• #Université, service public ou secteur productif ?

    L’#annonce d’une “vraie #révolution de l’Enseignement Supérieur et la Recherche” traduit le passage, organisé par un bloc hégémonique, d’un service public reposant sur des #carrières, des #programmes et des diplômes à l’imposition autoritaire d’un #modèle_productif, au détriment de la #profession.

    L’annonce d’une « #vraie_révolution » de l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR) par Emmanuel Macron le 7 décembre, a pour objet, annonce-t-il, d’« ouvrir l’acte 2 de l’#autonomie et d’aller vers la #vraie_autonomie avec des vrais contrats pluriannuels où on a une #gouvernance qui est réformée » sans recours à la loi, avec un agenda sur dix-huit mois et sans modifications de la trajectoire budgétaire. Le président sera accompagné par un #Conseil_présidentiel_de_la_science, composé de scientifiques ayant tous les gages de reconnaissance, mais sans avoir de lien aux instances professionnelles élues des personnels concernés. Ce Conseil pilotera la mise en œuvre de cette « révolution », à savoir transformer les universités, en s’appuyant sur celles composant un bloc d’#excellence, et réduire le #CNRS en une #agence_de_moyen. Les composantes de cette grande transformation déjà engagée sont connues. Elle se fera sans, voire contre, la profession qui était auparavant centrale. Notre objet ici n’est ni de la commenter, ni d’en reprendre l’historique (Voir Charle 2021).

    Nous en proposons un éclairage mésoéconomique que ne perçoit ni la perspective macroéconomique qui pense à partir des agrégats, des valeurs d’ensemble ni l’analyse microéconomique qui part de l’agent et de son action individuelle. Penser en termes de mésoéconomie permet de qualifier d’autres logiques, d’autres organisations, et notamment de voir comment les dynamiques d’ensemble affectent sans déterminisme ce qui s’organise à l’échelle méso, et comment les actions d’acteurs structurent, elles aussi, les dynamiques méso.

    La transformation de la régulation administrée du #système_éducatif, dont nombre de règles perdurent, et l’émergence d’une #régulation_néolibérale de l’ESR, qui érode ces règles, procède par trois canaux : transformation du #travail et des modalités de construction des #carrières ; mise en #concurrence des établissements ; projection dans l’avenir du bloc hégémonique (i.e. les nouveaux managers). L’action de ces trois canaux forment une configuration nouvelle pour l’ESR qui devient un secteur de production, remodelant le système éducatif hier porté par l’État social. Il s’agissait de reproduire la population qualifiée sous l’égide de l’État. Aujourd’hui, nous sommes dans une nouvelle phase du #capitalisme, et cette reproduction est arrimée à l’accumulation du capital dans la perspective de #rentabilisation des #connaissances et de contrôle des professionnels qui l’assurent.

    Le couplage de l’évolution du système d’ESR avec la dynamique de l’#accumulation, constitue une nouvelle articulation avec le régime macro. Cela engendre toutefois des #contradictions majeures qui forment les conditions d’une #dégradation rapide de l’ESR.

    Co-construction historique du système éducatif français par les enseignants et l’État

    Depuis la Révolution française, le système éducatif français s’est déployé sur la base d’une régulation administrée, endogène, co-construite par le corps enseignant et l’État ; la profession en assumant de fait la charge déléguée par l’État (Musselin, 2022). Historiquement, elle a permis la croissance des niveaux d’éducation successifs par de la dépense publique (Michel, 2002). L’allongement historique de la scolarité (fig.1) a permis de façonner la force de travail, facteur décisif des gains de productivité au cœur de la croissance industrielle passée. L’éducation, et progressivement l’ESR, jouent un rôle structurant dans la reproduction de la force de travail et plus largement de la reproduction de la société - stratifications sociales incluses.

    À la fin des années 1960, l’expansion du secondaire se poursuit dans un contexte où la détention de diplômes devient un avantage pour s’insérer dans l’emploi. D’abord pour la bourgeoisie. La massification du supérieur intervient après les années 1980. C’est un phénomène décisif, visible dès les années 1970. Rapidement cela va télescoper une période d’austérité budgétaire. Au cours des années 2000, le pilotage de l’université, basé jusque-là sur l’ensemble du système éducatif et piloté par la profession (pour une version détaillée), s’est effacé au profit d’un pilotage pour et par la recherche, en lien étroit avec le régime d’accumulation financiarisé dans les pays de l’OCDE. Dans ce cadre, l’activité économique est orientée par l’extraction de la valeur financière, c’est à dire principalement par les marchés de capitaux et non par l’activité productive (Voir notamment Clévenot 2008).
    L’ESR : formation d’un secteur productif orienté par la recherche

    La #massification du supérieur rencontre rapidement plusieurs obstacles. Les effectifs étudiants progressent plus vite que ceux des encadrants (Piketty met à jour un graphique révélateur), ce qui entrave la qualité de la formation. La baisse du #taux_d’encadrement déclenche une phase de diminution de la dépense moyenne, car dans l’ESR le travail est un quasi-coût fixe ; avant que ce ne soit pour cette raison les statuts et donc la rémunération du travail qui soient visés. Ceci alors que pourtant il y a une corrélation étroite entre taux d’encadrement et #qualité_de_l’emploi. L’INSEE montre ainsi que le diplôme est un facteur d’amélioration de la productivité, alors que la productivité plonge en France (voir Aussilloux et al. (2020) et Guadalupe et al. 2022).

    Par ailleurs, la massification entraine une demande de différenciation de la part les classes dominantes qui perçoivent le #diplôme comme un des instruments de la reproduction stratifiée de la population. C’est ainsi qu’elles se détournent largement des filières et des établissements massifiés, qui n’assurent plus la fonction de « distinction » (voir le cas exemplaire des effectifs des #écoles_de_commerce et #grandes_écoles).

    Dans le même temps la dynamique de l’accumulation suppose une population formée par l’ESR (i.e. un niveau de diplomation croissant). Cela se traduit par l’insistance des entreprises à définir elles-mêmes les formations supérieures (i.e. à demander des salariés immédiatement aptes à une activité productive, spécialisés). En effet la connaissance, incorporée par les travailleurs, est devenue un actif stratégique majeur pour les entreprises.

    C’est là qu’apparaît une rupture dans l’ESR. Cette rupture est celle de la remise en cause d’un #service_public dont l’organisation est administrée, et dont le pouvoir sur les carrières des personnels, sur la définition des programmes et des diplômes, sur la direction des établissements etc. s’estompe, au profit d’une organisation qui revêt des formes d’un #secteur_productif.

    Depuis la #LRU (2007) puis la #LPR (2020) et la vague qui s’annonce, on peut identifier plusieurs lignes de #transformation, la #mise_en_concurrence conduisant à une adaptation des personnels et des établissements. Au premier titre se trouvent les instruments de #pilotage par la #performance et l’#évaluation. À cela s’ajoute la concurrence entre établissements pour l’#accès_aux_financements (type #Idex, #PIA etc.), aux meilleures candidatures étudiantes, aux #labels et la concurrence entre les personnels, pour l’accès aux #dotations (cf. agences de programmes, type #ANR, #ERC) et l’accès aux des postes de titulaires. Enfin le pouvoir accru des hiérarchies, s’exerce aux dépens de la #collégialité.

    La généralisation de l’évaluation et de la #sélection permanente s’opère au moyen d’#indicateurs permettant de classer. Gingras évoque une #Fièvre_de_l’évaluation, qui devient une référence définissant des #standards_de_qualité, utilisés pour distribuer des ressources réduites. Il y a là un instrument de #discipline agissant sur les #conduites_individuelles (voir Clémentine Gozlan). L’important mouvement de #fusion des universités est ainsi lié à la recherche d’un registre de performance déconnecté de l’activité courante de formation (être université de rang mondial ou d’université de recherche), cela condensé sous la menace du #classement_de_Shanghai, pourtant créé dans un tout autre but.

    La remise en question du caractère national des diplômes, revenant sur les compromis forgés dans le temps long entre les professions et l’État (Kouamé et al. 2023), quant à elle, assoit la mise en concurrence des établissements qui dépossède en retour la profession au profit des directions d’établissement.

    La dynamique de #mise_en_concurrence par les instruments transforme les carrières et la relation d’#emploi, qui reposaient sur une norme commune, administrée par des instances élues, non sans conflit. Cela fonctionne par des instruments, au sens de Lascoumes et Legalès, mais aussi parce que les acteurs les utilisent. Le discours du 7 décembre est éloquent à propos de la transformation des #statuts pour assurer le #pilotage_stratégique non par la profession mais par des directions d’établissements :

    "Et moi, je souhaite que les universités qui y sont prêtes et qui le veulent fassent des propositions les plus audacieuses et permettent de gérer la #ressource_humaine (…) la ministre m’a interdit de prononcer le mot statut. (…) Donc je n’ai pas dit qu’on allait réformer les statuts (…) moi, je vous invite très sincèrement, vous êtes beaucoup plus intelligents que moi, tous dans cette salle, à les changer vous-mêmes."

    La démarche est caractéristique du #new_management_public : une norme centrale formulée sur le registre non discutable d’une prétérition qui renvoie aux personnes concernées, celles-là même qui la refuse, l’injonction de s’amputer (Bechtold-Rognon & Lamarche, 2011).

    Une des clés est le transfert de gestion des personnels aux établissements alors autonomes : les carrières, mais aussi la #gouvernance, échappent progressivement aux instances professionnelles élues. Il y a un processus de mise aux normes du travail de recherche, chercheurs/chercheuses constituant une main d’œuvre qui est atypique en termes de formation, de types de production fortement marqués par l’incertitude, de difficulté à en évaluer la productivité en particulier à court terme. Ce processus est un marqueur de la transformation qui opère, à savoir, un processus de transformation en un secteur. La #pénurie de moyen public est un puissant levier pour que les directions d’établissement acceptent les #règles_dérogatoires (cf. nouveaux contrats de non titulaires ainsi que les rapports qui ont proposé de spécialiser voire de moduler des services).

    On a pu observer depuis la LRU et de façon active depuis la LPR, à la #destruction régulière du #compromis_social noué entre l’État social et le monde enseignant. La perte spectaculaire de #pouvoir_d’achat des universitaires, qui remonte plus loin historiquement, en est l’un des signaux de fond. Il sera progressivement articulé avec l’éclatement de la relation d’emploi (diminution de la part de l’emploi sous statut, #dévalorisation_du_travail etc.).

    Arrimer l’ESR au #régime_d’accumulation, une visée utilitariste

    L’État est un acteur essentiel dans l’émergence de la production de connaissance, hier comme commun, désormais comme résultat, ou produit, d’un secteur productif. En dérégulant l’ESR, le principal appareil de cette production, l’État délaisse la priorité accordée à la montée de la qualification de la population active, au profit d’un #pilotage_par_la_recherche. Ce faisant, il radicalise des dualités anciennes entre système éducatif pour l’élite et pour la masse, entre recherche utile à l’industrie et recherche vue comme activité intellectuelle (cf. la place des SHS), etc.

    La croissance des effectifs étudiants sur une période assez longue, s’est faite à moyens constants avec des effectifs titulaires qui ne permettent pas de maintenir la qualité du travail de formation (cf. figure 2). L’existence de gisements de productivité supposés, à savoir d’une partie de temps de travail des enseignants-chercheurs inutilisé, a conduit à une pénurie de poste et à une recomposition de l’emploi : alourdissement des tâches des personnels statutaires pour un #temps_de_travail identique et développement de l’#emploi_hors_statut. Carpentier & Picard ont récemment montré, qu’en France comme ailleurs, le recours au #précariat s’est généralisé, participant par ce fait même à l’effritement du #corps_professionnel qui n’a plus été à même d’assurer ni sa reproduction ni ses missions de formation.

    C’est le résultat de l’évolution longue. L’#enseignement est la part délaissée, et les étudiants et étudiantes ne sont plus au cœur des #politiques_universitaires : ni par la #dotation accordée par étudiant, ni pour ce qui structure la carrière des universitaires (rythmée par des enjeux de recherche), et encore moins pour les dotations complémentaires (associées à une excellence en recherche). Ce mouvement se met toutefois en œuvre en dehors de la formation des élites qui passent en France majoritairement par les grandes écoles (Charle et Soulié, 2015). Dès lors que les étudiants cessaient d’être le principe organisateur de l’ESR dans les universités, la #recherche pouvait s’y substituer. Cela intervient avec une nouvelle convention de qualité de la recherche. La mise en œuvre de ce principe concurrentiel, initialement limité au financement sur projets, a été élargie à la régulation des carrières.

    La connaissance, et de façon concrète le niveau de diplôme des salariés, est devenu une clé de la compétitivité, voire, pour les gouvernements, de la perspective de croissance. Alors que le travail de recherche tend à devenir une compétence générale du travail qualifié, son rôle croissant dans le régime d’accumulation pousse à la transformation du rapport social de travail de l’ESR.

    C’est à partir du système d’#innovation, en ce que la recherche permet de produire des actifs de production, que l’appariement entre recherche et profit participe d’une dynamique nouvelle du régime d’accumulation.

    Cette dynamique est pilotée par l’évolution jointe du #capitalisme_financiarisé (primauté du profit actionnarial sur le profit industriel) et du capitalisme intensif en connaissance. Les profits futurs des entreprises, incertains, sont liés d’une part aux investissements présents, dont le coût élevé repose sur la financiarisation tout en l’accélérant, et d’autre part au travail de recherche, dont le contrôle échappe au régime historique de croissance de la productivité. La diffusion des compétences du travail de recherche, avec la montée des qualifications des travailleurs, et l’accumulation de connaissances sur lequel il repose, deviennent primordiaux, faisant surgir la transformation du contenu du travail par l’élévation de sa qualité dans une division du travail qui vise pourtant à l’économiser. Cela engendre une forte tension sur la production des savoirs et les systèmes de transmission du savoir qui les traduisent en connaissances et compétences.

    Le travail de recherche devenant une compétence stratégique du travail dans tous les secteurs d’activité, les questions posées au secteur de recherche en termes de mesure de l’#efficacité deviennent des questions générales. L’enjeu en est l’adoption d’une norme d’évaluation que les marchés soient capables de faire circuler parmi les secteurs et les activités consommatrices de connaissances.

    Un régime face à ses contradictions

    Cette transformation de la recherche en un secteur, arrimé au régime d’accumulation, suppose un nouveau compromis institutionnalisé. Mais, menée par une politique néolibérale, elle se heurte à plusieurs contradictions majeures qui détruisent les conditions de sa stabilisation sans que les principes d’une régulation propre ne parviennent à émerger.

    Quand la normalisation du travail de recherche dévalorise l’activité et les personnels

    Durant la longue période de régulation administrée, le travail de recherche a associé le principe de #liberté_académique à l’emploi à statut. L’accomplissement de ce travail a été considéré comme incompatible avec une prise en charge par le marché, ce dernier n’étant pas estimé en capacité de former un signal prix sur les services attachés à ce type de travail. Ainsi, la production de connaissance est un travail entre pairs, rattachés à des collectifs productifs. Son caractère incertain, la possibilité de l’erreur sont inscrits dans le statut ainsi que la définition de la mission (produire des connaissances pour la société, même si son accaparement privé par la bourgeoisie est structurel). La qualité de l’emploi, notamment via les statuts, a été la clé de la #régulation_professionnelle. Avec la #mise_en_concurrence_généralisée (entre établissements, entre laboratoires, entre Universités et grandes écoles, entre les personnels), le compromis productif entre les individus et les collectifs de travail est rompu, car la concurrence fait émerger la figure du #chercheur_entrepreneur, concerné par la #rentabilisation des résultats de sa recherche, via la #valorisation sous forme de #propriété_intellectuelle, voire la création de #start-up devenu objectifs de nombre d’université et du CNRS.

    La réponse publique à la #dévalorisation_salariale évoquée plus haut, passe par une construction différenciée de la #rémunération, qui rompt le compromis incarné par les emplois à statut. Le gel des rémunérations s’accompagne d’une individualisation croissante des salaires, l’accès aux ressources étant largement subordonné à l’adhésion aux dispositifs de mise en concurrence. La grille des rémunérations statutaires perd ainsi progressivement tout pouvoir organisationnel du travail. Le rétrécissement de la possibilité de travailler hors financements sur projet est indissociable du recours à du #travail_précaire. La profession a été dépossédée de sa capacité à défendre son statut et l’évolution des rémunérations, elle est inopérante à faire face à son dépècement par le bloc minoritaire.

    La contradiction intervient avec les dispositifs de concurrence qui tirent les instruments de la régulation professionnelle vers une mise aux normes marchandes pour une partie de la communauté par une autre. Ce mouvement est rendu possible par le décrochage de la rémunération du travail : le niveau de rémunération d’entrée dans la carrière pour les maîtres de conférences est ainsi passé de 2,4 SMIC dans les années 1980 à 1,24 aujourd’hui.

    Là où le statut exprimait l’impossibilité d’attacher une valeur au travail de recherche hors reconnaissance collective, il tend à devenir un travail individualisable dont le prix sélectionne les usages et les contenus. Cette transformation du travail affecte durablement ce que produit l’université.

    Produire de l’innovation et non de la connaissance comme communs

    Durant la période administrée, c’est sous l’égide de la profession que la recherche était conduite. Définissant la valeur de la connaissance, l’action collective des personnels, ratifiée par l’action publique, pose le caractère non rival de l’activité. La possibilité pour un résultat de recherche d’être utilisé par d’autres sans coût de production supplémentaire était un gage d’efficacité. Les passerelles entre recherche et innovation étaient nombreuses, accordant des droits d’exploitation, notamment à l’industrie. Dans ce cadre, le lien recherche-profit ou recherche-utilité économique, sans être ignoré, ne primait pas. Ainsi, la communauté professionnelle et les conditions de sa mise au travail correspondait à la nature de ce qui était alors produit, à savoir les connaissances comme commun. Le financement public de la recherche concordait alors avec la nature non rivale et l’incertitude radicale de (l’utilité de) ce qui est produit.

    La connaissance étant devenue un actif stratégique, sa valorisation par le marché s’est imposée comme instrument d’orientation de la recherche. Finalement dans un régime d’apparence libérale, la conduite politique est forte, c’est d’ailleurs propre d’un régime néolibéral tel que décrit notamment par Amable & Palombarini (2018). Les #appels_à_projet sélectionnent les recherches susceptibles de #valorisation_économique. Là où la #publication fait circuler les connaissances et valide le caractère non rival du produit, les classements des publications ont pour objet de trier les résultats. La priorité donnée à la protection du résultat par la propriété intellectuelle achève le processus de signalement de la bonne recherche, rompant son caractère non rival. La #rivalité exacerbe l’effectivité de l’exclusion par les prix, dont le niveau est en rapport avec les profits anticipés.

    Dans ce contexte, le positionnement des entreprises au plus près des chercheurs publics conduit à une adaptation de l’appareil de production de l’ESR, en créant des lieux (#incubateurs) qui établissent et affinent l’appariement recherche / entreprise et la #transférabilité à la #valorisation_marchande. La hiérarchisation des domaines de recherche, des communautés entre elles et en leur sein est alors inévitable. Dans ce processus, le #financement_public, qui continue d’endosser les coûts irrécouvrables de l’incertitude, opère comme un instrument de sélection et d’orientation qui autorise la mise sous contrôle de la sphère publique. L’ESR est ainsi mobilisée par l’accumulation, en voyant son autonomie (sa capacité à se réguler, à orienter les recherches) se réduire. L’incitation à la propriété intellectuelle sur les résultats de la recherche à des fins de mise en marché est un dispositif qui assure cet arrimage à l’accumulation.

    Le caractère appropriable de la recherche, devenant essentiel pour la légitimation de l’activité, internalise une forme de consentement de la communauté à la perte du contrôle des connaissances scientifiques, forme de garantie de sa circulation. Cette rupture de la non-rivalité constitue un coût collectif pour la société que les communautés scientifiques ne parviennent pas à rendre visible. De la même manière, le partage des connaissances comme principe d’efficacité par les externalités positives qu’il génère n’est pas perçu comme un principe alternatif d’efficacité. Chemin faisant, une recherche à caractère universel, régulée par des communautés, disparait au profit d’un appareil sous doté, orienté vers une utilité de court terme, relayé par la puissance publique elle-même.

    Un bloc hégémonique réduit, contre la collégialité universitaire

    En tant que mode de gouvernance, la collégialité universitaire a garanti la participation, et de fait la mobilisation des personnels, car ce n’est pas la stimulation des rémunérations qui a produit l’#engagement. Les collectifs de travail s’étaient dotés d’objectifs communs et s’étaient accordés sur la #transmission_des_savoirs et les critères de la #validation_scientifique. La #collégialité_universitaire en lien à la définition des savoirs légitimes a été la clé de la gouvernance publique. Il est indispensable de rappeler la continuité régulatrice entre liberté académique et organisation professionnelle qui rend possible le travail de recherche et en même temps le contrôle des usages de ses produits.

    Alors que l’université doit faire face à une masse d’étudiants, elle est évaluée et ses dotations sont accordées sur la base d’une activité de recherche, ce qui produit une contradiction majeure qui affecte les universités, mais pas toutes. Il s’effectue un processus de #différenciation_territoriale, avec une masse d’établissements en souffrance et un petit nombre qui a été retenu pour former l’élite. Les travaux de géographes sur les #inégalités_territoriales montrent la très forte concentration sur quelques pôles laissant des déserts en matière de recherche. Ainsi se renforce une dualité entre des universités portées vers des stratégies d’#élite et d’autres conduites à accepter une #secondarisation_du_supérieur. Une forme de hiatus entre les besoins technologiques et scientifiques massifs et le #décrochage_éducatif commence à être diagnostiquée.

