• [Talk From Homografía] Talk From Homografía #19
    https://www.radiopanik.org/emissions/talk-from-homografia/talk-from-homografia-19

    En cette journée mondiale de lutte pour les droits des femmes, nous rendons hommage en abordant l’état des droits et condition, en évoquant le #féminisme, d’hier et d’aujourd’hui. Temporairement solo, Prinzessin a invité Cr33p.exe, aka Thor, DJ & camarade qui nous parlera entre autres de son expérience de terrain auprès de femmes TDS migrantes dans le Quartier Nord de Bruxelles. On écoutera des archives sonores de Delphine Seyrig grâce à Suzy Q en régie, et comme chaque mois en #musique avec morceaux choisis, dont celui emblématique du #dancefloor.

    Régie : Suzy Q

    Host.ess : Prinzessin & Creep.exe

    #sexwork #rights #women #actrice #féminisme,musique,dancefloor,sexwork,rights,women,actrice
    https://www.radiopanik.org/media/sounds/talk-from-homografia/talk-from-homografia-19_15473__1.mp3

  • L’ADN - Interview de Fred Turner : Comment la Silicon Valleyr réagit au COVID19 et à BlackLivesMatter ?
    https://www.ladn.eu/tech-a-suivre/silicon-valley-covid19-black-lives-matter-interview-fred-turner

    Alors que la pandémie mondiale de COVID-19 est pour les GAFAM une opportunité de marché en or, les grandes entreprises des nouvelles technologies font face à des contestations venues de différents pans de la société américaine.

    Historien, professeur à l’université de Stanford, Fred Turner est un spécialiste de la contre-culture américaine, de l’utopie numérique et de l’histoire des médias américains. Il est notamment l’auteur de Aux sources de l’utopie numérique : De la contre culture à la cyberculture, C&F Editions, 2013. Son prochain essai, qui paraît à l’automne, analyse le marché de l’art dans la Silicon Valley.
    Les Etats-Unis sont le pays le plus touché par la pandémie. Dans le même temps, les entreprises de la Silicon Valley réalisent des profits exceptionnels à la faveur de cette crise. Que dit cette situation des enjeux actuels du pays ?

    Fred Turner : La crise du coronavirus est pour les Big Tech ce que le 11 Septembre 2011 a été pour l’industrie de la défense : une opportunité de marché parfaite. Ces entreprises ont logiquement profité de la crise pour générer du chiffre d’affaires et de la croissance. D’autant que les outils technologiques qui sont utiles pour contenir la pandémie (applications de traçing, données de santé) sont contrôlées par ces mêmes entreprises. Imaginez donc l’opportunité que cette situation représente.

    À mon sens, il s’agit d’un problème social majeur. Notamment parce que l’État américain est incapable d’encadrer ce phénomène. En fait, c’est l’inaction de l’administration qui crée la faille dans laquelle se sont engouffrées les grandes entreprises du numérique. La responsabilité de Donald Trump est immense dans cette situation. Son incompétence est directement responsable de la mort de centaines de milliers de personnes.
    Le pays vit également une période très intense sur le plan des revendications pour la justice sociale, contre le racisme et les violences policières. Comment réagissent les entreprises de la Silicon Valley ?

    F. T. : Il y a deux manières de voir les choses. D’un côté, la Silicon Valley a produit les infrastructures qui permettent au mouvement #BlackLivesMatter de se déployer et aux groupes de se coordonner. Les réseaux sociaux contribuent largement à mettre le mouvement en action. Mais, d’un autre côté, l’enjeu de la diversité ethno-raciale continue d’être très largement ignoré par ces mêmes entreprises dès lors qu’il est question de recrutement. Ce décalage ne se résorbera qu’à une condition : que le mouvement #BlackLivesMatter parvienne à avoir une influence qui ne soit pas que symbolique et performative. Il faut que ce mouvement conduise à un véritable changement institutionnel. J’ai l’habitude de dire que les mouvements sociaux n’ont d’impact que s’ils se transposent de la rue au Congrès. Si le mouvement y parvient, les entreprises devront opérer des changements structurels, elles ne pourront plus se contenter de faire circuler des images ou afficher des déclarations d’intention.
    L’idéologie selon laquelle les entreprises des nouvelles technologies contribuent à « rendre le monde meilleur » est très prégnante. Cette intention contraste-t-elle avec la réalité de ces entreprises ?

