• Deutsche Bank shares plunge after spike in credit default swaps By Investing.com
    https://www.investing.com/news/stock-market-news/deutsche-bank-shares-plunge-after-spike-in-credit-default-swaps-3038811

    Scott Kanowsky

    Investing.com — Shares in Deutsche Bank AG (ETR:DBKGn) shed more than 10% of their value in early European trading on Friday, while European financial services firms broadly declined, after a record surge in the cost of insuring against the risk of a default late in the previous day.

    The German lender’s stock dropped for a third straight day and has now lost a fifth of its value in March. Meanwhile, credit default swaps - a type of insurance for the company’s bondholders against default - surged by 173 basis points (bps) on Thursday from 142 bps the day before, according to S&P Market Intelligence data cited by Reuters. It is the biggest leap in Deutsche Bank’s CDS ever recorded, Reuters added.

    Deutsche Bank’s bonds themselves also sold off. Its 7.5% additional tier 1 dollar bonds slipped to 74.716 cents on the dollar, while the yield climbed to 22.87% - double its mark only two weeks ago, according to Tradeweb data cited by Reuters.

    AT1s, also known as “contingent convertible” or “CoCo” bonds, can be turned into equity or written off in the event of a crisis. They have become a main focus for investors this week after $17 billion in Credit Suisse AT1s were wiped out as part of the Swiss bank’s government-brokered takeover by rival UBS.

    Deutsche Bank shares led a wider decrease in European bank stocks. The Europe Stoxx Banks index, which includes some of the region’s biggest lenders apart from Credit Suisse Group AG (SIX:CSGN) and UBS Group AG (SIX:UBSG), was more than 3% in the red, erasing both weekly and yearly gains. The index has fallen by over a sixth in the past one-month period.

    In individual banks, Germany’s Commerzbank AG (ETR:CBKG), as well as Sydbank A/S (CSE:SYDB) in Denmark, both saw shares lose over 8%.

  • Apparemment, Aladdin, le super-ordinateur de Larry Fink (BlackRock), a des sueurs froides…

    « Les dominos ont-ils commencé à tomber » ? Le patron de BlackRock, premier gestionnaire d’actifs au monde, s’inquiète de l’effondrement de SVB, « la plus grande #faillite bancaire en quinze ans ».

    Dans sa dernière lettre annuelle, adressée ce mercredi pour la première fois à ses actionnaires et ses clients, #Larry_Fink craint que la faillite de SVB ne soit pas un épiphénomène mais le début d’une longue série de déboires financiers. Un juste pressentiment, alors que les difficultés de #Credit_Suisse déclenchent une nouvelle tempête sur les marchés boursiers.

    L’origine de ce #risque_systémique est à trouver dans le changement total de paradigme économique de ces derniers mois : la flambée de l’inflation liée à la guerre en Ukraine a conduit les banques centrales à relever leurs taux directeurs de façon très abrupte, mettant fin à des décennies « d’argent facile ». Sans doute le premier domino d’une longue série à tomber.

    « Les #marchés_obligataires ont reculé de 15 % l’an dernier, mais cela semblait, comme ils disent dans les vieux westerns, ’calme, trop calme’. Quelque chose d’autre devait se produire alors que la plus puissante remontée des taux depuis les années 1980 devait faire apparaître les fragilités du #système_financier », écrit Larry Fink.

    Cette crainte s’est matérialisée dans la fermeture de #SVB par les autorités américaines vendredi dernier pour protéger les dépôts et limiter le risque de contagion. « C’est un problème classique d’incompatibilité entre l’actif et le passif », note le président de #BlackRock. Investi dans des obligations à long terme, SVB a en effet dû vendre ces actifs à perte dans la précipitation pour faire face aux demandes massives de retrait de ses clients.

    D’autres problèmes similaires ont eu lieu sur différentes classes d’actifs. Ainsi, un certain nombre de sociétés de gestion ont dû bloquer les retraits de #fonds_immobiliers, auxquels elles ne pouvaient faire face ces derniers mois.

    « Nous ne savons pas encore si les conséquences de l’argent facile et des changements réglementaires se répandront sur le secteur des banques régionales américaines (comme dans la crise des Saving & Loans qui s’est prolongée durant les années 1980 et le début des années 1990), avec davantage de crises et de faillites à venir », craint Larry Fink.

    Autre sujet d’inquiétude, les années de taux bas ont conduit les gérants d’actifs à accroître leurs expositions à des investissements illiquides, qui présentaient des rendements plus élevés. « Il y a maintenant un risque d’incompatibilité de liquidité pour ces gérants, particulièrement pour ceux ayant un portefeuille avec un fort levier d’endettement », redoute le patron de BlackRock.

    Compte tenu du repli sur soi des économies et du rapatriement des chaînes de production, il s’attend par ailleurs à une inflation comprise entre 3,5 % et 4 % dans les prochaines années.

    Le PDG du groupe de 8.594 milliards de dollars d’ actifs sous gestion profite aussi de sa lettre pour éclaircir sa position sur l’ESG (respect des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). Cible des tirs croisés des républicains et des démocrates ces derniers mois, pour son engagement jugé trop ou pas assez marqué dans ce domaine, Larry Fink a rappelé que son devoir fiduciaire consistait avant tout à répondre aux attentes des clients.[1]

    (Les Échos)

    1. Le « respect des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance », Larry Fink s’en contretape, rappelant que son devoir fiduciaire consistait avant tout à goinfrer de profits les parasites que sont partout les actionnaires.

  • La Silicon Valley Bank fermée par les autorités américaines, les dépôts de nombreuses start-up menacés
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/03/10/wall-street-ouvre-en-baisse-inquiete-des-deboires-de-la-banque-regionale-cal


    #plop, le petit bruit discret d’une #bulle qui explose dans l’indifférence générale, alors que ça sent le premier domino à plein pif.

    Peu connue du grand public, Silicon Valley Bank, dont le siège social est situé en Californie, est la 16e banque américaine par le volume des actifs, spécialisée dans le secteur technologique. Ce dernier faisant face à des difficultés, entre la hausse des taux d’intérêt et les remous dans la tech, les clients de SVB ont retiré ces derniers mois beaucoup d’argent de leurs comptes. Pour disposer de suffisamment de liquidités, la banque avait annoncé mercredi qu’elle cherchait à lever rapidement du capital. Dans la foulée, elle perdait 60 % à la Bourse de New York jeudi et son titre a été suspendu vendredi avant le début de la séance.

    • « Coup de stress » : pauvres biquets !

      Voilà qui nous rappelle en quoi consiste fondamentalement le rôle de l’État au pays du libéralisme économique : d’une part, qu’il garantisse, par son arsenal militaire, la tenue de son rang dans la compétition impérialiste mondiale ; d’autre part, qu’il contrôle, arrête, juge et emprisonne les gueux et enfin, qu’il remette à flot, comme en 2008, l’économie capitaliste quand elle boit la tasse.

    • Précisément. Un outil dans la main gantée des possédants.

      Un chenil de chiens de garde avec un service de meutes organisées pour maintenir l’ordre social et la propriété privée des usines et des banques d’une classe de parasites.

    • L’onde de choc s’est propagée jusqu’en Europe :

      PARIS (Reuters) - Le secteur bancaire européen évoluait en forte baisse vendredi en Bourse, dans le sillage de la chute la veille du compartiment à Wall Street, après les déboires de la banque américaine SVB Financial Group qui a annoncé une augmentation de capital surprise pour faire face à un risque de liquidités.
      La banque, maison-mère de la société de capital-risque Silicon Valley Bank, a plongé de 60% jeudi à Wall Street, faisant chuter l’indice S&P des banques de 6,6%.
      En Europe, l’indice Stoxx 600 des banques reculait de 4,18% dans la matinée vendredi, accusant de loin la plus forte baisse sectorielle.
      A Paris, BNP Paribas reculait de 4,2%, Société générale perdait 5,6% et Crédit agricole lâchait 3,7%.
      Deutsche Bank perdait 7,8% à Francfort, ING reculait de 5% à Amsterdam et Barclays abandonnait 4,3% à Londres.

      https://www.boursorama.com/bourse/actualites/tempete-sur-les-valeurs-bancaires-apres-les-deboires-de-silicon-valley-b

      Comme une impression de sauve-qui-peut et de « chacun pour sa gueule ». Dans le monde feutré de la #finance, on agite le spectre d’un #bankrun généralisé.

      Depuis quelques jours, le secteur financier tremble aux Etats-Unis. Mercredi soir, la banque californienne Silvergate Bank, connue pour sa proximité avec les cryptomonnaies a annoncé sa liquidation, emportée par l’effondrement de la plateforme d’échanges de monnaies numériques FTX.
      Mais depuis jeudi ce sont les difficultés d’une autre banque qui font vaciller l’ensemble des marchés, notamment américains. Silicon Valley Bank (SVB), un établissement spécialisé dans le financement d’entreprises technologiques, souffre. Selon Reuters, SVB est le partenaire bancaire de près de la moitié des start-up américaines financées par capital-risque qui ont été cotées en bourse en 2022.
      Cet établissement a dû en urgence vendre 21 milliards de dollars de titres obligataires, ce qui l’a amené à essuyer une perte de 1,8 milliard de dollars et sa maison-mère, SVB Financial Group, a été contrainte de procéder en urgence à une augmentation de capital de 2,25 milliards de dollars.
      SVB voit ses dépôts fondre comme neige au soleil. « Le Founders Fund de Peter Thiel [un célèbre milliardaire américain] et d’autres grands investisseurs en capital-risque (ont) conseillé aux entreprises de leur portefeuille de retirer leur argent » de cet établissement, explique John Plassard, de Mirabaud.

      https://www.tradingsat.com/cac-40-FR0003500008/actualites/cac-40-les-deboires-d-une-obscure-banque-americaine-font-craquer-tout-le

      #bulle_spéculative #risques_systémiques

    • https://www.liberation.fr/international/amerique/les-autorites-americaines-garantissent-le-retrait-des-depots-de-la-banque

      Faillite de SVB : les autorités américaines au chevet des banques, Bruno Le Maire ne « voit pas de risque de contagion »

      Dans une tentative de chasser le spectre de la crise de 2008, l’administration Biden a annoncé dimanche une série de mesures pour protéger les particuliers et les entreprises, avant un discours du Président ce lundi. En France, le ministre de l’Economie s’est voulu rassurant.

      Un vent d’inquiétude souffle sur la planète finance depuis la fin de la semaine dernière et des faillites de banques américaines. « Je ne vois pas de risque de contagion » en France, a toutefois tempéré ce lundi matin Bruno Le Maire sur France Info. Le ministre de l’Economie et des Finances a rassuré : « Nous surveillons la situation mais il n’y a pas d’alerte spécifique ». Selon lui, les banques françaises « sont solides ».

      La veille au soir, les autorités américaines ont annoncé une série de mesures pour rassurer particuliers et entreprises sur la solidité du système bancaire américain et vont notamment garantir le retrait de l’intégralité des dépôts de la banque en faillite Silicon Valley Bank (SVB). Outre cette banque, elles vont permettre l’accès à tous les dépôts d’un autre établissement, Signature Bank, qui a été fermé d’office par le régulateur, à la surprise générale, selon un communiqué. La Réserve fédérale (Fed) - la banque centrale américaine - s’est également engagée à prêter les fonds nécessaires à d’autres banques qui en auraient besoin pour honorer les demandes de retraits de leurs clients.

      Ces mesures ont été prises conjointement par la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, la Fed et l’Agence de garantie des dépôts (FDIC), après consultation avec le président américain Joe Biden, selon le communiqué. L’ensemble du dispositif témoigne des turbulences qui menacent le système bancaire américain, perturbé par le resserrement monétaire de la Fed à marche forcée. La réserve fédérale a mis les marges des banques sous pression, incité des clients à placer leur argent dans des produits financiers mieux rémunérés que les comptes courants et a bousculé le secteur des nouvelles technologies, gourmand en cash.

      La vague de retraits qui a suivi a provoqué la défaillance de trois banques cette semaine, à savoir SVB, Signature Bank mais aussi Silvergate Bank, plus petite mais connue pour ses liens privilégiés avec le milieu des cryptomonnaies. La New-Yorkaise Signature Bank est la 21e banque américaine, avec des actifs estimés par la Fed à 110 milliards de dollars, fin 2022.
      Système bancaire plus résilient

      La défaillance de la Signature Bank est la troisième plus importante de l’histoire des Etats-Unis, derrière SVB et Washington Mutual, en 2008. « Aujourd’hui, nous prenons des mesures décisives pour protéger l’économie américaine en renforçant la confiance dans notre système bancaire », ont indiqué Fed, Trésor et FDIC dans leur communiqué. « Cette initiative va permettre au système bancaire américain de continuer à jouer son rôle vital de protection des dépôts et d’accès au crédit pour ménages et entreprises », ont-ils poursuivi.

      Après l’annonce de la prise de contrôle de SVB par la FDIC, vendredi, beaucoup s’étaient inquiétés du sort des dépôts bloqués par la défaillance de l’établissement. Quelque 96 % d’entre eux n’étaient, en effet, pas couverts par la garantie traditionnelle des dépôts, qui assure jusqu’à 250 000 dollars par client et par banque.

      « Le système bancaire est beaucoup plus résilient et doté d’une bien meilleure assise qu’avant la crise financière », a martelé un responsable du Trésor. « Pour être clair, la situation n’est pas celle de 2008 ». Un responsable de la Fed a expliqué de son côté que « les actions de la Fed ce week-end sont destinées à mettre fin aux perturbations dans le secteur bancaire et le système financier qui s’étaient manifestées rapidement ces derniers jours ». L’ensemble des mesures dévoilées dimanche étaient « nécessaires pour traiter le risque systémique que nous avons observé sur les marchés financiers », a-t-il appuyé.
      « Demander des comptes »

      « Je suis fermement déterminé à demander des comptes aux responsables de ce gâchis », a déclaré le président américain Joe Biden dans un communiqué. La solution annoncée dimanche protège les déposants mais « les investisseurs (actionnaires) de ces deux banques (SVB et Signature Bank) vont tout perdre » et leurs dirigeants seront remplacés, a souligné le responsable de la Fed.

      Le chef de l’Etat a assuré que « le peuple américain et les entreprises américaines (pouvaient) avoir confiance dans le fait que leurs dépôts bancaires seront là lorsqu’ils en auront besoin ». Il doit s’exprimer dans la journée de lundi sur « la manière dont nous maintiendrons un système bancaire résilient pour protéger notre reprise économique historique », a-t-il annoncé.

      Parallèlement, les autorités américaines ont mis aux enchères SVB avec l’objectif de trouver un repreneur au plus vite. La course contre la montre engagée par les autorités américaines rappelle le week-end des 13 et 14 septembre 2008. Elles avaient alors échoué à trouver un repreneur pour la banque Lehman Brothers et refusé d’intervenir, la poussant au dépôt de bilan le lundi, avec des conséquences dramatiques pour le secteur financier et l’économie toute entière.

      Outre la stabilité du système bancaire, beaucoup se disaient préoccupés par les répercussions de la faillite de SVB sur le secteur technologique, américain mais aussi au-delà. SVB se targuait d’avoir pour clients « près de la moitié » des entreprises technologiques et des sciences du vivant financées par des investisseurs américains.

      Les dépôts de SVB se montaient autour de 170 milliards de dollars, selon un document publié mercredi par l’établissement, mais des retraits colossaux sont intervenus depuis. « Beaucoup de déposants sont des petites entreprises qui ont besoin de pouvoir accéder à leurs fonds pour payer leurs factures et elles emploient des dizaines de milliers de personnes » aux Etats-Unis, avait relevé Janet Yellen, dimanche, sur la chaîne CBS.

      Janet Yellen avait écarté dimanche un sauvetage de SVB via une injection d’argent public.
      La branche britannique de SVB rachetée à une livre

      La branche britannique de SVB a été vendue au géant bancaire britannique HSBC pour 1 livre, d’après des communiqués simultanés du Trésor britannique et de HSBC publiés lundi. HSBC UK Bank, filiale britannique du géant bancaire, « acquiert Silicon Valley Bank UK Limited (SVB UK) pour 1 livre » symbolique, écrit la banque britannique dans son communiqué.

      « Silicon Valley Bank (UK) a été vendue aujourd’hui à HSBC. […] Les clients de SVB UK pourront accéder à leurs dépôts et leurs services bancaires normalement à partir d’aujourd’hui », précise le Trésor dans sa déclaration. Au 10 mars, SVB UK détenait des prêts d’un montant d’environ 5,5 milliards de livres et des dépôts d’environ 6,7 milliards de livres, d’après HSBC, qui explique que « les actifs et dettes des maisons mères de SVB UK sont exclus de la transaction ».

      Les autorités financières britanniques ont agi dans l’urgence tout le week-end après l’annonce de la faillite de SVB afin de rassurer les marchés et tenter de limiter les dégâts pour le secteur de la technologie pour qui ce dépôt de bilan pose un « risque sérieux », a admis le ministre des Finances Jeremy Hunt.

    • Bruno Le Maire ne « voit pas de risque de contagion »

      Dans la même veine que « le nuage de Tchernobyl s’arrête aux frontières », « la crise des subprimes ne nous atteindra pas », « le covid ne se répandra pas chez nous », etc. (le lecteur complétera par lui même).

    • Panique boursière : suite.
      Après avoir fanfaronné à la clôture hier soir, nos brillants analystes financiers ne l’avaient pas vu venir celle-là :

      https://www.lesechos.fr/finance-marches/marches-financiers/svb-la-bourse-de-paris-plonge-dans-le-rouge-emportee-par-la-chute-des-valeu

      Les difficultés de Crédit Suisse alimentent les craintes d’une crise bancaire à grande échelle. Le principal actionnaire* de la banque helvète a exclu de lui apporter une aide financière supplémentaire. L’indice CAC 40 chutait de plus de 3,3 % en fin de matinée, à environ 6.900 points. Les cours de BNP Paribas et de Société Générale ont été brièvement suspendus.

      *Le principal actionnaire étant une banque saoudienne :

      La Saudi National Bank, premier actionnaire de Credit Suisse avec 9,88% du capital, n’envisage pas d’engager plus d’argent pour la soutenir, selon une interview du président de la banque saoudienne à Bloomberg.

      https://www.boursorama.com/bourse/actualites/la-valeur-du-jour-en-europe-credit-suisse-decroche-de-20-son-principal-a

  • Pendant ce temps-là, les puissances occidentales mettent en ordre de bataille les esprits et transforment à vitesse accélérée leurs économies en «  économies de guerre  »

    Contre la guerre en Ukraine et sa généralisation
    https://mensuel.lutte-ouvriere.org/2023/02/25/contre-la-guerre-en-ukraine-et-sa-generalisation_521781.html

    Poutine, qui nie jusqu’à l’existence d’une nation ukrainienne, aura, par son sanglant mépris des peuples, contribué à ce que s’affirme le sentiment d’appartenir à l’Ukraine, alors qu’il peinait à prendre corps malgré les efforts du pouvoir et des nationalistes.

    L’échec relatif de Poutine résulte, entend-on souvent, de la mobilisation d’un peuple dressé pour défendre sa patrie, rien de tel ne motivant les soldats russes. Certes. Mais ce n’est qu’une partie de la réalité. Si l’Ukraine a tenu bon, malgré une industrie et une armée a priori moins fortes que celles du Kremlin, elle le doit avant tout à la trentaine de membres de l’OTAN, dont les États-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la France, qui l’ont armée, financée et soutenue de bien des façons. Et ils ne cessent de surenchérir en ce domaine, tel Biden encore le 20 février à Kiev.

    Quand les pays de l’OTAN livrent à l’Ukraine des armements de plus en plus sophistiqués, de plus en plus efficaces, ils poursuivent un objectif immédiat proclamé  : éviter la défaite de l’Ukraine et faire durer la guerre afin d’affaiblir la Russie, et si possible la mettre à genoux.

    Cela pour montrer au monde entier ce qu’il en coûte de ne pas s’incliner devant l’ordre impérialiste. Les propos de Biden à Varsovie  : «  L’Ukraine ne sera jamais une victoire pour la Russie  », son refus affiché de toute négociation avec Poutine, le fait que les dirigeants occidentaux ont tous adopté la même posture et le même langage ces derniers temps, tout cela va dans le même sens.

    Le conflit en cours n’est pas la principale raison d’une escalade que l’Occident mène tambour battant. Il fait aussi office de toile de fond pour une mise en ordre de bataille des esprits, ne serait-ce que par la banalisation d’une guerre qui s’installe pour durer, dans une Europe qui n’en avait plus connu depuis 1945, exception faite des bombardements de la Serbie par l’OTAN, il y a un quart de siècle.

    Une mise sur le pied de guerre qui vaut aussi pour les économies de chaque pays, dans un monde capitaliste qui s’enfonce dans la crise sans que ses dirigeants y voient d’issue. Certes, les dirigeants du monde capitaliste n’ont pas encore choisi la fuite en avant vers une conflagration généralisée, comme celle qui conduisit à la Première et à la Deuxième Guerre mondiale, mais rien ne garantit que le conflit ukrainien ne risque pas, à tout moment, de précipiter l’humanité dans une nouvelle guerre mondiale.

    Le conflit en Ukraine sert déjà de terrain d’entraînement aux États impérialistes pour préparer l’éventualité d’un affrontement dit de haute intensité, que les états-majors militaires et politiques envisagent explicitement. Il sert aussi aux chefs de file de l’impérialisme à renforcer des blocs d’États alliés, avec leurs réseaux de bases sur le pourtour de la Russie et de la Chine.

    sommant les autres États de se rallier à ces alliances militaires et d’adopter des trains de sanctions contre la Russie, même quand cela va à l’encontre de leurs intérêts et de ceux, sonnants et trébuchants, de leurs capitalistes. On le constate pour l’arrêt des importations de gaz et de pétrole russes, l’interdiction de commercer avec la Russie, d’y maintenir des activités industrielles, ce qui pénalise des pays européens, dont l’Allemagne et la France, mais profite aux États-Unis.

