• « Hériter » : le pouvoir économique de la famille : épisode 27/44 du podcast Le mot de l’éco | Radio France | France Culture
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/entendez-vous-l-eco/heriter-ce-qui-nous-revient-de-droit-8763884

    Depuis les années 1970, l’héritage fait son retour dans la constitution du patrimoine privé des français, atteignant des niveaux comparables à ceux du XIXème siècle. Comment le retour aux penseurs de ce "siècle de l’héritage" peut-il nous aider à repenser la transmission du patrimoine aujourd’hui ?

    Avec Mélanie Plouviez, maîtresse de conférences en philosophie à l’université Côte d’Azur, en charge du pilotage du projet de recherche « Philosophie de l’héritage » financé par l’Agence Nationale de Recherche

    #héritage #richesse #inégalités #économie #philosophie

  • Les milliardaires ont « amassé plus de richesses » en janvier que 15 millions de travailleurs pendant un an, selon Oxfam
    https://www.liberation.fr/economie/les-milliardaires-ont-amasse-plus-de-richesses-en-janvier-que-15-millions

    Après l’adoption de la taxe sur le patrimoine des ultra-riches à l’Assemblée jeudi 20 février, l’ONG membre du mouvement #TaxTheSuperRich veut maintenir la pression sur le sujet à l’international.

    Des milliards de dollars, encore des milliards et toujours plus d’inégalités dans le monde. Oxfam publie ce lundi 24 février un nouveau chiffre choc. En janvier, les #milliardaires ont gagné 15 500 milliards de dollars (14 800 milliards d’euros). C’est 314 milliards de plus que le mois précédent, explique l’ONG qui s’appuie sur les données du classement des milliardaires du magazine économique américain Forbes. Or pour gagner cette somme, il faudrait qu’environ 15 millions de personnes (1) travaillent pendant une année entière, compare Oxfam. Et si l’on s’intéresse au revenu des travailleurs les plus modestes, l’écart est encore vertigineux : la richesse totale des 35 % les plus pauvres de la population mondiale est de 241,5 milliards de dollars. Autrement dit, moins que le gain des plus riches du monde sur le premier mois de l’année.

    « Cette explosion de richesse des milliardaires constatée en janvier 2025, conforte la trajectoire observée depuis 2020 en France et dans le monde. En France, la note de Bercy [révélée par le Monde, ndlr] qui montre que la fortune des 0,1 % les plus riches a doublé en vingt ans montre qu’il y a aujourd’hui consensus sur le constat », estime Stanislas Hannoun, responsable justice fiscale et inégalités à Oxfam France, dans le communiqué de l’ONG. Il ajoute : « Il reste maintenant au gouvernement de passer aux solutions en réformant drastiquement la fiscalité appliquée aux plus riches notamment en taxant davantage le patrimoine. »

    Alors qu’en France les députés ont adopté jeudi soir la proposition de loi des Ecologistes pour que les ultra-riches paient au moins 2 % d’impôts sur leur patrimoine, le débat sur la taxation des milliardaires se poursuit aussi à l’international. L’objectif de la communication d’Oxfam est de « donner un élan » au mouvement #TaxTheSuperRich (taxez les super riches), lancé en janvier par plus de 50 organisations internationales, dont Amnesty International, Earth4All, Fight Inequality Alliance, Greenpeace International, la Confédération syndicale internationale ou encore Patriotic Millionaires, un club de 250 fortunes américaines, présidé par Morris Pearl.

    « L’inégalité croissante et extrême menace tout ce qui nous est cher : nos démocraties, nos économies, notre planète et notre société au sens large. Dans notre monde de plus en plus connecté, il s’agit d’un problème mondial qui exige des solutions mondiales. C’est pourquoi mon groupe, Patriotic Millionaires, est fier de s’associer à plus de 50 organisations internationales pour appeler les dirigeants du G20 à respecter leur engagement à coopérer pour taxer plus efficacement les super-riches » pris en juillet 2024, déclare-t-il selon des propos repris dans le communiqué. Depuis cette promesse, Oxfam calcule que la richesse des milliardaires a augmenté de 1 100 milliards de dollars.

    Dans le détail, #TaxTheSuperRich demande aux gouvernements du G20 d’« aboutir à un accord mondial pour taxer les super-riches à des taux suffisamment élevés pour réduire les inégalités, ainsi que des mécanismes pour mettre fin à l’évasion fiscale », « investir les milliards de dollars collectés dans la lutte contre la pauvreté, les crises climatiques et environnementales et l’élimination des inégalités extrêmes » et « approuver et soutenir activement la Convention fiscale des Nations unies en tant que plateforme inclusive pour la coopération fiscale mondiale ». A quelle échéance ? « Avant qu’il ne soit tard. »

    (1) Le revenu moyen mondial est d’environ 21 000 dollars par personne par an, selon Oxfam qui dit s’appuyer la base de données sur les inégalités dans le monde World Inequality Data Base et l’ONG.

    #riches #richesse

  • #Livre : Répondre aux #préjugés sur les #migrations

    « Les réfugié·es nous envahissent ! Les personnes migrantes profitent des aides sociales et ne sont pas intégrées ! Elles menacent notre sécurité et notre identité », etc.
    Elles sont nombreuses, en France, les personnes qui accordent du crédit à ces formules-choc qu’on entend régulièrement dans les médias, dans les discours politiques, sur nos lieux de vie. Les préjugés sur les migrations sont nombreux, encore plus en temps de crise : les migrant·es sont alors les coupables parfait·es. Mais ce sont des idées fausses qui ne reflètent en aucun cas la réalité des migrations.

    À travers le démontage de dix idées reçues courantes sur les migrations, ce petit #guide montre qu’il est possible de résister aux manipulations électoralistes et idéologiques qui voudraient faire des migrant·es et réfugié·es la source de tous nos problèmes. Il donne des arguments et des #chiffres basés sur des #statistiques officielles qui invalident ces préjugés pour faire percevoir les migrations comme une #richesse économique, sociale et culturelle, et même comme le seul avenir possible pour notre planète mondialisée.

    Ce guide offre également des pistes pour être citoyen·ne et solidaire des migrant·es au quotidien.

    https://www.pressenza.com/fr/2025/01/livre-repondre-aux-prejuges-sur-les-migrations
    #idées-reçues
    #invasions #chômage #crise #identité #sécurité #intégration #afflux

    ping @karine4

  • #Narcotrafic : le Sénat a adopté l’ensemble des articles de la #proposition_de_loi… On vous résume les principales mesures

    Mercredi soir, le Sénat a terminé l’examen de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic. Un texte issu des travaux d’une commission d’enquête sur le sujet. « DEA à la française », statut du #repenti, nouveau parquet national… Le texte contient de nouveaux dispositifs pour que la France ne bascule pas vers un « narco-Etat ».

    « DEA à la française »

    Parmi les points forts de la proposition de loi, on retrouve à l’article 1, le renforcement de l’Office antistupéfiants (Ofast) structuré en une véritable « DEA à la française » (l’agence américaine de lutte contre la drogue, ndlr). En séance publique, Bruno Retailleau a précisé que l’état-major de l’Ofast serait composé de services de quatre ministères, l’Intérieur, Bercy, la Justice et l’Armée. « Vous vouliez l’interministérialité, il ne faut pas deux ministères il en faut quatre […] le patron sera désigné par la DNPJ avec un adjoint de la gendarmerie et un adjoint douanes, Bercy.

    La localisation du parquet national anticriminalité pas encore définie

    En ce qui concerne la création du nouveau #parquet_national_anticriminalité (#Pnaco), Gérald Darmanin a annoncé ne pas vouloir attendre le vote de la loi pour doubler, dès cette année, les effectifs de magistrats dans les juridictions pénales spécialisées (JIRS), et la juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée (JUNALCO) ». De même, si le futur Pnaco qui sera mis en place au 1er janvier 2026 sera situé « par défaut » à Paris. « Mais ça ne veut pas forcément dire que ce sera à Paris », a précisé le garde des Sceaux, précisant que la localisation pourrait changer le temps de la navette parlementaire, « le temps de challenger les équipes du ministère », en charge d’examiner d’autres villes comme Marseille.

    Un sous-amendement de la commission des lois supprime, par ailleurs, « le monopole qu’il était envisagé de confier au Pnaco ». Le nouveau parquet national pourra ainsi définir ses propres compétences, dans un dialogue avec les JIRS et les parquets locaux afin de pas priver les juridictions de toute possibilité de se saisir d’affaires graves. La création du Pnaco fait l’objet d’une proposition de loi organique que les sénateurs ont adoptée.

    C’était l’un des points forts des conclusions de la commission d’enquête du Sénat : frapper les narcotrafiquants au portefeuille. Les sénateurs ont adopté plusieurs dispositions visant à lutter plus fortement contre le #blanchiment_d’argent. L’article 4 prévoit, à ce titre, de systématiser les #enquêtes_patrimoniales dans le cadre des investigations relatives au narcotrafic et, d’autre part, de créer une nouvelle procédure d’injonction pour #richesse_inexpliquée. La systématisation avait été supprimée en commission des lois. « C’est ce qu’on appelle une fausse bonne idée. Nous nous en sommes rendu compte au fil des auditions parce que les services nous ont dit que ce n’était pas toujours utile […] Nous ne sommes pas favorables à ce que nous puissions encombrer divers services d’enquêteurs », avait justifié la corapporteure Muriel Jourda (LR) en présentant son avis défavorable à l’amendement du sénateur écologiste, Guy Benarroche qui proposait de rétablir cette systématisation.

    #Confiscation_des_biens rendue « obligatoire »

    Plusieurs amendements identiques ont cette fois-ci rendu « obligatoires », la confiscation de biens dont le propriétaire ne peut justifier l’origine, et condamné pour un crime ou un délit puni d’au moins cinq ans d’emprisonnement.

    Interdire le #paiement_en_liquide des #voitures_de_location

    Bruno Retailleau a défendu un amendement proposant une mesure « radicale » contre l’avis de la commission des lois. Elle vise à interdire strictement tout #paiement_en_espèces d’une location de voiture. « La location de voiture, c’est une plaie. C’est une aide considérable aux narcotrafiquants […] ça facilitera le travail de l’autorité judiciaire puisque ce sera traçable », a-t-il justifié. Le rapporteur LR de la commission d’enquête, Etienne Blanc a proposé de fixer un seuil par décret, « 200 ou 250 euros au-delà duquel, le paiement en espèce serait interdit ».

    Un volet du texte porte sur les techniques spéciales d’enquête. Un amendement du président de la commission des affaires étrangères et de la Défense, Cédric Perrin (LR) pourrait, s’il est conservé au bout de la procédure parlementaire, bousculer les habitudes des trafiquants. Il oblige les #messageries_cryptées comme #WhatsApp ou #Telegram de permettre aux #services_de_renseignement d’accéder aux échanges des trafiquants.

    S’inspirant de la législation italienne « anti-mafia », les sénateurs ont réformé le statut des repentis (article 14) qu’ils jugent insuffisamment exploité en France. Les élus ont pris conscience, lors de leurs travaux, qu’un « informateur n’est pas celui qui est innocent de toute infraction ». C’est pourquoi, ils proposent d’étendre le #statut_de_repenti à ceux qui ont commis des crimes de sang, et créée une immunité de poursuites pour ceux qui bénéficieront de ce statut.

    Refonte du statut du repenti

    De quoi faire tiquer le garde des Sceaux, Gérald Darmanin qui avait déposé un amendement visant à revenir sur cette immunité. Il l’a finalement retiré en obtenant la garantie de la part du rapporteur PS, Jérôme Durain de « retravailler le texte » pendant la navette parlementaire. « Est-ce que les crimes de sang sont compris dans cette immunité ? Sans doute non […] Si notre dispositif n’est pas assez audacieux, selon vous. Le vôtre l’est peut-être trop », a estimé de ministre qui propose, en lieu et place de l’immunité, une réduction de peine pour les repentis. « Dire à nos compatriotes que nous abandonnons toutes les poursuites parce que quelqu’un aura parlé. Ce n’est pas évident non plus. Le garde des Sceaux est aussi le ministre des victimes », a-t-il rappelé. Cet article pourrait évoluer lors de la navette parlementaire.

    Dossier coffre

    Peut-être le sujet le plus sensible du texte, l’article 16 a nécessité de nombreuses suspensions de séance afin de permettre au gouvernement et au Parlement de s’accorder sur sa rédaction. Il vise à créer « un #dossier_coffre » dénoncé par le Conseil national des Barreaux comme « une atteinte au principe du contradictoire et aux « droits de la défense ». Ce dossier coffre ou « #procès-verbal_distinct », sous le contrôle d’une collégialité de magistrats, a, en effet, pour but de soustraire au contradictoire certains éléments de procédure pour les techniques spéciales d’enquête les plus sensibles, comme le recours à des technologies de pointe, d’écoutes ou de balisages. L’amendement du gouvernement. Il s’appuie sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui considère qu’il n’est pas possible d’utiliser des éléments incriminants recueillis lors d’une technique pour laquelle les modalités de pose sont dans un dossier coffre. C’est pourquoi l’amendement prévoit que le dossier coffre a pour seule fonction d’orienter l’enquête. Les éléments incriminants issus d’actes ultérieurs d’enquêtes seront versés au contradictoire. Le dispositif voté prévoit toutefois une exception. Ces éléments pourront être utilisés en cas « d’intérêt exceptionnel pour la manifestation de la vérité » et lorsque « la vie ou l’intégrité physique d’une personne » est mise en jeu.

