). Thirty percent identified as Hispanic or Latino and 70% as non-Hispanic.

    With the extra $500 a month, most participants reported putting the money toward groceries, paying bills, buying household essentials, rent and miscellaneous expenses including car repairs.

    Individuals who received the stipend reported increasing their monthly income by 36%, from $1,200 to $1,640, compared to the control group, whose income only rose 9%. ACF says the extra cash gave participants breathing room to make investments that could improve their job prospects.

    “Rather than working overtime or multiple jobs to meet basic needs, some participants reported using the time to pursue credentials… that could lead to a higher-paying job or starting their own business,” ACF said. “Other participants indicated that Arlington’s Guarantee helped them pursue better-paying jobs by allowing them to purchase interview clothes or cover the gap between their old and new jobs.”

    By the end of the study, nearly three-quarters of participants who received a guaranteed income reported improved mental and physical well-being and an increased sense of control, compared to the control group.

    “It’s a mental thing for me. Just the fact that I knew that I had an income coming, it helped me not have panic attacks,” said one participant. “I knew I could have food for the kids and pay the bills. It allowed me to use my time to be wise about money and not stressed about money.”

    Still, most participants reported they still could not cover an unexpected $400 expense from their savings and said they would need to borrow money, get a loan or sell their belongings in case of an emergency. Income, food and housing insecurity were most acute among undocumented immigrants and those who were once incarcerated.

    Arlington County is not the only locality in Northern Virginia experimenting with a guaranteed income program. Last year, Fairfax County also supported a guaranteed income pilot, offering a monthly stipend of $750 to 180 eligible families over 15 months.

    Although the Arlington County Board signed a resolution imploring state and federal lawmakers to implement a guaranteed income program, neither it nor Fairfax County has indicated that a permanent version of these programs would be implemented locally.

    Meanwhile, ACF said it has been engaging state lawmakers about the prospect of restoring the child tax credit, which expired in 2021, to help raise families out of poverty.

    “This expanded federal CTC in 2021 was a game changer: it reduced child poverty by 46% by lifting 3.7 million children out of poverty before it was allowed to lapse in 2022,” the report said. “This was effectively a trial of guaranteed income policy by the federal government.”

    The U.S. House of Representatives recently passed legislation to expand this credit, which has headed to the Senate for a vote. The tax credit offers a break of up to $2,000 per child, with potentially $1,600 of that being refundable. If signed into law, it would incrementally raise the tax credit amount of $100 annually through 2025.

    Democrats in the Virginia General Assembly, meanwhile, have proposed establishing a child tax credit that would extend until 2029. A House of Delegates subcommittee voted yesterday to delay consideration of the bill until next year.

    https://www.arlnow.com/2024/02/06/report-arlingtons-first-guaranteed-income-pilot-boosted-quality-of-life-for-

    #rdb #revenu_de_base #revenu_garanti #qualité_de_vie #réduction_de_la_pauvreté #travail #Arlington #USA #Etats-Unis #statistiques #chiffres

  • #Productivisme et destruction de l’#environnement : #FNSEA et #gouvernement marchent sur la tête

    Répondre à la #détresse des #agriculteurs et agricultrices est compatible avec le respect de l’environnement et de la #santé_publique, expliquent, dans cette tribune à « l’Obs », les Scientifiques en rébellion, à condition de rejeter les mesures productivistes et rétrogrades du duo FNSEA-gouvernement.

    La #crise de l’agriculture brasse croyances, savoirs, opinions, émotions. Elle ne peut laisser quiconque insensible tant elle renvoie à l’un de nos #besoins_fondamentaux – se nourrir – et témoigne du #désarroi profond d’une partie de nos concitoyen·nes qui travaillent pour satisfaire ce besoin. Reconnaître la #souffrance et le désarroi du #monde_agricole n’empêche pas d’examiner les faits et de tenter de démêler les #responsabilités dans la situation actuelle. Une partie de son #traitement_médiatique tend à faire croire que les agriculteurs et agricultrices parleraient d’une seule voix, celle du président agro-businessman de la FNSEA #Arnaud_Rousseau. Ce directeur de multinationale, administrateur de holding, partage-t-il vraiment la vie de celles et ceux qui ne parviennent plus à gagner la leur par le travail de la terre ? Est-ce que les agriculteur·ices formeraient un corps uniforme, qui valoriserait le productivisme au mépris des #enjeux_environnementaux qu’ils et elles ne comprendraient soi-disant pas ? Tout cela est difficile à croire.

    Ce que la science documente et analyse invariablement, en complément des savoirs et des observations de nombre d’agriculteur·ices, c’est que le #modèle_agricole industriel et productiviste conduit à une #catastrophe sociale et environnementale. Que ce modèle concurrence dangereusement les #alternatives écologiquement et socialement viables. Que cette agriculture ne s’adaptera pas indéfiniment à un environnement profondément dégradé. Qu’elle ne s’adaptera pas à un #réchauffement_climatique de +4 °C pour la France et une ressource en #eau fortement diminuée, pas plus qu’à une disparition des #insectes_pollinisateurs.

    Actuellement, comme le rappelle le Haut Conseil pour le Climat (HCC), l’agriculture représente le deuxième secteur d’émissions de #gaz_à_effet_de_serre, avec 18 % du total français, derrière les transports. La moitié de ces émissions agricoles (en équivalent CO2) provient de l’#élevage_bovin à cause du #méthane produit par leur digestion, 14 % des #engrais_minéraux qui libèrent du #protoxyde_d’azote et 13 % de l’ensemble des #moteurs, #engins et #chaudières_agricoles. Le HCC rappelle aussi que la France s’est engagée lors de la COP26 à baisser de 30 % ses émissions de méthane d’ici à 2030, pour limiter le réchauffement climatique. L’agriculture, bien que répondant à un besoin fondamental, doit aussi revoir son modèle dominant pour répondre aux enjeux climatiques. De ce point de vue, ce qu’indique la science, c’est que, si l’on souhaite faire notre part dans le respect de l’accord de Paris, la consommation de #viande et de #produits_laitiers doit diminuer en France. Mais la solidarité avec nos agriculteur.ices ainsi que l’objectif légitime de souveraineté et #résilience_alimentaire nous indiquent que ce sont les importations et les élevages intensifs de ruminants qui devraient diminuer en premier.

    Côté #biodiversité, la littérature scientifique montre que l’usage des #pesticides est la deuxième cause de l’effondrement des populations d’#insectes, qui atteint 80 % dans certaines régions françaises. Les #oiseaux sont en déclin global de 25 % en quarante ans, mais ce chiffre bondit à 60 % en milieux agricoles intensifs : le printemps est devenu particulièrement silencieux dans certains champs…

    D’autres voies sont possibles

    Le paradoxe est que ces bouleversements environnementaux menacent particulièrement les agriculteur·ices, pour au moins trois raisons bien identifiées. Tout d’abord environnementale, à cause du manque d’eau, de la dégradation des sols, des événements météorologiques extrêmes (incendies ou grêles), ou du déclin des insectes pollinisateurs, qui se traduisent par une baisse de production. Sanitaires, ensuite : par leur exposition aux #produits_phytosanitaires, ils et elles ont plus de risque de développer des #cancers (myélome multiple, lymphome) et des #maladies_dégénératives. Financière enfin, avec l’interminable fuite en avant du #surendettement, provoqué par la nécessité d’actualiser un équipement toujours plus performant et d’acheter des #intrants pour pallier les baisses de production engendrées par la dégradation environnementale.

    Depuis des décennies, les #traités_de_libre-échange et la compétition intra-européenne ont privé la grande majorité des agriculteur·ices de leur #autonomie, dans un cercle vicieux aux répercussions sociales tragiques pouvant mener au #suicide. Si la FNSEA, les #JA, ou la #Coordination_rurale réclament une forme de #protectionnisme_agricole, d’autres de leurs revendications portent en revanche sur une baisse des #contraintes_environnementales et sanitaires qui font porter le risque de la poursuite d’un modèle délétère sur le long terme. Ce sont justement ces revendications que le gouvernement a satisfaites avec, en particulier, la « suspension » du #plan_Ecophyto, accueilli par un satisfecit de ces trois organisations syndicales rappelant immédiatement « leurs » agriculteurs à la ferme. Seule la #Confédération_paysanne refuse ce compromis construit au détriment de l’#écologie.

    Pourtant, des pratiques et des modèles alternatifs existent, réduisant significativement les émissions de gaz à effet de serre et préservant la biodiversité ; ils sont déjà mis en œuvre par des agriculteur·ices qui prouvent chaque jour que d’autres voies sont possibles. Mais ces alternatives ont besoin d’une réorientation des #politiques_publiques (qui contribuent aujourd’hui pour 80 % au #revenu_agricole). Des propositions cohérentes de politiques publiques répondant à des enjeux clés (#rémunération digne des agriculteur·ices non soumis aux trusts’de la grande distribution, souveraineté alimentaire, considérations climatiques et protection de la biodiversité) existent, comme les propositions relevant de l’#agroécologie, qu’elles émanent du Haut Conseil pour le Climat, de la fédération associative Pour une autre PAC, de l’IDDRI, ou encore de la prospective INRAE de 2023 : baisse de l’#élevage_industriel et du cheptel notamment bovin avec soutien à l’#élevage_extensif à l’herbe, généralisation des pratiques agro-écologiques et biologiques basées sur la valorisation de la biodiversité (cultures associées, #agro-foresterie, restauration des #haies favorisant la maîtrise des bio-agresseurs) et arrêt des #pesticides_chimiques_de_synthèse. Ces changements de pratiques doivent être accompagnés de mesures économiques et politiques permettant d’assurer le #revenu des agriculteur·ices, leur #accès_à_la_terre et leur #formation, en cohérence avec ce que proposent des syndicats, des associations ou des réseaux (Confédération paysanne, Atelier paysan, Terre de liens, Fédérations nationale et régionales d’Agriculture biologique, Réseau salariat, …).

    Nous savons donc que les politiques qui maintiennent le #modèle_agro-industriel sous perfusion ne font qu’empirer les choses et qu’une réorientation complète est nécessaire et possible pour la #survie, la #dignité, la #santé et l’#emploi des agriculteur·ices. Nombre d’enquêtes sociologiques indiquent qu’une bonne partie d’entre elles et eux le savent très bien, et que leur détresse témoigne aussi de ce #conflit_interne entre le modèle productiviste qui les emprisonne et la nécessité de préserver l’environnement.

    Une #convention_citoyenne

    Si le gouvernement convient que « les premières victimes du dérèglement climatique sont les agriculteurs », les mesures prises démontrent que la priorité gouvernementale est de sanctuariser le modèle agro-industriel. La remise en cause du plan Ecophyto, et la reprise en main de l’#Anses notamment, sont en totale contradiction avec l’urgence de s’attaquer à la dégradation environnementale couplée à celle des #conditions_de_vie et de travail des agriculteur·ices. Nous appelons les citoyen·nes et les agriculteur·rices à soutenir les changements de politique qui iraient réellement dans l’intérêt général, du climat, de la biodiversité. Nous rappelons que le sujet de l’agriculture et de l’#alimentation est d’une redoutable complexité, et qu’identifier les mesures les plus pertinentes devrait être réalisé collectivement et démocratiquement. Ces mesures devraient privilégier l’intérêt général et à long-terme, par exemple dans le cadre de conventions citoyennes dont les conclusions seraient réellement traduites dans la législation, a contrario a contrario de la précédente convention citoyenne pour le climat.

    https://www.nouvelobs.com/opinions/20240203.OBS84041/tribune-productivisme-et-destruction-de-l-environnement-fnsea-et-gouverne
    #tribune #scientifiques_en_rébellion #agriculture #souveraineté_alimentaire #industrie_agro-alimentaire

  • « En sociologie, la prise en compte du ressenti peut aider à identifier les inégalités les plus critiques », Nicolas Duvoux
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/11/20/en-sociologie-la-prise-en-compte-du-ressenti-peut-aider-a-identifier-les-ine

    La sociologie ne peut prétendre à la neutralité, puisqu’elle est une science étudiant la société au sein de laquelle elle émerge. Elle est prise dans les divisions et conflits sociaux, elle met au jour des formes de contrainte et de domination auxquelles elle ne peut rester indifférente. De quel côté penchons-nous ?, demandait à ses pairs le sociologue américain Howard Becker, dans un texte majeur (« Whose Side Are We on ? », Social Problems, 1967). Cependant, cette discipline n’a pas vocation à se substituer à la politique et aux choix collectifs qui relèvent du débat public. La contribution qu’elle peut apporter est de formuler un diagnostic aussi précis que possible sur les dynamiques sociales et la différenciation de leurs effets selon les groupes sociaux.

    L’inflation et la hausse des prix alimentaires très forte depuis l’année 2022 affectent beaucoup plus durement les ménages modestes. Ceux-ci consacrent en effet une part plus importante de leurs revenus à ce poste de consommation. Le relever revient à formuler un constat objectif. De même, la hausse des taux d’intérêt immobiliers exclut davantage de l’accès à la propriété les ménages sans apport (plutôt jeunes et de milieux populaires) que les autres. Il y va ainsi des évolutions de courte durée, mais aussi de celles de longue durée : le chômage touche plus fortement les moins qualifiés, les ouvriers et employés, même s’il n’épargne pas les cadres, notamment vieillissants ; la pauvreté touche davantage les jeunes, même si elle n’épargne pas les retraités.
    Formuler un diagnostic suppose d’éviter deux écueils qui se répondent et saturent un débat public fait d’oppositions, voire de polarisation, au détriment d’une compréhension de l’état de la société. La littérature du XIXe siècle – comme les sciences sociales avec lesquelles elle a alors partie liée – a souvent oscillé entre d’un côté une représentation misérabiliste du peuple, en soulignant la proximité des classes laborieuses et des classes dangereuses, et de l’autre une vision populiste qui exalte les vertus des classes populaires. Claude Grignon et Jean-Claude Passeron l’ont montré dans un livre qui a fait date (Le Savant et le Populaire, Gallimard, 1989). De la même manière, le débat public semble aujourd’hui osciller entre un optimisme propre aux populations favorisées économiquement et un catastrophisme des élites culturelles.

    Cruel paradoxe

    Pouvoir envisager l’avenir de manière conquérante vous place du côté des classes aisées ou en ascension. Cette thèse a un enjeu politique évident : le rapport subjectif à l’avenir nous informe sur la position sociale occupée par un individu et non sur sa représentation de la société. Pour ne prendre qu’un exemple, sur la fracture entre les groupes d’âge, on n’est guère surpris qu’en pleine période inflationniste le regain de confiance en son avenir individuel soit le privilège quasi exclusif [d’un %] des seniors. Il faut être déjà âgé pour penser que l’on a un avenir, cruel paradoxe d’une société qui fait porter à sa jeunesse le poids de la pauvreté et de la précarité de l’emploi, au risque de susciter une révolte de masse.
    Peut-être est-ce un signe de l’intensité des tensions sociales, nombre d’essais soulignent le décalage entre la réalité d’une société où les inégalités sont relativement contenues et le pessimisme de la population. Les dépenses de protection sociale sont parmi les plus élevées du monde, sinon les plus élevées. En conséquence de ces dépenses, les Français jouissent d’un niveau d’éducation, d’égalité et d’une sécurité sociale presque sans équivalent. Ces faits sont avérés.

    Mais le diagnostic ne se borne pas à ce rappel : les données objectives qui dressent le portrait d’une France en « paradis » sont, dans un second temps, confrontées à l’enfer du « ressenti », du mal-être, du pessimisme radical exprimé par les Français, souvent dans des sondages. Ainsi, dans « L’état de la France vu par les Français 2023 » de l’institut Ipsos, il apparaît que « 70 % des Français se déclarent pessimistes quant à l’avenir de la France ». Les tenants de la vision « optimiste », qui se fondent sur une critique du ressenti, tendent à disqualifier les revendications de redistribution et d’égalité.

    Or l’écart entre le « ressenti » et la réalité objective des inégalités peut être interprété de manière moins triviale et surtout moins conservatrice. Cet écart peut être travaillé et mis au service d’un diagnostic affiné de la situation sociale, un diagnostic qui conserve l’objectivité de la mesure tout en se rapprochant du ressenti.

    Une autre mesure de la pauvreté

    La notion de « dépenses contraintes » en porte la marque : ce sont les dépenses préengagées, qui plombent les capacités d’arbitrage des ménages, notamment populaires, du fait de la charge du logement. Entre 2001 et 2017, ces dépenses préengagées occupent une part croissante du budget, passant de 27 % à 32 %, selon France Stratégie. « Le poids des dépenses préengagées dans la dépense totale dépend d’abord du niveau de vie. Il est plus lourd dans la dépense totale des ménages pauvres que dans celle des ménages aisés, et l’écart a beaucoup augmenté entre 2001 (6 points d’écart) et 2017 (13 points d’écart). »
    Cette évolution et le renforcement des écarts placent de nombreux ménages – même s’ils ne sont pas statistiquement pauvres – en difficulté. La volonté de rapprocher « mesure objective » et « ressenti » permet de prendre une tout autre mesure de la pauvreté, qui double si l’on prend en compte le niveau de vie « arbitrable » , soit le revenu disponible après prise en compte des dépenses préengagées.

    De ce point de vue, l’équivalent du taux de pauvreté, c’est-à-dire la part des personnes dont le revenu arbitrable par unité de consommation est inférieur à 60 % du niveau de vie arbitrable médian, s’établissait à 23 % en 2011, selon des travaux réalisés par Michèle Lelièvre et Nathan Rémila pour la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques. Ce chiffre atteint même 27 % si l’on prend en compte les dépenses peu compressibles, comme l’alimentation. Comparativement, le taux de pauvreté tel qu’on le définit traditionnellement se fixait en 2011 à 14,3 %. L’augmentation de la fréquentation des structures d’aide alimentaire témoigne des difficultés croissantes d’une part conséquente de la population.

    Le parti du catastrophisme

    L’optimisme empêche de penser les réalités dans toute leur violence et d’identifier les remèdes qui conviennent le mieux à ces maux. Le catastrophisme doit également être évité. Il a tendance à accuser exclusivement les super-riches dans la genèse des maux sociaux, en mettant en avant une explosion des inégalités démentie par les faits, si l’on exclut le patrimoine et la forte augmentation de la pauvreté dans la période post-Covid-19. En prenant le parti du catastrophisme, la sociologie, et avec elle la société, s’exonérerait d’un travail de fond.
    Un certain nombre de points soulignés par ceux qui critiquent le pessimisme restent vrais. La société française a connu une relative mais réelle démocratisation de l’accès à des positions privilégiées. Les postes d’encadrement n’ont cessé d’augmenter en proportion de la structure des emplois, une partie non négligeable de la population – y compris au sein des catégories populaires – a pu avoir accès à la propriété de sa résidence principale, a pu bénéficier ou anticipe une augmentation de son patrimoine. Les discours sur la précarisation ou l’appauvrissement généralisés masquent la pénalité spécifique subie par les groupes (jeunes, non ou peu qualifiés, membres des minorités discriminées, femmes soumises à des temps partiels subis, familles monoparentales) qui sont les plus affectés et qui servent, de fait, de variable d’ajustement au monde économique. Le catastrophisme ignore ou feint d’ignorer les ressources que les classes moyennes tirent du système éducatif public par exemple.

    Le catastrophisme nourrit, comme l’optimisme, une vision du monde social homogène, inapte à saisir les inégalités les plus critiques et les points de tension les plus saillants, ceux-là mêmes sur lesquels il faudrait, en priorité, porter l’action. La prise en compte du ressenti peut aider à les identifier et à guider le débat et les décideurs publics, à condition de ne pas entretenir de confusion sur le statut des informations produites, qui ne se substituent pas aux mesures objectives, mais peuvent aider à les rapprocher du sens vécu par les populations et ainsi à faire de la science un instrument de l’action.

    Nicolas Duvoux est professeur de sociologie à l’université Paris-VIII, auteur de L’Avenir confisqué. Inégalités de temps vécu, classes sociales et patrimoine (PUF, 272 pages, 23 euros).

    voir cette lecture des ressorts du vote populaire RN depuis les années 2000
    https://seenthis.net/messages/1027569

    #sociologie #inflation #alimentation #aide_alimentaire #dépenses_contraintes #revenu_arbitrable #revenu #pauvreté #chômage #jeunesse #femmes #mères_isolées #précarité #taux_de_pauvreté #patrimoine #inégalités #riches #classes_populaires

    • « Les inégalités sont perçues comme une agression, une forme de mépris », François Dubet - Propos recueillis par Gérard Courtois, publié le 12 mars 2019
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2019/03/12/francois-dubet-les-inegalites-sont-percues-comme-une-agression-une-forme-de-

      Entretien. Le sociologue François Dubet, professeur émérite à l’université Bordeaux-II et directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), vient de publier Le Temps des passions tristes. Inégalités et populisme (Seuil, 112 p., 11,80 €).

      Reprenant l’expression de Spinoza, vous estimez que la société est dominée par les « passions tristes ». Quelles sont-elles et comment se sont-elles imposées ?

      Comme beaucoup, je suis sensible à un air du temps porté sur la dénonciation, la haine, le #ressentiment, le sentiment d’être méprisé et la capacité de mépriser à son tour. Ce ne sont pas là seulement des #émotions personnelles : il s’agit aussi d’un #style_politique qui semble se répandre un peu partout. On peut sans doute expliquer ce climat dangereux de plusieurs manières, mais il me semble que la question des #inégalités y joue un rôle essentiel.

      Voulez-vous parler du creusement des inégalités ?