    Si un fait nouveau, capital pour l’avenir de l’humanité, s’est fait jour au feu de cette guerre, c’est l’évolution rapide de la situation mondiale dans le sens de sa #militarisation.

    Poutine a répondu de façon monstrueuse à la pression continue de l’impérialisme en Europe de l’Est en lançant ses missiles et ses tanks sur l’Ukraine le 24 février 2022. Mais c’est l’impérialisme qui s’est préparé depuis longtemps à aller à la confrontation.

    ... à plonger tôt ou tard l’Ukraine dans la guerre, donc à faire de ses habitants les otages d’une rivalité qui les dépasse, car elle oppose le camp mené par les États-Unis à la Russie, avec son dictateur, ses bureaucrates et ses oligarques pillards. D’un côté ou de l’autre, il n’y a nulle place pour le droit des peuples à décider de leur destinée, même si on veut nous le faire croire.

    L’ex-chancelière Angela Merkel n’en croit rien. Elle le dit dans une interview où elle revient sur la crise qui s’ouvrit en février 2014, quand le président ukrainien d’alors, contesté par la rue et surtout lâché par des secteurs de la bureaucratie et de l’oligarchie, dut s’enfuir. Le pouvoir issu du #Maïdan s’alignant sur les États-Unis, Poutine récupéra alors la #Crimée et poussa le Donbass à faire sécession. Les accords de Minsk, que Merkel parrainait avec Hollande et auxquels avaient souscrit Moscou et Kiev, devaient régler pacifiquement le différend, prétendait-elle à l’époque. Elle avoue désormais qu’il s’agissait d’un leurre. «  Poutine, explique-t-elle, aurait [alors] pu facilement gagner. Et je doute fortement que l’OTAN aurait eu la capacité d’aider l’Ukraine comme elle le fait aujourd’hui. […] Il était évident pour nous tous que le conflit allait être gelé, que le problème n’était pas réglé, mais cela a justement donné un temps précieux à l’Ukraine.  » Et à l’OTAN pour préparer l’affrontement avec Moscou.

    Le conflit couvait depuis l’effondrement de l’#URSS en 1991. Dès ce moment-là, États-Unis et Union européenne furent à la manœuvre pour aspirer l’Europe de l’Est dans l’orbite de l’OTAN. Des conseillers de la Maison-Blanche expliquaient qu’il fallait détacher l’Ukraine de la Russie, pour que celle-ci n’ait plus les moyens de redevenir une grande puissance.

    Or, après les années Eltsine (1991-1999), d’effondrement économique, d’éclatement de l’État et de vassalisation humiliante du pays par l’Occident, Poutine et la bureaucratie russe voulaient restaurer la #Grande_Russie.

    Une première tentative de l’Occident pour aspirer l’Ukraine eut lieu en 2004 sous l’égide du tandem ­Iouchtchenko­-­Timochenko, tombeur du pro-russe Ianoukovitch. Elle tourna court, la population, dégoûtée, finissant par rappeler Ianoukovitch. Elle allait le chasser à nouveau en 2014. Cette fois fut la bonne pour le camp occidental et signifiait la guerre  : dans le #Donbass, que l’armée de Kiev et des troupes d’extrême droite disputaient aux séparatistes, elle fit 18 000 morts et des centaines de milliers de réfugiés. Huit ans plus tard, tout le pays bascula dans l’horreur.

    Les dirigeants américains et européens savaient que Moscou ne pouvait accepter une Ukraine devenue la base avancée de l’OTAN. Ils savaient quels risques mortels leur politique impliquait pour les Ukrainiens, et pour la jeunesse russe que Poutine enverrait tuer et se faire tuer. Cette guerre, l’OTAN l’avait rendue inéluctable depuis 2014, en armant, entraînant, conseillant l’#armée_ukrainienne et les troupes des nationalistes fascisants.

    Les dirigeants occidentaux n’en avaient cure, car faire la guerre avec la peau des peuples est une constante de la politique des puissances coloniales, puis impérialistes. On le vérifie encore une fois dans le sang et la boue des tranchées en #Ukraine, dans les ruines des HLM de #Kharkiv, #Kherson ou #Donetsk que les missiles des uns ou des autres ont fait s’effondrer sur leurs habitants. N’en déplaise aux médias d’ici qui ressassent la fable d’un conflit soudain opposant le petit David ukrainien isolé et désarmé qu’agresserait sans raison le grand méchant Goliath russe.

    À l’occasion du premier l’anniversaire de l’invasion de l’Ukraine, on a eu droit au rouleau compresseur d’une #propagande sans fard dans les #médias. Il y aurait le camp du Mal (la Russie, l’Iran et surtout la Chine), face au camp du Bien, celui des puissances qui, dominant la planète, y garantissent la pérennité du système d’exploitation capitaliste au nom de la démocratie ou de la sauvegarde de pays comme l’Ukraine, dès lors qu’ils leur font allégeance.

    Cette propagande massive vise à s’assurer que l’opinion publique adhère sans réserve à ce qu’on lui présente comme la défense d’un peuple agressé, en fait, à la guerre que mènent les grandes puissances par Ukrainiens interposés. Car, au-delà de ce qu’il adviendra de la Russie et du régime de Poutine – une des préoccupations contradictoires des États impérialistes, qui disent vouloir la victoire de Kiev tout en craignant qu’une défaite de Poutine déstabilise de façon incontrôlable la Russie et son «  étranger proche  » – ces mêmes États visent un objectif au moins aussi important pour eux. Ils veulent enchaîner à leur char de guerre leur propre population, dans le cadre ukrainien, tout en ayant en vue des conflits plus larges à venir.

    En fait, le conflit ukrainien a tout du prologue d’un affrontement plus ou moins généralisé, dont politiques, généraux et commentateurs désignent déjà la cible principale  : la Chine. Ainsi, Les Échos du 15 février a mis à sa une un article qui titrait  : «  Pour l’Amérique, la Chine redevient l’ennemi numéro un  », après que «  la guerre en Ukraine [avait un temps détourné son attention] de la confrontation  » avec la Chine.

    Déjà, les steppes, les villes et le ciel d’Ukraine servent autant aux états-majors et industriels occidentaux à affronter la #Russie, par soldats ukrainiens interposés, qu’à tester sur le vif leurs #blindés, pièces d’#artillerie, #systèmes_de_commandement, de communication, d’interception, de renseignement, et à en tirer les leçons voulues. Ils y voient aussi une aubaine pour se débarrasser de #munitions et d’engins plus ou moins anciens que les combats vont consommer . Conséquence favorable pour eux, cela justifie l’escalade des livraisons d’armes et, de ce fait, l’explosion des #budgets_militaires afin de doper les #industries_de_guerre.

    Cette conjoncture permet à des États d’engranger des commandes, parfois énormes, de pays dépendants de protecteurs plus puissants et des leaders des marchés de l’#armement.

    Ainsi, Varsovie a envisagé de donner à Kiev des vieux Mig-29 de conception soviétique pour les remplacer par des F-16 américains, et promis de lui livrer d’anciens chars Leopard, qu’elle remplacera par de nouveaux modèles. Évidemment, cela ne fait l’affaire ni de Dassault ni du char Leclerc français qui peine à trouver preneur. C’est que, même alliés au sein de l’OTAN, voire soucieux d’afficher leur unité, comme Biden l’a souligné lors de la promesse que lui et Scholtz ont voulue simultanée de livrer des tanks à Kiev, les États impérialistes restent rivaux sur ce terrain, comme sur d’autres. Les États-Unis se réservent la part du lion, avec des commandes d’armement qui ont doublé en 2022, à la mesure de leur puissance industrielle, de leur suprématie militaire… et des guerres à venir.

    Ces commandes d’armes pour l’Ukraine, qui s’ajoutent à celles que l’on dit destinées à remettre à niveau chaque armée occidentale, servent autant à tenir la dragée haute à #Poutine qu’à transformer à vitesse accélérée les #économies occidentales en «  #économies_de_guerre  », selon les termes même du programme que se sont fixé les ministres de la Défense des pays de l’#OTAN, lors de leur sommet des 14-15 février à Bruxelles. Depuis des mois, les dirigeants politiques occidentaux et plus encore les chefs de leurs armées discutent publiquement et concrètement d’une guerre généralisée qu’ils savent s’approcher. Ainsi, à Brest, l’#amiral_Vandier, chef d’état-major de la Marine, a lancé à la nouvelle promotion d’élèves-­officiers  : «  Vous entrez dans une Marine qui va probablement connaître le feu à la mer.  » Certains avancent même une date pour cela, tel le général Minihan, chef des opérations aériennes aux #États-Unis  : «  J’espère me tromper, mais mon intuition me dit que nous nous affronterons en 2025  » avec la #Chine.

    Ukraine  : un effroyable bilan humain, social et économique

    En attendant, la guerre en Ukraine a déjà tué ou blessé 180 000 militaires russes, à peine moins de soldats ukrainiens, et tué plus de 30 000 civils, estime le chef de l’armée norvégienne, membre de l’OTAN. 7,5 millions d’Ukrainiens ont trouvé refuge en Pologne, Slovaquie, Autriche, etc., et en Russie. Parmi eux se trouvent une écrasante majorité de femmes et d’enfants, car les hommes de 18 à 60 ans, mobilisables, ont l’interdiction de quitter le territoire. Il y a aussi plusieurs millions de déplacés dans le pays même.

    De nombreuses villes, grandes ou petites, ont été bombardées, parfois rasées, les infrastructures énergétiques partout frappées, ce qui a plongé la population dans l’obscurité et le froid. Le montant des destructions de routes, ponts, voies ferrées, ports, aéroports, entreprises, écoles, hôpitaux, logements… atteignait 326 milliards de dollars, selon ce qu’estimait le Premier ministre en septembre dernier. Ce montant, déjà colossal, n’a pu que croître depuis, ne serait-ce que parce qu’il s’accompagne d’énormes détournements qu’ont effectués et que vont effectuer ministres, généraux, bureaucrates et oligarques ukrainiens.

    Zelensky a reconnu la corruption de l’appareil d’État jusqu’au sommet quand il a limogé une partie de son gouvernement, dont les ministres de la Défense et de la Reconstruction, et plusieurs très hauts dirigeants. Cela ne change rien à la nature d’un État qui, source principale des nantis comme en Russie, est l’un des plus corrompus au monde  : plus que l’État russe, dit-on, ce qui n’est pas rien. En fait, Zelensky n’avait pas le choix  : une commission américaine de haut niveau avait débarqué à Kiev pour vérifier ce que devenait l’aide colossale fournie par l’oncle d’Amérique. Après tout, même si l’État américain est richissime, il a aussi ses bonnes œuvres (industriels de l’armement, financiers, capitalistes de haut vol) et ne veut pas qu’une trop grosse part des profits de guerre file dans poches des bureaucrates, oligarques et maffieux ukrainiens.

    Et puis, au moment même où l’Occident annonçait fournir des tanks à l’État ukrainien, il ne s’agissait pas que le régime apparaisse pour ce qu’il est  : celui de bandits prospérant sur le dos de la population. Cela s’adressait moins à l’opinion occidentale, qui ne connaît de la situation que ce qu’en disent les médias, qu’à la population ukrainienne.

    Victime des bombardements et exactions de l’armée russe, elle se rend compte qu’elle est aussi la victime des parasites de la haute bureaucratie, des ministres véreux ou des généraux voleurs. Et l’union sacrée n’a pas fait disparaître les passe-droits qui permettent aux nantis de profiter en paix de leur fortune à l’étranger, tandis que leurs sbires de la police raflent les hommes, valides ou pas, pour le front. Les résistances que cela provoque ici ou là n’ont rien pour étonner dans un tel contexte, d’autant que, si l’armée a d’abord pu compter sur des volontaires, ceux qu’elle mobilise maintenant n’en font, par définition, pas partie.

    Tout à leurs commentaires dithyrambiques sur un régime censé incarner la démocratie et l’unité d’un peuple derrière ses dirigeants, les médias français préfèrent tirer un voile pudique sur des faits qui pourraient gâcher leur tableau mensonger.

    [...] Le régime de la bureaucratie russe et de ses oligarques milliardaires, lui-même bien mal en point socialement et économiquement, corrompu, policier et antiouvrier, ne peut représenter aucun avenir pour la population ukrainienne, même russophone.

    Quant au régime qu’incarne Zelensky, ce chargé de pouvoir des grandes puissances et de leurs trusts qui lorgnent sur les richesses agricoles et minières de l’Ukraine ainsi que sur sa main-d’œuvre qualifiée, afin de l’exploiter avec des salaires misérables , ce qui a commencé dès 2014, le conflit lui a sans doute sauvé la mise, au moins dans un premier temps. Comme dans toute guerre, la population s’est retrouvée bon gré mal gré derrière un pouvoir qui se faisait fort de la défendre. Mais gageons que de larges pans des classes populaires n’ont pas oublié pour autant ce qu’avait fini par leur inspirer cet acteur devenu président, qui avait joué au «  serviteur du peuple  » pour mieux préserver les intérêts des nantis.

    S’affrontant sur le terrain par peuples interposés, les dirigeants occidentaux, représentants d’une bourgeoisie impérialiste qui domine le monde, les dirigeants russes, représentants des parasites qui exploitent les travailleurs de Russie, les dirigeants ukrainiens, représentants de leurs oligarques autant que des trusts occidentaux, sont tous des ennemis des classes populaires, de la classe ouvrière.

    Et les travailleurs, où qu’ils se trouvent, quelle que soit leur nationalité, leur langue ou leur origine, n’ont aucune solidarité à avoir, sous quelque prétexte que ce soit, avec «  l’ennemi principal qui est toujours dans notre propre pays  », comme disait le révolutionnaire allemand Karl Liebknecht en 1916, en pleine Première Guerre mondiale.

    Partout, la marche à une économie de guerre

    Le 6 février, Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU [...] : «   Le monde se dirige les yeux grand ouverts [vers] une guerre plus large .  »

    On vient d’en avoir la confirmation au sommet des ministres de la Défense des membres de l’OTAN. Il leur a été demandé, selon Les Échos, «  de passer en #économie_de_guerre  », de relancer et activer la #production_d’armements, et d’abord d’#obus, de #chars et de pièces d’artillerie, pour faire face à «  une #guerre_d’usure  » en Ukraine. Et de préciser que si, il y a dix ans, les États-Unis demandaient à leurs alliés de monter leurs #dépenses_militaires à 2 % de leur produit intérieur brut, ce chiffre est désormais considéré comme un plancher que beaucoup ont dépassé. La conférence sur la sécurité en Europe qui a suivi, à Munich, a réuni la plupart des dirigeants européens et mondiaux pour aller dans le même sens.

    C’est ce qu’ils font en cherchant à persuader leur population de l’inéluctabilité de la guerre  ; en lui désignant comme ennemis certains pays, au premier rang desquels la Russie et la Chine  ; en déployant une propagande insidieuse mais permanente dans les médias autour de thèmes guerriers  ; en mettant l’accent sur la préparation de la #jeunesse à servir «  sa  » nation, à la défendre, sans jamais dire qu’il s’agira de la transformer en #chair_à_canon pour les intérêts des classes possédantes. Le gouvernement français s’en charge avec son #Service_national_universel, qui vise à apprendre à des jeunes à marcher au pas, avec des reportages télévisés plus ou moins suscités sur le service à bord de navires de guerre, sur des régions sinistrées (Saint-Étienne) où la reprise de la production d’armes ferait reculer le chômage. Le nouveau ministre allemand de la Défense se situe sur le même terrain, lui qui veut rétablir le service militaire et faire de la Bundeswehr la première armée du continent grâce aux 100 milliards de hausse de son #budget.

    En juin dernier, Macron avait annoncé la couleur avec son plan Économie de guerre doté par l’État de 413 milliards sur sept ans. Il fallait «  aller plus vite, réfléchir différemment sur les rythmes, les montées en charge, les marges, pour pouvoir reconstituer plus rapidement ce qui est indispensable pour nos #armées, pour nos alliés ou pour celles [comme en Ukraine] que nous voulons aider  ». Et, s’adressant aux dirigeants de l’organisme qui regroupe les 4 000 entreprises du secteur militaire, il leur avait promis des décisions et, surtout, des #investissements. Pour les #profits, la guerre est belle…

    Bien au-delà du conflit ukrainien, la cause profonde de l’envolée des budgets militaires est à chercher dans la crise du système capitaliste mondial, qui va s’aggravant sans que quiconque dans les milieux dirigeants de la bourgeoisie en Europe et en Amérique sache comment y faire face.

    Comme à chaque fois que le monde se trouve confronté à une telle situation, la bourgeoisie et ses États en appellent à l’industrie d’armement pour relancer l’économie. Car, grâce au budget militaire des États, elle échappe à la chute de la demande qui affecte les secteurs frappés par la baisse du pouvoir d’achat des couches populaires et, en dopant le reste de l’économie par des commandes de machines, de logiciels, de matériaux, de matières premières, etc., la bourgeoisie peut espérer que cela l’aidera à maintenir le taux de profit général.

    [...] même quand certains prétendent chercher une solution de paix à une guerre que leur politique a suscitée, la logique de leur politique d’armement continu de l’un des deux camps sur le terrain, celle de la militarisation de l’économie de nombreux pays sur fond d’une crise générale dont l’évolution leur échappe, tout cela fait que, de la guerre en Ukraine à un conflit plus large, la distance pourrait être bien plus courte qu’on ne le croit.

    Contrairement à ce qu’affirme Guterres, ce n’est pas toute l’humanité qui avance vers l’abîme les yeux grands ouverts. Les dirigeants politiques de la bourgeoisie ne peuvent pas ne pas voir ce qu’ils trament, eux, et dans quels intérêts, ceux de la bourgeoisie. Cela, ils le discernent en tout cas bien mieux que les masses du monde entier, auxquelles on masque la réalité, ses enjeux et son évolution qui s’accélère.

    Oui, en Ukraine, en Russie, comme partout ailleurs, le niveau de la conscience et de l’organisation de la classe ouvrière est très en retard sur cette course à la guerre dans laquelle la bourgeoisie engage l’humanité. Et plus encore au regard de ce qu’il faudrait pour l’enrayer, la transformer en guerre de classe pour l’émancipation des travailleurs du monde entier.

    C’est ce que firent les bolcheviks en Russie en 1917, en pleine guerre mondiale. C’est sur cette voie qu’il faut que s’engagent, en communistes révolutionnaires et internationalistes, en militants de la seule classe porteuse d’avenir, le prolétariat, toutes celles et tous ceux qui veulent changer le monde avant qu’il ne précipite à nouveau l’humanité dans la barbarie. Alors, pour paraphraser ce que Lénine disait de la révolution d’Octobre  : «  Après des millénaires d’esclavage, les esclaves dont les maîtres veulent la guerre leur [répondront]  : Votre guerre pour le butin, nous en ferons la guerre de tous les esclaves contre tous les maîtres.  »

    #guerre_en_ukraine #capitalisme #crise

    • Royaume-Uni : hausse significative du budget militaire

      A l’occasion de la mise à jour de sa doctrine de politique étrangère, le Royaume-Uni a annoncé son intention de porter à terme son #budget_défense à 2,5 % du PIB.

      Face aux « nouvelles menaces », le #Royaume-Uni va investir cinq milliards de livres supplémentaires dans sa politique de défense. Cette rallonge va porter ce budget à 2,25 % du PIB à horizon 2025, un redressement jamais vu depuis la guerre froide.
      Cette enveloppe doit permettre de « reconstituer et de renforcer les stocks de #munitions, de moderniser l’entreprise nucléaire britannique et de financer la prochaine phase du programme de #sous-marins_Aukus », a souligné Downing Street dans un communiqué, le jour même de la signature à San Diego du contrat entre l’Australie, les Etats-Unis et le Royaume-Uni. A terme, l’objectif est de revenir à des dépenses militaires équivalentes à 2,5 % du PIB, bien au-dessus de l’engagement pris au niveau de l’#Otan (2 % du PIB).

      Ces annonces interviennent au moment où le Royaume-Uni met à jour sa doctrine de politique étrangère dans un document de 63 pages qui fait la synthèse des principaux risques pour la sécurité du pays. La dernière mouture, publiée il y a trois ans, exposait les ambitions de la « Global Britain » de Boris Johnson au lendemain du Brexit. La #Russie y était identifiée comme la principale menace pour la sécurité. La #Chine était qualifiée de « défi systémique » et le document annonçait un « pivot » du Royaume-Uni vers l’axe Indo-Pacifique.
      Les tendances observées sont toujours les mêmes, mais « elles se sont accélérées ces deux dernières années », observe cette nouvelle revue. « Nous sommes maintenant dans une période de risques renforcés et de volatilité qui va probablement durer au-delà des années 2030 », note le rapport.

      (Les Échos)

      #militarisation #impérialisme

    • Les importations d’armes en Europe en forte hausse

      Les #achats_d'armement ont quasiment doublé l’an dernier sur le sol européen

      Depuis le début de la guerre en Ukraine, l’Europe s’arme massivement. C’est ce que confirme le dernier rapport de l’#Institut_international_de_recherche_sur_la_paix_de_Stockholm (Sipri), publié lundi. Hors Ukraine, les #importations_d'armements sur le Vieux Continent se sont envolées de 35 % en 2022. En intégrant les livraisons massives d’#armes à l’Ukraine, elles affichent une hausse de 93 %.