    La mesure a été rejetée par les socialistes et les écologistes qui s’inquiètent d’une remise en cause du #principe_du_contradictoire. « On ne limite pas aux données techniques ce qui est contenu dans ce procès-verbal distinct, (…) qui ne serait pas accessible aux parties. Ce n’est pas acceptable », a justifié la socialiste Marie-Pierre de La Gontrie.

    Les sénateurs ont aussi adopté l’article 20 visant à limiter le poids des nullités « provoquées » par certains avocats de narcotrafiquants, « lorsque la cause de nullité résulte d’une manœuvre ou d’une négligence de la personne mise en cause ». Un amendement de la commission des lois précise certains points dans le code de procédure pénale. Il interdit, par exemple, la désignation de l’avocat « chef de file » par lettre recommandée avec accusé de réception, dans les affaires de criminalité organisée. Il prévoit aussi que le dernier mémoire déposé par les parties doit reprendre l’ensemble des moyens de nullité, pour garantir la clarté des débats, ou encore il rejette les nullités fondées sur des moyens de communication non agréés, comme EncroChat et Sky ECC.

    Les dernières dispositions prévoient une série de mesures visant à renforcer les moyens juridiques de la politique de lutte contre la corruption dans les administrations sensibles. On trouve aussi une série de mesures visant à sécuriser les établissements pénitentiaires en autorisant, par exemple, les drones aux fins de prévenir l’introduction d’objets prohibés. Enfin, l’article 24 ouvre la possibilité de prononcer des interdictions administratives de paraître sur les points de deal. Un amendement des rapporteurs adopté en commission ouvre, de plus, la possibilité au préfet d’expulser de son logement, une personne impliquée dans un trafic de stupéfiants, si son logement est situé dans la zone d’interdiction de paraître.

    Le vote sur l’ensemble du texte et sur la loi organique aura lieu mardi 4 février.
    https://www.publicsenat.fr/actualites/parlementaire/narcotrafic-le-senat-a-adopte-lensemble-des-articles-de-la-proposition-d
    #loi #mafia #confiscation_de_biens #France

    • PPL Narcotrafic : les #droits et #libertés à nouveau victimes de l’addiction aux lois sécuritaires

      Communiqué de l’Observatoire des libertés et du numérique (OLN), Paris, le 28 janvier 2025.

      Voilà des mois que nos responsables politiques font mine de faire la guerre au trafic de drogues et que les médias leur emboîtent le pas de façon sensationnaliste, en amplifiant des faits graves, des tragédies humaines ou en donnant de l’écho à des opérations « choc ». Les sénateurs Jérome Durain (PS) et Étienne Blanc (LR), en cheville avec les ministres de l’Intérieur et de la Justice, cherchent à renforcer le dispositif répressif et de surveillance, abaisser le contrôle de l’activité policière et réduire les droits de la défense au nom de la lutte contre le trafic de stupéfiants.

      L’Observatoire des Libertés et du Numérique (OLN) souhaite alerter sur les dangers de ce texte qui, au prétexte d’une reprise en main d’une problématique sociétale pourtant loin d’être nouvelle et appelant d’autres solutions que le tout répressif – comme le rappelait récemment le Haut commissaire aux droits humains de l’ONU -, vise à introduire et renforcer des mesures dangereuses pour les libertés et dérogatoires au droit commun.

      La proposition de loi « Sortir la France du piège du narcotrafic », outre qu’elle convoque l’imaginaire des cartels mexicains, vise à renforcer largement le régime juridique d’exception de la criminalité organisée. Ce dernier déroge déjà au droit commun en ce qu’il permet que soient utilisés les moyens d’enquête les plus intrusifs et attentatoires à la vie privée dès lors que la commission de l’une des infractions figurant sur une liste qui ne cesse de s’allonger, est suspectée. Elle englobe ainsi une grande partie des crimes et délits lorsqu’ils sont commis en bande organisée ou via la constitution d’une association de malfaiteurs, mais aussi toutes les infractions relevant du trafic de stupéfiants.

      La notion de criminalité organisée, insérée en 2004 dans le code de procédure pénale officiellement pour cibler des réseaux mafieux, s’applique donc en réalité à de nombreuses autres situations. Aujourd’hui, elle légitime, comme la lutte contre le terrorisme avant elle, d’élargir toujours plus les mécanismes d’exception en vue d’une répression accrue, au nom d’une logique d’efficacité, mais dont l’expérience montre qu’ils sont toujours détournés de leur finalité initiale. Par exemple, la qualification d’association de malfaiteurs a pu être utilisée dans des affaires relatives à des actions militantes, comme à Bure contre l’enfouissement des déchets nucléaires. En outre, depuis une réforme de 2016, les pouvoirs d’enquêtes du parquet, non indépendant car soumis à l’autorité hiérarchique du Garde des Sceaux, ont été renforcés et élargis en matière de criminalité organisée, évinçant encore un peu plus les garanties attachées à l’intervention du juge d’instruction.

      Mais surtout, ce texte prévoit de faire tomber toujours un peu plus les barrières encadrant la surveillance policière. À titre d’illustration, il propose d’élargir le champ d’utilisation des « boites noires », cette technique de renseignement qui analyse les données de toutes nos communications et données récupérées sur internet via des algorithmes au motif de « détecter » de nouveaux suspects, technique que nous dénonçons depuis sa création. Initialement prévue pour le seul champ du terrorisme, elle a récemment été étendue aux « ingérences étrangères » et serait donc désormais aussi autorisée « pour la détection des connexions susceptibles de révéler des actes de délinquance et à la criminalité organisées ».

      Le texte vise en outre à étendre la durée d’autorisation de la surveillance par géolocalisation ainsi que pour l’accès à distance aux correspondances en matière de criminalité organisée, tandis que l’article 23 amorce la possibilité d’utiliser les drones dans les prisons. De plus, il permettra à la police – via le service Pharos – de censurer sur internet « tout contenu faisant la promotion de produits stupéfiants ». Cette censure administrative avait été autorisée dans un premier temps pour les contenus pédopornographiques avant d’être étendue au terrorisme. Vous avez dit effet « cliquet » ? Ce texte constitue incontestablement une étape de plus vers la surveillance de masse et l’extension des pouvoirs de contrôle sécuritaire.

      Enfin, il innove avec une mesure extrêmement inquiétante : « le dossier coffre », ou « procès-verbal distinct ». Prévue à l’article 16 du texte, cette mesure a pour objectif d’empêcher les personnes poursuivies de connaître la manière dont elles ont été surveillées pendant l’enquête, afin qu’elles ne puissent pas contourner cette surveillance à l’avenir ou la contester dans le cadre de la procédure. Les sénateurs proposent ainsi tout bonnement que les procès-verbaux autorisant et détaillant les modalités de mise en œuvre de cette surveillance ne soient pas versés au dossier, autrement dit qu’ils ne puisse jamais être débattus. Les personnes poursuivies n’auraient ainsi plus aucun moyen de savoir ni de contester quand et comment elles ont été surveillées, y compris donc, en cas de potentiels abus des services d’enquête. Le législateur créerait une nouvelle forme de procédure secrète, introduisant par là une faille béante dans le respect du principe du contradictoire et par suite dans le droit pourtant fondamental à se défendre, maillon essentiel d’une justice équitable et d’une société démocratique.

      Si nous ne sommes à l’évidence plus étonnés de l’affaiblissement progressif des libertés publiques au nom des discours sécuritaires, une attaque à ce point décomplexée des principes fondateurs d’une justice démocratique témoigne de la profonde perte de repères et de valeurs des actuels responsables publics. Parce que la proposition de loi relative au trafic de drogues suscite de graves inquiétudes quant à l’atteinte aux droits et libertés fondamentales, nous appelons l’ensemble des parlementaires à rejeter ce texte.

      Organisations signataires membres de l’OLN : Globenet, Creis-Terminal, la Ligue des droits de l’Homme (LDH), le Syndicat des Avocats de France (SAF), le Syndicat de la Magistrature (SM), La Quadrature du Net (LQDN), le CECIL.

      https://www.laquadrature.net/2025/01/28/ppl-narcotrafic-les-droits-et-libertes-a-nouveau-victimes-de-laddictio

    • #Narcotrafic : une loi pour gagner la guerre

      Une proposition de loi transpartisane « visant à sortir la France du piège du narcotrafic », composé de 24 articles, est étudiée au Sénat. Elle est soutenue par le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau et le ministre de la Justice, Gérald Darmanin. Une batterie de mesures, qui fait écho à la législation anti-mafia italienne. Que contient cette proposition de loi ? Comment l’État peut-il reprendre le contrôle, notamment dans les villes moyennes et les zones rurales¿ ? On en débat avec le grand reporter spécialiste de la criminalité et de la police, Frédéric Ploquin, le sénateur UC des Français établis hors de France, ainsi que le Vice-président de la commission d’enquête sur l’impact du narcotrafic en France ainsi que l’avocate pénaliste au barreau de la Seine-Saint-Denis, Clarisse Serre.

      https://www.publicsenat.fr/emission/sens-public/narcotrafic-une-loi-pour-gagner-la-guerre-e0

  • #Multinationales et #inégalités multiples : nouveau #rapport

    Depuis 2020, les cinq hommes les plus riches du monde ont doublé leur fortune tandis que, dans le même temps, la richesse cumulée de 5 milliards de personnes a baissé. C’est ce que révèle le nouveau rapport d’Oxfam sur les inégalités mondiales.

    Si cette tendance se poursuit, nous pourrions voir dans près de 10 ans la fortune d’un multimilliardaire franchir pour la première fois le cap de 1000 milliards de dollars alors qu’il faudra encore 230 ans pour éradiquer la pauvreté.

    Malgré les crises successives, les milliardaires prospèrent. Pourquoi ? Car ils achètent le pouvoir politique et économique.
    Inégalités mondiales : les chiffres-clés

    #Monde

    - La fortune des 5 hommes les plus #riches a grimpé de 114 % depuis 2020.
    – La #fortune des #milliardaires a augmenté de 3 300 milliards de dollars depuis 2020, à une vitesse 3 fois plus rapide que celle de l’inflation.
    - Les 1 % les plus riches possèdent 48 % de tous les actifs financiers mondiaux.
    - Les pays riches du Nord détiennent 69 % des richesses mondiales et accueillent 74 % des richesses des milliardaires alors qu’ils n’abritent que 21 % de la population mondiale.
    - Au rythme actuel, il faudrait plus de deux siècles pour mettre fin à la pauvreté, mais dans à peine 10 ans nous pourrions voir pour la première fois la fortune d’un multimilliardaire franchir le cap des 1 000 milliards de dollars. Avoir 1 000 milliards, c’est comme gagner plus d’un million d’euros par jour depuis la naissance de Jésus-Christ.
    - Sept des dix plus grandes entreprises mondiales sont dirigées par un·e milliardaire.
    - 148 grandes entreprises ont réalisé 1800 milliards de dollars de bénéfices cumulés – soit 52 % de plus en moyenne sur les 3 dernières années – et distribué d’énormes dividendes à de riches actionnaires tandis que des centaines de millions de personnes ont été confrontées à des réductions de salaires réels.

    #France

    - Les quatre milliardaires français les plus riches et leurs familles – la famille Arnault, la famille Bettencourt Meyers, Gérard et Alain Wertheimer – ont vu leur fortune augmenter de 87 % depuis 2020. Dans le même temps, la richesse cumulée de 90% des Français a baissé.
    – Sur cette même période, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros, autant que pour faire un chèque de 3 400 euros pour chaque Français-e.
    – Les 1 % les plus riches détiennent 36 % du patrimoine financier total en France alors que plus de 80% des Français ne déclarent posséder ni assurance-vie, ni actions directement.
    - 11 des plus grandes entreprises françaises ont réalisé 101 milliards de dollars de bénéfices entre juin 2022 et juin 2023, soit une augmentation de 57% par rapport à la période 2018-2021.
    - L’héritière Françoise Bettencourt est devenue la première femme milliardaire à voir sa fortune atteindre les 100 milliards d’euros.

    Grandes entreprises, médias : comment les milliardaires achètent le pouvoir

    Depuis 2020, l’accroissement de la fortune des milliardaires et l’accumulation de profits des multinationales sont intrinsèquement liés.

    A l’heure où l’élite économique se réunit à Davos, le rapport « Multinationales et inégalités multiples » révèle notamment que sept des dix plus grandes entreprises mondiales ont un·e PDG milliardaire ou un·e milliardaire comme actionnaire principal·e.

    Les grandes entreprises ont un pouvoir démesuré et sont une machine à fabriquer des inégalités. Salaires qui augmentent moins que la rémunération des PDG, bénéfices majoritairement utilisés pour rémunérer les actionnaires, optimisation fiscale : les milliardaires veillent avant tout à ce que les multinationales contribuent à leur propre enrichissement, au détriment du reste de la population.

    Ils utilisent par ailleurs leur richesse pour asseoir et conforter leur influence politique, en particulier via leur emprise sur les médias et leurs relations avec les hautes sphères de l’Etat.
    En France aussi, les milliardaires s’enrichissent et la pauvreté s’intensifie

    Les 4 milliardaires français les plus riches (Bernard Arnault et sa famille, Françoise Bettencourt Meyers et sa famille ainsi que Gérard Wertheimer et Alain Wertheimer) ont vu leur fortune augmenter de 87% depuis 2020.