      Bien sûr. On observe une croissance des inégalités sociales, notamment une envolée des hyper riches qui pose des problèmes de maîtrise économique et fiscale essentiels. Mais je ne pense pas que l’ampleur des inégalités explique tout : je fais plutôt l’hypothèse que l’expérience des inégalités a profondément changé de nature. Pour le dire vite, tant que nous vivions dans une société industrielle relativement intégrée, les inégalités semblaient structurées par les #classes sociales : celles-ci offraient une représentation stable des inégalités, elles forgeaient des identités collectives et elles aspiraient à une réduction des écarts entre les classes [et, gare à la revanche ! à leur suppression]– c’est ce qu’on appelait le progrès social. Ce système organisait aussi les mouvements sociaux et plus encore la vie politique : la #gauche et la #droite représentaient grossièrement les classes sociales.

      Aujourd’hui, avec les mutations du capitalisme, les inégalités se transforment et se multiplient : chacun de nous est traversé par plusieurs inégalités qui ne se recouvrent pas forcément. Nous sommes inégaux « en tant que » – salariés ou précaires, diplômés ou non diplômés, femmes ou hommes, vivant en ville ou ailleurs, seul ou en famille, en fonction de nos origines… Alors que les plus riches et les plus pauvres concentrent et agrègent toutes les inégalités, la plupart des individus articulent des inégalités plus ou moins cohérentes et convergentes. Le thème de l’#exploitation de classe cède d’ailleurs progressivement le pas devant celui des #discriminations, qui ciblent des inégalités spécifiques.

      Pourquoi les inégalités multiples et individualisées sont-elles vécues plus difficilement que les inégalités de classes ?

      Dans les inégalités de classes, l’appartenance collective protégeait les individus d’un sentiment de mépris et leur donnait même une forme de fierté. Mais, surtout, ces inégalités étaient politiquement représentées autour d’un conflit social et de multiples organisations et mouvements sociaux. Dans une certaine mesure, aussi injustes soient-elles, ces inégalités ne menaçaient pas la dignité des individus. Mais quand les inégalités se multiplient et s’individualisent, quand elles cessent d’être politiquement interprétées et représentées, elles mettent en cause les individus eux-mêmes : ils se sentent abandonnés et méprisés de mille manières – par le prince, bien sûr, par les médias, évidemment, mais aussi par le regard des autres.

      Ce n’est donc pas simplement l’ampleur des inégalités sociales qui aurait changé, mais leur nature et leur perception ?
      Les inégalités multiples et individualisées deviennent une expérience intime qui est souvent vécue comme une remise en cause de soi, de sa valeur et de son identité : elles sont perçues comme une agression, une forme de #mépris. Dans une société qui fait de l’#égalité_des_chances et de l’#autonomie_individuelles ses valeurs cardinales, elles peuvent être vécues comme des échecs scolaires, professionnels, familiaux, dont on peut se sentir plus ou moins responsable.

      Dans ce régime des inégalités multiples, nous sommes conduits à nous comparer au plus près de nous, dans la consommation, le système scolaire, l’accès aux services… Ces jeux de comparaison invitent alors à accuser les plus riches, bien sûr, mais aussi les plus pauvres ou les étrangers qui « abuseraient » des aides sociales et ne « mériteraient » pas l’égalité. L’électorat de Donald Trump et de quelques autres ne pense pas autre chose.

      Internet favorise, dites-vous, ces passions tristes. De quelle manière ?

      Parce qu’Internet élargit l’accès à la parole publique, il constitue un progrès démocratique. Mais Internet transforme chacun d’entre nous en un mouvement social, qui est capable de témoigner pour lui-même de ses souffrances et de ses colères. Alors que les syndicats et les mouvements sociaux « refroidissaient » les colères pour les transformer en actions collectives organisées, #Internet abolit ces médiations. Les émotions et les opinions deviennent directement publiques : les colères, les solidarités, les haines et les paranoïas se déploient de la même manière. Les #indignations peuvent donc rester des indignations et ne jamais se transformer en revendications et en programmes politiques.

      La démultiplication des inégalités devrait renforcer les partis favorables à l’égalité sociale, qui sont historiquement les partis de gauche. Or, en France comme ailleurs, ce sont les populismes qui ont le vent en poupe. Comment expliquez-vous ce « transfert » ?

      La force de ce qu’on appelle les populismes consiste à construire des « banques de colères », agrégeant des problèmes et des expériences multiples derrière un appel nostalgique au #peuple unique, aux travailleurs, à la nation et à la souveraineté démocratique. Chacun peut y retrouver ses indignations. Mais il y a loin de cette capacité symbolique à une offre politique, car, une fois débarrassé de « l’oligarchie », le peuple n’est ni composé d’égaux ni dénué de conflits. D’ailleurs, aujourd’hui, les politiques populistes se déploient sur tout l’éventail des politiques économiques.

      Vous avez terminé « Le Temps des passions tristes » au moment où émergeait le mouvement des « gilets jaunes ». En quoi confirme-t-il ou modifie-t-il votre analyse ?

      Si j’ai anticipé la tonalité de ce mouvement, je n’en avais prévu ni la forme ni la durée. Il montre, pour l’essentiel, que les inégalités multiples engendrent une somme de colères individuelles et de sentiments de mépris qui ne trouvent pas d’expression #politique homogène, en dépit de beaucoup de démagogie. Dire que les « gilets jaunes » sont une nouvelle classe sociale ou qu’ils sont le peuple à eux tout seuls ne nous aide guère. Il faudra du temps, en France et ailleurs, pour qu’une offre idéologique et politique réponde à ces demandes de justice dispersées. Il faudra aussi beaucoup de courage et de constance pour comprendre les passions tristes sans se laisser envahir par elles.

      #populisme

  • L’Italie enterre son revenu de citoyenneté

    Le 31 décembre 2023, l’équivalent italien du #RSA , supprimé pendant l’été pour la plupart des bénéficiaires, disparaîtra définitivement. Reportage à Pescara, dans le centre-sud du pays, où la mairie a mis en place une politique de #substitution.

    L’histoire de Juanito La Selva est celle d’une vie revenue doucement à l’équilibre, après des années de précarité. « C’est une renaissance », soufflent les travailleurs sociaux qui l’ont entouré ces dernières années. Depuis l’instauration du revenu de citoyenneté, en mars 2019, il a touché presque tous les mois 500 euros.

    « J’ai toujours fait en sorte que ça suffise pour couvrir toutes mes dépenses, pour ne pas devoir solliciter les services sociaux », raconte, non sans une pointe de fierté, Juanito La Selva. Son petit appartement à loyer modéré, situé dans un quartier populaire de Pescara, lui coûte vingt euros par mois. Alors, avec le revenu de citoyenneté, il a eu, enfin, des comptes qui tournaient rond. « J’ai même pu acheter un nouvel appareil électroménager », glisse-t-il.

    Mais depuis le 27 juillet, comme près de 169 000 foyers italiens, Juanito La Selva a reçu un SMS pour l’informer de la fin du revenu de citoyenneté. « On est dans une phase d’attente, pour l’instant, c’est la mairie qui me soutient », commente pudiquement le quinquagénaire. Au cœur de l’été, le gouvernement de Giorgia Meloni, la cheffe de file du parti d’extrême droite Fratelli d’Italia, a mis en application l’une de ses promesses de campagne : en finir avec le revenu de citoyenneté, introduit par le gouvernement d’alliance du Mouvement 5 Étoiles et de la Ligue de Matteo Salvini.

    Pensé comme un outil de « lutte contre la pauvreté, les inégalités et l’exclusion sociale et de politique active du travail », c’est un peu l’équivalent italien du RSA. Destiné aux foyers déclarant moins de 9 360 euros par an, le revenu de citoyenneté permettait de toucher un maximum de 780 euros par mois. Dans les faits, selon l’Institut national de prévoyance sociale, d’avril 2019 à juin 2023, la moyenne nationale perçue s’élevait à 571,58 euros.

    « Quand ils ont reçu la nouvelle, les bénéficiaires étaient déboussolés, frustrés, ils n’avaient aucune idée de ce qui allait se passer pour eux », explique Pierluigi Romagnolo, travailleur social pour la mairie de Pescara. À Naples, Palerme ou Rome, des manifestant·es descendent dans la rue et crient leur colère et leur désarroi. Rapidement, le conseil municipal de Pescara vote une délibération pour augmenter le budget des services sociaux.

    D’abord, les travailleuses et travailleurs sociaux passent de 9 à 23 en quelques mois. Ensuite, un budget est dégagé pour aider les habitant·es en grande difficulté à payer les factures. « Cela a finalement été moins sollicité que ce à quoi on s’attendait », s’étonne l’adjoint aux politiques sociales de la ville, Adelchi Sulpizio.

    Un « #chèque_d’inclusion » plus restrictif

    Les foyers qui accueillent une personne handicapée, au moins un mineur et les plus de 60 ans ont encore un sursis jusqu’au 31 décembre. Ce sont les potentiels futurs bénéficiaires du « chèque d’inclusion » qui entrera en vigueur le 1er janvier. Ils sont 1 300 à Pescara.

    Parmi eux, Gino Silipo. À bientôt 62 ans, il touche encore 414 euros par mois. Sa femme, 400 euros pour un temps partiel de femme de ménage. « On mène une vie simple, sans prétention, on paie nos factures et à la fin du mois, on arrive parfois à mettre cinquante euros de côté », raconte celui qui a été tour à tour policier, ouvrier dans des usines lombardes et travailleur dans le bâtiment.

    Dès le 1er janvier, il devrait bénéficier du « chèque d’inclusion », d’un montant maximal de 500 euros – lequel est assorti de 280 euros pour les personnes locataires de leur logement. Ce dispositif est limité à une durée de 18 mois, renouvelable une fois pour un an. À celles et ceux qui n’y sont pas éligibles, les centres pour l’emploi proposeront des formations d’une durée maximale d’un an et rémunérées 350 euros par mois.

    Le message est clair : « Faire la différence entre ceux qui sont capables de travailler et ceux qui ne le sont pas », selon les mots de Giorgia Meloni. Vilipendé par le centre-droit, « symbole de l’assistanat », le revenu de citoyenneté n’a jamais eu bonne presse en Italie. Toutes les semaines ou presque, les médias nationaux ont partagé des histoires de fraudes au point de faire naître l’expression des « petits fourbes du revenu de citoyenneté ». Ils étaient pourtant une infime minorité. En quatre ans et demi, le montant des allocations indûment perçues pour le revenu et la retraite de citoyenneté s’est élevé à 505 millions d’euros, sur une dépense publique totale de 31,5 milliards d’euros soit à peine 1,6 % du total.

    Les chiffres officiels dressent un tableau un peu plus complexe du profil des bénéficiaires . D’abord, en avril 2019, le ministère du travail avait publié leur répartition par âge : 61 % avaient entre 45 et 67 ans. À cette période, selon les chiffres de l’Institut national de prévoyance sociale, le nombre de bénéficiaires s’élevait à 512 569 foyers, contre 895 723 au mois de juin 2023. Sans surprise, c’est au cœur de la pandémie de Covid-19 que les bénéficiaires ont été le plus nombreux.

    « Ça a été une bouée de sauvetage à ce moment-là », se souvient Gino Silipo, qui a touché le revenu de citoyenneté pour la première fois en janvier 2020. Dans la foulée, il avait été appelé par le centre pour l’emploi, avait refait son CV, lancé des recherches de travail, avant que tout ne soit suspendu, jusqu’à l’hiver 2021. « Nous payons encore les conséquences de la pandémie de Covid-19. Certains habitants ont demandé de l’aide à nos services pour la toute première fois dans la foulée des fermetures liées aux mesures de restriction et depuis, ils n’ont pas toujours remonté la pente », analyse l’adjoint aux politiques sociales de la ville, Adelchi Sulpizio, depuis son bureau qui surplombe la place Italie.

    De 2019 à 2023, les habitant·es de Pescara qui ont fait appel aux services sociaux de la ville sont passés de 8 000 à 13 000, sur une population totale de 120 000 personnes. Pourtant, c’est sans regret que Roberta Pellegrino, la directrice des services sociaux de la mairie, voit le revenu de citoyenneté disparaître : « Cela devait inclure une politique active du travail : d’un côté, une aide économique, de l’autre, une aide pour trouver un emploi ou une formation, sauf que mettre en place ce système sans d’abord repenser le marché du travail et le rôle des centres pour l’emploi, ça a été un échec total. »
    Les petits boulots de Pescara

    Selon des chiffres publiés en mars 2023 par l’Institut national pour l’analyse des politiques publiques, qui a interrogé les services sociaux et centres pour l’emploi, entre 3 % et 8 % estimaient que le revenu de citoyenneté a produit des résultats concrets pour les bénéficiaires concernant l’emploi ou la formation. Car elles et ils devaient signer un pacte pour l’emploi ou, le cas échéant, un pacte d’inclusion sociale. Ce dernier prévoyait d’adhérer à un PUC, un projet d’intérêt général. Sur ce front, la mairie de Pescara a été l’une des plus actives d’Italie et souhaite continuer de l’être.

    « Nous avons été la première ville d’Italie à mettre sur pied une force de travail composée de près de 400 personnes ! », commente le maire, Carlo Masci, du parti de droite libérale Forza Italia. « Le projet “Grands-parents vigilants” a déployé 70 bénéficiaires du revenu de citoyenneté pour aider les enfants à traverser devant les écoles, 40 autres ont participé au projet de pédibus, d’autres sont devenus des “sentinelles de quartier”, sortes de concierge dans les immeubles pour signaler les problèmes, ou ont participé au nettoyage des rues », détaille le travailleur social Pierluigi Romagnoli, coordinateur du projet PUC.

    Juanito La Selva a été affecté à la manutention des routes, à la propreté des rues, aux travaux de peinture puis a effectué un stage au service de propreté d’un hôpital. « Je fais tout pour me réinsérer sur le marché du travail. Se dire qu’on a un mieux économique, c’est bien, mais ce qui est important c’est qu’à un moment, ça débouche sur une embauche », espère celui qui se forme aussi chez un tailleur.

    Gino Silipo, lui, a encore cinq ans avant de pouvoir prendre sa retraite, au taux le plus bas. Depuis deux ans, il a réalisé son PUC comme concierge à la mairie. Il sait que ses chances de retrouver un emploi sur le marché du travail classique sont faibles : « Je ne sais pas encore si je pourrai continuer en janvier, moi ça me plaît, c’est une aide qu’on reçoit mais aussi qu’on donne et vu mon âge, ça me va très bien. »

    Tous les deux le savent : le retour sur le marché du travail est ardu. Dans un rapport sur le revenu de citoyenneté, publié en février 2022, l’Institut national pour l’analyse des politiques publiques conclut que « le travail ne parvient pas à maintenir les travailleurs en dehors de la pauvreté, le phénomène des travailleurs pauvres est largement répandu en Italie puisque parmi les bénéficiaires du revenu de citoyenneté, 30 % sont des travailleurs classiques et 15,4 % des travailleurs précaires ».

    Pour rappel, l’Italie n’a toujours pas adopté de salaire minimum. Alors, pour permettre aux près de 400 habitant·es de la ville qui ont participé aux projets d’intérêt général « d’avoir une continuité et une vraie rétribution économique », Roberta Pellegrino rêve de mettre sur pied une coopérative sociale. Elle pourrait être financée par le GOL, un plan de soutien au retour à l’emploi financé à hauteur de quatre milliards d’euros par le plan de relance national.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/071123/l-italie-enterre-son-revenu-de-citoyennete
    #revenu_de_base #revenu_de_citoyenneté #Italie #Pescara #résistance #résistance_locale #Pescara #suppression

    • Reddito di cittadinanza: a Pescara anche il Comune pensa a come aiutare chi lo ha perso

      Lo stop al reddito di cittadinanza ha coinvolto 169mila famiglie italiane. A Pescara sono 2.100 i nuclei interessati. Il Comune promette: “Non lasceremo indietro nessuno”

      Il Governo ha previsto nuovi strumenti, l’assegno di inclusione per chi continua ad aver diritto ad un sussidio e la formazione per i soggetti cosiddetti ‘occupabili’. Tra la fine dell’erogazione del rdc (ieri) e l’attivazione delle nuove misure c’è però un lasso di tempo, un gap, che in qualche modo rischia di gravare maggiormente sulle persone fragili.

      Il Comune di Pescara, in particolare l’assessorato alle politiche sociali ribadisce: “Noi non lasceremo indietro nessuno”. Più dettagliatamente come nel servizio del Tg8.

      Nel pomeriggio di oggi si è svolta in Comune una riunione con la struttura dei servizi sociali che ha individuato gli stanziamenti di bilancio da destinare alle attività di contrasto alla povertà acuite dalla cessazione dell’erogazione del Reddito di cittadinanza. Ammontano a circa 190mila euro le risorse disponibili e serviranno a soddisfare le esigenze di circa 350 400 nuclei familiari. Non sarà necessaria alcuna variazione di bilancio in quanto le somme sono già stanziate nei capitoli dei sociale.

      https://www.youtube.com/watch?v=_UCK92GB59A&embeds_referring_euri=https%3A%2F%2Fwww.rete8.it%2F&sou

      https://www.rete8.it/cronaca/pescara/reddito-di-cittadinanza-a-pescara-anche-il-comune-pensa-a-come-aiutare-chi-lo-

  • L’#agriculture n’est pas une carte postale

    Dans les #Alpes_Maritimes, pour nos élus, l’agriculture n’a pour seule fonction que de servir de carte postale pour le #tourisme. Je suis devenu agriculteur à 25 ans. Et depuis, à part des bâtons dans les roues, je/nous n’avons jamais reçu aucune aide. Donc ce que je propose, c’est qu’on devienne tous intermittents du spectacle. Par #Cédric_Herrou.

    La question de l’agriculture dans la vallée de la Roya, et plus largement dans les Alpes-Maritimes, c’est une question qui comporte quelque chose de très surprenant : nous avons des politiques qui nous parlent de « #culture_identitaire ». Il s’agit du seul département, à ma connaissance, où l’on parle de « culture identitaire » à propos des #olives. Alors même que c’est un arbre du bassin méditerranéen, cultivé par des Marseillais, des Niçois, des Italiens, des Égyptiens… C’est une « #identité » de la Méditerranée dans son ensemble.

    C’est un détail, mais il est porteur de quelque chose : les Alpes-Maritimes, pour nos élus, l’agriculture n’a pour seule fonction que de servir de #carte_postale pour le tourisme.

    Nous l’avons vu lors de la #tempête_Alex, en octobre 2020 (1). J’étais alors agriculteur depuis 2006, donc depuis une quinzaine d’années. J’ai depuis cédé mon exploitation agricole à #Emmaüs-Roya, première #communauté_Emmaüs entièrement agricole. Cette exploitation faisait, auparavant, moyennement vivre une seule personne (moi) ; il nous a fallu à partir de là faire vivre quinze personnes, et dans des conditions matérielles beaucoup plus confortables que quand je vivais seul. Nous avons donc dû transformer ces 5 hectares en quelque chose de plus gros, de plus productif, -de plus professionnalisé.

    Nous voulions donc nous agrandir, et faire du #maraîchage sur des terrains où il était plus facile de le faire -donc, sur un terrain plat, ce qui est très rare ici.

    Ainsi, suite à la tempête, dans un contexte où ils voulaient relancer l’agriculture dans la vallée de la Roya -patin-couffin et blablabla-, il y a eu une réunion avec les associations, et nous avons eu rendez-vous avec Sébastien Olharan, maire de Breil-sur-Roya, avec la CARF (communauté d’agglomération de la Riviera française), et aussi, très important, avec la #SAFER (Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, supposément voué au soutien tout projet viable d’installation en milieu rural).

    Ils nous ont tous dit qu’ils adoraient ce que ce nous faisions. Que c’était super, que c’était génial. « Bien évidemment, nous préférons vous voir planter des tomates qu’héberger des noirs, mais en tous les cas, la partie agriculture, c’est très bien ! » Par contre, ils n’avaient pas de terrain à nous proposer. Rien. Car les terrains plats étaient déjà « réservés », qui pour un terrain de basket, qui pour un parking…

    J’étais donc bien saoulé. Et j’ai décidé de faire moi-même mes recherches, sur Le Bon Coin. Et je peux donc le dire : le Bon Coin est beaucoup plus efficace que la mairie de Breil, la CARF et la SAFER - dont c’est pourtant la fonction. Car sur ce site, je trouve un terrain qui est à vendre depuis des mois sur la commune de Saorge, non loin. Nous l’avons acheté, et nous y développons donc aujourd’hui une partie de nos activités.

    En temps normal, la SAFER surveille les ventes. Elle est supposée être LA référence pour savoir où des terrains potentiellement exploitables sont à acheter. Et là, nous avions un terrain en bord de route, avec de l’eau car à côté de la Roya, de l’eau potable également, l’accès à l’électricité, et un hectare de terrain plat. Ce qui, dans notre vallée, n’est vraiment pas rien. D’autant plus qu’une maison présente sur ce lieu a été rasée car trop proche de l’eau, ce qui en a fait du même coup des terres agricoles.

    La mairie, la #CARF et la SAFER étaient donc forcément au courant.