      […] Sur la période 2018-2022, privilégiée par le #Sipri pour identifier les tendances de fond, les importations d’armes européennes affichent ainsi une hausse de 47 % par rapport aux cinq années précédentes, alors qu’au niveau mondial, les transferts internationaux d’armes ont diminué de 5,1 % sur cette période. Un contraste majeur qui témoigne de la volonté des Européens d’« importer plus d’armes, plus rapidement », explique Pieter ​Wezeman, coauteur du rapport.
      Dans cette optique, outre les industriels locaux, les Européens comptent sur les #Etats-Unis. Sur la période 2018-2022, ces derniers ont représenté 56 % des #importations_d'armes de la région. Le premier importateur en #Europe a été le Royaume-Uni, suivi de l’#Ukraine et de la Norvège.
      […]

      En France, #Emmanuel_Macron a proposé une augmentation de 100 milliards d’euros pour la loi de programmation militaire 2024-2030 par rapport à la période 2019-2025. Le Premier ministre britannique, #Rishi_Sunak, vient pour sa part d’annoncer que le #Royaume-Uni allait investir 5 milliards de livres (5,6 milliards d’euros) supplémentaires dans la défense, dans un contexte de « nouvelles menaces venues de #Russie et de #Chine ». Plus symbolique encore, l’Allemagne du chancelier #Olaf_Scholz a annoncé, en mai 2022, le lancement d’un fonds spécial de 100 milliards pour moderniser son armée et rompre avec des décennies de sous-investissement.

      (Les Échos)

      #militarisation

    • La France s’apprête à relocaliser sur son sol une vingtaine de productions industrielles militaires , révèle mardi franceinfo. Ces relocalisations sont une déclinaison de « l’économie de guerre » réclamée par l’Élysée.

      Le mois dernier, on a appris que la France s’apprêtait à relocaliser la production de #poudre pour ses obus d’artillerie (de 155mm). Selon nos informations, en tout, il y aura une vingtaine de relocalisations stratégiques en France.

      Dans le détail, la France va donc de nouveaux produire sur son territoire des #coques de bateaux produites jusqu’à présent dans les pays de l’Est, des explosifs pour gros calibres produits en Suède, Italie ou encore Allemagne, mais, surtout, des pièces jugées « critiques » pour certains moteurs d’hélicoptères. On parle ici précisément des disques des turbines haute-pression des bi-moteurs RTM322. Jusqu’à présent, ces pièces étaient élaborées aux Etats-Unis puis forgées en Angleterre. Bientôt, l’élaboration et la forge seront faites en France dans l’usine #Aubert_et_Duval située dans le Puy-de-Dôme. […]

      (France Info)

      #militarisation #relocalisation #industrie_de_la_défense

    • Emmanuel Chiva est à la tête (de l’emploi) de la direction générale de l’armement (DGA). Son sale boulot : mettre en œuvre l’« économie de guerre » voulue par Macron.

      Un type qui pratique au quotidien "l’argent magique" et un "pognon de dingue" (public) au service des capitalistes de l’armement. Le principe : un vol à grande échelle des fruits du travail de millions de travailleurs pour produire en masse du matériel de destruction massive.

      Pour nous en faire accepter les conséquences (les futures baisses du pouvoir d’achat, les hôpitaux fermés, les écoles surchargées, les enseignants en sous-effectif, les transports dégradés, un budget de l’État écrasé par la dette, etc.), Le Monde lui tend ses colonnes : « Nous sommes entrés dans l’économie de guerre »
      https://www.lemonde.fr/international/article/2023/03/15/emmanuel-chiva-dga-nous-sommes-entres-dans-l-economie-de-guerre_6165595_3210

    • La marche vers un économie de guerre
      https://lutte-ouvriere.be/la-marche-vers-un-economie-de-guerre

      [...] Les USA augmentent fortement leur budget militaire, l’Allemagne débloque 100 milliards pour l’armée, la France annonce plus de 400 milliards de budget pour les prochaines années et en Belgique, 14 milliards de dépenses guerrières supplémentaires sont prévues d’ici 2030.

      Pour faire accepter l’envolée des dépenses militaires, alors que partout les besoins des populations sont criants, les dirigeants des pays capitalistes cherchent à persuader de l’inéluctabilité de la guerre. Ils désignent comme ennemis certains pays, au premier rang desquels la Russie et la Chine, et déploient une propagande insidieuse mais permanente dans les médias autour de thèmes guerriers.

      Les gouvernements mettent aussi l’accent sur la préparation de la jeunesse qu’ils comptent utiliser comme chair à canon. L’Etat belge s’en est chargé en ouvrant cette année, dans 13 écoles de la fédération Wallonie Bruxelles, une option « métiers de la Défense et de la sécurité » dans laquelle des jeunes sont préparés à devenir agent de sécurité, policier ou militaire, à partir de la quatrième secondaire technique !

      Au-delà du conflit ukrainien, la cause profonde de l’envolée des budgets militaires est à chercher dans la crise du système capitaliste mondial qui ne fait que s’aggraver.

    • Vers un doublement du budget militaire / Le Japon tourne la page du pacifisme
      https://www.monde-diplomatique.fr/2023/03/POUILLE/65605

      Ce samedi 27 novembre 2021, le premier ministre japonais Kishida Fumio effectue une visite matinale des troupes de défense terrestre sur la base d’Asaka, au nord de Tokyo. Après un petit tour en char d’assaut, il prononce un discours de rupture : « Désormais, je vais envisager toutes les options, y compris celles de posséder des capacités d’attaque de bases ennemies, de continuer le renforcement de la puissance militaire japonaise. » Selon le chef du gouvernement, « la situation sécuritaire autour du Japon change à une vitesse sans précédent. Des choses qui ne se produisaient que dans des romans de science-fiction sont devenues notre réalité ». Un an plus tard, M. Kishida annonce le doublement des dépenses de #défense et débloque l’équivalent de 315 milliards de dollars sur cinq ans. Le #Japon va ainsi disposer du troisième budget militaire du monde derrière ceux des États-Unis et de la Chine. Il représentera 2 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui correspond à l’engagement pris en 2014 par les vingt-huit membres de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (#OTAN)… dont il ne fait pourtant pas partie.

      Ces décisions — qui s’inscrivent dans le cadre de la nouvelle « stratégie de sécurité nationale » dévoilée en août 2022 — changent profondément les missions des forces d’autodéfense, le nom officiel de l’#armée_nippone. Elles ne s’en tiendront plus, en effet, à défendre le pays mais disposeront des moyens de contre-attaquer. Et même de détruire des bases militaires adverses.

      Cette #militarisation et cette imbrication renforcée avec les États-Unis sonnent, pour la presse chinoise, comme dune dangereuse alerte. Certes, les rapports sino-japonais s’étaient déjà dégradés quand Tokyo avait acheté, le 11 septembre 2012, trois des îles Senkaku/Diaoyu à leur propriétaire privé et que, dans la foulée, Pékin avait multiplié les incursions dans la zone (8). Les visites régulières d’Abe au sanctuaire Yasukuni, qui honore la mémoire des criminels de guerre durant la seconde guerre mondiale, n’avaient rien arrangé.

      Mais le climat s’était plutôt apaisé dans la dernière période. « J’étais parvenu à un consensus important [avec Abe] sur la construction de relations sino-japonaises répondant aux exigences de la nouvelle ère (9) », a même témoigné le président chinois après l’assassinat de l’ex-premier ministre, en juillet 2022. Depuis l’annonce de la nouvelle stratégie de défense, le ton a changé.

      [...] en tournant le dos brutalement à sa politique pacifiste, le Japon se place en première ligne face à Pékin et éloigne tout espoir d’autonomie vis-à-vis des États-Unis. Cette impossible entrée dans l’après-guerre froide cohabite pourtant avec un dynamisme régional haletant où, de Hanoï à Colombo, ce pays vieillissant a construit les leviers de sa future croissance. Il y est en concurrence directe avec la Chine, très présente. Déjà, la plupart des pays asiatiques refusent de choisir entre Pékin et Washington, qui leur promet la sécurité. Et avec Tokyo ?

      (Le Monde diplomatique, mars 2023)

      #budget_militaire

    • Le géant de l’armement Rheinmetall surfe sur la remilitarisation de l’Europe (Les Échos)

      L’entrée au DAX, lundi, du premier producteur de munitions et constructeur de chars en Europe consacre le retour en force des combats conventionnels terrestres. Après une année 2022 record, Rheinmetall s’attend à faire mieux encore en 2023.

      Ce lundi, Armin Papperger, le patron de Rheinmetall, se fera un plaisir de sonner la cloche de la Bourse de Francfort pour marquer l’entrée de son groupe dans le Dax après une année record. Son cours a doublé et sa valorisation avoisine 10,5 milliards d’euros. « Le changement d’ère et la guerre en Europe ont ouvert une nouvelle page pour #Rheinmetall », a-t-il déclaré jeudi, lors de la présentation des résultats du premier producteur de munitions et constructeur de chars en Europe.

      Le retour des combats conventionnels terrestres a dopé le résultat net de ce dernier : il a bondi de 61 %, à 469 millions d’euros pour un chiffre d’affaires record de 6,4 milliards d’euros, en hausse de 13,25 %. Le résultat opérationnel (Ebit hors effets exceptionnels) a, lui, progressé de 27 %, à 754 millions d’euros. Et ce n’est qu’un début : « Je m’attends à ce que l’année 2023 soit de loin la meilleure année de l’histoire de l’entreprise en termes de commandes », a annoncé Armin Papperger.

      Carnet de commandes record

      Il a plusieurs fois loué devant la presse l’efficacité du nouveau ministre de la Défense Boris Pistorius, qui devrait, selon lui, permettre de débloquer enfin les 100 milliards du fonds de modernisation de l’armée allemande. Sur cette enveloppe, le patron de Rheinmetall estime pouvoir capter 38 milliards d’euros d’ici à 2030, dont 20 milliards répartis à parts équivalentes entre les chars et la numérisation des forces terrestres, et 8 milliards pour les munitions. A ces montants s’ajoute la hausse prévisible du budget de la défense allemande : Boris Pistorius a réclamé 10 milliards de plus par an et il faudrait même 10 milliards supplémentaires pour atteindre les 2 % du PIB. Un objectif pour tous les membres de l’Otan qui devrait rapidement devenir un prérequis minimum. Le réarmement généralisé des pays de l’Alliance atlantique ne peut donc que profiter à Rheinmetall. Il vient en outre d’élargir sa palette en s’invitant dans la fabrication du fuselage central du F-35 américain qui devrait lui rapporter plusieurs milliards d’euros. Le groupe, qui affichait déjà l’an dernier un carnet de commandes record de 24 milliards d’euros, estime avoir les capacités pour faire bien davantage.

      600.000 obus

      En Ukraine, Rheinmetall assure ainsi pouvoir livrer un peu moins de la moitié des besoins de la production d’artillerie. Avec l’achat du fabricant espagnol Expal Systems, qui devrait être bouclé dans l’année, la capacité annuelle du groupe passe à environ 450.000 obus, voire 600.000 d’ici à deux ans.

      Rheinmetall est en train d’agrandir une usine en Hongrie et souhaite en ouvrir une de poudre en Saxe avec la participation financière de Berlin. Selon Armin Papperger, l’intégration verticale de l’entreprise, qui produit elle-même ses composants, la met par ailleurs à l’abri d’un chantage éventuel de la Chine sur les matières premières. Quant à la main-d’oeuvre, elle ne manquerait pas : le groupe se dit « inondé de candidatures », il a recruté 3.000 personnes l’an dernier et compte en faire autant cette année. Toutes les planètes sont donc alignées aux yeux de Rheinmetall pour pousser les feux. Le groupe vise un chiffre d’affaires de 7,4 à 7,6 milliards d’euros en 2023, ce qui représenterait une nouvelle hausse de 15,5 % à 18,7 %. Sa marge opérationnelle devrait passer de 11,8 % à 12 % environ.

      #militarisation #militarisme #capitalisme #troisième_guerre_mondiale

    • La guerre en Ukraine accélère la militarisation

      La guerre en Ukraine accélère la militarisation de l’Europe. Tragédie pour les populations ukrainienne et russe qui ont déjà payé cette guerre de 30 000 morts, elle est une aubaine pour les militaires et les marchands d’armes. Première guerre dite «  de haute intensité  » en Europe depuis 1945, sur un front de plus de 1 000 kilomètres, elle permet aux militaires de tester leurs matériels, de valider ou adapter leurs doctrines d’utilisation. Elle offre un marché inespéré pour les marchands d’armes appelés à fournir munitions et missiles, drones ou chars détruits en grande quantité. Elle accélère la hausse des budgets militaires de tous les États.

      Une militarisation engagée avant la guerre en Ukraine

      La hausse des dépenses militaires dans le monde était engagée avant l’invasion russe de l’Ukraine. Selon le dernier rapport du Sipri, l’Institut international pour la paix de Stockholm, publié le 25 avril, les dépenses militaires dans le monde ont dépassé en 2021, pour la première fois, la barre des 2 000 milliards de dollars, avec 2 113 milliards de dollars, soit 2,2 % du PIB mondial. C’est la septième année consécutive de hausse des dépenses militaires dans le monde selon ce rapport, qui précise  : «  Malgré les conséquences économiques de la pandémie de Covid-19, les dépenses militaires mondiales ont atteint des niveaux records.  »

      Si la Russie, présentée comme le seul agresseur et va-t-en-guerre, a augmenté son budget militaire en 2021, qui atteint 66 milliards de dollars et 4 % de son PIB, elle n’arrive qu’en cinquième position dans le classement des puissances les plus dépensières, derrière les États-Unis, la Chine, l’Inde et la Grande-Bretagne.

      En Grande-Bretagne, avec 68,3 milliards de dollars, les dépenses militaires sont en hausse de 11,1 %. Après le Brexit, Boris Johnson a multiplié les investissements, en particulier dans la marine. Peu avant sa démission, il affirmait vouloir restaurer l’impérialisme britannique en tant que «  première puissance navale en Europe  » et marquait à la culotte les autres puissances impérialistes du continent. Il a été l’un des premiers dirigeants européens à se rendre à Kiev pour afficher son soutien à Zelensky. Toute une brochette de politiciens britanniques milite pour que les dépenses militaires augmentent plus vite encore dans les années à venir. Ainsi, Nile Gardiner, ancien collaborateur de Thatcher, affirmait en mars au Daily Express : «  Les dépenses de défense devraient doubler, de deux à quatre pour cent [du PIB] dans les années à venir si la Grande-Bretagne veut sérieusement redevenir une puissance mondiale.  »

      Johnson a renforcé par divers canaux sa coopération militaire avec les États-Unis. Ces liens étroits entre les impérialismes britannique et américain ont été illustrés par l’alliance #Aukus (acronyme anglais pour Australie, Royaume-Uni et États-Unis) contre la Chine. Cette alliance s’est concrétisée par la commande australienne de huit sous-marins à propulsion nucléaire, pour la somme de 128 milliards de dollars. Déjà en hausse de 4 % en 2021 par rapport à 2020, les dépenses militaires de l’Australie sont donc appelées à augmenter. C’est aussi la politique occidentale agressive vis-à-vis de la Chine, et les pressions américaines, qui ont poussé le Japon à dépenser 7 milliards de dollars de plus en 2021 pour ses armées, la plus forte hausse depuis 1972.

      Selon le rapport du #Sipri, dès 2021, donc avant la guerre en Ukraine, huit pays européens membres de l’#Otan avaient porté leurs dépenses militaires à 2 % de leur PIB, ce que réclament depuis longtemps les États-Unis à leurs alliés. Avec 56,6 milliards de dollars (51 milliards d’euros) dépensés en 2021, la France est passée de la huitième à la ­sixième place des États pour leurs dépenses en armement. La loi de programmation militaire 2019-2025 avait déjà prévu un budget de 295 milliards d’euros sur six ans, pour arriver à plus de 2,5 % du PIB en 2025.

      La guerre en Ukraine a donc éclaté dans ce contexte d’augmentation générale des dépenses d’armement, qu’elle ne peut qu’accélérer et renforcer.

      Les leçons de la guerre en Ukraine

      Pour les états-majors et les experts, la #guerre_en_Ukraine n’est pas une tragédie mais d’abord un formidable terrain d’expérimentation des matériels de guerre et des conditions de leur mise en œuvre. Chaque épisode – offensive contrariée des armées russes au début de la #guerre, retrait du nord de l’#Ukraine puis offensive dans le #Donbass, destruction méthodique des villes – et les diverses façons d’utiliser l’artillerie, les drones, l’aviation, les moyens de communication et de renseignement sont étudiés pour en tirer le maximum de leçons. Depuis six mois, des milliers d’experts et d’ingénieurs chez #Thales, #Dassault, #Nexter, MBDA (ex-Matra), #Naval_Group ou chez leurs concurrents américains #Lockheed_Martin, #Boeing ou #Northrop_Grumman, étudient en détail comment cette guerre met en lumière «  la #numérisation du champ de bataille, les besoins de munitions guidées, le rôle crucial du secteur spatial, le recours accru aux drones, robotisation, cybersécurité, etc.  » (Les Échos du 13 juin 2022). Ces experts ont confronté leurs points de vue et leurs solutions technologiques à l’occasion de l’immense salon de l’#armement et de la sécurité qui a réuni, début juin à Satory en région parisienne, 1 500 #marchands_d’armes venus du monde entier. Un record historique, paraît-il  !

      Les leçons de la guerre en Ukraine ne sont pas seulement technologiques. Comme l’écrivait le journal Les Échos du 1er avril 2022, «  la guerre entre grands États est de retour en Europe. » Cette guerre n’a plus rien à voir avec «  les “petites guerres” comme celles de Bosnie ou du Kosovo, ni les opérations extérieures contre des groupes terroristes (Al Qaida, Daech) ou des États effondrés (Libye, 2011)  ». Pour les militaires, cette guerre n’est plus «  une guerre échantillonnaire mais une guerre de masse  », tant du point de vue du nombre de soldats tués ou blessés au combat que du nombre de munitions tirées et du matériel détruit.

      Entre février et juin, selon les estimations réalisées malgré la censure et les mensonges de chaque camp, cette guerre aurait fait 30 000 morts russes et ukrainiens, plusieurs centaines par jour. L’Ukraine rappelle que la guerre est une boucherie, que les combats exigent sans cesse leur chair à canon, avec des soldats qui pourrissent et meurent dans des tranchées, brûlent dans des chars ou sont tués ou estropiés par des obus et des missiles. Leur guerre «  de haute intensité  », c’est avant tout des morts, parmi les militaires comme les civils. Préparer les esprits à accepter de «  mourir pour nos valeurs démocratiques  », autre déclinaison du «  mourir pour la patrie  », est l’un des objectifs de la #propagande des gouvernements occidentaux qui mettent en scène la guerre en Ukraine.

      Côté matériel, les armées russes ont perdu plusieurs centaines de chars. Les États-Unis et leurs alliés ont livré plusieurs dizaines de milliers de missiles sol-sol ou sol-air de type Javelin ou Stinger, à 75 000 dollars pièce. Une semaine après le début de l’invasion russe, le colonel en retraite Michel Goya, auteur d’ouvrages sur les guerres contemporaines, écrivait  : «  L’#armée_de_terre française n’aurait plus aucun équipement majeur au bout de quarante jours  » (véhicules de combat, pièces d’artillerie…). La conclusion de tous ces gens-là est évidente, unanime  : il faut «  des forces plus nombreuses, plus lourdement équipées [qui] exigeront des budgets de défense accrus  » (Les Échos, 1er avril 2022). Augmenter les budgets militaires, drainer toujours plus d’argent public vers l’industrie militaire ou sécuritaire, c’est à quoi s’emploient les ministres et les parlementaires, de tous les partis, depuis des années.

      Des complexes militaro-industriels concurrents

      La guerre en Ukraine, avec l’augmentation spectaculaire des #budgets_militaires qu’elle accélère, est une aubaine pour les marchands d’armes. Mais elle intensifie en même temps la guerre que se livrent ces industriels. L’annonce par le chancelier allemand, fin février, d’un emprunt de 100 milliards d’euros pour remettre à niveau la #Bundeswehr, autrement dit pour réarmer l’Allemagne, a déclenché des polémiques dans l’#Union_européenne. Le journal Les Échos du 30 mai constatait avec dépit  : «  L’#armée_allemande a annoncé une liste de courses longue comme le bras, qui bénéficiera essentiellement aux industries américaines  : achat de #F-35 à Lockheed Martin, d’hélicoptères #Chinook à Boeing, d’avions P8 à Boeing, de boucliers antimissiles à Israël, etc.  » Au grand dam des militaristes tricolores ou europhiles, le complexe militaro-industriel américain profitera bien davantage des commandes allemandes que les divers marchands de mort européens.

      Il en est ainsi depuis la naissance de l’Union européenne  : il n’y a pas une «  #défense_européenne  » commune car il n’y a pas un #impérialisme européen unique, avec un appareil d’État unique défendant les intérêts fondamentaux d’une #grande_bourgeoisie européenne. Il y a des impérialismes européens concurrents, représentant des capitalistes nationaux, aux intérêts économiques complexes, parfois communs, souvent opposés. L’#impérialisme_britannique est plus atlantiste que les autres puissances européennes et très tourné vers son vaste ex-­empire colonial. L’#impérialisme_français a développé ses armées et sa marine pour assurer sa mainmise sur son pré carré ex-colonial, en particulier en Afrique. L’impérialisme allemand, qui s’est retranché pendant des décennies derrière la contrition à l’égard des années hitlériennes pour limiter ses dépenses militaires, en se plaçant sous l’égide de l’Otan et des #États-Unis, a pu consacrer les sommes économisées à son développement économique en Europe centrale et orientale. Les interventions militaires ou diplomatiques n’étant que la continuation des tractations et des rivalités commerciales et économiques, il n’a jamais pu y avoir de défense européenne commune.