    La sectorisation de l’ESR, et le pouvoir pris par un bloc hégémonique réduit auquel participent certaines universités dans l’espoir de ne pas être reléguées, ont procédé par l’appropriation de prérogatives de plus en plus larges sur les carrières, sur la valorisation de la recherche et la propriété intellectuelle, de ce qui était un commun de la recherche. En cela, les dispositifs d’excellence ont joué un rôle marquant d’affectation de moyens par une partie étroite de la profession. De cette manière, ce bloc capte des prébendes, assoit son pouvoir par la formation des normes concurrentielles qu’il contrôle et développe un rôle asymétrique sur les carrières par son rôle dominant dans l’affectation de reconnaissance professionnelle individualisée, en contournant les instances professionnelles. Il y a là création de nouveaux périmètres par la norme, et la profession dans son ensemble n’a plus grande prise, elle est mise à distance des critères qui servent à son nouveau fonctionnement et à la mesure de la performance.

    Les dispositifs mis en place au nom de l’#excellence_scientifique sont des instruments pour ceux qui peuvent s’en emparer et définissant les critères de sélection selon leur représentation, exercent une domination concurrentielle en sélectionnant les élites futures. Il est alors essentiel d’intégrer les Clubs qui en seront issus. Il y a là une #sociologie_des_élites à préciser sur la construction d’#UDICE, club des 10 universités dites d’excellence. L’évaluation de la performance détermine gagnants et perdants, via des labels, qui couronnent des processus de sélection, et assoit le pouvoir oligopolistique et les élites qui l’ont porté, souvent contre la masse de la profession (Musselin, 2017).

    Le jeu des acteurs dominants, en lien étroit avec le pouvoir politique qui les reconnait et les renforce dans cette position, au moyen d’instruments de #rationalisation de l’allocation de moyens pénuriques permet de définir un nouvel espace pour ceux-ci, ségrégué du reste de l’ESR, démarche qui est justifié par son arrimage au régime d’accumulation. Ce processus s’achève avec une forme de séparatisme du nouveau bloc hégémonique composé par ces managers de l’ESR, composante minoritaire qui correspond d’une certaine mesure au bloc bourgeois. Celles- et ceux-là même qui applaudissent le discours présidentiel annonçant la révolution dont un petit fragment tirera du feu peu de marrons, mais qui seront sans doute pour eux très lucratifs. Toutefois le scénario ainsi décrit dans sa tendance contradictoire pour ne pas dire délétère ne doit pas faire oublier que les communautés scientifiques perdurent, même si elles souffrent. La trajectoire choisie de sectorisation déstabilise l’ESR sans ouvrir d’espace pour un compromis ni avec les personnels ni pour la formation. En l’état, les conditions d’émergence d’un nouveau régime pour l’ESR, reliant son fonctionnement et sa visée pour la société ne sont pas réunies, en particulier parce que la #rupture se fait contre la profession et que c’est pourtant elle qui reste au cœur de la production.

    https://laviedesidees.fr/Universite-service-public-ou-secteur-productif
    #ESR #facs #souffrance

  • « Dans la nuit du dortoir, lorsque la Main Réglementaire a muselé ma serrante pour douze heures, je m’éveille, je me retourne, je serre le drap autour de mon cou ; et, le nez contre la peinture grise et rafraîchissante du mur, je laisse gargouiller en moi d’énormes rigolades. Un joyeux assaut de petites folies grimpe à mon chevet et s’éparpille en gammes explosives.
    Chut : attendre un peu, modérer l’élan de mes doigts lorsque passe une silhouette de chance. Écraser. »

    #rire #masturbation ? #sexualité

  • Une organisation en #souffrance

    Les Français seraient-ils retors à l’effort, comme le laissent entendre les mesures visant à stigmatiser les chômeurs ? Et si le nombre de #démissions, les chiffres des #accidents et des #arrêts_de_travail étaient plutôt le signe de #conditions_de_travail délétères.

    Jeté dans une #concurrence accrue du fait d’un #management personnalisé, évalué et soumis à la culture froide du chiffre, des baisses budgétaires, le travailleur du XXIe siècle est placé sous une #pression inédite...

    L’étude de 2019 de la Darès (Ministère du Travail) nous apprend que 37% des travailleurs.ses interrogés se disent incapables de poursuivre leur activité jusqu’à la retraite. Que l’on soit hôtesse de caisse (Laurence) ou magistrat (Jean-Pierre), tous témoignent de la dégradation de leurs conditions de travail et de l’impact que ces dégradations peuvent avoir sur notre #santé comme l’explique le psychanalyste Christophe Dejours : “Il n’y a pas de neutralité du travail vis-à-vis de la #santé_mentale. Grâce au travail, votre #identité s’accroît, votre #amour_de_soi s’accroît, votre santé mentale s’accroît, votre #résistance à la maladie s’accroît. C’est extraordinaire la santé par le travail. Mais si on vous empêche de faire du travail de qualité, alors là, la chose risque de très mal tourner.”

    Pourtant, la #quête_de_sens est plus que jamais au cœur des revendications, particulièrement chez les jeunes. Aussi, plutôt que de parler de la semaine de quatre jours ou de développer une sociabilité contrainte au travail, ne serait-il pas temps d’améliorer son #organisation, d’investir dans les métiers du « soin » afin de renforcer le #lien_social ?

    Enfin, la crise environnementale n’est-elle pas l’occasion de réinventer le travail, loin du cycle infernal production/ consommation comme le pense la sociologue Dominique Méda : “Je crois beaucoup à la reconversion écologique. Il faut prendre au sérieux la contrainte écologique comme moyen à la fois de créer des emplois, comme le montrent les études, mais aussi une possibilité de changer radicalement le travail en profondeur.”

    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/une-organisation-en-souffrance-5912905

    #travail #audio #sens #reconnaissance #podcast #déshumanisation #grande_distribution #supermarchés #Carrefour #salariat #accidents_du_travail # location-gérance #jours_de_carence #délai_de_carence #financiarisation #traçabilité #performance #néo-taylorisme #taylorisme_numérique #contrôle #don #satisfaction #modernisation #mai_68 #individualisation #personnalisation #narcissisation #collectif #entraide #épanouissement #marges_de_manoeuvre #intensification_du_travail #efficacité #rentabilité #pression #sous-traitance #intensité_du_travail #santé_au_travail #santé #épidémie #anxiété #dépression #santé_publique #absentéisme #dégradation_des_conditions_de_travail #sommeil #identité #amour_de_soi #santé_par_le_travail #tournant_gestionnaire #gouvernance_de_l'entreprise #direction_d'entreprise #direction #règles #lois #gestionnaires #ignorance #objectifs_quantitatifs #objectifs #performance #mesurage #évaluation #traçabilité #quantification #quantitatif #qualitatif #politique_du_chiffre #flux #justice #charge_de_travail

    25’40 : #Jean-Pierre_Bandiera, ancien président du tribunal correctionnel de Nîmes :

    « On finit par oublier ce qu’on a appris à l’école nationale de la magistrature, c’est-à-dire la motivation d’un jugement... On finit par procéder par affirmation, ce qui fait qu’on gagne beaucoup de temps. On a des jugements, dès lors que la culpabilité n’est pas contestée, qui font abstraction de toute une série d’éléments qui sont pourtant importants : s’attarder sur les faits ou les expliquer de façon complète. On se contente d’une qualification développée : Monsieur Dupont est poursuivi pour avoir frauduleusement soustrait 3 véhicules, 4 téléviseurs au préjudice de Madame Durant lors d’un cambriolage » mais on n’est pas du tout en mesure après de préciser que Monsieur Dupont était l’ancien petit ami de Madame Durant ou qu’il ne connaissait absolument pas Madame Durant. Fixer les conditions dans lesquelles ce délit a été commis de manière ensuite à expliquer la personnalisation de la peine qui est quand même la mission essentielle du juge ! Il faut avoir à chaque fois qu’il nous est demandé la possibilité d’adapter au mieux la peine à l’individu. C’est très important. On finit par mettre des tarifs. Quelle horreur pour un juge ! On finit par oublier la quintessence de ce métier qui est de faire la part des choses entre l’accusation, la défense, l’auteur de faits, la victime, et essayer d’adopter une sanction qui soit la plus adaptée possible. C’est la personnalisation de la peine, c’est aussi le devenir de l’auteur de cette infraction de manière à éviter la récidive, prévoir sa resocialisation. Bref, jouer à fond le rôle du juge, ce qui, de plus en plus, est ratatiné à un rôle de distributeur de sanctions qui sont plus ou moins tarifées. Et ça c’est quelque chose qui, à la fin de ma carrière, c’est quelque chose qui me posait de véritables problèmes d’éthique, parce que je ne pensais pas ce rôle du juge comme celui-là. Du coup, la qualité de la justice finit par souffrir, incontestablement. C’est une évolution constante qui est le fruit d’une volonté politique qui, elle aussi, a été constante, de ne pas consacrer à la justice de notre pays les moyens dont elle devait disposer pour pouvoir fonctionner normalement. Et cette évolution n’a jamais jamais, en dépit de tout ce qui a pu être dit ou écrit, n’ai jamais été interrompue. Nous sommes donc aujourd’hui dans une situation de détresse absolue. La France est donc ??? pénultième au niveau européen sur les moyens budgétaires consacrés à sa justice. Le Tribunal de Nîme comporte 13 procureurs, la moyenne européenne nécessiterait qu’ils soient 63, je dis bien 63 pour 13. Il y a 39 juges au Tribunal de Nîmes, pour arriver dans la moyenne européenne il en faudrait 93. Et de mémoire il y a 125 greffiers et il en faudrait 350 je crois pour être dans la moyenne. Il y avait au début de ma carrière à Nîmes 1 juge des Libertés et de la détention, il y en a aujourd’hui 2. On a multiplié les chiffres du JLD par 10. Cela pose un problème moral et un problème éthique. Un problème moral parce qu’on a le sentiment de ne pas satisfaire au rôle qui est le sien. Un problème éthique parce qu’on finit par prendre un certain nombre de recul par rapport aux valeurs que l’on a pourtant porté haut lorsqu’on a débuté cette carrière. De sorte qu’une certaine mélancolie dans un premier temps et au final un certain découragement me guettaient et m’ont parfois atteint ; mes périodes de vacances étant véritablement chaque année un moment où la décompression s’imposait sinon je n’aurais pas pu continuer dans ces conditions-là. Ce sont des heures de travail qui sont très très chargés et qui contribuent aussi à cette fatigue aujourd’hui au travail qui a entraîné aussi beaucoup de burn-out chez quelques collègues et puis même, semble-t-il, certains sont arrivés à des extrémités funestes puisqu’on a eu quelques collègues qui se sont suicidés quasiment sur place, vraisemblablement en grande partie parce que... il y avait probablement des problèmes personnels, mais aussi vraisemblablement des problèmes professionnels. Le sentiment que je vous livre aujourd’hui est un sentiment un peu partagé par la plupart de mes collègues. Après la réaction par rapport à cette situation elle peut être une réaction combative à travers des engagements syndicaux pour essayer de parvenir à faire bouger l’éléphant puisque le mammouth a déjà été utilisé par d’autres. Ces engagements syndicaux peuvent permettre cela. D’autres ont plus ou moins rapidement baissé les bras et se sont satisfaits de cette situation à défaut de pouvoir la modifier. Je ne regrette rien, je suis parti serein avec le sentiment du devoir accompli, même si je constate que en fermant la porte du tribunal derrière moi je laisse une institution judiciaire qui est bien mal en point."

    Min. 33’15, #Christophe_Dejours, psychanaliste :

    « Mais quand il fait cela, qu’il sabote la qualité de son travail, qu’il bâcle son travail de juge, tout cela, c’est un ensemble de trahisons. Premièrement, il trahi des collègues, parce que comme il réussi à faire ce qu’on lui demande en termes de quantité... on sait très bien que le chef va se servir du fait qu’il y en a un qui arrive pour dire aux autres : ’Vous devez faire la même chose. Si vous ne le faites pas, l’évaluation dont vous allez bénéficier sera mauvaise pour vous, et votre carrière... vous voulez la mutation ? Vous ne l’aurez pas !’ Vous trahissez les collègues. Vous trahissez les règles de métier, vous trahissez le justiciable, vous trahissez les avocats, vous leur couper la parole parce que vous n’avez pas le temps : ’Maître, je suis désolé, il faut qu’on avance.’ Vous maltraitez les avocats, ce qui pose des problèmes aujourd’hui assez compliqués entre avocats et magistrats. Les relations se détériorent. Vous maltraitez le justiciable. Si vous allez trop vite... l’application des peines dans les prisons... Quand vous êtes juges des enfants, il faut écouter les enfants, ça prend du temps ! Mais non, ’va vite’. Vous vous rendez compte ? C’est la maltraitance des justiciables sous l’effet d’une justice comme ça. A la fin vous trahissez la justice, et comme vous faites mal votre travail, vous trahissez l’Etat de droit. A force de trahir tous ces gens qui sont... parce que c’est des gens très mobilisés... on ne devient pas magistrat comme ça, il faut passer des concours... c’est le concours le plus difficile des concours de la fonction publique, c’est plus difficile que l’ENA l’Ecole nationale de magistrature... C’est des gens hyper engagés, hyper réglo, qui ont un sens de la justice, et vous leur faites faire quoi ? Le contraire. C’est ça la dégradation de la qualité. Donc ça conduit, à un moment donné, à la trahison de soi. Ça, ça s’appelle la souffrance éthique. C’est-à-dire, elle commence à partir du moment où j’accepte d’apporter mon concours à des actes ou à des pratiques que le sens moral réprouve. Aujourd’hui c’est le cas dans la justice, c’est le cas dans les hôpitaux, c’est le cas dans les universités, c’est le cas dans les centres de recherche. Partout dans le secteur public, où la question éthique est décisive sur la qualité du service public, vous avez des gens qui trahissent tout ça, et qui entrent dans le domaine de la souffrance éthique. Des gens souffrent dans leur travail, sauf que cette souffrance, au lieu d’être transformée en plaisir, elle s’aggrave. Les gens vont de plus en plus mal parce que le travail leur renvoie d’eux-mêmes une image lamentable. Le résultat c’est que cette trahison de soi quelques fois ça se transforme en haine de soi. Et c’est comme ça qu’à un moment donné les gens se suicident. C’est comme ça que vous avez des médecins des hôpitaux, professeurs de médecine de Paris qui sautent par la fenêtre. Il y a eu le procès Mégnien, au mois de juin. Il a sauté du 5ème étage de Georges-Pompidou. Il est mort. Comment on en arrive là ? C’est parce que les gens ont eu la possibilité de réussir un travail, de faire une oeuvre, et tout à coup on leur casse le truc. Et là vous cassez une vie. C’est pour cela que les gens se disent : ’Ce n’est pas possible, c’est tout ce que j’ai mis de moi-même, tous ces gens avec qui j’ai bossé, maintenant il faut que ça soit moi qui donne le noms des gens qu’on va virer. Je ne peux pas faire ça, ce n’est pas possible.’ Vous les obligez à faire l’inverse de ce qu’ils croient juste, de ce qu’ils croient bien. Cette organisation du travail, elle cultive ce qu’il y a de plus mauvais dans l’être humain. »

    #suicide #trahison #souffrance_éthique

    • Quels facteurs influencent la capacité des salariés à faire le même travail #jusqu’à_la_retraite ?

      En France, en 2019, 37 % des salariés ne se sentent pas capables de tenir dans leur travail jusqu’à la retraite. L’exposition à des #risques_professionnels – physiques ou psychosociaux –, tout comme un état de santé altéré, vont de pair avec un sentiment accru d’#insoutenabillité du travail.

      Les métiers les moins qualifiés, au contact du public ou dans le secteur du soin et de l’action sociale, sont considérés par les salariés comme les moins soutenables. Les salariés jugeant leur travail insoutenable ont des carrières plus hachées que les autres et partent à la retraite plus tôt, avec des interruptions, notamment pour des raisons de santé, qui s’amplifient en fin de carrière.

      Une organisation du travail qui favorise l’#autonomie, la participation des salariés et limite l’#intensité_du_travail tend à rendre celui-ci plus soutenable. Les mobilités, notamment vers le statut d’indépendant, sont également des moyens d’échapper à l’insoutenabilité du travail, mais ces trajectoires sont peu fréquentes, surtout aux âges avancés.

      https://dares.travail-emploi.gouv.fr/publication/quels-facteurs-influencent-la-capacite-des-salaries-faire-
      #statistiques #chiffres

  • Non Monsieur Macron, l’antisémitisme n’est pas la cause du massacre du 7 octobre - UJFP
    https://ujfp.org/non-monsieur-macron-lantisemitisme-nest-pas-la-cause-du-massacre-du-7-octobre

    Depuis le 7 octobre un génocide est en cours à Gaza. Malgré des médias aux ordres, il n’est plus possible de nier la réalité : plus de 30000 mort.es dont une grande majorité de femmes et d’enfants, 90% de la population déplacée de force et régulièrement bombardée, des habitations pulvérisées, la famine organisée, des familles ciblées et exterminées.

    La Cour Internationale de Justice a confirmé qu’il y a une tentative de génocide. Monsieur Macron n’a rien dit sur ce qui se passe à Gaza. Il n’a rien vu, il ignore que ce n’est pas seulement la population palestinienne qui est assassinée, c’est aussi le Droit international.

    Il a sciemment fait une confusion majeure : les victimes de l’attaque du 7 octobre n’ont pas été tué.es en tant que juifs/ves. Pour leur malheur hélas, elles ont été tuées en tant que membres d’un État colonial et désormais fasciste, qui enferme depuis 16 ans plus de deux millions de personnes dans un ghetto dont il a construit les murs. Seize ans dans la plus parfaite illégalité et avec la complicité des nations dites civilisées ! Seize ans sans discontinuer jusqu’à la brèche du 7 octobre.


    Toutes les vies ont la même valeur et parler des victimes israéliennes du 7 octobre sans un mot pour les milliers de victimes palestiniennes d’aujourd’hui et de demain est d’une indécence absolue.

  • #Risques_industriels : la #Cour_des_comptes au renfort d’#Amaris
    https://www.banquedesterritoires.fr/risques-industriels-la-cour-des-comptes-au-renfort-damaris

    Il y a peu, l’association Amaris déplorait que les pouvoirs publics n’aient pas tiré le bilan de la loi dite Bachelot relative à la prévention des risques technologiques et naturels, adoptée il y a 20 ans (voir notre article du 20 septembre 2023). L’association vient de recevoir un renfort de poids : celui de la Cour des comptes. En conclusion du rapport(https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2024-01/20240201-S2023-1508-ICPE-industrielles.pdf) qu’elle vient de consacrer à la gestion des installations classées pour la protection l’environnement (#ICPE) dans le domaine industriel, […] si elle constate que la grande majorité des PPRT a été approuvée, la rue Cambon relève comme Amaris que "beaucoup de questions demeurent sans réponse : de nombreux #logements resteront exposés […] et la mise en #sécurité des entreprises riveraines et des bâtiments publics n’est pas suivie". Elle ajoute que les ouvrages d’infrastructures de transports de matières dangereuses sont ignorés. Pour y remédier, elle recommande de prévoir des mesures de protection foncière et des travaux pour les "zones d’effets létaux" qui y sont liées, mais aussi de modifier la législation pour généraliser la mise en place de commissions consultatives analogues aux commissions de suivi de site des ICPE.

    Sont insuffisamment pris en compte également selon elle, des risques dont l’acuité va pourtant croissant, comme les "NaTechs" (#accidents_technologiques dus à un événement naturel) ou les #cyberattaques. C’est encore le cas des risques chroniques. Elle juge ainsi que "les impacts sanitaires et environnementaux de la #pollution des sols et #nappes_phréatiques ne sont pas assez étudiés", alors que nombre de ces derniers sont "durablement pollués". Elle souligne en outre que "la volonté de simplifier et d’accélérer les procédures afin de faciliter les implantations industrielles a conduit à restreindre le champ de l’obligation de l’étude d’impact et à rendre facultative la consultation du comité départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologique" (#Coderst – via la loi Asap — https://www.banquedesterritoires.fr/simplification-tout-ce-que-les-collectivites-peuvent-retenir-de — et son décret d’application — https://www.banquedesterritoires.fr/simplification-des-procedures-environnementales-le-decret-asap-), et que la loi pour l’industrie verte (https://www.banquedesterritoires.fr/industrie-verte-le-projet-de-loi-adopte-par-le-parlement) introduit de nouvelles mesures de #simplification. Elle déplore encore que nombre de « #polluants_émergents » (au regard de leur prise en compte, et pas de leur existence) ne sont toujours pas réglementés, leur encadrement se heurtant souvent à l’absence de valeurs toxicologiques de référence.

    De manière générale, la Cour dénonce l’insuffisance des moyens accordés. Pour elle, c’est notamment le cas des moyens alloués au recensement des sites pollués – et à leur# dépollution (mais le fonds vert est salué). Cela l’est également singulièrement des moyens de #police_environnementale de l’inspection des installées classées, fortement sollicités par l’essor des éoliennes terrestres et des méthaniseurs, mais aussi par l’application du règlement européen REACH et l’instruction des projets soutenues par le plan France 2030 (voir notre article du 22 juin 2023).

    […] Côté #sanctions, ce n’est guère mieux : "Les suites administratives demeurent peu dissuasives à l’exception des astreintes", les plafonds n’étant ni proportionnels aux capacités financières des contrevenants, ni à l’enrichissement qu’ils sont susceptibles de tirer de la situation de non-conformité.

    […] En dépit des efforts conduits en la matière – notamment le lancement du plan d’actions "Tous résilients face aux risques" –, la rue Cambon juge que "l’information institutionnelle sur les risques majeurs peine à atteindre ses cibles". Elle relève que "les organismes de concertation mis en place sont souvent critiqués pour leur fonctionnement vertical" et que "nombre de secrétariats permanents pour la prévention des pollutions industrielles ne sont plus actifs depuis plusieurs années". Elle estime également que "la culture de sécurité reste inégale parmi les élus, y compris parmi ceux des #collectivités accueillant des ICPE à hauts risques" et que "les collectivités s’estiment peu éclairées sur les risques chroniques et leurs effets sur l’environnement et la santé".