    Sur la même période, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros, soit l’équivalent d’un chèque de 3 400 euros pour chaque Français·e. Alors que les Français et Françaises subissent l’inflation de plein fouet et sont confronté·e·s à une véritable crise du pouvoir d’achat, l’enrichissement continu des ultra-riches fracture la société.

    Comme dans le reste du monde, l’omniprésence des milliardaires dans les mondes économique, politique et médiatique, est indéniable. En tête de proue : Bernard Arnault, à la tête de l’empire du luxe LVMH et de certains des plus grands médias français comme Les Échos ou Le Parisien, mais aussi le milliardaire Vincent Bolloré, qui fait des médias dont il est actionnaire principal une arme au service de l’extrême droite.

    Les recommandations d’Oxfam

    Oxfam appelle les États à réduire rapidement et radicalement le fossé entre les ultra-riches et le reste de la société grâce notamment aux mesures suivantes :
    Augmenter les impôts sur les ultra-riches

    Oxfam estime qu’un impôt sur la fortune pour les multimillionnaires et les milliardaires du monde entier pourrait rapporter 1 800 milliards de dollars par an.

    Plus précisément, Oxfam France formule une série de recommandations fiscales qui permettraient de dégager 88 milliards d’euros par an, tout en préservant le pouvoir d’achat de 70% des Français, dont :

    - Un impôt sur la fortune climatique pour les multimillionnaires et les milliardaires : Il s’agit de taxer, d’une part, le niveau de patrimoine (la taille de la fortune), et d’autre part, la quantité de CO2 qu’il contient (son impact sur le climat).

    Réguler les multinationales

    – Encadrer la part des bénéfices versés aux actionnaires
    - Conditionner les aides publiques aux entreprises aux investissements dans la transition
    - Imposer un écart de rémunération de 1 à 20 entre le salaire du dirigeant et le salaire médian de l’entreprise.

    https://www.oxfamfrance.org/rapports/multinationales-et-inegalites-multiples
    #Oxfam #richesse #chiffres #statistiques

  • « Sur l’immigration, le récit de Donald Trump évolue au gré des rapports de force dans son camp », Marie-Cécile Naves
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/01/03/sur-l-immigration-le-recit-de-donald-trump-evolue-au-gre-des-rapports-de-for

    Durant toute sa campagne, Donald #Trump s’est engagé à réduire de manière drastique l’#immigration non seulement illégale, mais aussi légale. Son souhait de confier cette tâche à l’ancien policier Tom Homan – l’artisan de la séparation de plus de 4 000 enfants de leurs parents immigrés entre 2017 et 2021 – allait dans ce sens.
    Le récit trumpien se décline en trois points : la lutte contre la délinquance (le #migrant étant automatiquement associé au criminel) ; la préservation d’une identité (blanche) américaine mythifiée ; et, précisément, l’efficacité économique. Ces trois objectifs sont liés entre eux, le travailleur immigré étant présumé prendre le travail du « vrai » Américain.

    Dans les faits, la perspective d’une expulsion des quelque 11 millions de clandestins, mais aussi de leurs enfants, même si ces derniers sont en situation régulière, s’avère, au-delà des problèmes éthiques et pratiques qu’elle pose, une aberration économique.

    En 2022, on comptait 30 millions d’immigrés dans la main-d’œuvre du pays (soit 18 %), dont 8 millions de travailleurs illégaux indispensables à de nombreux secteurs économiques. Les sans-papiers représentent ainsi jusqu’à un tiers des employés dans l’#agriculture, le #BTP, les #loisirs, la #restauration, les #services_à_domicile ou à la personne, en particulier parce qu’ils sont les seuls à accepter certains emplois peu qualifiés.

    Cependant, nombre d’entre eux sont très demandés en raison de leur niveau de qualification : aux Etats-Unis, un tiers des immigrés possèdent un diplôme de l’enseignement supérieur (soit la même proportion que les citoyens américains), ce qui les conduit à occuper des emplois à haute valeur ajoutée : banque, nouvelles technologies, recherche fondamentale et appliquée, etc.
    Une étude du National Bureau of Economic Research, un centre de recherche indépendant, a montré qu’ entre 1990 et 2015 les immigrés ont concentré 16 % des inventions et 23 % des innovations. Ils créent, en outre, plus souvent leur entreprise, et donc des emplois, dont bénéficient également les Américains : les deux tiers des principales entreprises en intelligence artificielle ont été fondées par des immigrés, dont une part importante était au départ sans papiers.

    Opportunités d’emploi perdues

    Avec des expulsions massives, le marché du travail, malgré sa grande fluidité, ne se redéploiera pas de lui-même par un effet de vases communicants. La #compétitivité de nombreuses entreprises, petites ou grandes, s’en trouvera affectée, sur le plan national ou à l’échelle internationale : non seulement elles devront augmenter les salaires pour embaucher des Américains ou des immigrés légaux, ce qui aura un effet inflationniste, mais c’est toute une chaîne de production et de distribution qui en pâtira (sous-traitants, etc.). Autrement dit, des opportunités d’emploi seront perdues pour tout le monde.

    Par ailleurs, les économistes et la Banque mondiale s’accordent à dire que la #richesse créée par les immigrés, clandestins compris, est considérable : jusqu’à 8 % du PIB des Etats-Unis. Et, même avec un pouvoir d’achat plus faible que la moyenne, les sans-papiers restent des consommateurs, et paient des impôts locaux et fédéraux.

    Enfin, expulser des millions d’immigrés demandera des moyens policiers et judiciaires démesurés : l’American Immigration Council estime qu’arrêter, juger et expulser, chaque année, un million d’immigrés coûterait près de 90 milliards de dollars (87,5 millions d’euros wtf !!, ndc).

    Il est donc certain que le discours trumpien s’adaptera, quelles que soient les décisions prises, et quels que soient les faits. Le #récit du président élu évolue déjà au gré des rapports de force dans son camp. Pour l’heure, Donald Trump semble soutenir les « tech bros » de la Silicon Valley, symbolisée par Elon Musk, qui demandent le maintien et l’extension d’un système de visa, le H1B, pour leurs futurs ingénieurs et techniciens, contre l’extrême droite identitaire jusqu’au-boutiste, emmenée notamment par l’idéologue Steve Bannon. A contre-courant de ce que Trump affirme depuis des années.

    Marie-Cécile Naves est une politiste française, spécialiste des Etats-Unis et du féminisme, directrice de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques. Elle est l’autrice de plusieurs ouvrages, dont « Trump, la revanche de l’homme blanc » (Textuel, 2018).

    #économie #suprémacisme #racisme

  • Les #influenceurs pèseraient près de 6,5 milliards d’euros et 1,5 million d’emplois en France

    https://www.liberation.fr/economie/medias/les-influenceurs-peseraient-pres-de-65-milliards-deuros-et-15-million-dem

    Ça me semble énorme notamment pour le nombre d’emplois mais bon.

    Rien à voir mais je juxtapose avec le récent rapport gouvernemental sur les emplois publics :

    Travailler dans la fonction publique : le défi de l’attractivité

    https://www.strategie.gouv.fr/publications/travailler-fonction-publique-defi-de-lattractivite

    #emplois
    #richesse
    #économie
    #PIB
    #service_public
    #marketing

  • Quels sont les métiers qui paient le plus ?

    Chef d’entreprise, directeur d’hôpital, pilote d’avion, avocat : combien gagnent les professions les mieux payées ? L’Observatoire des inégalités présente son palmarès des métiers aux plus hautes rémunérations, du secteur privé et du public, pour les salariés ou les indépendants.

    https://inegalites.fr/Quels-sont-les-metiers-qui-paient-le-plus

    #rémunération
    #salaire
    #richesse

  • En Espagne, la possibilité d’un discours de gauche sur l’immigration
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/10/29/en-espagne-la-possibilite-d-un-discours-de-gauche-sur-l-immigration_6364304_

    En Espagne, la possibilité d’un discours de gauche sur l’immigration
    Sandrine Morel
    « L’Espagne doit choisir entre être un pays ouvert et prospère ou un pays fermé et pauvre », a lancé Pedro Sanchez à la tribune du Congrès des députés le 9 octobre. Avant d’ajouter, solennel : « Nous, Espagnols, nous sommes les enfants de la migration, nous ne serons pas les parents de la xénophobie. » Dans une Europe en proie au repli identitaire, le président du gouvernement espagnol offre une vision du phénomène migratoire à contre-courant de celle qui s’est imposée chez ses voisins.
    Faisant fi des imaginaires de la peur utilisés par l’extrême droite, le dirigeant socialiste s’applique à dessiner un tableau positif de la migration, à la fois humaniste et pragmatique. « Je pense que les gouvernements européens se trompent quand ils abordent le débat sur la migration, parce qu’ils le centrent sur des aspects négatifs », a-t-il expliqué le 23 octobre.
    Face à « l’hiver démographique » d’une Europe qui risque de perdre 30 millions de personnes en âge de travailler dans les vingt prochaines années, ou le fait que 150 000 emplois sont actuellement vacants en Espagne faute de main-d’œuvre, il défend l’immigration comme l’une des principales solutions. Alors que la politique de l’Italienne Giorgia Meloni a de plus en plus d’adeptes, Pedro Sanchez s’en démarque clairement. « La création de centres [de rétention] dans des pays tiers ne résout rien et crée de nouveaux problèmes », a-t-il déclaré. Au discours sécuritaire, il répond par les statistiques. « Si nous analysons les données de manière rigoureuse, en prenant en compte l’âge et le niveau de revenus, le taux de délinquance des étrangers est le même que celui des Espagnols. Ni plus ni moins. Parce que la réalité, c’est que les étrangers ne sont ni meilleurs ni pire que nous », a-t-il résumé le 9 octobre.
    Ce jour-là, à l’occasion d’une session parlementaire consacrée à l’immigration, convoquée à la demande du Parti populaire (PP, droite) en raison de la crise migratoire dont souffrent les îles Canaries – 33 000 migrants y sont arrivés depuis le début de l’année (+ 40 % en un an) –, il a invoqué l’histoire et ressuscité des valeurs européennes que beaucoup semblent avoir oubliées. M. Sanchez a rappelé que l’histoire des Européens ne peut pas être dissociée de celle des migrations. Dans le cas de l’Espagne, près de 2 millions de personnes ont émigré entre 1948 et 1978, fuyant la misère et le franquisme, dont la moitié de manière illégale.
    Ses arguments ne sont pas nouveaux, mais ils sont peu utilisés en ce moment et politiquement courageux, puisque en septembre, l’immigration est devenue pour la première fois la principale préoccupation des Espagnols, devant l’économie et le logement, selon le Centre de recherche sociologique – l’équivalent de l’Insee.
    Alors que l’extrême droite parle d’« invasion » à propos des Africains accostant aux Canaries, il cite des faits : la migration irrégulière ne représente que 6 % du total des immigrés entrés en Espagne ces dix dernières années, dont 40 % sont latino-américains, 30 % européens et 20 % africains.
    Si, auparavant, bien des migrants ne restaient pas en Espagne et continuaient leur route vers le nord, c’est de moins en moins souvent le cas. Cette réalité est présentée comme une opportunité. De fait, malgré un solde démographique naturel négatif, l’Espagne est passée de 46,9 à 48,6 millions d’habitants (+ 3,6 %) entre 2019 et 2024. Dans le même temps, elle a gagné 1,4 million d’actifs qui contribuent à la croissance de l’économie, devenue l’un des moteurs de l’Europe (+ 2,7 % du PIB attendu cette année).
    Sans ces migrants, les principaux secteurs de l’économie espagnole ne pourraient pas fonctionner. L’agriculture, la construction, l’hôtellerie « couleraient, car ils y constituent de 25 % à 50 % des travailleurs », rappelle M. Sanchez. Loin de « nous mettre en danger », comme l’affirme l’extrême droite, ils représentent « la moitié des personnes qui travaillent dans les soins aux jeunes enfants ou aux personnes âgées, a-t-il ajouté. Les immigrés ont un taux d’activité de quatre points supérieur aux citoyens nationaux et apportent 10 % des revenus de la Sécurité sociale ».
    M. Sanchez n’est pas seul en Espagne à tenir un tel discours. L’Eglise espagnole reste un rempart contre la xénophobie. « Les personnes ont le droit fondamental de pouvoir chercher une vie meilleure. Les frontières ont été inventées par les hommes, pas par Dieu », a rappelé en mars l’évêque César Garcia Magan, secrétaire et porte-parole de la Conférence épiscopale espagnole, appelant les fidèles à « ne pas faire l’équation migrant égale délinquant, voleur ou violeur » car c’est « une injustice ». Le président de la Confédération des organisations d’entreprises, Antonio Garamendi, patron des patrons, soutient, quant à lui, la régularisation massive des travailleurs sans papiers et une « immigration légale et ordonnée » face au manque de main-d’œuvre.
    « D’un point de vue pratique, Pedro Sanchez ne fait pas grand-chose de différent de ce qu’ont fait ses prédécesseurs en Espagne : il externalise la gestion de ses frontières au Maroc, on lui a reproché de procéder à des refoulements à chaud et il plaide pour des contrats de travail signés dans les pays d’origine », rappelle le politiste Pablo Simon, professeur à l’université Carlos-III de Madrid.
    « Cependant, d’un point de vue rhétorique, analyse-t-il, il a décidé de faire de l’immigration un sujet de lutte idéologique face à l’extrême droite, en insistant sur ses bénéfices économiques et sur le respect des conventions internationales sur les droits humains. C’est un pari osé, alors que la gauche européenne ne sait pas comment affronter un thème qui lui a volé une partie de sa base électorale. » C’est aussi un pari nécessaire pour ne pas laisser l’extrême droite imposer un récit de la migration univoque, largement fantasmé.