      Les rivalités permanentes entre Dassault, Airbus, #BAE, #Safran ont empêché la construction d’un avion de combat européen. La prépondérance des États-Unis dans l’Otan et leur rôle majeur en Europe de l’Est et dans la guerre en Ukraine renforcent encore les chances du #secteur_militaro-industriel américain d’emporter les futurs marchés. Ces industriels américains vendent 54 % du matériel militaire dans le monde et réalisent 29 % des exportations. L’aubaine constituée par les futures dépenses va aiguiser les appétits et les rivalités.

      Bien sûr, les diverses instances européennes s’agitent pour essayer de ne pas céder tout le terrain aux Américains. Ainsi, le commissaire européen au Commerce et ex-ministre français de l’Économie, Thierry Breton, vient de débloquer 6 milliards d’euros pour accélérer le lancement de 250 satellites de communication de basse orbite, indispensables pour disposer d’un réseau de communication et de renseignement européen. Jusqu’à présent, les diverses armées européennes sont dépendantes des États-Unis pour leurs renseignements militaires, y compris sur le sol européen.

      À ce jour, chaque pays européen envoie en Ukraine ses propres armes, plus ou moins compatibles entre elles, selon son propre calendrier et sa volonté politique. Les champs de bataille du Donbass servent de terrain de démonstration pour les canons automoteurs français Caesar, dont les journaux télévisés vantent régulièrement les mérites, et les #chars allemands Gepard, anciens, ou Leopard, plus récents. La seule intervention commune de l’Union européenne a été le déblocage d’une enveloppe de financement des livraisons d’armes à l’Ukraine, d’un montant de 5,6 milliards sur six ans, dans laquelle chaque État membre peut puiser. C’est une façon de faciliter l’envoi d’armes en Ukraine aux pays de l’UE les moins riches. Avec l’hypocrisie commune aux fauteurs de guerre, les dirigeants de l’UE ont appelé cette enveloppe «  la facilité européenne pour la paix  »  !

      Vers une économie de guerre  ?

      Pour passer d’une «  guerre échantillonnaire  » à une «  guerre de masse  », la production d’armes doit changer d’échelle. Pour ne parler que d’eux, les fameux canons Caesar de 155 millimètres sont produits en nombre réduit, une grosse dizaine par an, dans les usines #Nexter de Bourges, pour la somme de 5 millions d’euros l’unité. Pour en livrer une douzaine à l’Ukraine, le gouvernement a dû les prélever sur la dotation de l’armée française, qui n’en a plus que 64 en service. Juste avant le début de la guerre en Ukraine, Hervé Grandjean, le porte-parole des armées, rappelait les objectifs de l’armée française pour 2025  : «  200 chars Leclerc, dont 80 rénovés, 135 #blindés_Jaguar, 3 300 #blindés_légers, 147 hélicoptères de reconnaissance et d’attaque dont 67 Tigre, 115 #hélicoptères de manœuvre, 109 #canons de 155 et 20 drones tactiques notamment  ». En comparaison, et même si les chars des différentes armées n’ont ni les mêmes caractéristiques ni la même valeur, en trois mois de guerre en Ukraine, plus de 600 chars russes ont été détruits ou mis hors service.

      La guerre en Ukraine devrait donc permettre aux militaires d’obtenir davantage de coûteux joujoux. Ils ont reçu le soutien inconditionnel du président de la Cour des comptes, l’ex-socialiste Pierre Moscovici, pour qui «  l’aptitude des armées à conduire dans la durée un combat de haute intensité n’est pas encore restaurée  ». Et dans son discours du 14 juillet, Macron a confirmé une rallonge de 3 milliards d’euros par an pour le budget de l’armée. Mais pour rééquiper en masse les armées européennes, il faut que les capacités de production suivent. Le 13 juin, Le Monde titrait  : «  Le ministère de la Défense réfléchit à réquisitionner du matériel du secteur civil pour refaire ses stocks d’armes  », et précisait  : «  L’État pourrait demander à une PME de mécanique de précision qui ne travaille pas pour le secteur de la défense de se mettre à disposition d’un industriel de l’armement pour accélérer ses cadences.  » Et comme toujours, l’État s’apprête à prendre en charge lui-même «  les capacités de production de certaines PME de la défense, en payant par exemple des machines-outils  ». Les capitalistes n’étant jamais si bien servis que par eux-mêmes, le chef de l’UIMM, le syndicat des patrons de la métallurgie, est désormais #Éric_Trappier, le PDG de Dassault.

      Produire plus massivement du matériel militaire coûtera des dizaines, et même des centaines, de milliards d’euros par an. Il ne suffira pas de réduire encore plus les budgets de la santé ou de l’école. Les sommes engagées seront d’un tout autre niveau. Pour y faire face, les États devront s’endetter à une échelle supérieure. Les gouvernements européens n’ont peut-être pas encore explicitement décidé un tel tournant vers la production en masse de ce matériel militaire, mais les plus lucides de leurs intellectuels s’y préparent. L’économiste et banquier Patrick Artus envisageait dans Les Échos du 8 avril le passage à une telle «  #économie_de_guerre  ». Pour lui, cela aurait trois conséquences  : une hausse des #dépenses_publiques financées par le déficit du budget de l’État avec le soutien des #banques_centrales  ; une forte inflation à cause de la forte demande en énergie et en métaux parce que les #dépenses_militaires et d’infrastructures augmentent  ; enfin la rupture des interdépendances entre les économies des différents pays à cause des ruptures dans les voies d’approvisionnement.

      Avant même que les économies européennes ne soient devenues «  des économies de guerre  », les dépenses publiques au service des capitalistes ne cessent d’augmenter, l’inflation revient en force, aggravée par la spéculation sur les pénuries ou les difficultés d’approvisionnement de telle ou telle matière première. L’#économie_capitaliste est dans une impasse. Elle est incapable de surmonter les contradictions qui la tenaillent, et se heurte une fois de plus aux limites du marché solvable et à la concurrence entre capitalistes, qui engendrent les rivalités entre les puissances impérialistes  ; à la destruction des ressources  ; et à son incapacité génétique d’en planifier l’utilisation rationnelle au service de l’humanité. La course au militarisme est inexorable, car elle est la seule réponse à cette impasse qui soit envisageable par la grande bourgeoisie. Cela ne dépend absolument pas de la couleur politique de ceux qui dirigent les gouvernements. Le militarisme est inscrit dans les gènes du capitalisme.

      Le #militarisme, une fuite en avant inexorable

      Il y a plus d’un siècle, #Rosa_Luxemburg notait que le militarisme avait accompagné toutes les phases d’accumulation du #capitalisme  : «  Il est pour le capital un moyen privilégié de réaliser la plus-value.  » Dans toutes les périodes de crise, quand la rivalité entre groupes de capitalistes pour s’approprier marchés et matières premières se tend, quand le marché solvable se rétrécit, le militarisme a toujours représenté un «  champ d’accumulation  » idéal pour les capitalistes. C’est un marché régulier, quasi illimité et protégé  : «  L’#industrie_des_armements est douée d’une capacité d’expansion illimitée, […] d’une régularité presque automatique, d’une croissance rythmique  » (L’accumulation du capital, 1913). Pour la société dans son ensemble, le militarisme est un immense gâchis de force de travail et de ressources, et une fuite en avant vers la guerre généralisée.

      Pour les travailleurs, le militarisme est d’abord un vol à grande échelle des fruits de leur travail. La production en masse de matériel de destruction massive, ce sont des impôts de plus en plus écrasants pour les classes populaires qui vont réduire leur pouvoir d’achat, ce sont des hôpitaux fermés, des écoles surchargées, des enseignants en sous-effectif, des transports dégradés, c’est un budget de l’État écrasé par la charge de la dette. Pour la #jeunesse, le militarisme, c’est le retour au service militaire, volontaire ou forcé, c’est l’embrigadement derrière le nationalisme, l’utilisation de la guerre en Ukraine pour redonner «  le sens du tragique et de l’histoire  », selon la formule du chef d’état-major des armées, Thierry Burkhard.

      L’évolution ultime du militarisme, c’est la #guerre_généralisée avec la #mobilisation_générale de millions de combattants, la militarisation de la production, la #destruction méthodique de pays entiers, de villes, d’infrastructures, de forces productives immenses, de vies humaines innombrables. La guerre en Ukraine, après celles en Irak, en Syrie, au Yémen et ailleurs, donne un petit aperçu de cette barbarie. La seule voie pour éviter une barbarie plus grande encore, qui frapperait l’ensemble des pays de la planète, c’est d’arracher aux capitalistes la direction de la société.

      Un an avant l’éclatement de la Première Guerre mondiale, #Rosa_Luxemburg concluait son chapitre sur le militarisme par la phrase  : «  À un certain degré de développement, la contradiction [du capitalisme] ne peut être résolue que par l’application des principes du socialisme, c’est-à-dire par une forme économique qui est par définition une forme mondiale, un système harmonieux en lui-même, fondé non sur l’accumulation mais sur la satisfaction des besoins de l’humanité travailleuse et donc sur l’épanouissement de toutes les forces productives de la terre.  » Ni Rosa Luxemburg, ni #Lénine, ni aucun des dirigeants de la Deuxième Internationale restés marxistes, c’est-à-dire communistes, révolutionnaires et internationalistes, n’ont pu empêcher l’éclatement de la guerre mondiale et la transformation de l’Europe en un gigantesque champ de bataille sanglant. Mais cette guerre a engendré la plus grande vague révolutionnaire de l’histoire au cours de laquelle les soldats, ouvriers et paysans insurgés ont mis un terme à la guerre et menacé sérieusement la domination du capital sur la société. L’issue est de ce côté-là.

    • France. Militaires et industriels doutent d’être suffisamment gavés

      Les « promesses déjà annoncées : une hausse de 5 milliards d’euros pour combler le retard dans les drones, un bond de 60 % des budgets des trois agences de renseignement, une relance des commandes dans la défense sol-air , la reconstitution des stocks de munitions. Il a aussi promis plus de navires et de satellites pour l’Outre-Mer, des avancées dans la cyberdéfense, le spatial, la surveillance des fonds marins, le doublement du budget des forces spéciales, et enfin une progression de 40 % des budgets pour la maintenance des équipements, afin d’en accroître les taux de disponibilité.

      Ajouter à cette liste un doublement de la réserve, une participation potentiellement accrue au service national universel, la promesse de dégager 10 milliards pour l’innovation... « Toutes les lignes budgétaires vont augmenter, sauf la provision pour les opérations extérieures », a déclaré le ministre. Selon lui, les dépenses pour aider l’armée ukrainienne ne seront pas imputées sur le budget des armées. Ce dont beaucoup de militaires doutent. Un partage des frais entre ministères est plus probable.

      (Les Échos)

    • Pour eux, la guerre n’est pas une tragédie, mais une aubaine.

      Entre 2018 et 2022, la France a vu sa part dans les ventes mondiales d’armes passer de 7 à 11 %.

      Actuellement 3e sur le marché de l’armement, elle se rapproche de la 2e place. Un record qui contribue à la surenchère guerrière, en Ukraine et ailleurs, et qui alimente les profits des marchands d’armes.

    • La nouvelle #loi_de_programmation_militaire a été présentée en Conseil des ministres ce mardi 4 avril. Un budget de la défense en hausse de 40 % par rapport à la #LPM 2019-2025. Un montant historique

      D’autant que la LPM 2024-2030 n’inclura pas le montant de l’aide militaire à l’#Ukraine

      La politique de l’actuel président de la République contraste avec celle de ses prédécesseurs. Comme beaucoup de ses voisins, la France a vu ses dépenses de défense diminuer depuis la fin de la #guerre_froide

      Réarmement spectaculaire de la #Pologne par le biais de la Corée du Sud

      « Ce pays est en première ligne et sera potentiellement une grande puissance militaire en 2030 », a affirmé Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique lors de son audition au Sénat. Le 30 janvier dernier, le Premier ministre polonais a ainsi annoncé que le budget de la défense atteindrait 4 % du PIB en 2023.

      #militarisation #budget_de_la_défense

    • On ne prépare une guerre qu’à la condition de pouvoir la gagner. Et en l’état, les occidentaux commencent tout juste à comprendre que ce qu’ils pensaient assuré (première frappe nucléaire et bouclier ABM) de la part des américains, n’est finalement pas du tout si assuré que cela et que même, ma foi, la guerre est peut-être déjà perdue.

    • En l’état, ce n’est pas la guerre. Mais, oui, ils s’y préparent.

      Et cette nouvelle guerre mondiale ne sera pas déclenchée nécessairement quand ils seront certains de « pouvoir la gagner ».

    • L’Union européenne et ses obus : un petit pas de plus vers une économie de guerre
      https://journal.lutte-ouvriere.org/2023/05/10/lunion-europeenne-et-ses-obus-un-petit-pas-de-plus-vers-une-

      Mercredi 3 mai, le commissaire européen Thierry Breton a présenté son plan pour produire un million de munitions lourdes par an. Les industries d’armement européennes ne sont plus adaptées au rythme de production nécessaire pour des guerres de « haute intensité », ou même simplement telle que celle en Ukraine.

      Alors que l’armée ukrainienne tire 5 000 obus d’artillerie par jour de combat, la production annuelle du fabricant français Nexter ne permettrait de tenir ce rythme... que huit jours. Thierry Breton a annoncé une enveloppe de 500 millions d’euros pour stimuler dans ce sens les industriels de l’Union européenne. Elle fait partie d’un plan de deux milliards d’euros annoncé fin mars pour fournir des obus à l’armée de Kiev, sous prétexte « d’aider » l’Ukraine. Il s’agit d’abord de puiser dans les stocks nationaux, puis de passer des commandes, et enfin de remplir les caisses des industriels pour qu’ils produisent plus vite.

      Les sommes déployées par l’UE sont très marginales par rapport aux dépenses faites par chaque puissance impérialiste pour financer son propre armement et enrichir ses capitalistes de l’armement. Ainsi, la programmation militaire française a augmenté de 100 milliards d’euros, tandis que le gouvernement allemand promet, lui, 100 milliards pour moderniser son armée.

      L’annonce européenne vise sans doute surtout à afficher à l’échelle du continent, donc aux yeux d’un demi-milliard d’Européens, que l’on va vers une économie de guerre et qu’il faut s’y adapter dès maintenant. Dans ce qu’a déclaré Thierry Breton, il y a aussi l’idée de s’attaquer à tous les goulots d’étranglement qui bloquent cette marche vers une économie de guerre. Il prévoit des dérogations aux règles européennes, déjà peu contraignantes, sur le temps de travail, c’est-à-dire de donner carte blanche aux patrons pour allonger la journée de travail dans les usines concernées. Le flot d’argent public dépensé en armement, que ce soit au niveau des États ou de l’Union européenne, sera pris sur la population d’une façon ou une autre. Chaque milliard en plus pour les obus signifiera un hôpital en moins demain.

  • En #Tunisie, la mort d’une #fillette retrouvée échouée sur une #plage suscite l’#indifférence générale

    Le corps d’une enfant a été retrouvé sur une île de l’archipel des #Kerkennah, au large de #Sfax, en décembre dernier, dans la même position que le petit #Aylan_Kurdi en 2015. Mais contrairement à lui, sa #photo n’a pas fait le tour du monde ni engendré la moindre #réaction politique. Un #silence qui en dit long sur la #banalisation des #naufrages en mer.

    Son corps sans vie a été retrouvé échoué sur une plage, le 24 décembre dernier, vêtu d’un blouson rose bonbon et d’un collant. Âgée d’environ 3 ans, la fillette reposait sur le ventre, face contre terre. Les #îles_de_Kerkennah, au large de Sfax, en Tunisie, ont été les tristes témoins de l’ignominie qui se déroule en #Méditerranée chaque jour : les naufrages qui s’enchaînent à la pelle ; ceux que l’on connaît, parce qu’ils laissent des traces derrière eux, et ceux dont on n’a pas connaissance, qualifiés d’« invisibles », pour lesquels aucune embarcation ni dépouille n’est jamais retrouvée.

    Mais cette fois, il y a une photo. L’enfant a été découvert sur la plage de #Sidi_Founkhal au petit matin, par un habitant de Sfax, originaire des Kerkennah, qui a décidé d’immortaliser l’horreur produite par nos politiques migratoires.

    Retrouvé par Mediapart, Boulbeba Bougacha, âgé de 20 ans, raconte avoir voulu « changer d’air » en allant déjeuner avec ses proches sur la plage, aux alentours de 13 heures, le 24 décembre. « On l’a trouvée là, allongée sur le ventre. On a appelé les autorités, qui sont venues la récupérer. Ça a été un choc. On sait que beaucoup de gens meurent en mer, mais on n’est jamais préparé à voir une chose pareille. »

    Sur la même plage ce jour-là, la mer a expulsé de ses entrailles au moins trois autres corps adultes, tous subsahariens. Boulbeba s’est exprimé sur les ondes de la radio locale Diwan FM, le 26 décembre 2022. Mais, fait surprenant, ni l’information ni la photo n’ont été relayées en Tunisie ou ailleurs, hormis dans quelques rares publications sur les réseaux sociaux. On se souvient de la photo du petit Aylan Kurdi, un enfant kurde retrouvé lui aussi échoué sur une plage de Turquie en 2015, quasiment dans la même position, qui avait suscité l’émoi et l’indignation partout à travers le monde.

    Dans l’archipel de Kerkennah, où règnent les familles de pêcheurs, tout le monde ou presque a entendu parler de la fillette. Mais le choc des premières découvertes de naufragé·es en mer a laissé place, depuis plusieurs années, à une forme de #résilience. « On voit des #cadavres presque tous les jours », lâche Nasser*, qui vit de la pêche.

    Lorsque nous le rencontrons à Remla, capitale des îles Kerkennah, l’homme semble soulagé d’être enfin entendu. Au printemps dernier, il dit avoir trouvé un bébé, âgé d’à peine 2 ans. « La dernière fois, j’ai vu quatre ou cinq morts d’un coup. Quand on appelle la garde nationale, ils nous demandent si ce sont des Blancs ou des Noirs. Si ce sont des Noirs, ils ne se déplacent pas. »

    Des pêcheurs traumatisés

    Depuis les années 2000, l’archipel aux 15 000 âmes s’est transformé en lieu de départ pour les personnes souhaitant émigrer vers l’Europe, du fait de sa proximité avec l’île italienne de Lampedusa. Il attire ainsi les Tunisiens, mais aussi, depuis une dizaine d’années les Subsahariens, de plus en plus nombreux à passer par la Tunisie (et le Maghreb de manière générale) pour tenter de travailler et/ou de prendre la mer.

    « De par sa localisation, Sfax a attiré beaucoup de Subsahariens, d’abord parce que c’est la deuxième plus grande ville de Tunisie et qu’il y a un fort besoin de main-d’œuvre, ensuite parce qu’elle est proche de Kerkennah, où des réseaux de passage existaient déjà », analyse Hassan Boubakri, chercheur à l’université de Sousse et de Sfax.

    Jeudi 9 février, des militaires armés contrôlent la montée à bord du Loud, nom du ferry reliant Sfax à Kerkennah en une heure. Plusieurs hommes voyageant seuls sont mis à l’écart, contrôlés puis interrogés.

    « Les autorités surveillent beaucoup l’île désormais, poursuit le spécialiste des migrations. Les Noirs ne peuvent plus rallier Kerkennah et les Tunisiens doivent présenter un justificatif démontrant qu’ils vont travailler ou rendre visite à des proches pour s’y rendre. » Les pêcheurs qui acceptent de s’exprimer confirment tous l’information. Mais ils précisent que des départs par la mer continuent de s’organiser depuis l’archipel, sans doute par l’intermédiaire des Tunisiens y ayant leur « réseau ».

    Les départs se font aussi depuis Sfax, rendant la traversée plus longue et dangereuse pour les exilé·es. « Une journée comme ça, avec un vent du Nord plutôt fort, va nous ramener plusieurs cadavres sur l’île », assure Nasser, qui se dit traumatisé par la vue de visages défigurés ou de corps à moitié dévorés par les poissons et les oiseaux migrateurs, très présents sur l’île. « La dernière fois, j’étais tellement marqué par ce que j’avais vu que sur le trajet retour vers ma maison, j’ai dû m’arrêter sur le bas-côté pour reprendre mes esprits », poursuit-il, le regard vide et abîmé.

    Il y a aussi les squelettes, que les pêcheurs disent observer surtout sur l’île de #Roumedia, située au nord-est de l’archipel. « Il y a un corps qui est là-bas depuis l’Aïd-el-Séghir [la fête marquant la fin du ramadan – ndlr], donc depuis avril dernier. On l’a signalé mais personne n’est venu le récupérer », regrette l’un des amis de Nasser, également pêcheur.

    Un autre explique avoir culpabilisé après avoir laissé un corps dans l’eau lorsqu’il était au large : « Si je l’avais signalé à la garde nationale, elle m’aurait demandé ensuite de l’accompagner jusqu’au #cadavre. C’était trop loin et il y avait de grandes chances que je n’arrive pas à le retrouver », se justifie-t-il.

    Ce dernier se souvient également avoir trouvé, il y a quelques mois, une femme enceinte sur le bord d’une plage. « C’est très dur pour nous. On sort en mer et on ne sait pas sur quoi on va tomber », ajoute-t-il, expliquant avoir constaté une hausse des naufrages en 2022. Tous affirment que « l’#odeur » est insupportable.

    Une question, qu’ils prononcent du bout des lèvres, les taraude : les poissons qu’ils pêchent et qu’ils donnent à manger à leur famille se sont-ils nourris de ces cadavres dont personne ne se préoccupe, parce que « migrants » ?

    À #Mellita, dans le sud des Kerkennah, d’autres remontent régulièrement des corps dans les mailles de leur filet. Certains, comme Ali*, en trouvent coincés dans leur charfia traditionnel, un barrage visant à bloquer le poisson et à le rediriger vers un piège.