  • Cadences, sous-traitance, pression… quand le travail tue

    « Morts au travail : l’hécatombe. » Deux personnes meurent chaque jour, en moyenne, dans un accident dans le cadre de leur emploi. Ce chiffre, sous estimé, qui n’intègre pas les suicides ou les maladies, illustre un problème systémique

    « J’ai appris la mort de mon frère sur Facebook : la radio locale avait publié un article disant qu’un homme d’une trentaine d’années était décédé près de la carrière, raconte Candice Carton. J’ai eu un mauvais pressentiment, j’ai appelé la gendarmerie, c’était bien lui… L’entreprise a attendu le lendemain pour joindre notre mère. » Son frère Cédric aurait été frappé par une pierre à la suite d’un tir de mine le 28 juillet 2021, dans une carrière à Wallers-en-Fagne (Nord). Il travaillait depuis dix-sept ans pour le Comptoir des calcaires et matériaux, filiale du groupe Colas.

    Deux ans et demi plus tard, rien ne permet de certifier les causes de la mort du mécanicien-soudeur de 41 ans. D’abord close, l’enquête de gendarmerie a été rouverte en septembre 2023 à la suite des conclusions de l’inspection du travail, qui a pointé la dizaine d’infractions dont est responsable l’entreprise. Cédric Carton n’avait pas le boîtier pour les travailleurs isolés, qui déclenche une alarme en cas de chute. « Ils l’ont retrouvé deux heures après, se souvient sa sœur. Le directeur de la carrière m’a dit que mon frère était en sécurité, et qu’il avait fait un malaise… alors qu’il avait un trou béant de 20 centimètres de profondeur de la gorge au thorax. » En quête de réponses, elle a voulu déposer plainte deux fois, chacune des deux refusée, multiplié les courriers au procureur, pris deux avocats… Sans avoir le fin mot de cette triste histoire.

    Que s’est-il passé ? Est-ce la « faute à pas de chance », les « risques du métier » ? Qui est responsable ? Chaque année, des centaines de familles sont confrontées à ces questions après la mort d’un proche dans un accident du travail (AT), c’est-à-dire survenu « par le fait ou à l’occasion du travail, quelle qu’en soit la cause ».

    « Un chauffeur routier a été retrouvé mort dans son camion », « Un ouvrier de 44 ans a été électrocuté », « Un homme meurt écrasé par une branche d’arbre », « Deux ouvriers roumains, un père et son fils, trouvent la mort sur un chantier à Istres [Bouches-du-Rhône] »… Le compte X de Matthieu Lépine, un professeur d’histoire-géographie, qui recense depuis 2019 les accidents dramatiques à partir des coupures de presse locale, illustre l’ampleur du phénomène. Vingt-huit ont été comptabilisés depuis janvier.

    En 2022, selon les derniers chiffres connus, 738 décès ont été recensés parmi les AT reconnus. Soit deux morts par jour. Un chiffre en hausse de 14 % sur un an, mais stable par rapport à 2019. Et, depuis une quinzaine d’années, il ne baisse plus. A cela s’ajoutent 286 accidents de trajet mortels (survenus entre le domicile et le lieu de travail) et 203 décès consécutifs à une maladie professionnelle.

    Et encore, ces statistiques sont loin de cerner l’ampleur du problème. La Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM) ne couvre que les salariés du régime général et n’intègre donc ni la fonction publique, ni les agriculteurs, ni les marins-pêcheurs, la majorité des chefs d’entreprise ou les autoentrepreneurs. C’est ainsi qu’en 2022 la Mutualité sociale agricole (MSA) a dénombré 151 accidents mortels dans le secteur des travaux agricoles, 20 % de plus qu’en 2019.

    Pour disposer de chiffres plus complets, il faut se tourner vers la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du ministère du travail (Dares). Problème : sa dernière étude porte sur 2019… A cette époque, elle dénombrait 790 AT mortels chez les salariés affiliés au régime général ou à la MSA et les agents des fonctions publiques territoriale et hospitalière.

    Le secteur de la construction est celui où la fréquence des accidents mortels est la plus importante (le triple de la moyenne). Arrivent ensuite l’agriculture, la sylviculture et la pêche, le travail du bois et les transports-entreposage. Quatre-vingt-dix pour cent des victimes sont des hommes, et les ouvriers ont cinq fois plus de risques de perdre la vie que les cadres.

    Les accidents mortels sont deux fois plus fréquents chez les intérimaires. (...)
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/06/cadences-sous-traitance-pression-quand-le-travail-tue_6214988_3234.html

    https://justpaste.it/2ozrb

    #travail #accidents_du_travail #le_travail_tue

    • Accidents du travail : la lenteur de la justice pour faire reconnaître la responsabilité de l’employeur
      https://www.lemonde.fr/emploi/article/2024/02/06/morts-au-travail-la-douloureuse-lenteur-de-la-justice_6215011_1698637.html

      Les familles de victimes d’accidents mortels doivent parfois attendre des années avant de voir le bout de procédures judiciaires complexes.

      Pour ceux qui ont perdu un proche à la suite d’un accident du travail, la reconnaissance de la responsabilité de l’employeur est essentielle. Mais les procédures, d’ordre pénal ou civil, tournent parfois au parcours du combattant, voire s’étirent sur des années, ajoutant à la douleur des familles. Fabienne Bérard, du collectif Familles : stop à la mort au travail, cite l’exemple de Fanny Maquin, qui a perdu son mari cordiste, Vincent, il y a douze ans. Et qui n’est toujours pas passée en justice pour être indemnisée. « Comme souvent, il y a eu un grand nombre de renvois d’audience, explique-t-elle. L’avocat adverse met en avant que, depuis ce temps, elle a reconstruit une cellule familiale et que le préjudice ne peut pas être établi de la même manière… »

      Tout accident du travail mortel est suivi d’une enquête de l’inspection du travail (qui doit intervenir dans les douze heures), et de la gendarmerie ou de la police. Depuis 2019, les deux institutions peuvent mener une enquête en commun, mais c’est encore rare. Et souvent, l’enquête de l’inspection dure plusieurs mois, parce que les effectifs manquent pour mener à bien les constats immédiats, les auditions des témoins ou encore solliciter des documents auprès de l’entreprise.

      Ces investigations permettent de déterminer si la responsabilité pénale de l’employeur est engagée. Si les règles de santé et sécurité n’ont pas été respectées, l’inspection du travail en avise le procureur, qui est le seul à pouvoir ouvrir une procédure. « Dès lors, le parquet a trois possibilités, explique l’avocat Ralph Blindauer, qui accompagne souvent des familles. Soit l’affaire est classée sans suite, soit une information judiciaire avec juge d’instruction est ouverte, car le cas est jugé complexe, soit, le plus couramment, une ou plusieurs personnes sont citées à comparaître devant le tribunal correctionnel. »

      Un montant négligeable

      En cas de poursuite au pénal, l’employeur est fréquemment condamné pour homicide involontaire en tant que personne morale – ce qui est peu satisfaisant pour les victimes, et peu dissuasif. L’amende est en effet de 375 000 euros maximum, un montant négligeable pour un grand groupe. L’employeur est plus rarement condamné en tant que personne physique, car il est difficile d’identifier le responsable de la sécurité – la peine encourue est alors l’emprisonnement.

      Dans le cas d’une procédure au civil, la reconnaissance d’une « faute inexcusable » de l’employeur permet aux ayants droit (conjoints, enfants ou ascendants) d’obtenir la majoration de leur rente, ainsi que l’indemnisation de leur préjudice moral. La faute est caractérisée lorsque l’entreprise a exposé son salarié à un danger dont il avait, ou aurait dû, avoir conscience et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

      « Le nœud du sujet, c’est la conscience du danger, en particulier lors d’un malaise mortel, explique Morane Keim-Bagot, professeure de droit à l’université de Strasbourg. Les employeurs remettent en question le caractère professionnel de l’accident, en démontrant qu’il y a une cause étrangère exclusive. » Certains prétendent ainsi que la victime souffrait d’un problème cardiaque décelé au moment de l’autopsie, de surpoids, de stress ou de tabagisme.

      « Si vous tombez sur un inspecteur surchargé, un parquet qui s’y attelle moyennement, des gendarmes non spécialisés et débordés, les procédures durent facilement des années, sans compter les renvois d’audience fréquents, conclut Me Blindauer. La longueur très variable de ces affaires illustre aussi le manque de moyens de la #justice. »

      #responsabilité_de_l’employeur #inspection_du_travail #responsabilité_pénale

    • Entre déni des entreprises et manque de données, l’invisibilisation des suicides liés au travail

      https://www.lemonde.fr/emploi/article/2024/02/06/entre-deni-des-entreprises-et-manque-de-donnees-l-invisibilisation-des-suici

      Le manque de prise en compte du mal-être au travail renforce les risques d’accidents dramatiques.
      Par Anne Rodier

      « La dernière conversation que j’ai eue avec mon mari [Jean-Lou Cordelle] samedi 4 juin [2022] vers 22 heures concernait les dossiers en cours à son travail. Le lendemain matin, mon fils découvrait son père au bout d’une corde pendu dans le jardin », témoigne Christelle Cordelle dans la lettre adressée aux représentants du personnel d’Orange pour leur donner des précisions sur l’état psychologique de son mari avant son suicide, à l’âge de 51 ans, après des mois de surcharge de travail, d’alertes vaines à la hiérarchie et à la médecine du travail.

      Son acte, finalement reconnu comme « accident de service » – c’est ainsi que sont nommés les accidents du travail (#AT) des fonctionnaires –, n’est pas recensé dans le bilan annuel de la Sécurité sociale. Celui-ci ne tient pas, en effet, compte de la fonction publique, invisibilisant les actes désespérés des infirmières, des professeurs ou encore des policiers.

      L’Assurance-maladie parle d’une quarantaine de suicides-accidents du travail par an. Un chiffre stable, représentant 5 % du total des accidents du travail mortels, mais qui serait nettement sous-évalué. C’est entre vingt et trente fois plus, affirme l’Association d’aide aux victimes et aux organismes confrontés aux suicides et dépressions professionnelles (ASD-pro), qui l’évalue plutôt entre 800 et 1 300 chaque année, sur la base d’une étude épidémiologique sur les causes du suicide au travail réalisée fin 2021 par Santé publique France. https://www.santepubliquefrance.fr/recherche/#search=Suicide%20et%20activité%20professionnelle%20en%20France

      L’explosion des risques psychosociaux (RPS) en entreprise constatée étude après étude et par la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM : https://assurance-maladie.ameli.fr/etudes-et-donnees/2018-sante-travail-affections-psychiques) apporte de l’eau au moulin de l’ASD-pro : 1 814 maladies professionnelles relèvent de maladies psychiques, en augmentation régulière, note le rapport 2022. Quant au dernier baromètre du cabinet Empreinte humaine, publié en novembre 2023, il est sans équivoque : près d’un salarié sur deux (48 %) était en détresse psychologique en 2023.

      « Passage à l’acte brutal »

      La mécanique mortifère de la souffrance au travail est connue. « Les mécanismes à l’œuvre semblent être toujours liés : atteintes à la professionnalité et à l’identité professionnelle, perte de l’estime de soi, apparition d’un sentiment d’impuissance », explique Philippe Zawieja, psychosociologue au cabinet Almagora.
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      Tous les RPS ne conduisent pas au geste fatal. « Il y a moins de suicidés chez les #salariés que parmi les #chômeurs, et 90 % des suicides interviennent sur fond de problème psychiatrique antérieur », souligne M. Zawieja. Mais « il existe des actes suicidaires qui ne sont pas la conséquence d’un état dépressif antérieur, qui marquent un passage à l’acte brutal [raptus], lié à un élément déclencheur conjoncturel », indique l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) https://www.inrs.fr/risques/suicide-travail/ce-qu-il-faut-retenir.html. Comme ce fut le cas du management toxique institutionnel à France Télécom. C’est alors que survient l’accident.

      « Pour Jean-Lou, tout s’est passé insidieusement, témoigne sa veuve. Il était en surcharge de travail depuis octobre-novembre 2021, avec des salariés non remplacés, des départs en retraite. Un jour de janvier, je l’ai vu buguer devant son ordinateur. A partir de là, j’ai été plus attentive. En mars [2022], ils ont allégé sa charge de travail mais insuffisamment. En avril, il a craqué. La médecine du travail a été prévenue. Il a finalement été mis en arrêt, sauf qu’il continuait à recevoir des mails. Ils lui avaient laissé son portable professionnel et il n’y avait pas de message de gestion d’absence renvoyant vers un autre contact. Jusqu’au bout, Orange n’a pas pris la mesure ».

      Le plus souvent, les suicides au travail sont invisibilisés, au niveau de l’entreprise d’abord, puis des statistiques. « Classiquement, l’entreprise, quand elle n’est pas tout simplement dans le déni, considère que c’est une affaire privée et que le travail n’en est pas la cause », explique le juriste Loïc Lerouge, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et spécialiste du sujet.

      Un déni qui a valu à Renault la première condamnation pour « faute inexcusable de l’employeur pour n’avoir pas pris les mesures nécessaires alors qu’il avait conscience du danger » concernant les salariés du Technocentre de Guyancourt (Yvelines) qui ont mis fin à leurs jours dans les années 2000. [en 2012 https://www.lemonde.fr/societe/article/2012/05/12/suicide-au-technocentre-renault-condamne-pour-faute-inexcusable_1700400_3224 « On reconnaît pleinement la responsabilité de la personne morale de l’entreprise depuis l’affaire #France_Télécom », précise M. Lerouge.

      Caractérisation délicate

      L’#invisibilisation des suicides commence par le non-dit. En réaction aux deux suicides de juin 2023 à la Banque de France, où l’une des victimes avait laissé une lettre incriminant clairement ses conditions de travail, la direction a déclaré avoir « fait ce qui s’impose » après un tel drame https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/10/10/a-la-banque-de-france-le-suicide-de-deux-salaries-empoisonne-le-dialogue-soc . Puis, lors des vœux 2024 adressés au personnel le 2 janvier, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, n’a pas prononcé le mot « suicide », évoquant les « décès dramatiques de certains collègues ». Et s’il a déclaré « prendre au sérieux les résultats et les suggestions » de l’enquête qui acte le problème de #surcharge_de_travail, présentée au comité social et économique extraordinaire du 18 janvier, il n’a pas mis sur pause le plan de réduction des effectifs dans la filière fiduciaire. Celle-là même où travaillaient les deux salariés qui ont mis fin à leurs jours. « Beaucoup de gens n’ont pas les moyens de faire correctement leur travail et sont en souffrance. Il existe à la Banque de France une forme de maltraitance généralisée », affirme Emmanuel Kern, un élu CGT de l’institution.

      La caractérisation des suicides en accidents du travail est un exercice délicat, au cœur de la reconnaissance de la responsabilité de l’employeur. Pour Santé publique France, la définition est assez simple (« Surveillance des suicides en lien potentiel avec le travail », 2021). Il s’agit de tout suicide pour lequel au moins une des situations suivantes était présente : la survenue du décès sur le lieu du travail ; une lettre laissée par la victime mettant en cause ses conditions de travail ; le décès en tenue de travail alors que la victime ne travaillait pas ; le témoignage de proches mettant en cause les conditions de travail de la victime ; des difficultés connues liées au travail recueillies auprès des proches ou auprès des enquêteurs.

      Mais pour l’administration, le champ est beaucoup plus restreint : l’Assurance-maladie prend en compte « l’acte intervenu au temps et au lieu de travail ». Et la reconnaissance n’aura pas lieu si des éléments au cours de l’enquête permettent d’établir que « le travail n’est en rien à l’origine du décès », précise la charte sur les accidents du travail rédigée à destination des enquêteurs de la Sécurité sociale https://www.atousante.com/wp-content/uploads/2011/05/Charte-des-AT-MP-acte-suicidaire-et-accident-du-travail.pdf. « En dehors du lieu de travail, c’est à la famille de faire la preuve du lien avec l’activité professionnelle », explique Michel Lallier, président de l’ASD-pro. Une vision nettement plus restrictive, qui explique cet écart entre les bilans des suicides au travail.

      #suicide_au_travail #risques_psychosociaux #médecine_du_travail #conditions_de_travail #management #cadences #pression #surcharge_de_travail

    • Manque de sécurité sur les chantiers : « Notre fils est mort pour 6 000 euros », Aline Leclerc
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/07/manque-de-securite-sur-les-chantiers-notre-fils-est-mort-pour-6-000-euros_62

      Pour réduire les coûts et tenir les délais, certaines entreprises du bâtiment accumulent les négligences et infractions au code du travail, susceptibles d’engendrer de graves accidents du travail

      Alban Millot avait trouvé l’offre d’emploi sur Leboncoin. Touche-à-tout débrouillard enchaînant les petits boulots, il n’avait aucune expérience dans la pose de panneaux photovoltaïques ni dans le travail en hauteur. Trois semaines après son embauche, il est passé à travers la toiture d’un hangar, le 10 mars 2021. Une chute mortelle de plus de 5 mètres. Le jour de ses 25 ans.

      « Quand le gendarme vous l’annonce, il parle d’un “accident”, comme on dit quand quelqu’un meurt sur la route », se rappelle douloureusement Laurent Millot, son père. La chute renvoie toujours d’abord l’idée d’une erreur d’attention, d’un déséquilibre. La faute à pas de chance. Et à la victime surtout – Alban n’a-t-il pas marché sur une plaque translucide qu’il savait fragile ?

      Ce n’est que quelque temps après que reviennent en mémoire ces petites phrases qui donnent à l’« accident » un autre sens. « J’avais eu Alban au téléphone une semaine avant. Il m’a dit que son travail était hyperdangereux, et qu’il allait s’acheter son propre harnais parce que celui fourni par la boîte était bas de gamme », raconte Véronique Millot, sa mère. Quand pour la rassurer il lui a dit : « Je fais ça seulement jusqu’à l’été », elle a répondu : « Te tue pas pour un boulot… »

      Inexpérimentés

      L’enquête, étoffée dans ce dossier, a mis en évidence une effarante liste de dysfonctionnements et d’infractions au code du travail de la PME qui l’employait, dont l’activité officiellement enregistrée (son code NAF ou APE) était « commerce de détail en quincaillerie, peintures ». Le seul technicien dûment diplômé avait quitté la société deux mois avant l’embauche d’Alban. Sur les vingt-cinq salariés, une dizaine de commerciaux et seulement trois équipes de deux poseurs, lesquels étaient en conséquence soumis à un rythme intense pour honorer les commandes.

      Avant sa mort, Alban et son collègue de 20 ans, et trois mois d’ancienneté seulement, étaient partis le lundi de Narbonne (Aude) pour un premier chantier en Charente, puis un autre en Ille-et-Vilaine, avant un troisième, le lendemain, dans les Côtes-d’Armor, et un ultime, le mercredi, en Ille-et-Villaine, où a eu lieu l’accident. Alban, seul à avoir le permis, avait conduit toute la route.

      Inexpérimentés, les deux hommes n’avaient reçu qu’une formation sommaire à la sécurité. Et, surtout, ne disposaient pas de harnais complets pour s’attacher, comme l’a constaté l’inspectrice du travail le jour du drame.

      « Méconnaissance totale » et « déconcertante » du dirigeant

      Sans matériel, ils ont loué sur place une échelle chez Kiloutou. « Combien pèse une plaque photovoltaïque ? », a demandé le président du tribunal correctionnel de Rennes, lors du procès en première instance. « Dix-huit kilos », a répondu le chef d’entreprise. « Il faut monter l’échelle avec le panneau sous le bras ? », s’est étonné le président. « Cela dépend du chantier. »

      Il sera démontré pendant l’enquête, puis à l’audience, la « méconnaissance totale » et « déconcertante » du dirigeant, commercial de formation, de la réglementation en vigueur sur le travail en hauteur comme sur les habilitations électriques. Il n’avait entrepris aucune démarche d’évaluation des risques. Et ce, alors que deux autres accidents non mortels avaient eu lieu peu de temps avant sur ses chantiers.

      Dans son jugement du 6 juin 2023, le tribunal a reconnu l’employeur – et non l’entreprise, déjà liquidée – coupable d’homicide involontaire, retenant la circonstance aggravante de « violation manifestement délibérée » d’une obligation de sécurité ou de prudence, « tant l’inobservation était inscrite dans ses habitudes ».

      Enjeux financiers

      Car ces négligences tragiques cachent aussi des enjeux financiers. Monter un échafaudage, c’est plusieurs heures perdues dans un planning serré, et un surcoût de 6 000 euros, qui aurait doublé le devis, a chiffré un ouvrier à l’audience. « En somme, notre fils est mort pour 6 000 euros », souligne Mme Millot.

      L’affaire résonne avec une autre, dans laquelle Eiffage Construction Gard et un sous-traitant ont été condamnés en première instance comme en appel lors des procès qui se sont tenus en mai 2021 et avril 2022, à Nîmes. Mickaël Beccavin, cordiste de 39 ans, a fait une chute mortelle le 6 mars 2018, alors qu’il assemblait des balcons sur les logements d’un chantier d’envergure. Pour une raison restée inexpliquée, une corde sur laquelle il était suspendu a été retrouvée sectionnée, trop courte de plusieurs mètres. Quand la défense de l’entreprise a plaidé la seule responsabilité de la victime, qui aurait mal vérifié son matériel, l’inspecteur du travail a proposé une autre analyse.