    F. T. : Cette idée n’est pas neuve, elle préside à la naissance de la Silicon Valley. Elle a émergé dans la contre-culture américaine au moment de la guerre du Vietnam (1955-1973). L’enjeu était alors d’utiliser le progrès technologique comme un outil pour faire évoluer la société dans le sens de plus de bienveillance, mais aussi d’utilitarisme. À l’époque, l’idée de cette transformation culturelle et technologique laissait déjà largement de côté les populations autochtones, les afro-américains ou les hispaniques.

    L’utopie numérique se pense comme profondément apolitique, or c’est tout l’inverse. La dimension politique est soigneusement évitée dans le discours des GAFAM. Ces dernières années, pour les dirigeants de la tech, les affaires politiques, telles qu’elles ont court à Washington DC, étaient considérées comme de la « politique à papa », quelque chose de dépassé et anachronique. Pour les Big Tech la transformation positive du monde est affaire de réseaux et de technologies. Une technologie performante, mise à disposition du grand nombre, permettra aux utilisateurs et utilisatrices de nouer des liens plus honnêtes, authentiques, et donc de faire société d’une meilleure manière.

    Il faut comprendre que ce positionnement - qui peut paraître simpliste - est aussi excellent pour le business. C’est plus compliqué de remettre en question une entreprise qui explique qu’elle « fait le bien dans le monde ». Par ailleurs, l’une des stratégies pour les dirigeants consiste à brandir les bons résultats financiers comme un argument pour justifier que leur produit a du succès, donc qu’il est bon. Il ne faut jamais oublier que l’aspect financier est au fondement de cette utopie technologique.
    Les Big Tech sont-elles capables de se réformer et de faire évoluer leurs pratiques ?

    F. T. : Je pense qu’un changement structurel ne s’obtient que par la pression exercée de l’extérieur par les institutions en charge de l’intérêt général. L’industrie des nouvelles technologies n’est finalement qu’une industrie parmi tant d’autres, dotée des mêmes rouages. La motivation principale de Facebook, Google ou Apple n’est pas la qualité du service, c’est le profit, comme pour toutes les firmes industrielles. Dans ce contexte, le profit passera toujours avant les conséquences socialement néfastes des produits que ces entreprises développent. C’est dont à l’état et à ses institutions de les réguler.
    L’affaire Cambridge Analytica a-t-elle eu des répercussions concrètes ? Qu’en est-il aujourd’hui, les choses ont-elles changé depuis ?

    F. T. : J’aurais aimé vous dire que les choses se sont arrangées depuis l’affaire Cambridge Analytica, mais ce n’est pas le cas. Nous vivons des Cambridge Analytica tous les jours. C’est directement lié au fait que les plateformes sociales des GAFA sont plus que des « réseaux sociaux », ce sont des espaces de publication de contenu. De ce fait, tout ce qui apparaît devrait être régulé, selon les mêmes règles qui s’appliquent pour les médias et les éditeurs. Or ce n’est pas encore le cas. Des pas timides ont été réalisés, comme par exemple Twitter qui a retiré de sa plateforme les posts émanant du groupe conspirationniste QAnon. Je pense que cette décision est un effet collatéral positif de l’affaire Cambridge Analytica.

    Mais chez Facebook, Mark Zuckerberg, qui assume ses liens avec le financier libertarien Peter Thiel, fait tout ce qui est en son pouvoir pour préserver la fameuse « liberté d’expression ». Dans ce contexte là, liberté d’expression est synonyme d’autorisation implicite à la diffusion de contenus haineux et conspirationnistes par l’alt-right. Tout est fait pour encourager la diffusion de contenus de ce type. Tout ce qui est clivant, stimulant, excitant est valorisé par l’algorithme de Facebook. C’est une manière de susciter les réactions, pour retenir les utilisateurs et utilisatrices plus longtemps et ainsi générer plus de données donc de revenus publicitaires. Mark Zuckerberg dirige une entreprise qui autorise ce genre de publications, les laisse se déployer. En ne prenant pas de mesures strictes, il est indirectement responsable du fait que de nouvelles affaires Cambridge Analytica ont lieu tous les jours.
    Comment répondre à cette menace ?

    F. T. : L’enjeu majeur est la taille de ces entreprises. Lorsque l’on regarde Amazon, Facebook, on voit l’équivalent de la Standard Oil du XIXème siècle [première compagnie majeure des Etats-Unis qui a par la suite dominé le marché mondial, ndlr]. Ou bien l’équivalent des quatre majors de l’automobile au 20ème siècle. Ce sont des multinationales colossales avec un pouvoir d’influence démesuré. L’état américain a la responsabilité de les réguler, comme il l’a fait avec les compagnies pétrolières au 20ème siècle.
    La sénatrice Elizabeth Warren avait fait du démantèlement des GAFAM un pilier de son programme lors de la primaire démocrate. Que pensez-vous de cette proposition ?