    #Covid-19#migrant#migration#espagne#immigration#politiquemigratoire#economie#vieillissement#sante#droit

    • Les 1 % les plus riches émettent autant de CO2 que deux tiers de l’humanité

      - Les 1% les plus riches ont été responsables de 16% des émissions mondiales en 2019.
      - Leurs émissions sont suffisantes pour provoquer 1,3 million de décès supplémentaires dus à la chaleur.
      - Les décès liés aux inondations sont sept fois plus importants dans les pays inégalitaires que dans les pays plus égalitaires.
      - Une taxation juste des ultra-riches permettrait de lutter à la fois contre les inégalités et contre les changements climatiques.

      Un nouveau rapport publié aujourd’hui par Oxfam révèle qu’en 2019, les 1 % les plus riches ont généré autant d’émissions de carbone que 5 milliards de personnes qui représentaient alors les deux tiers les plus pauvres de l’humanité. Ce rapport a été rendu public en amont de la Conférence des Parties (COP) sur les changements climatiques qui se tiendra à Dubaï, dans un contexte d’inquiétude croissante alors que l’objectif de limiter le réchauffement mondial à 1,5 °C semble de plus en plus difficile à réaliser.

      Ces émissions démesurées des 1 % les plus riches vont causer 1,3 million de décès supplémentaires liés à la chaleur, soit environ l’équivalent de la population de Bruxelles. La plupart de ces décès surviendront entre 2020 et 2030.

      « Les ultra-riches pillent et polluent la planète au point de la détruire, et laissent l’humanité en proie aux chaleurs extrêmes, aux inondations et aux sécheresses, dénonce Amitabh Behar, directeur général par intérim d’Oxfam International.

      « Depuis des années, nous luttons pour mettre fin à l’ère des combustibles fossiles et sauver des millions de vie, ainsi que notre planète. Il est plus que jamais clair que cet objectif n’est possible que si nous mettons également fin à l’ère de l’extrême richesse », estime M. Behar.
      77 millions de personnes responsables de 16% des émissions mondiales

      Le rapport « Égalité climatique : une planète pour les 99% » est basé sur des recherches menées par l’Institut de l’environnement de Stockholm (SEI). Il analyse les émissions de consommation générées par différents groupes de revenus en 2019, l’année la plus récente pour laquelle des données sont disponibles. Ce rapport souligne l’écart considérable entre l’empreinte carbone des ultra-riches, dont le mode de vie gourmand en carbone et les investissements dans des industries polluantes comme les combustibles fossiles accélèrent le réchauffement climatique, et celle du reste de l’humanité.

      - Les 1 % les plus riches (77 millions de personnes) ont généré 16 % des émissions mondiales liées à la consommation en 2019, soit plus que l’ensemble des émissions liées aux voitures et au transport routier. Les 10 % les plus riches sont responsables de la moitié des émissions mondiales.
      - Il faudrait près de 1 500 ans à une personne appartenant au 99 % restants de l’humanité pour générer autant d’émissions de carbone que les milliardaires les plus riches produisent en un an.
      - Chaque année, les émissions des 1 % les plus riches annulent les économies de carbone réalisées grâce à l’utilisation de près d’un million d’éoliennes.
      - Depuis les années 1990, les 1% les plus riches ont consommé deux fois plus de budget carbone disponible pour limiter le réchauffement à 1,5°C que la moitié la plus pauvre de l’humanité.
      - Les émissions des 1 % les plus riches sont parties pour être 22 fois plus élevées en 2030 que le niveau requis pour limiter le réchauffement à 1,5°C défini dans l’Accord de Paris.

      Les pays à faible revenu, les plus sévèrement touchés par la crise climatique

      Les dérèglements climatiques et les inégalités perpétuent un cercle vicieux. Oxfam a constaté dans les pays dans lesquels elle est active que les personnes en situation de pauvreté, les femmes, les filles, les communautés autochtones et les pays du Sud global sont touchés de manière disproportionnée par les effets des changements climatiques qui, à leur tour, exacerbent les inégalités. Le rapport établit qu’il y a sept fois plus de décès dus aux inondations dans les pays plus inégalitaires. Les changements climatiques aggravent déjà les inégalités nationales et internationales.

      Les gouvernements peuvent s’attaquer au double fléau des inégalités et des changements climatiques en ciblant les émissions excessives des ultra-riches et en investissant dans les services publics et la réalisation des objectifs climatiques. D’après les estimations d’Oxfam, un impôt de 60 % sur les revenus des 1 % les plus riches réduirait les émissions d’une quantité supérieure aux émissions totales du Royaume-Uni et rapporterait 6,4 milliards de dollars par an pour financer l’abandon des combustibles fossiles et la transition vers les énergies renouvelables.

      « Nous devons montrer clairement l’interdépendance de ces deux questions. Tant qu’ils ne seront pas imposés, les plus riches vont continuer à spolier le reste de l’humanité, à détruire notre planète et à miner la démocratie. La taxation des richesses extrêmes renforcerait considérablement la lutte contre les inégalités et la crise climatique. Elle permettrait de générer des milliers de milliards de dollars qui sont requis pour investir dans nos démocraties et la mise en place de politiques gouvernementales réellement respectueuses de l’environnement », conclut M. Behar.

      https://oxfambelgique.be/les-1-les-plus-riches-emettent-autant-de-co2-que-deux-tiers-de-lhumani
      #rapport #1% #99%

      Pour télécharger le rapport :
      https://oi-files-d8-prod.s3.eu-west-2.amazonaws.com/s3fs-public/2023-11/VF%20Resume%CC%81%20executif_Oxfam_Franc%CC%A7ais%20.pdf

    • Les 1% les plus riches émettent autant de CO2 que deux tiers de l’humanité selon une étude d’#Oxfam

      En 2019, la frange la plus riche de la population mondiale (1%) a généré autant de CO2 que 5 milliards de personnes, qui représentaient alors les deux tiers les plus pauvres de l’humanité, indique l’ONG Oxfam dans un rapport publié lundi, à deux semaines de l’ouverture de la COP28 à Dubaï.

      Fondé sur les recherches de l’Institut de l’environnement de Stockholm (SEI), ce nouveau rapport, intitulé « Égalité climatique : une planète pour les 99% », analyse les émissions de consommation générées par différents groupes de revenus en 2019, dernière année pour laquelle des données sont disponibles.

      Selon les auteurs, les 1% les plus riches (77 millions de personnes) ont généré 15% des émissions mondiales liées à la consommation en 2019, soit plus que l’ensemble des émissions liées aux voitures et au transport routier. Les 10% les plus riches sont, quant à eux, responsables de la moitié des émissions mondiales.

      De l’autre côté de la pyramide, les 50% les plus pauvres ne sont responsables que de 8% des émissions en équivalent carbone sur la planète. « Il y a cercle vicieux qui s’installe avec la richesse, indique Alexandre Poidatz, responsable de campagne climat et inégalités chez Oxfam. Plus on est riche, plus on a un mode de vie qui émet du CO2. Cela s’explique par la consommation de biens de luxe non-essentiels et particulièrement polluants comme des yachts ou des jets. »

      Cet élément avait déjà été mis en avant par une étude scientifique réalisée aux Etats-Unis en 2021, qui démontrait que les 20 plus grands milliardaires des Etats-Unis avaient une emprunte carbone moyenne de 8000 tonnes de CO2 par an, alors qu’elle est de 8 tonnes pour un « Européen normal », et ce, en ne tenant compte que des émissions liées au logement, aux transports et aux yachts.

      D’après Oxfam, les 0,1% les plus riches émettent 77 fois plus de CO2 que l’objectif de 2,8 tonnes de CO2 par personne demandé par les Accords de Paris pour rester sous les 1,5°C de réchauffement climatique.
      La moitié des Belges font partie des 10% les plus riches

      Le riche n’est pas toujours l’autre. Car en jetant un œil à qui sont les « 10% les plus riches de la planète », on retrouve environ la moitié de la population belge assure Alexandre Poidatz d’Oxfam. Le fait de savoir où on se place au niveau mondial démontre que « notre mode de vie actuel général en Belgique n’est pas compatible avec un réchauffement climatique limité à 1,5°C. Et de fait, alors que le Belge émet en moyenne 6 à 7 tonnes de CO2 par an, on devrait descendre cela à 2,6 tonnes de CO2 par an. »

      Selon Oxfam, pour réduire cela, il est nécessaire que l’Etat propose des modes de consommation alternatifs et moins polluants, en favorisant par exemple le train face à la voiture individuelle.
      La solution ? Réduire les modes de consommation « non-essentiels »

      Pour réduire ces émissions carbone, et combattre en même temps les « inégalités extrêmes », Oxfam propose une taxation des plus riches. « Cela permettrait de réduire les inégalités en garantissant un revenu quotidien minimum de 25 dollars à chacun tout en réduisant les émissions mondiales de 10% ».

      Et d’un cercle vicieux « richesse - pollution », on passerait alors à un cercle vertueux « répartition des richesses - réduction des émissions de CO2 ». « Mais pour créer ce cercle vertueux, on a besoin que les décideurs politiques et économiques puissent orienter l’argent vers une transition écologique qui soit juste », pointe Alexandre Poidatz. Un appel lancé à 10 jours du début de la COP 28 au Qatar.
      Méthodologie

      Pour désigner la part de la population « la plus riche », Oxfam s’est basé sur le « Word inequality Database » qui classe la répartition mondiale des revenus des 5,15 milliards d’adultes en termes en parité de pouvoir d’achat (1 dollar permet d’acheter moins de choses aux USA qu’au Kenya). La méthodologie utilisée par Oxfam est accessible en anglais. L’ensemble des statistiques croisées entre revenus et émissions de CO2 sont consultables sur le site emissions-inequality.org.

      Les émissions de CO2 attribuées aux personnes, et a fortiori aux plus riches, ne tiennent pas compte des éventuelles sociétés dont ils auraient des parts.

      https://www.rtbf.be/article/les-1-les-plus-riches-emettent-autant-de-co2-que-deux-tiers-de-l-humanite-selon

  • The Code of Capital: How the Law Creates Wealth and Inequality

    Capital is the defining feature of modern economies, yet most people have no idea where it actually comes from. What is it, exactly, that transforms mere wealth into an asset that automatically creates more wealth? The Code of Capital explains how capital is created behind closed doors in the offices of private attorneys, and why this little-known fact is one of the biggest reasons for the widening wealth gap between the holders of capital and everybody else.

    In this revealing book, Katharina Pistor argues that the law selectively “codes” certain assets, endowing them with the capacity to protect and produce private wealth. With the right legal coding, any object, claim, or idea can be turned into capital—and lawyers are the keepers of the code. Pistor describes how they pick and choose among different legal systems and legal devices for the ones that best serve their clients’ needs, and how techniques that were first perfected centuries ago to code landholdings as capital are being used today to code stocks, bonds, ideas, and even expectations—assets that exist only in law.

    A powerful new way of thinking about one of the most pernicious problems of our time, The Code of Capital explores the different ways that debt, complex financial products, and other assets are coded to give financial advantage to their holders. This provocative book paints a troubling portrait of the pervasive global nature of the code, the people who shape it, and the governments that enforce it.

    https://press.princeton.edu/books/hardcover/9780691178974/the-code-of-capital
    #loi #injustice #inégalités #capital #capitalisme #richesse #système_légal #dette
    #livre

  • Héritières, tricheuses et inutiles : découvrez les 500 fortunes de France
    https://www.frustrationmagazine.fr/500-fortunes

    Chaque été sort la publication la plus marxiste de toute la presse française : le classement annuel des 500 familles les plus riches de France, par le magazine Challenges. Quand un citoyen parle de ces 500 grandes fortunes, il est un odieux complotiste. Mais quand c’est le magazine officiel de la bourgeoisie française, c’est du […]

  • L’expert de l’ONU sur la pauvreté alerte sur la dangereuse focalisation sur l’augmentation du #PIB comme moyen d’éradiquer la pauvreté dans le monde | OHCHR
    https://www.ohchr.org/fr/press-releases/2024/07/end-dangerous-fixation-gdp-way-eradicate-global-poverty-un-expert

    « Voilà des décennies que nous suivons le même script : faire croître l’économie d’abord, puis utiliser les #richesses pour lutter contre la pauvreté. Cette stratégie a engendré une situation désastreuse : un monde au bord de l’effondrement climatique dans lequel une minuscule élite possède scandaleusement une fortune démesurée tandis que des centaines de millions de personnes se débattent au quotidien dans l’horreur de l’extrême pauvreté », a déclaré #Olivier_De_Schutter, Rapporteur spécial de l’#ONU sur les droits de l’homme et l’extrême #pauvreté.

  • Tout ce que les riches ne veulent pas que vous sachiez sur eux | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/riches-ne-veulent-sachiez-eux/00111388

    « Pour vivre heureux, vivons cachés. » Un adage que les plus fortunés respectent à la lettre. Et c’est peu dire qu’ils voient d’un mauvais œil la publication du nouveau « Rapport sur les riches en France », édité par l’Observatoire des inégalités, et rendu public le 5 juin.