      « On peut vous expliquer que le cordiste doit faire attention, mais la question n’est pas que là. La question est : est-ce qu’on devait faire appel à des cordistes pour ce chantier ? », a expliqué Roland Migliore à la barre, en mai 2021. Car la législation n’autorise les travaux sur cordes, particulièrement accidentogènes, qu’en dernier recours : cette pratique n’est possible que si aucun autre dispositif de protection dite « collective » (échafaudage, nacelle…) n’est envisageable. « La protection collective protège le salarié indépendamment de ce qu’il peut faire lui. S’il s’attache mal, il est protégé, rappelle l’inspecteur du travail. Au contraire, si l’on choisit la protection individuelle, on fait tout reposer sur le salarié. »

      « Précipitation »

      Le recours à la corde était apparu à l’audience comme un choix de dernière minute, sur un chantier où « tout le monde était pressé ». L’inspecteur du travail avait alors souligné cet aspect : « Malheureusement, dans le BTP, les contraintes sur les délais de livraison poussent à la précipitation : on improvise, quitte à ne pas respecter le plan général de coordination. »

      Secrétaire CGT-Construction, bois et ameublement de Nouvelle-Aquitaine, Denis Boutineau n’en peut plus de compter les morts. « Très souvent, c’est lié à un manque de sécurité. Quand vous êtes en ville, regardez les gens qui travaillent sur les toits, il n’y a aucune protection ! Pourquoi ? Pour des raisons économiques ! » Il cite ainsi le cas d’un jeune couvreur passé à travers un toit Everite. « L’employeur avait fait deux devis ! Un avec la mise en sécurité, un sans ! Bien sûr, le second était moins cher. Lequel croyez-vous qu’a accepté le client ? »

      Caroline Dilly reste, elle aussi, hantée par un échange avec son fils Benjamin, 23 ans, quelque temps avant sa mort, le 28 février 2022. Couvreur lui aussi, il aurait chuté en revenant dans la nacelle après avoir remis une ardoise en place sur un toit. Il n’était pas titulaire du certificat d’aptitude à la conduite d’engins en sécurité (Caces), nécessaire à l’utilisation de cet engin. Et la nacelle était-elle adaptée pour réaliser ce chantier ? C’est ce que devra établir la procédure judiciaire, encore en cours.

      Mais avant de rejoindre cette entreprise, Benjamin avait été renvoyé par une autre, au bout de quinze jours. « Il avait refusé de monter sur un échafaudage qui n’était pas aux normes », raconte sa mère, qui s’entend encore lui faire la leçon : « Y a ce que t’apprends à l’école et y a la réalité du monde du travail ! » « Je m’en veux tellement d’avoir dit ça… J’ai pris conscience alors à quel point prendre des risques au travail était entré dans nos mœurs. Tout ça pour aller plus vite. Comment en est-on arrivés à ce que la rentabilité prime sur le travail bien fait, en sécurité ? », se désole-t-elle.

      « Quand on commence, on est prêt à tout accepter »

      Depuis qu’elle a rejoint le Collectif familles : stop à la mort au travail, elle est frappée par la jeunesse des victimes : « Quand on commence dans le métier, on n’ose pas toujours dire qu’on a peur. Au contraire, pour s’intégrer, on est prêt à tout accepter. »

      Alexis Prélat avait 22 ans quand il est mort électrocuté sur un chantier, le 5 juin 2020. Son père, Fabien, bout aujourd’hui d’une colère qui lui fait soulever des montagnes. Sans avocat, il a réussi à faire reconnaître par le pôle social du tribunal judiciaire de Périgueux la « faute inexcusable » de l’employeur.

      C’est-à-dire à démontrer que ce dernier avait connaissance du danger auquel Alexis a été exposé et n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. Le jeune homme est descendu dans une tranchée où était clairement identifiée, par un filet rouge, la présence d’un câble électrique. « Le préposé de l’employeur sous les ordres duquel travaillait la victime ce jour-là aurait dû avoir connaissance du danger », dit le jugement rendu le 11 mai 2023, qui liste des infractions relevées par l’inspecteur du travail, notamment l’« absence d’habilitation électrique » et l’« absence de transcription de l’ensemble des risques dans le document unique d’évaluation des risques ».

      Fabien Prélat relève également que, comme pour Alban Millot, le code APE de l’entreprise ne correspond pas à son activité réelle. Elle est identifiée comme « distribution de produits informatiques, bureautique et papeterie ». Il estime par ailleurs que le gérant, « de fait », n’est pas celui qui apparaît sur les documents officiels. « Bien sûr, ce n’est pas ça qui a directement causé la mort de mon fils. Mais si l’Etat contrôlait mieux les choses, ces gens-là n’auraient jamais pu s’installer », s’emporte-t-il.

      « Pas assez de contrôles de l’inspection du travail »

      Cheffe du pôle santé et sécurité à la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), syndicat patronal, et elle-même gestionnaire d’une PME de charpente et couverture dans le Puy-de-Dôme, Cécile Beaudonnat s’indigne de ces pratiques. « Ce sont des gens contre qui on lutte, explique-t-elle. On les repère quand leurs clients nous contactent, dépités, quand ils comprennent que l’entreprise qui leur a mal installé des panneaux solaires n’avait ni les techniciens qualifiés, ni l’assurance professionnelle décennale », explique-t-elle.

      Normalement, pour s’installer, il y a l’obligation d’avoir une formation professionnelle qualifiante homologuée (au moins un CAP ou un BEP) ou de faire valider une expérience de trois ans sous la supervision d’un professionnel. « Malheureusement, il n’y a pas assez de contrôles de l’inspection du travail », déplore-t-elle. Avant d’ajouter : « Pour nous, c’est avant tout au chef d’entreprise d’être exemplaire, sur le port des équipements de protection, en faisant ce qu’il faut pour former ses salariés et en attaquant chaque chantier par une démarche de prévention des risques. Nous sommes une entreprise familiale, on n’a aucune envie d’avoir un jour un décès à annoncer à une famille. »

      « Il y a une bataille à mener pour faire changer les mentalités. Y compris chez les ouvriers, pour qu’ils ne se mettent pas en danger pour faire gagner plus d’argent à l’entreprise ! Quand on voit les dégâts que ça fait sur les familles… », s’attriste Denis Boutineau.

      Les deux parents d’Alexis Prélat ont obtenu, chacun, 32 000 euros en réparation de leur préjudice moral, sa sœur 18 000 euros. Ils espèrent maintenant un procès en correctionnelle. « La meilleure façon de changer les choses, c’est d’obtenir des condamnations exemplaires », estime Fabien Prélat.

      Fait rare, l’employeur d’Alban Millot a, lui, été condamné en correctionnelle à trente-six mois de prison dont dix-huit ferme. Il a fait appel du jugement. « Avant le procès, j’avais la haine contre ce type, confie Laurent Millot. L’audience et, surtout, une sanction telle que celle-là m’ont fait redescendre. »

    • Accidents du travail : quand les machines mettent en péril la vie des salariés
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/08/accidents-du-travail-quand-les-machines-tuent_6215360_3234.html

      Dans l’industrie, le BTP ou l’agriculture, les accidents liés à l’utilisation de machines comptent parmi les plus graves et les plus mortels. Employeurs, fabricants et responsables de la maintenance se renvoient la faute.

      Lorsqu’il prend son poste, ce lundi 27 décembre 2021, cela fait déjà plusieurs mois que Pierrick Duchêne, 51 ans, peste contre la machine qu’il utilise. Après deux décennies dans l’agroalimentaire, il est, depuis cinq ans, conducteur de presse automatisée dans une agence Point P. de fabrication de parpaings, à Geneston (Loire-Atlantique). Depuis un an et demi, la bonne ambiance au boulot, cette fraternité du travail en équipe qu’il chérit tant, s’est peu à peu délitée. L’atmosphère est devenue plus pesante. La cadence, toujours plus infernale. Les objectifs de #productivité sont en hausse. Et ces #machines, donc, « toujours en panne », fulmine-t-il souvent auprès de sa femme, Claudine.

      Ce jour-là, il ne devait même pas travailler. Mais parce qu’il était du genre à « toujours aider et dépanner », dit Claudine, il a accepté de rogner un peu sur ses vacances pour participer à la journée de maintenance et de nettoyage des machines. Pierrick Duchêne a demandé à son fils qu’il se tienne prêt. Dès la fin de sa journée, à 15 heures, ils devaient aller à la déchetterie. Mais, vers 11 h 30, il est retrouvé inconscient, en arrêt cardiorespiratoire, écrasé sous une rectifieuse à parpaing. Dépêché sur place, le service mobile d’urgence et de réanimation fait repartir son cœur, qui s’arrête à nouveau dans l’ambulance. Pierrick Duchêne meurt à l’hôpital, le 2 janvier 2022.

      Son histoire fait tragiquement écho à des centaines d’autres, se produisant chaque année en France. En 2022, la Caisse nationale d’assurance-maladie a recensé 738 accidents du travail mortels dans le secteur privé, selon son rapport annuel publié en décembre 2023. 1 % d’entre eux sont liés au « risque machine » – auquel on peut ajouter les accidents liés à la « manutention mécanique », de l’ordre de 1 % également. Selon l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS), qui répertorie plus précisément les incidents de ce type, les machines sont mises en cause dans 10 % à 15 % des accidents du travail ayant entraîné un arrêt supérieur ou égal à quatre jours, ce qui représente environ 55 000 accidents. Dont une vingtaine sont mortels chaque année.

      « La peur suppure de l’usine parce que l’usine au niveau le plus élémentaire, le plus perceptible, menace en permanence les hommes qu’elle utilise (…), ce sont nos propres outils qui nous menacent à la moindre inattention, ce sont les engrenages de la chaîne qui nous rappellent brutalement à l’ordre », écrivait Robert Linhart, dans L’Etabli (Editions de Minuit), en 1978. L’industrie, et notamment la métallurgie, est un secteur d’activité dans lequel les risques pour la santé des ouvriers sont amplifiés par l’utilisation d’outils et de machines. Les employés agricoles, les salariés de la chimie ou les travailleurs du BTP sont aussi très exposés. Sur le terrain, les services de l’inspection du travail font régulièrement état de la présence de machines dangereuses.

      « Aveuglement dysfonctionnel »

      Si leur fréquence baisse depuis les années 1990, ces accidents sont souvent les plus graves, avec des blessures importantes, et les procédures qui s’ensuivent sont extrêmement longues. La responsabilité peut être difficile à établir, car plusieurs acteurs sont en jeu : l’employeur, le fabricant de la machine, l’installateur, la maintenance. La plupart du temps, chacun se renvoie la faute. Comme si la machine permettait à tous de se dédouaner.

      « Le risque zéro n’existe pas », entend-on régulièrement au sujet des accidents du travail, qui plus est quand une machine est en cause. Pourtant, le dysfonctionnement brutal que personne ne pouvait anticiper, qui accréditerait la thèse d’une infortune létale, n’est quasiment jamais à l’œuvre. Au contraire, les défaillances des machines sont souvent connues de tous. « Il peut s’installer une sorte d’aveuglement dysfonctionnel, analyse Jorge Munoz, maître de conférences en sociologie à l’université de Bretagne occidentale. Le problème est tellement récurrent qu’il en devient normal. »

      Une situation qui hante encore les jours et les nuits de Delphine et de Franck Marais, les parents de Ludovic. Personne ne pouvait soupçonner que ce jeune apprenti barman de 19 ans mettait sa vie en péril en servant pintes et cafés derrière le comptoir d’une brasserie réputée de Tours. Mais, le 16 décembre 2019, quelques minutes avant de rentrer chez lui, à 23 h 45, sa tête est percutée par le monte-charge des poubelles.

      La machine fonctionnait depuis des mois, voire plusieurs années, avec les grilles de protection ouvertes. « Quelqu’un a désactivé la sécurité qui empêchait le monte-charge de démarrer ainsi, grilles ouvertes », raconte Franck, le père. Qui ? Un salarié, pour gagner du temps ? L’employeur, pour que ses salariés aillent plus vite ? Le responsable de la maintenance, à la demande de l’employeur ? Un oubli du technicien ? « On ne saura probablement jamais, mais, finalement, là n’est pas la question, estime l’avocate des parents, Marion Ménage. Ce qui compte, c’est que l’entreprise savait qu’il fonctionnait grilles ouvertes et qu’elle n’a rien fait. »

      « Il se sentait en danger »

      Sécurité désactivée, maintenance non assurée, prévention déconsidérée… Les mêmes logiques, les mêmes légèretés face à des machines dangereuses reviennent méthodiquement dans les récits, soulignant le caractère systémique de ces événements dramatiques. « Les dispositifs de sécurité ralentissent parfois le processus de travail et empêchent de tenir la cadence, analyse Jorge Munoz. On peut être tenté de défaire le mécanisme et, donc, de mettre en péril l’utilisateur. » C’est cette logique mortifère qui a été fatale à Flavien Bérard. Le jeune homme de 27 ans était sondeur pour la Société de maintenance pétrolière (SMP), une entreprise de forage et d’entretien de puits pétroliers, gaziers et de géothermie.

      D’abord employé sur un site dans le Gard, où il s’épanouit malgré les conditions de travail difficiles, Flavien Bérard est transféré après une semaine à Villemareuil, en Seine-et-Marne. Il se retrouve sur un chantier de forage pétrolier dont est propriétaire SMP, « les puits du patron », comme on surnomme le lieu. Industrie lourde, à l’ancienne, rythme en trois-huit, rendements à tout prix… Flavien est confronté à un milieu dur et peu accueillant. « Il nous a vite dit que c’était difficile, se souvient sa mère, Fabienne. Le gaillard de 1,84 mètre, plus de 80 kilos, corps de rugbyman, est pourtant du genre à tenir physiquement.

      « Il nous a surtout dit qu’il se sentait en danger, que les machines étaient dangereuses et qu’il avait des doutes sur la sécurité », déplore aujourd’hui Fabienne Bérard. Ses inquiétudes s’avèrent prémonitoires. Alors qu’il avait décidé de ne pas poursuivre sur le site une fois sa mission arrivée à son terme, le 5 mars 2022, vers 4 heures, une pièce métallique d’une trentaine de kilos se détache d’une machine de forage et percute Flavien à la tête, une quinzaine de mètres plus bas. Il meurt le lendemain, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris.

      « On nous a tout de suite parlé d’une erreur humaine, avec une sécurité désactivée », explique le père de la victime, Laurent Bérard. Selon l’avocat des parents, Lionel Béthune de Moro, le rapport machine de l’expert judiciaire ferait état de « 373 non-conformités », dont 3 concerneraient le système responsable de l’accident. « Une sécurité essentielle a été désactivée, pour le rendement », ajoute-t-il. « On nous a même dit que ce n’était pas la première fois qu’il y avait un problème avec cette machine », renchérit Fabienne Bérard.

      Complexité des procédures

      Ces exemples posent la question de la #prévention et de la maintenance. « L’objectif, c’est que les entreprises voient celles-ci comme un profit et non comme un coût », affirme Jean-Christophe Blaise, expert de l’INRS. L’institut a justement pour mission de développer et de promouvoir une culture de prévention des accidents du travail au sein des entreprises. « Dans certains cas, elle peut être perçue comme quelque chose qui alourdit les processus, qui coûte plus cher, complète Jorge Munoz. Mais l’utilisation d’une machine nécessite une organisation spécifique. »

      D’autant qu’une politique de prévention se déploie sur le long terme et nécessite des actions régulières dans le temps. Les agents de l’INRS travaillent sur trois aspects pour éviter les drames autour des machines : les solutions techniques, l’organisation du travail et le levier humain (formation, compétences, etc.). « Un accident du travail est toujours multifactoriel et il faut agir sur tout à la fois, souligne M. Blaise. La clé, c’est la maintenance préventive : anticiper, prévoir plutôt que subir. »

      Les accidents du travail liés aux machines ont un autre point commun : la complexité des procédures qui s’ensuivent. Plus de deux ans après les faits, Claudine Duchêne ne connaît toujours pas les circonstances exactes de la mort de son mari. « Je sais juste que la machine n’aurait pas dû fonctionner en ce jour de maintenance, qu’il n’aurait pas dû y avoir d’électricité », assure-t-elle. L’enquête de la gendarmerie a été close en juillet 2022, celle de l’inspection du travail a été remise à la justice en juin 2023. Celle-ci révélerait « une faute accablante sur l’organisation de la journée de maintenance », précise Claudine Duchêne. Depuis, elle attend la décision du parquet de Nantes.

      Aux enquêtes de police et de l’inspection du travail peut s’ajouter une expertise judiciaire, ralentissant encore un peu plus la procédure, comme dans le cas de Flavien Bérard. « L’attente est longue et douloureuse pour les familles, souligne Me Béthune de Moro. Plus il y a d’intervenants, plus cela alourdit les choses, mais c’est toujours pour éclairer la situation, dans un souci de manifestation de la vérité. » La famille attend désormais d’éventuelles mises en examen et une ordonnance de renvoi dans l’année pour un procès en 2025.

      Après l’accident de Ludovic Marais, le monte-charge a été mis sous scellé jusqu’en mars 2023, une procédure indispensable mais qui allonge encore les délais. Cela a empêché l’intervention d’un expert judiciaire pendant plus de trois ans. « Le nouveau juge d’instruction a décidé de lever les scellés et une nouvelle expertise est en cours », confie Me Ménage. Le rapport pourrait arriver d’ici à l’été. Sachant que les avocats de la défense pourront éventuellement demander une contre-expertise. La brasserie, le patron, la tutrice du jeune apprenti, Otis (la société ayant installé le monte-charge) et un de ses techniciens chargé de la maintenance sont mis en examen pour « homicide involontaire par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité et de prudence dans le cadre du travail ». Un procès pourrait avoir lieu fin 2024 ou en 2025. La fin d’un chemin de croix judiciaire pour qu’enfin le deuil soit possible.

    • Accidents du travail : les jeunes paient un lourd tribut
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/09/accidents-du-travail-les-jeunes-paient-un-lourd-tribut_6215566_3234.html

      Entre les entreprises peu scrupuleuses et la nécessité pour les jeunes de faire leurs preuves dans un monde du travail concurrentiel, les stagiaires, élèves de lycées professionnels ou apprentis sont les plus exposés aux risques professionnels.

      Quatre jours. L’unique expérience professionnelle de Jérémy Wasson n’aura pas duré plus longtemps. Le #stage d’observation de cet étudiant en première année à l’Ecole spéciale des travaux publics, du bâtiment et de l’industrie (ESTP) devait durer deux mois, dans l’entreprise Urbaine de travaux (filiale du géant du BTP Fayat). Le 28 mai 2020, il est envoyé seul sur le toit du chantier du centre de commandement unifié des lignes SNCF de l’Est parisien, à Pantin (Seine-Saint-Denis). A 13 h 30, il fait une chute en passant à travers une trémie de désenfumage – un trou laissé dans le sol en attente d’aménagement – mal protégée. Il meurt deux jours plus tard, à 21 ans.

      L’accident de Jérémy a laissé la grande école du bâtiment en état de choc. « C’est ce qui m’est arrivé de pire en trente ans d’enseignement supérieur », exprime Joël Cuny, directeur général de l’ESTP, directeur des formations à l’époque. La stupeur a laissé la place à de vibrants hommages. Un peu courts, toutefois… L’ESTP ne s’est pas portée partie civile au procès, regrette Frédéric Wasson, le père de Jérémy, qui souligne que « Fayat est l’entreprise marraine de la promo de [s]on fils… », ou que, dès 2021, Urbaine de travaux reprenait des dizaines de stagiaires issus de l’école.

      #Stagiaires, élèves de lycées professionnels en période de formation en milieu professionnel, #apprentis… Les jeunes paient un lourd tribut parmi les morts au travail : trente-six travailleurs de moins de 25 ans n’ont pas survécu à un accident du travail en 2022, selon le dernier bilan de la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM). C’est 29 % de plus qu’en 2019. Et encore cela ne porte que sur les salariés du régime général. La CNAM souligne aussi que, par rapport aux autres accidents du travail, il s’agit davantage d’accidents « classiques, c’est-à-dire hors malaises et suicides », et d’accidents routiers.

      « Irresponsabilité totale »

      L’inexpérience de ces jeunes, quand elle n’est pas compensée par un accompagnement renforcé, explique en partie cette surmortalité. Quelque 15 % des accidents graves et mortels surviennent au cours des trois premiers mois suivant l’embauche, et plus de la moitié des salariés de moins de 25 ans morts au travail avaient moins d’un an d’ancienneté dans le poste.

      Tom Le Duault a, lui, perdu la vie le lundi 25 octobre 2021. Cet étudiant en BTS technico-commercial entame alors son quatrième contrat court dans l’abattoir de LDC Bretagne, à Lanfains (Côtes-d’Armor). Sa mère y travaille depuis vingt-neuf ans, et il espère ainsi mettre un peu d’argent de côté. Comme lors de ses premières expériences, il est « à la découpe », où il s’occupe de mettre en boîte les volailles. Ce matin-là, un salarié est absent. Tom doit le remplacer dans le réfrigérateur où sont stockées les caisses de viande. Il est censé y empiler les boîtes avec un gerbeur, un appareil de levage.

      « Sur les dernières images de vidéosurveillance, on le voit entrer à 9 h 53. Il n’est jamais ressorti, et personne ne s’est inquiété de son absence », regrette Isabelle Le Duault, sa mère. Il est découvert à 10 h 45, asphyxié sous deux caisses de cuisses de volaille. Elle apprend la mort de son fils par hasard. « J’ai vu qu’il y avait plein de monde dehors. Une fille m’a dit qu’il y avait un accident grave, elle m’a dit de demander si ce n’était pas mon fils au responsable. Il m’a demandé : “C’est Tom comment ?” C’était bien lui… »

      Les conclusions des enquêtes de gendarmerie et de l’inspection du travail ont vite écarté une éventuelle responsabilité du jeune homme. Jean-Claude Le Duault, son père, en veut à l’entreprise. « Tom n’a pas voulu les décevoir, vu que sa mère travaillait là. Mais on ne met pas un gamin de 18 ans seul dans un atelier, une heure, sans vérifier, sur un gerbeur. Il ne connaît pas les dangers, les règles de sécurité. C’est une irresponsabilité totale, à tous les étages. »

      Manquements

      Dans un monde du travail concurrentiel, les jeunes se doivent de faire leurs preuves. A quel prix ? Selon une enquête du Centre d’études et de recherches sur les qualifications publiée en 2020, 59 % des jeunes sortant de la voie professionnelle sont exposés à des risques de blessures ou d’accidents. Or, dans le même temps, ils n’ont pas la même connaissance de leurs droits. Toujours dans cette étude, 42 % déclaraient ne pas avoir reçu de formation ou d’informationsur la santé et la sécurité à l’arrivée sur leur poste. C’est le cas de Tom Le Duault, qui n’avait même pas de fiche de poste. Comme son utilisation du gerbeur n’était pas prévue, il avait été formé sur le tas.