    F. T. : Je défends l’idée d’Elizabeth Warren de démanteler les GAFAM, mais je n’ai pas le même avis qu’elle quant à la méthode à appliquer pour le faire. Je me reconnais plus dans les idées que défends Timothy Wu, professeur à l’université Columbia. Nous avons deux options : la première, démanteler purement et simplement les GAFAM. L’autre option consiste à les nationaliser, comme ce qui a été fait au 19ème siècle pour les chemins de fer. Les réseaux sociaux sont devenus des services utilisés chaque jour par des milliards de personnes. Mais, aujourd’hui, on les traite juridiquement comme des objets légaux neutres, alors qu’elles sont tout sauf neutres. Elles ont même une influence majeure sur nos démocraties. Il faut donc un nouveau cadre juridique pour les GAFAM. C’est en substance ce que défend Timothy Wu.
    Shoshana Zuboff, professeure à Harvard, a publié l’an dernier un ouvrage sur le capitalisme de surveillance. En quoi est-il complémentaire avec la réflexion sur le démantèlement des GAFAM ?

    F. T. : Le cadre de réflexion du capitalisme de surveillance est extrêmement puissant. Il permet de rassembler toutes les pièces du puzzle, de les connecter entre elles. La surveillance s’est instillée dans notre vie quotidienne et elle est utilisée pour nous vendre des produits, mais aussi pour nous manipuler en orientant nos comportements. Shoshana Zuboff dévoile l’architecture qui sous-tend ce système. Elle révèle les intérêts de ceux qui l’ont construit mais aussi de ceux qui en profitent : les entreprises mais aussi l’état.
    Cet ouvrage a-t-il rencontré un écho en dehors des cercles universitaires, chez les décideurs politiques notamment ?

    F. T. : La critique de Shoshana Zuboff est systémique, mais le discours public américain est avant tout centré sur l’individu. C’est comme si on n’avait pas le langage pour comprendre les logiques systémiques qui traversent le corps social, précisément parce que l’on ne se concentre que sur la dimension individuelle. De ce fait, aux Etats-Unis, le discours qui consiste à appeler à une politique publique centralisée pour répondre à des problèmes sociaux collectifs, comme le racisme ou les pandémies, a tôt fait de se faire taxer de communiste.

    Friends, watch this great conversation for insight into #SurveillanceCapitalism right now. Comprehension is the first step toward resistance. Thank you, #RightsCon. https://t.co/X14L9zSYpj

    — Shoshana Zuboff (@shoshanazuboff) August 12, 2020

    #Fred_Turner #Interview

  • La politique des putes

    Océan réalise, avec « La #Politique_des_putes », une enquête en immersion dans laquelle il tend le micro à des travailleuses·rs du sexe. Elles disent le stigmate, la marginalisation, la précarité, les violences systémiques mais aussi les ressources et l’empowerment. Pour elles, l’intime est résistance. Dix épisodes de 30 mn pour briser les préjugés.



    La Politique des putes (1/10) - Travailler
    La Politique des putes (2/10) - Stigmatiser
    La Politique des putes (3/10) - Militer
    La Politique des putes (4/10) - Choisir
    La Politique des putes (5/10) - Désirer
    La Politique des putes (6/10) - Migrer
    La Politique des putes (7/10) - Soigner
    La Politique des putes (8/10) - S’échapper
    La Politique des putes (9/10) - Agir
    La Politique des putes (10/10) - Construire

    http://www.nouvellesecoutes.fr/podcasts/intime-politique

    #sex_work #prostitution #patriarchy #capitalism #feminism #wage_labor #whorephobe #whorephobia #pimping #stigma #bias #prejudice #stigmatization #discrimination #systemic_violence #instiutional_violence #heterosexual_concept #sexual_education #normalisation #abolotionism #black_and_white #subventions #decriminalisation #penalty #laws #rights #transphobia #domination #marginalisation #vulnerability #invisbility #undocumented #isolation #fear #police_harassment #physical_violence #rape #precarity #affirmation #empowerment #dignity #trust #solidarity #network #community #choice #perception #society #associations #seropositive #access_to_healthcare #suicidal_thought #debt #menace #voodoo #exploitation #trafficking #migration #borders #family_pressure #clients_image #mudered #testimony #interview #podcast #audio #France #Paris

    “sex work is not dirty - dirty are all the representations about sex work” (La politique des putes 7/10, min 7).