    Dans sa maisonnette, l’homme raconte comment il a ainsi trouvé le corps d’un homme d’une quarantaine d’années coincé sous l’eau. « J’ai appelé la garde nationale à 11 heures. J’ai attendu jusqu’à 15 heures mais personne n’est venu le récupérer. Le lendemain, j’ai retrouvé le corps au même endroit. » La garde nationale aurait invoqué un « manque de moyens ».

    Si dix-huit mille personnes ont réussi à traverser la Méditerranée depuis les côtes tunisiennes en 2022 pour rejoindre l’Italie, « au moins neuf mille migrants ont dû mourir en mer », présume un habitant des Kerkennah, qui préfère garder l’anonymat.

    Pour Hassan Boubakri, également président du Centre de Tunis pour la migration et l’asile (Cetuma), plusieurs signes viennent démontrer que l’on assiste à une #banalisation de la mort en Méditerranée, dans un contexte de multiplication des naufrages. « Il y a les #médias qui font régulièrement le décompte des morts, les pêcheurs qui ne sont plus surpris de sortir des corps de leur filet, les riverains de la mer qui souffrent d’assister à tout cela… »

    Et d’ajouter que cette banalisation se traduit aussi à travers les procédures de plus en plus standardisées pour la prise en charge des naufrages et des corps retrouvés. « Tous les acteurs impliqués, comme la garde nationale, l’appareil judiciaire, la médecine légale ou le Croissant-Rouge, sont devenus, même inconsciemment, parties prenantes de cette banalisation. Tout le monde s’accorde à dire que la Méditerranée est devenue un cimetière, alors que cela devrait susciter de la compassion. Mais on est passés de la #compassion à l’#indifférence, avec très peu de perspectives sur les solutions pouvant protéger les personnes menacées », décrypte-t-il.

    La difficile #identification des non-Tunisiens

    Face à ces drames, plusieurs acteurs s’activent, dans l’ombre, pour tenter de documenter les naufrages et permettre l’identification des victimes, comme la plateforme AlarmPhone. Pour le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui aide au rétablissement des liens familiaux et travaille en coopération avec le Croissant-Rouge tunisien, la recherche et l’identification des personnes disparues en mer sont indispensables.

    Si les autorités tunisiennes restent responsables pour le processus d’identification des personnes ayant perdu leur vie en mer, le CICR intervient en appui, sur la base d’une « demande de recherche », ouverte le plus souvent par un proche de disparu. Il vérifie alors les informations permettant de faire le lien avec la personne présumée disparue. Quelle est son identité ? Quels vêtements ou quels effets personnels avait-elle ? Quel signe distinctif peut permettre de l’identifier ?

    La démarche est plus simple s’agissant des ressortissants tunisiens, pour lesquels les autorités peuvent consulter le fichier des empreintes digitales et dont les familles, basées en Tunisie, se mobilisent pour les retrouver. Elle est moins évidente s’agissant des exilés non tunisiens, dont les proches restent dans le pays d’origine et n’ont pas toujours d’informations sur le projet ou le parcours migratoire de la personne disparue.

    Dans ce cas, le CICR s’autorise à prendre en compte les informations venues d’ami·es ou de connaissances ayant croisé la route d’une personne portée disparue. Mais parfois, le signalement ne vient jamais. « Certains ont peur de signaler une disparition aux ONG parce qu’ils ne font pas la différence avec les autorités. Ils ne veulent pas avoir des ennuis », commente Yaha, une Ivoirienne et entrepreneure installée à Sfax depuis six ans, qui consacre tout son temps libre à accompagner les proches de disparu·es en mer dans leurs recherches, notamment avec le Croissant-Rouge.

    À Sfax, où nous la retrouvons, Yaha rejoint deux jeunes Ivoiriens, inquiets pour un groupe de sept personnes qui ne donnent plus signe de vie. « Il y a cinq adultes et deux enfants, âgés de 2 ans et de 8 mois. Ils ont disparu depuis deux semaines. On sait qu’ils sont morts en mer. Maintenant, on veut savoir si leurs corps ont été retrouvés », souffle le premier, occupé à chercher leurs photos sur son téléphone. La fillette des Kerkennah ? Ils n’en savent rien. Le second commente : « Les gens ne préviennent pas quand ils partent. Il faut attendre qu’ils disparaissent pour qu’on le sache. »

    Tous deux iront, deux jours plus tard, dans les locaux de la garde nationale de Sfax, où ils pourront accéder au registre et aux photos des naufragé·es. Ils seront accompagnés d’un membre du Croissant-Rouge, dont la présence est censée rassurer vis-à-vis des autorités et aider sur le plan émotionnel, dans un moment particulièrement difficile.

    Identifier les personnes disparues n’est pas chose facile : durant le week-end des 28 et 29 janvier, soit la période correspondant à leur disparition, les acteurs associatifs comptent onze à douze tentatives de traversée, dont au moins trois naufrages.

    Une #morgue dépassée

    Pour l’heure, aucune demande de recherche n’a été enregistrée par le #CICR concernant la fillette des Kerkennah, que ce soit en Tunisie ou en Italie. Plusieurs acteurs locaux redoutent que ses parents soient décédés lors du naufrage. « On pense qu’il n’y a pas eu de survivants pour cette embarcation. Elle a été retrouvée à un moment où il y a eu beaucoup de naufrages. On sait juste qu’elle a la peau noire, comme les adultes retrouvés sur place le même jour », indique un membre du tissu associatif. Selon nos informations, son corps est resté un temps à la morgue de l’hôpital de Sfax, avant d’être inhumé.

    « Quand il y a un naufrage, c’est la #garde_nationale qui doit porter secours. S’il y a des personnes décédées, elle les ramène sur terre, où l’unité technique et scientifique prend des photos et des traces d’ADN. [Les corps] sont ensuite emmenés à la morgue, jusqu’à ce qu’ils soient réclamés ou qu’il y ait un ordre d’#enterrement provenant de la municipalité, pour ceux qui n’ont pas été identifiés », détaille la militante des droits humains. Problème, l’unité médico-légale de l’hôpital de Sfax, qui a une capacité de quarante places, est débordée.

    Sollicitées, leurs équipes n’ont pas souhaité s’exprimer. Mais dans un document que nous avons pu nous procurer, l’unité médico-légale fait état d’une « nette augmentation » des naufrages en mer ces dernières années, les exilé·es représentant désormais 50 % de l’activité des effectifs.

    On y apprend également que les personnes de peau noire représentent la majorité des #victimes et que les enfants, de même que les nourrissons, représentent 5 % des naufragés au large de Sfax sur le premier semestre en 2022. La plupart d’entre eux n’avaient aucun document d’identité.

    L’unité souffre de conditions de travail « difficiles », dues à un manque criant de moyens. À plusieurs reprises, des cadavres ont dû, par manque de place, être entreposés sur un brancard dans les couloirs de l’établissement. « Les migrations dépassent tout le monde, admet Wajdi Mohamed Aydi, adjoint au maire de Sfax chargé des migrations, qui évoque un manque de gouvernance à l’échelle nationale. Il y a des tentatives de traversée et des #accidents chaque semaine, voire chaque jour. On s’occupe de l’#enterrement des personnes non identifiées, en essayant de respecter au mieux leur dignité. » Lorsqu’il n’y a pas de nom, un numéro est inscrit sur la #pierre_tombale.

    Les Subsahariens confrontés à la #précarité et au #racisme

    L’élu pointe aussi un phénomène récent, celui de l’apparition d’embarcations en métal utilisées par les migrants pour la traversée (selon plusieurs sources, certains les fabriqueraient eux-mêmes, sous la houlette des réseaux de passage tunisiens).

    Une information que confirme la militante des droits humains déjà citée : « Ces nouvelles #embarcations en métal sont une catastrophe. Ils cherchent à en fabriquer un maximum de l’heure et ne les soudent pas bien. Les gens ont peu de chances de s’en sortir s’il y a un naufrage car les bateaux coulent plus vite et ils restent coincés à l’intérieur. »

    À six kilomètres au sud de Sfax, dans le quartier défavorisé de #Ben_Saïda, où vit une communauté importante de Subsahariens, Junior s’engouffre dans la maison inachevée qu’il occupe, dont les murs en briques sont restés nus. C’est ici que le jeune Guinéen (Guinée-Conakry), âgé de 16 ans, vit avec au moins soixante-dix autres jeunes, originaires de ce même pays, du Cameroun, de Côte d’Ivoire, du Sénégal ou du Mali. Tous ont déjà tenté au moins une fois la traversée et attendent de pouvoir de nouveau tenter leur « chance ».

    Dans l’intérieur sombre de l’habitation, où des matelas et couvertures sont disposés à même le sol, des dizaines de gamins se bousculent, curieux de nous voir pénétrer leur univers. Une majorité de jeunes hommes, encore dans l’adolescence, dont le visage et les corps sont déjà usés par l’exil. « On a été interceptés par la garde nationale il y a deux semaines. Ils nous ont mis en difficulté exprès. Mon frère Mohamed est tombé à l’eau et s’est noyé », résume Junior, encore en état de choc. Il montre une vidéo de la garde nationale fonçant sur une embarcation refusant de s’arrêter en mer. Il montre aussi ses pieds blessés lors de l’interception et restés sans soins depuis.

    Les quelques femmes vivant là, seules ou avec leur enfant, disent être inquiètes pour un couple et son bébé, disparus depuis trois semaines. « On sait qu’ils voulaient traverser. On n’a plus de nouvelles, on pense qu’ils sont morts en mer. » Sur son smartphone, la bouille de l’enfant, dans les bras de sa mère souriante, apparaît.

    Malgré leur disparition en mer, elles veulent partir, elles aussi. « Mais j’ai très peur de l’eau, je ne sais pas nager », hésite l’une d’elles. Elle a quitté son pays pour fuir les violences conjugales. Elle expérimente désormais la violence des frontières.

    Junior n’a pas trouvé la force de contacter le Croissant-Rouge. « J’imagine que mon frère a été enterré. Je n’ai pas cherché à savoir car c’est trop lourd pour moi, ça me fait mal au cœur rien que d’y penser. » Les ados semblent avoir intégré le #risque de mourir en mer. Ils n’ont « pas d’autre choix », assurent-ils. « On ne peut pas rester dans notre pays et on ne peut pas rester ici. »

    Ils dénoncent le « racisme » auquel ils sont confrontés en Tunisie. « Des policiers ont volé mon portable l’autre jour. Au commissariat, ils n’ont pas voulu prendre ma plainte. Dans les épiceries, ils ne veulent pas nous vendre de riz parce qu’il y a une pénurie et qu’on n’est pas prioritaires. »

    Le membre du tissu associatif déjà cité explique : « Leurs #conditions_de_vie se sont durcies. Depuis quelque temps, un blocage a été mis en place à la Poste pour qu’ils ne puissent ni envoyer ni retirer de l’argent. » Il ajoute avoir observé, au cours des derniers mois, de nombreuses « #arrestations_arbitraires » de personnes en situation irrégulière.

    « C’est aussi ça qui pousse les gens à prendre la mer, affirme Yaha. S’ils restent ici sans papiers, c’est comme une prison à ciel ouvert. S’ils veulent rentrer chez eux, ils doivent payer une pénalité [d’un montant maximal de 3 000 dinars tunisiens, soit environ mille euros – ndlr]. Avec cet argent, certains préfèrent partir en Europe, où ils pourront offrir un avenir meilleur à leurs enfants. »

    https://www.mediapart.fr/journal/international/190223/en-tunisie-la-mort-d-une-fillette-retrouvee-echouee-sur-une-plage-suscite-

    #migrations #asile #réfugiés #décès #mourir_en_mer #fille #enfant #enfance #enfants #photographie #racisme #pêcheurs #Alan_Kurdi

    ping @karine4 @_kg_

    • En Tunisie, « il faut dépasser la question des #traversées pour penser l’immigration africaine »

      Dans un contexte où le Parti nationaliste tunisien s’en prend violemment à la communauté subsaharienne et où les naufrages ne cessent de s’intensifier en mer, le géographe #Camille_Cassarini revient sur les évolutions de la présence africaine dans ce pays du Maghreb, dont les politiques migratoires n’échappent pas aux mécanismes que l’on peut observer en Europe.

      DixDix-huit mille personnes ont réussi à rejoindre l’Italie depuis les côtes tunisiennes en 2022. Un chiffre en constante augmentation ces dernières années, démontrant que la crise socio-économique, mais aussi démocratique, dans laquelle s’enfonce la Tunisie ne cesse de pousser des personnes sur les chemins de l’exil.

      À l’heure où les naufrages s’amplifient et où la découverte du corps d’une fillette, échoué sur une plage des îles Kerkennah le 24 décembre dernier, vient brutalement nous rappeler la violence des politiques de fermeture des frontières, Camille Cassarini, chercheur à l’Université de Gênes et chercheur associé au LPED/IRD, alerte sur la nécessité de reconnaître l’immigration africaine en Tunisie.

      Après avoir passé plusieurs années à Sfax pour réaliser sa thèse, ville où la communauté subsaharienne est particulièrement importante, le géographe constate qu’un certain nombre de personnes viennent d’abord pour étudier et travailler.

      « Les personnes subsahariennes sont structurellement irrégularisées par l’État tunisien et leur départ prend avant tout naissance dans ce contexte de vulnérabilité juridique », souligne ce spécialiste des mobilités africaines en Tunisie, estimant que la délivrance d’un titre de séjour et l’ouverture de leurs droits pourraient permettre à certains de se projeter en Tunisie. Il faut, dit-il, cesser de penser ces mobilités sous l’angle du transit vers l’Europe.

      Mediapart : Depuis quand observe-t-on la présence d’exilés subsahariens en Tunisie ?

      Camille Cassarini : Depuis les années 1980, avec principalement des étudiants au départ, issus de classes moyennes supérieures, venus se former dans des instituts publics tunisiens. Il y a un premier changement dans les années 1990, qui correspond au grand pari de Ben Ali sur l’enseignement privé, visant à attirer lesdites « classes moyennes émergentes » d’Afrique.

      C’est ainsi qu’on a vu arriver des Camerounais, Congolais, Sénégalais ou Ivoiriens. Au même moment, il y avait déjà des mobilités de travailleurs qui arrivaient en Tunisie puis tombaient en situation irrégulière, mais on n’en parlait pas du tout.

      Un second changement a eu lieu en 2003, avec l’arrivée de la Banque africaine de développement et de son personnel, qui, à la suite des événements en Côte d’Ivoire, a été déplacée à Tunis. En 2011 enfin, l’arrivée au pouvoir d’Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire a mis beaucoup d’Ivoiriens sur la route. On estime qu’il y avait alors quelques milliers d’Ivoiriens à Tunis, quelques centaines à Sfax. Ces chiffres ont connu une croissance très forte dans les années qui ont suivi. Je dirais qu’aujourd’hui, entre 30 000 et 50 000 personnes originaires d’Afrique subsaharienne vivent en Tunisie.

      Quel est leur profil ?

      On retrouve toujours une très large majorité de personnes ivoiriennes, ce qui est en soi une particularité, voire un paradoxe, car la Côte d’Ivoire n’était pas un pays d’émigration, contrairement à d’autres pays d’Afrique de l’Ouest. On observe surtout la présence de travailleurs, issus de deux principaux groupes socio-ethniques en Côte d’Ivoire (les Akan et Baoulé, ainsi que les Bété, proches de Laurent Gbagbo), qui, avant, ne migraient absolument pas hors de la Côte d’Ivoire et sont issus de couches sociales assez favorisées.

      Dans quelles conditions de vie évoluent-ils ?

      Jusqu’au Covid-19, tous ces groupes vivaient d’emplois relativement précaires ; pas seulement d’emplois journaliers, payés 25 dinars par jour, mais aussi de petites activités commerciales à la valise (le fait de ramener des produits du pays d’origine pour les revendre en Tunisie).

      Cette population arrivait par avion sans visa et vivait en situation irrégulière (puisque une fois passés les trois mois de séjour autorisés, ils n’ont plus de droit au séjour), dans des logements collectifs, parfois individuels et dans des conditions relativement précaires ; mais des conditions qui, au regard de leur précédente situation en Côte d’Ivoire, n’étaient pas forcément si mauvaises.

      Leur salaire leur permettait d’opérer des renvois de fonds et de soutenir leur famille. Notamment au regard du taux de change qui existait entre le dinar tunisien et l’euro, et donc le franc CFA. À partir de 2018, l’État tunisien a développé une autre politique monétaire, faisant doper les exportations et baisser la valeur du dinar. Les cordons de la bourse ont alors été de plus en plus serrés.

      Quel impact le Covid-19 a-t-il pu avoir sur les migrations de Subsahariens vers et via la Tunisie ?

      Étant donné que ces personnes vivaient majoritairement d’emplois journaliers, sur un marché du travail informel, elles ont été les premières à perdre leur emploi. Elles ont vécu une très forte précarité, notamment parce qu’elles n’avaient ni sécurité sociale, ni parachute, ni aucune structure familiale pouvant leur venir en aide. Et on a vu des choses apparaître pour la toute première fois durant cette période, comme la mendicité et le sans-abrisme. Sur le plan des arrivées, il y a eu une forte baisse des arrivées, mais cela a repris dès que le trafic aérien s’est rouvert.

      Selon les ONG, la présence des Subsahariens a fortement augmenté en 2022. Comment l’expliquez-vous ?

      Les arrivées ont augmenté, oui, mais difficile de dire dans quelle mesure. Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a plus seulement que des Ivoiriens. Il y a d’autres nationalités qui ont investi cette route migratoire comme les lieux d’installation ouverts par ces mobilités. Des personnes originaires du Cameroun et de Guinée-Conakry, qui pratiquent les routes migratoires entre Afrique de l’Ouest et Afrique du Nord depuis longtemps.

      Alors qu’on les trouvait beaucoup en Libye, en Algérie ou au Maroc, les mobilités ivoiriennes ont ouvert cette route à travers la Tunisie, notamment jusqu’à Sfax. Aussi, sans doute, parce que des routes s’ouvrent et se ferment en permanence, et que les populations cherchent de nouveaux itinéraires. Chaque groupe en migration a sa propre histoire migratoire.

      Ces populations, différentes les unes des autres, cherchent-elles toutes à tenter la traversée pour l’Europe ?

      Mes travaux montrent que les Ivoiriens sont venus en Tunisie pour travailler et s’installer. Ces mobilités s’apparentent donc de plus en plus à une immigration, avec des gens qui restent plusieurs années, fondent une famille et occupent des emplois et une position sociale en Tunisie. On est face à un début d’immigration qui est appelée à rester.

      Concernant les Guinéens et Camerounais (et je le dis avec beaucoup de prudence car je n’ai pas mené d’enquête sur le sujet), on sait que ce sont des groupes connus pour rechercher une traversée vers l’Europe. On sait aussi que ce sont des groupes surreprésentés dans les demandes d’asile en Europe. C’est une donnée sur laquelle on peut s’appuyer pour faire l’hypothèse qu’ils ne sont pas forcément en Tunisie pour y rester, contrairement aux Ivoiriens. Mais il faudrait y consacrer des travaux.

      L’arrivée de nouvelles nationalités a-t-elle changé la donne pour les réseaux de passage ?

      Oui. Ces nouvelles nationalités ramènent avec elles leur expérience de la route et de la traversée. Certaines personnes sont restées très longtemps en Libye et ont acquis de bonnes connaissances dans la fabrication de bateaux. En arrivant à Sfax, qui est une ville littorale avec toute une économie de la mer, elles se sont mises à fabriquer des bateaux ou à acheter des moteurs. C’est le cas des Guinéens et des Gambiens. Aujourd’hui, on voit de nouveaux types d’embarcation en métal.

      Cela étant dit, aucune économie du passage ne se fait sans l’aval, le soutien et la protection de réseaux de passage tunisiens vers l’Europe. Les personnes en situation de domination quotidienne, sans capital social ni économique, n’ont pas les moyens de mettre en place de tels réseaux. Les Tunisiens cherchent un public, certains Subsahariens leur donnent accès à ce public-là, et ensuite, c’est de la négociation et du business. S’il y a une économie du passage des Subsahariens vers l’Europe, c’est avant tout parce qu’il y a une économie du passage des Tunisiens vers l’Europe.

      Avec l’arrivée de ces nouvelles nationalités, l’économie du passage s’est diversifiée. On a une plus grande offre du passage, pour une demande qui n’est pas nécessairement plus importante qu’avant. La conséquence de cela, c’est que les prix ont baissé. Lorsqu’il fallait payer auparavant 5 000 dinars, 1 000 ou 1 500 dinars suffisent désormais pour partir.

      Avez-vous le sentiment que le nombre de naufrages a augmenté ?

      Les organisations de la société civile disent que cela augmente. Mais depuis le début de mon travail en Tunisie, donc en 2017, j’ai toujours entendu parler des naufrages et des morts qui en découlent. L’ennui, c’est qu’on a beaucoup de mal à décompter ces naufrages, on ne sait pas exactement qui meurt, puisqu’on compte beaucoup de disparus en mer.

      En Tunisie, on sent que cette question des disparitions prend de plus en plus d’importance, d’abord chez les familles de Tunisiens disparus qui se mobilisent, mais aussi chez les familles et proches de Subsahariens, parce qu’elles sont installées en Tunisie. C’est plus compliqué en revanche pour les autres, lorsqu’ils sont en transit et n’ont pas forcément de proches en Tunisie. C’est le travail des organisations telles que la Croix-Rouge internationale que de les aider à retrouver un proche disparu.

      Ceux qui survivent à ces naufrages restent confrontés à de forts traumas et ne sont pas du tout pris en charge ensuite. Cela fait partie de toute cette architecture frontalière, qui consiste à marquer les gens dans leur mémoire, leur corps, leur histoire.

      Qu’est-ce qui pousse les gens à tenter la traversée au risque de perdre la vie en mer ?