    Car en 88 pages et plusieurs centaines de tableaux et graphiques, dont certaines données sont inédites, ce document lève le voile sur leur train de vie privilégié. De quoi provoquer un tollé dans les rangs de nos concitoyens les plus aisés : les deux précédentes éditions de ce rapport ont suscité de nombreuses critiques, pour l’essentiel illégitimes.

    Même le très sérieux Insee, l’institut national de la statistique publique, s’est autorisé quelques piques. Critiques auxquelles répond de manière convaincante ce troisième opus, « celui de la maturité », estime Louis Maurin, le directeur de l’Observatoire des inégalités.

    L’accueil mouvementé réservé à ce rapport prouve en tout cas qu’il a fait mouche et qu’il bouscule quelques intérêts bien établis. Et pour cause : les riches, ce ne sont pas forcément les autres, ces quelques milliardaires qu’il est facile de brocarder sans se sentir concerné. La France à l’aise financièrement est bien plus large que cette poignée d’ultra-privilégiés.

    https://justpaste.it/ekiay

    #inégalités #richesse #patrimoine

  • Inégalités mondiales : pour les riches, la norme d’abondance

    Dans son rapport annuel, publié ce lundi 14 janvier, jour de l’ouverture du Forum de Davos, l’ONG Oxfam dénonce l’extrême concentration de la richesse depuis 2020 et le pouvoir des multinationales, alors qu’une large partie de la population mondiale souffre de l’inflation.

    La France n’a plus de Première ministre, mais elle a « gagné » une « pionnière » d’un tout autre genre. En effet, la première femme à avoir vu sa fortune dépasser les 100 milliards de dollars (91 milliards d’euros) est française, il s’agit de Françoise Bettencourt Meyers, l’héritière du fondateur de L’Oréal, selon l’indice Bloomberg des milliardaires de fin décembre (elle est repassée depuis sous cette barre symbolique). Pour autant, dans cette coterie-là non plus, les inégalités entre les hommes et les femmes ne sont pas près de disparaître. Bernard Arnault, le fondateur de LVMH, qui figure dans le trio des plus riches du monde, détient une fortune bien plus importante que sa compatriote, estimée aujourd’hui à 162 milliards de dollars par le même indice.

    Pendant qu’une grande partie de la population se débattait avec l’inflation, ces deux-là comme les 40 autres milliardaires français, se sont considérablement enrichis. Ils ont gagné, en cumulé, 230 milliards de dollars ces trois dernières années, calcule l’ONG Oxfam, en s’appuyant sur les données du magazine américain Forbes. Au total leur fortune atteint près de 600 milliards de dollars.

    « Danger bien réel »

    Ce lundi 15 janvier, jour de l’ouverture du 54e Forum économique mondial dans la station de ski suisse de Davos, où Emmanuel Macron mettra les pieds mercredi pour la première fois depuis six ans, Oxfam publie son rapport annuel sur les inégalités mondiales. Ces dernières s’accroissent. Tandis que les plus riches le sont toujours plus – depuis 2020, la fortune des milliardaires s’est appréciée de 34 %, soit de 3 300 milliards de dollars, trois fois plus que l’inflation –, près de cinq milliards de personnes se sont appauvries, estime Oxfam en compilant plusieurs sources. Constatant que « l’augmentation spectaculaire de l’extrême richesse observée depuis 2020 est désormais gravée dans le marbre », l’ONG s’alarme du « danger bien réel de voir cette aggravation devenir la norme ».

    Le rapport décrit une extrême concentration de la richesse, sur différents plans. Entre les zones géographiques. « Seulement 21 % de l’humanité vit dans les pays du Nord, mais ces pays abritent 69 % de la richesse privée et 74 % de la richesse mondiale des milliardaires. » Dans la détention des actifs financiers : les 1 % les plus riches possèdent 43 % de tous les actifs financiers mondiaux. Entre les entreprises : « Au niveau mondial, les 0,001 % d’entreprises les plus importantes empochent environ un tiers de tous les bénéfices des entreprises. »
    « Eviter le piège à la con »

    Ces multinationales, et leurs propriétaires par la même occasion, viennent de vivre des années de crises ultraprofitables. En analysant les profits de 148 des plus grandes entreprises mondiales, Oxfam constate qu’en 2021 et 2022, ils sont en hausse de 89 % par rapport à la moyenne des années 2017 à 2020. D’après les premiers chiffres disponibles, « l’année 2023 devrait battre tous les records de bénéfices pour les grandes entreprises », note aussi le rapport. Les compagnies pétrolières et gazières, les marques de luxe, les entreprises du secteur financier ainsi que les laboratoires pharmaceutiques apparaissent comme les plus gagnantes, comme d’autres études l’avaient déjà démontré. Pendant que les revendications de hausses salariales ont été ravivées dans de nombreux pays par le choc inflationniste, le partage de la valeur dans les grandes entreprises reste loin d’être équitable. En considérant cette fois 96 d’entre elles et les douze mois précédant juin 2023, Oxfam calcule que pour chaque tranche de 100 dollars de bénéfices, 82 dollars sont allés vers les actionnaires, en rachats d’actions ou en distribution de dividendes.

    Oxfam s’attaque aux monopoles et à leur pouvoir, qualifié de « machine implacable à fabriquer des inégalités » – un sujet de préoccupations et débats particulièrement vifs aux Etats-Unis. Rappelant les évolutions des trois dernières décennies, comme les fusions successives qui ont abouti à l’avènement des dix géants mondiaux de l’industrie pharmaceutique, ou l’émergence des « Big tech » avec Meta (maison mère de Facebook), Alphabet (maison mère de Google) et Amazon qui raflent les trois quarts des dépenses publicitaires en ligne, Oxfam dénonce « un pouvoir des monopoles qui s’accroît et alimente les inégalités », notamment avec une coordination implicite pour augmenter les prix et les marges. La hausse de ces dernières est même soupçonnée d’avoir nourri l’inflation dans la zone euro, formant une boucle prix profits, selon les travaux de plusieurs économistes du Fonds monétaire international publiés en juin.

    Afin de réduire les inégalités, l’ONG continue de plaider pour une réforme de la fiscalité. Son antenne française, dirigée par Cécile Duflot, propose plusieurs mesures fiscales, qui mettraient davantage à contribution seulement 30 % des Français. Parmi elles, un ISF climatique. Celui-ci prendrait en compte le niveau de patrimoine des plus aisés ainsi que son empreinte carbone et pourrait rapporter autour de 15 milliards d’euros par an. Au printemps dernier, Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz esquissaient dans leur rapport sur les aspects économiques de la transition climatique une version plus restreinte de ce mécanisme, avec un impôt temporaire dédié au financement de la transition, qui serait prélevé sur le patrimoine financier des 10 % les plus riches et générerait environ 5 milliards d’euros par an. Emmanuel Macron avait alors tenté de clore les discussions, en enjoignant à la Première ministre, selon des propos tenus en Conseil des ministres et rapportés par le Figaro, « d’éviter le piège à la con du débat sur la fiscalité des riches ». Rien n’indique qu’il a changé d’avis.

    https://www.liberation.fr/economie/inegalites-mondiales-pour-les-riches-la-norme-dabondance-20240115_LGVC6SH
    #richesse #pauvreté #riches #pauvres #inégalités #visualisation #graphique #France #statistiques #chiffres #inflation #multinationales #concentration_de_la_richesse #milliardaires #Bernard_Arnault #LVMH #fortune #impôts #fiscalité

    • Multinationales et inégalités multiples : nouveau rapport

      Depuis 2020, les cinq hommes les plus riches du monde ont doublé leur fortune tandis que, dans le même temps, la richesse cumulée de 5 milliards de personnes a baissé. C’est ce que révèle le nouveau rapport d’Oxfam sur les inégalités mondiales.

      Si cette tendance se poursuit, nous pourrions voir dans près de 10 ans la fortune d’un multimilliardaire franchir pour la première fois le cap de 1000 milliards de dollars alors qu’il faudra encore 230 ans pour éradiquer la pauvreté.

      Malgré les crises successives, les milliardaires prospèrent. Pourquoi ? Car ils achètent le pouvoir politique et économique.

      Inégalités mondiales : les chiffres-clés
      Monde

      – La fortune des 5 hommes les plus riches a grimpé de 114 % depuis 2020.
      - La fortune des milliardaires a augmenté de 3 300 milliards de dollars depuis 2020, à une vitesse 3 fois plus rapide que celle de l’inflation.
      - Les 1 % les plus riches possèdent 48 % de tous les actifs financiers mondiaux.
      - Les pays riches du Nord détiennent 69 % des richesses mondiales et accueillent 74 % des richesses des milliardaires alors qu’ils n’abritent que 21 % de la population mondiale.
      - Au rythme actuel, il faudrait plus de deux siècles pour mettre fin à la pauvreté, mais dans à peine 10 ans nous pourrions voir pour la première fois la fortune d’un multimilliardaire franchir le cap des 1 000 milliards de dollars. Avoir 1 000 milliards, c’est comme gagner plus d’un million d’euros par jour depuis la naissance de Jésus-Christ.
      - Sept des dix plus grandes entreprises mondiales sont dirigées par un·e milliardaire.
      - 148 grandes entreprises ont réalisé 1800 milliards de dollars de bénéfices cumulés – soit 52 % de plus en moyenne sur les 3 dernières années – et distribué d’énormes dividendes à de riches actionnaires tandis que des centaines de millions de personnes ont été confrontées à des réductions de salaires réels.

      France

      - Les quatre milliardaires français les plus riches et leurs familles – la famille Arnault, la famille Bettencourt Meyers, Gérard et Alain Wertheimer – ont vu leur fortune augmenter de 87 % depuis 2020. Dans le même temps, la richesse cumulée de 90% des Français a baissé.
      - Sur cette même période, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros, autant que pour faire un chèque de 3 400 euros pour chaque Français-e.
      - Les 1 % les plus riches détiennent 36 % du patrimoine financier total en France alors que plus de 80% des Français ne déclarent posséder ni assurance-vie, ni actions directement.
      - 11 des plus grandes entreprises françaises ont réalisé 101 milliards de dollars de bénéfices entre juin 2022 et juin 2023, soit une augmentation de 57% par rapport à la période 2018-2021.
      – L’héritière Françoise Bettencourt est devenue la première femme milliardaire à voir sa fortune atteindre les 100 milliards d’euros.

      Grandes entreprises, médias : comment les milliardaires achètent le pouvoir

      Depuis 2020, l’accroissement de la fortune des milliardaires et l’accumulation de profits des multinationales sont intrinsèquement liés.

      A l’heure où l’élite économique se réunit à Davos, le rapport « Multinationales et inégalités multiples » révèle notamment que sept des dix plus grandes entreprises mondiales ont un·e PDG milliardaire ou un·e milliardaire comme actionnaire principal·e.

      Les grandes entreprises ont un pouvoir démesuré et sont une machine à fabriquer des inégalités. Salaires qui augmentent moins que la rémunération des PDG, bénéfices majoritairement utilisés pour rémunérer les actionnaires, optimisation fiscale : les milliardaires veillent avant tout à ce que les multinationales contribuent à leur propre enrichissement, au détriment du reste de la population.

      Ils utilisent par ailleurs leur richesse pour asseoir et conforter leur influence politique, en particulier via leur emprise sur les médias et leurs relations avec les hautes sphères de l’Etat.
      En France aussi, les milliardaires s’enrichissent et la pauvreté s’intensifie

      Les 4 milliardaires français les plus riches (Bernard Arnault et sa famille, Françoise Bettencourt Meyers et sa famille ainsi que Gérard Wertheimer et Alain Wertheimer) ont vu leur fortune augmenter de 87% depuis 2020.

      Sur la même période, les 42 milliardaires français ont gagné 230 milliards d’euros, soit l’équivalent d’un chèque de 3 400 euros pour chaque Français·e. Alors que les Français et Françaises subissent l’inflation de plein fouet et sont confronté·e·s à une véritable crise du pouvoir d’achat, l’enrichissement continu des ultra-riches fracture la société.

      Comme dans le reste du monde, l’omniprésence des milliardaires dans les mondes économique, politique et médiatique, est indéniable. En tête de proue : Bernard Arnault, à la tête de l’empire du luxe LVMH et de certains des plus grands médias français comme Les Échos ou Le Parisien, mais aussi le milliardaire Vincent Bolloré, qui fait des médias dont il est actionnaire principal une arme au service de l’extrême droite.

      https://www.oxfamfrance.org/rapports/multinationales-et-inegalites-multiples
      #rapport #oxfam

  • #José_Vieira : « La #mémoire des résistances face à l’accaparement des terres a été peu transmise »

    Dans « #Territórios_ocupados », José Vieira revient sur l’#expropriation en #1941 des paysans portugais de leurs #terres_communales pour y planter des #forêts. Cet épisode explique les #mégafeux qui ravagent le pays et résonne avec les #luttes pour la défense des #biens_communs.

    Né au Portugal en 1957 et arrivé enfant en France à l’âge de 7 ans, José Vieira réalise depuis plus de trente ans des documentaires qui racontent une histoire populaire de l’immigration portugaise.

    Bien loin du mythe des Portugais·es qui se seraient « intégré·es » sans le moindre problème en France a contrario d’autres populations, José Vieira s’est attaché à démontrer comment l’#immigration_portugaise a été un #exode violent – voir notamment La Photo déchirée (2001) ou Souvenirs d’un futur radieux (2014) –, synonyme d’un impossible retour.