  • L’Europe paye des équipements militaires à la Turquie pour refouler les réfugiés

    Mediapart et l’EIC révèlent que l’argent de l’Union européenne a permis à la Turquie de s’équiper en véhicules blindés afin d’empêcher le passage de réfugiés à sa frontière avec la Syrie. Cette opération pourrait avoir causé de nombreuses victimes parmi les Syriens tentant de fuir la guerre, alors que la prise d’Afrin par l’armée turque va pousser encore des milliers de personnes sur la route de l’exil.
    Quand les soldats turcs ont ouvert le feu, Ibrahim Khaled a pris sa mère par la main et s’est mis à courir. Il a entendu le cliquetis des armes à feu, entendu les cris des réfugiés frappés par les balles, et a été projeté à terre. Khaled ne s’est pas retourné. « J’ai senti que si je m’arrêtais là, je serais tué ou arrêté », dit-il.
    Pendant des heures, Khaled et sa mère ont couru dans la direction que le passeur leur avait indiquée. Ils ont marché à travers des champs d’oliviers, ont rampé sur des pierres jusqu’à atteindre un village turc. De la soixantaine de réfugiés qui avaient quitté le camp près de #Darkush, dans la province syrienne d’#Idlib, seule une poignée a traversé la frontière. Khaled ne sait pas ce qui est arrivé aux autres. Ils sont probablement morts ou de retour en Syrie, pense-t-il. « Nous avons eu de la chance. »
    Khaled est assis dans un appartement nouvellement construit en périphérie de Mersin, dans le sud-est de la Turquie, où lui et sa mère ont trouvé refuge après leur fuite à l’automne dernier. Il porte un jean déchiqueté et un pull qu’un voisin lui a donnés. Ses yeux sont fatigués, son front est plissé de rides. Khaled s’est longtemps posé la question de savoir s’il devait parler avec des journalistes des #violences à la #frontière_turco-syrienne. Il a peur que les autorités turques ne se vengent sur lui. Dernièrement, il a accepté de nous accorder une interview à la condition que son nom soit changé. « Je veux que le monde sache ce qui nous arrive à nous, Syriens », dit-il.

    La guerre civile en Syrie entre dans sa huitième année. Plus de 350 000 personnes ont été tuées à ce jour, des millions ont été déplacées. Et bien qu’il n’y ait toujours pas de paix en vue, les pays voisins de la Syrie ont fermé les voies d’échappatoire. Le Liban, la Jordanie et la Turquie, qui accueillent ensemble plus de cinq millions de Syriens, refusent d’accepter davantage de demandeurs d’asile. La Turquie a construit sur sa frontière avec la Syrie un mur de trois mètres de haut et long de plusieurs centaines de kilomètres.

    Khaled raconte que des #soldats_turcs ont ouvert arbitrairement le feu sur des réfugiés. Les détails de son témoignage sont difficiles à vérifier, mais ils sont cohérents et coïncident avec les déclarations de plus d’une douzaine de témoins avec lesquels le Spiegel s’est entretenu. L’ONG Human Rights Watch a révélé des cas similaires début février : des soldats turcs ont forcé des réfugiés à retourner en Syrie et ont tiré de manière indiscriminée, selon l’organisation.

    Il y a précisément deux ans, le 18 mars 2016, l’Union européenne et Ankara concluaient un accord selon lequel les Européens allaient verser 3 milliards d’euros à la Turquie en échange du maintien des réfugiés sur son sol (en attendant un deuxième volet de 3 milliards d’euros). Les dirigeants européens ont prétendu que cet accord avait permis de contenir la « crise des réfugiés ». En réalité, la crise s’est simplement déplacée. À présent, les gens meurent moins fréquemment dans la mer Égée, où le nombre d’embarcations traversant vers la Grèce s’est réduit drastiquement une fois l’accord passé. Mais ils meurent sur la frontière turco-syrienne.

    Officiellement, les milliards de l’Europe servent exclusivement à aider la Turquie à gérer les réfugiés sur son sol et à les empêcher d’entrer en Europe. C’est faux. Mediapart et ses partenaires du réseau European Investigative Collaborations (EIC) révèlent que l’Union européenne a payé à la Turquie pour 83 millions d’euros de véhicules militaires et d’équipements de surveillance afin de traquer les réfugiés. Y compris à la frontière turco-syrienne, pourtant officiellement ouverte.

    Les journalistes de l’EIC se sont plongés dans les centaines de contrats européens. L’un d’entre eux montre que l’Union européenne a financé à 75 % l’achat par la Turquie de 82 véhicules blindés Cobra II, dont le coût total est de 47,5 millions d’euros. Ces engins, équipés de périscopes, peuvent patrouiller le long du mur côté turc tout en localisant les réfugiés approchant de l’autre côté. Produits par Otokar, l’un des plus gros industriels turcs de l’armement, ces véhicules ont été livrés aux forces armées turques au printemps 2017.