      « Il avait déjà travaillé avec un appareil de levage lors de son précédent contrat, et il s’était déjà blessé à la cheville, ce qui avait causé trois semaines d’arrêt, fulmine Ralph Blindauer, avocat de la famille. Il a été formé par un autre intérimaire. C’était une formation à l’utilisation, pas à la sécurité ! »

      A l’absence d’encadrement et de formation s’ajoutent d’autres manquements, détaillés lors du procès de l’entreprise au pénal : l’appareil était défaillant, ce qui a vraisemblablement causé l’accident, et les salariés de LDC avaient l’habitude d’empiler les caisses sur trois niveaux au lieu de deux, faute de place dans la chambre froide, ce qui est contraire aux règles de sécurité.

      Le rôle du tuteur est crucial

      LDC Bretagne a été condamné, en mai 2023, à une amende de 300 000 euros, tandis que l’ancien directeur de l’#usine – devenu, entre-temps, « chargé de mission » au sein de l’entreprise – a été condamné à deux ans de prison avec sursis. Reconnaissant ses manquements, l’entreprise n’a pas fait appel, chose rare. La direction de cette grosse PME déclare que des mesures complémentaires ont été prises à la suite du décès de Tom, notamment un « plan de formation renforcé à la sécurité, des habilitations, une évaluation complète et approfondie des risques sur les différents postes, des audits par des cabinets indépendants ou le suivi d’indicateurs ».

      Un badge est désormais nécessaire pour se servir d’un gerbeur, ajoute Isabelle Le Duault. Elle a choisi de rester dans l’entreprise, mais à mi-temps. « Moi, je ne peux plus passer devant cette usine, ou même dans cette ville », renchérit son mari.

      En stage ou en apprentissage, le rôle du tuteur est crucial. Sur le chantier d’Urbaine de travaux, à Pantin, l’arrivée de Jérémy Wasson n’avait pas été anticipée. Le lundi matin, personne ne s’occupe de lui, car le chantier est en retard. Il ne reçoit rien d’autre qu’un livret d’accueil et un rendez-vous de quinze minutes pendant lequel on lui parle surtout des gestes barrières. « Jérémy s’est très vite interrogé sur la nature de son stage. Dès le premier jour, on lui a fait faire du marteau-piqueur, le mercredi soir, il trouvait ça fatigant et inintéressant. Ce soir-là, on a hésité à prévenir l’école… », raconte son père.

      Renforcer la formation à la sécurité

      La société Urbaine de travaux a été condamnée, en 2022, à 240 000 euros d’amende pour « homicide involontaire », et l’ingénieure en chef du chantier à 10 000 euros et deux ans de prison avec sursis. Cette décision du tribunal de Bobigny a confirmé les lourdes conclusions de l’inspection du travail, notamment la violation délibérée d’une obligation de #sécurité, l’absence d’encadrement et de formation de Jérémy et l’absence de #sécurisation de la trémie. L’entreprise a fait appel.

      Face à la violence de ces récits, qui concernent parfois des mineurs, le sujet a été érigé en axe prioritaire dans le plan santé au travail du gouvernement. Mais le choix du ministère du travail de publier deux mémentos qui mettent jeunes et entreprises sur le même plan, les invitant à « respecter toutes les consignes », peut étonner.

      Les écoles et centres de formation ont aussi un rôle à jouer pour renforcer la formation à la sécurité. En 2022, la CNAM a recensé plus de 1 million d’élèves et apprentis (CAP et bac professionnel) ayant reçu un enseignement spécifique en santé et sécurité au travail.

      Faciliter la mise en situation des adolescents

      A la suite du décès de Jérémy, l’ESTP a renforcé les enseignements – déjà obligatoires – sur la sécurité. Un élève ne peut se rendre en stage sans avoir obtenu une certification. « En cas de signalement, on fait un point avec les RH de l’entreprise, et si ça ne se résout pas, nous n’avons pas de scrupules à arrêter le stage. Mais je ne remets pas en cause la volonté des entreprises de créer un environnement de sécurité pour accueillir nos élèves », déclare Joël Cuny.

      Un argument difficile à entendre pour la famille de Jérémy Wasson… Car les #entreprises restent les premières responsables de la santé des jeunes sous leur responsabilité, comme du reste de leurs salariés. Le nombre d’apprentis a explosé ces dernières années, la réforme du lycée professionnel souhaite faciliter la mise en situation des adolescents.

      Par ailleurs, le gouvernement a annoncé l’obligation pour les élèves de 2de générale et technologique, dès 2024, d’effectuer un stage en entreprise ou en association de deux semaines, semblable au stage de 3e. La question ne s’est jamais autant posée : les employeurs mettront-ils les moyens pour protéger tous ces jeunes ?

      #apprentissage

    • Avec la sous-traitance, des accidents du travail en cascade, Anne Rodier
      https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/02/10/avec-la-sous-traitance-des-accidents-du-travail-en-cascade_6215798_3234.html

      Pression économique des donneurs d’ordre, délais resserrés, manque de prévention… Les salariés des entreprises en sous-traitance, en particulier sur les chantiers et dans le nettoyage, sont plus exposés aux accidents du travail. Surtout lorsqu’ils sont #sans-papiers.

      https://justpaste.it/axscq

      #sous-traitance

  • Bunkers et fermes bio : comment les ultrariches préparent l’avenir
    https://reporterre.net/Bunkers-et-fermes-bio-comment-les-riches-preparent-l-avenir

    Face à la crise climatique, le survivalisme est devenu l’ultime lubie des milliardaires qui planifient leur exode et tentent d’échapper au monde commun.

    Les ultrariches se préparent à la catastrophe qu’ils ont eux-mêmes contribué à provoquer. Alors que le monde plonge peu à peu dans le chaos climatique, ils se bâtissent des bunkers, s’achètent des îles privées et s’aménagent des existences qu’ils rêvent à l’abri des violences, pour continuer à vivre dans le luxe, le calme et la volupté.

    Voilà déjà quelques années que les médias ont révélé le phénomène. La pandémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine ont tout accéléré. Avec leurs jets privés, leurs yachts et leurs « gated communities » (quartiers résidentiels privés), les milliardaires ont décidé de faire sécession.

    La Nouvelle-Zélande et la Patagonie sont devenues leurs repaires. Ils investissent aussi dans des contrées isolées comme l’Alaska, la Scandinavie ou le Kamtchatka en Russie. Steve Huffman, le cofondateur du réseau social Reddit, le dit lui-même : une bonne moitié de ses collègues milliardaires de la Silicon Valley ont acheté des « biens immobiliers apocalyptiques » dans le monde. Les médias anglo-saxons évoquent même « un rush ».

    #riches #climat

  • L’autre menace pour Gaza : sols et air pollués, eau contaminée
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/01/sols-pollues-armes-au-phosphore-eau-contaminee-a-gaza-la-crise-sanitaire-pou

    L’autre menace pour Gaza : sols et air pollués, eau contaminée
    Si les attaques israéliennes ont déjà provoqué plus de 25 000 morts dans la bande de Gaza, leurs conséquences sur l’environnement des habitants les exposent à des risques tout aussi fatals.
    [...]

    Les bombardements israéliens sur Gaza, menés en représailles de l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, tuent des centaines de Palestiniens chaque jour. Selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), plus de 25 000 personnes ont été tuées par les offensives successives d’Israël depuis quatre mois, et 85 % des 2,1 millions d’habitants de l’enclave palestinienne ont été déplacés. Mais ces attaques pourraient avoir d’autres conséquences fatales pour les Gazaouis.

    « Les opérations militaires israéliennes à Gaza ont des conséquences désastreuses, notamment à cause d’une pollution carbone énorme, que ce soit dans l’air, l’eau, les sols, exposant les Palestiniens à un large panel de substances toxiques », explique au Monde le Canadien David R. Boyd, rapporteur spécial des Nations unies sur les droits humains et l’environnement. En octobre 2023, l’organisation Human Rights Watch avait révélé que du phosphore blanc, une substance toxique inflammable à l’apparence jaunâtre, pouvant brûler jusqu’à une température de 800 °C, avait été utilisé par Israël à Gaza et dans le sud du Liban.

    L’ONG a analysé des séries d’images, concluant à l’emploi de « projectiles d’artillerie au phosphore blanc de 155 mm ». Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), une personne rentrant directement en contact avec du phosphore blanc risque des nausées, des vomissements et des diarrhées, des douleurs abdominales sévères, des sensations de brûlure. « La mort peut advenir sous vingt-quatre à quarante-huit heures à cause d’un collapsus cardiovasculaire », complète l’agence fédérale américaine de santé publique. L’utilisation de cette substance par Israël sur Gaza est « une grave violation du droit international », ajoute M. Boyd.

    En 2009, Israël avait admis avoir « utilisé des munitions contenant du phosphore blanc » pendant son offensive militaire contre Gaza, entre décembre 2008 et janvier 2009, précisant qu’elles « ne visaient pas directement les zones civiles ».

    Destruction de terrains agricoles
    Plus de 25 000 tonnes de bombes auraient été larguées sur la bande de Gaza entre le 7 octobre et le début du mois de novembre 2023, estime l’ONG Euromed Droits, qui accuse l’armée israélienne d’avoir utilisé des « armes à sous-munitions ». Selon le service de lutte contre les mines des Nations unies, ce sont des « munitions classiques conçues pour disperser ou libérer des sous-munitions explosives dont chacune pèse moins de 20 kilos ». L’usage de ce type d’artillerie a été déclaré illégal, car particulièrement meurtrier, par 119 Etats signataires de la convention d’Oslo de 2008, dont l’Etat hébreu n’est pas partie prenante. De plus, selon la Croix-Rouge internationale, « un grand nombre de ces sous-munitions n’éclatent pas comme prévu, leur présence rend l’agriculture dangereuse et entrave les reconstructions ». Israël a déjà utilisé ce type d’armes, notamment au Liban en 2006.

    La dégradation, voire la destruction, des terres représente un autre enjeu. « Des images satellites montrent que des terres agricoles sont détruites de manière délibérée », affirme Omar Shakir, directeur Israël-Palestine de Human Rights Watch. Il fait notamment référence à la zone de Beit Hanoun, dans le Nord, tapissée par les bombes pour, selon l’armée israélienne, atteindre des tunnels et des cibles du Hamas et où des bulldozers frayent de nouvelles routes aux véhicules militaires. « Nous avons pu constater qu’approximativement 30 % des terres agricoles ont été endommagées », explique He Yin, chercheur en géographie à l’université d’Etat de Kent (Ohio), qui a contribué à concevoir des cartes satellites permettant d’observer les destructions de terres à Gaza.

    Créé par deux universitaires américains, Jamon Van Den Hoek (université de l’Oregon) et Corey Scher (université de New York), pour visualiser, grâce à des images satellites, les dégâts provoqués par le conflit, l’outil Conflict Damage révèle que, au 17 janvier, « 49,7 % à 61,5 % des bâtiments de Gaza ont probablement été endommagés ou détruits ». Or, lorsque les édifices, infrastructures ou résidences explosent, d’énormes quantités de poussières et de débris sont rejetées dans l’environnement. En 2021, un rapport de la Banque mondiale portant sur la campagne militaire israélienne cette année-là à Gaza estimait que « 30 000 tonnes de déchets dangereux, y compris amiante, pesticides, engrais, (…) tuyaux en amiante-ciment » avaient contaminé le territoire.

    Un scénario aujourd’hui décuplé par l’ampleur de l’offensive israélienne. « Nous souffrons d’un air pollué à cause des bombes. De plus en plus de gens tombent malades », témoigne par message Adam, un jeune homme originaire de Jabaliya, dans le nord de la bande, et actuellement réfugié à Rafah, dans le Sud.

    Accès à l’eau potable préoccupant
    Auteur d’un rapport pour l’ONG néerlandaise Pax for Peace portant sur les risques environnementaux et sanitaires de la guerre à Gaza, l’expert en désarmement Wim Zwijnenburg explique que les substances contenues dans ce type de débris ont été analysées dans des conflits précédents, comme en Syrie, ou lors de catastrophes naturelles, comme le séisme de février 2023 dans le sud de la Turquie, et « peuvent provoquer de graves maladies ».

    A cet air difficilement respirable vient s’ajouter un accès à l’eau potable devenu extrêmement rare. Cette difficulté n’est pas nouvelle. Dès 2012, un rapport des Nations unies estimait que 90 % du volume disponible était impropre à la consommation. Dix jours après le début de l’offensive israélienne d’octobre 2023, les capacités de pompage des nappes phréatiques étaient tombées à 5 % par rapport à leur niveau habituel, selon l’Unicef.

    D’après le Wall Street Journal, Israël aurait commencé début décembre à inonder des tunnels de Gaza d’eau de mer afin d’en déloger le Hamas. L’armée israélienne a confirmé mardi 30 janvier avoir procédé à l’inondation de certains tunnels. « Des rapports, non corroborés, affirment que des hydrocarbures et autres substances sont présentes dans ces tunnels. Si c’est le cas, elles pourront donc affecter le sol et s’infiltrer dans l’aquifère », souligne Wim Zwijnenburg.

    L’OCHA ajoute qu’une vingtaine d’infrastructures liées à l’eau, à l’assainissement ou à l’hygiène auraient été détruites par des attaques. « Les gens passent la plus grande partie de leur journée à essayer de trouver de l’eau pour boire », affirme Omar Shakir, de Human Rights Watch.

    Zones inhabitables
    Les eaux usées se déversent dans les lieux de vie. Le 4 janvier, une vidéo diffusée sur WhatsApp et consultée par Le Monde montrait un journaliste palestinien se filmant en train d’avancer au milieu d’une inondation d’eaux usées dans l’école servant de camp de réfugiés à Jabaliya. Ces déchets liquides peuvent également être déversés dans la mer, constituant un danger pour la santé humaine et la biodiversité. Un rapport du Programme pour l’environnement de l’ONU en 2020 affirmait avoir « trouvé des preuves substantielles de changements environnementaux et d’une dégradation du territoire palestinien ». Sur les soixante-cinq stations d’épuration d’eau que compte Gaza, la plupart seraient actuellement hors service, selon l’ONG Oxfam.

    La présence de certaines bactéries dans l’eau accroît de plus la résistance aux antibiotiques. Une étude publiée dans The Lancet, le 25 novembre 2023, rappelle l’urgence de la situation. « Sans une action rapide, cette guerre menace de redéfinir l’épidémiologie de la résistance aux antimicrobiens à Gaza et au-delà », peut-on lire. Selon un rapport de l’ONU du 2 janvier 2024, on comptait à Gaza 179 000 cas d’infections respiratoires aiguës, 136 400 cas de diarrhée chez les enfants de moins de 5 ans, 55 400 cas de gale et de poux et 4 600 cas de jaunisse.

    « Nous verrons plus de gens mourir de maladies que nous n’en voyons tués par les bombardements si nous ne pouvons pas remettre en place un système de santé », alertait Margaret Harris, porte-parole de l’OMS, à Genève, le 28 novembre 2023. Pour Wim Zwijnenburg, certaines parties de la bande de Gaza peuvent déjà être considérées comme inhabitables. « Les gens ne pourront pas retourner dans ces endroits. Il n’y a rien pour espérer rebâtir une société humaine », conclut-il.

    #gaza #sols #eau #pollution #risques #maladies

  • #UK and France’s small boats pact and doubling in drownings ‘directly linked’

    Report says greater police presence on French beaches and more attempts to stop dinghies increases risks to refugees

    The most recent illegal migration pact between the UK and France is “directly linked” to a doubling of the number of Channel drownings in the last year, a report has found.

    The increased police presence on French beaches – along with more dinghies being stopped from reaching the coast – is leading to more dangerous overcrowding and chaotic attempts to board the boats, the paper said.

    The lives lost in 2023 – when the deal was signed – were close to the French shore and to police patrols on the beaches, in contrast to earlier Channel drownings such as the mass drowning on 24 November 2021, where at least 27 people lost their lives after their boat got into difficulty in the middle of the Channel.

    “We directly link the recent increase in the number of deadly incidents to the agreement between the British and French governments to Stop The Boats,” the report states.

    It adds that the increased police presence and their attacks on some of the migrants trying to cross “create panicked and dangerous situations in which dinghies launch before they are fully inflated”. This scenario can increase the risk of drowning in shallow water.

    The paper, named the Deadly Consequences of the New Deal to Stop the Boats, condemns what it describes as increased police violence as the most visible consequence of last year’s deal.

    The report compares data in the year before the March 2023 deal with last year’s data after the deal was signed.

    The data was analysed by the organisation Alarmphone, which operates an emergency helpline for migrants crossing the seas who get into distress, and passes on location and other information to rescue services.

    In 2022, six lives were lost at sea in three separate incidents. In 2023, at least 13 lives were lost in six separate incidents.

    The most recent incident was on 14 January this year where five people lost their lives near the beach of Wimereux, north of Boulogne-sur-Mer, as more than 70 people tried to board a dinghy.

    The BBC reported that two of those who drowned were Obada Abd Rabbo, 14, and his older brother, Ayser, 24, who lost their lives a few metres from the French coast when people rushed into the sea to try to board the dinghy.

    Crossings reduced by a third in 2023 compared with 2022. But there are indications more migrants are turning to lorries and other methods of transport to reach the UK as the clampdown on sea crossings increases.

    Incidents last year in which people lost their lives close to the French shore include:

    - 12 August 2023: six Afghan men drowned in an overloaded dinghy which got intro trouble close to the French shore

    - 26 September 2023: Eritrean woman, 24, died in Blériot-Plage after being asphyxiated in a crush of 80 people trying to board one dinghy

    - 22 November 2023: three people drowned close to Équihen-Plage as the dinghy collapsed close to the shore. Fifty-seven survivors returned to the beach.

    The report concludes that the UK/French deal has further destabilised an already dangerous situation while police are still unable to prevent most crossings on a busy day. It identifies “victim blaming” of those trying to cross by politicians.

    A Home Office spokesperson said: “Fatal incidents in the Channel are the result of dangerous, illegal and unnecessary journeys in unseaworthy craft, facilitated by criminals in the pursuit of profit.

    “Asylum seekers should seek protection in the first country where it is reasonable for them to do so and we continue to take robust action to crackdown on criminal gangs, deter migrants from making dangerous crossings and intercept vessels.”

    The French interior ministry was approached for comment.

    https://www.theguardian.com/uk-news/2024/jan/29/uk-france-small-boats-pact-doubling-drownings-directly-linked

    #Calais #France #asile #migrations #réfugiés #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #militarisation_des_frontières #rapport #létalité #risques #Manche #La_Manche #violences_policières #accord #Wimereux #Boulogne-sur-Mer #responsabilité #Angleterre

    • The deadly consequences of the new deal to ‘#Stop_the_Boats’

      There were more deadly incidents in the Channel in 2023 due to the new ’Stop the Boats’ deal. Increased funding for the French has meant more police, more violence on the beaches, and thus more of the dangerously overcrowded and chaotic embarkations in which people loose their lives.

      On 14 January 2024, around 2am CET, another five people were killed attempting to cross the Channel to the UK. Survivors report that their dinghy collapsed near the beach of Wimereux, north of Boulogne-sur-Mer, as more than 70 people tried to get onboard during the launch. The Préfecture maritime’s press release states the police forces present first tried rescuing the people returning to the beach, as rescue boats and a helicopter spotted four unconscious people in the sea. Later in the morning, a walker discovered a fifth body washed up on the beach. In addition to the five who died, one person was taken into intensive care in the Boulogne hospital due to severe hypothermia, and another 33 needed additional care ashore after the incident. The identities of those who died have not yet been officially published. Testimonies of survivors identify them as four Syrian nationals; two aged 14 and 16. The fifth person remains unidentified but is thought to be a man from the Middle East.

      This incident is the most recent in a disturbing trend we have observed develop over the latter part of 2023: an increase in the loss of life in the Channel very close to the French beaches and often in the presence of police.

      The increasing activities of French police since the newest Franco-British declaration in March 2023 have had two main consequences:

      - Fewer dinghies are reaching the French coast, causing dangerous overcrowding and chaotic embarkations;
      – More police attacks on the dinghies as they launch, provoking panic and further destabilising an already unsafe situation.

      The result has been not only more dangerous and deadly embarkations, but further injury and trauma for travellers at the hands of police, as well as the increased separation of families.

      In this report we show the evolution in state policy and practices which are responsible for this trend, while drawing attention to those who lost their lives as a result.
      More deadly incidents

      Since the start of 2023 there has been an alarming increase in the number of deadly incidents in the Channel compared with 2022. Of the 29 people1 known to have died at the Franco-British border last year according to Calais Migrant Solidarity, at least 13 lost their lives in six incidents related to sea crossings. This includes the shipwreck of 12 August in which six Afghan men drowned.2 This is significantly more than the six people known to have lost their lives in three events related to sea crossings in 2022.