    La même chose s’est produite, 10 ans auparavant, avec un terrain situé à 100 mètres d’une zone que nous exploitons déjà, à Veil, chez mes parents. Il s’est vendu 2 fois plus cher que ce qu’avaient vu des amis à moi venu y jeter un œil : dans mes souvenirs, quelque chose comme 80 000 euros, au lieu des 40 000 annoncés. C’est la CARF qui l’avait acheté, et revendu à la mairie de Breil-sur-Roya, avec la promesse d’un projet agricole - qui n’a jamais eu lieu. Quand nous avons questionné la mairie sur ce point, car nous voulions récupérer ces terres, ils nous ont dit non, et prétexté vouloir y développer des activités... touristiques - dans un lieu sans eau potable, sans évacuation des eaux usées, et surtout qui est une zone agricole, donc non destinée à quoi que ce soit lié au tourisme. Et on en revient à ce que je disais au début. Ce même maire avait par ailleurs soutenu le voisin qui avait voulu (indûment, et la justice lui a donné tort) bloquer l’accès à mon terrain, rendant très complexe voire impossible nos activités agricoles.

    On pourrait penser que c’est le « militant » en faveur des droits des personnes en situation d’exil qui est attaqué, et pas le paysan. Mais j’ai commencé à être médiatisé sur ces sujets en 2016. Et je suis arrivé dans la vallée de la Roya en 2002. J’avais 23 ans.

    Je suis devenu agriculteur à 25 ans, et c’est rare de le devenir aussi jeune. Et à part des bâtons dans les roues (sans jeu de mot, NDLR), je, nous n’avons jamais reçu aucune aide.

    Au-delà des grands mots, agriculture, ici, cela semble donc faire chier tout le monde. Cela bloque 5 hectares, des terres qui, l’État le sait, ne deviendront jamais constructible. Sur les terrains limitrophes à l’exploitation, l’agriculteur sera prioritaire sur l’achat. Cela bloque le foncier, qui est la seule chose qui leur importe.

    On veut de l’agriculture, mais que comme carte postale.

    Donc ce que je propose, c’est qu’on sorte de la #mutuelle_sociale_agricole (#MSA), et qu’on devienne tous intermittents du spectacle.

    Un article paru dans le Mouais n°42 (octobre 2023), consacré à l’alimentation, nous le mettons en accès libre mais soutenez-nous, abonnez-vous ! https://www.helloasso.com/associations/association-pour-la-reconnaissance-des-medias-alternatifs-arma/boutiques/abonnement-a-mouais

    (1) Épisode méditerranéen extrêmement violent ayant ravagé en une nuit les vallées de la Tinée, de la Vésubie et de la Roya, occasionnant des morts et de nombreux dégâts matériels, NDLR.

    https://blogs.mediapart.fr/mouais-le-journal-dubitatif/blog/291023/l-agriculture-n-est-pas-une-carte-postale
    #Vallée_de_la_Roya #montagne #agriculture_de_montagne #paysannerie

    ping @isskein

  • To reduce inequalities in research evaluation, give researchers a universal basic income for research impact

    As the review of REF2021 begins, Mark Reed proposes that rather than allocating impact funding to a small number of high performing institutions, funding should be allocated more broadly to individual researchers. He argues that not only would this limit the over-concentration of resources in particular institutions, but would also benefit the wider culture of research impact by limiting zero-sum competition between institutions for impact and enabling researchers to pursue, or choose not to pursue, more intrinsically motivated forms of research impact.

    –-

    The link between research assessment and funding allocations has created perceived and real conflicts of interest for researchers seeking to generate impact, and is at the root of many of the negative unintended consequences of the impact agenda in the UK. A majority (57%) of UK academics hold negative attitudes towards REF, feel pressured to meet REF targets (54%), and think that their creativity is being stifled due to research being driven by an impact agenda (75%). But, few have opinions about what should replace REF.

    Other countries are following in the UK’s footsteps as they develop their own systems for evaluating the impact of publicly funded research, but none have so far linked scores to funding in quite the same way. They have also not experienced the same level of unintended consequences. One way of resolving this tension would be to weaken the link between impact scores in REF and funding allocations, and thereby reduce extrinsic incentives for impact. Currently funding is “quality rated” so the “best” institutions get most funding, but does this “rich get richer” system simply perpetuate inequality and make it harder for post-1992 institutions to build and retain talent? Do research intensive institutions produce more high-quality research because they have better researchers and facilities? Or, do they out-compete newer Universities in large part because of a system that they have the power and vested interest to maintain? The answer is both.

    If the system concentrates resources in a small number of institutions, it will be easier to produce high quality research in those places and they will attract the most ambitious researchers from new universities, who will seek out the advantage that comes with moving to a Russell Group institution. Speaking from experience, when I moved from a post-1992 to a Russell Group institution, I noticed a big jump in my funding success and the number of invitations and opportunities, which had previously passed me by. I was no different, but I was perceived differently. I didn’t want to leave my post-1992 colleagues, but it felt like the only way I could reach the critical mass I was looking for in my research team (now I’ve achieved that, I’ve moved back out of the Russell Group to a specialist college). If resources were spread more equitably, it might be easier to do research in post-1992 institutions, which in turn would be able to invest in their best researchers with less fear that they will be snapped up by their local Russell Group institution as soon as they start bringing in significant research income.

    So, here’s an idea (not a new one, but a good one): make funding proportional to the number of research active academics and give them all a universal basic income for their research and impact. I’m not talking about scrapping competitive research funding, but if at least 50% of funding from REF were to go into individual staff accounts, we’d all have equal opportunities to do seed-corn projects, impact, networking and capacity building to prepare us for our next funding bid, and we might have a fairer chance of success. I’ve often been surprised by the creativity and outputs that ECRs get from very small amounts of funding and I think we’d be blown away by the research and impact that could be made possible by universal basic income for researchers. It would also curtail the “projectification” of research, where researchers “are currently hopping from project grant to project grant” instead of conducting “groundbreaking, continuous lines of research”, as the Dutch Academy put it, in its own proposal to the Dutch Government to introduce universal basic income for researchers in The Netherlands (still pending a decision by the Ministry of Education). It would also go some way to paying for the estimated 37% of research in UK Universities that is currently self-funded by researchers and their institutions, often to support REF submissions. If REF funding is meant to build UK research capacity and leadership, why limit it to those who already lead and have most capacity, when we could level up across the sector? The best resourced institutions and teams already have enough advantage to maintain their trajectory without such a change leading to a levelling off for them.

    I’m not suggesting there should be no strings attached. Researchers would have to demonstrate they are research active (as they already do in REF), and I think institutions should still have to produce impact case studies underpinned by rigorous research. But those case studies should be graded only for the purposes of choosing which ones to publish publicly, with funding linked to the submission of enough case studies above this quality threshold. I wouldn’t set such a threshold particularly high in terms of the significance and reach of impact; the goal would be to publish a database of impacts that doesn’t include case studies based on questionable research, or that consist of long lists of activities with no evidence of impact (there are many of the latter in the REF2014 database). If an institution doesn’t submit enough case studies above the threshold, then they wouldn’t get their full funding allocation.

    By decoupling impact scores from funding, we could also relax rules around where the underpinning research was conducted, or even who it was conducted by, as long as an institution has invested in the generation of impact during the assessment period. Many of the most robust impacts are based on diverse bodies of work and evidence synthesis. This kind of impact work would stand to gain much from a system that encouraged collaboration, rather than competition, between institutions..

    I’d make the minimum number per head of staff lower than it is now (though not as low as it is in Australia), but allow institutions to submit as many cases as they wanted, so we celebrate a much wider range of impacts. One of the reasons we’re increasingly narrowing and instrumentalising what we submit to REF is that we are being driven to prioritise case studies we think will make the top grade. If the threshold was lowered for funding (say to 2* or above), institutions would be less risk averse and celebrate many more impacts, empowering those who wish to disengage from impact and enabling others to pursue impact on their own terms based on what inspires and motivates them intrinsically. We would begin to see more of the “unsung impacts” we saw submitted to the recent Fast Track Impact competition of this title, including transformational changes that had limited reach, and we’d discover all the rich impacts arising from public engagement in more applied disciplines that tend to currently only submit easier to measure, more instrumental impacts on things like policy or the economy.

    Research assessments like REF present the highly polished tip of an iceberg. I think the public deserve to see the true depth and breadth of that iceberg. And when they do, I think that they too will support the idea of trusting individual researchers with funding, and the creativity that comes from this.

    https://blogs.lse.ac.uk/impactofsocialsciences/2021/06/21/to-reduce-inequalities-in-research-evaluation-give-researchers-a-univer

    #université #recherche #revenu_de_base #revenu_universel #projets_de_recherche #inégalités #impact #compétition #néo-management #néo-libéralisme #université_néolibérale #financement #financement_par_projet

  • 🚨 RÉFORME DU RSA : LA NOTE SUR LE DANGER DE LA RÉFORME QUE LE GOUVERNEMENT VOULAIT CACHER. 🧶, Arthur Delaporte, député de la 2ème circonscription du Calvados • Porte-parole du groupe PS à l’A.N.

    https://threadreaderapp.com/thread/1706736451625370073.html

    Comment la réforme du RSA va mettre les Français dans la galère plutôt qu’au travail.

    Depuis lundi, l’Assemblée nationale étudie le texte « pour le plein emploi ». Au menu : 15h d’activité obligatoire par semaine pour les allocataires du RSA et des sanctions à la pelle.
    C’est là que ça se corse. On a beau demander au ministre @olivierdussopt d’avoir des données sur les sanctions : combien ? sur quels territoires ? pour quelle efficacité ?

    Aucune réponse. Le parlement légifère à l’aveugle.

    ce Monsieur publie en 1ère page cette note, réputée publique, mais ne la publie pas. je ne la trouve nulle part...

    #RSA #France_travail #loi_plein_emploi #sanctions

    • Ration non plus ne publie pas la note CNAF France Travail : des députés socialistes dénoncent une réforme « à l’aveugle » des sanctions du RSA
      https://www.liberation.fr/economie/social/france-travail-des-deputes-socialistes-denoncent-une-reforme-a-laveugle-d

      Arthur Delaporte et Jérôme Guedj ont obtenu de la CNAF une étude partielle sur les sanctions imposées aux allocataires de ce revenu minimal de subsistance. Et y trouvent la preuve que « la sanction a pour conséquence d’exclure du RSA ».

      En réformant le système de sanction des allocataires du RSA avec son projet de loi « France Travail » (ou « plein emploi »), le gouvernement a-t-il une idée de ce qu’il fait ? C’est la question que veulent poser deux députés socialistes, Arthur Delaporte (Calvados) et Jérôme Guedj (Essonne), alors que l’Assemblée nationale examine cette semaine le texte dans l’hémicycle. Au cœur de leur offensive, lancée ce mardi après-midi en séance, figure un document obtenu lundi soir par Jérôme Guedj auprès de la Caisse nationale d’allocation familiale (CNAF), en sa qualité de coprésident de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (Mecss). « Depuis mai dernier, je demande des éléments sur les sanctions actuellement appliquées, mais le gouvernement ne répond pas », explique Arthur Delaporte. « Jeudi, Jérôme [Guedj] a envoyé un courrier en tant que coprésident de la Mecss au président de la CNAF, qui lui a répondu hier soir tard en disant que ces éléments ne lui ont jamais été demandés par quiconque. Donc le gouvernement ne les a jamais demandés, ce qui est un peu surprenant. »

      Interpellé par Arthur Delaporte dans l’hémicycle ce mardi, le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a répondu qu’il « n’existe pas de relevé statistique du nombre de radiés (…) au niveau national, et donc nous n’avons pas ce fichier-là ». Pour autant, la CNAF – qui confirme au passage n’avoir pas de suivi statistique sur le sujet des sanctions – est bien parvenue, dans un temps très court et à la demande des députés socialistes, à fournir une étude portant sur un seul mois, celui de juin 2022. Seulement, précise le rédacteur de cette note que Libération a pu consulter, ces données sont « fragiles » et « doivent donc être considérées avec grande prudence, comme des ordres de grandeurs ».

      Que disent-elles ? Qu’au mois de juin 2022, les CAF ont sanctionné 31 500 personnes, réparties dans 31 000 foyers bénéficiaires du RSA « pour non-respect des obligations du contrat d’engagement réciproque (“droits et devoirs”) » (1). Ces sanctions, justifiées par une absence de déclaration des ressources ou à la suite d’un contrôle, pouvaient prendre la forme soit d’une suspension du RSA (dans 40 % des cas) ou d’une réduction de l’allocation d’un certain taux ou d’un certain montant (257 euros en moyenne, une somme importante rapportée aux 504 euros qui constituaient le droit moyen au RSA à verser pour l’ensemble des foyers allocataires en juin 2022). Il s’agissait bien, précise la CNAF, d’un « stock » et non d’un flux, ce qui signifie que ces 31 000 foyers, soit 2 % du total des foyers bénéficiaires, constituaient l’intégralité de ceux visés par des sanctions ce mois-là. Et que, relève la note, « la sanction semble avoir un impact sur le droit au RSA à moyen terme », en entraînant « fréquemment une sortie du droit ». Ainsi, alors que près de la moitié des personnes sanctionnées en juin 2022 avaient droit au RSA, elles n’étaient plus que 35 % en octobre, quatre mois plus tard.

      L’étude de la CNAF n’avance aucune explication à ce phénomène. Pour Arthur Delaporte, c’est la preuve que « la sanction a pour conséquence d’exclure du RSA, ce que pointent d’ailleurs les associations », et que « la loi va avoir des conséquences extrêmement graves sur l’exclusion, la pauvreté ». « On légifère à l’aveugle », accuse-t-il encore en dénonçant la pauvreté de l’étude d’impact accompagnant le projet de loi. Des arguments que les socialistes ne manqueront pas de faire valoir lors de l’examen de l’article 3 du texte, qui introduit justement une nouvelle sanction dans le système en permettant une suspension quasi immédiate de l’allocation, laquelle peut ensuite être remboursée à l’allocataire (dans une limite de trois mois) s’il est rentré dans le droit chemin.

      (1) Il faut y ajouter, précise la note, 13 000 foyers dont le RSA a été suspendu sur décision du Conseil départemental [instance en charge du pilotage local et de l’"insertion", ndc], mais l’étude ne s’attarde pas sur eux.

      #CNAF #CAF #déclaration_de_ressources #contrôle #allocataire #suspension #droit_au_RSA #Conseil_départemental

    • Les salariés de Pôle emploi étaient en grève, ce mardi 26 septembre, pour dénoncer le texte de loi examiné en ce moment à l’Assemblée nationale. Malgré la contestation, le ministre du Travail, Olivier Dussopt, croit dur comme fer à son adoption par le vote.
      https://www.humanite.fr/social-et-economie/emploi/france-travail-un-projet-purement-coercitif

      Face à la mobilisation des agents, le ministre met en avant les 4 000 créations de postes à #Pôle_emploi durant le premier quinquennat et confirme un prochain relèvement du plafond des effectifs de 300 personnes. Le ministre du Travail n’en démord pas. « Pôle emploi, devenu France Travail, aura les moyens de faire face à ses nouveaux engagements tant en termes de services mutualisés que d’accueil et d’accompagnement renforcé des demandeurs d’emploi et allocataires du RSA. »

      Pourtant, l’équation est par essence insoluble : « On va demander aux 54 000 agents de suivre et contrôler 2 millions de personnes au RSA qui devront s’inscrire à France Travail. Seule une partie d’entre elles l’étaient jusqu’ici, met en parallèle Loïc Kerdraon. Beaucoup de collègues sont déjà en souffrance. Quand je visite une agence, je vois les salariés en larmes et d’autres qui me confient prendre des cachets. »

      à ma prochaine visite chez pôpol, je leur proposerai une goulée de mon kil de rouge pour faire descendre les cachetons.

    • "La loi sur le plein emploi terrorise les bénéficiaires du RSA" dénonce Sandrine Rousseau
      https://www.sudradio.fr/sud-radio/la-loi-sur-le-plein-emploi-terrorise-les-beneficiaires-du-rsa-denonce-sandr

      Parmi les nouvelles mesures, les conjoints des bénéficiaires de RSA seront inscrits sur les listes de demandeurs d’emploi. "Au nom de quoi ? C’est très grave !" s’indigne Sandrine Rousseau, qui indique qu’elle ne votera pas le texte. La députée dénonce par ailleurs le contrat d’engagement de 15 à 20h d’activité pour les bénéficiaires du RSA. "Le but de la loi est de pouvoir avoir la main sur les #radiations des personnes qui bénéficient du RSA" affirme la députée.
      "Il y a des choses scélérates dans cette loi, comme la nécessité de participation active. Mais qu’est-ce qu’une participation active ? J’ai posé cette question dans la commission". Pour Sandrine Rousseau, "cette loi ouvre une forme d’arbitraire. On aide les bénéficiaires du RSA en les respectant et pas en les menaçant. Cette loi les terrorise ! Elle est faite pour qu’ils aient peur de perdre le RSA, c’est scandaleux !" "Il faut un accompagnement mais pas un #accompagnement de #terreur" estime la députée très en colère, car "on n’embête pas les personnes les plus riches".

      #menace (et Rectorat de Versailles)

      Loi “plein-emploi ” : les seuls #parasites sont les #patrons
      https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/09/21/loi-plein-emploi-les-seuls-parasites-sont-les-patrons_726648

      il s’agit aussi et surtout d’avaliser l’idée que les allocataires du RSA, les #chômeurs et, de façon générale, tous ceux qui se débattent avec les malheureuses aumônes distribuées par l’État seraient au fond des parasites. Ainsi, les chômeurs fabriqués par la course au profit, la jeunesse des bourgs ravagés par les fermetures d’usine, les travailleurs broyés par l’exploitation, les mères qui se battent pour élever leurs enfants dans leurs quartiers dégradés seraient responsables des déficits publics. Le gouvernement et, derrière lui, la classe dominante voudraient opposer tous ceux-là aux salariés qui ont un emploi plus ou moins régulier, désormais rebaptisés classe moyenne.

    • FACE À LA CASSE DU RSA, NOUS OPPOSONS LA NÉCESSAIRE MISE EN PLACE D’UN REVENU MINIMUM D’EXISTENCE, 14/09/2023
      https://www.jean-jaures.org/publication/face-a-la-casse-du-rsa-nous-opposons-la-necessaire-mise-en-place-dun-re

      À l’approche de l’examen à l’Assemblée nationale de la réforme du RSA que le gouvernement souhaiterait conditionner, Arthur Delaporte, Simon Rumel-Sixdenier et Johanna Buchter, avec la contribution de Guillaume Mathelier, proposent avec le groupe socialiste à l’Assemblée nationale la mise en place d’un #revenu_minimum_d’existence inconditionnel, revalorisé, ouvert aux plus de 18 ans, qui serait assorti d’un droit opposable à l’accompagnement pour l’insertion sociale. Plus largement, ils donnent des pistes pour repenser le modèle des prestations sociales.

      #PS #protection_sociale #accompagnement #handicap_social

  • Un premier bilan du Revenu Solidarité Jeunes de la métropole lyonnaise | ESS, Emploi, Formation, Insertion et bien d’autres choses. | Michel Abhervé | Les blogs d’Alternatives Économiques
    http://blogs.alternatives-economiques.fr/abherve/2023/09/08/un-premier-bilan-du-revenu-solidarite-jeunes-de-la-me

    La Fondation Jean Jaurès publie un article d’Antoine Dulin Revenu solidarité jeunes : retour sur deux ans d’expérimentation à la métropole de Lyon https://www.jean-jaures.org/publication/revenu-solidarite-jeunes-retour-sur-deux-ans-dexperimentation-a-la-metr

    Nous avions en 2020 et 2021 suivi la mise en place de ce Revenu dans Une expérimentation du #RSA_Jeunes dans la métropole lyonnaise annoncée, La Métropole de Lyon annonce la création d’un « RSA Jeunes », au montant inférieur à celui du RSA, Le « #Revenu_de _solidarité_jeunes » à la lyonnaise n’est pas le RSA Jeunes et Un éclairage de Bruno Bernard sur le Revenu solidarité Jeunes à la lyonnaise

    Après avoir rappelé que la France est, avec l’Espagne, Chypre et le Luxembourg, l’un des seuls pays de l’Union à exclure les jeunes de l’accès au revenu minimum l’auteur présente l’initiative de la métropole lyonnaise, permise par son statut de collectivité à statut particulier associant les compétences de la communauté urbaine de Lyon et celles du département du Rhône qui fondait sa volonté de construire un filet de sécurité pour les #jeunes les plus #précaires du territoire et lutter contre le non-recours et l’invisibilité des publics.

    Deux ans après sa mise en place, il est évident que ce RSJ répond à la situation d’un certain nombre qui n’entrent pas dans les conditions des réponses existantes, en particulier du CEJ, Contrat Engagement Jeunes, trop rigide et limité dans la durée.

    De juin 2021 à juillet 2023, 1 979 jeunes ont eu recours au RSJ. En 2023, le dispositif accueille en moyenne 80 nouveaux bénéficiaires par mois. 649 jeunes ont bénéficié du versement de l’allocation en juillet 2023. 44% des bénéficiaires sont des femmes, 56% sont des hommes. 67% ont entre 21 et 24 ans. Les jeunes étrangers représentent 26% des bénéficiaires... 34% des jeunes sont sans diplôme, 24% ont un niveau CAP/BEP et 31% ont un niveau bac

    Les premiers résultats montrent le caractère déterminant de l’allocation mensuelle, 420 euros si le jeune n’a eu aucune ressource d’activité, 315 euros si le jeune a eu des ressources d’activité inférieures à 400 euros

    Les résultats de la première phase d’évaluation du RSJ, au travers de l’enquête en ligne, ont révélé les besoins exprimés par les bénéficiaires du RSJ. L’allocation est un enjeu capital pour la majorité d’entre eux, avec des besoins orientés vers l’emploi / la formation pour la plupart, qui ne doivent pas masquer pour autant la satisfaction de leurs besoins primaires (nourriture, santé, logement).