    Ils font aujourd’hui partie de l’infrastructure de surveillance de ce qui va devenir bientôt le troisième mur le plus long du monde : 900 km de béton équipés de drones, de caméras thermiques, et de tours de tir télécommandées et automatisées de manière « intelligente ». Des haut-parleurs diffusent des messages, avertissant les gens, en turc et en arabe, de ne pas s’approcher davantage. De l’artillerie lourde ouvre le feu si ces avertissements sont ignorés. Les caméras thermiques sont capables, par temps clair, de repérer trois personnes debout d’une taille de 1,80 m à une distance de dix kilomètres. En d’autres termes, l’équipement financé par l’Union européenne aide à repérer des réfugiés qui essaient de traverser le mur frontalier et risquent d’être touchés par des tirs… et tués.

    Le mur construit par Ankara maintient par ailleurs des centaines de milliers de réfugiés syriens coincés dans une zone de guerre. On estime que plus de 200 000 personnes ont été déplacées dans le nord de la Syrie depuis la mi-décembre, et il faut s’attendre à ce que la prise par l’armée turque, ces derniers jours, de la ville kurde d’Afrin provoque de nouveaux flux de réfugiés.

    La Turquie assure que la frontière est toujours ouverte pour les demandeurs d’asile, ce qui est contredit par différentes sources turques et syriennes proches de la frontière. L’Institut international pour les études stratégiques (IISS) notait déjà en juin 2017 que la Turquie avait rendu « pratiquement impossible pour les réfugiés syriens le passage de la frontière légalement ». « La Turquie assure que sa politique de la “porte ouverte” est toujours en vigueur, mais dans la réalité, elle est presque fermée », estimait alors l’institut.

    Depuis septembre dernier, 42 civils ont été tués alors qu’ils tentaient de passer de Syrie en Turquie, selon Rami Abdulrahman, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) confirme qu’il est devenu pratiquement impossible de traverser la frontière (excepté pour les personnes gravement blessées ou malades), alors que le nombre de réfugiés fuyant la Syrie est en hausse.

    On assiste à une violation des droits humains, selon Thomas Gammeltoft-Hansen, directeur de recherche à l’Institut danois des droits de l’homme et du droit humanitaire Raoul-Wallenberg. « Si des balles mortelles sont tirées sur des réfugiés essayant de traverser la frontière, c’est une violation pure et simple des droits humains, rappelle-t-il. Si le mur frontalier enlève aux Syriens toute possibilité de demander l’asile, c’est une autre violation du droit international, en particulier du principe de non-refoulement. »

    La fourniture de matériel à la Turquie par l’Union européenne pourrait rendre cette dernière complice de violation des droits humains à la frontière turco-syrienne. « S’ils savent que l’équipement est utilisé d’une façon qui viole les droits des réfugiés, les membres de l’UE sont par principe complices », ajoute Thomas Gammeltoft-Hansen.

    309 millions d’euros côté français

    Interrogée par l’EIC, la Commission européenne nous a répondu que « l’Union européenne ne fournit pas d’équipements militaires ou létaux à la Turquie ». Les Cobra II sont pourtant bien des engins militaires. La Commission ajoute que l’accord avec la Turquie prévoit que les véhicules soient « exclusivement affectés à la surveillance des frontières et que toute modification ou changement d’affectation des équipements requiert l’autorisation écrite de la commission ».

    Sauf que Bruxelles n’a pas les moyens de contrôler ce que fait le régime autoritaire d’Erdogan de ses armes. Plusieurs experts des droits de l’homme craignent d’ailleurs que la Turquie n’utilise cet équipement financé par les fonds européens pour les opérations militaires menées actuellement dans les zones kurdes de Syrie, ou pour la répression visant sa propre population. Des photos de l’invasion par l’armée turque de la province kurde d’Afrin depuis fin janvier montrent que des véhicules Cobra II ont été utilisés. Mais au lieu de périscopes avec des caméras thermosensibles, ils ont été équipés d’armes.

    Le caractère problématique des financements européens ne se limite pas à la frontière turco-syrienne. Pour aider la Turquie à surveiller sa portion de frontière terrestre avec la Grèce, l’Union européenne a financé des véhicules militaires plus monstrueux encore que les Cobra II, selon l’enquête de l’EIC.