      There is a common misperception that people most often die in the Channel far out to sea, when the search and rescue response is not properly initiated or help takes too long to arrive. This is understandable considering the shipwreck of 24 November 2021 where the UK and French coastguards refused to assist a group of more than 30 people, passing responsibility back and forth to one another. Only two people survived. The misperception may also have been bolstered by the shipwreck of 14 December, 2022 in which up to four people lost their lives, and more are still missing, despite the authorities being informed of their distress. See our analysis of what really happened here. However, as a result of their previous failures, the Coastguards have since improved their organisation, coordination, and resources for search and rescue missions on both sides of Channel. French boats routinely shadow dinghies as they make their way to the UK to be on hand to rescue if necessary, and the UK Border Force anticipate the arrivals and rescue people as they cross the borderline

      What we observed last year, however, is that the deadly incidents all happened despite the presence or near immediate intervention of French rescue boats, for example on 12 August, 15 December 2023 and 14 January 2024. Even more concerning is that they all occurred on or within sight of French shores. The cause in all of the cases seems to be the same; the dinghies being overcrowded and failing shortly after departure, or dangerous situations created by chaotic launches.
      2023 Deaths during sea crossing attempts
      12 August: 6 Afghan men drown after the sponson of their dinghy of around 65 people collapses off of Sangatte.

      36 survivors are taken to the port of Calais by the French coastguard, and 22 or 23 more are taken to Dover by the British coastguard. 2 people remain missing at sea.

      Survivors told us their dinghy was moving slowly because of the high number of people (65 or 66). One of the sponsons gave out suddenly and half of the travellers were thrown into the water. Some tried to swim to the shore as they reported they could still see Sangatte. The search and rescue operation included 5 French assets, 2 UK assets, a French helicopter and aeroplane. The search and rescue operation was not able to recover all the travellers because most of them were already in the water when the first vessel arrived on scene. Two survivors are in custody in France, accused of piloting the dinghy.
      26 September: A 24-year-old Eritrean woman dies in Blériot-Plage after being asphyxiated in a crush of 80 people trying to board one dinghy.

      Witnesses told us a group approached the dinghy at the last moment before it departed and attempted to get onboard too. The dinghy was already overcrowded and this intervention led to mass panic among travellers. We know of at least two Eritrean families who were separated as some were pushed out of the boat and others unable to leave due to physical pressure from the mass of people. Wudase, a 24 year old woman from Eritrea was unable to get out and died from asphyxiation, crushed underneath the other travellers. Her body was lowered from the boat and around 75 people continued their journey to arrive in the UK.
      8 October: A 23-year-old Eritrean man is found drowned in Merlimont, after 60 people in dinghy collapsed near the beach.

      Around 60 people tried to board a dinghy towards the UK but the craft was unable to take the weight of the people and collapsed. The travellers swam or waded back to the shore but one man, Meron, was unable to swim and drowned at the beach. The emergency services on scene were unable to resuscitate him.
      22 November: Three people drown off of Equihen-Plage as the dinghy collapsed in sight of the shore. 57 survivors return to the beach.

      Two bodies, one man, Aman and a woman, Mulu were recovered on scene. A third body, of Ezekiel, a man also from Ethiopia was found on the beach of Dannes on the 4th of December.
      15 December: One Kurdish man name Rawezh from Iraq drowns 8kms off the coast of Grand-Fort-Philippe after attempting to cross to the UK by sea. 66 other people are rescued.

      As a French Navy vessel military approached the dinghy at around 1am, the crew informed CROSS Gris-Nez that one of the dinghy’s tubes had deflated and that some people were in the water. Despite the fast response of the French, it was already too late to recover all of the people alive. Two young men Hiwa and Nima both Kurdish Iranian are still missing after the incident.
      15 December: A Sudanese man named Ahmed drowns.

      An overloaded boat struggled to leave from Sangatte’s beach amidst a cloud of tear gas launched by the French police. Some people fell into the water as the dinghy turned around due to a non-functioning engine. One young man from Sudan drowned, trapped under the collapsed dinghy, and died later from cardio-respiratory arrest in hospital.
      What changed?: dangerous deals

      We directly link the recent increase in the number of deadly incidents to agreements between the British and French governments to ‘Stop the Boats’. Since the introduction of juxtaposed border controls in the 1990s there has been intense cooperation between the French and British in attacking and harassing people on the move in Northern France to prevent and deter them from crossing to the UK. The UK gives huge sums of money to France to intensify its policing of the border in the North, and secure its ports. From 2014 to 2022 £319m was handed over according to the House of Commons Library. This included £150m in four deals between 2019 and 2022 focused on stopping boat crossings.

      This money paid for an increase of the numbers of gendarmes patrolling the coast under Operation Poseidon; more surveillance tech including night-vision goggles, drones, aeroplanes, and ANPR cameras on the roads; and several all-terrain vehicles for patrolling the beaches and dunes. This equipment has made the French police and gendarmes more effective at detecting stashed dinghies, engines, fuel and life-jackets as well as groups of people while they wait for several hours hidden in the dunes before a crossing. It also marginally increased their ability to disrupt departures on the beach, but they remained unable to prevent most on a busy crossing day. Additionally, the deals increased law enforcement cooperation and intelligence sharing between the French and British to dismantle the networks of those who organise the journeys, as well as disrupt their supply chains.

      Despite the vast sums put up by the British, previous deals were criticised for still not providing the French with enough resources to ‘Stop the Boats’. They also took place in a period of cooler relations between France and Britain in the post-Brexit period of Johnson’s premiership when the French may have been less enthusiastic about being Britain’s border police. Last March, however, both governments doubled-down and made a new declaration in which the UK promised £478m to the French over three years for 500 more police, a new detention centre, and more surveillance capacity ‘to enable swifter detection of crossing attempts’ and ‘monitor a larger area of northern France and prevent more crossings’. It is after this deal that we have really noticed an uptick in the numbers of police interventions to stop dinghies being delivered to the coast, violence on the beaches (and sometimes at sea) to stop them launching, and by consequence the number of deadly incidents occurring at or near the shores.
      Consequences of the new deal
      1: Dangerously overcrowded dinghies

      Despite the fewer overall number of people crossing in 2023 compared to 2022, each dinghy making the trip was more crowded than in any previous year.

      Illustrated in the graphs above, the 47 days with the highest average number of people per dinghy ever all took place in 2023. The highest, 26 September 2023, had an average over 70, and there were 27 days with 56 or more people per dinghy, with all except one being after June. By comparison, the highest average day in 2022 saw not-quite 53 people per dinghy. These averages do not show the actual figures of each dinghy which have recently been stretching to more than 70, and sometimes 80. Meanwhile the number of crossings on any given day has gone down.

      A key factor driving this overcrowding are the police operations against the logistical networks to organise the dinghies used for crossings, which stretch as far as Turkey and other European countries like Germany. The vehicles and drivers which do the deliveries to the French coast during periods of good weather are also targeted by police on the coastal roads. The UK government recently boasted that in 2023 246 people were arrested as ‘people smugglers’ and an international operation led to the seizure of 136 dinghies and 46 outboard motors.

      These attacks on the supply chain, however, do not reduce the overall demand. They simply mean there are fewer total vessels for the overall number of passengers. It has been observed that, with fewer boats reaching the shores on a crossing day, people who are expecting to travel try to force their way onto any dinghy that has been delivered and inflated. This had led to one person being crushed to death inside a dinghy as well as others being pushed out into the sea. It also means that the extremely overcrowded dinghies are failing close to the French shores, like in the case of 12 August 2023.
      2: Increased police violence

      Increased police violence on the French beaches is the most visible consequence of the new ‘Stop the Boats’ deal, and exacerbates the dangers of already overcrowded embarkations.

      In previous years, the fewer numbers of police patrolling the beaches were unable to deal with the large groups of people who gathered during a dinghy launch, and many times they chose to look on rather than intervene. They also had difficulties to cover the whole stretch of coastline between Belgium and Berck. Now with more aerial support, double the number of officers, and increased resources like dune buggies the police are more able to intervene at the moment of departure. Typically they will fire tear gas at the people to try and disperse them and then use knives to slice the dinghy. We have also been told about policing using ‘less-lethal’ grenades and wading into the sea to cut a dinghy as people try to board it and start the motor.

      The police’s presence and their attacks create panicked and dangerous situations in which dinghies launch before they are fully inflated and in which people have to scramble on board whilst in water up to their necks. During these moments people have drowned in the shallow water like on 8 October, and families have been separated like on 26 September 2023. The danger of the police attacks compounds that of overcrowding. It is now common to observe chaotic embarkations where more than 70 or even 80 people all try at once to get on an inflatable of just a few meters length while the police try to stop them. We have also been told that if the police do successfully destroy a dinghy as it launches the would-be travellers will look to get onboard another rather than give up, again increasing the risks of overcrowding.

      The British authorities have proudly acknowledged the increased violence, publicising a French police officer’s bodycam video where we see tear gas being used indiscriminately against a group of people which we know included those in a situation of vulnerability. In a statement celebrating the fact that two people shown in the video trying to hold the violence of the police at bay were arrested and jailed in the UK, the Home Office states:

      “Tension on French beaches is increasing due to the successful efforts of law enforcement in frustrating this organised criminal enterprise. Incidents like this highlight the complex and brave work of our French colleagues in the face of challenging conditions.”

      Despite the increased violence on the shore, for now, it still appears that the policy of the French is to not intervene to stop the boats once they are at sea and underway. This illustrates a clear contradiction between the apparent concern for safety of life while at sea, and creating extremely dangerous situations for people by attacking their dinghies as they launch.
      No borders, not ‘Stop the Boats’

      The hypocrisy of the French and British governments is that their increased border policing activities, which they sanctimoniously describe as protecting people who have to travel to the UK by boat, have only made their crossings more dangerous. Unfortunately it seems these policies will only continue over the coming years, evidenced by the three year funding agreement from March. We must then expect only more victim blaming and lies for each death in the coming years that will occur as a result. The people who continue to have to make this journey, denied access to the safe ferries and trains the rest of us are able to take, are being sacrificed for the sake of politicians’ electoral ambitions. What those politicians understand, but do not want to admit, is that it is impossible to ‘stop the boats’ so long as the border exists. Further militarisation and police intervention will only increase the number of people who die, as we have been seeing. How far the states will go in pursuing their policies of harm and death in the name of protecting their border remains to be seen. In the meantime we must continue doing all we can to not only present them the account of the consequences for their obstinance, but practically organise against it, together with those who already doing so.

      https://alarmphone.org/en/2024/01/28/the-deadly-consequences-of-the-new-deal-to-stop-the-boats
      #Alarmphone #Alarm_phone #bateaux #statistiques #chiffres

  • Vivre et lutter dans un monde toxique. #Violence_environnementale et #santé à l’âge du #pétrole

    Pour en finir avec les success stories pétrolières, voici une histoire des territoires sacrifiés à la transformation des #hydrocarbures. Elle éclaire, à partir de sources nouvelles, les #dégâts et les #luttes pour la santé au XXe siècle, du #Japon au #Canada, parmi les travailleurs et travailleuses des enclaves industrielles italiennes (#Tarento, #Sardaigne, #Sicile), auprès des pêcheurs et des paysans des « #Trente_Ravageuses » (la zone de #Fos / l’étang de# Berre, le bassin gazier de #Lacq), ou encore au sein des Premières Nations américaines et des minorités frappées par les #inégalités_environnementales en #Louisiane.
    Ces différents espaces nous racontent une histoire commune : celle de populations délégitimées, dont les plaintes sont systématiquement disqualifiées, car perçues comme non scientifiques. Cependant, elles sont parvenues à mobiliser et à produire des savoirs pour contester les stratégies entrepreneuriales menaçant leurs #lieux_de_vie. Ce livre expose ainsi la #tension_sociale qui règne entre défense des #milieux_de_vie et #profits économiques, entre santé et #emploi, entre logiques de subsistance et logiques de #pétrolisation.
    Un ouvrage d’une saisissante actualité à l’heure de la désindustrialisation des #territoires_pétroliers, des #conflits sur la #décarbonation des sociétés contemporaines, et alors que le désastre de #Lubrizol a réactivé les interrogations sur les effets sanitaires des dérivés pétroliers.

    https://www.seuil.com/ouvrage/vivre-et-lutter-dans-un-monde-toxique-collectif/9782021516081

    #peuples_autochtones #pollution #toxicité #livre

    • Ces territoires sacrifiés au pétrole

      La société du pétrole sur laquelle s’est bâtie notre prospérité ne s’est pas faite sans sacrifices. Gwenola Le Naour et Renaud Bécot, co-directeurs d’un ouvrage sur ce sujet, lèvent le voile sur les dégâts causés par cette « pétrolisation » du monde, en France et à l’étranger.

      Si le pétrole et ses produits ont permis l’émergence de notre mode de vie actuel, l’activité des raffineries et autres usines de la pétrochimie a abîmé les écosystèmes et les paysages et a des effets de long terme sur la santé humaine. Dans le livre qu’ils ont coordonné, Vivre et lutter dans un monde toxique (Seuil, septembre 2023), Gwénola Le Naour et Renaud Bécot lèvent le voile sur les dégâts causés par cette « pétrolisation » du monde, selon leurs propres mots. Ils ont réuni plusieurs études de cas dans des territoires en France et à l’étranger pour le démontrer. Un constat d’autant plus actuel que la société des hydrocarbures est loin d’être révolue : la consommation de pétrole a atteint un record absolu en 2023, avec plus de 100 millions de barils par jour en moyenne.

      À la base de votre ouvrage, il y a ce que vous appelez « la pétrolisation du monde ». Que recouvre ce terme ?
      Gwenola Le Naour1. Dans les années 1960, s’est développée l’idée que le pétrole était une énergie formidable, rendant possible la fabrication de produits tels que le plastique, les textiles synthétiques, les peintures, les cosmétiques, les pesticides, qui ont révolutionné nos modes de vie et décuplé les rendements agricoles. La pétrolisation désigne cette mutation de nos systèmes énergétiques pendant laquelle les hydrocarbures se sont imposés partout sur la planète et ont littéralement métamorphosé nos territoires physiques et mentaux.

      L’arrivée du pétrole et de ses dérivés nous est le plus souvent présentée comme une épopée, une success story. On a mis de côté la face sombre de cette pétrolisation, avec ses territoires sacrifiés comme Fos-sur-Mer, qui abrite depuis 1965 une immense raffinerie représentant aujourd’hui 10 % de la capacité de raffinage de l’Hexagone, ou Tarente, dans le sud de l’Italie, où se côtoient une raffinerie, une usine pétrochimique, un port commercial, une décharge industrielle et la plus grande aciérie d’Europe.

      Comment des territoires entiers ont-ils pu être ainsi abandonnés au pétrole ?
      Renaud Bécot2. L’industrie du pétrole et des hydrocarbures n’est pas une industrie comme les autres. Les sociétés pétrolières ont été largement accompagnées par les États. Comme pour le nucléaire, l’histoire de l’industrie pétrolière est étroitement liée à l’histoire des stratégies énergétiques des États et à la manière dont ils se représentent leur indépendance énergétique. L’État a soutenu activement ces installations destinées à produire de la croissance et des richesses. Pour autant, ces industries ne se sont pas implantées sans résistance, malgré les discours de « progrès » qui les accompagnaient.

      Des luttes ont donc eu lieu dès l’installation de ces complexes ?
      G. L. N. Dès le début, les populations locales, mais aussi certains élus, ont compris l’impact que ces complexes gigantesques allaient avoir sur leur environnement. Ces mobilisations ont échoué à Fos-sur-Mer ou au sud de Lyon, où l’installation de la raffinerie de Feyzin et de tout le complexe pétrochimique (le fameux « couloir de la chimie ») a fait disparaître les bras morts du Rhône et des terres agricoles... Quelques-unes ont cependant abouti : un autre projet de raffinerie, envisagé un temps dans le Beaujolais, a dû être abandonné. Il est en revanche plus difficile de lutter une fois que ces complexes sont installés, car l’implantation de ce type d’infrastructures est presque irréversible : le coût d’une dépollution en cas de fermeture est gigantesque et sans garantie de résultat

      Les habitants qui vivent à côté de ces installations finissent ainsi par s’en accommoder… En partie parce qu’ils n’ont pas d’autre choix, et aussi parce que les industriels se sont efforcés dès les années 1960-1970 et jusqu’à aujourd’hui de se conduire en « bons voisins ». Ils négocient leur présence en finançant par exemple des infrastructures culturelles et/ou sportives. Sans oublier l’éternel dilemme entre les emplois apportés par ces industries et les nuisances qu’elles génèrent. Dans le livre, nous avons qualifié ces arrangements à l’échelle des districts pétrochimiques de « compromis fordistes territorialisés ».

      Que recouvre ce terme de compromis ?
      R. B. En échange de l’accaparement de terres par l’industrie et du cortège de nuisances qui l’accompagne, les collectivités locales obtiennent des contreparties qui correspondent à une redistribution partielle des bénéfices de l’industrie. Cette redistribution peut être régulière (via la taxe professionnelle versée aux communes jusqu’en 2010, notamment), ou exceptionnelle, après un accident par exemple. Ainsi, en 1989, après une pollution spectaculaire qui marque les habitants vivant près de Lubrizol en Normandie, l’entreprise a versé 100 000 francs à la municipalité du Petit-Quevilly pour qu’elle plante quatre-vingts arbres dans la ville...

      Mais ce type de compromis a également été très favorable aux industries en leur offrant par exemple des allégements fiscaux de long terme, comme en Sicile près de Syracuse où se situe l’un des plus grands sites chimiques et pétrochimiques qui emploie plus de 7 000 personnes, voire une totale exonération fiscale comme en Louisiane, sur les rives du Mississippi. Des années 1950 aux années 1980, pas moins de 5 000 entreprises sur le sol américain – majoritairement pétrochimiques, pétrolières, métallurgiques ainsi que des sociétés gazières – ont demandé à bénéficier de ces exonérations, parmi lesquelles les sociétés les plus rentables du pays telles que DuPont, Shell Oil ou Exxon...

      Ces pratiques, qui se sont développées surtout lors des phases d’expansion de la pétrochimie, rendent plus difficile le retrait de ces industries polluantes. Les territoires continuent de penser qu’ils en tirent un bénéfice, même si cela est de moins en moins vrai.

      On entend souvent dire, concernant l’industrie pétrolière comme le nucléaire d’ailleurs, que les accidents sont rares et qu’on ne peut les utiliser pour remettre en cause toute une industrie… Est-ce vraiment le cas ?
      G. L. N. On se souvient des accidents de type explosions comme celle de la raffinerie de Feyzin, qui fit 18 morts en 1966, ou celle d’un stock de nitrates d’ammonium de l’usine d’engrais AZF à Toulouse en 2001, qui provoqua la mort de 31 personnes – car ils sont rares. Mais si l’on globalise sur toute la chaîne des hydrocarbures, les incidents et les accidents – y compris graves ou mortels pour les salariés – sont en réalité fréquents, même si on en entend rarement parler au-delà de la presse locale (fuites, explosions, incendies…). Sans oublier le cortège des nuisances liées au fonctionnement quotidien de ces industries, telles que la pollution de l’air ou de l’eau, et leurs conséquences sur la santé.

      Pour qualifier les méfaits des industries pétrochimiques, sur la santé notamment, vous parlez de « violence lente ». Pouvez-vous expliquer le choix de cette expression ?
      G. L. N. Cette expression, créée par l’auteur nord-américain Rob Nixon, caractérise une violence graduelle, disséminée dans le temps, caractéristique de l’économie fossile. Cette violence est également inégalitaire car elle touche prioritairement des populations déjà vulnérables : je pense notamment aux populations noires américaines de Louisiane dont les générations précédentes étaient esclaves dans les plantations…

      Au-delà de cet exemple particulièrement frappant, il est fréquent que ces industries s’installent près de zones populaires ou touchées par la précarité. On a tendance à dire que nous respirons tous le même air pollué, or ce n’est pas vrai. Certains respirent un air plus pollué que d’autres. Et ceux qui habitent sur les territoires dévolus aux hydrocarbures ont une qualité de vie bien inférieure à ceux qui sont épargnés par la présence de ces industries.

      Depuis quand la nocivité de ces industries est-elle documentée ?
      G. L. N. Longtemps, les seules mesures de toxicité dont on a disposé étaient produites par les industriels eux-mêmes, sur la base des seuils fixés par la réglementation. Pourtant, de l’aveu même de ceux qui la pratiquent, la toxicologie est une science très imparfaite : les effets cocktails ne sont pas recherchés par la toxicologie réglementaire, pas plus que ceux des expositions répétées à faibles doses sur le temps long. De plus, fixer des seuils est à double tranchant : on peut invoquer les analyses toxicologiques pour protéger les populations, l’environnement, ou les utiliser pour continuer à produire et à exposer les gens, les animaux, la nature à ces matières dangereuses. Ainsi, ces seuils peuvent être alternativement présentés comme des seuils de toxicité, ou comme des seuils de tolérance… Ce faisant, la toxicologie produit de l’imperceptibilité.

      R. B. Des études alternatives ont cependant commencé à émerger, avec des méthodologies originales. Au Canada, sur les territoires des Premières Nations en Ontario, au Saskatchewan précisément, une étude participative a été menée au cours de la décennie 2010 grâce à un partenariat inédit entre un collectif de journalistes d’investigation et un groupe de chercheurs. En distribuant très largement des kits de mesure, peu coûteux et faciles d’utilisation, elle a permis de démontrer que les populations étaient exposées aux sulfures d’hydrogène, un gaz toxique qui pénètre par les voies respiratoires. Grâce à cette démarche participative, des changements de règlementation et une meilleure surveillance des pollutions ont été obtenus. Il s’agit d’une réelle victoire qui change la vie des gens, même si l’industrie n’a pas été déplacée.

      Qu’en est-il des effets sur la santé de tous ces polluants ? Sont-ils documentés ?
      G. L. N. En France, les seuls travaux menés à ce jour l’ont été autour du gisement de gaz naturel de Lacq, exploité de 1957 à 2013 dans les Pyrénées. Une première étude, conduite en 2002 par l’université, concluait à un surrisque de cancer. Deux autres études ont été lancées plus récemment : une étude de mortalité dévoilée en 2021, qui montre une plus forte prévalence des décès par cancer, et une étude de morbidité toujours en cours. À Fos-sur-Mer, l’étude « Fos Epseal », conduite entre 2015 et 20223, s’est basée sur les problèmes de santé déclarés par les habitants. Ses résultats révèlent que près des deux-tiers des habitants souffrent d’au moins une maladie chronique – asthme, diabète –, ainsi que d’un syndrome nez-gorge irrités toute l’année qui n’avait jamais été identifié jusque-là.