    L’évaluation qui accompagne le déroulement de l’action a permis de qualifier quatre profils types de bénéficiaires :

    le profil accrochage : des jeunes entre 18-21 ans en grande précarité financière et résidentielle (souvent sans domicile fixe) et un public très éloigné des institutions, ne bénéficiant d’aucun dispositif mobilisé avant le RSJ

    le profil première marche : des jeunes entre 22 et 24 ans, en précarité financière et cohabitant au sein du foyer familial. C’est un public hors du radar des institutions, ne bénéficiant d’aucun dispositif mobilisé avant le RSJ 

    le profil transition : des jeunes entre 22 et 24 ans, en précarité financière, ayant mobilisé un ou plusieurs dispositifs d’accompagnement (majoritairement Garantie jeunes ou CEJ) sans sortie positive vers l’emploi ou la formation, avant de mobiliser le RSJ à la suite d’une rupture dans le parcours.

    le profil « en attente » : des jeunes entre 18 et 21 ans, mobilisant le RSJ en attente d’un autre dispositif ( AAH, RSA, CEJ…)

    La conclusion qui reste provisoire affirme que Après deux années d’existence, le Revenu de solidarité jeunes a répondu aux objectifs qui avaient été définis avec les partenaires et les jeunes concernés : filet de sécurité, tremplin professionnel et social, coup de pouce financier pour soulager le quotidien, capacité du jeune à consacrer du temps et davantage de moyens au développement de son projet professionnel.

    #revenu

  • Così la fine del #reddito_di_cittadinanza colpisce le donne vittime di violenza

    Secondo l’Istat il 38% delle donne inserite in un percorso di uscita dalla violenza ha subìto anche violenza economica e il 60% non ha autonomia finanziaria. Molte di loro per ricominciare avevano fatto ricorso al Rdc: adesso non ne usufruiranno più. I percorsi protetti sono rischio ed è possibile che tornino dal partner maltrattante

    Quando ha lasciato il marito che la picchiava, Alessia aveva sei figli da mantenere. Lavorava ma ha scelto di licenziarsi per mettersi in sicurezza. Arrivare a fine mese era difficile, soprattutto in una città costosa come Roma. Così è finita in una casa rifugio per donne vittime di violenza. Ha fatto domanda per ricevere il reddito di cittadinanza, che dopo qualche mese le è stato riconosciuto: insieme agli assegni familiari, arrivava a prendere circa 1.600 euro al mese. Con i soldi messi da parte, Alessia (il nome è di fantasia, come gli altri di questo articolo) si è poi trasferita con i figli in un piccolo paese nel Sud Italia: ha trovato un nuovo lavoro, e questo le ha permesso di ricominciare.

    Dal primo gennaio 2024 il reddito di cittadinanza verrà definitivamente sospeso, e questo rischia di compromettere i percorsi di uscita dalla violenza di molte donne. “Grazie al reddito di cittadinanza molte donne hanno lasciato il maltrattante e hanno trovato il coraggio di iniziare una nuova vita”, spiega Federica Scrollini, operatrice del centro antiviolenza BeFree di Roma. “Quel sostegno economico è stato volàno per la ricerca di una nuova autonomia che comprende casa, lavoro, cura di stesse e dei figli. Senza questa base di partenza, molti percorsi di fuoriuscita dalla violenza non vedranno la luce. D’altronde, con un mercato del lavoro in asfissia, i servizi sociali ridotti dall’osso e l’ennesima crisi economica alle porte, dove possiamo andare senza soldi?”.

    Secondo l’Istat il 38% delle donne inserite in un percorso di uscita dalla violenza ha subìto anche violenza economica. Il 60% non ha autonomia finanziaria, quota che sale al 69% se si considera la fascia tra i 18 e i 29 anni. Alcune di loro per ricominciare hanno fatto ricorso al reddito di cittadinanza, che da gennaio 2024 sarà sostituito dall’assegno di inclusione, concesso a tutte le famiglie con un minore, una persona con disabilità o con più di 60 anni, oppure con componenti svantaggiati inseriti in programmi di cura e assistenza certificati dalla pubblica amministrazione. L’importo è fino a 6mila euro l’anno, 500 al mese, più un contributo affitto di 3.360 euro l’anno, 280 al mese: il totale è di un massimo di 780 euro al mese, l’equivalente del reddito di cittadinanza. La misura prevede alcune agevolazioni per le donne vittime di violenza: nel conteggio dell’Isee, le donne potranno costituire nucleo familiare indipendente da quello del marito, e non avranno l’obbligo di partecipare percorsi di inclusione lavorativa, né di accettare le proposte di lavoro eventualmente offerte. “Il problema è che l’assegno esclude di fatto le donne che non hanno figli a carico, anche se si trovano in una situazione di difficoltà economica”, denuncia l’organizzazione ActionAid.

    Per le donne che non hanno figli, dal primo settembre c’è la possibilità di richiedere il supporto per la formazione e lavoro, pensato per le famiglie con una persona in grado di lavorare (i cosiddetti “occupabili”). Questo sussidio però è molto più ridotto -350 euro al mese- ed è vincolato alla partecipazione a progetti di formazione e di accompagnamento al lavoro individuati dal governo. Il limite massimo di Isee per ottenerlo, inoltre, è stato abbassato a 6mila euro, molto meno rispetto ai 9.360 euro del reddito di cittadinanza: gli “occupabili” che si trovano nella fascia intermedia restano senza aiuti. ActionAid ha lanciato quindi una petizione per chiedere al governo di garantire reddito, lavoro e autonomia abitativa affinché le donne non ricadano nella violenza.

    “Nei nostri servizi ci sono diverse donne che ancora ricevono il reddito di cittadinanza”, afferma Simona Lanzoni, vicepresidente della fondazione Pangea e coordinatrice della rete nazionale antiviolenza Reama, che ha aperto lo sportello Mia Economia sulla violenza economica. “Da gennaio rischiano di perdere quella sicurezza economica: ancora non sappiamo che cosa succederà. Comunque il reddito di cittadinanza non era una misura risolutiva: è utile in una fase iniziale, ma poi oltre quello che cosa c’è? In Italia mancano i sostegni al lavoro”.

    Lo sa bene Mara, brasiliana, arrivata in Italia da giovane. Per molti anni è stata vittima di violenza in ambito familiare, e ha anche subìto un abuso sessuale. Poi c’è stata la denuncia alla polizia: quando è arrivata in casa rifugio, aveva quasi cinquant’anni e non aveva niente in mano. Sono state le operatrici ad aiutarla a fare domanda per il reddito di cittadinanza: percepiva circa 700 euro al mese, e così si è sentita pronta a intraprendere un tirocinio, che da solo non le avrebbe garantito un guadagno sufficiente a sopravvivere. Dalla casa rifugio è passata alla casa di semi-autonomia: il tirocinio si è trasformato in un’assunzione, anche se a tempo determinato. Il contratto però le viene rinnovato di mese in mese, e il compenso non è sufficiente a pagare un affitto. Così Mara sta pensando di tornare in Brasile.

    Un altro strumento pensato per aiutare le donne che escono da una situazione di violenza e si trovano in condizione di povertà è il reddito di libertà: istituito nel 2020, consiste in un contributo economico di 400 euro al mese per un massimo di dodici mesi. Per il periodo tra il 2020 e il 2022 la misura è stata finanziata con 12 milioni di euro, a cui si aggiungono 1,8 milioni per il 2023: in tutto ne hanno potuto beneficiare meno di 3mila donne, un numero molto ridotto se si considera che secondo l’Istat ogni anno sarebbero circa 21mila le persone che avrebbero i requisiti per accedervi. In più non sono state adottate linee guida nazionali per valutare lo stato di bisogno delle richiedenti e oggi vige il principio del “chi prima arriva meglio alloggia”: le donne possono fare domanda e risultare idonee, ma una volta finiti i fondi non otterranno comunque il contributo.

    “Abbiamo molte donne che aspettano di ricevere il reddito di libertà”, spiega Mariangela Zanni, presidente del Centro Veneto Progetti Donna e consigliera dell’associazione nazionale Donne in rete contro la violenza(D.i.Re), che in Italia raccoglie più di cento centri antiviolenza e più di 50 case rifugio. “Si tratta di una misura importante, ma i finanziamenti sono pochi e le liste di attesa sono lunghe”.

    La violenza economica continua così ad essere uno dei principali strumenti di controllo sulla donna da parte del maltrattante. “La privazione del salario, l’impedimento di lavorare, l’obbligo a prendersi cura da sole dei figli, impedisce a molte donne che subiscono violenza di avere un’autonomia economica”, conclude Anita Lombardi, operatrice dello sportello di orientamento al lavoro del centro antiviolenza Casa delle donne di Bologna. “Per questo tutti gli strumenti che danno un sostegno economico, a partire dal reddito di cittadinanza fino al reddito di libertà, sono importanti affinché venga assicurato a queste donne il diritto a progettare la propria vita in libertà e autonomia”.

    https://altreconomia.it/cosi-la-fine-del-reddito-di-cittadinanza-colpisce-le-donne-vittime-di-v

    #revenu_de_Base #rdb #revenu_universel #Italie #femmes #violence_domestique #VSS #violences_sexuelles #violence_économique #autonomie_financière #autonomie #reddito_di_libertà

  • Rentrée 2023 : alerte rouge sur les loyers des logements étudiants - Challenges
    https://www.challenges.fr/grandes-ecoles/rentree-2023-alerte-rouge-sur-les-loyers-des-logements-etudiants_863126

    Les montants « exorbitants » des #loyers « ne surprennent personne », poursuit l’Union étudiante, qui déplore l’absence de « politique massive d’#encadrement_des_loyers ». Cette inflation des loyers est « écrasante pour les étudiants » considère le syndicat, qui estime qu’à côté, les premières mesures de la réforme des bourses qui s’appliqueront à la rentrée – hausse de 37 euros des bourses et révision des barèmes – ne sont que des « mesurettes ».

    À ces hausses de loyers, viendra s’ajouter celle de 10% prévue pour l’électricité à compter du 1er août, rappelle le syndicat, qui évoque une « double peine » pour les étudiants. Dans ces conditions, il craint que l’année universitaire 2023-2024 ne soit placée « sous le signe de la #précarité ». Pour l’Union étudiante, « il est urgent d’agir pour garantir un logement à coût social à [toutes celles et ceux] qui le souhaiteraient, d’encadrer les loyers et de mettre en sécurité sociale l’ensemble des étudiants, à commencer par la mise en place d’un #revenu_d’autonomie à hauteur du seuil de pauvreté, soit 1.128 euros pour toutes et tous ». Autres revendications du syndicat, augmenter les #APL et rénover en urgence les passoires énergétiques.

    #logement #étudiants

  • Le CPAS d’Anderlecht manifeste devant le 16 rue de la Loi face à la hausse de la pauvreté
    https://www.sudinfo.be/id684384/article/2023-07-05/le-cpas-danderlecht-manifeste-devant-le-16-rue-de-la-loi-face-la-hausse-de-l

    Les crises successives ont considérablement augmenté la #précarité, affirme le #CPAS d’#Anderlecht. « Le nombre de citoyens qui font appel au CPAS augmente de manière significative. » De nombreux profils qui n’avaient jamais eu besoin d’aide auparavant s’ajoutent en prime à la liste des bénéficiaires du #revenu_d_intégration.

    Le CPAS d’Anderlecht indique que certaines communes font face à un niveau de #pauvreté plus important que d’autres, sans pour autant disposer des mêmes moyens de financement. « 8,4 % de la population active d’Anderlecht a droit à un revenu d’intégration, ce qui en fait la troisième commune la plus pauvre du pays », rapporte le centre public d’action sociale.

    #RIS

  • RSA : « Vivre avec 600 euros n’étant pas une contrainte suffisante, il faudra désormais être stagiaire d’Etat pour les percevoir »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/03/rsa-vivre-avec-600-euros-n-etant-pas-une-contrainte-suffisante-il-faudra-des

    Raphaël Amselem, chargé d’études pour GenerationLibre, spécialiste des finances publiques, et Lucien Guyon, journaliste chez « Blast », dénoncent, dans une tribune au « Monde », la notion de devoir que le gouvernement veut associer au RSA, qui constitue un droit à la dignité humaine et ne saurait par conséquent souffrir de contrepartie.

    Le revenu de solidarité active (RSA) porte un nom bien administratif pour désigner une aide essentielle, allouée aux personnes sans moyens, afin qu’elles puissent se vêtir, un peu, se nourrir, comme elles peuvent, et se loger, difficilement. Autrement dit, il reconnaît par une maigre compensation financière que le corps social doit s’assurer de la dignité de chacun de ses membres.

    Le gouvernement discute actuellement d’un projet de loi qui devrait conditionner le versement du RSA à un « accompagnement intensif » de quinze à vingt heures par semaine composé, pour le dire simplement, de réunions et d’observations en entreprise. Partant du principe que la dignité se mesure au mérite, le gouvernement choisit, dans le cas d’une telle loi, d’ indexer le droit de survivre à une activité factice, non rémunérée et déléguant toujours davantage le destin des pauvres aux mécanismes iniques de l’administration.

    Vivre avec 600 euros n’étant pas une contrainte suffisante, il faudra désormais être stagiaire d’Etat pour les percevoir. Le droit à la dignité consacre, sans dérogations, que l’être humain, au moment où il est, ne peut être privé de subsistance. L’acquisition du savoir, la vie intime, l’éducation, le travail, la famille, la santé, autrement dit tout rapport au monde, se constituent à travers la reconnaissance de l’Autre. L’homme est social d’emblée. La dignité, conçue dans ce cadre, institue un réseau de respect dont il convient de garantir les conditions d’existence.

    Chaque membre du corps social doit voir sa subsistance garantie

    Paul Ricœur (1913-2005) a écrit dans l’introduction aux Fondements philosophiques des droits de l’homme (1988) : « A toute époque et dans toute culture, une plainte, un cri, un proverbe, une chanson, un conte, un traité de sagesse ont dit le message : si le concept de droits de l’homme n’est pas universel, il n’y en a pas moins, chez tous les hommes, dans toutes les cultures, le besoin, l’attente, le sens de ces droits. L’exigence a toujours été que “quelque chose est dû à l’être humain du seul fait qu’il est humain”. »

    Le droit à la dignité prend ainsi sa source dans l’impératif du soin de l’altérité. L’individualité, en ce sens, n’est rendue possible que par l’obligation de reconnaître à l’autre ce que lui-même me reconnaît. Cette correspondance, au fondement de toute civilité, passe par l’observation et la pratique d’un principe simple : chaque membre du corps social doit voir sa subsistance garantie.

    Le RSA coûte 15 milliards d’euros, 6 % du budget de la Sécurité sociale. Ce poste de dépenses, c’est 600 euros par personne. Et si tant est que l’argument financier soit central dans ce débat, l’économiste Marc de Basquiat notait qu’une telle réforme pourrait induire la création de 50 000 postes, soit un coût supplémentaire de 1 milliard d’euros. La jargonnante prosodie qui accompagne ce projet, traversée par les « dispositifs personnalisés », les « parcours de réinsertion », la « socialisation par le travail », noie sa violence dans un langage technique informe.

    Un régime individuel réglementé à outrance

    Le ministre du travail, Olivier Dussopt, disait, le 23 mai 2023, sur Franceinfo, que les allocataires déclinant les offres d’accompagnement seraient « suspendus ». Ce qui signifie, pour le dire sans politesse lexicale, que des humains se verront retirer leur unique ressource à la discrétion d’une instance administrative. Le reste de ce programme punitif prend les allures d’un régime individuel – encore un – réglementé à outrance.

    Miracle d’inventivité, le gouvernement a inventé le service national universel (SNU) du pauvre ! Qui touchera le RSA sera désormais administré comme un irresponsable a priori, incapable de s’émanciper d’une situation de dénuement sans l’aide éclairée d’un corps technocratique soi-disant à sa mesure, à sa portée, et capable de qualifier le bon, le juste et le souhaitable pour lui.

    Puis, nous la connaissons déjà bien, l’administration française ! Il faut imaginer l’ordinaire allocataire du RSA – 600 euros, pour le redire – à qui on demande de se déplacer à 10 kilomètres de chez lui, pour s’immerger dans une « journée entreprise » censée modifier le cours de son existence ! Il y verra ce qu’est le vrai monde, où des gens missionnent d’autres gens, où des personnes écrivent des notes, où des comptables comptent, où des patrons patronnent, où des livreurs livrent : une révolution !

    La violence sociale va de pair avec la violence administrative

    Des perspectives à venir pour celui qui pensait qu’être comptable, ça n’était pas compter, qu’être patron, ça n’était pas diriger, et qu’être livreur, ça n’était pas livrer. Ce déboussolement organisé aura sans doute une influence vivifiante dans son « parcours de réinsertion », de sorte qu’il se lèvera, le lendemain, en se disant : « C’est donc ça, une épiphanie ! »

    C’est ce manque éclatant de confiance dans la part de la société civile la plus démunie, au point d’en faire l’objet d’un contrôle bureaucratique, qui scandalise, alors que les plus pauvres sont souvent les « premiers de cordée » devant les retors de l’administration, ses impondérables lourdeurs, ses voies labyrinthiques (parfois impénétrables) et son formalisme excessif. Un tiers des bénéficiaires potentiels du RSA renoncent ainsi à le réclamer.

    La violence sociale va de pair avec la violence administrative. L’assurance du droit à la dignité est consubstantielle à la philosophie libérale. De John Locke (1632-1704) à Raymond Aron (1905-1983), de Cesare Beccaria (1738-1794) à John Rawls (1921-2002), les principes du libéralisme politique ont été exposés en ces termes : l’Etat n’a pas un droit sur les individus équivalent aux droits qu’il assure.

    Ce mythe qui prétend que tout droit serait la conversion d’un devoir amène de graves fautes politiques. La garantie des droits fondamentaux doit être gratuite, spontanée, pour elle-même, par elle-même, et au fondement de l’action publique. Nul ne saurait être redevable en dignité. Une mesure qui conditionne la survie est une mesure qui oublie que des gens survivent.

    Rafaël Amselem (chargé d’études au sein du club de réflexions libéral GenerationLibre) et Lucien Guyon(journaliste pour le site de presse en ligne et la Web-TV « Blast »)

    #guerre_aux_pauvres #droits_fondamentaux #RSA #travail #accompagnement_intensif #mérite #contrepartie #contrainte #sanction #droit_au_revenu #revenu_minimum #contrôle #violence_sociale #violence_administrative

    • RSA : « Et si le gouvernement prenait vraiment les choses au sérieux ? », Jean-Claude Barbier
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/01/rsa-et-si-le-gouvernement-prenait-vraiment-les-choses-au-serieux_6175733_323
      La querelle sur l’activité obligatoire des allocataires des minima sociaux date d’avant le RMI de 1988, ancêtre du RSA, rappelle dans une tribune au « Monde » le sociologue Jean-Claude Barbier.

      Quelles sont les différentes options qui pourraient tracer les pistes d’une possible réforme du revenu de solidarité active (RSA), voulue par le gouvernement ? Elles sont au nombre de quatre et sont bien antérieures à la réforme envisagée aujourd’hui. Il y a d’abord ce que l’on peut qualifier de « méthode Raymond Barre ». Elle remonte à l’époque où l’ancien premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing et candidat à l’élection présidentielle de 1988 demandait l’assistance « absolue » uniquement pour les vieillards et les personnes handicapées ne pouvant pas du tout travailler.

      Puis il y a la « méthode Nixon », étendue par Clinton en 1996 : obliger pour une allocation de misère – pas même un emploi – à travailler dans les parcs publics. Elle a été surnommée « workfare ». Ensuite, l’insertion, originalité française, la « méthode Jean-Michel Belorgey » (du nom du député socialiste auteur et pilote de la loi revenu minimum d’insertion (RMI) promulguée le 1er décembre 1988), qui combine allocation et accompagnement effectif des personnes par les travailleurs sociaux.

      Laissons de côté l’actuelle tentation démagogique qui agite aujourd’hui les députés Renaissance et LR comme elle agita Clinton, et intéressons-nous à la quatrième solution, celle de la « dignité humaine » (Menschenwürde), principe constitutionnel allemand. La Cour de Karlsruhe a en effet exigé en 2019 du gouvernement fédéral qu’il respecte le minimum d’existence (digne) fixé par la Constitution en euros, applicable même après d’éventuelles diminutions pour sanctions.

      Rompre avec « l’esprit de radinerie »

      Si un gouvernement français prenait vraiment les choses au sérieux, il devrait d’abord rompre avec « l’esprit de radinerie » qui marque l’assistance aux pauvres depuis son invention en Angleterre élisabéthaine au XVIe siècle. Jamais depuis cette époque les gouvernements n’ont accordé un financement suffisant pour aider les personnes pauvres à sortir de la misère.

      Si en effet les sommes dépensées paraissent énormes, elles ne représentent, y compris l’indemnisation du chômage, que 8 % des dépenses de protection sociale, contre 80 % pour la santé et les retraites. Près des deux tiers de ceux et celles qui perçoivent les minima sociaux sont en dessous du seuil de pauvreté en France (y compris les enfants).
      Une réponse sérieuse devrait donc être celle d’un financement décent mais conséquent, et d’une action d’accompagnement elle aussi conséquente, comme elle existe par exemple au Danemark (à l’exception des immigrants désormais discriminés dans ce pays). Le RMI n’a jamais bien fonctionné en termes de suivi efficace pour le retour ou l’accès à un emploi.