    En mai 2017, Aselsan, une société détenue à 84 % par l’armée turque, a remporté un contrat à hauteur de 30 millions d’euros avec l’Union européenne pour fournir à la Turquie 50 véhicules pour patrouiller à la frontière grecque, dont 20 sont dotés d’un blindage extrêmement épais afin de protéger les véhicules des mines et grenades. Selon les documents européens consultés par l’EIC, ces engins sont des contributions de l’Europe à « la prévention de l’immigration illégale, du trafic humain, des crimes de passage des frontières [« cross-border crimes »], et du système des passeurs ».

    L’un des industriels qui a étudié l’appel d’offres s’est retrouvé perplexe devant la disproportion apparente entre l’objectif affiché et les spécifications techniques de ces véhicules, « clairement exagérées » pour des engins censés être utilisés à la frontière de la Turquie avec l’Union européenne. Mais l’UE a été ferme : le blindage lourd est absolument requis, dit-elle dans sa réponse, sans en expliquer les raisons.

    On comprend que Bruxelles soit très discret sur la question. Aselsan, qui a remporté l’appel d’offres, ne fournira en réalité que l’équipement électronique. Selon l’enquête de l’EIC, les véhicules sont des Hizir, d’impressionnants engins de guerre (notre photo ci-dessus) fabriqués par Katmerciler, un industriel appartenant à un ancien député de l’AKP, le parti de Recep Tayyip Erdogan. Le président turc est un grand fan de l’Hizir, dont il a dévoilé le prototype en novembre 2016 lors d’un salon militaire, six mois avant que l’UE n’en finance 50 exemplaires.

    L’appel d’offres de Bruxelles stipulait pourtant que les véhicules devaient avoir été mis sur le marché depuis un an. Ce n’est pourtant pas le cas des Hizir, dont les premiers exemplaires sont récemment sortis de l’usine, et qui sont toujours en cours de test avant leur livraison prochaine à l’armée turque.

    Lorsque, en 2016, l’Union européenne a promis à Erdogan 3 milliards d’euros en échange de son accord pour reprendre tous les réfugiés syriens arrivant sur les îles grecques, il était pourtant statué que cet argent serait uniquement utilisé pour aider à l’accueil des plus de 3,5 millions de réfugiés syriens vivant en Turquie.

    Or sur ces 3 milliards d’euros qui ont été collectés auprès des États membres de l’UE (la quote-part de la France dans ce programme s’élève à 309 millions d’euros), une partie a été utilisée pour financer six bateaux de patrouille à destination des gardes-côtes turcs. Lesquels, selon plusieurs ONG opérant dans ces zones maritimes, arrêtent agressivement les réfugiés tentant de quitter la Turquie, mettant parfois les embarcations de réfugiés en danger.

    « Juste après que l’accord avec la Turquie a été mis en place, il était évident que les #gardes-côtes_turcs faisaient tout pour arrêter les gens qui traversaient la mer, explique Ruben Neugebauer, porte-parole de Sea-Watch, l’une de ces organisations. Il y a différentes tactiques. Parfois nous voyons des bateaux turcs naviguer autour des canots pneumatiques, provoquant des vagues, les mettant en danger de telle sorte que parfois les réfugiés décident de rentrer par eux-mêmes. Parfois, ils chassent les bateaux et frappent même les gens à coups de bâton afin de les faire repartir. »

    En réponse à cette interpellation, les gardes-côtes turcs ont publié une déclaration disant qu’ils étaient mandatés pour arrêter les bateaux de réfugiés avant qu’ils ne pénètrent dans les eaux européennes. Les bâtons, expliquent-ils, sont utilisés pour tenter d’endommager les moteurs et les hélices de façon à attacher les petites embarcations aux plus gros bateaux des gardes-côtes pour les tirer vers les côtes turques.

    Mais ce n’est pas le seul cas d’abus présumé commis à bord de ces bateaux financés par l’argent européen. L’ONG Lighthouse Relief a publié une déclaration commune avec le UNHCR pour exprimer sa préoccupation au sujet d’un incident survenu en novembre dernier, assurant que les gardes-côtes turcs avaient tiré en l’air et dans la mer, ce qui a provoqué le saut dans l’eau de plusieurs réfugiés.

    Ces six bateaux de patrouille ont été commandés à un constructeur naval néerlandais, #Damen, pour la somme de 18 millions d’euros – une somme qui vient pour partie du fonds danois d’#aide_au_développement. Ils ont été livrés aux gardes-côtes turcs l’année dernière. Le dernier a été livré juste avant Noël. D’après la société navale, ces bateaux peuvent transporter jusqu’à 120 réfugiés et migrants en mer.