      Je crois qu’il faut déconstruire les logiques qui amènent les gens à partir, notamment parce que j’ai connu des personnes qui avaient construit une vie en Tunisie (comme les Camerounais) et qui sont parties malgré tout pour l’Europe. Les traversées sont aussi le produit de la fermeture des frontières qui s’opère en Afrique et, sans nier l’influence des États européens dans ce domaine, il ne faut pas non plus sous-estimer la capacité des États maghrébins et africains à développer leurs propres agendas stratégiques vis-à-vis de la migration.

      En Tunisie, les personnes subsahariennes sont structurellement irrégularisées par l’État tunisien et leur départ prend avant tout naissance dans ce contexte de vulnérabilité juridique : c’est parce qu’on empêche les circulations entre pays africains que ces personnes sont amenées à partir. Soit elles dépensent l’argent économisé dans le paiement de pénalités pour rentrer dans leur pays, soit elles paient une traversée vers l’Europe, le tout sous l’effet conjugué de la baisse du dinar, du renforcement de l’appareil policier tunisien et d’un climat de peur.

      Il faut donc poser la question fondamentale du droit au séjour pour les personnes subsahariennes en Tunisie. On ne parle pas de la nationalité, mais de l’obtention d’un titre de séjour qui leur ouvre des droits. Il faut dépasser la question des traversées pour penser l’immigration africaine en Tunisie.

      La Tunisie nie-t-elle l’existence de cette immigration ?

      Jusqu’ici, il n’y avait jamais eu de débat politique ou de véritable positionnement des acteurs politiques vis-à-vis de l’immigration africaine en Tunisie. Depuis quelque temps, le Parti politique nationaliste tunisien a lancé des campagnes xénophobes et racistes de lutte contre la présence africaine en Tunisie, reprenant les mêmes discours que les partis xénophobes en Europe, autour de la théorie du « grand remplacement ». Pour la première fois, un parti fonde sa rhétorique sur la présence africaine en Tunisie. Ce n’est pas anodin, parce que le pays avait toujours nié cette présence.

      Paradoxalement, cela montre que l’immigration africaine devient un sujet politique. On ne la regarde plus seulement comme une sorte d’extériorité, on la pense au regard de la société tunisienne, de manière très violente certes, mais cela fait naître de nouveaux débats. On voit d’ailleurs des acteurs de la société civile qui, en réaction à cette campagne, appellent à la régularisation. Finalement, on a une politisation latente et progressive de la question des mobilités africaines. On est bien face à une immigration.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/190223/en-tunisie-il-faut-depasser-la-question-des-traversees-pour-penser-l-immig

  • Le Petit Livre des grands dangers du #nucléaire (ebook gratuit)
    http://carfree.fr/index.php/2023/02/08/le-petit-livre-des-grands-dangers-du-nucleaire-ebook-gratuit

    Synthèse de plus de 150 documents, ce petit livre aborde les principes fondamentaux de l’énergie nucléaire, de la radioactivité et de ses risques sur la santé, avant de détailler les Lire la suite...

    #Destruction_de_la_planète #Livres #accident #critique #destruction #énergie #france #fukushima #monde #risque

  • Décembre 2022 : Immigration : la justice britannique valide le projet d’expulser des demandeurs d’asile au #Rwanda

    En avril, le gouvernement de #Boris_Johnson avait conclu un #accord avec Kigali pour faire accueillir les candidats réfugiés arrivés illégalement sur le sol britannique.

    La #Haute_Cour_de_Londres a jugé, lundi 19 décembre, « légal » le projet, hautement controversé, du gouvernement britannique d’expulser vers le Rwanda les demandeurs d’asile arrivés illégalement au Royaume-Uni. Une décision qui survient au moment où le nombre de traversées de la Manche par des migrants n’a jamais été aussi élevé.

    « La Cour a conclu qu’il est légal pour le gouvernement britannique de mettre en place des dispositions pour envoyer des demandeurs d’asile au Rwanda et que leur demande d’asile soit examinée au Rwanda plutôt qu’au Royaume-Uni », selon un résumé du jugement publié par la Haute Cour. Celle-ci a estimé que les dispositions prévues par le gouvernement ne contrevenaient pas à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.

    « Bâtir une nouvelle vie »

    Le Rwanda s’est félicité de cette décision, par la voix de la porte-parole du gouvernement, Yolande Makolo. « Nous saluons cette décision et sommes prêts à offrir aux demandeurs d’asile et aux migrants l’occasion de bâtir une nouvelle vie au Rwanda », a-t-elle déclaré, en parlant d’une mesure « positive » pour résoudre la crise mondiale des migrations.

    En avril, le gouvernement de Boris Johnson avait conclu un accord avec Kigali pour expulser vers le Rwanda des demandeurs d’asile arrivés illégalement sur le sol britannique. Une politique destinée à décourager les traversées de la Manche à bord de petites embarcations.

    Aucune expulsion n’a encore eu lieu – un premier vol prévu en juin a été annulé après une décision de la #Cour_européenne_des_droits_de_l’homme (#CEDH) –, mais le gouvernement de #Rishi_Sunak poursuit cette politique.

    La décision rendue lundi porte sur le recours d’associations d’aide aux migrants, comme Care4Calais, Detention Action et Asylum Aid, ainsi que de la Public and Commercial Services Union (ou PCS), le syndicat des services publics et commerciaux.

    Le Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies était même intervenu dans le dossier, arguant que « les composantes minimales d’un système d’asile fiable et juste » font défaut au Rwanda et qu’une telle politique mènerait à de « graves risques de violations » de la Convention de l’ONU sur le statut des réfugiés.

    « Immoral et illégal »

    En septembre, avant le début de l’audience, le secrétaire général de la PCS, Mark Serwotka, avait jugé l’expulsion de migrants vers le Rwanda « non seulement immorale mais illégale ». Il avait exhorté le ministère de l’intérieur à « abandonner son approche hostile envers les réfugiés ». Pour l’association Care4Calais, ce projet est « cruel » :

    « Les réfugiés qui ont subi les horreurs de la guerre, de la torture et de la persécution seront désormais confrontés à l’immense traumatisme de l’expulsion et à un avenir inconnu. Cela leur causera une peur, une angoisse et une détresse incommensurables. »

    A l’audience, les avocats du gouvernement avaient affirmé que l’accord avec le Rwanda assurait aux personnes qui y seraient expulsées de bénéficier d’une procédure de détermination de leur statut de réfugiés « sûre et efficace ».

    Au début d’octobre, la très à droite ministre de l’intérieur, #Suella_Braverman, avait partagé son « rêve » pour Noël : « Voir (…) un avion décoller pour le Rwanda. » « Je souhaite sincèrement que nous soyons en mesure de mettre en œuvre le programme du Rwanda », a-t-elle dit dans un entretien au Times samedi. Plus tôt dans la semaine, le premier ministre, Rishi Sunak, avait rappelé que son gouvernement reprendrait ce projet, à l’occasion de l’annonce d’un éventail de mesures destinées à résoudre la crise du système d’asile, actuellement débordé.

    Son message aux migrants est « clair », selon Mme Braverman : « Si vous venez ici (…) illégalement sur de petits bateaux, en enfreignant nos règles, vous n’aurez pas le droit d’être hébergé ici indéfiniment à la charge du contribuable. Il y aura une réponse très rapide à votre arrivée ici. Détention suivie d’un renvoi. » « On peut légitimement se demander si ce cadre international est adapté à la situation alors que nous assistons à une crise migratoire mondiale », a-t-elle encore déclaré au Times.

    Ce serait « impardonnable si nous ne réglions pas ce problème » des migrants, a affirmé la ministre, alors que les travaillistes sont au plus haut dans l’opposition. « Le vote du Brexit portait en partie sur la migration, le contrôle de nos frontières et le retour de la souveraineté sur la question de savoir qui entre dans notre pays », a-t-elle admis, avant de reconnaître un échec : le gouvernement n’a « pas repris le contrôle » des frontières.

    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2022/12/19/la-justice-britannique-valide-le-projet-d-expulser-des-migrants-au-rwanda_61
    #Angleterre #UK #asile #migrations #réfugiés
    #offshore_asylum_processing #externalisation #justice #légalité

    Cette phrase :
    « Si vous venez ici (…) illégalement sur de petits bateaux, vous n’aurez pas le droit d’être hébergé ici indéfiniment à la charge du contribuable » —> est un copier-coller du #modèle_australien et de sa #Pacific_solution qui inclut la loi sur l’#excision_territoriale :
    https://seenthis.net/messages/901628#message901630

  • Dans ce système, il est « raisonnable » & « opportun » de saccager les services publics utiles à la population, mais « déraisonnable » et « inopportun » de lutter pour empêcher leur démolition, pour les préserver de la rapacité du capital et de ses agents.

    Au lendemain de la #grève des infirmières,la première depuis plus de cent ans, le #gouvernement_britannique maintient sa position face à un mouvement ayant la sympathie d’une majorité de l’opinion.
    Dans une interview au « Daily Mail », le Premier ministre, #Rishi_Sunak, confronté à son premier grand test social, a répété qu’il tiendrait bon face aux revendications salariales « déraisonnables ». « J’exhorte les syndicats à prendre en considération l’impact de ces grèves sur la vie et la santé des gens et à juger si elles sont opportunes », a-t-il ajouté.

    (Les Échos)
    #hôpital #royaume-uni #service_hospitalier #service_public

  • Que prévoit la #France pour les 230 migrants de l’#Ocean_Viking ?

    Les migrants arrivés vendredi à #Toulon font l’objet d’un suivi sanitaire, et de contrôles de sécurité, avant d’être entendus par l’#Ofpra dans le cadre d’une #procédure_d’asile à la frontière. Pendant tout ce temps, ils sont maintenus dans une « #zone_d'attente ». Des associations dénoncent ces conditions d’accueil.

    Si les 230 migrants sauvés par l’Ocean Viking ont bien débarqué en France, vendredi 11 novembre, dans le port de Toulon (http://www.infomigrants.net/fr/post/44677/locean-viking-et-ses-230-migrants-accostent-a-toulon-en-france), ils ne se trouvent « pas techniquement sur le sol français », comme l’a indiqué le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

    En effet, les autorités françaises ont choisi de les placer dans une « zone d’attente », définie jeudi soir dans la zone portuaire de Toulon et sur un #centre_de_vacances de la #presqu’île de #Giens à #Hyères, où les exilés sont hébergés pour l’occasion. Un « #centre_administratif » dont ils n’ont pas le droit de sortir.

    Le maintien des personnes dans ce lieu peut durer 26 jours au maximum d’après la loi française.

    « Un système d’#enfermement de #privation_de_liberté et non d’accueil »

    Un dispositif dénoncé par plusieurs associations, dont l’Anafé qui défend les étrangers aux frontières. Interrogée par InfoMigrants, sa directrice Laure Palun souligne que c’est « un système d’enfermement de privation de liberté et non d’accueil, qui pose question quant aux conséquences sur des personnes vulnérables ».

    Gérad Sadik, responsable national de l’asile à La Cimade, estime, quant à lui, que cette #zone_temporaire est « illégale » car ce dispositif est normalement réservé aux espaces situés sur une frontière, dans les aéroports par exemple.

    Une centaine de « #Zones_d'attente_pour_personnes_en_instance » (#ZAPI) existe actuellement en France. Plusieurs associations dont l’Anafé, la Cimade et la Croix-Rouge interviennent dans ces lieux où patientent les étrangers qui ne sont pas autorisés à entrer sur le territoire, pour leur porter une assistance juridique, sanitaire et sociale.

    Mais, concernant les migrants de l’Ocean Viking, la Cimade s’inquiète de ne pas avoir accès aux personnes retenues dans la zone d’attente. Gérard Sadik affirme que l’entrée leur a été refusée. Il alerte également sur le fait que les mineurs non accompagnés ne doivent pas être placés dans ces zones d’attente, or 42 jeunes dans ce cas se trouvaient à bord de l’Ocean Viking selon SOS Méditerranée.

    Dans cette zone d’attente, les migrants feront l’objet d’un suivi sanitaire, puis de contrôles de sécurité des services de renseignement, avant d’être entendus par l’Office français de protection des réfugiés (Ofpra), qui examine les demandes d’asile et décide ou non d’attribuer le statut de réfugié.

    Procédure d’asile à la frontière comme dans les #aéroports

    La France, qui veut décider « très rapidement » du sort des migrants de l’Ocean Viking, a choisi d’appliquer la procédure d’asile à la frontière.

    Habituellement une demande d’asile française est d’abord enregistrée en préfecture, déposée auprès de l’Ofpra sous forme de dossier puis s’ensuit une convocation à un entretien, et entre trois à six mois mois d’attente avant la réponse.

    Mais dans le cas des migrants de l’Ocean Viking, l’Etat a choisi d’appliquer une #procédure_exceptionnelle qui prévoit qu’un agent de la mission asile frontière de l’Ofpra mène un entretien avec ces personnes dans un délai de 48 heures ouvrées afin d’évaluer si la demande d’asile n’est pas « #manifestement_infondée ».

    Cela peut poser problème, car cette notion floue et présentée sous une forme alambiquée laisse un large champ aux autorités françaises pour refuser l’entrée d’une personne, soulèvent les associations d’aide aux migrants.

    « En théorie, l’examen du caractère manifestement infondé ou non d’une demande d’asile ne devrait consister à vérifier que de façon sommaire si les motifs invoqués par le demandeur correspondent à un besoin de protection », soulignait l’Anafé, interrogée par InfoMigrants début novembre sur cette même procédure très régulièrement appliquée sur l’île de La Réunion. « Il ne devrait s’agir que d’un examen superficiel, et non d’un examen au fond, de la demande d’asile, visant à écarter les personnes qui souhaiteraient venir en France pour un autre motif (tourisme, travail, étude, regroupement familial, etc.) en s’affranchissant de la procédure de délivrance des visas », précisait l’association.

    Difficile donc pour des migrants tout juste arrivés après plusieurs semaines d’errance en mer, et parfois la perte de leurs papiers d’identité lors des naufrages, de prouver le fondement de leur demande lors d’un entretien de quelques minutes. D’autres considérations rentrent aussi en ligne de compte lors de ce type d’entretiens, notamment la langue parlée, et la qualité de la traduction effectuée par l’interprète de l’Ofpra.

    Pour accélérer encore un peu plus la procédure, « l’Ofpra a prévu de mobiliser dès ce week-end seize agents pouvant réaliser jusqu’à 90 entretiens par jour », a insisté vendredi le directeur général des étrangers (DGEF) au ministère de l’Intérieur, Eric Jalon.

    Après avoir mené ces entretiens, l’Ofpra donne un avis au ministère de l’Intérieur qui autorise ou non les migrants interrogés à déposer leur demande d’asile. Dans la plupart des cas, les personnes soumises à ce type de procédure échouent avec un taux de refoulement de 60%, indique l’Anafé.

    « Doutes sur le fait que les autorités françaises puissent expulser rapidement »

    « Pour les personnes dont la demande d’asile serait manifestement infondée, qui présenteraient un risque sécuritaire, nous mettrons en œuvre (...) les procédures d’#éloignement pour qu’elles regagnent leur pays d’origine », a prévenu Eric Jalon. Le ministère de l’Intérieur affirme également que des contacts ont déjà été pris avec les pays d’origine de ces rescapés.

    D’après les informations dont dispose InfoMigrants, les rescapés de l’Ocean Viking sont majoritairement originaires du Bangladesh, d’Érythrée et de Syrie, mais aussi d’Égypte, du Pakistan et du Mali notamment.

    « Nous avons des doutes sur le fait que les autorités françaises puissent expulser rapidement », fait savoir Laure Palun, « car il faut que la personne soit détentrice d’un passeport et d’un laissez-passer consulaire ». Or ce document doit être délivré par le pays d’origine et cela prend du temps car certains pays tardent à l’octroyer.

    Deux-tiers des personnes ne resteront de toute façon pas en France, puisqu’elles seront relocalisées dans neuf pays, a précisé le ministère, citant l’#Allemagne qui doit en accueillir environ 80, le #Luxembourg, la #Bulgarie, la #Roumanie, la #Croatie, la #Lituanie, #Malte, le #Portugal et l’#Irlande.

    Si une personne se voit refuser l’entrée sur le territoire par le ministère de l’Intérieur, un recours juridique est possible. Il s’agit du recours contre le refus d’admission sur le territoire au titre de l’asile à déposer dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la décision de refus prise par le ministère de l’Intérieur, explique la Cimade.

    http://www.infomigrants.net/fr/post/44696/que-prevoit-la-france-pour-les-230-migrants-de-locean-viking
    #sauvetage #asile #migrations #réfugiés #Méditerranée #Italie #ports #ports_fermés #frontières #relocalisation #renvois #expulsions

    ping @isskein @karine4 @_kg_

    –—

    ajouté à la métaliste autour de la création de zones frontalières (au lieu de lignes de frontière) en vue de refoulements :
    https://seenthis.net/messages/795053

    • À peine débarqués, les rescapés de l’« Ocean Viking » sont privés de liberté

      C’est sous #escorte_militaire que le navire de #SOS_Méditerranée a pu s’amarrer à Toulon. Les migrants, dont des enfants, ont été transférés dans une « zone d’attente », soit un lieu de privation de liberté. Un député LFI, qui a pu y entrer, a vu « des humains au bord du gouffre ».

      Deux places, deux ambiances pour l’arrivée du bateau de SOS Méditerranée, vendredi, à Toulon. Sur le quai Cronstadt, en fin de matinée, une centaine de personnes se sont rassemblées pour affirmer un message de bienvenue aux 230 exilé·es secouru·es par l’Ocean Viking. Les slogans, cependant, n’ont pas pu être entendus des concerné·es, puisque le gouvernement a organisé leur réception au port militaire, loin des regards, y compris de ceux de la presse.

      Deux heures plus tard, quelques dizaines de soutiens d’Éric Zemmour ont tenu le pavé devant l’entrée de l’arsenal, tandis que leur chef déclamait un énième discours xénophobe devant un mur de caméras. Outre #Marion_Maréchal-Le Pen, il était accompagné d’anciens de #Génération_identitaire, dont l’Aixois #Jérémie_Piano, récemment condamné à huit mois de prison avec sursis pour des faits de violence au siège de SOS Méditerranée en 2018.

      Jeudi, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, avait annoncé l’autorisation donnée à l’Ocean Viking de débarquer à Toulon, après trois semaines d’errance en mer dans l’attente d’un port sûr que lui ont refusé Malte et l’Italie. Le navire et ses 230 passagers et passagères, dont 13 enfants accompagnés et 44 mineur·es sans famille, s’est amarré à 8 h 50 ce vendredi. Son entrée en rade de Toulon s’est faite sous escorte de plusieurs bateaux militaires et d’un hélicoptère. Puis les personnes ont été acheminées dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, transformé en « zone d’attente » provisoire. Autrement dit : aux yeux de l’administration, les rescapé·es de l’Ocean Viking ne sont pas entré·es sur le territoire français.

      Des bus sont chargés de les conduire « sous #escorte_policière jusqu’au site d’hébergement situé sur la commune d’Hyères », a précisé le préfet du Var, Evence Richard à l’occasion d’une conférence de presse. Les personnes y seront privées de leur liberté, le temps de l’évaluation de leur situation, et sous la #garde_policière de quelque 200 agents.

      Des centaines de policiers

      Le représentant de l’État annonce d’importants moyens mis en place par ses services pour répondre à un triptyque : « #dignité_humanitaire ; #sécurité ; #rigueur et #fermeté ». 600 personnes en tout, forces de l’ordre comprises, vont se consacrer à cet « accueil » prévu pour un maximum de 26 jours. La prise en charge médicale est assurée par les services des pompiers et du Samu.

      D’un point de vue administratif, le ministère veut d’abord « évaluer les #risques_sécuritaires », via des entretiens menés par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), selon les mots d’Éric Jalon, directeur général des étrangers en France, présent au côté du préfet. La mise en avant de cet aspect est un gage donné par Gérald Darmanin à l’extrême droite.

      Ensuite, si les personnes demandent l’asile et rentrent dans les critères, elles pourront, pour un tiers seulement des adultes, rester en France ou bien être « relocalisées », selon le jargon administratif, dans au moins neuf autres pays européens : Allemagne, Luxembourg, Bulgarie, Roumanie, Croatie, Lituanie, Malte, Portugal et Irlande.

      Des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), l’instance dépendant du ministère de l’intérieur chargée d’attribuer ou non le statut de réfugié, évalueront les situations « sous 48 heures », insistent les hauts fonctionnaires. Une procédure express réservée aux « zones d’attente », ces sites habituellement installés dans les aéroports, les ports ou à des postes-frontières, régulièrement dénoncés par des associations comme des lieux où les droits de certains étrangers et étrangères sont bafoués.

      Si les personnes ne demandent pas l’asile, si l’Ofpra rejette leur demande ou si elles sont considérées comme présentant un risque pour la sécurité, le ministère de l’intérieur s’efforcera de les renvoyer dans leur pays d’origine. « Des contacts ont d’ores et déjà été pris avec les pays vers lesquels les personnes ont vocation à retourner », affirme Éric Jalon.

      Les 44 mineur·es non accompagné·es déclaré·es par SOS Méditerranée, pour leur part, verront leur situation évaluée par les services de l’Aide sociale à l’enfance du Var. Si celle-ci ne met pas en cause leur minorité, ils pourront quitter la zone d’attente et être sous la protection du département, comme la loi l’impose.