      Renforcer les sanctions reste une mesure marginale

      En 2022, la Cour des comptes a noté que les dépenses des départements ne sont compensées en longue durée qu’à près de 60 %, ce qui veut dire qu’ils n’ont tout simplement pas les moyens de financer l’insertion. Au Danemark, les collectivités territoriales lèvent leurs propres impôts, et sont au contraire suffisamment dotées.
      Mieux, elles sont engagées à gérer efficacement leurs dépenses par des contrats avec l’Etat central qui les incitent à bien le faire. Il est tout à fait possible de dépenser à la fois à bon escient et avec rigueur. Et cela serait une belle réforme à entreprendre pour le ministre français des finances…

      Car renforcer les sanctions reste une mesure marginale ou inopérante. Les économistes savent que les sanctions sont d’une efficacité toute relative : elles motivent à la recherche d’emploi quand approche la fin du droit à l’indemnisation, mais elles incitent à prendre des emplois médiocres.

      Trouver des emplois de qualité et non des ombres d’emploi

      En outre, elles peuvent aussi inciter au non-recours (« Droits et devoirs du RSA : l’impact des contrôles sur la participation des bénéficiaires », Sylvain Chareyron, Rémi Le Gall, Yannick L’Horty, Revue économique n °5/73, 2022). Or, le non-recours au RSA est évalué à un tiers des personnes éligibles. Le problème à résoudre est par conséquent de placer en emploi ou en formation pendant plusieurs mois des centaines de milliers de personnes en difficulté.

      Il s’agit de trouver des emplois de qualité et non des ombres d’emploi, comme le redoute l’ancien commissaire au RSA Martin Hirsch. Les personnes pauvres craignent en effet des emplois de seconde zone, selon l’avis du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale https://www.cnle.gouv.fr/l-avis-accompagnement-vers-l-1672.html (CNLE) sur l’accompagnement et l’insertion.

      Dans le rapport qui envisage la réforme du RSA, l’administration annonce l’objectif d’un conseiller Pôle emploi et d’un travailleur social pour 50 personnes, afin d’obtenir un « accompagnement global » adéquat pour des candidats très éloignés de l’emploi. Or, le régime normal, dit « de suivi », à Pôle emploi est de un pour 363, le régime « guidé » de un pour 211) et régime « renforcé » de un pour 97, selon les chiffres de la Cour des comptes. Un pas immense reste à franchir.

      Le service de l’emploi et de l’insertion est en outre confronté à trois populations hétérogènes : les jeunes ayant de grosses difficultés (à qui Le RSA est refusé, jusqu’à l’âge arbitraire de 25 ans), les chômeurs et les titulaires des minima sociaux, et parmi eux ceux qui ont des problèmes de santé (et ils sont nombreux). Chacun de ces groupes a besoin de services adaptés, qui ne peuvent être automatisés.

      L’essence de l’esprit de solidarité

      Par exemple, il faut des allocations aux jeunes sans emploi ni formation : ils sont plus d’un million, mais moins de 300 000 ont droit au soutien d’un contrat engagement jeune. L’idée d’un accompagnement renforcé accordé à un million de titulaires du RSA (avec un conseiller pour 50 allocataires) coûterait annuellement de 1,4 milliard d’euros, affirme l’IFRAP, un groupe de réflexion ultra-libéral.

      Or, la qualité de l’accompagnement conditionne la réussite : c’est précisément son absence qui explique les mauvais résultats de l’insertion, comme l’affirme la Cour des comptes à juste titre. Selon l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Danemark dépense trois fois plus proportionnellement que la France pour les « mesures actives » de l’emploi (c’est-à-dire les mesures de formation, d’accompagnement, d’insertion…. hors allocations), ce qui explique leur succès relatif dans notre pays.

      Or le Danemark est, comme la France, critiqué comme champion européen des dépenses sociales. Mais il n’y a rien sans rien ! Et de toute façon, l’insertion sociale et professionnelle est sans cesse à remettre sur l’ouvrage, avec des taux d’accès à l’emploi souvent décevants. Il ne faut pourtant pas renoncer, car il s’agit ici de l’essence de l’esprit de solidarité.

      Jean-Claude Barbier(sociologue CNRS au Centre d’économie de la Sorbonne /Paris 1 Panthéon Sorbonne)*

    • La réforme du RSA suscite inquiétudes et scepticisme
      https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/05/04/la-reforme-du-rsa-suscite-inquietudes-et-scepticisme_6172003_823448.html

      Le gouvernement s’inspire notamment du contrat d’engagement jeune (#CEJ), mis en place en mars 2022. Un dispositif réservé aux 16-25 ans et aux moins de 30 ans en situation de handicap qui ne sont ni en études, ni en activité, ni en formation, et qui peinent à accéder à un emploi durable. Ces derniers s’inscrivent dans un parcours d’accompagnement de quinze à vingt heures hebdomadaires en échange d’une #allocation de 530 euros.

      Voilà le tarif : 530e par mois
      Toujours aussi drôle de voir les articles de gauche, et les critiques libérales (comme ci-dessus) qui disent 600 euros pour le RSA individuel alors que dans les faits c’est 534,82 (dans plus de 90% des cas, et ce depuis 1988, un « forfait logement » de 12% est retranché du montant maximum théorique).

      edit trouvé le reste dont

      (...)Des mesures coercitives qui suscitent, là encore, le scepticisme. « Les sanctions annoncées posent une vraie question opérationnelle, considère Antoine Foucher, du cabinet Quintet. Comment va-t-on, même partiellement, même provisoirement, diminuer le RSA des allocataires récalcitrants ? » Ces derniers « sont déjà très contrôlés, avec pas mal de sanctions », ajoute Michaël Zemmour, qui cite notamment « la mise sous surveillance » de leurs comptes en banque.

      Discours « démagogiques »
      Si les collectivités locales expriment ces craintes c’est aussi parce qu’elles pensent qu’une sorte de double discours existe au sein du gouvernement. « Nous sommes rassurés sur les conditions de l’expérimentation, mais inquiets concernant le contenu de la loi », lance Bruno Bernard. Le président écologiste de la métropole de Lyon dénonce les discours « démagogiques » du président de la République et du ministre des comptes publics, Gabriel Attal. Lors d’un déplacement dans l’Hérault, le 25 avril, ce dernier a opposé « les classes moyennes », « ceux qui comptent pour l’essentiel sur leur travail pour vivre, pas sur les aides sociales ni sur un gros patrimoine », aux opposants à la réforme des retraites qui accueillent les déplacements de ministres avec des casseroles.

      Cette opposition entre les actifs et ceux qui bénéficient des minima sociaux avait déjà utilisée par Emmanuel Macron, lors de son entretien télévisé, le 22 mars. « Beaucoup de travailleurs disent “vous nous demandez des efforts mais il y a des gens qui ne travaillent jamais” », avait déclaré le locataire de l’Elysée pour justifier le conditionnement du RSA. (...)

      Une rhétorique qui trouve un écho dans la population et qui peut en partie expliquer la difficulté que peuvent avoir les opposants à mobiliser largement. « L’idée s’est imposée dans l’opinion publique [que nous fabriquons] qu’il y a trop de gens qui vivent de la solidarité nationale, analyse le directeur général délégué d’Ipsos, Brice Teinturier. Une forme de consensus sur le sujet s’est installé, donc une telle réforme du RSA ne sera pas vraiment contestée par les Français. » Un climat politique issu de vingt ans de discours sur le supposé « assistanat » auquel vient s’ajouter un contexte économique favorable.
      Compte tenu des difficultés de recrutements rencontrées par les employeurs dans de très nombreux secteurs, ceux qui ne travaillent pas sont considérés comme profitant du système. Plusieurs études montrent qu’il y a surtout beaucoup de personnes qui peuvent prétendre au RSA et qui n’en bénéficient pas. « En 2018, un tiers (34 %) des foyers éligibles au RSA serait non recourant chaque trimestre, et un sur cinq (20 %) le serait de façon pérenne trois trimestres consécutifs », rappelle la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques.
      Dans son entretien avec les lecteurs du Parisien, le 23 avril, Emmanuel Macron s’appuie pourtant sur ceux qui « abusent » du RSA pour défendre la réforme. Un sentiment renforcé par la sensation qu’ont les actifs, et surtout les travailleurs dit de première et deuxième lignes, que leur travail est dévalorisé et ne paie pas assez. « La précarisation du monde du travail renforce le ressentiment de ceux qui ont l’impression de se lever tôt pour un travail difficile et mal payé envers ceux qui bénéficient des minima sociaux sans travailler », signale Brice Teinturier.

      https://justpaste.it/5oq7c

    • Cela me fait penser à ce passage du Capital de Marx, chapitre 27 – L’expropriation de la population campagnarde – évoquant « la loi sur les pauvres » au XVIe siècle.

      Le protestantisme est essentiellement une religion bourgeoise. Pour en faite ressortir « l’esprit » un seul exemple suffira. C’était encore au temps d’Élisabeth : quelques propriétaires fonciers et quelques riches fermiers de l’Angleterre méridionale se réunirent en conciliabule pour approfondir la loi sur les pauvres récemment promulguée. Puis ils résumèrent le résultat de leurs études communes dans un écrit,contenant dix questions raisonnées, qu’ils soumirent ensuite à l’avis d’un célèbre jurisconsulte d’alors, le sergent Snigge, élevé au rang de juge sous le règne de Jacques-Ier. En voici un extrait :

      « Neuvième question : Quelques-uns des riches fermiers de la paroisse ont projeté un plan fort sage au moyen duquel on peut éviter toute espèce de trouble dans l’exécution de la loi. Ils proposent de faire bâtir dans la paroisse une prison. Tout pauvre qui ne voudra pas s’y laisser enfermer se verra refuser l’assistance. On fera ensuite savoir dans les environs que, si quelque individu désire louer les pauvres de cette paroisse, il aura à remettre, à un terme fixé d’avance, des propositions cachetées indiquant le plus bas prix auquel il voudra nous en débarrasser. Les auteurs de ce plan supposent qu’il y a dans les comtés voisins des gens qui n’ont aucune envie de travailler, et qui sont sans fortune ou sans crédit pour se procurer soit ferme, soit vaisseau, afin de pouvoir vivre sans travail. Ces gens-là seraient tout disposés à faire à la paroisse des propositions très-avantageuses. Si çà et là des pauvres venaient à mourir sous la garde du contractant, la faute en retomberait sur lui, la paroisse ayant rempli à l’égard de ces pauvres tous ses devoirs. Nous craignons pourtant que la loi dont il s’agit ne permette pas des mesures de prudence de ce genre. Mais il vous faut savoir que le reste des freeholders (francs tenanciers) de ce comté et des comtés voisins se joindra à nous pour engager leurs représentants à la chambre des communes à proposer une loi qui permette d’emprisonner les pauvres et de les contraindre au travail, afin que tout individu qui se refuse à l’emprisonnement perde son droit à l’assistance. Ceci, nous l’espérons, va empêcher les misérables d ’avoir besoin d’être assistés . (a) »

      (a) R. Blakey : The History of political, literature from the earliest times. Lond., 1855, vol. II, p. 83, 84

    • oui, si ce n’est qu’on est passé des #workhouse à la « société de travail » (comme Jospin l’a excellemment formulé en 1998) sur un soubassement matériel et social tout autre que les dimensions communautaires détruites par la dynamique du capital : le salaire et le salaire social (j’entends par là autre chose que Friot ; toutes les formes de salaire socialisé, hors emploi, dont le RSA). là l’enjeu du contrôle, c’est de déterminer par la loi, la jurisprudence, les pratiques de guichet, les gesticulations agressives, etc., l’étiage de la disponibilité à l’emploi (la conditionnalité de fait), quitte à multiplier les simulacres (plutôt que les murs) où s’épuise le temps des prolos (la disponibilité à l’emploi avec ses jeux imposés, du théâtre)

      des éléments sur ce théâtre, d’il y a 12 ans (...)
      https://seenthis.net/messages/46203

    • là l’enjeu du contrôle, c’est de déterminer par la loi, la jurisprudence, les pratiques de guichet, les gesticulations agressives, etc., l’étiage de la disponibilité à l’emploi (la conditionnalité de fait), quitte à multiplier les simulacres (plutôt que les murs) où s’épuise le temps des prolos (la disponibilité à l’emploi avec ses jeux imposés, du théâtre)

      Effectivement, « de l’autre côté » des allocataires du RSA on trouve des personnes qui occupent des emplois d’insertion, qui ne correspondent à guère autre chose que des missions de contrôle social et de gestion administrative de la précarité (dont un certain nombre sont d’ailleurs d’anciens « bénéficiaires » du RSA).

      C’est à ce genre d’aberration auquel conduit la défense aveugle des emplois pour les emplois, au lieu de celle des ressources. J’utilise à dessein le mot « ressources » pour évoquer - indépendamment des différentes formes qu’elles peuvent prendre (salaire, minima, pension de retraite, revenu, apprentis, stage, emplois aidés, etc.) - l’accès inconditionnel à des moyens d’existence qui ne soient jamais inférieurs au SMIC (même si le SMIC est un salaire bas, ce sera toujours mieux que ce que donne la liste des emplois bilboques).

      Quand à savoir s’il s’agit ou d’un « salaire socialisé » ou d’un « revenu garanti », à la limite, cela ne me semble pas vraiment déterminant (ce genre de questions aurait même plutôt tendance à me gonfler). Si on trouve un autre mot que « ressources » qui exprime le même sens que celui que je viens de proposer, je suis preneur.

      L’autre raison pour laquelle, de façon plus générale, je pense qu’il est essentiel de déconnecter la question des emplois et d’insister sur celle des ressources dans la lutte sociale (notamment dans la lutte syndicale - ce qui n’est vraiment pas gagné) c’est qu’à cause de la « défenses de l’emploi » on en vient à justifier le développement des pires aberrations industrielles qui nous conduisent droit dans le mur sur le plan social, politique et écologique.

      Il faut arrêter de justifier les choix politiques et sociaux sur les emplois mais, par contre, la défense des fondamentaux de la justice économique doit rester une priorité afin qu’aucune décision économique ou politique (plan sociaux, taxe carbone, etc.) se fasse au détriment des conditions d’existence matérielles de la classe ouvrière (pour faire simple).

      Et puis, après, vient la question du travail, mais là, de mon point de vue, c’est encore une autre problématique.

    • RSA : « La règle des 15 à 20 heures d’activité obligatoires est irréalisable, et le pouvoir le sait très bien », Yves Faucoup, Ancien directeur d’un centre de formation de travailleurs sociaux à Toulouse
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/26/rsa-la-regle-des-15-a-20-heures-d-activite-obligatoires-est-irrealisable-et-

      Ancien cadre dans le travail social, Yves Faucoup dénonce, dans une tribune au « Monde », la réforme du revenu de solidarité active projetée par le gouvernement au nom d’une « mise au travail » dont il ne donne pas les moyens.

      France Travail, remplaçant de Pôle emploi, aura entre autres pour mission de veiller à ce que les attributaires du revenu de solidarité active (RSA) soient inscrits au chômage et établissent un contrat d’engagement.
      A terme, il s’agirait officiellement d’imposer quinze à vingt heures hebdomadaires d’activité à celles et ceux qui perçoivent le RSA. Certains commentateurs considèrent que le président de la République et la première ministre se seraient partagé les rôles : à lui la version dure, de droite, à la Sarkozy (« droits et devoirs »), à elle la version plus humaine, de gauche (« accompagnement et insertion »).
      Depuis bientôt trente-cinq ans (loi sur le revenu minimum d’insertion, décembre 1988), le principe du revenu minimum consiste en France à garantir à une personne sans ressources une allocation différentielle de faible niveau. Elle est fixée en effet à la moitié du seuil de pauvreté pour une personne seule, soit 534 euros mensuels (et non pas 608 euros comme si souvent colporté, en oubliant de déduire le forfait logement).

      Un accompagnement social et professionnel
      Il s’agit de lui permettre de survivre, bien loin des « moyens convenables d’existence » prévus par la Constitution ! Il n’a jamais été non plus expliqué clairement pourquoi le RSA est fixé à 60 % de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) ou de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA ou minimum vieillesse), autres minima sociaux.
      En contrepartie de cette allocation, un engagement d’activité (emploi, bénévolat, formation, création d’entreprise, soins) est signé par la personne en fonction de sa situation (car elle n’est pas toujours en capacité physique ou psychique d’assumer un travail). Cet engagement suppose un accompagnement social et professionnel. C’est du moins ce qu’indiquent les textes en vigueur depuis trente-cinq ans, sauf que les sommes qui y sont consacrées sont passées de 20 % du montant des allocations dans les années 1990 à 7 % aujourd’hui.

      Le RSA mis en avant par Nicolas Sarkozy avait pour but, tout comme la réforme annoncée par Emmanuel Macron, de « mettre les gens au travail », un discours autoritaire destiné à siphonner des voix à droite. Mais cela a été un fiasco, à part le renforcement de l’implication de Pôle emploi. En réalité, la mise en œuvre du RSA a entraîné des pertes majeures pour l’efficacité des accompagnements.
      L’intéressement à une reprise d’activité existait déjà, il aurait suffi de l’améliorer. Le RSA activité a été une erreur : les ayants droit ne l’ont pas ou peu demandé, redoutant la stigmatisation du minimum social entretenue par les idéologues de la droite dure, à l’instar de Laurent Wauquiez. Il a d’ailleurs été remplacé plus efficacement par la prime d’activité, ce que de nombreux spécialistes de la question réclamaient depuis longtemps.

      Le risque de l’affichage
      Le débat public sur le RSA est simpliste, parce qu’il entend régler le problème selon le principe des vases communicants : il y a des emplois non pourvus, donc ils peuvent être attribués à des gens au RSA. Alors que tous les professionnels du secteur savent que si l’on veut être efficace, il faut des moyens en matière d’accompagnement.
      Si le chef de l’Etat en était persuadé, il n’aurait pas attendu six ans pour se préoccuper de l’efficacité du dispositif – ce qui ne laisse d’ailleurs rien augurer de bon sur la mise en œuvre effective de la réforme. Car le risque est de rester dans l’affichage : non seulement pour passer le plus vite possible à autre chose après la promulgation de la loi sur les retraites, mais aussi pour faire de la communication politique à destination d’une classe moyenne prétendument excédée en se servant de la précarité. Comme Nicolas Sarkozy lors de la campagne présidentielle de 2012 dans sa lettre aux Français : « Nous avons consacré des milliards à maintenir des gens dans l’assistanat (…), nous l’avons payé d’une défaite financière. »
      En coulisse, les professionnels de l’accompagnement social suivent vaguement ces débats avec un triste sourire : ils savent que le rapport du haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, Thibaut Guilluy, n’a pas fait l’objet d’une véritable concertation (une seule réunion pour toute l’Occitanie) ; et si beaucoup de ses propositions sont intéressantes, elles sont présentées à tort comme des innovations alors qu’elles n’inventent rien. Les nombreuses pistes existent déjà, elles sont appliquées, tentées ou explorées sur les territoires où les autorités départementales ont mis le paquet, et bien moins là où les moyens manquent.
      Négocié et non imposé
      Elisabeth Borne, en déplacement sur l’île de La Réunion, a parlé de « sanctions » si les attributaires du RSA ne respectent pas l’engagement. Juste pour montrer ses muscles, car la suspension du revenu minimum existe depuis toujours, si la personne ne prend pas contact avec le service d’accompagnement ou ne respecte pas l’engagement qu’elle a pris.

      Sauf que la première ministre a ajouté que dans la mesure où « on aura accompli, de notre côté, notre part de responsabilité », la sanction tombera si le bénéficiaire du RSA, lui, ne suit pas « le parcours qu’on lui a proposé ». Or jusqu’à ce jour, il est entendu, et d’ailleurs bien plus efficace, que le parcours soit négocié avec l’intéressé et non imposé. Il y a là un risque énorme d’un dispositif autoritaire voué à l’échec, car les professionnels de l’accompagnement résisteront et les allocataires aussi.

      1,8 million de foyers perçoivent le RSA : la règle des quinze à vingt heures d’activité obligatoires est irréalisable, et le pouvoir le sait très bien. S’il l’agite comme un hochet dans l’espoir d’en tirer profit auprès de « ceux qui travaillent », il ne semble pas qu’il ait l’intention de l’inscrire précisément dans la loi.
      Ce recul est plutôt une bonne chose, mais qu’en sera-t-il des promesses qu’il a faites sur les moyens d’accompagnement social et professionnel et de formation, indispensables pour aider vraiment les citoyens qui galèrent à tenter d’accéder à une véritable insertion ?

  • ÉDITO - Quand François Lenglet tente de remplir le formulaire du RSA : « Au secours ! »
    https://www.rtl.fr/actu/economie-consommation/edito-quand-francois-lenglet-tente-de-remplir-le-formulaire-du-rsa-au-secours-79

    Une bonne partie des Français ayant théoriquement droit au RSA n’en font pas la demande. Pour tenter de comprendre pourquoi, François Lenglet a tenté de remplir le dossier de demande de cette allocation sociale. Mais il est d’une complexité absolue.

    Regarder
    LENGLET-CO - Faut il avoir fait une grande école pour réussir à remplir le dossier d’attribution du RSA ?

    Je me suis plongé dans l’enfer administratif français, avec un cas exemplaire : le #RSA. Le Revenu de solidarité active, c’est un minima social, 607 euros par mois pour une personne seule, réservé à ceux qui n’ont pas de #revenu. Deux millions de foyers le touchent en France. Il s’agit de protéger les Français les plus démunis, et les étrangers vivant en France depuis plus de 5 ans, contre l’extrême #pauvreté. Le gouvernement veut le réformer, en imposant aux bénéficiaires d’effectuer des travaux d’intérêt général et en accompagnant davantage leur réinsertion sur le marché de l’#emploi.