    Ces fournitures d’équipement pour le contrôle des frontières à la Turquie font partie d’une tendance croissante au sein de l’Union européenne : « L’UE utilise de plus en plus le principe de la pleine concurrence et externalise le contrôle frontalier à des pays tiers au lieu d’effectuer son propre contrôle, fait valoir le chercheur danois Thomas Gammeltoft-Hansen. Vous financez le contrôle des frontières, mais vous ne voulez pas être là vous-mêmes car vous risquez de mettre en jeu votre responsabilité en termes de droits humains. » Une stratégie qui rappelle étrangement ce qui se passe aujourd’hui entre l’Italie et la Libye.

    Un porte-parole de la Commission européenne a répondu par écrit aux questions de l’EIC en affirmant que l’Union européenne suivait « attentivement » la situation à la frontière turco-syrienne et qu’elle était consciente de l’existence de violences à la frontière, « mais n’a pas été capable d’obtenir de confirmation indépendante par ses sources ou par les autorités turques ». Sollicités depuis une semaine, l’ambassade turque à Copenhague et le gouvernement turc à Ankara n’ont pas donné suite aux sollicitations de l’EIC.

    Mercredi 14 mars, l’Union européenne a donné son feu vert pour le versement du deuxième volet de l’aide promise à la Turquie. Trois nouveaux milliards d’euros vont être versés à Ankara.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/240318/l-europe-paye-des-equipements-militaires-la-turquie-pour-refouler-les-refu
    #externalisation #UE #EU #Turquie #frontières #asile #migrations #réfugiés_syriens #surveillance_des_frontières #militarisation_des_frontières #gardes-côtes #contrôles_frontaliers #violence

    • Commentaire d’Emmanuel Blanchard sur la liste Migreurop :

      Cela fait bien longtemps que la « #guerre_aux_migrants » n’est plus une métaphore mais s’incarne dans dispositifs et matériels. Une enquête de l’European Investigative Collaborations décrit comment des fonds de l’UE ont servi à l’armée turque pour acheter des équipements (véhicules blindés notamment) utilisés aux frontières turco syriennes et turco-grecques.
      Afin de rendre plus hermétiques encore ces frontières, lieux de toutes les violences, « l’Union européenne a donné son feu vert pour le versement du deuxième volet de l’aide promise à la Turquie. Trois nouveaux milliards d’euros vont être versés à Ankara ».

    • EUROPA - Droits de l’homme | Union Européenne
      https://europa.eu/european-union/topics/human-rights_fr

      Protéger les droits de l’homme dans le monde

      Le cadre stratégique en faveur des droits de l’homme et de la démocratie adopté en 2012 vise à renforcer l’efficacité et la #cohérence de la politique dans ce domaine. [...]

      L’Union européenne s’est résolument engagée à défendre et à protéger les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit dans le monde. Les droits de l’homme sont au cœur de ses relations avec d’autres pays et régions. [...]

      La politique de l’UE :

      vise à faire progresser les droits des femmes, des enfants, des minorités et des personnes déplacées ;

      [...]

      Tous les accords commerciaux ou de coopération conclus avec des pays tiers (plus de 120 à ce jour) prévoient une clause sur les droits de l’homme spécifiant que ces droits constituent un aspect fondamental des relations avec l’UE, qui a imposé à plusieurs reprises des sanctions pour violations des droits de l’homme.

      L’#UE poursuit également des dialogues sur les droits de l’homme avec plus de 40 pays et organisations, dont la #Russie, la #Chine et l’#Union_africaine. Elle évalue ses activités mondiales dans ce domaine, dans son rapport annuel sur les droits de l’homme et la démocratieRechercher les traductions disponibles de ce lienEN•••.

      Par l’intermédiaire de l’instrument européen pour la démocratie et les droits de l’hommeRechercher les traductions disponibles de ce lienEN••• (IEDDH), l’UE soutient des groupes, des associations ou des particuliers qui défendent les droits de l’homme, les libertés fondamentales, la démocratie et l’État de droit. Cet instrument est doté d’un budget de 1,3 milliard d’euros pour la période 2014-2020.

      Macron : la situation en #Turquie ne permet « aucune avancée » avec l’UE
      http://www.lemonde.fr/europe/article/2018/01/05/pour-macron-les-evolutions-recentes-de-la-turquie-ne-permettent-aucune-avanc

      Le président français a notamment évoqué des visions différentes sur le respect des libertés individuelles et a appelé la Turquie au « respect de l’Etat de droit ».