    Dans son nouveau documentaire, Territórios ocupados, diffusé sur Mediapart, José Vieira a posé sa caméra dans les #montagnes du #Caramulo, au centre du #Portugal, afin de déterrer une histoire oubliée de la #mémoire_collective rurale du pays. Celle de l’expropriation en 1941, par l’État salazariste, de milliers de paysans et de paysannes de leurs terres communales – #baldios en portugais.

    Cette #violence étatique a été opérée au nom d’un vaste #projet_industriel : planter des forêts pour développer économiquement ces #territoires_ruraux et, par le même geste, « civiliser » les villageois et villageoises des #montagnes, encore rétifs au #salariat et à l’ordre social réactionnaire de #Salazar. Un épisode qui résonne aujourd’hui avec les politiques libérales des États qui aident les intérêts privés à accaparer les biens communs.

    Mediapart : Comment avez-vous découvert cette histoire oubliée de l’expropriation des terres communales ou « baldios » au Portugal ?

    José Vieira : Complètement par hasard. J’étais en train de filmer Le pain que le diable a pétri (2012, Zeugma Films) sur les habitants des montagnes au Portugal qui sont partis après-guerre travailler dans les usines à Lisbonne.

    Je demandais à un vieux qui est resté au village, António, quelle était la définition d’un baldio – on voit cet extrait dans le documentaire, où il parle d’un lieu où tout le monde peut aller pour récolter du bois, faire pâturer ses bêtes, etc. Puis il me sort soudain : « Sauf que l’État a occupé tous les baldios, c’était juste avant que je parte au service militaire. »

    J’étais estomaqué, je voulais en savoir plus mais impossible, car dans la foulée, il m’a envoyé baladé en râlant : « De toute façon, je ne te supporte pas aujourd’hui. »

    Qu’avez-vous fait alors ?

    J’ai commencé à fouiller sur Internet et j’ai eu la chance de tomber sur une étude parue dans la revue de sociologie portugaise Análise Social, qui raconte comment dans les années 1940 l’État salazariste avait pour projet initial de boiser 500 000 hectares de biens communaux en expropriant les usagers de ces terres.

    Je devais ensuite trouver des éléments d’histoire locale, dans la Serra do Caramulo, dont je suis originaire. J’ai passé un temps fou le nez dans les archives du journal local, qui était bien sûr à l’époque entièrement dévoué au régime.

    Après la publication de l’avis à la population que les baldios seront expropriés au profit de la plantation de forêts, plus aucune mention des communaux n’apparaît dans la presse. Mais rapidement, des correspondants locaux et des éditorialistes vont s’apercevoir qu’il existe dans ce territoire un malaise, qu’Untel abandonne sa ferme faute de pâturage ou que d’autres partent en ville. En somme, que sans les baldios, les gens ne s’en sortent plus.

    Comment sont perçus les communaux par les tenants du salazarisme ?

    Les ingénieurs forestiers décrivent les paysans de ces territoires comme des « primitifs » qu’il faut « civiliser ». Ils se voient comme des missionnaires du progrès et dénoncent l’oisiveté de ces montagnards peu enclins au salariat.

    À Lisbonne, j’ai trouvé aussi une archive qui parle des baldios comme étant une source de perversion, de mœurs légères qui conduisent à des enfants illégitimes dans des coins où « les familles vivent presque sans travailler ». Un crime dans un régime où le travail est élevé au rang de valeur suprême.

    On retrouve tous ces différents motifs dans le fameux Portrait du colonisé d’Albert Memmi (1957). Car il y a de la part du régime un vrai discours de colonisateur vis-à-vis de ces régions montagneuses où l’État et la religion ont encore peu de prise sur les habitants.

    En somme, l’État salazariste veut faire entrer ces Portugais reculés dans la modernité.

    Il y a eu des résistances face à ces expropriations ?

    Les villageois vont être embauchés pour boiser les baldios. Sauf qu’après avoir semé les pins, il faut attendre vingt ans pour que la forêt pousse.

    Il y a eu alors quelques histoires d’arrachage clandestin d’arbres. Et je raconte dans le film comment une incartade avec un garde forestier a failli virer au drame à cause d’une balle perdue – je rappelle qu’on est alors sous la chape de plomb du salazarisme. D’autres habitants ont aussi tabassé deux gardes forestiers à la sortie d’un bar et leur ont piqué leurs flingues.

    Mais la mémoire de ces résistances a peu été transmise. Aujourd’hui, avec l’émigration, il ne reste plus rien de cette mémoire collective, la plupart des vieux et vieilles que j’ai filmés dans ce documentaire sont déjà morts.

    Comment justement avez-vous travaillé pour ce documentaire ?

    Quand António me raconte cette histoire d’expropriation des baldios par l’État, c’était en 2010 et je tournais un documentaire, Souvenirs d’un futur radieux. Puis lorsqu’en 2014 un premier incendie a calciné le paysage forestier, je me suis dit qu’il fallait que je m’y mette.

    J’ai travaillé doucement, pendant trois ans, sans savoir où j’allais réellement. J’ai filmé un village situé à 15 kilomètres de là où je suis né. J’ai fait le choix d’y suivre des gens qui subsistent encore en pratiquant une agriculture traditionnelle, avec des outils de travail séculaires, comme la roue celte. Ils ont les mêmes pratiques que dans les années 1940, et qui sont respectueuses de l’écosystème, de la ressource en eau, de la terre.

    Vous vous êtes aussi attaché à retracer tel un historien cet épisode de boisement à marche forcée...

    Cette utopie industrialiste date du XIXe siècle, des ingénieurs forestiers parlant déjà de vouloir récupérer ces « terres de personne ». Puis sous Salazar, dans les années 1930, il y a eu un débat intense au sein du régime entre agrairistes et industrialistes. Pour les premiers, boiser ne va pas être rentable et les baldios sont vitaux aux paysans. Pour les seconds, le pays a besoin de l’industrie du bois pour décoller économiquement, et il manque de bras dans les villes pour travailler dans les usines.

    Le pouvoir central a alors même créé un organisme étatique, la Junte de colonisation interne, qui va recenser les baldios et proposer d’installer des personnes en leur donnant à cultiver des terres communales – des colonies de repeuplement pour résumer.

    Finalement, l’industrie du bois et de la cellulose l’a emporté. La loi de boisement des baldios est votée en 1938 et c’est en novembre 1941 que ça va commencer à se mettre en place sur le terrain.

    Une enquête publique a été réalisée, où tout le monde localement s’est prononcé contre. Et comme pour les enquêtes aujourd’hui en France, ils se sont arrangés pour dire que les habitants étaient d’accord.

    Qu’en est-il aujourd’hui de ces forêts ? Subsiste-t-il encore des « baldios » ?

    Les pinèdes sont exploitées par des boîtes privées qui font travailler des prolos qui galèrent en bossant dur. Mais beaucoup de ces forêts ont brûlé ces dernière décennies, notamment lors de la grande vague d’incendies au Portugal de 2017, où des gens du village où je filmais ont failli périr.

    Les feux ont dévoilé les paysages de pierre qu’on voyait auparavant sur les photos d’archives du territoire, avant que des pins de 30 mètres de haut ne bouchent le paysage.

    Quant aux baldios restants, ils sont loués à des entreprises de cellulose qui y plantent de l’eucalyptus. D’autres servent à faire des parcs d’éoliennes. Toutes les lois promues par les différents gouvernements à travers l’histoire du Portugal vont dans le même sens : privatiser les baldios alors que ces gens ont géré pendant des siècles ces espaces de façon collective et très intelligente.

    J’ai fait ce film avec en tête les forêts au Brésil gérées par les peuples autochtones depuis des siècles, TotalEnergies en Ouganda qui déplace 100 000 personnes de leurs terres pour du pétrole ou encore Sainte-Soline, où l’État aide les intérêts privés à accaparer un autre bien commun : l’eau.

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/021223/jose-vieira-la-memoire-des-resistances-face-l-accaparement-des-terres-ete-

    #accaparement_de_terres #terre #terres #dictature #histoire #paysannerie #Serra_do_Caramulo #communaux #salazarisme #progrès #colonisation #colonialisme #rural #modernité #résistance #incendie #boisement #utopie_industrialiste #ingénieurs #ingénieurs_forestiers #propriété #industrie_du_bois #Junte_de_colonisation_interne #colonies_de_repeuplement #cellulose #pinèdes #feux #paysage #privatisation #eucalyptus #éoliennes #loi #foncier

  • Cette #hospitalité_radicale que prône la philosophe #Marie-José_Mondzain

    Dans « Accueillir. Venu(e)s d’un ventre ou d’un pays », Marie-José Mondzain, 81 ans, se livre à un plaidoyer partageur. Elle oppose à la #haine d’autrui, dont nous éprouvons les ravages, l’#amour_sensible et politique de l’Autre, qu’il faudrait savoir adopter.

    En ces temps de crispations identitaires et même de haines communautaires, Marie-José Mondzain nous en conjure : choisissons, contre l’#hostilité, l’hospitalité. Une #hospitalité_créatrice, qui permette de se libérer à la fois de la loi du sang et du #patriarcat.

    Pour ce faire, il faut passer de la filiation biologique à la « #philiation » − du grec philia, « #amitié ». Mais une #amitié_politique et proactive : #abriter, #nourrir, #loger, #soigner l’Autre qui nous arrive ; ce si proche venu de si loin.

    L’hospitalité fut un objet d’étude et de réflexion de Jacques Derrida (1930-2004). Née douze ans après lui, à Alger comme lui, Marie-José Mondzain poursuit la réflexion en rompant avec « toute légitimité fondée sur la réalité ou le fantasme des origines ». Et en prônant l’#adoption comme voie de réception, de prise en charge, de #bienvenue.

    Son essai Accueillir. Venu(e)s d’un ventre ou d’un pays se voudrait programmatique en invitant à « repenser les #liens qui se constituent politiquement et poétiquement dans la #rencontre de tout sujet qu’il nous incombe d’adopter ».

    D’Abraham au film de Tarkovski Andreï Roublev, d’Ulysse à A. I. Intelligence artificielle de Spielberg en passant par Antigone, Shakespeare ou Melville, se déploie un plaidoyer radical et généreux, « phraternel », pour faire advenir l’humanité « en libérant les hommes et les femmes des chaînes qui les ont assignés à des #rapports_de_force et d’#inégalité ».

    En cette fin novembre 2023, alors que s’ajoute, à la phobie des migrants qui laboure le monde industriel, la guerre menée par Israël contre le Hamas, nous avons d’emblée voulu interroger Marie-José Mondzain sur cette violence-là.

    Signataire de la tribune « Vous n’aurez pas le silence des juifs de France » condamnant le pilonnage de Gaza, la philosophe est l’autrice d’un livre pionnier, adapté de sa thèse d’État qui forait dans la doctrine des Pères de l’Église concernant la représentation figurée : Image, icône, économie. Les sources byzantines de l’imaginaire contemporain (Seuil, 1996).

    Mediapart : Comment voyez-vous les images qui nous travaillent depuis le 7 octobre ?

    Marie-José Mondzain : Il y a eu d’emblée un régime d’images relevant de l’événement dans sa violence : le massacre commis par le Hamas tel qu’il fut en partie montré par Israël. À cela s’est ensuite substitué le tableau des visages et des noms des otages, devenu toile de fond iconique.

    Du côté de Gaza apparaît un champ de ruines, des maisons effondrées, des rues impraticables. Le tout depuis un aplomb qui n’est plus un regard humain mais d’oiseau ou d’aviateur, du fait de l’usage des drones. La mort est alors sans visages et sans noms.

    Face au phénomène d’identification du côté israélien s’est donc développée une rhétorique de l’invisibilité palestinienne, avec ces guerriers du Hamas se terrant dans des souterrains et que traque l’armée israélienne sans jamais donner à voir la moindre réalité humaine de cet ennemi.

    Entre le visible et l’invisible ainsi organisés, cette question de l’image apparaît donc extrêmement dissymétrique. Dissymétrie accentuée par la mise en scène des chaînes d’information en continu, qui séparent sur les écrans, avec des bandes lumineuses et colorées, les vues de Gaza en ruine et l’iconostase des otages.

    C’est avec de telles illustrations dans leur dos que les prétendus experts rassemblés en studio s’interrogent : « Comment retrouver la paix ? » Comme si la paix était suspendue à ces images et à la seule question des otages. Or, le contraire de la guerre, ce n’est pas la paix − et encore moins la trêve −, mais la justice.

    Nous assistons plutôt au triomphe de la loi du talion, dont les images deviennent un levier. Au point que visionner les vidéos des massacres horrifiques du Hamas dégénère en obligation…

    Les images deviennent en effet une mise à l’épreuve et une punition. On laisse alors supposer qu’elles font suffisamment souffrir pour que l’on fasse souffrir ceux qui ne prennent pas la souffrance suffisamment au sérieux.

    Si nous continuons à être uniquement dans une réponse émotionnelle à la souffrance, nous n’irons pas au-delà d’une gestion de la trêve. Or la question, qui est celle de la justice, s’avère résolument politique.

    Mais jamais les choses ne sont posées politiquement. On va les poser en termes d’identité, de communauté, de religion − le climat très trouble que nous vivons, avec une indéniable remontée de l’antisémitisme, pousse en ce sens.