      R. B. Ce que soulignent les collectifs qui évoquent des problèmes de santé liés à l’industrie pétrochimique – maladies chroniques de la sphère ORL, diabètes, cancers, notamment pédiatriques, etc. –, c’est la difficulté de prouver un lien de corrélation entre ces maladies et telle ou telle exposition toxique.

      L’épidémiologie conventionnelle ne le permet pas, en tout cas, car elle travaille à des échelles larges, sur de grands nombres, et est mal adaptée à un déploiement sur de plus petits territoires. C’est pourquoi les collectifs militants et les scientifiques qui travaillent avec eux doivent faire preuve d’inventivité, en faisant parfois appel aux sciences humaines et sociales, avec des sociologues qui vont recueillir des témoignages et trajectoires d’exposition, des historiens qui vont documenter l’histoire des lieux de production…

      Cela suppose aussi la mise au point de technologies, d’outils qui permettent de mesurer comment et quand les gens sont exposés. Cela nécessite enfin une coopération de longue haleine entre chercheurs de plusieurs disciplines, militants et populations. Car l’objectif est d’établir de nouveaux protocoles pour mieux documenter les atteintes à la santé et à l’environnement avec la participation active de celles et ceux qui vivent ces expositions dans leurs chairs.

      https://lejournal.cnrs.fr/articles/ces-territoires-sacrifies-au-petrole

  • Des lycées privés, sauf de subventions :-D :-D :-D

    Financer l’#école des #rupins : comment ça marche ? Facile, on redistribue. On prend aux #pauvres pour donner aux écoles des #riches.

    « #Enseignement_privé : des #cadeaux qui se chiffrent en millions d’euros

    Et si Amélie #Oudéa_Castéra avait permis de mettre à jour le système opaque de #subventions des établissements privés sous contrat ? Le prestigieux établissement privé #Stanislas ne serait-il que l’arbre qui cache la forêt ? Alors que les collectivités sont tenues de contribuer aux frais de fonctionnement des établissements privés sous contrat, beaucoup d’entre elles font le choix de donner encore plus. C’est le cas de la région d’Île-de-France qui allouera pas moins de 9 000 000 d’euros supplémentaires à l’enseignement privé sous contrat, en plus des financements obligatoires. En Seine-et-Marne, c’est tout bonnement la création d’un collège que contribuera à financer le département. Un collège en partenariat avec ... Stanislas. (...) »

    https://www.legrandsoir.info/financer-l-ecole-des-rupins-comment-ca-marche-facile-on-redistribue-on

  • La #nouvelle du jeudi 20:42
    https://framablog.org/2024/01/25/la-nouvelle-du-jeudi-2042

    Chaque jour de cette semaine, à 20:42, une nouvelle de 2042 concoctée avec amour par les participant⋅es des ateliers #solarpunk #UPLOAD de l’Université Technologique de #Compiègne (UTC). Aujourd’hui, sous le regard étonné des enfants de 2042, une exposition sur Compiègne … Lire la suite­­

    #Communs_culturels #Enjeux_du_numérique #UPLOAD #atelier #Democratie #écriture #indices #LowTech #oligarchie #PIB #Politique #représentation #RIP #Sante #soin #Solarpunk #UTC #Voitures

  • « Donc, laissons mon plan en ombre portée et floue, et, puisqu’elles en veulent absolument, ressortons celui du bateau.
    C’est un gigantesque bateau, où je vais embarquer le plus de monde possible ; je prendrai soin de sauter à terre au moment du lancement, et lorsque le bateau, après avoir bourlingué quelques jours à travers des étendues saumâtres, reviendra s’échouer piteusement à son point de départ, moi je serai là sur le rivage, à rigoler. »

    Elle invente un scénario d’évasion improbable puis écrit :

    « J’ai un peu de remords.
    Parce que tout cela, je sais bien que je l’ai inventé, inventé pour éclairer mon sourire.
    Mais ainsi, on a quelque chose à chuchoter pendant la balade. »

    La Cavale Partie I Chapitre IX

    #rêve #évasion #cavale #invention #scénario #rire #

  • Bernard Werber : « ChatGPT écrit mieux que moi »
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-biais-de-bernard-werber/bernard-werber-chatgpt-ecrit-mieux-que-moi-1718438

    L’écrivaine Rie Kudan, lauréate du prestigieux prix Akutagawa au Japon, a révélé que 5 % de son #roman avait été rédigé par l’outil d’intelligence artificielle ChatGPT. L’occasion pour Bernard Werber de tester les capacités d’écriture de #ChatGPT.

    La semaine dernière, un coup de tonnerre a retenti dans le monde très feutré de #l’édition. Ce coup de tonnerre est venu de l’est, du Japon pour être précis puisque le 18 janvier 2024, l’écrivaine #Rie_Kudan a reçu le prix Akutagawa, le prix littéraire japonais le plus prestigieux, correspondant à notre prix Goncourt.

    Or, durant sa conférence de presse, Rie Kudan a révélé que 5 % de son roman avait été rédigé par le programme d’intelligence artificielle ChatGPT.

    Son roman a pour nom Tokyo-to Dojo-to qui pourrait se traduire par La tour de la compassion de Tokyo. L’intrigue de style science-fiction se déroule dans une tour transformée en prison. La romancière de 33 ans a expliqué qu’elle « espère pouvoir continuer à utiliser ChatGPT pour écrire ses prochains romans tout en continuant de développer sa propre créativité ».

    Des romans utilisés pour nourrir les algorithmes de ChatGPT

    Depuis que le programme ChatGPT est sorti, c’est-à-dire le 30 novembre 2022, les plateformes d’autoédition voient fleurir des milliers de romans partiellement ou même entièrement écrit par intelligence artificielle. Au point ou un collectif de 17 auteurs américains a lancé une action collective en justice contre OpenAI. Et parmi ces auteurs, il y a notamment John Grisham, George Saunders ou Michael Connelly.

    Selon eux, leurs œuvres ont été utilisées pour nourrir les algorithmes de ChatGPT, ce qui a permis ensuite au logiciel de faire des romans qui sont des pures copies de leurs œuvres. Or à aucun moment, ils n’ont autorisé cet emprunt et à aucun moment, ils n’ont été rémunérés pour ça.

    « Il est impératif que nous arrêtions ce vol, sinon nous détruirons notre culture littéraire qui nourrit de nombreuses autres industries créatives aux États-Unis » a déclaré Mary Rasenberger, la dirigeante de la prestigieuse Authors Guild américaine.

    Plus de 10 000 auteurs américains ont de même signé une pétition pour réclamer à OpenAI une demande de consentement et une rémunération. Ce combat juridique risque d’être long avant d’aboutir.

    Entre temps, le phénomène prend de plus en plus d’ampleur. Déjà en juillet, les fans de Game of Thrones qui en avaient assez d’attendre que George R. R. Martin publie la suite de sa célèbre saga ont mis en ligne des versions générées par l’ordinateur qui ont beaucoup de succès.

    ChatGPT remplace la fadeur de l’histoire par l’épaisseur de la sauce

    Après avoir publié Le Temps des chimères l’année dernière, j’ai demandé à ChatGPT d’écrire à la manière de Bernard Werber un premier chapitre sur le même thème, c’est-à-dire un futur avec trois communautés d’hybrides, hommes, animaux capables de voler, nager et creuser sous terre.

    En quelques secondes, le texte est sorti.

    Eh bien en toute honnêteté, je dois avouer que c’était mieux écrit que ce que j’avais rédigé pour mon roman. Des phrases plus longues. Du vocabulaire plus riche. Des tournures compliquées avec beaucoup de style. Je pense que ChatGPT a cru que je voulais un prix littéraire.

    En fait, cela m’a permis de comprendre encore mieux ma spécificité d’auteur. Je privilégie la complexité de l’histoire sur la complexité de la forme. Ce que me proposait ChatGPT, c’est comme un plat en sauce, ou l’on remplace la banalité ou la fadeur de l’histoire par l’épaisseur de la sauce.

    ChatGPT incite à être plus créatif

    Je ne pense pas que chat GPT puisse inventer une intrigue complexe originale, elle ne peut que copier celle qui existe déjà. Mais justement, c’est en ça que ce phénomène est intéressant. Cela va obliger les écrivains à devenir encore plus créatifs, encore plus originaux et probablement à prendre de plus en plus de risques pour sortir des chemins battus. Et pour conclure, je citerai Bob Dylan.

    « La créativité vient de l’expérience, de l’observation et de l’imagination et si l’un de ces éléments manque, cela ne fonctionne pas ».

    • Argumentationshilfen

      Die hier zusammengetragenen Broschüren und Artikel liefern Fakten und Argumentationshilfen, um Vorurteilen gegen Geflüchteten zu begegnen.

      (Hintergrund)Informationen

      Die Broschüre pro menschenrechte. contra vorurteile. Fakten und Argumente zur Debatte über Flüchtlinge in Deutschland und Europa von der Amadeu Antonio Stiftung und Pro Asyl enthält wichtige Fakten, nützliches Wissen und Argumente gegen Ahnungslosigkeit, Vorurteile, Hetze und aufkeimenden Rassismus und für eine sachliche Diskussion zum Thema Asyl und Geflüchtete.

      Der Artikel Argumentationshilfen und Argumentationsstrategien ist Zusammenstellung von Argumentationshilfen und Argumentationsstrategien der ver.di-Jugend und bietet einen kurzen Überblick und Antwort auf die Frage ’Wie argumentiere ich wirksam gegen Vorurteile und Stammtischparolen?’

      Lehrmaterialien

      bpb-Reihe „Was sage ich, wenn …“ - Die Filme, Flyer und Wandzeitungen der Reihe „Was sage ich, wenn...“ der Bundeszentrale für politische Bildung zu den Themen „Rassismus begegnen“, „Homophobie begegnen“, „Islamfeindlichkeit begegnen“, „Sexismus begegnen“, „Antiziganismus begegnen“ und „Antisemitismus begegnen“ bieten eine Hilfestellung für den Alltag, im Privat- oder Berufsleben, in Unternehmen oder Verein. Mit Illustrationen wird erläutert, was Rassismus, Antisemitismus, Sexismus etc. bedeutet. Anhand von Beispielen werden Handlungsempfehlungen gegeben, mögliche Entgegnungen und Reaktionen auf Vorurteile aufgezeigt.

      Die Unterrichtseinheit Stimmungsmache gegen Flüchtlinge der Politologin Anja Joest zielt darauf ab, dass Schüler:innen sich kritisch mit der Entstehung, der Funktion und den Folgen von Gerüchten im Zusammenhang mit der Flüchtlingsdebatte auseinandersetzen. Die Unterrichtseinheit ist weitgehend so angelegt, dass sich Schüler:innen das Thema selbstständig erarbeiten. Zu dem Konzept für sechs Schulstunden im Fach Sozialwissenschaft bzw. Politik in der Sekundarstufe I stehen vielfältige Arbeitsmaterialien zum freien Download zur Verfügung.

      Der Flyer Rassismus begegnen. Praktische Hilfestellung für Demokratiearbeit vor Ort der Bundeszentrale für politische Bildung ist eine Hilfestellung für den Alltag, im Privat- oder Berufsleben, für Unternehmen oder Vereine. Neben der Erläuterung des Rassismusbegriffs werden anhand von Beispielen (Diskussion beim Elternabend, Beschimpfungen während eines Fußballspiels etc.) Handlungsempfehlungen gegeben sowie mögliche Entgegnungen und Reaktionen auf rassistische Vorurteile aufgezeigt.

      Argumentationsstrategien gegen Rassismus, Rechtsextremismus und –populismus

      In der Broschüre ‚Das wird man ja wohl noch sagen dürfen . . .!’ Zur Auseinandersetzung mit rechtspopulistischen Argumentationsweisen werden die Unterschiede zwischen Rechtsextremismus und -populismus dargestellt und die Strategien der Rechtspopulisten beschrieben. Anschließend werden Hintergrundinformationen zur Verfügung gestellt, die bei der Dekonstruktion von Sätzen wie „Das wird man ja wohl noch sagen dürfen!“ helfen sollen. Die Beiträge liefern dabei zum Einen Fakten und differenzierte Analysen zur inhaltlichen Widerlegung von Thesen (z. B. zu Kriminalität, Globalisierung oder der Entscheidung für ein Kopftuch), zum Anderen geht es explizit um das Aufdecken rechtspopulistischer Methoden.

      Der Zeitungsbericht Vorurteile gegen Asylbewerbern – So argumentieren Sie gegen rechte Hetze von Alexandra Ringendahl, veröffentlicht am 16. August 2015 in der Mitteldeutschen Zeitung, gibt knappe Antworten auf und Argumente gegen rechte Behauptungen bzw. rassistische Posts im Internet.

      Die Expertise Argumente gegen rechte Sprüche von Michael Hammerbacher aus der Reihe Standpunkte.Erziehung für Demokratie – Gegen Rechtsextremismus stellt häufig verwendeten rechten Behauptungen und Thesen, eine Auswahl an Gegenargumenten entgegen. Der Text richtet sich dabei insbesondere an Lehrer:innen und thematisiert Gespräche und Äußerungen im Schulkontext, ist jedoch für jegliche Gesprächssituation bzw. Auseinandersetzung mit rassistischen und rechtsextremistischen Parolen zu gebrauchen.

      Die Handreichung Streiten mit Neonazis? Zum Umgang mit öffentlichen Auftritten von Rechtsextremisten zum Umgang mit öffentlichen Auftritten von Rechtsextremisten, die der Verein Miteinander e. V. gemeinsam mit seinem Teilprojekt, der Arbeitsstelle Rechtsextremismus in Sachsen-Anhalt, herausgegeben hat, gibt Antworten auf diese Fragen und stellt klar: Neonazis sind keine Dialogpartner demokratischer Institutionen, Vereine und Parteien. Die Publikation geht auf Strategien und Inhalte der extremen Rechten ein und zeigt Handlungsoptionen auf. Eine Checkliste für das Gelingen von Veranstaltungen sowie Literatur und Adressen runden die Broschüre ab.

      Handreichung Wi(e)dersprechen. Über die Auseinandersetzung mit der Alternative für Deutschland und die Notwendigkeit, über Demokratie zu sprechen - Die Mobile Beratung gegen Rechtsextremismus Berlin (MBR) hat gemeinsam mit dem Verein für Demokratische Kultur in Berlin e.V. (VDK) eine erste Handreichung zum Umgang mit der Alternative für Deutschland (AfD) veröffentlicht. Die MBR reagiert damit auf die stetig steigende Anzahl von Beratungsanfragen aus Politik und Zivilgesellschaft. Der Fokus liegt dabei weniger auf der Partei als solche, sondern viel mehr auf der Auseinandersetzung mit der Stimmung im Land und den teils rechtspopulistischen Forderungen der AfD.

      Die Broschüre Was können Sie sagen...? – Argumente gegen antimuslimischen Rassismus und rechtspopulistische Parolen der [moskito] Netzwerkstelle gegen Rechtsextremismus – für Demokratie und Vielfalt und dem Zentrum für Demokratie Treptow-Köpenick setzt sich vorrangig mit den Inhalten von Rechtspopulist:innen auseinander und stellt Vorurteilen, antimuslimischen und rechten Parolen Gegenargumente und ‑strategien entgegen. Hintergrundinformationen zu Antimuslimischem Rassismus sowie zu den Themen „Wohlstandschauvinismus“ und „Kritik an bestehender Demokratie“ stellen weitere Argumentationsgrundlagen zur Verfügung. Ziel der Broschüre ist es, Bürger:innen zu befähigen gängigen Vorurteilen entgegenzutreten.

      Übersicht Rechtspopulistischen Gesprächsstrategien – und wie wir damit umgehen - Es gibt eine ganze Reihe rechtspopulistische Gesprächsstrategien, deren Ziel es ist, einen vernünftigen und sachlichen Austausch zu Themen wie Geflüchtete, Rechtsextremismus oder Minderheitenschutz unmöglich machen. Simone Rafael vom Netz gegen Nazis hat online eine Übersicht zu ’Rechtspopulistischen Gesprächsstrategien – und wie wir damit umgehen’ zusammengestellt und Gegenstrategien für Diskussionen entwickelt.

      Die Wandzeitung Rassismus begegnen. Eine Hilfestellung für den Alltag, im Privat- oder Berufsleben, Unternehmen oder Verein der Bundeszentrale für politische Bildung ist eine Hilfestellung für den Alltag, im Privat- oder Berufsleben, für Unternehmen oder Vereine. Mithilfe von Illustrationen wird erläutert, was Rassismus bedeutet. Anhand von Beispielen werden Handlungsempfehlungen gegeben und mögliche Entgegnungen und Reaktionen auf rassistische Vorurteile aufgezeigt. Die Wandzeitung eignet sich ideal für das Büro, Vereinsheim oder den Besprechungsraum.

      Vorurteilen und Hass gegenüber Geflüchteten im Beruf begegenen

      Der Faktencheck „Ich habe nichts gegen Flüchtlinge, aber…“ der Bundeszentrale für politische Bildung prüft und entkräftigt Argumente, die bei Protesten gegen die Einrichtung von Gelüchtetenunterkünften immer wieder genannt werden.

      Die Broschüre Vorurteile im Betrieb. Weniger Sprachlosigkeit, mehr Argumente für ein gutes Betriebsklima von Sarah Gerwing, Salah Isayyied, Stefan Petke, Maria Ringler, Hiltrud Stöcker-Zafari des RKW Rationalisierungs- und Innovationszentrum der Deutschen Wirtschaft e. V. soll Personalverantwortliche dabei unterstützen, die Akzeptanz und Integration zugewanderter Mitarbeiter:innen voranzubringen. Dabei gibt es viele Möglichkeiten auf Vorurteile und ausgrenzende Kommentare zu reagieren. Die Autor:innen stellen zu diesem Zweck rhetorische Mittel, Argumente, Gestaltungsmöglichkeiten sowie Hintergrundwissen zusammen.

      Die vom Kumpelverein Broschüre Flüchtlinge schützen, Rassismus entgegentreten – Handreichung für Aktive in der Arbeitswelt veranschaulicht konkrete Handlungsmöglichkeiten, die sich in Betrieben und Verwaltungen bieten, um Diskriminierungen und Fremdenfeindlichkeit entgegenzuwirken. Diesbezüglich werden der rechtliche Rahmen der Arbeitsmarktintegration von Geflüchteten, die Möglichkeiten des Betriebsrats und die Einflusskanäle der Gewerkschaft erläutert. Darüber hinaus liefert die Broschüre Analysen und Informationen zu den aktuellen Mobilsierungen am rechten Rand. Die Entwicklung von Pegida und der Alternative für Deutschland (AfD) sowie die inhaltliche Entkräftung ihrer rassistischen Thesen werden thematisiert. Die Broschüre eignet sich für die betriebliche und gewerkschaftliche Antirassismus- und Bildungsarbeit.

      Umgang mit Vorurteilen und Hass gegenüber Geflüchteten

      Artikel Die schlimmsten Totschlagargumente in der Flüchtlingsdebatte - Um herausfordernden Argumenten und Parolen in der Flüchtlingsdebatte begegnen und Argumente von Flüchtlingsgegnern auseinandernehmen zu können, hat die Autorin Verena Bogner des Magazins Vice die schlimmsten Totschlagargumente in der Flüchtlingsdebatte gesammelt, analysiert und ihnen Fakten und Gegenargumente gegenüber gestellt.

      Broschüre Hetze gegen Flüchtlinge in Sozialen Medien - Seit vermehrt Geflüchtete im deutschsprachigen Raum Schutz vor Krieg und Verfolgung suchen, explodieren die sozialen Netzwerke. Alle und jede haben eine Meinung, eine Warnung, Sorgen, sehr viel Hass und noch mehr Wut. In vielen Formen treffen Benutzer:innen auf explizit rassistische und flüchtlingsfeindliche Aussagen und Kommentare, oder beteiligen sich aktiv selbst daran. Die Broschüre der Amadeu Antonio Stiftung will Handlungsempfehlungen ausloten, rassistischer Hetze entgegenzutreten. Neben vielfältigen Reaktionsmöglichkeiten (Löschen, Blocken, Ignorieren, Diskutieren, Gegenrede, Strafverfolgung) wird auch das Thema Selbstschutz in den Fokus genommen.

      Die Broschüre Gegenhalten – Flüchtlinge Willkommen – immer noch! Mythen und Fakten zur Migrations- und Flüchtlingspolitik (3. Auflage) der Rosa Luxemburg Stiftung will einer Politik der Migrationsabwehr und Anti-Integration etwas entgegensetzen und stellt von deutschen Politiker:innen geäußerten Mythen Fakten und fundierte Argumente gegenüber. So liefert die Handreichung einen Gegenentwurf für ein offeneres Deutschland und Europa.

      Der Artikel Gewerkschaften und Flüchtlinge: Argumente für eine solidarische Flüchtlingspolitik des DGB Nord enthält neben Argumenten für eine solidarische Flüchtlingspolitik im Anhang eine Übersicht über Positionen und Aktivitäten der DGB-Gewerkschaften.

      https://www.idaev.de/themen/flucht-asyl/ehrenamtliche/argumentationshilfen

      #argumentation

  • #Grain_à_moudre

    « L’#uniforme et l’#École : sortir des faux-semblants » - Fondation Res Publica
    https://fondation-res-publica.org/2024/01/18/luniforme-et-lecole-sortir-des-faux-semblants

    Extraits d’une note pro-uniforme publiée sur le site du laboratoire d’idées Fondation Res Publica.