    J’ai tout simplement téléchargé le formulaire de demande du RSA, et je l’ai parcouru. C’est édifiant. J’y ai trouvé le summum du raffinement bureaucratique français. Il faut rappeler que ce formulaire, le CERFA 15481 01, s’adresse à une population souvent désocialisée, faiblement diplômée, parfois au chômage depuis des années. Ce ne sont pas les pros du CERFA, pour résumer.

    Sept pages de questionnaire, donc, qui commence de façon assez classique, avec nom et adresse. Page 2, ça se complique, la situation familiale (votre situation familiale actuelle et vos droits à pension alimentaire). Page 3, situation professionnelle actuelle, la température monte. Il faut donner le numéro de SIRET de son employeur, indiquer s’il cotise à l’Urssaf, la MSA ou la CGSS, le brouillard s’épaissit.

    Mais le cœur du formulaire, c’est la page 4 : vos #ressources sur les trois derniers mois. Le meilleur est pour la fin : déclaration sur l’honneur. Au secours ! En fait, il faut un conseiller fiscal pour remplir cette affaire. Bon, alors, on pourrait vous objecter qu’il faut bien des critères pour attribuer cette aide. Mais on peut imaginer un effet pervers incroyable : davantage de monde occupé à contrôler ces formulaires qu’à aider les bénéficiaires. Pauvres agents de la #CAF, condamnés à vivre au quotidien dans cet enfer. Pauvres bénéficiaires, condamnés à signaler le moindre changement de leur situation sur ces formulaires abscons.

    En fait, à la lecture de ces pages, je repensais aux arguments des partisans du #revenu_universel – une allocation qui serait versée à tous, et évidemment reprise aussitôt à ceux qui n’en ont pas besoin par le biais de l’impôt sur le revenu. Un système simple. Pas si bête. Parce que ça permettrait aux agents publics de se concentrer sur les tâches vraiment utiles.

    #contrôle #bureaucratie

  • Les propos de Gérald Darmanin sur Giorgia Meloni provoquent une nouvelle crise franco-italienne sur la question de l’immigration
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/05/05/les-propos-de-gerald-darmanin-sur-giorgia-meloni-provoquent-une-nouvelle-cri

    « Meloni, c’est comme Le Pen, elle se fait élire sur “vous allez voir ce que vous allez voir” et puis ce que l’on voit, c’est que ça ne s’arrête pas et que ça s’amplifie », a également déclaré M. Darmanin, les considérations de politique intérieure prenant ainsi le pas à nouveau sur les relations diplomatiques entre les deux pays. Côté français, les parallèles entre Marine Le Pen et Giorgia Meloni semblent dominer les préoccupations d’un exécutif professant face à l’extrême droite un discours de fermeté sur le dossier migratoire.

    On en est au stade où on se brouille avec la néo-fasciste italienne, parce que notre ministre de l’intérieur trouve qu’elle n’est pas assez fasciste. Alors qu’avec lui, vous allez voir comment ça va te me ratonner efficace…

  • Politique de l’absurde
    https://laviedesidees.fr/Politique-de-l-absurde

    La dématérialisation de l’accès aux #droits_sociaux, loin de réduire le non-recours, ne fait qu’accentuer la fracture #numérique. Si cette politique peut paraître absurde, elle est parfaitement délibérée. Depuis une dizaine d’années, dans les CAF (Caisse d’allocations familiales) ou les MSA (Mutualité sociale agricole), il faut faire usage des outils numériques pour accéder à ses droits. Qu’il s’agisse de solliciter un rendez-vous, d’obtenir son test d’éligibilité ou encore d’envoyer les pièces justificatives (...) #Essais

    / Société, #inégalités, pauvreté, revenu de solidarité active (RSA), numérique, droits sociaux, (...)

    #Société #pauvreté #revenu_de_solidarité_active_RSA_ #administration
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20230502_rsa.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20230502_rsa.pdf

    • la mise en œuvre des réformes est toujours prévue avec son taux de #non-recours, ainsi anticipé dans les lignes budgétaires.

      (...) Ces éléments conduisent à pointer les limites conceptuelles de la notion de non-recours, dont la construction même ne permet pas de prendre en compte les déterminants sociaux de l’accès aux droits. Pour réencastrer le problème dans les dynamiques sociales complexes qui le structure, il paraît important de se tenir à distance des pièges à penser qui se forment autour de l’appréhension de la pauvreté et qui réduisent le regard porté sur celles et ceux qui y sont confrontés. Demander le RSA ne requiert pas seulement un ensemble de compétences (numérique, administrative, de mobilité ...) qui permettent ou non de décider de faire valoir son droit. Demander le RSA c’est, plus largement, un parcours qui s’inscrit dans des rapports à l’État qui se constituent sur le temps long, au fil de biographies plus ou moins marquées par les violences qu’exercent les administrations, et qui s’intensifient à mesure que l’on descend dans la hiérarchie sociale.

      (...) Outre l’aggravation des situations de pauvreté de ces personnes et les difficultés sociales qui naissent de ces situations (en termes d’accès aux soins ou encore au logement), un des effets de ces parcours heurtés d’accès aux droits concerne le rapport au politique (Deville, 2022). Que voit-on et que pense-t-on de l’État quand il n’est plus là ? Ce qu’on voit, c’est que l’État s’occupe des « autres », cette figure située juste en-dessous de soi et qui se matérialise régulièrement sous les traits racisés du profiteur d’aide sociale. En l’absence de trace matérielle des pouvoirs publics, la cause retenue aux problèmes rencontrés se mue en mise en concurrence des malheurs, renforçant ainsi les divisions internes aux classes populaires et faisant naître un ressentiment suffisamment grand pour soutenir les votes d’extrême droite.

      #CAF #MSA #dématérialisation #pauvres #RSA #APL #contrôle

  • Un an de revenu universel en Espagne : un sentiment d’inachevé

    La question de la mise en place d’un revenu universel s’invite régulièrement dans les débats. Son introduction en France constituait d’ailleurs une des mesures phares du candidat socialiste à l’élection présidentielle de 2017, Benoît Hamon. Depuis, une ébauche en a été proposée en Espagne, durant le premier confinement, par le gouvernement de Pedro Sanchez. Un an après l’introduction du dispositif, qui devait concerner dans un premier temps les moins fortunés, un article publié dans The Conversation Espagne en dresse un bilan mitigé, le premier texte semblant avoir été largement improvisé.

    Si la route de l’enfer est pavée de bonnes intentions, l’incontinence réglementaire des gouvernements constitue souvent la carrière d’où sont extraits les pavés.

    Fin mai 2020, plongée dans une pandémie mondiale sans précédent, la société espagnole a accueilli à bras ouverts l’annonce par le gouvernement d’une mesure visant à lutter contre l’extrême pauvreté et l’exclusion sociale, sous le slogan « que nadie se quede atrás » (que l’on peut traduire en « que personne ne reste sur la touche »).

    Un an plus tard, à ces bonnes intentions répond la frustration de plus d’un demi-million de personnes dans le besoin qui, à ce jour, ne peuvent toujours pas accéder à la prestation.
    La naissance pleine d’espoir de la mesure

    Avec le décret-loi royal 20/2020 du 29 mai 2020, le revenu vital minimum (RVM), une prestation économique pour l’intégration des personnes en situation de vulnérabilité économique et sociale, a été approuvé. En Espagne, ce type de mesure décidée par l’exécutif intervient en seconde position dans la hiérarchie des normes, derrière les lois votées par le parlement.

    Pour agir, le gouvernement s’appuyait notamment sur l’article 41 de la Constitution espagnole qui reconnaît le droit à la sécurité sociale. Le RVM devait apporter une réponse urgente aux cas de pauvreté et d’exclusion dont les chiffres dépassaient déjà la moyenne de l’Union européenne avant la crise sanitaire, qui a par la suite aggravé la situation. Le Conseil européen alertait d’ailleurs sur ce point dans sa recommandation de 2019 sur le programme national de réforme.

    Le droit à l’assistance sociale reste d’ailleurs un droit de l’homme internationalement reconnu, d’autant plus que l’objectif de développement durable 1.3 des Nations unies exhorte les États à mettre en œuvre des systèmes de protection sociale universelle.

    Cette prestation a été conçue, d’après le décret-loi royal, comme un « outil pour faciliter le passage des individus de l’exclusion sociale imposée par l’absence de ressources à une situation dans laquelle ils peuvent s’épanouir pleinement dans la société ».

    À cette fin, l’objectif était de garantir un revenu minimum en fonction du nombre de membres du foyer. Celui-ci serait de plus compatible avec les dispositifs prévus par chacune des administrations autonomes, faisant ainsi office de prestation plancher.

    Dans le même temps, des mécanismes complémentaires ont été introduits pour favoriser l’intégration sociale, tels que la possibilité de cumuler la prestation avec des revenus issus d’un travail dans certains cas, l’obligation de participer aux programmes d’inclusion du gouvernement, ou celle de s’inscrire comme demandeur d’emploi avec le reste des membres de l’unité de cohabitation. Était aussi prévue la mise en place de mesures incitant les entreprises à embaucher des bénéficiaires du RVM.
    Une mise en œuvre mouvementée

    Depuis son entrée en vigueur, le règlement a été validé par les députés mais aussi modifié à cinq reprises, pour des aspects liés aussi bien à la procédure qu’à son régime juridique et à son application, ce qui traduit en creux un haut degré d’improvisation dans l’approbation du texte initial.

    La dernière réforme en profondeur, introduite par le décret-loi royal 3/2021, le reconnaît dans son exposé des motifs :

    « La période de mise en œuvre de la prestation, depuis son entrée en vigueur, a mis en évidence la nécessité d’améliorer certains de ses aspects afin de permettre la couverture du plus grand nombre de personnes et de pouvoir inclure certaines situations qui, avec la réglementation actuelle, échappent au dispositif ou ne sont pas incorporées de façon satisfaisante ».

    Ces difficultés apparaissent de façon encore plus évidente si l’on regarde les chiffres avancés par un communiqué de presse du ministère de l’Inclusion, de la sécurité sociale et des migrations en date du 18 mars 2021 :

    Sur les 1 150 000 demandes valides reçues, plus de 800 000 ont été traitées. Parmi celles-ci, 600 000 ont été rejetées, 210 000 ont été approuvées et 62 000 sont en cours de rectification. Il convient toutefois de garder à l’esprit que quelque 75 000 personnes se sont vues intégrer d’office dans le dispositif parce qu’il s’agissait de bénéficiaires de revenus minimaux régionaux qui remplissaient déjà toutes les conditions d’accès à la prestation. Par conséquent, l’aide approuvée sur demande ne concernerait à cette date que 135 000 personnes. Même en comptant toutes les demandes approuvées (210 000), cela ne représente que 25 % des demandes traitées.

    - Les ménages ou unités de cohabitation sont composés en moyenne de 2,77 personnes et la prestation moyenne accordée par ménage ou unité de cohabitation est de 460 euros.

    - Plus de 70 % des bénéficiaires de prestations sont des femmes.

    – Quarante-trois pour cent des personnes vivant dans des ménages bénéficiant du RVM sont des mineurs, et près de 70 % des unités de cohabitation comptent au moins un mineur.

    Comme nous pouvons le constater, les données ne traduisent pas seulement la complexité de l’accès ou des critères d’éligibilité serrés. Elles montrent aussi que la pauvreté et la vulnérabilité sociale touchent principalement les femmes et les personnes âgées. Cela devrait rappeler au législateur que le déploiement du dispositif devrait faire la part belle aux problématiques de genre de l’enfance.
    Les nouveaux amendements comme reflet de ses lacunes

    Jusqu’à présent, les cinq réformes entreprises ne semblent pas suffisantes et différentes propositions ont été avancées ces derniers mois pour améliorer encore la réglementation. Cela se ferait désormais sous forme de loi.

    D’une part, le syndicat UGT considère qu’une réforme structurelle plus large serait nécessaire. En ce sens, il propose d’abaisser de l’âge d’accès à 18 ans, de considérer la situation de vulnérabilité au moment de la demande sur la base des revenus déclarés, de mettre un place un accès automatique au RVM une fois que toutes les allocations de chômage ont été épuisées. Il demande aussi à ce que la certification de la situation de vulnérabilité qui détermine l’accès au dispositif fasse l’objet d’une gestion publique directe.

    Néanmoins, le syndicat avertit également que, malgré ces réformes prioritaires, le RVM continuerait de présenter une série de limites qui le rendent incapable de répondre aux situations de grande pauvreté.

    De son côté, Unidas Podemos a déposé 12 amendements, appelant à supprimer de la nécessité de prouver une résidence légale, continue et ininterrompue d’au moins un an en Espagne pour les demandeurs de protection internationale, les émigrants espagnols de retour au pays, les mineurs vivant dans des foyers en situation irrégulière ou les victimes de la traite ou de violences de genre.

    Le parti propose également l’exclusion des prestations pour charges de famille dans le calcul du revenu, la réduction de l’exigence d’une unité de cohabitation indépendante à deux ans pour les personnes de moins de trente ans, ainsi que la révision de l’échelle des paliers pour le calcul de la prestation afin qu’elle n’implique pas un désavantage comparatif pour les familles monoparentales ayant quatre enfants à charge ou plus.

    En résumé, depuis le débat théorique initial sur le revenu de base universel en tant que mécanisme permettant de garantir une reconnaissance de base à tous les membres de la société sans autres exigences, jusqu’à la réalité actuelle du RVM, un fossé existe entre ce qui a été promis et ce qui a été finalement convenu.

    https://theconversation.com/un-an-de-revenu-universel-en-espagne-un-sentiment-dinacheve-163595
    #revenu_universel #revenu_de_base #rdb #Espagne

  • Bernard Friot ou la stratégie de l’incantation Par Michel Husson

    À propos de : Vaincre Macron de Bernard Friot, Paris, La Dispute, 2017.
    https://alencontre.org/societe/debat-bernard-friot-ou-la-strategie-de-lincantation.html

    Le projet de « salaire à vie » de Bernard Friot peut aujourd’hui apparaître à certains comme le nec plus ultra du radicalisme. En réalité, il ne saurait dépasser le stade de l’incantation, non seulement parce que ce projet est incomplet, mais surtout parce qu’il est intrinsèquement dépourvu de toute stratégie de transformation sociale.

    Une histoire de déjà-là
    Près de la moitié du dernier livre de Bernard Friot, Vaincre Macron[1] , est consacrée à un récit qui lui permet d’inscrire son projet dans la continuité de la « révolution communiste du travail » opérée par les fondateurs de la Sécurité sociale[2]. Il faut s’appuyer sur cet existant, ce « déjà-là » anticapitaliste, qui a été en partie vidé de son contenu par les contre-réformes successives. Le salaire à vie existerait déjà pour les fonctionnaires, pour les retraités et même pour un certain nombre de salariés qualifiés de l’industrie. Il suffirait d’étendre cette logique et de renouer ainsi avec la dynamique initiale.

    Mais cette lecture, où l’œuvre des ministres communistes est longuement soulignée, est difficilement généralisable à d’autres pays voisins qui disposent eux aussi d’un État social, par ailleurs grignoté par les « réformes » comme en France. C’est souvent à l’initiative des sociaux-démocrates que les systèmes de protection sociale ont été mis en place et, horreur, certains sont financés par l’impôt plutôt que par la cotisation vertueuse. Il est difficile d’en faire des implants anti-capitalistes plutôt que les produits d’un compromis entre capital et travail, sous la pression des luttes sociales, dans une conjoncture historique sans doute révolue. Mais cette lecture a une fonction : elle sert à fonder l’idée que le passage au modèle de société que promeut Friot pourrait se faire par simple extension du « déjà là », moyennant une prise de conscience des travailleurs. La mise en avant des spécificités de l’histoire sociale de la France conduit à une absence de toute réflexion sur la situation dans les autres pays européens : le projet de Friot reste contenu dans les frontières nationales.

    La fable des retraités créateurs de richesse
    Dans son livre L’enjeu des retraites, publié en 2010, Friot explique que le doublement du PIB d’ici à 2040 permettra de financer facilement les pensions, malgré l’augmentation prévisible du nombre de retraités. Il reprend le même argumentaire trois ans plus tard :

    « On oublie toujours, quand on raisonne sur l’avenir des retraites, que le PIB progresse d’environ 1,6 % par an en volume, et donc qu’il double, à monnaie constante, en 40 ans. C’est pourquoi nous avons pu multiplier par 4,5 les dépenses de pensions depuis 1960 tout en doublant presque le revenu disponible pour les actifs ou l’investissement. Nous pourrons évidemment plus que tripler les dépenses de pensions d’ici 2040 sans que cela empêche le reste du PIB d’être multiplié par 1,8[3] ».

    Quelques années plus tard, dans sa réponse à une chronique où Jean Gadrey lui reprochait de tout attendre de la croissance[4], Friot proteste en affirmant que cette critique repose sur une « totale méprise ». Il se serait borné à prendre au mot les projections du COR (Conseil d’orientation des retraites)
    « pour dire qu’il sera plus facile de consacrer aux retraites 18 % d’un PIB de 4000 milliards d’euros qu’il ne l’est aujourd’hui d’y consacrer 13 % d’un PIB de 2000 ».

    La réalité est que Friot est passé d’une position à une autre. La première consistait à rappeler une évidence :
    « Nous finançons les pensions par un partage immédiat de la valeur ajoutée (une fraction de celle-ci, à hauteur de 25% du salaire brut, va à une cotisation sociale immédiatement transformée en pensions) ».

    La seconde constitue la découverte théorique de Friot :

    « Ce sont les retraités qui produisent les biens et services correspondant à la valeur attribuée à leur travail à travers leur salaire continué : leur pension n’est pas prise sur la valeur attribuée au travail des actifs ».

    Il devrait être clair que ces deux assertions sont contradictoires : la première dit que les pensions sont une fraction du PIB qui est immédiatement transmise aux retraités ; la seconde affirme que les pensions ne sont pas « prises » sur la valeur créée par les actifs. Et pourtant ces deux propositions figurent dans un même entretien[5] où Friot exposait les principales thèses de son livre.

    Friot a ainsi poussé jusqu’à l’absurde[6] son programme de recherche sur la cotisation parce qu’il en avait besoin pour construire son concept de salaire à vie. Cette dérive « théoriciste » le conduit finalement à abjurer son analyse initiale pour se rabattre sur la théorie de la pension comme rémunération de l’activité du retraité :

    « la monnaie distribuée aux retraités correspond non pas à une part de la richesse créée par les actifs, mais à la richesse créée par les retraités eux-mêmes[7] ».

    Même Jean-Marie Harribey qui insiste par ailleurs sur la création de valeur par les fonctionnaires ne peut suivre Friot sur ce terrain[8].

    Un modèle de socialisme inachevé
    Bernard Friot renoue avec le débat sur les « modèles de socialisme » dont il faut bien reconnaître qu’il a perdu de son actualité et qu’il est au point mort depuis au moins deux décennies. C’est assurément à mettre à son crédit mais Friot ne fait aucune référence aux débats passés sur ce sujet[9] et présente un projet incomplet, voire incohérent.

    Friot se borne souvent à construire un lexique spécifique pour désigner des notions déjà largement travaillées. Il parle par exemple de propriété « lucrative » au lieu de propriété privée des moyens de production. De telles élégances de langage ne changent rien au concept mais permettent de poser Friot en innovateur théorique. Friot utilise une notion de « valeur économique » censée prolonger l’appareil théorique marxiste sans rien lui apporter sinon un certain obscurcissement[10]. Il parle de « convention capitaliste du travail » plutôt que de rapports capitalistes de production. La « cotisation investissement » ne fait que recycler la vieille idée de « fonds d’accumulation » qui est un enjeu important des débats ignorés par Friot.

    Cette dernière remarque conduit à une deuxième critique qui va plus au fond : le modèle de Friot ne dit rien de l’articulation entre plan et marché ou plutôt entre la socialisation de l’investissement et les décisions individuelles des entreprises. Friot se borne à couper la poire en deux :

    « on peut envisager que les entreprises conservent 15 % de leur valeur ajoutée pour de l’autofinancement et qu’une cotisation progressivement portée à 15 % aille à des caisses d’investissement[11] ».

    Friot pense-t-il réellement que cette règle – qui évoque irrésistiblement Saint-Martin coupant son manteau en deux pour le partager – répond à la question-clé de la socialisation de l’investissement ? Quel est le moyen de rendre compatible les choix de la société avec la moitié du profit qui reste à la disposition des entreprises ? Comment éviter l’« égoïsme d’entreprise ? Et quid de l’autogestion ?

    Dans les débats sur les modèles de socialisme, une autre question-clé porte sur le calcul économique et en particulier sur la formation des prix. Dans une économie planifiée, il peut s’agir de « quasi-prix », de « pseudo-prix », de « prix administrés », ou encore d’« évaluations objectivement déterminées », pour reprendre le terme de Kantorovitch. Quel que soit le nom qu’on leur donne, leur fonction est de permettre un calcul économique qui prenne en compte les priorités de la société qui sont déterminées autrement que selon des mécanismes de marché. Du coup la distorsion par rapport aux prix de marché est l’instrument
    des choix politiques.
    Sur ce point, la proposition de Friot est pour le moins déroutante :

    « on pourrait décider que tout prix soit la multiplication par 1,25 du prix des consommations intermédiaires[12] ».