      Des parlementaires interdits d’accès au quai

      Venue à Toulon pour observer, Laure Palun, de l’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers), organisation active pour défendre les droits des étrangers et étrangères en zones d’attente, critique la méthode. « Il n’y a pas assez d’agents de l’Ofpra formés aux demandes d’asile formulées à la frontière. Il risque d’y avoir plein d’erreurs, dit-elle. Et puis, pour des gens qui ont failli se noyer, qui sont restés autant de temps sur ce bateau, comment pourront-ils être opérationnels dès demain pour faire un récit de vie qui va être crédible aux yeux des autorités françaises ? »

      Sur le plan humain, « enfermer ces personnes, c’est rajouter une couche de #violence à ce qu’elles ont déjà vécu. La zone d’attente n’est pas un lieu qui permet d’aborder sereinement l’asile. Je ne suis pas certaine qu’il y aura une prise en charge psychologique », juge la responsable associative. Dans de nombreuses zones d’attente temporaire habituellement mises en place dans les départements d’outre-mer, l’association a observé que l’information sur la demande d’asile n’est pas toujours donnée aux individus. « C’est une obligation d’informer les étrangers de leurs droits », assure pour sa part Éric Jalon.

      Des rescapés harassés, pieds nus, sans pantalon

      L’opération du gouvernement interpelle aussi par le secret qu’elle s’évertue à organiser. En dehors des agents de l’État, personne n’a eu accès à l’arsenal vendredi, une zone militaire, donc confidentielle. Le député de Marseille Sébastien Delogu (La France insoumise – LFI) s’est vu refuser l’accès à l’Ocean Viking, alors que la loi autorise n’importe quel parlementaire à visiter une zone d’attente à l’improviste, et que celle créée dans le village vacances englobe « l’emprise de la base navale de Toulon », d’après l’arrêté publié vendredi par le préfet.

      Le gouvernement prétend faire primer, semble-t-il, le secret défense. « Moi je ne viens pas pour faire du théâtre comme l’extrême droite, je veux exercer mon droit de parlementaire, s’agace le député insoumis. J’ai aussi été élu pour ça. Sinon, qui a un droit de regard ? » Son collègue Hendrik Davi (LFI) a également été repoussé.

      Plus tard, Sébastien Delogu a pu, tout de même, se rendre au village vacances et « constater toute la souffrance et la détresse physique et mentale dans laquelle se trouvent les rescapés ». « Ces jeunes hommes et femmes sont épuisés, parfois pieds nus ou sans pantalon, harassés par ce périple durant lequel ils ont tout quitté et risqué leur vie. Je n’ai vu que des humains au bord du gouffre, a-t-il précisé, à la sortie, dans un communiqué. Nous ne céderons pas un centimètre d’espace politique aux fascistes qui instrumentalisent ces drames pour propager la haine et la xénophobie. »

      Entre soulagement et amertume, les responsables de SOS Méditerranée ont quant à eux fustigé vendredi des blocus de plus en plus longs imposés à leur navire, au détriment de la sécurité physique et psychologique des naufragé·es recueilli·es à bord. Comme elle le fait depuis sept ans, l’ONG a appelé à la (re)constitution d’une flotte européenne pour faire du sauvetage en Méditerranée centrale et à la mise en place d’un processus de solidarité entre États européens pour la répartition des personnes secourues, qui respecte le droit maritime (soit un débarquement dans le port sûr le plus proche).

      Les finances de l’association étant en baisse à cause de l’explosion des coûts due à l’inflation et à la diminution des dons reçus, elle a relancé un appel aux soutiens. « Dans l’état actuel de nos finances, on ne peut continuer encore que quelques mois, précise sa directrice Sophie Beau. Depuis le premier jour, SOS Méditerranée est essentiellement soutenu par la société civile. » Si quelques collectivités complètent le budget par des subventions, l’État français, lui, ne verse évidemment pas un centime.

      « C’est essentiel qu’on retourne en mer, déclare Xavier Lauth, directeur des opérations de SOS Méditerranée. Parce qu’il y a eu déjà au mois 1 300 morts depuis le début de l’année [en Méditerranée centrale, face à la Libye – ndlr]. » Le décompte de l’Organisation internationale pour les migrations (liée à l’ONU) a précisément dénombré 1 912 personnes disparues en Méditerranée depuis le début de l’année, que les embarcations aient visé l’Italie, la Grèce ou encore l’Espagne. Et depuis 2014, plus de 25 000.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/111122/peine-debarques-les-rescapes-de-l-ocean-viking-sont-prives-de-liberte

    • Le jour où la France n’a pas (vraiment) accueilli l’Océan Viking…

      Après trois semaines à errer, sans qu’on lui assigne de port où débarquer les 234 rescapés secourus en mer, l’Océan Viking, de Sos-Méditerranée, a enfin accosté à Toulon. Entre soulagement et indignation, les associations dénoncent l’instrumentalisation politique de cette crise et les défaillances des États membres de l’Union Européenne.

      « Le sauvetage que nous avons débuté le 22 octobre n’est toujours pas terminé », c’est en substance ce qu’explique Louise Guillaumat, directrice adjointe des opérations de SOS-Méditerranée, lors de la conférence de presse tenue, le vendredi 11 novembre à midi. À cette heure, plus de la moitié des rescapés tirés des eaux par l’ONG, trois semaines auparavant, sont toujours à bord de l’Océan Viking, qui a accosté le matin même, sur le quai de l’artillerie de la base navale varoise.

      Au soleil levant, sur le quai Cronstadt, au pied du « cul-vers-ville », une statue évoquant le génie de la navigation, les caméras de télévision se sont frayé une place parmi les pêcheurs matinaux. Il est 7 h 00, le bateau de Sos-méditerranée est à moins de six miles marins des côtes toulonnaises. Il accoste deux heures plus tard. Pourtant, les 231 exilés à son bord ne sont pas accueillis par la France.
      44 enfants isolés

      « Les passagers ont été placés en zone d’attente. Ils n’ont pas été autorisés à entrer sur le territoire national. » explique Éric Jalon, préfet, et directeur général des étrangers en France (DGEF). Le port militaire et le centre où vont être hébergés les exilés ont été, par décret, définis, la veille, comme « zone d’attente provisoire » gérée par la Police des airs et des frontières (PAF). « Des évaluations de leur état de santé sont faites dès leur descente du navire », promet le préfet.

      Après quoi, ils sont conduits en bus dans un centre de vacances, mis à disposition par la Caisse centrale d’activités sociales (CCAS) des agents des industries électriques et gazières en France, en solidarité avec les personnes réfugiées. Une fois là-bas, ces dernières, parmi lesquelles 44 mineurs isolés, doivent pouvoir formuler une demande d’asile en procédure accélérée.

      « Des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ont été détachés sur place pour y mener des entretiens », poursuit le DGEF. Ceux pour qui la demande d’asile sera jugée « irrecevable et manifestement infondée » feront l’objet de reconduites dans leur pays d’origine. Ce n’est qu’après cette procédure, pouvant durer jusqu’à 26 jours, que les autres pourront alors prétendre à demander l’asile en France ou dans un des neuf pays de l’union européenne s’étant déclaré prêt à en accueillir une partie.
      Une façon de détourner le règlement de Dublin

      « Ce n’est pas ce que prévoit le droit dans l’état », pointe Laure Palun, la directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé), présente au rassemblement organisé sur le port, en milieu de matinée, par les associations, syndicats et partis solidaires des exilés. « Les demandeurs d’asile doivent normalement être accueillis sur le territoire d’un État avant leur relocalisation. » explique-t-elle.

      Le choix fait par la France est une façon de détourner le règlement de Dublin qui prévoit qu’une demande d’asile ne puisse être étudiée que par le pays de première entrée du candidat. Et ce n’est pas la seule entorse à la loi que revêt le dispositif « exceptionnel » mise en place par Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. « Ce matin, on nous a refusé l’entrée dans la zone d’attente alors que nous sommes une des associations agréées pour y accéder en tant qu’observateur », dénonce ainsi la responsable associative. La loi prévoit, d’ailleurs, dans le même cadre un libre accès aux parlementaires. Le député LFI de la 7e circonscription de Marseille, Sébastien Delogu, s’est porté volontaire ce matin. Mais « le cabinet de Sébastien Lecornu, ministre des armées, nous interdit l’accès au port », confia-t-il, en début d’après-midi, au téléphone depuis le bureau du préfet maritime. Même les membres de Sos-Méditerranée n’ont pas pu venir à la rencontre de leur équipage bloqué en mer depuis 21 jours.
      L’indignité monte d’un cran

      « La France a su accueillir dignement les réfugiés venus d’Ukraine », rappelle Olivier Masini, secrétaire général de l’UD CGT du Var, alors que plusieurs centaines de militants entament une marche solidaire en direction du théâtre de la liberté où les représentants de SOS-Méditerranée tiennent leur conférence de presse. « Nous sommes ici pour affirmer les valeurs humanistes de notre syndicat et pour demander que les réfugiés débarqués aujourd’hui puissent bénéficier d’un traitement similaire. »

      C’est avec les traits tendus par la colère et la fatigue que les quatre dirigeants de l’Ong de sauvetage en mer accueillent leur auditoire. « Les États Européens négligent depuis sept ans la situation » , lance Sophie Beau, Co-fondatrice de SOS-Méditerranée. « Il est temps que soit mis en place un véritable mécanisme opérationnel et pérenne de répartition des exilés secourus en Méditerranée centrale. L’instrumentalisation politique de cette crise est indigne des démocraties européennes. »

      L’#indignité est d’ailleurs montée d’un cran en début d’après-midi, lorsque devant l’arsenal, les représentants du parti d’extrême-droite, Reconquête, sont venus s’exprimer devant une poignée de groupies haineux. Pas de quoi décourager, cependant, les sauveteurs de Sos-Méditerranée. «  Je préfère rester optimiste, reprend Sophie Beau. Les citoyens européens sont porteurs de solidarité. Nous repartirons rapidement en mer pour continuer notre mission de sauvetage. Et dans le contexte économique actuel, nous avons plus que jamais besoin du soutien de la société civile… Répondez à ce SOS. »

      https://www.humanite.fr/societe/ocean-viking/le-jour-ou-la-france-n-pas-vraiment-accueilli-l-ocean-viking-770755#xtor=RS

      #migrerrance

    • « Ocean-Viking », un désastre européen

      Editorial du « Monde » . Les trois semaines d’errance du navire humanitaire, qui a fini par accoster à Toulon sur fond de crise diplomatique entre la France et l’Italie, rappellent l’impuissance européenne à mettre en œuvre les droits humains.

      L’Union européenne (UE) n’avait pas besoin de cela. Déjà aux prises avec une guerre à ses portes, une crise énergétique, la montée de l’inflation et les tensions que ce contexte exacerbe entre ses membres, voilà que la terrible errance depuis trois semaines d’un navire humanitaire, l’Ocean-Viking, chargé de migrants secourus en Méditerranée, remet en lumière son incapacité à organiser la solidarité en son sein. Cela sur la principale question qui nourrit l’extrême droite dans chaque pays – l’immigration – et, partant, menace l’avenir de l’Union elle-même.

      Si la France a, finalement, sauvé l’honneur en acceptant que l’Ocean-Viking accoste à Toulon, vendredi 11 novembre, après le refus italien, l’impuissance européenne à mettre en œuvre les droits humains qui la fondent historiquement – en l’occurrence la sauvegarde de 234 vies, dont celles de 57 enfants – est extrêmement préoccupante.

      Que la France et l’Italie, que rapprochent mille liens historiques, géographiques et humains, en viennent à s’apostropher par ministres de l’intérieur interposés donne la mesure de la déstabilisation d’un équilibre déjà fragile, consécutif à l’arrivée à Rome de Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien issue de l’extrême droite.

      Sept ans après la crise migratoire de 2015, au cours de laquelle l’UE avait manqué de solidarité à l’égard de l’Italie, y nourrissant la xénophobie, les ingrédients du malaise sont toujours là. Même si les migrants de l’Ocean-Viking doivent être répartis dans l’UE, le fragile système de partage des demandeurs d’asile dans une douzaine d’Etats européens, obtenu par la France en juin, qui n’a jusqu’à présent connu qu’une application homéopathique, a déjà volé en éclats avec l’Italie.

      Volte-face

      Pour l’exécutif français, enclin à présenter l’Union européenne comme un facteur de protection, le scénario de l’Ocean-Viking est également désastreux. S’il a pris en définitive la bonne décision, il semble s’être fait forcer la main par le gouvernement italien. Alors qu’Emmanuel Macron avait refusé en 2018 l’accostage de l’Aquarius, un autre bateau humanitaire, pour ne pas « faire basculer le pays vers les extrêmes », sa volte-face intervient alors que le Rassemblement national, avec ses 89 députés, a renforcé son emprise sur la vie politique.

      Si le dénouement de Toulon devrait logiquement être salué à gauche, il risque de compromettre le ralliement déjà incertain de la droite au projet de loi sur l’immigration, construit sur un équilibre entre régularisation de travailleurs étrangers et fermeté sur les mesures d’éloignement.

      Le poids des images et des symboles – le navire chargé de malheureux, le débarquement sous escorte militaire – ne saurait cependant faire perdre la véritable mesure de l’événement : l’arrivée de quelques dizaines de demandeurs d’asile est bien loin de déstabiliser un pays comme la France. Une centaine de milliers de réfugiés ukrainiens y sont d’ailleurs accueillis à bras ouverts. Comme eux, les migrants venus d’autres continents ont droit à un examen sérieux de leur demande d’asile.

      Les difficultés d’intégration, les malaises et les craintes que suscite l’immigration dans l’opinion sont évidents et doivent être sérieusement écoutés et pris en compte. Mais, alors que l’extrême droite fait des migrants le bouc émissaire de tous les dysfonctionnements de la société et tient la mise au ban des étrangers pour la panacée, il faut rappeler que des hommes, des femmes et des enfants sont là, derrière les statistiques et les joutes politiques.

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/11/12/ocean-viking-un-desastre-europeen_6149574_3232.html

    • Pour le plein respect des droits et de la dignité des passager.e.s de l’Ocean Viking, pour une véritable politique d’accueil européenne [Communiqué de presse inter-associatif]

      L’accueil de l’Ocean Viking à Toulon en France a été un soulagement face au drame terrible et indigne que vivaient ses passager.e.s depuis plusieurs semaines, balloté.e.s sur les flots en attente d’une décision sur leur possibilité de débarquement.

      Maintenant se pose la question des conditions de l’accueil des passager.e.s.

      Nous demandons la mise en place des dispositions suivantes :

      – Pas de privation de liberté en zone d’attente, qui ne ferait qu’accroitre les souffrances et traumatismes vécus en mer et sur le parcours d’exil ; de nos expériences sur le terrain, le respect des droits des personnes et de leur dignité n’est pas compatible avec l’enfermement de ces dernières, quel que soit le contexte de leur arrivée, et a fortiori après un périple tel que l’on vécut les rescapés de l’Océan Viking.
      En outre, il est inadmissible que le gouvernement ait fait le choix de « fabriquer » une zone d’attente temporaire dans une base militaire, rendant impossible l’accès des associations habilitées et des élu.e.s de la République, sous prétexte de secret défense, ne permettant pas à des personnes en situation de particulière vulnérabilité d’avoir accès à l’assistance minimale que la loi leur reconnaît.

      – Mobilisation d’un centre d’accueil ouvert, permettant de mettre en place l’accompagnement sanitaire, social, et également psychologique nécessaire.

      – Protection immédiate, mise à l’abri et hébergement des passager.e.s, dépôt de demandes d’asile pour toutes les personnes le souhaitant, et examen approfondi de toutes les situations des personnes afin de garantir le respect de l’exercice effectif de leurs droits.

      Plus globalement, pour éviter demain d’autres drames avec d’autres bateaux :

      – Nous rappelons le nécessaire respect du droit international de la mer, en particulier l’obligation de porter secours aux passagers d’un bateau en difficulté, le débarquement des personnes dans un lieu sûr dans les meilleurs délais ainsi que le principe de non-refoulement vers des pays où les personnes encourent un risque d’être soumises à la torture ou à des traitements inhumains ou dégradants.

      – La solidarité en Europe ne fonctionne pas. Le « mécanisme de solidarité » proposé dans le cadre du pacte européen « migrations et asile » est non seulement non respecté par les pays mais très en-deçà d’une véritable politique d’accueil respectueuse de la dignité des personnes et de leurs droits fondamentaux. L’Italie est à la pointe des égoïsmes nationaux mais globalement les pays européens dans leur ensemble ne sont pas à la hauteur.

      – C’est donc un changement de modèle politique qui est indispensable : passer de politiques européennes fondées sur la fermeture et le repli vis-à-vis des migrant.e.s considéré.e.s comme indésirables pour prôner un autre système :

      > permettre un accès inconditionnel au territoire européen pour les personnes bloquées à ses frontières extérieures afin d’examiner avec attention et impartialité leurs situations et assurer le respect effectif des droits de tou∙te∙s
      > permettre l’accueil des réfugié.e.s non pas sur la base de quotas imposés aux pays, mais sur la base des choix des personnes concernées (selon leurs attaches familiales, leurs compétences linguistiques ou leurs projets personnels), dans le cadre d’une politique de l’asile harmonisée, fondée sur la solidarité entre Etats et le respect inconditionnel des droits fondamentaux.

      http://www.anafe.org/spip.php?article655

    • Zone d’attente de Toulon : violations des droits des personnes sauvées par l’Ocean Viking [Communiqué de presse]

      Depuis 5 jours, l’Anafé se mobilise pour venir en soutien aux personnes enfermées en zone d’attente de Toulon après le débarquement de l’Ocean Viking, le vendredi 11 novembre. Ses constats sont alarmants. Les personnes sauvées par l’Ocean Viking sont victimes de violations de leurs droits fondamentaux dans ce lieu d’enfermement qui n’a rien d’un village de vacances : violations du droit d’asile, personnes portant des bracelets avec numéro, absence d’interprétariat, absence de suivi psychologique effectif, pas de téléphones disponibles et pas de visites de proches, pas d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

      Violation du droit d’asile
      Toutes les personnes enfermées dans la zone d’attente de Toulon ont demandé l’asile. L’Anafé dénonce le choix des autorités de priver de liberté ces personnes en demande de protection internationale alors que ces mêmes autorités n’ont pas nié l’état psychologique dégradé dans lequel elles se trouvent après un long parcours au cours duquel elles ont failli se noyer et après avoir été débarquées d’un bateau de sauvetage sur lequel elles avaient passé 21 jours. Or, la procédure d’asile à la frontière est une procédure d’asile « au rabais », réalisée dans l’urgence mais aussi dans un lieu d’enfermement, quelques heures seulement après le débarquement.
      Les autorités auraient pu, à l’instar de ce qui a été mis en œuvre l’année dernière à l’arrivée de personnes ressortissantes d’Afghanistan ou lors de l’arrivée de ressortissants d’Ukraine depuis le début d’année, prévoir des mesures d’hébergement et un accès à la procédure de demande d’asile sur le territoire, après un temps de repos et de prise en charge médicale sur le plan physique et psychologique.

      Les conditions d’entretien Ofpra
      Les entretiens Ofpra doivent veiller au respect de la confidentialité des échanges et de la dignité des personnes, tout en prenant en compte leur vulnérabilité. L’Ofpra aurait pu refuser de réaliser les entretiens de personnes à peine débarquées au regard de leur vulnérabilité. Cela n’a pas été le cas. Au contraire, elles ont dû expliquer leurs craintes de persécutions sitôt enfermées en zone d’attente. Surtout, des entretiens se sont déroulés dans des tentes, dont certaines laissant une visibilité depuis l’extérieur et sans respect de la confidentialité des échanges, les conversations étaient audibles depuis l’extérieur. Les autres ont été faits dans des locaux où avaient été réalisés des entretiens avec les services de police, ajoutant à la confusion des interlocuteurs et des rôles. Rien, hormis le petit badge porté par les officiers de protection, ne pouvait les distinguer des policiers en civil ou des associations présents dans le camp.

      L’absence d’interprétariat
      Les personnes ainsi enfermées n’ont pas eu accès à des interprètes. Seulement deux interprètes en arabe étaient présentes lors d’une visite organisée par des sénateurs et un député. Leur rôle : traduire les entretiens avec la police aux frontières. Hormis ces deux interprètes, l’ensemble des entretiens sont effectués via un interprétariat téléphonique assuré par un prestataire, y compris pour les entretiens Ofpra. L’Anafé a pu observer les difficultés de la police aux frontières pour contacter un interprète, faisant parfois appel à une personne maintenue en zone d’attente.
      Dès lors, les personnes ne sont pas en mesure de comprendre la procédure de maintien en zone d’attente, leurs droits, la procédure spécifique d’asile à la frontière et ses tenants et aboutissants.

      Des numéros aux poignets
      Les personnes maintenues sont identifiées par des bracelets de couleur au poignet portant un numéro. Les autorités n’ont donc pas hésité à les numéroter sans aucun respect pour leur individualité et leur identité.

      L’absence de suivi psychologique effectif
      L’Anafé a pu constater dans la zone d’attente que si la CUMP83 (cellules d’urgence médico-psychologique) était présente, les conditions d’enfermement ne permettent pas aux infirmiers d’échanger avec les personnes maintenues, les services d’interprétariat téléphonique toujours assurés par le même prestataire étant saturés. De plus, la CUMP83 ne bénéficie pas d’un local adapté pour s’entretenir de manière confidentielle avec les personnes mais d’une tente située dans le « village Croix-Rouge » au milieu de la zone d’attente. Cette disposition ne permet donc pas aux personnes maintenues de bénéficier d’un soutien psychologique confidentiel et adapté au traumatisme qu’elles ont subi lors de leur parcours migratoire et des trois semaines passées en mer.
      De plus, si un médecin, une sage-femme et une infirmière étaient présents le samedi 13 novembre 2022, nous avons pu constater le lendemain qu’aucun médecin n’était présent sur le site. Il nous a été indiqué qu’en cas de nécessité, il serait fait appel à SOS Médecin.