    Les chaînes d’information en continu ne nous montrent jamais une carte de la Cisjordanie, devenue trouée de toutes parts telle une tranche d’emmental, au point d’exclure encore et toujours la présence palestinienne. Les drones ne servent jamais à filmer les colonies israéliennes dans les Territoires occupés. Ce serait pourtant une image explicite et politique…

    Vous mettez en garde contre toute « réponse émotionnelle » à propos des images, mais vous en appelez dans votre livre aux affects, dans la mesure où, écrivez-vous, « accueillir, c’est métamorphoser son regard »…

    J’avais écrit, après le 11 septembre 2001, L’#image peut-elle tuer ?, ou comment l’#instrumentalisation du #régime_émotionnel fait appel à des énergies pulsionnelles, qui mettent le sujet en situation de terreur, de crainte, ou de pitié. Il s’agit d’un usage balistique des images, qui deviennent alors des armes parmi d’autres.

    Un tel bombardement d’images qui sème l’effroi, qui nous réduit au silence ou au cri, prive de « logos » : de parole, de pensée, d’adresse aux autres. On s’en remet à la spontanéité d’une émotivité immédiate qui supprime le temps et les moyens de l’analyse, de la mise en rapport, de la mise en relation.

    Or, comme le pensait Édouard Glissant, il n’y a qu’une poétique de la relation qui peut mener à une politique de la relation, donc à une construction mentale et affective de l’accueil.

    Vous prônez un « #tout-accueil » qui semble faire écho au « Tout-monde » de Glissant…

    Oui, le lien est évident, jusqu’en ce #modèle_archipélique pensé par Glissant, c’est-à-dire le rapport entre l’insularité et la circulation en des espaces qui sont à la fois autonomes et séparables, qui forment une unité dans le respect des écarts.

    Ces écarts assument la #conflictualité et organisent le champ des rapports, des mises en relation, naviguant ainsi entre deux écueils : l’#exclusion et la #fusion.

    Comment ressentir comme un apport la vague migratoire, présentée, voire appréhendée tel un trop-plein ?

    Ce qui anime mon livre, c’est de reconnaître que celui qui arrive dans sa nudité, sa fragilité, sa misère et sa demande est l’occasion d’un accroissement de nos #ressources. Oui, le pauvre peut être porteur de quelque chose qui nous manque. Il nous faut dire merci à ceux qui arrivent. Ils deviennent une #richesse qui mérite #abri et #protection, sous le signe d’une #gratitude_partagée.

    Ils arrivent par milliers. Ils vont arriver par millions − je ne serai alors plus là, vu mon âge −, compte tenu des conditions économiques et climatiques à venir. Il nous faut donc nous y préparer culturellement, puisque l’hospitalité est pour moi un autre nom de la #culture.

    Il nous faut préméditer un monde à partager, à construire ensemble ; sur des bases qui ne soient pas la reproduction ou le prolongement de l’état de fait actuel, que déserte la prospérité et où semble s’universaliser la guerre. Cette préparation relève pour moi, plus que jamais, d’une #poétique_des_relations.

    Je travaille avec et auprès d’artistes − plasticiens, poètes, cinéastes, musiciens −, qui s’emparent de toutes les matières traditionnelles ou nouvelles pour créer la scène des rapports possibles. Il faut rompre avec ce qui n’a servi qu’à uniformiser le monde, en faisant appel à toutes les turbulences et à toutes les insoumissions, en inventant et en créant.

    En établissant des #zones_à_créer (#ZAC) ?

    Oui, des zones où seraient rappelées la force des faibles, la richesse des pauvres et toutes les ressources de l’indigence qu’il y a dans des formes de précarité.

    La ZAD (zone à défendre) ne m’intéresse effectivement que dans la mesure où elle se donne pour but d’occuper autrement les lieux, c’est-à-dire en y créant la scène d’une redistribution des places et d’un partage des pouvoirs face aux tyrannies économiques.

    Pas uniquement économiques...

    Il faut bien sûr compter avec ce qui vient les soutenir, anthropologiquement, puisque ces tyrannies s’équipent de tout un appareil symbolique et d’affects touchant à l’imaginaire.

    Aujourd’hui, ce qui me frappe, c’est la place de la haine dans les formes de #despotisme à l’œuvre. Après – ou avant – Trump, nous venons d’avoir droit, en Argentine, à Javier Milei, l’homme qui se pose en meurtrier prenant le pouvoir avec une tronçonneuse.

    Vous y opposez une forme d’amitié, de #fraternité, la « #filia », que vous écrivez « #philia ».

    Le [ph] désigne des #liens_choisis et construits, qui engagent politiquement tous nos affects, la totalité de notre expérience sensible, pour faire échec aux formes d’exclusion inspirées par la #phobie.

    Est-ce une façon d’échapper au piège de l’origine ?

    Oui, ainsi que de la #naturalisation : le #capitalisme se considère comme un système naturel, de même que la rivalité, le désir de #propriété ou de #richesse sont envisagés comme des #lois_de_la_nature.

    D’où l’appellation de « #jungle_de_Calais », qui fait référence à un état de nature et d’ensauvagement, alors que le film de Nicolas Klotz et Élisabeth Perceval, L’Héroïque lande. La frontière brûle (2018), montre magnifiquement que ce refuge n’était pas une #jungle mais une cité et une sociabilité créées par des gens venus de contrées, de langues et de religions différentes.

    Vous est-il arrivé personnellement d’accueillir, donc d’adopter ?

    J’ai en en effet tissé avec des gens indépendants de mes liens familiaux des relations d’adoption. Des gens dont je me sentais responsable et dont la fragilité que j’accueillais m’apportait bien plus que ce que je pouvais, par mes ressources, leur offrir.

    Il arrive, du reste, à mes enfants de m’en faire le reproche, tant les font parfois douter de leur situation les relations que je constitue et qui tiennent une place si considérable dans ma vie. Sans ces relations d’adoption, aux liens si constituants, je ne me serais pas sentie aussi vivante que je le suis.

    D’où mon refus du seul #héritage_biologique. Ce qui se transmet se construit. C’est toujours dans un geste de fiction turbulente et joyeuse que l’on produit les liens que l’on veut faire advenir, la #vie_commune que l’on désire partager, la cohérence politique d’une #égalité entre parties inégales – voire conflictuelles.

    La lecture de #Castoriadis a pu alimenter ma défense de la #radicalité. Et m’a fait reconnaître que la question du #désordre et du #chaos, il faut l’assumer et en tirer l’énergie qui saura donner une forme. Le compositeur Pascal Dusapin, interrogé sur la création, a eu cette réponse admirable : « C’est donner des bords au chaos. »

    Toutefois, ces bords ne sont pas des blocs mais des frontières toujours poreuses et fluantes, dans une mobilité et un déplacement ininterrompus.

    Accueillir, est-ce « donner des bords » à l’exil ?

    C’est donner son #territoire au corps qui arrive, un territoire où se créent non pas des murs aux allures de fin de non-recevoir, mais des cloisons – entre l’intime et le public, entre toi et moi : ni exclusion ni fusion…

    Mon livre est un plaidoyer en faveur de ce qui circule et contre ce qui est pétrifié. C’est le #mouvement qui aura raison du monde. Et si nous voulons que ce mouvement ne soit pas une déclaration de guerre généralisée, il nous faut créer une #culture_de_l’hospitalité, c’est-à-dire apprendre à recevoir les nouvelles conditions du #partage.

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/271123/cette-hospitalite-radicale-que-prone-la-philosophe-marie-jose-mondzain
    #hospitalité #amour_politique

    via @karine4

    • Accueillir - venu(e)s d’un ventre ou d’un pays

      Naître ne suffit pas, encore faut-il être adopté. La filiation biologique, et donc l’arrivée d’un nouveau-né dans une famille, n’est pas le modèle de tout accueil mais un de ses cas particuliers. Il ne faut pas penser la filiation dans son lien plus ou moins fort avec le modèle normatif de la transmission biologique, mais du point de vue d’une attention à ce qui la fonde : l’hospitalité. Elle est un art, celui de l’exercice de la philia, de l’affect et du lien qui dans la rencontre et l’accueil de tout autre exige de substituer au terme de filiation celui de philiation. Il nous faut rompre avec toute légitimité fondée sur la réalité ou le fantasme des origines. Cette rupture est impérative dans un temps de migrations planétaires, de déplacements subjectifs et de mutations identitaires. Ce qu’on appelait jadis « les lois de l’hospitalité » sont bafouées par tous les replis haineux et phobiques qui nous privent des joies et des richesses procurées par l’accueil. Faute d’adopter et d’être adopté, une masse d’orphelins ne peut plus devenir un peuple. La défense des philiations opère un geste théorique qui permet de repenser les liens qui se constituent politiquement et poétiquement dans la rencontre de tout sujet qu’il nous incombe d’adopter, qu’il provienne d’un ventre ou d’un pays. Le nouveau venu comme le premier venu ne serait-il pas celle ou celui qui me manquait ? D’où qu’il vienne ou provienne, sa nouveauté nous offre la possibilité de faire œuvre.

      https://www.quaidesmots.fr/accueillir-venu-e-s-d-un-ventre-ou-d-un-pays.html
      #livre #filiation_biologique #accueil

  • Les ménages les plus aisés ont échappé au piège de l’inflation, pas les plus modestes

    L’#Insee publie deux études qui permettent de mesurer l’impact de l’inflation sur le niveau de vie. Conséquence d’une #politique_antiredistributive du gouvernement, les 10 % les plus aisés sont les seuls à avoir vu leur capacité d’acheter progresser.

    LaLa France a connu en 2022 le plus fort taux d’inflation depuis le milieu des années 1980, avec un niveau moyen de 5,2 %. Cette accélération de la hausse des prix est souvent difficile à traduire en termes d’impact sur le niveau de vie, car le taux d’inflation concerne un panier moyen assez éloigné de la réalité des dépenses quotidiennes des ménages. De même, il est parfois difficile de saisir la réalité de l’évolution des revenus qui viendrait compenser cette hausse des prix.

    Deux études de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) publiées jeudi 23 novembre dans le cadre de son « Portrait social de la France » annuel tentent néanmoins de saisir le phénomène. La première décrypte l’impact sur les niveaux de vie des mesures sociofiscales, c’est-à-dire des mesures prises par le gouvernement sur le plan des allocations, exceptionnelles ou non, et des changements fiscaux. La seconde tente d’établir un état des lieux de l’évolution du niveau de vie en 2022 en estimant l’impact de l’évolution des différents types de revenu.

    Cela ne surprendra personne, mais le résultat de cette dernière étude confirme la baisse majeure du niveau de vie en France en 2022. Selon l’Insee, les mesures sociofiscales et l’évolution des revenus n’ont, en moyenne, compensé que 90 % de la hausse estimée des dépenses liées à l’inflation. C’est-à-dire que les revenus ont augmenté 10 % en deçà de la hausse des dépenses.

    Mais la facture n’a pas été la même pour tout le monde. Pour 80 % des Français, l’impact négatif est plutôt compris entre 15 % et 20 %, et plutôt proche de 20 %. Mais pour les 10 % qui bénéficient des revenus les plus élevés, l’année 2022 a été une année où les revenus ont dépassé de 10 % la hausse des prix.

    Autrement dit, l’inflation a encore creusé les inégalités réelles. Cette vérité est d’autant plus dure que pour les plus modestes, la compensation n’est liée qu’à des mesures ponctuelles, alors que pour les plus riches, ce sont les revenus primaires qui ont augmenté.
    Les effets des mesures gouvernementales

    Pour comprendre le phénomène, il faut revenir à l’impact de la hausse des prix sur les dépenses des ménages. L’Insee a travaillé sur l’hypothèse d’une stabilité des comportements, autrement dit sur une structure stable des dépenses. Dans les faits, bien sûr, l’inflation conduit à des changements de comportement de consommation. Mais l’idée ici est de comparer l’effet de l’inflation de 2022 sur le niveau de vie de 2021, l’hypothèse est donc cohérente.

    L’Institut estime que le renchérissement de ces dépenses s’élève en moyenne à 1 320 euros sur 2022. Mais là encore, la situation n’est pas la même selon le niveau de revenu. Si les plus riches ont une facture plus élevée en euros courants, ce qui est logique puisqu’ils consomment davantage, l’impact de cette hausse est beaucoup plus faible. Ainsi, les Français qui ont les 10 % des revenus les plus hauts ont vu leur niveau de vie amputé par l’inflation de 3,6 %. Mais pour ceux qui ont les revenus les 10 % les plus bas, cet impact négatif est de 7,4 %, soit plus du double.

    En face, deux sources de revenu sont venues compenser cette dégradation : d’un côté la politique sociofiscale, de l’autre l’effet des revenus primaires, c’est-à-dire l’effet des revenus du travail et du patrimoine.

    Sur le premier terrain, le gouvernement a multiplié les mesures ponctuelles comme le chèque énergie, la prime exceptionnelle de rentrée, l’indemnité inflation ou la revalorisation anticipée de certaines prestations. À cela se sont ajoutées quelques mesures pérennes de revalorisation, notamment celle de l’allocation pour les familles monoparentales ou la déconjugalisation de l’allocation adulte handicapé. Enfin, il y a eu la dernière phase de la suppression de la taxe d’habitation, imposée à l’État après sa décision de supprimer cette taxe pour les classes moyennes lors du premier quinquennat.