    Ce « on pourrait décider » souligne les imprécisions du modèle. Pourquoi 25 % ? Mais surtout comment sont fixés les prix des consommations intermédiaires, autrement dit le prix des marchandises achetées par une entreprise à d’autres ? Cette bourde montre que Friot n’a pas travaillé des questions qui ont pourtant occupé les théoriciens du socialisme depuis Marx et Engels. Plus grave, peut-être, elle révèle en creux l’absolue indifférence de Friot à la question écologique.

    Beaucoup d’autres questions restent sans réponse dans la construction de Friot, et notamment l’insertion dans l’économie mondiale. Sur ce point pourtant crucial et actuel pour tout projet de transformation sociale, Friot botte en touche :

    « Bien des questions demeurent, dont celle de l’exportation d’une telle organisation économique dans d’autres pays, ainsi que de sa compatibilité avec le libre-échange et les contraintes européennes[13] ».

    Le document du réseau salariat est encore plus évasif :

    « Concernant les échanges purement marchands, ils continueraient à se faire comme aujourd’hui au « prix du marché », avec les mêmes conséquences ou risques en termes de balance commerciale[14] ».

    Enfin le droit à l’emploi n’est pas affirmé, et Friot, même s’il récuse un tel rapprochement, se heurte aux mêmes objections que les projets de revenu universel : et si un grand nombre de personnes décide de ne rien faire du tout ? A cette question qui lui est posée dans un entretien excellemment mené[15], Friot répond :

    « les personnes qui décident de ne rien faire, moi je n’y crois pas. Parce que notre humanisation dépend de notre contribution à la production de valeur économique ».

    Mais c’est vrai aussi dans la société d’aujourd’hui, avec ses 10% de chômeurs, et cette réponse est contradictoire avec l’idée que le salaire à vie rémunère une activité autovalidée (comme celle des retraités).

    L’interrogation doit donc aller plus loin : y aura-t-il des emplois pour tout le monde et comment se réalisera la correspondance entre postes de travail et candidats à l’emploi ? Il y a là un des éléments les plus problématiques de tous les projets de société post-capitaliste. Friot répond ainsi :

    « Soit vous voulez monter une boîte et on vous dit « eh bien écoutez non, cela existe déjà, on ne subventionne pas », soit vous entrez dans une entreprise et là ça n’est pas vous qui allez décider tout seul de ce que vous allez faire, vous entrez dans un collectif qui va partager les tâches avec vous. Donc vous allez toujours vous inscrire dans des besoins exprimés par la société. Et s’il y avait pénurie sur des tâches de nuit par exemple, qui seraient indispensables dans des industries de process ou dans les hôpitaux, on pourvoirait ces postes en assurant une promotion plus rapide de ceux qui les accepteraient pour un temps limité ».

    Cette réponse est insatisfaisante parce qu’on ne sait pas qui décide aux différentes étapes décrites par Friot. Qui par exemple jouerait le rôle d’une sorte de « marché du travail » permettant d’attirer des salariés par la perspective d’une promotion plus rapide, par ailleurs contradictoire avec le principe d’un salaire uniquement lié à la qualification ?

    L’incantation comme stratégie
    Comment articuler les luttes sociales actuelles avec le projet fondé sur le « salaire à vie » ? C’est là que Friot dérape en raison de ce que l’on pourrait appeler la compacité de son projet qui le conduit à des formules provocatrices comme celle-ci :

    « Se battre pour l’emploi, c’est se tirer une balle dans le pied[16] ».

    La lutte pour un meilleur partage de la valeur équivaut pour lui à « éviter la lutte de classes » alors qu’il faudrait « changer la valeur ». Bref, Friot dénonce tous les axes actuels de mobilisation sociale comme autant de « conduites d’évitement » parce qu’ils ont le tort de ne pas reprendre son projet. C’est ce que montre ce passage assez hallucinant qui mérite d’être cité in extenso :

    « Parmi les conduites d’évitement, je viens d’évoquer la revendication d’un meilleur partage de la valeur, mais il y en a bien d’autres qui vont faire l’objet de cet entretien. Si on n’assume pas le conflit sur la valeur, on se bat non pas pour la suppression du marché du travail, mais pour le plein-emploi. Non pas pour la fonction publique, mais pour le service public. Non pas pour le salaire à vie et la copropriété d’usage des entreprises, mais pour le revenu de base, la sécurité emploi-formation ou l’allocation d’autonomie pour la jeunesse. Non pas pour une autre mesure de la valeur que le temps de travail et le refus de la productivité capitaliste, mais pour la réduction du temps de travail. Non pas pour la suppression du crédit par cotisation économique subventionnant l’investissement, mais pour un pôle public bancaire, pour un financement des emprunts publics par la Banque centrale. Non pas pour une généralisation de la cotisation à tout le PIB, mais pour une révolution fiscale. Non pas pour une pratique salariale de la valeur, mais pour la suppression du travail et de la monnaie dans une illusoire société de l’activité vouée à la seule valeur d’usage. Non pas pour la révolution tout court, mais pour la révolution informationnelle. Non pas pour l’émancipation du travail de la folie capitaliste, mais pour un développement durable. Face à la détermination offensive de la classe dirigeante depuis quarante ans, toutes ces conduites d’évitement sont autant d’erreurs stratégiques qui mènent le mouvement populaire à la défaite[17] ».

    Dans Vaincre Macron, Friot enfonce le clou en décrétant que

    « travailler moins pour travailler tous est un mot d’ordre réactionnaire qui naturalise la pratique capitaliste du travail et sa réduction aux seules activités valorisant le capital ».

    Et il va encore plus loin quand il écrit que ce serait

    « admettre que le travail est par nature en quantité limitée, et qu’il ne faut pas trop d’étrangers pour le partager ».

    Il reprend ainsi à son compte l’amalgame (injurieux et ignorant) du prix « Nobel » Jean Tirole :

    « paradoxalement, l’hypothèse sous-jacente à la fixité de l’emploi et donc à la politique de réduction du temps de travail afin de permettre un partage de l’emploi est la même que celle qui sous-tend le discours des partis d’extrême droite quand ils soutiennent que les immigrants « prendraient » le travail des résidents nationaux au motif que cet emploi serait en quantité fixe[18] ».

    Bref, militer pour la réduction du temps de travail, défendre les services publics, etc. sont autant d’« erreurs stratégiques ». Au-delà des règlements de compte avec les économistes du PCF (sécurité emploi formation, révolution informationnelle) ces insultes adressées aux revendications et aux luttes réellement existantes fonctionnent comme une injonction : soit vous basculez intégralement et immédiatement dans mon système, soit vous êtes condamnés à la défaite.

    Plus récemment, Friot s’est prêté pour l’Humanité à un exercice programmatique a priori plus immédiat. Voilà ce qu’il propose et qui mérite aussi d’être cité longuement :

    « J’évoque à la suite de la CGT le maintien du salaire entre deux emplois jusqu’à ce qu’on retrouve un emploi à salaire au moins égal ou la titularisation de tous les agents contractuels des services publics. J’évoque aussi l’abaissement de l’âge de la retraite à 50 ans à 100 % du salaire net des six meilleurs mois, et cela indépendamment de la durée de cotisation (ces travailleurs ainsi payés par la caisse de retraite pouvant mettre leur savoir-faire au service d’entreprises marchandes, propriété de leurs salariés), le paiement par l’Unedic pendant trois ans des salaires des salariés reprenant leur entreprise en Scop, l’attribution aux 10 cohortes suivant la majorité (les 18-27 ans) du premier niveau de qualification et donc de salaire à vie (par exemple, 1500 euros par mois). Amorcer ainsi la pompe de la généralisation du salaire suppose que les entreprises versent à la caisse des salaires (l’Unedic, transformée et gérée par les seuls travailleurs) une cotisation nouvelle de l’ordre de 15 % de leur valeur ajoutée, étant entendu qu’elles n’auraient plus à payer, elles, les travailleurs payés par la caisse. Cette cotisation nouvelle serait compensée en totalité par le non-versement de dividendes et le non-remboursement de dettes contractées pour investir dans l’outil de travail : les dettes privées pour financer l’investissement sont aussi illégitimes que la dette publique, et les dividendes doivent disparaître[19] ». _

    Évidemment, ça décoiffe ! Friot pense pourtant qu’il ne fait que prolonger les implications du « déjà-là » hérité de l’action des ministres communistes dans l’immédiat après-guerre. Mais un tel programme équivaut à socialiser une grande partie de l’économie : le système financier d’abord puisqu’on annule toutes les actions (plus de dividendes) et une bonne partie de l’actif des banques (plus de dettes), les entreprises ensuite, avec 15 % de leur valeur ajoutée qui passent à l’Unedic, sans parler de l’augmentation de cotisation pour financer la retraite à 50 ans à 100 % du salaire net. Cette surenchère ne peut convaincre qu’une frange de disciples et elle ne dessine pas une trajectoire crédible de transformation sociale.

    La démarche de Friot est en réalité un obstacle à l’élaboration d’un projet alternatif doté d’une logique de transition ou de bifurcation vers un autre modèle. Une bonne partie de son activité (ainsi que celle de ses disciples du Réseau salariat) consiste d’ailleurs à déconsidérer – voire insulter comme on l’a vu – tout projet qui n’a pas le salaire à vie comme objectif.

    En appelant à se projeter dans un futur indistinct, Friot ignore toute mesure d’urgence comme l’augmentation du salaire minimum et des minima sociaux. Il s’oppose violemment à la réduction de la durée de travail comme instrument de lutte contre le chômage au profit d’une « autre mesure de la valeur que le temps de travail et le refus de la productivité capitaliste » ce qui n’a rien à voir, à moins d’assimiler de manière malhonnête le projet de travailler tou(te)s pour travailler moins avec l’intensification capitaliste du travail.

    En faisant miroiter un salaire à vie le projet de Friot contourne toute élaboration d’une version radicale de la sécurité sociale professionnelle[20]. La renonciation ou en tout cas l’absence de priorité accordée au plein-emploi empêche d’envisager une logique d’Etat « employeur en dernier ressort ». Quant à la nécessité de faire face au défi climatique, elle est totalement absente du modèle.

    L’unique chemin
    Dans le dernier chapitre de Vaincre Macron, Bernard Friot propose de « poursuivre le geste de création du régime général en 1946 » et rappelle sans rien y ajouter les grandes lignes de son programme. Le livre se termine par cette interrogation légitime : « Que répondre au lecteur qui trouve le projet enthousiasmant et le chemin impossible ? ». La réponse de Friot est que « le projet est le chemin » et que c’est le seul :
    « l’alternative communiste ne viendra que par l’alternative communiste, et l’affermissement des prémices de cette alternative est l’unique chemin ».

    Cette idée d’un chemin unique en dit long sur la fermeture du système-Friot. Le salariat est confronté à un choix binaire : soit se rallier à son programme, par exemple en refusant « le remboursement des dettes d’investissement et le versement des dividendes », en organisant « la hausse des cotisations et [la création] des caisses d’investissement », soit, encore une fois, se condamner à de nouvelles défaites. Bref, c’est tout ou rien :

    « tout atermoiement dans la poursuite du déjà-là laisse du champ à la bourgeoisie et désarme le salariat ».

    Cette stupéfiante prétention à tracer « l’unique chemin » dans un vide stratégique abyssal conduit à reprendre en conclusion ce commentaire sévère de Mateo Alaluf :

     « En ce qui concerne l’engagement politique, un tel système théorique désincarné se traduit par des pratiques sectaires. Le droit politique au salaire, revendiqué par ses disciples, ne revêt en conséquence qu’une portée incantatoire[21] ». (17 janvier 2018)

    Notes
    [1] Bernard Friot, Vaincre Macron, La Dispute, 2017.
    [2] Pour une critique de ce récit, voir Jean-Claude Mamet, « Autour du dernier livre de Bernard Friot : Vaincre Macron », Entre les lignes entre les mots, 24 décembre 2017,
    [3] Bernard Friot, « Financement des retraites : l’enjeu des cotisations patronales », Autisme-economie.org, 16 mai 2003.
    [4] Jean Gadrey, « Retraites : les curieuses thèses de Bernard Friot » (1), 28 août 2013 ; Bernard Friot, « Premier commentaire », 30 août 2013.
    [5] Bernard Friot, « La retraite ? un salaire continué », Alternative libertaire, mai 2010.
    [6] L’auteur de ces lignes (un retraité) crée assurément une richesse considérable en écrivant cet article, mais en serait-il de même s’il se consacrait à l’audition de l’intégrale des Chaussettes noires ?
    [7] Bernard Friot, L’enjeu des retraites, La Dispute, 2010.
    [8] Jean-Marie Harribey, « Les retraités créent-ils la valeur monétaire qu’ils perçoivent ? », Revue française de socio-économie, n° 6, 2010. Voir aussi Henri Sterdyniak, « A propos de Bernard Friot, quelques remarques », blog Mediapart, 3 juin 2016 ; Pierre Khalfa, « Des théorisations fragiles aux implications politiques hasardeuses », Les Possibles n° 11, automne 2016.
    [9] Voir par exemple : Thomas Coutrot, « Socialisme, marchés, autogestion : un état du débat », séminaire Matisse « Hétérodoxies », 18 octobre 2002, et les textes réunis sur le site du défunt « Groupe d’études un socialisme pour demain ».
    [10] Alain Bihr, « Universaliser le salaire ou supprimer le salariat ? », A l’encontre, 13 juin 2013.
    [11] Bernard Friot, « La cotisation, levier d’émancipation », Monde diplomatique, février 2012.
    [12] Bernard Friot, Emanciper le travail, La dispute, 2014.
    [13] Bernard Friot, « En finir avec les luttes défensives », Le Monde diplomatique, novembre 2017.
    [14] Réseau salariat, Caisses d’investissement et monnaie, août 2016.
    [15] Bernard Friot, « Nous pouvons organiser nous-mêmes le travail, sans employeurs, ni prêteurs », Le Comptoir, 6 octobre 2017. Propos recueillis par Luc Toupense.
    [16] Bernard Friot, Emanciper le travail, La dispute, 2014, pp.105-106.
    [17] Bernard Friot, idem, pp.100-101.
    [18] Jean Tirole, Economie du bien commun, 2016. Pour une critique, voir Michel Husson, « Les anti-RTT : arrogance et gros sabots », Alternatives économiques, 25 mai 2016.
    [19] Bernard Friot, « Le salaire universel, droit politique », L’Humanité, 20 Juin 2016.
    [20] Laurent Garrouste, Michel Husson, Claude Jacquin, Henri Wilno, Supprimer les licenciements, Syllepse, 2006.
    [21] Mateo Alaluf, « La solidarité est-elle contre révolutionnaire ? », Ensemble ! n° 88, septembre 2015.

    #Bernard_Friot #incantations #retraite #travail #social #salaire #Sécurité_sociale #capitalisme #économie #Socialisme #incantations #salaire_à_vie #Jean_Tirole 
     #revenu_universel #salaire_à_vie #revenu_de_base #revenu_garanti #emmanuel_macron #croyance #religion

  • La garantie d’emploi, un outil au potentiel révolutionnaire | Romaric Godin
    http://www.contretemps.eu/chomage-economie-garantie-emploi-depassement-capitalisme

    L’ouvrage de Pavlina Tcherneva qui inaugure la collection « Économie politique » avance une proposition qui peut paraître a priori insensée : fournir à tous les citoyens qui le souhaitent un travail rémunéré, permettant de vivre décemment. Tout l’intérêt de son propos est de montrer que, précisément, cette proposition n’a rien d’insensé, mais qu’elle est parfaitement réalisable pour peu que l’on se libère de certaines certitudes qui ne sont que des constructions politiques. L’idée que le chômage soit le mode d’ajustement « normal » de l’économie est déjà un choix politique remarquablement déconstruit par l’autrice. Source : (...)

  • La #pauvreté des enfants au niveau local : cartographie communale

    En #Belgique, plus d’un enfant sur six vit sous le #seuil_de_pauvreté, mais cette pauvreté n’est pas répartie de la même façon dans toutes les communes. Actuellement, seule la #Flandre dispose d’un outil de mesure de la pauvreté des enfants au niveau communal : le #Kansarmoede_Index. Afin de mieux cerner le phénomène, la Fondation Roi Baudouin a chargé l’Université de Mons en 2018 de cartographier les facteurs de risque de pauvreté des enfants sur l’ensemble du pays et à l’échelon communal.

    Vous trouverez ci-dessous six cartes représentant la Belgique avec, pour chacune d’elles, les données de chaque commune relatives à un indicateur de risque de pauvreté des enfants. Ces cartes sont interactives : en les parcourant avec la souris, vous verrez apparaître à l’écran les chiffres pour chaque commune.

    Les cinq premières cartes présentent cinq indicateurs indirects de risque de #pauvreté_des_enfants. Ils portent sur l’ensemble de la Belgique et mesurent des facteurs de (haut) #risque_de_pauvreté dans les #ménages avec enfants de 0 à 18 ans, mais pas la pauvreté des enfants en tant que telle. Il faut donc les interpréter avec précaution. Les cartes sont individuelles, mais complémentaires : c’est en prenant en compte plusieurs indicateurs indirects qu’on obtient une meilleure image du risque de pauvreté couru par les enfants de chaque commune.

    1. Les bénéficiaires d’un #revenu_d’intégration_sociale (#RIS) ou équivalent (eRIS) en charge d’un ménage

    Cet indicateur met en évidence le pourcentage de familles bénéficiaires du RIS ou eRIS dans chaque commune et parmi les ménages avec enfants. Plus une commune compte de bénéficiaires d’un RIS ou eRIS en charge d’un ménage, plus le risque de pauvreté des enfants est élevé.

    2. Les revenus moyens par ménage

    Cet indicateur donne une approximation de la richesse des ménages dans chaque commune. Plus l’indicateur est élevé, plus faible est le risque de pauvreté des enfants.

    3. La part des #mineurs vivant dans un ménage sans revenu du travail

    Vivre dans un ménage sans revenu du travail est l’indicateur indirect le plus fiable du risque de pauvreté des enfants. Plus cet indicateur est élevé, plus nombreux sont les enfants à risque de pauvreté.

    4. La part des ménages vivant dans un logement public social

    Cet indicateur doit être interprété avec précaution. Même si les enfants vivant dans un logement public social sont plus à risque de pauvreté, un taux élevé de ménages vivant dans un logement public social peut aussi refléter une stratégie communale active de lutte contre la précarité des familles.

    5. Le type de ménage – focus sur les ménages monoparentaux

    Vivre dans une famille monoparentale, dont le parent est le plus souvent une femme seule, augmente le risque de pauvreté des enfants. Toutefois, cet indicateur doit être interprété avec prudence car certains parents seuls disposent de revenus suffisamment élevés, d’un réseau social ou d’autres types de ressources qui protègent leur(s) enfant(s) du risque de pauvreté.

    6. Le dernière carte présente le Kansarmoede Index (Index de risque de pauvreté), le seul indicateur direct de la pauvreté des enfants développé par l’organisme flamand Kind en Gezin et disponible uniquement pour la Flandre. Cet indicateur fournit le pourcentage d’enfants entre 0 et 3 ans qui vivent dans un ménage défavorisé. Le pourcentage de risque de pauvreté est calculé sur la base de six domaines : le revenu mensuel de la famille, le niveau d’éducation des parents, le niveau de stimulation de l’enfant, la situation professionnelle des parents, la qualité du logement et la santé. Les familles sont considérées comme à risque de pauvreté lorsque leur situation est impactée négativement dans trois des six domaines. Plus cet indicateur est élevé, plus les familles sont à risque de pauvreté.

    https://www.kbs-frb.be/fr/cartographie_pauvreteinfantile

    #cartographie #Belgique #pauvreté #enfants #enfance #visualisation #chiffres #statistiques #pauvreté_des_enfants #communes #indicateurs

    via @suske

  • #Développement_humain (2020)

    - L´#indice_de_développement_humain et ses composantes
    – L´évolution de l´indice de développement humain
    – L´indice de développement humain ajusté aux #inégalités
    – L´indice de développement de #genre
    – L´indice d´#inégalités_de_genre
    – Indice de #pauvreté multidimensionnelle : pays en développement
    – Tendances démographiques
    #Santé
    – Niveaux d´#instruction
    #Revenu_national et composition des ressources
    #Travail et #emploi
    #Sécurité_humaine
    #Mobilité humaine et flux de capitaux
    – Qualité du développement humain
    – Inégalités femmes-hommes sur le cycle de vie
    – Autonomisation des #femmes
    #Durabilité_environnementale
    – Viabilité socio-économique

    http://www.cartostat.eu/dr=2020_developpement_humain/F/TABLEAU.html

    #cartothèque #cartes #visualisations #développement_humain
    #ressources_pédagogiques #statistiques #chiffres #monde
    #inégalités #démographie #éducation #mobilité_humaine #dette #tourisme #migrations #téléphone #téléphone_mobile #mortalité_infantile #paludisme #tuberculeuse #VIH #HIV #scolarisation #alphabétisation #PIB #chômage #réfugiés #IDPs #déplacés_internes #suicide #suicides #violence_domestique #violence_conjugale #alimentation #déficit_alimentaire #espérance_de_vie #lits_d'hôpitaux #soins #médecin #PISA #électricité #eau_potable #assainissement #travail_domestique #accouchement #contraception #congé_maternité #combustibles_fossiles #CO2 #émissions_de_CO2 #forêt #engrais #industrie_agro-alimentaire #pollution #pollution_atmosphérique #hygiène #dépenses_militaires #armée #pauvreté

    ping @reka

  • #Refugia : a Utopian solution to the crisis of mass displacement

    And still they come. An apparently endless flotilla of rubber dinghies filled with migrants and refugees making their way across the Mediterranean to Europe. As the numbers and visibility of this migration have gathered pace, even mainstream politicians have expressed their alarm. Antonio Tajani, president of the European Parliament, has talked of an exodus of biblical proportions. Solutions designed for a few thousand people will not work as a strategy for millions, he warned.