      #psychose

    • #Militarisation_des_frontières, dans ce cas la frontière turco-syrienne... avec l’argent de l’UE :

      Un’inchiesta giornalistica transnazionale ha rivelato che fondi UE sono stati impiegati dalla #Turchia per la militarizzazione del confine con la Siria. La parlamentare europea @SofiaSakorafa chiede alla CE di accertarsi che non ci siano violazioni dei diritti umani #RightsEP

      https://twitter.com/BalcaniCaucaso/status/986650825333379073
      Vu sur twitter, le 19.04.2018

  • Un nom de domaine en .fr porte atteinte à mes droits, comment faire ? L’Afnic met à jour son guide pratique des ayants-droit https://www.afnic.fr/fr/ressources/publications/guides-pratiques/guide-pratique-a-l-attention-de-l-ayant-droit.html

    What to do if a .fr domain name infringes your rights ? Afnic updates its guide for right holders https://www.afnic.fr/en/resources/publications/practical-guides/guide-for-rights-holders-2.html

    #Afnic #Domains #ndd #Internet #Web #Droits #Trademarks #Trademark #rights #France

  • Congress may stiff Trump on wall funding

    Congressional Republicans might deliver some more bad news for President Donald Trump, fresh off their embarrassing failure to scrap Obamacare: No new money is coming to build his wall.
    “The border wall is probably not a smart investment,” said Sen. Lindsey Graham (R-S.C.), who proposes funding the wall as part a package legalizing some young undocumented immigrants and beefing up enforcement.

    http://www.politico.com/story/2017/03/border-wall-trump-congress-funding-236561
    #congrès #USA #congress #Etats-Unis #murs #barrières_frontalières #frontières #financement #résistance #Trump

  • PLO to File #ICC Case Against #Israel in April
    http://english.al-akhbar.com/content/plo-file-icc-case-against-israel-april

    A Palestinian boy lies on a mattress admist the rubble of buildings that were destroyed during the 50-day Israeli assault, in #Gaza City’s al-Shejaiya neighborhood on February 26, 2015. AFP/Mohammed Abed A Palestinian boy lies on a mattress admist the rubble of buildings that were destroyed during the 50-day Israeli assault, in Gaza City’s al-Shejaiya neighborhood on February 26, 2015. AFP/Mohammed Abed

    The #palestinians are to lodge their first complaint against Israel for war crimes at the International Criminal Court on April 1, a senior official told AFP on Monday. “One of the first important steps will be filing a complaint against Israel at the ICC on April 1 over the (2014) Gaza war and settlement activity,” said (...)

    #jerusalem #Palestine #rights #west_bank

  • Saudi Appeals Court Upholds 15-Year Jail Term for #Human_Rights Lawyer
    http://english.al-akhbar.com/content/saudi-appeals-court-upholds-15-year-jail-term-human-rights-lawyer

    An appeals court in #Saudi_Arabia has upheld a 15-year jail term for a human rights lawyer who was nominated for the Nobel Peace Prize, a watchdog said Wednesday. The Specialized Criminal Court of Appeal, Saudi Arabia’s infamous “terrorism tribunal,” confirmed on Sunday the latest verdict against Waleed Abu al-Khair, the Gulf Center for Human Rights said. In January an appeals court ordered Abu al-Khair to serve the full 15 years of his jail sentence. read more

    #rights_activist

  • #Morocco activist says death row prisoners kept in “inhumane conditions”
    http://english.al-akhbar.com/content/morocco-activist-says-death-row-prisoners-kept-inhumane-condition

    Rights activists accused Moroccan authorities on Wednesday of keeping more than 100 prisoners awaiting execution in “inhumane and unacceptable conditions,” despite a 20-year moratorium on the death penalty. Citing a recent study, Abderrahim Jamai, coordinator of the Moroccan Coalition Against the Death Penalty (CMCPM), said dozens of inmates were being kept in “corridors of death” nationwide. Some prisoners “have already spent 15 years in their cells and that begs the question about the amount of time it takes to implement a sentence,” Jamai said. read more

    #Rights_activists

  • http://dailynewsegypt.com/2012/12/17/egyptian-women-and-morsy

    Women are burying their children on almost a weekly basis now. In our poor country where women view their children as the single reason to wake up in the morning, this death aroma is bound to stir action.

    And despite what these women offer the country, they have been marginalized in a sick joke of a Constituent Assembly and completely left out of an even sicker draft constitution. Young women are harassed by Niqabis on the street, as well as men, for being unveiled or not face-veiled. Pseudo-Sheikhs spout out their own twisted version of the role of women—mainly a sex minion and a reproduction vessel—on TV all the time.

    #egypt #revolution #women #rights #morsi