    1/ Si l’École a perdu de son lustre, c’est aussi parce qu’elle a accepté de le perdre, au prix d’une normalisation de l’institution alors conçue comme continuation du foyer, un appendice diminué de l’#autorité_parentale, faisant du professeur un animateur. […] Une des solutions de la ré-institutionnalisation de l’École passe donc par le rehaussement des symboles qui la caractérisent. […] L’uniforme participerait donc à ce rôle de #ritualisation de la République, d’ancrage de cette dernière dans les esprits.[…] Il serait de nature à dissocier clairement l’École du reste de la vie du pays.

    2/ […] Au-delà de l’importance de faire renaître les #symboles qui démarquent l’École, l’uniforme peut aussi contribuer à rappeler l’idéal républicain d’égalité et tempérer le sacre de l’individu. […] Opter pour l’uniforme, c’est privilégier l’#égalité nationale et républicaine sur un conformisme marchand et individualiste.

    3/ Mais l’uniforme est aussi une barrière face aux polémiques et dérives communautaires qui prennent pour cible l’École. En effet, l’institution, parce que centrale, est devenue le lieu de mise en scène des provocations des divers groupes religieux et idéologiques. […] Un règlement strict et uniforme éviterait d’abandonner le corps enseignant face à ses responsabilités et permettrait d’assumer une position ferme. L’uniforme évite en effet l’application de règlements intérieurs différenciés, dont les largesses d’interprétation peuvent donner un arrière-goût d’arbitraire.

    4/ […] Le port de l’uniforme est aussi un rappel de la #discipline attendue dans l’enceinte de l’École. […] L’action conjuguée de la philosophie post-moderne, de la sociologie bourdieusienne et de la nouvelle pédagogie des années 1970 va alors délégitimer le rôle de l’École et la place de la discipline dans son fonctionnement. Le port de l’uniforme aurait ainsi pour vertu de rappeler, sans être néanmoins suffisant, que l’école est le lieu de l’apprentissage, ce qui sous-tend nécessairement le respect de l’autorité.

    5/ Indéniablement, le coût de l’uniforme est amené à peser sur les finances publiques alors que son apport est difficilement mesurable à l’aune des seuls indicateurs de performance. En effet, afin de satisfaire au principe d’égalité des citoyens devant la loi, son coût devra être pris en charge par l’État. Il est néanmoins possible, selon le principe d’#équité, de laisser un reste à charge plus ou moins important aux ménages selon leur revenu fiscal de référence. […]

    6/ Pour autant il ne faut pas se leurrer, l’uniforme n’est nullement une solution miracle aux problèmes rencontrés par l’École. Si les points soulevés précédemment sont d’une importance capitale, d’autres peut-être plus importants encore resteront en suspens. Contrairement, ainsi, à ce qui est souvent invoqué, l’uniforme ne représente nullement une réponse face au #harcèlement, qui se déportera sur d’autres marqueurs que l’accoutrement. Il en va de même pour la question de la #performance_scolaire. Il n’est aussi évidemment pas une solution face à la revalorisation nécessaire du traitement des professeurs dont la perte de pouvoir d’achat relative est massive avec la désindexation du point d’indice. Enfin, l’uniforme ne prend son sens pour restaurer l’autorité, la discipline et l’égalité que si d’autres mesures effectives sont mises en œuvre, à commencer par la mise à l’arrêt de l’intrusion des #parents_d’élèves dans les écoles à d’autres fins que celles de les responsabiliser vis-à-vis du respect des règles communes.

    C’est donc faire un faux procès à l’uniforme que de le rendre incapable de répondre à ces maux, il ne peut le prétendre. Ceux qui l’invoquent alors à tout-va ne font que trahir leur méconnaissance du sujet, ou bien leur manque cruel d’inspiration. Le poids des symboles, aujourd’hui souvent ignoré, reste néanmoins significatif : l’imaginaire collectif en est imprégné. Il importe alors de réinstituer l’école dans la psyché commune et l’uniforme peut, à ce titre, être une voie.

    #Bourdieu #Foucault #finances_publiques

  • Le fils de la ministre Oudéa-Castéra a bénéficié d’un système de contournement de Parcoursup à Stanislas | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/200124/le-fils-de-la-ministre-oudea-castera-beneficie-d-un-systeme-de-contourneme

    Les inspecteurs ont ainsi bondi devant des chiffres tirés de la base nationale 2023 de Pacoursup : au printemps dernier, sur les 41 lycéens en France qui ont pris le risque étonnant de formuler un vœu unique pour une prépa du lycée qu’ils fréquentaient déjà, 38 étaient en Terminale à « Stan »… Aux yeux des inspecteurs généraux, cette bizarrerie statistique atteste du caractère « très isolé » des pratiques ayant cours dans ce fleuron de l’enseignement catholique de la capitale.

    Le rapport ne livre aucun nom d’élève. Mais d’après nos informations, parmi ces 38 candidat·es de 2023, se trouvait le fils aîné d’Amélie Oudéa-Castéra, alors excellent élément de Terminale – il a entre-temps obtenu une mention très bien au Bac –, scolarisé dans la « maison » depuis sa moyenne section de maternelle. Sur Parcoursup, au printemps dernier, il a indiqué comme seul vœu d’être intégré dans une prépa HEC (aussi dite ECG) à « Stan ».

    Il a formulé précisément quatre « sous-voeux », avec ou sans internat, avec l’option éco (ESH) ou histoire (HGG). Rien d’autre, en dehors de Stanislas. Une stratégie risquée pour le commun des mortels, mais lui a bien été sélectionné, parmi plus de 2 000 candidatures enregistrées.

  • Royaume-Uni : le premier ministre, #Rishi_Sunak, parvient à faire voter le projet de loi visant à expulser des migrants vers le #Rwanda

    La Chambre des communes a approuvé le texte soutenu par le premier ministre conservateur, qui a réussi à surmonter une tentative de fronde au sein de sa majorité.

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    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/18/royaume-uni-le-premier-ministre-rishi-sunak-parvient-a-faire-voter-le-projet

    Le premier ministre britannique, Rishi Sunak, a franchi une étape cruciale pour sa survie politique. Après deux jours sous haute tension au palais de Westminster avec des débats houleux, des tractations à huis clos et des démissions retentissantes, les députés ont adopté, mercredi 17 janvier au soir, le projet de loi controversé sur l’expulsion de migrants vers le Rwanda. Avec le retour dans le rang des dissidents, le texte a été approuvé en troisième lecture à la Chambre des communes par 320 votes pour et 276 contre.

    Chef d’une majorité largement devancée dans les sondages par les travaillistes en ce début d’année électorale, Rishi Sunak a mis tout son poids dans la balance pour faire aboutir ce projet censé montrer sa fermeté sur une préoccupation majeure de sa base électorale, mais qui aura exposé à vif les divisions de sa majorité, les modérés redoutant une atteinte au droit international et les plus à droite voulant aller plus loin.

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    Ce texte vise à répondre aux objections de la Cour suprême britannique, qui a jugé le projet illégal dans sa version précédente par crainte notamment pour la sécurité des demandeurs d’asile expulsés envoyés au Rwanda. Selon le projet, ces derniers, d’où qu’ils viennent, verraient leur dossier examiné au Rwanda et ne pourraient ensuite en aucun cas retourner au Royaume-Uni, ne pouvant obtenir l’asile que dans le pays africain.
    Démission de deux vice-présidents des tories

    Lors de son examen, des dizaines de députés conservateurs ont soutenu, en vain, des amendements visant à durcir le texte, tentant notamment de limiter le droit des migrants à faire appel de leur expulsion. La tension est également montée d’un cran après la démission, mardi, de deux vice-présidents des tories, partisans d’une ligne plus dure, qui ont reçu le soutien de l’ancien premier ministre Boris Johnson.

    Annoncé en avril 2022 par ce dernier, ce projet visait à décourager l’afflux de migrants dans des petites embarcations à travers la Manche : près de 30 000 en 2023 après un sommet de 45 000 en 2022.

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    Ce week-end, cinq migrants sont morts alors qu’ils tentaient de rejoindre une embarcation dans une eau glaciale. Mercredi matin, d’autres bateaux ont été vus en train de tenter cette traversée périlleuse, a constaté un photographe de l’Agence France-Presse. Le texte n’a jusque-là jamais pu être mis en œuvre. Un premier avion a été bloqué in extremis par une décision de la justice européenne, puis la justice britannique avait, jusqu’à la Cour suprême, déclaré le projet illégal dans sa version initiale.
    Nouveau traité avec le Rwanda

    Pour tenter de sauver son texte, vivement critiqué par les associations humanitaires, le gouvernement a signé un nouveau traité avec Kigali. Il est adossé à ce nouveau projet de loi qui définit le Rwanda comme un pays tiers sûr et empêche le renvoi des migrants vers leurs pays d’origine. Il propose également de ne pas appliquer aux expulsions certaines dispositions de la loi britannique sur les droits humains, pour limiter les recours en justice. Le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies a estimé, mercredi, que la dernière version du projet n’était « pas compatible » avec le droit international.

    Un peu plus d’un an après son entrée à Downing Street, M. Sunak compte bien sur le succès de ce projet pour montrer qu’il est capable de tenir l’une de ses promesses-phares : celle de mettre fin à l’arrivée des bateaux de migrants sur les côtes britanniques.

    Son projet de loi devra désormais être approuvé par les membres non élus de la Chambre des lords, qui pourraient fort bien l’amender. Et s’il est adopté à temps avant les législatives, prévues en l’état à l’automne, le Labour, mené par Keir Starmer, a promis de l’abroger s’il arrive au pouvoir après quatorze ans dans l’opposition.

    Un durcissement trop important pourrait par ailleurs fragiliser le partenariat avec le Rwanda, qui a déjà reçu près de 240 millions de livres (280 millions d’euros) de la part du Royaume-Uni. « Cet argent ne sera utilisé que si les [migrants] viennent. Si ce n’est pas le cas, nous pourrons le rendre », a assuré le président rwandais, Paul Kagame, interrogé mercredi au Forum économique mondial à Davos, en Suisse.

    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/01/18/royaume-uni-le-premier-ministre-rishi-sunak-parvient-a-faire-voter-le-projet

    #UK #Angleterre #asile #migrations #réfugiés #externalisation #offshore_asylum_processing

    –-

    ajouté à la métaliste sur la mise en place de l’#externalisation des #procédures_d'asile au #Rwanda par l’#Angleterre (2022) :
    https://seenthis.net/messages/966443

    elle-même ajouté à la métaliste sur les tentatives de différentes pays européens d’#externalisation non seulement des contrôles frontaliers (https://seenthis.net/messages/731749), mais aussi de la #procédure_d'asile dans des #pays_tiers :
    https://seenthis.net/messages/900122

  • Inégalités mondiales : pour les riches, la norme d’abondance

    Dans son rapport annuel, publié ce lundi 14 janvier, jour de l’ouverture du Forum de Davos, l’ONG Oxfam dénonce l’extrême concentration de la richesse depuis 2020 et le pouvoir des multinationales, alors qu’une large partie de la population mondiale souffre de l’inflation.

    La France n’a plus de Première ministre, mais elle a « gagné » une « pionnière » d’un tout autre genre. En effet, la première femme à avoir vu sa fortune dépasser les 100 milliards de dollars (91 milliards d’euros) est française, il s’agit de Françoise Bettencourt Meyers, l’héritière du fondateur de L’Oréal, selon l’indice Bloomberg des milliardaires de fin décembre (elle est repassée depuis sous cette barre symbolique). Pour autant, dans cette coterie-là non plus, les inégalités entre les hommes et les femmes ne sont pas près de disparaître. Bernard Arnault, le fondateur de LVMH, qui figure dans le trio des plus riches du monde, détient une fortune bien plus importante que sa compatriote, estimée aujourd’hui à 162 milliards de dollars par le même indice.

    Pendant qu’une grande partie de la population se débattait avec l’inflation, ces deux-là comme les 40 autres milliardaires français, se sont considérablement enrichis. Ils ont gagné, en cumulé, 230 milliards de dollars ces trois dernières années, calcule l’ONG Oxfam, en s’appuyant sur les données du magazine américain Forbes. Au total leur fortune atteint près de 600 milliards de dollars.

    « Danger bien réel »

    Ce lundi 15 janvier, jour de l’ouverture du 54e Forum économique mondial dans la station de ski suisse de Davos, où Emmanuel Macron mettra les pieds mercredi pour la première fois depuis six ans, Oxfam publie son rapport annuel sur les inégalités mondiales. Ces dernières s’accroissent. Tandis que les plus riches le sont toujours plus – depuis 2020, la fortune des milliardaires s’est appréciée de 34 %, soit de 3 300 milliards de dollars, trois fois plus que l’inflation –, près de cinq milliards de personnes se sont appauvries, estime Oxfam en compilant plusieurs sources. Constatant que « l’augmentation spectaculaire de l’extrême richesse observée depuis 2020 est désormais gravée dans le marbre », l’ONG s’alarme du « danger bien réel de voir cette aggravation devenir la norme ».

    Le rapport décrit une extrême concentration de la richesse, sur différents plans. Entre les zones géographiques. « Seulement 21 % de l’humanité vit dans les pays du Nord, mais ces pays abritent 69 % de la richesse privée et 74 % de la richesse mondiale des milliardaires. » Dans la détention des actifs financiers : les 1 % les plus riches possèdent 43 % de tous les actifs financiers mondiaux. Entre les entreprises : « Au niveau mondial, les 0,001 % d’entreprises les plus importantes empochent environ un tiers de tous les bénéfices des entreprises. »
    « Eviter le piège à la con »

    Ces multinationales, et leurs propriétaires par la même occasion, viennent de vivre des années de crises ultraprofitables. En analysant les profits de 148 des plus grandes entreprises mondiales, Oxfam constate qu’en 2021 et 2022, ils sont en hausse de 89 % par rapport à la moyenne des années 2017 à 2020. D’après les premiers chiffres disponibles, « l’année 2023 devrait battre tous les records de bénéfices pour les grandes entreprises », note aussi le rapport. Les compagnies pétrolières et gazières, les marques de luxe, les entreprises du secteur financier ainsi que les laboratoires pharmaceutiques apparaissent comme les plus gagnantes, comme d’autres études l’avaient déjà démontré. Pendant que les revendications de hausses salariales ont été ravivées dans de nombreux pays par le choc inflationniste, le partage de la valeur dans les grandes entreprises reste loin d’être équitable. En considérant cette fois 96 d’entre elles et les douze mois précédant juin 2023, Oxfam calcule que pour chaque tranche de 100 dollars de bénéfices, 82 dollars sont allés vers les actionnaires, en rachats d’actions ou en distribution de dividendes.

    Oxfam s’attaque aux monopoles et à leur pouvoir, qualifié de « machine implacable à fabriquer des inégalités » – un sujet de préoccupations et débats particulièrement vifs aux Etats-Unis. Rappelant les évolutions des trois dernières décennies, comme les fusions successives qui ont abouti à l’avènement des dix géants mondiaux de l’industrie pharmaceutique, ou l’émergence des « Big tech » avec Meta (maison mère de Facebook), Alphabet (maison mère de Google) et Amazon qui raflent les trois quarts des dépenses publicitaires en ligne, Oxfam dénonce « un pouvoir des monopoles qui s’accroît et alimente les inégalités », notamment avec une coordination implicite pour augmenter les prix et les marges. La hausse de ces dernières est même soupçonnée d’avoir nourri l’inflation dans la zone euro, formant une boucle prix profits, selon les travaux de plusieurs économistes du Fonds monétaire international publiés en juin.

    Afin de réduire les inégalités, l’ONG continue de plaider pour une réforme de la fiscalité. Son antenne française, dirigée par Cécile Duflot, propose plusieurs mesures fiscales, qui mettraient davantage à contribution seulement 30 % des Français. Parmi elles, un ISF climatique. Celui-ci prendrait en compte le niveau de patrimoine des plus aisés ainsi que son empreinte carbone et pourrait rapporter autour de 15 milliards d’euros par an. Au printemps dernier, Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz esquissaient dans leur rapport sur les aspects économiques de la transition climatique une version plus restreinte de ce mécanisme, avec un impôt temporaire dédié au financement de la transition, qui serait prélevé sur le patrimoine financier des 10 % les plus riches et générerait environ 5 milliards d’euros par an. Emmanuel Macron avait alors tenté de clore les discussions, en enjoignant à la Première ministre, selon des propos tenus en Conseil des ministres et rapportés par le Figaro, « d’éviter le piège à la con du débat sur la fiscalité des riches ». Rien n’indique qu’il a changé d’avis.

    https://www.liberation.fr/economie/inegalites-mondiales-pour-les-riches-la-norme-dabondance-20240115_LGVC6SH
    #richesse #pauvreté #riches #pauvres #inégalités #visualisation #graphique #France #statistiques #chiffres #inflation #multinationales #concentration_de_la_richesse #milliardaires #Bernard_Arnault #LVMH #fortune #impôts #fiscalité

    • Multinationales et inégalités multiples : nouveau rapport

      Depuis 2020, les cinq hommes les plus riches du monde ont doublé leur fortune tandis que, dans le même temps, la richesse cumulée de 5 milliards de personnes a baissé. C’est ce que révèle le nouveau rapport d’Oxfam sur les inégalités mondiales.

      Si cette tendance se poursuit, nous pourrions voir dans près de 10 ans la fortune d’un multimilliardaire franchir pour la première fois le cap de 1000 milliards de dollars alors qu’il faudra encore 230 ans pour éradiquer la pauvreté.

      Malgré les crises successives, les milliardaires prospèrent. Pourquoi ? Car ils achètent le pouvoir politique et économique.

      Inégalités mondiales : les chiffres-clés
      Monde

      – La fortune des 5 hommes les plus riches a grimpé de 114 % depuis 2020.
      - La fortune des milliardaires a augmenté de 3 300 milliards de dollars depuis 2020, à une vitesse 3 fois plus rapide que celle de l’inflation.
      - Les 1 % les plus riches possèdent 48 % de tous les actifs financiers mondiaux.
      - Les pays riches du Nord détiennent 69 % des richesses mondiales et accueillent 74 % des richesses des milliardaires alors qu’ils n’abritent que 21 % de la population mondiale.
      - Au rythme actuel, il faudrait plus de deux siècles pour mettre fin à la pauvreté, mais dans à peine 10 ans nous pourrions voir pour la première fois la fortune d’un multimilliardaire franchir le cap des 1 000 milliards de dollars. Avoir 1 000 milliards, c’est comme gagner plus d’un million d’euros par jour depuis la naissance de Jésus-Christ.
      - Sept des dix plus grandes entreprises mondiales sont dirigées par un·e milliardaire.
      - 148 grandes entreprises ont réalisé 1800 milliards de dollars de bénéfices cumulés – soit 52 % de plus en moyenne sur les 3 dernières années – et distribué d’énormes dividendes à de riches actionnaires tandis que des centaines de millions de personnes ont été confrontées à des réductions de salaires réels.

      France

      - Les quatre milliardaires français les plus riches et leurs familles – la famille Arnault, la famille Bettencourt Meyers, Gérard et Alain Wertheimer – ont vu leur fortune augmenter de 87 % depuis 2020. Dans le même temps, la richesse cumulée de 90% des Français a baissé.
      - Sur cette même période, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros, autant que pour faire un chèque de 3 400 euros pour chaque Français-e.
      - Les 1 % les plus riches détiennent 36 % du patrimoine financier total en France alors que plus de 80% des Français ne déclarent posséder ni assurance-vie, ni actions directement.
      - 11 des plus grandes entreprises françaises ont réalisé 101 milliards de dollars de bénéfices entre juin 2022 et juin 2023, soit une augmentation de 57% par rapport à la période 2018-2021.
      – L’héritière Françoise Bettencourt est devenue la première femme milliardaire à voir sa fortune atteindre les 100 milliards d’euros.

      Grandes entreprises, médias : comment les milliardaires achètent le pouvoir

      Depuis 2020, l’accroissement de la fortune des milliardaires et l’accumulation de profits des multinationales sont intrinsèquement liés.

      A l’heure où l’élite économique se réunit à Davos, le rapport « Multinationales et inégalités multiples » révèle notamment que sept des dix plus grandes entreprises mondiales ont un·e PDG milliardaire ou un·e milliardaire comme actionnaire principal·e.

      Les grandes entreprises ont un pouvoir démesuré et sont une machine à fabriquer des inégalités. Salaires qui augmentent moins que la rémunération des PDG, bénéfices majoritairement utilisés pour rémunérer les actionnaires, optimisation fiscale : les milliardaires veillent avant tout à ce que les multinationales contribuent à leur propre enrichissement, au détriment du reste de la population.

      Ils utilisent par ailleurs leur richesse pour asseoir et conforter leur influence politique, en particulier via leur emprise sur les médias et leurs relations avec les hautes sphères de l’Etat.
      En France aussi, les milliardaires s’enrichissent et la pauvreté s’intensifie

      Les 4 milliardaires français les plus riches (Bernard Arnault et sa famille, Françoise Bettencourt Meyers et sa famille ainsi que Gérard Wertheimer et Alain Wertheimer) ont vu leur fortune augmenter de 87% depuis 2020.

      Sur la même période, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros, soit l’équivalent d’un chèque de 3 400 euros pour chaque Français·e. Alors que les Français et Françaises subissent l’inflation de plein fouet et sont confronté·e·s à une véritable crise du pouvoir d’achat, l’enrichissement continu des ultra-riches fracture la société.

      Comme dans le reste du monde, l’omniprésence des milliardaires dans les mondes économique, politique et médiatique, est indéniable. En tête de proue : Bernard Arnault, à la tête de l’empire du luxe LVMH et de certains des plus grands médias français comme Les Échos ou Le Parisien, mais aussi le milliardaire Vincent Bolloré, qui fait des médias dont il est actionnaire principal une arme au service de l’extrême droite.

      https://www.oxfamfrance.org/rapports/multinationales-et-inegalites-multiples
      #rapport #oxfam