    Toutes ces mesures ont coûté 5,7 milliards d’euros en termes nets et, logiquement, elles ont d’abord profité aux plus modestes. Cumulées, elles ont apporté 190 euros supplémentaires par ménage en moyenne, mais l’effet est de 360 euros pour le premier décile de revenus (les 10 % qui ont les revenus les plus bas), soit un effet positif de 3,4 % sur leur niveau de vie. On voit qu’on est loin de la hausse des dépenses.

    A contrario des autres mesures sociofiscales, qui ont logiquement moins d’effet à mesure que le revenu augmente, la fin de la taxe d’habitation, qui concerne les 20 % de la population aux revenus les plus élevés, a, elle, permis d’ajouter 0,4 % de niveau de vie à cette seule population. Ce qui a un effet intéressant : l’effet des mesures sociofiscales sur les hauts revenus est, au total, plus important que pour les classes moyennes supérieures (les 30 % de la population dont les revenus sont supérieurs à la moyenne, mais inférieurs aux 20 % les plus riches).
    Des revenus du travail en faible progression

    Le deuxième élément clé pour saisir l’évolution du niveau de vie est celui des revenus primaires. Pour les plus modestes, l’essentiel des revenus est lié au salaire. Plus on s’élève dans la hiérarchie sociale, plus la part des revenus du patrimoine (immobilier, produits financiers divers, dividendes) augmente.

    Ce que montre l’étude de l’Insee, c’est que l’évolution des salaires a été très éloignée de celle des prix. Ils n’ont en effet augmenté le niveau de vie qu’entre 1,5 % et 2 % en moyenne, bien loin, par conséquent, des effets inflationnistes. Et là encore, ce sont les plus modestes qui en ont le moins profité.

    Pour les plus aisés, notamment les 10 % de la population aux revenus les plus élevés, l’augmentation des salaires n’a pas été très élevée en termes de niveau de vie. Mais elle est plus que compensée par l’augmentation des revenus du patrimoine. Cette dernière représente pour ces 10 % pas moins de 970 euros en moyenne, soit 1,5 % du niveau de vie. Pour les 90 % de la population restante, l’effet des revenus du patrimoine est en moyenne de 150 euros, soit entre 0,5 et 0,8 % du niveau de vie.

    Cette situation n’est pas étonnante, et elle est le fruit d’un phénomène de long terme en partie explicable par la stratégie du gouvernement de supprimer en 2018 l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et d’introduire un niveau maximal d’imposition sur les revenus du capital à 30 % (c’est le prélèvement forfaitaire unique ou PFU). Cela a conduit une partie des individus aisés à faire basculer leur revenu du salaire vers le dividende, plus intéressant fiscalement. C’est ce qui explique aussi l’écart de performance entre ces deux types de revenu.

    Au total, l’effet de l’évolution des revenus est très faible pour les plus modestes : ils ne compensent qu’à 25 % la hausse du prix des dépenses pour les 10 % aux revenus les plus faibles. Mais les plus aisés, eux, sont bien protégés : les 10 % aux revenus les plus élevés voient leurs revenus primaires compenser à 95 % la hausse de leurs dépenses liées à l’inflation.

    C’est ainsi que l’on en arrive au résultat final : malgré un effort de compensation important de l’État, les plus modestes restent les plus grandes victimes de l’inflation, tandis que les plus aisés, eux, gagnent sur tous les tableaux : hausse des revenus primaires grâce aux revenus du patrimoine et surplus de revenu grâce à la suppression de la taxe d’habitation.

    Il convient de le souligner : si les plus aisés voient leurs revenus augmenter plus vite que leurs dépenses, c’est certes grâce aux revenus du patrimoine, mais aussi et surtout à cause de cette suppression de la taxe d’habitation, qui est une mesure antiredistributive. Or, si le Conseil d’État a contraint le gouvernement à supprimer l’ensemble de cette taxe, rien n’empêchait ce même gouvernement de trouver des mesures compensatoires pour ne pas favoriser les revenus des plus aisés tout en appauvrissant la puissance publique et sa capacité de redistribution.

    Ce résultat est d’autant plus préoccupant que les plus modestes doivent principalement compter sur des mesures provisoires qui les laissent à la merci du bon vouloir de l’État, tandis que les plus riches, eux, peuvent s’appuyer pour leurs revenus sur des mesures pérennes (fin de la taxe d’habitation, baisse de l’impôt sur le capital).

    Si donc on réfléchit aux effets durables de l’inflation, il est important de noter, puisque les prix ne baisseront pas, que la perte de niveau de vie des Français sera durable. Le décalage entre le niveau des prix et les revenus va rester constant, faute de dynamique des revenus du travail et compte tenu du retrait des mesures anti-inflationnistes, qui ne prennent pas en compte cet aspect durable. Les plus riches, eux, peuvent se réjouir puisque l’amélioration de leur sort, déjà très favorable, sera encore plus notable avec le ralentissement des prix.
    La responsabilité du gouvernement

    Derrière ces chiffres déjà désastreux, il y a une réalité encore plus dure. Pour les ménages les plus modestes, les revenus du travail sont insuffisants et les revenus sociaux sont incertains, et même souvent menacés. La politique d’attaques contre les allocations-chômage en 2023 en a apporté la preuve formelle : le gouvernement n’est pas un garant fiable de l’évolution future de leur niveau de vie.

    On notera d’ailleurs que, malgré les « chèques énergie » et autres « indemnités inflation », les ménages les plus exposés aux dépenses importantes d’énergie et de carburant ont été les plus touchés. Le niveau de vie des ménages ruraux est ainsi plus dégradé que celui des ménages de la région parisienne, qui, en moyenne, est plutôt stable.

    En réalité, la responsabilité gouvernementale dans la situation décrite par l’Insee est bien plus vaste. Emmanuel Macron l’avait annoncé dès sa conférence de presse du 14 juillet 2020 : il défend une politique de « modération salariale » en vue de favoriser les profits et l’accumulation du capital. Cette logique sous-tend l’ensemble des réformes du marché du travail, des retraites et de l’assurance-chômage menées depuis 2017. Et elle va se poursuivre, comme l’a confirmé le chef de l’État mardi 21 novembre.

    Il n’y a donc aucune surprise à ce que les revenus salariaux ne suivent pas les prix. Évidemment, l’autre conséquence de cette politique, c’est que l’État, pour tenter de modérer l’effet désastreux de sa propre politique, doit intervenir avec des mesures coûteuses mais forcément partielles. Mesures que ce même État fera payer aux plus modestes plus tard par une politique de dégradation de la redistribution et des services publics au nom de la « réduction de la dette », puisqu’il refuse toute hausse d’impôts.

    La boucle est bouclée. Ce refus de la redistribution fiscale est, comme on l’a vu, très favorable aux plus aisés sur le long terme. L’État apparaît alors comme un Don Quichotte économique, feignant de lutter contre un mouvement de fond. À cette différence près avec l’Hidalgo de la Mancha que c’est lui-même qui initie et soutient ce mouvement de fond.

    Les satisfecit continus du gouvernement se glorifiant des différentes mesures d’aides contre les effets de l’inflation ne peuvent donc pas dissimuler l’échec patent de sa stratégie. En donnant la priorité aux profits et aux rentes, il met à contribution le travail et expose les ménages modestes aux conséquences directes de l’inflation.

    Ainsi, l’effet de l’inflation, plus fort pour le bas de la distribution des revenus, n’est pas le fruit d’une force économique malheureuse et incontrôlable, elle est directement le produit d’une politique. Et de fait, la faiblesse de la hausse des revenus du travail face aux prix confirme l’importance de l’indexation salariale pour préserver le niveau de vie des travailleurs. Mais le gouvernement préfère protéger les revenus des plus riches, et c’est même le cœur de sa philosophie économique.

    https://www.mediapart.fr/journal/economie-et-social/231123/les-menages-les-plus-aises-ont-echappe-au-piege-de-l-inflation-pas-les-plu
    #redistribution #économie

    #pauvreté #richesse #riches #pauvres #inflation #statistiques #chiffres #France #fiscalité #niveau_de_vie

  • Selon #Oxfam, les 1 % les plus riches du monde émettent autant de #CO2 que les deux tiers des plus pauvres

    77 millions de fortunés émettent autant de gaz à effet de serre que les cinq milliards de personnes les plus pauvres de la planète, dénonce un rapport d’Oxfam publié dimanche 19 novembre.

    Le poids des plus riches pèse lourd dans la balance du dérèglement climatique. Selon un rapport d’Oxfam publié dimanche 19 novembre, les 1 % les plus riches de la planète, soit 77 millions de personnes, émettent autant de gaz à effet de serre que les deux tiers de la population la plus pauvre, soit environ cinq milliards de personnes. L’empreinte carbone de ces très riches s’est ainsi établie en 2019 à « 16 % des émissions mondiales », et a « occasionné 1,3 million de décès supplémentaires dus à la chaleur », chiffre le rapport.

    Si la lutte contre le changement climatique est un défi commun, certains en sont donc plus responsables que d’autres et les politiques gouvernementales doivent être adaptées en conséquence, a exhorté Max Lawson, coauteur du rapport publié par l’ONG de lutte contre la pauvreté. « Plus vous êtes riche, plus il est facile de réduire vos émissions personnelles et celles liées à vos investissements, selon lui. Vous n’avez pas besoin d’une troisième voiture, de quatrièmes vacances ou […] d’investir dans l’industrie du ciment. »

    Selon Oxfam, « les 50 % les plus pauvres sont responsables d’à peine 8 % des émissions mondiales de CO2 ». Parmi les autres principales conclusions, le rapport alerte aussi sur le fait que « depuis les années 1990, les 1 % des super-riches ont brûlé deux fois plus de budget carbone que la moitié la plus pauvre de l’humanité réunie ». Le seuil de revenu annuel pour faire partie des 1 % les plus riches a été ajusté par pays : aux Etats-Unis, le seuil est de 140 000 dollars, alors qu’il se fixe à environ 40 000 dollars au Kenya.
    Bernard Arnault émet 1 270 fois plus de gaz à effet de serre qu’un Français moyen

    Ces « inégalités extrêmes » n’épargnent pas la France, selon Oxfam. Si l’on exclut les émissions associées à ses investissements, Bernard Arnault, le PDG français du groupe de luxe LVMH, a une empreinte carbone 1 270 fois supérieure à celle d’un Français moyen. En 2019, le Français le plus riche du pays aurait ainsi émis près de 8 100 tonnes de CO2, contre 6,4 tonnes pour un Français moyen. Ces émissions de carbone dans l’atmosphère présentent des « conséquences dramatiques pour les pays et les communautés les plus pauvres – avec en première ligne les femmes et les enfants –, qui sont pourtant les moins responsables de la crise climatique », détaille l’ONG. Dans l’Hexagone, les 1 % les plus riches auraient émis autant de carbone en un an que les 50 % les plus pauvres en dix ans.

    « Nous pensons qu’à moins que les gouvernements n’adoptent une politique climatique progressiste, où les personnes qui émettent le plus sont invitées à faire les plus grands sacrifices, nous n’obtiendrons jamais de bonnes politiques dans ce domaine », a estimé Max Lawson. Cela pourrait consister à la mise en place d’un « ISF climatique » ; à « mettre fin aux niches fiscales climaticides comme celle sur le kérosène de l’aérien » ; ou encore à une « taxe sur les dividendes pour les entreprises ne respectant pas l’Accord de Paris ». Selon Oxfam, ces différentes mesures de fiscalité écologique pourraient engranger « 50 milliards d’euros de recettes par an à la France ».

    Intitulée « L’égalité climatique : une planète pour les 99 %», cette étude, la plus complète jamais réalisée sur l’inégalité climatique mondiale, s’appuie sur des recherches compilées par l’Institut de l’environnement de Stockholm et analyse les émissions liées à la consommation associées à différentes catégories de revenus jusqu’en 2019. Selon elle, « l’accroissement des inégalités » et le « dérèglement climatique » se présentent comme « deux crises entrelacées, fusionnées, et [qui] s’alimentent mutuellement ». Un cercle vicieux qui doit cesser au plus vite.

    https://www.liberation.fr/environnement/climat/selon-oxfam-les-1-les-plus-riches-du-monde-emettent-autant-de-co2-que-les

    #classes_sociales #climat #changement_climatique #rapport #riches #richesse #chiffres #statistiques

    • Les inégalités des émissions en 2030 : L’empreinte carbone par habitant et l’objectif de 1,5⁰C

      Les inégalités des émissions en 2030 : L’empreinte carbone par habitant et l’objectif de 1,5⁰C
      En 2030, on estime que les 1 % les plus riches de la planète auront une empreinte carbone par habitant 30 fois supérieure à celle compatible pour limiter le réchauffement à 1,5°C, objectif inscrit dans l’Accord de Paris. En revanche, l’empreinte carbone de la moitié la plus pauvre de l’humanité restera bien en-dessous de ce seuil. D’ici à 2030, les 1 % les plus riches représenteront une part encore plus importante des émissions mondiales de CO2 qu’au moment de la signature de l’Accord de Paris. S’attaquer aux inégalités extrêmes et identifier les émissions excessives liées à la consommation et aux investissements des personnes les plus riches du monde est crucial pour maintenir en vie l’objectif de 1,5°C.

      https://policy-practice.oxfam.org/fr/resources/les-inegalites-des-emissions-en-2030-lempreinte-carbone-par-h

      #oxfam