    In responsible political circles, let alone in the more feverish popular media, there is an increasing recognition that the three conventional “durable solutions” to displacement – local integration, resettlement and return – cannot meet the scale and speed of the movement of people. The international institutional architecture seems unequal to the task. In 2016, there were no fewer than seven international summits to address the refugee and migrant “crisis”. What is talked about is often a reboot of what has demonstrably failed before.

    Emerging, sometimes from unexpected places, have come a number of imaginative solutions. For example, the proposal to create a separate “refugee nation” was first promoted by a Californian businessman, Jason Buzi. Egyptian telecoms billionaire Naguib Sawiris has also sought to buy an island from Greece or Italy to house those crossing the Mediterranean. The most elaborately worked-out island solution is to create a “Europe-in-Africa” city-state on the Tunisian Plateau – a thin strip of seabed that sits between Tunisia and Italy within the Mediterranean. The concept has been modelled in detail by Theo Deutinger, a respected Dutch architect.

    Other proposals have centred on the creation of “refugee cities” or zones. Drawing from the example of a special economic zone in Jordan near the Za’atari refugee camp, where refugees have been allowed to work rather than languish, migration expert Alex Betts and economist Paul Collier have made the simple but daring point that many refugees can be turned into assets rather than liabilities if the legalities forbidding asylum-seekers seeking paid jobs are set aside.
    Refugia and the Sesame Pass

    My colleague Nicholas Van Hear and I have reviewed most of these proposals and advanced an even more radical plan. Our vision is to create a set of loosely-connected self-governing units we call “Refugia”, brought into being mainly by refugees and displaced people themselves, with some support from sympathisers. Though scattered like an archipelago, Refugia will nonetheless link together many refugee communities – in conflict areas, in neighbouring or transit countries, and in more distant countries of settlement. We are happy to accept the label “utopian” for our scheme, but ours is a more pragmatic idea, a “realistic utopianism” to use a term developed by the philosopher John Rawls.

    We see Refugia as the outcome of a tacit grand bargain – among richer states and emerging countries, nearby countries affected by conflict and, crucially, refugees themselves. After discussions with representatives of Refugia, new constituent zones will be licensed by the nation states within whose territories they lie.

    Refugee camps, hostels, farming communities, self-built housing estates or suburbs of a town might all join Refugia. Though subject to the host states’ laws, zones are created from below. They are self-governing and eventually self-supporting. The upshot is that Refugians hold dual affinities: as well as an affiliation to Refugia they can be long-term residents of the states that license their territories. They can move among different parts of Refugia, and, where negotiated, between sovereign nations.

    Refugians will be issued with a “Sesame Pass”, a super-smart, biometric card that opens up and connects all the nodes and zones of Refugia. This will provide those who have it with a collective identity, the right to vote for a transnational parliament, legal status, entitlements and the facilitation of work, financial transfers and enhanced mobility. The Sesame Pass could also be developed as a machine-readable currency, which will allow tax collection or the administration of a basic income grant for all Refugians.

    There is some sense in which an embryonic form of Refugia already exists. As the length of time in refugee camps has lengthened and more refugees have been accommodated in or near cities, organic urban settlements have developed. A good example is Camp Domiz, a Syrian refugee camp in northern Iraq that has been badged a “Refugee republic”, as its inhabitants have set up community centres, shops and mosques.

    The displaced in control of their future

    In our vision, Refugia is essentially self-organised and self-managed. It does not require political or cultural conformity, rather it subscribes to the principles and deeds of solidarity and mutual aid. But it is absolutely possible that desperation might drive the European Union to come up with a radical blueprint for a dystopian form of Refugia, which does not fit these principles.

    In September 2016, Hungary’s right-wing prime minister Victor Orban suggested that the EU should build a “refugee city” in North Africa. Not only was this explicitly about repression enforced by military might, Orban also declared that “those who came [to Europe] illegally must be rounded up and shipped out”.

    While we must be on the guard for forms of Refugia that are nakedly about subjugation, new territorial units initiated from above should not be discarded in principle. There is no reason why, where these proposals comply with Refugia’s democratic and tolerant values, they should not be incorporated as nodes within the wider idea.

    Precisely because they have been disempowered by their traumatic experiences, those who have been displaced do not need things done to them and may even resist things being done for them. Ideally, Refugians will be in charge of as much of Refugia as is practically possible. This is the promise of the many small initiatives and inventive new solutions in this utopian vision of what could be possible.

    https://theconversation.com/refugia-a-utopian-solution-to-the-crisis-of-mass-displacement-81136
    Je mets ici pour archivage... mais ce projet imaginé par des profs émerites est très douteux !

    #utopie ou, plutôt... #distopie ?!?

    #solution (sic) #alternative (sic) #Jason_Buzi #nation_réfugiée #nation_de_réfugiés #refugee_nation #Naguib_Sawiris #île #Europe-in-Africa #Theo_Deutinger #auto-gouvernance #utopie_réaliste #revenu_de_base #camps_de_réfugiés #Domiz #solidarité #entraide #réseau

    #Sesame_Pass #Nicholas_Van_Hear

    –—
    Le site web de #Refugee_Republic :


    https://refugeerepublic.submarinechannel.com

    Une vidéo introductive :
    https://vimeo.com/113100941

    déjà signalé en 2015 par @fil :
    https://seenthis.net/messages/427762

    ping @isskein @karine4

  • Droit du travail : un chauffeur Uber requalifié en « salarié »
    http://www.bonnes-nouvelles.be/site/index.php?iddet=2849&id_surf=&idcat=305&quellePage=999&surf_lang=fr

    Je me sens comme un esclave : je travaille de longues heures chaque jour, sous les ordres d’une application, mais je n’ai pas de quoi me payer un salaire à la fin du mois. » Guillaume* est chauffeur indépendant, ou « limousine » comme on dit chez Bruxelles Mobilité, où il a obtenu sa licence il y a un peu plus de deux ans. Depuis novembre 2018, il « collabore » avec Uber, qui organise le transport rémunéré de citadins dans la capitale et un peu partout dans le monde. À ce stade, il n’a « plus rien à (...)

    #Uber #procès #législation #conducteur·trice·s #GigEconomy #travail

    • Je me sens comme un esclave : je travaille de longues heures chaque jour, sous les ordres d’une application, mais je n’ai pas de quoi me payer un salaire à la fin du mois. »

      Guillaume* est chauffeur indépendant, ou « limousine » comme on dit chez Bruxelles Mobilité, où il a obtenu sa licence il y a un peu plus de deux ans. Depuis novembre 2018, il « collabore » avec Uber, qui organise le transport rémunéré de citadins dans la capitale et un peu partout dans le monde. À ce stade, il n’a « plus rien à perdre », nous explique-t-il. « Mais peut-être, quelque chose à gagner ». À savoir : devenir salarié de la multinationale.

      Début juillet, Guillaume a introduit une demande de qualification de sa relation avec la plateforme d’origine américaine auprès de la Commission administrative de règlement de la relation de travail (CRT). Quand la nature de votre relation avec votre donneur d’ordre ou votre employeur vous apparaît comme suspecte, cet organe est là pour analyser votre cas et décider, si au regard de la législation locale, vous êtes salarié ou indépendant.

      « Je ne gagne pas ma vie décemment »

      Guillaume, sur papier, appartient à la seconde catégorie de travailleurs (les deux seules existant en droit du travail belge). Il a enregistré une société en personne physique, son véhicule lui appartient, il a obtenu seul les autorisations nécessaires pour exercer son métier. « Avec Uber, je ne connais que les inconvénients de ce statut, en aucun cas les avantages. Je ne gagne de toute façon pas ma vie décemment, donc j’ai décidé d’aller jusqu’au bout », poursuit le trentenaire.

      Une démarche concluante puisque Le Soir a appris que la CRT lui avait donné raison à travers une décision longue de 12 pages rendue le 26 octobre dernier : Uber est bien, selon la Commission qui dépend du SPF Sécurité sociale, l’employeur de Guillaume. Précisément, la CRT conclut après un examen approfondi que « les modalités d’exécution de la relation de travail sont incompatibles avec la qualification de #travail_indépendant ».

      Pour aboutir à cette conclusion – la question est épineuse et fait débat dans bon nombre de pays européens ainsi qu’aux États-Unis (lire ci-contre) –, plusieurs éléments contractuels ont été analysés. Notamment ceux qui concernent la #liberté_d’organisation_du_travail et d’organisation du #temps_de_travail de Guillaume, deux démarches inhérentes au #statut_d’indépendant. Deux leitmotivs aussi utilisés par Uber depuis son lancement : l’entreprise estime, en effet, que la #flexibilité de ses chauffeurs ainsi que leur #liberté de prester quand ils le souhaitent et pour qui ils le souhaitent est à la base de sa « philosophie ».

      « Je ne peux pas refuser une course »

      « La réalité est bien différente », détaille Guillaume. « Uber capte quasi tout le marché à Bruxelles et, si je suis connecté à l’#application, je n’ai pas le #droit_de_refuser une course. Si je le fais, Uber abaisse ma “#cotation”. Si je le fais trois fois de suite, Uber me vire », détaille Guillaume. Qui précise qu’il lui est également impossible de jongler entre plusieurs plateformes. « Si je suis sur deux applications et que j’accepte une course pour un autre opérateur et qu’Uber me demande d’être disponible, je suis obligé de refuser la course. Au final, comme expliqué, cela me porte préjudice. »

      Guillaume, en outre, ne connaît pas son itinéraire avant d’accepter de prendre en charge un client. « On peut m’envoyer à 10 kilomètres. Soit un long trajet non rémunéré pour un trajet payé de 1.500 mètres. » S’il choisit de dévier du chemin imposé par la plateforme, par bon sens ou à la demande d’un client pressé, le chauffeur se dit également régulièrement pénalisé. Chez Uber, le client est roi. Quand ce dernier commande une course, l’application lui précise une fourchette de #prix. « Évidemment, si je prends le ring pour aller jusqu’à l’aéroport, le prix de la course augmente car le trajet est plus long, mais le client peut très facilement réclamer à Uber la différence tarifaire. Même s’il m’a demandé d’aller au plus vite. » Dans ce cas de figure, la différence en euros est immédiatement déduite de la #rémunération de Guillaume.

      La CRT estime que le chauffeur ne peut pas influer sur la manière dont Uber organise un #trajet, qu’il « n’a aucune marge de manœuvre quant à la façon dont la prestation est exercée. (…) En cas de non-respect de l’#itinéraire, si le prix de la course ne correspond pas à l’estimation, il peut être ajusté a posteriori par Uber, le passager peut alors obtenir un remboursement mais le chauffeur ne sera payé que sur base du prix annoncé à ce dernier. (…) A aucun moment, un dialogue direct entre le chauffeur et le passager n’est possible. (…) De telles modalités obligent le chauffeur à fournir une prestation totalement standardisée. »

      Un chantier dans le « pipe » du gouvernement

      Guillaume n’est pas naïf, ses représentants qui l’ont accompagné dans la démarche administrative – le syndicat CSC via sa branche dédiée aux indépendants #United_Freelancers et le collectif du secteur des taxis – ne le sont pas non plus. Il sait que l’avis de la CRT est « non contraignant » pour Uber mais qu’elle a de lourdes implications pour son cas personnel. À moins d’être requalifié comme « salarié » par l’entreprise elle-même (un recommandé a été envoyé à ce titre aux différentes filiales impliquées en Belgique), il ne peut désormais plus travailler pour Uber.

      De son côté, Uber explique qu’il « n’a pas encore pas encore reçu le point de la vue de la CRT » mais qu’il « estime que la justice bruxelloise a déjà tranché en 2019 le fait que ses chauffeurs étaient indépendants » (un procès a opposé l’entreprise au secteur des #taxis et lui a donné raison, mais ce dernier a fait appel et le jugement n’a pas encore été rendu). La société américaine pourrait d’ailleurs attaquer la décision en justice. L’anglaise #Deliveroo avait opté pour cette démarche en 2018 après que le même organe a acté en 2018 qu’un de ses #coursiers indépendants était en réalité salarié de la plateforme (l’audience aura lieu en septembre de cette année).

      « Notre priorité est de faire réagir les autorités. Uber, comme d’autres plateformes, doit occuper ses travailleurs selon une qualification conforme à la réalité du travail. Soit les #prestataires sont véritablement indépendants et devraient, dès lors, pouvoir fixer leurs prix, leurs conditions d’intervention, choisir leurs clients, organiser leur service comme ils l’entendent… Soit Uber continue à organiser le service, à fixer les prix et les règles, à surveiller et contrôler les chauffeurs, et ceux-ci sont alors des travailleurs salariés », cadrent Martin Willems, qui dirige United Freelancers et Lorenzo Marredda, secrétaire exécutif de la CSC Transcom.

      Au cabinet du ministre en charge du Travail Pierre-Yves Dermagne (PS), on confirme avoir déjà analysé les conclusions de la CRT et la volonté de débuter rapidement un chantier sur le sujet avec les partenaires sociaux. « Nous allons nous attaquer à la problématique des #faux_indépendants des #plateformes_numériques, comme décidé dans l’accord de gouvernement. L’idée est bien d’adapter la loi de 2006 sur la nature des #relations_de_travail. Cela pourrait passer par une évaluation des critères nécessaires à l’exercice d’une #activité_indépendante, par un renforcement des critères également. Mais il s’agit évidemment d’une matière qui doit être concertée », précise Nicolas Gillard, porte-parole.

      * Le prénom est d’emprunt, les décisions de la CRT sont anonymisées quand elles sont publiées.

      Des pratiques désormais similaires chez les taxis

      A.C.

      Selon le collectif des Travailleurs du taxi et la #CSC-Transcom, les problèmes constatés chez Uber sont actuellement également une réalité chez d’autres acteurs du secteur, en l’occurrence les #centrales_de_taxis. « Les taxis indépendants sont très dépendants des centrales. Et depuis leur #numérisation, il y a vraiment un glissement des pratiques. Les chauffeurs de taxi indépendants ne savent pas non plus où on les envoie avant d’accepter une course », explique Michaël Zylberberg, président du collectif. « La dernière version de l’application #Taxis_Verts est un clone de celle d’Uber. Au début, il y a cette idée de #concurrence_déloyale mais, comme le problème n’a pas été réglé, les centrales tendent à copier les mauvaises habitudes des plateformes. Cela est très inquiétant pour les travailleurs, qui perdent progressivement leur #autonomie », ajoute Lorenzo Marredda, secrétaire exécutif de la CSC-Transcom.

      Des décisions dans d’autres pays

      Mis en ligne le 13/01/2021 à 05:00

      Par A.C.

      Lors de son introduction en Bourse en 2019, Uber expliquait collaborer avec 3 millions de chauffeurs indépendants dans le monde. Fatalement, face à une telle masse de main-d’œuvre, qui se plaint souvent de #conditions_de_travail et de #rémunération indécentes, procès et interventions des législateurs ponctuent régulièrement l’actualité de l’entreprise. Ces derniers mois, trois décisions retiennent particulièrement l’attention.

      En #Suisse

      Plusieurs cantons sont en plein bras de fer avec la plateforme américaine. A #Genève et à #Zurich, les chauffeurs Uber sont désormais considérés comme des salariés. Les caisses d’#assurances_sociales réclament des sommes très importantes à l’entreprise, qui refuse jusqu’à présent de payer les #cotisations_sociales employeurs réclamées.

      En #France

      La# Cour_de_cassation a confirmé en mars dernier que le lien entre un conducteur et l’entreprise est bien un « #contrat_de_travail ». Les arguments utilisés se rapprochent de ceux de la CRT : la plus haute juridiction du pays a jugé que « le chauffeur qui a recours à l’application Uber ne se constitue pas sa propre clientèle, ne fixe pas librement ses tarifs et ne détermine pas les conditions d’exécution de sa prestation de transport ». Une #jurisprudence qui permet d’appuyer les demandes de #requalification des chauffeurs indépendants de l’Hexagone.

      En #Californie

      Une loi contraint, depuis le 1er janvier 2020, Uber et #Lyft à salarier ses collaborateurs. Les deux entreprises refusant de s’y plier ont investi environ 200 millions de dollars pour mener un référendum citoyen sur la question qu’ils ont remporté en novembre dernier, avec un texte baptisé « #proposition_22 ». Qui introduit pour les dizaines de milliers de chauffeurs concernés un #revenu_minimum_garanti et une contribution à l’#assurance_santé.

      #néo-esclavage #ordres #Bruxelles_Mobilité #sous-traitance #travailleur_indépendant #salariat #salaire #Commission_administrative_de_règlement_de_la_relation_de_travail (#CRT) #Belgique #droit_du_travail

  • #Pauvreté en #France. Les jeunes et l’#Outre-mer en première ligne

    Le #rapport publié par l’#Observatoire_des_inégalités montre que 5,3 millions de Français vivent sous le seuil de 885 € par mois. Et la #crise_sanitaire, prévient l’organisme, va aggraver la situation.

    L’observatoire des inégalités, un organisme indépendant fondé à Tours en 2003, surveille en permanence les données statistiques du pays et s’intéresse aux « grandes évolutions structurelles ». La deuxième édition (2020-2021) du rapport bi-annuel sur la pauvreté en France qu’il publie ce jeudi 26 novembre dresse un constat alarmant, en particulier pour la jeunesse et les territoires d’Outre-mer. Dans un contexte marqué par l’épidémie de Covid-19, dont les conséquences échappent encore à ce diagnostic.

    « En 2020, la récession atteindra des niveaux inégalés depuis la dernière guerre mondiale. Nous allons en payer les dégâts avec une progression attendue dévastatrice du chômage », prévient Louis Maurin, directeur de l’Observatoire. Quel sera son impact : « 500 000 personnes pauvres de plus ? Un million ? On n’en sait rien » dit-il, alors que la majorité des données exploitées ont été collectées avant 2020. Et que les effets de la crise sanitaire « ne pourront se mesurer qu’en 2022 ».

    5,3 millions de pauvres en France

    Le pays compte 5,3 millions de pauvres « si l’on prend en compte le seuil de 50 % du niveau de vie médian (1 770 € par mois) », retenu par l’observatoire. C’est 8,3 % de la population totale. « La pauvreté est plus répandue qu’il y a 15 ans, la hausse s’est faite entre 2002 et 2012, avec 1,3 million supplémentaire (+ 35 %) », détaille Anne Brunner, codirectrice du rapport.Au total 6,3 millions de personnes vivent avec au maximum 934 € par mois pour une personne seule. Ce qui correspond au seuil des 10 % les plus pauvres. Et en moyenne ce dixième dispose de seulement 735 €.

    Les Français sans activité plus exposés

    Près de la moitié des personnes pauvres sont inactives, à la retraite ou au foyer. L’autre est composée de salariés, d’étudiants. Un chômeur sur quatre vit sous le seuil de pauvreté. La moitié des personnes pauvres vit en couple, un quart seules, un autre quart au sein de familles monoparentales.

    Lors d’une séparation, une famille sur cinq bascule dans la pauvreté. Le taux de pauvreté des femmes est légèrement supérieur à celui des hommes 52,7 % contre 47,3 % : un « reflet du poids financier des enfants sur leur niveau de vie », indique l’observatoire. Les immigrés seraient trois fois plus exposés, selon les dernières données disponibles datant de 2015.

    Les enfants et les jeunes plus touchés

    En France, un enfant sur dix grandit dans une famille pauvre. La moitié des pauvres ont moins de 30 ans, 20 % sont étudiants, un tiers sont des enfants et des adolescents. Les 18-29 ans sont les plus touchés. « Cette tranche d’âge est vulnérable à la crise économique qui suit la crise sanitaire », appuie Louis Maurin, directeur de l’Observatoire.

    Les Outre-mer en tête des territoires les plus pauvres

    Les données de l’Insee, publiées au cours de l’été et mentionnée par le rapport sont édifiantes. À Mayotte, 77 % de la population se situe sous le seuil de 60 % du niveau de vie médian ; 53 % en Guyane. À la Réunion, un quart des habitants vivent avec moins de 867 € par mois. Et en Martinique, les 10 % les plus pauvres vivent avec moins de 630 € mensuels.

    Parmi les villes qui comptent plus de 20 000 habitants, cinq communes de la Réunion en tête classement des vingt villes où le taux de pauvreté est le plus élevé. Devant Grigny (Essonne) et Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) qui affichent des taux de 45 % et 46 %.

    Un #revenu_minimum unique pour lutter contre la pauvreté

    C’est ce que suggère de créer l’Observatoire des inégalités pour « sortir les plus démunis de la pauvreté ». Sept milliards d’euros « hors crise sanitaire, soit l’équivalent de baisse d’impôts accordée aux plus aisés en 2017 », suffiraient pour « que chaque français puisse bénéficier de 900 € par mois pour vivre. »

    Car si en France, pays d’Europe affichant l’un des taux de pauvreté les plus bas derrière la Finlande, « le modèle social protège », les jeunes de moins de 25 ans ne disposent d’aucune aide. « On est à un moment où il faut absolument que les plus favorisés aident davantage ceux qui le sont moins », plaident les auteurs du rapport.

    https://www.ouest-france.fr/societe/pauvrete/pauvrete-en-france-les-jeunes-et-l-outre-mer-en-premiere-ligne-7063848
    #statistiques #chiffres #seuil_de_pauvreté #pauvres #rdb #revenu_de_base #2020