      Impossibilité d’avoir des contacts avec l’extérieur, contrairement à la législation régissant les zones d’attente
      Les numéros utiles ne sont pas affichés. Le wifi installé par la Croix-Rouge ne fonctionne pas correctement. Si huit téléphones portables sont disponibles toute la journée, les conversations sont limitées à 5 minutes et jusqu’à 18h environ. Il n’est pas possible d’être appelé sur ces numéros et ils ne servent que dans le cadre du rétablissement des liens familiaux. Hormis ces téléphones, aucune cabine téléphonique n’est prévue sur le site de la zone d’attente. Il n’est donc pas possible pour les personnes maintenues de s’entretenir de manière confidentielle, notamment avec un avocat, une association ou leurs proches. Il est impossible pour les personnes maintenues de se faire appeler de l’extérieur.
      Aucune visite de proche n’est possible en raison de l’absence de de mise en place d’un système de visite ou d’un local dédié.

      L’impossible accès aux avocats et aux associations
      L’Anafé a pu constater que les personnes maintenues n’avaient aucune connaissance de leur droit à contacter un avocat et qu’aucun numéro de téléphone ne leur avait été communiqué, là encore, contrairement à la législation applicable. Après la visite de la Bâtonnière de l’Ordre des avocats de Toulon et des élus, les avocats se sont vu attribuer deux chambres faisant office de bureau qui ne sont équipées ni d’ordinateur, ni de fax, ni d’internet pour transmettre les recours.
      L’Anafé n’a pas de local pour s’entretenir de manière confidentielle avec les personnes maintenues, notamment en faisant appel à un service d’interprétariat. D’après les informations fournies par la protection civile, il n’y avait pas de local disponible.
      Il est donc impossible pour les avocats et pour les associations de défense des droits d’exercer leur mission dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges et un accompagnement digne des personnes.

      Toutes ces violations constituent des manquements graves aux droits des personnes enfermées dans la zone d’attente de Toulon. Ces atteintes inacceptables sont le résultat du choix fait par les autorités d’enfermer ces personnes au lieu de les accueillir. Comme à chaque fois que des gens sont enfermés en zone d’attente, leurs droits ne sont pas respectés. C’est ce que l’Anafé dénonce depuis la création des zones d’attente. Il est temps de mettre fin à ce régime d’enfermement.

      http://www.anafe.org/spip.php?article656

    • Comment l’affaire de l’Ocean Viking révèle l’ambiguïté des « zones d’attente »

      Vendredi 11 novembre, les 234 migrantes et migrants secourus par le navire Ocean Viking ont pu rejoindre la base navale de Toulon, après trois semaines d’errance en mer. Ultime épisode du drame de la migration qui se joue en Méditerranée et dont le déroulement puis le dénouement peuvent donner lieu à plusieurs clés de lecture. Au niveau de la politique et de l’intégration européennes, le bras de fer entre Paris et Rome, rejouant le duel ayant opposé en 2018 Emmanuel Macron avec l’alors Président du Conseil des ministres italien et actuel Vice-Président Matteo Salvini, a souligné les obstacles à l’affirmation de la solidarité européenne sur la question. Au niveau de la politique interne, ensuite, l’on a vu combien la situation de l’Ocean Viking a accusé les clivages entre « humanistes » et partisans de la fermeté.

      Rappelons d’ailleurs que les propos ayant valu l’exclusion pour deux semaines du député du Rassemblement national Grégoire de Fournas ont précisément été tenus à l’occasion de l’allocution d’un député de la France insoumise dénonçant le sort réservé aux passagers du navire humanitaire.

      Le dernier épisode en date dans l’épopée de l’Ocean Viking est également et entre autres justiciable d’une analyse juridique.
      Les limites du droit international de la mer

      Pendant son errance, les difficultés à trouver un lieu de débarquement ont de nouveau souligné les limites d’un droit de la mer peinant à imposer à un État clairement défini d’ouvrir ses ports pour accueillir les rescapés. La décision de laisser les passagers de l’Ocean Viking débarquer à Toulon est également significative. Elle signe certes leur prise en charge temporaire par la France, mais n’emporte pas, du moins dans un premier temps, leur admission sur le territoire français (au sens juridique). Ce dont le ministre de l’Intérieur ne s’est d’ailleurs fait faute de souligner).

      Cette situation permet alors de mettre en exergue l’une des singularités de la conception juridique du territoire, notamment en ce qui concerne la situation des étrangers. Les zones d’attente en sont une claire illustration.
      Les « zones d’attente »

      Les aéroports ont été les premiers espaces où sont apparues ces zones considérées comme ne relevant pas juridiquement du territoire de l’État les accueillant. Le film Le Terminal, dans lequel Tom Hanks campait un iranien ayant vécu plusieurs années à Roissy – où il s’est d’ailleurs éteint ce samedi 12 novembre –, avait en 2004 porté à la connaissance du grand public cette situation.

      En France, les « zones internationales », initialement nimbées d’un flou quant à leur fondement juridique et au sein desquelles les autorités prétendaient par conséquent n’y être pas assujetties au respect des règles protectrices des droits humains, ont cédé la place aux « zones d’attente » à la faveur de la loi du 6 juillet 1992).

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      À une situation d’exclusion – du moins, alléguée par les autorités – du droit, s’est alors substitué un régime d’exception : les personnes y étant maintenues n’étaient toujours pas considérées comme ayant pénétré juridiquement le territoire français.

      N’étant plus – prétendument – placées « hors du droit » comme l’étaient les zones internationales, les zones d’attente n’en restaient pas moins « hors sol ». L’une des conséquences en est que les demandes d’asile qui y sont le cas échéant déposées relèvent alors de l’« asile à la frontière ». Elles sont par conséquent soumises à un régime, notamment procédural, beaucoup moins favorable aux demandeurs (Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile CESEDA, Titre V, article L.350-1 à L.352-9).
      La « fiction juridique »

      La « fiction juridique » que constituent les zones d’attente s’étend désormais entre autres aux gares ferroviaires ouvertes au trafic international, aux ports ou à proximité du lieu de débarquement (CESEDA, article L.341-1). Ces « enclaves » au sein du territoire, autour d’une centaine actuellement, peuvent par ailleurs inclure, y compris « à proximité de la gare, du port ou de l’aéroport ou à proximité du lieu de débarquement, un ou plusieurs lieux d’hébergement assurant aux étrangers concernés des prestations de type hôtelier » (CESEDA, article L.341-6).

      Tel est le cas de la zone d’attente créée par le préfet du Var par le biais d’un arrêté, à la suite de l’accueil de l’Ocean Viking.

      « pour la période du 11 novembre au 6 décembre 2022 inclus, une zone d’attente temporaire d’attente sur l’emprise de la base navale de Toulon et sur celle du Village Vacances CCAS EDF 1654, avenue des Arbanais 83400 Hyères (Giens) ».

      Accueillis dans ce Village Vacances dont les « prestations de type hôtelier » ne semblent aucunement correspondre à la caricature opportunément dépeinte par certains, les rescapés demeurent, juridiquement, aux frontières de la France.
      Aux portes du territoire français

      Ils ne se situent pas pour autant, de ce fait, dans une zone de non-droit : placés sous le contrôle des autorités françaises, ils doivent se voir garantir par elles le respect de leurs droits humains. Aux portes du territoire français, les migrantes et migrants secourus par l’Ocean Viking n’en relèvent pas moins de la « juridiction » française comme le rappelle la Cour européenne des droits de l’Homme. La France est ainsi tenue d’observer ses obligations, notamment au regard des conditions de leur maintien contraint au sein de la zone.

      Une partie des rescapés recouvreront leur liberté en étant admis à entrer juridiquement sur le territoire de la France. Tel est le cas des mineurs non accompagnés, dont il est annoncé qu’ils seront pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance.

      Tel est également le cas de ceux qui auront été autorisés à déposer une demande d’asile sur le territoire français et se seront vus, à cette fin, délivrer un visa de régularisation de huit jours. Parmi eux, la plupart (175) devraient être acheminés vers des États européens qui se seraient engagés à les accueillir, vraisemblablement afin que soient examinées leurs demandes de protection internationale. Expression d’une solidarité européenne a minima dont il faudra cependant voir cependant les suites.

      À lire aussi : Podcast : « Quand la science se met au service de l’humanitaire », le Comité international de la Croix-Rouge

      Pour tous les autres enfin, ceux à qui un refus d’entrer sur le territoire français aura été notifié et qui ne seront pris en charge par aucun autre État, le ministre de l’Intérieur précise qu’ils seront contraints de quitter la zone d’attente vers une destination qui demeure cependant encore pour le moins incertaine. Ceux-là auront alors été accueillis (très) temporairement par la France mais seront considérés comme n’ayant jamais pénétré sur le territoire français.

      https://theconversation.com/comment-laffaire-de-locean-viking-revele-lambigu-te-des-zones-datte

    • « Migrants » de l’« Ocean Viking », « réfugiés » d’Ukraine : quelle différence ?

      Comme elle l’a fait après l’invasion russe, la France doit mener une véritable politique d’accueil pour les passagers de l’« Ocean Viking » : permettre l’accès inconditionnel au territoire sans présupposé lié à leur origine ni distinction entre « migrants » et « réfugiés ».

      Après trois semaines d’errance en Méditerranée, la France a accepté « à titre exceptionnel » de laisser débarquer le 11 novembre, à Toulon, les 234 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking. Tout en précisant, par la voix du ministre de l’Intérieur, que ces « migrants ne pourront pas sortir du centre administratif de Toulon » où ils seront placés et qu’« ils ne sont donc pas légalement sur le territoire national » : à cette fin, une zone d’attente a été créée en urgence où les personnes, qui ont toutes déposé une demande d’asile, sont donc enfermées sous surveillance policière.

      Pour la suite, il est prévu que la France ne gardera sur son sol, s’ils remplissent les conditions de l’asile, qu’environ un tiers des passagers du bateau. Les autres seront autoritairement relocalisés dans neuf pays de l’Union européenne. Voilà donc « l’accueil » réservé à des femmes, des enfants et des hommes qui, après avoir fui la guerre, la misère, l’oppression, et pour beaucoup subi les sévices et la violence du parcours migratoire, ont enduré une longue attente en mer aux conséquences notoirement néfastes sur la santé mentale et physique. L’accueil réservé par la France à ceux qu’elle désigne comme « migrants ».
      Pas de répartition entre les Etats européens

      Rappelons-nous : il y a moins d’un an, au mois de février, lorsque plusieurs millions d’Ukrainiens fuyant l’invasion russe se sont précipités aux frontières des pays européens, la France a su mettre en place en quelques jours un dispositif à la hauteur de cette situation imprévue. Pas question de compter : au ministère de l’Intérieur, on expliquait que « dès lors que des besoins seront exprimés, la France y répondra », tandis que le ministre lui-même annonçait que « nous pouvons aujourd’hui accueillir jusqu’à 100 000 personnes réfugiées sur le territoire national ». Pas question non plus de répartition entre les Etats européens : « Ce sont des personnes libres, elles vont là où elles veulent », affirmait la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur. Et pour celles qui choisiraient de rester en France, un statut provisoire de protection immédiate était prévu, donnant droit au travail, à un logement et à un accompagnement social. On n’a pas manqué de se féliciter de l’élan formidable de solidarité et d’humanité dont la France avait fait preuve à l’égard des réfugiés, à l’instar de ses voisins européens.

      Une solidarité et une humanité qui semblent aujourd’hui oubliées. Parce qu’ils sont d’emblée qualifiés de « migrants », les passagers de l’Ocean Viking, sans qu’on ne connaisse rien de leurs situations individuelles, sont traités comme des suspects, qu’on enferme, qu’on trie et qu’on s’apprête, pour ceux qui ne seront pas expulsés, à « relocaliser » ailleurs, au gré d’accords entre gouvernements, sans considération de leurs aspirations et de leurs besoins.

      On entend déjà les arguments qui justifieraient cette différence de traitement : les « réfugiés » ukrainiens sont les victimes d’un conflit bien identifié, dans le contexte d’une partie de bras de fer qui oppose l’Europe occidentale aux tentations hégémoniques du voisin russe. Des « migrants » de l’Ocean Viking,on prétend ne pas savoir grand-chose ; mais on sait au moins qu’ils et elles viennent de pays que fuient, depuis des années, d’innombrables cohortes d’exilés victimes des désordres du monde – guerres, corruption, spoliations, famines, désertification et autres dérèglements environnementaux – dont les Européens feignent d’ignorer les conséquences sur les mouvements migratoires mondiaux, pour décréter que ce ne sont pas de « vrais » réfugiés.
      Une hospitalité à deux vitesses

      Mais cette hospitalité à deux vitesses est aussi la marque du racisme sous-jacent qui imprègne la politique migratoire de la France, comme celle de l’Union européenne. Exprimée sans retenue par un élu d’extrême droite sur les bancs de l’Assemblée à propos de l’Ocean Viking (« qu’il(s) retourne(nt) en Afrique ! »), elle s’est manifestée dès les premiers jours de l’exode ukrainien, quand un tri des exilés s’est opéré, sur la base de la nationalité ou de la couleur de peau, à la frontière polonaise, au point que la haut-commissaire aux droits de l’homme de l’Onu s’était dite « alarmée par les informations crédibles et vérifiées faisant état de discrimination, de violence et de xénophobie à l’encontre de ressortissants de pays tiers qui tentent de fuir le conflit en Ukraine ». Le traitement réservé depuis des années en France aux exilés privés d’abri et de nourriture, harcelés et pourchassés par la police, dans le Calaisis comme en région parisienne, à la frontière italienne ou dans le Pays basque est la traduction quotidienne de cette politique xénophobe et raciste.

      Au-delà d’une indispensable réorganisation du secours en mer afin que les passagers d’un navire en détresse puissent être débarqués sans délai dans un lieu sûr, comme le prescrit le droit international, l’épisode de l’Ocean Viking nous rappelle, une fois de plus, la nécessité d’une véritable politique d’accueil, dont l’exemple ukrainien montre qu’elle est possible. Elle doit être fondée sur l’accès inconditionnel au territoire de toutes celles et ceux qui demandent protection aux frontières de la France et de l’Europe, sans présupposé lié à leur origine ni distinction arbitraire entre « migrants » et « réfugiés », la mise à l’écart de tout dispositif coercitif au profit d’un examen attentif et de la prise en charge de leurs besoins, et le respect du choix par les personnes de leur terre d’asile, à l’exclusion de toute répartition imposée.

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/migrants-de-locean-viking-refugies-dukraine-quelle-difference-20221115_WG

    • « Ocean Viking » : les fourberies de Darmanin

      Le ministre de l’intérieur a annoncé, mardi 15 novembre, que 44 des 234 rescapés de l’« Ocean Viking » seront expulsés dans leur pays d’origine, tandis que la majorité des autres seront relocalisés dans des pays de l’Union européenne. La #fable de la générosité française s’est rapidement fracassée sur l’obsession de Gérald Darmanin de ne pas donner de prises au RN, en acceptant de secourir, mais pas d’accueillir.

      « Expulsés », « relocalisés » : ces termes affreux pour désigner des personnes résument à eux seuls le vrai visage de l’« accueil » que la France réserve aux rescapés de l’Ocean Viking, bien loin d’une certaine idée que l’on pourrait se faire de l’hospitalité due à des hommes, des femmes et des enfants ayant risqué de se noyer en mer pour fuir leur pays. On avait bien compris depuis ses premières interventions que Gérald Darmanin avait agi contraint et forcé. Que les autorités françaises, par la voix blanche du ministre de l’intérieur, avaient fini, à contrecœur, par autoriser les passagers à débarquer à Toulon, dans le Var, vendredi 11 novembre, uniquement parce qu’elles estimaient ne pouvoir faire autrement : à la suite du refus de la nouvelle présidente post-fasciste du conseil italien, Giorgia Meloni, de voir le bateau affrété par SOS Méditerranée accoster sur les rives italiennes, les exilés étaient à bout de forces, et risquaient de mourir.

      Après avoir failli dans le sauvetage de 27 exilés dans la Manche en 2021 (les secours français ayant attendu leur entrée dans les eaux anglaises sans envoyer de moyen de sauvetage, selon les récentes révélations du Monde), la France cette fois-ci ne les laisserait pas périr en mer. Mais elle s’en tiendrait là, sans accueil digne de son nom, ni élan de solidarité. Et ce qui a été vécu par Paris comme un affront ne resterait pas sans conséquences. Tels étaient les messages passés après la décision à reculons d’accepter le débarquement.

      Le courroux français s’est logiquement abattu sur la dirigeante italienne, qui, contrevenant au droit international, a bloqué l’accès de ses côtes au navire humanitaire. Mais il y a fort à parier que la discorde diplomatique finisse par se dissiper. Et qu’en définitive les exilés eux-mêmes soient les principales victimes des mesures de rétorsion françaises.

      Mardi 15 novembre, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, le ministre de l’intérieur a ainsi annoncé, telle une victoire, qu’au moins 44 des 234 rescapés seraient renvoyés dans leur pays d’origine. « Dès que leur état de santé » le permettra, bien sûr, et alors même que l’étude des dossiers est toujours en cours, selon son propre aveu devant les députés. « J’ai déjà pris […] contact dès [lundi] avec mes homologues étrangers pour que ces reconduites à la frontière puissent se faire dans les temps les plus courts possible », s’est-il réjoui, espérant que ces expulsions seront réalisées d’ici à la fermeture de la zone d’attente « dans une vingtaine de jours ». Sachant que le ministre avait d’emblée assuré que les deux tiers des rescapés acceptés sur le sol européen feraient l’objet d’une « relocalisation » vers onze autres pays de l’UE, le nombre de celles et ceux autorisés à demander l’asile en France sera réduit à la portion congrue.

      Gérald Darmanin, en vérité, avait commencé ses calculs d’apothicaire avant même le débarquement, en déclarant que la France suspendait immédiatement l’accueil pourtant prévu de longue date de 3 500 réfugiés se trouvant en Italie et qu’il renforcerait les contrôles à la frontière franco-italienne.

      Entre les « expulsés », les « relocalisés » et les « refusés », la générosité de la France s’est vite muée en démonstration de force à visée politique sur le dos de personnes qui, venues du Bangladesh, d’Érythrée, de Syrie, d’Égypte, du Pakistan, du Mali, du Soudan et de Guinée, ont enduré les dangers de l’exil dans l’espoir d’une vie meilleure. Personne, faut-il le rappeler, ne quitte ses proches, son pays, sa maison, son travail, ses habitudes, avec pour seul bagage quelques billets en poche, pour le plaisir de traverser la Méditerranée. Politiques, économiques, sociaux, climatiques, leurs motifs sont le plus souvent solides. Sauvés en mer par l’équipage de l’Ocean Viking, les 234 rescapés ont attendu trois semaines, dans des conditions indicibles, la possibilité de poser un pied sur la terre ferme. La Commission européenne avait rappelé la nécessité, la veille du feu vert français, de les laisser accoster, soulignant « l’obligation légale de sauver les vies humaines en mer, claire et sans équivoque, quelles que soient les circonstances ».
      « Secourir et reconduire »

      Guidé par sa volonté de répondre à l’extrême droite qui l’accuse de « complaisance », le ministre de l’intérieur a en réalité anticipé son attente, telle qu’exprimée par une élue RN du Var, Laure Lavalette, dans l’hémicycle mardi, l’appelant à « secourir et reconduire ».

      Le cadre répressif de cet accueil à la française a été posé au moment même où les rescapés sont arrivés en France. Leur débarquement s’est fait sous escorte militaire, à l’abri des regards des élus, des ONG et des journalistes, dans le port militaire de Toulon (lire ici et là). Ils ont aussitôt été placés dans une « zone d’attente » créée pour l’occasion, dans un ancien « village de vacances » de la presqu’île de Giens, c’est-à-dire dans un lieu d’enfermement. Ainsi l’« accueil » a commencé sous de sombres auspices.

      Placés sous la garde de deux cents policiers et gendarmes, les 234 rescapés ont été soumis, sans attendre d’être remis des épreuves physiques et psychologiques de la traversée, à un examen de leur situation administrative. Pratiquée dans l’urgence, la procédure, dans ce cadre « exceptionnel », est particulièrement expéditive : les agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), instance dépendant du ministère de l’intérieur, sont tenus de délivrer un avis « sous 48 heures » sur le « caractère manifestement fondé ou non de la demande d’asile », charge ensuite au ministère de l’intérieur de poursuivre – ou non – l’examen du dossier. Comment peut-on humainement demander à des personnes venant de passer trois semaines d’errance en mer, et qui ont pour la plupart subi des chocs de toute sorte, de retracer posément – et de manière convaincante, c’est-à-dire preuves à l’appui – les raisons qui leur permettraient d’obtenir une protection de la France ? L’urgence, l’arbitraire et le respect de la dignité des personnes font rarement bon ménage.

      Habilitée à intervenir en zone d’attente, l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers, qui a pu se rendre sur place, estime dans un communiqué publié mardi que les rescapés de l’Ocean Viking sont « victimes de violation de leurs droits fondamentaux » dans cette zone d’attente. Ses constats sont « alarmants ». Elle regrette tout d’abord le manque de temps de repos à l’arrivée et une prise en charge médicale passablement insuffisante. Elle évoque ensuite de nombreuses violations du droit d’asile dans le déroulement des entretiens administrés par l’Ofpra, liées notamment au manque d’interprétariat, à l’absence de confidentialité des échanges et à l’absence d’accès à un avocat ou à une association de défense des droits.

      Mais discuter de la légalité des procédures n’est, à cette heure, pas la priorité du ministre de l’intérieur dont l’objectif est de montrer qu’il prend garde à ce que la France ne soit pas « submergée » par quelques dizaines d’exilés. Sa célérité à annoncer, le plus vite possible, et avant même la fin de la procédure, qu’une partie des rescapés seront expulsés, en est la preuve.

      Quand on se souvient de l’accueil réservé aux Afghans fuyant le régime des talibans ou aux Ukrainiens fuyant la guerre, on observe pourtant qu’il existe d’autres manières d’assurer que les droits des demandeurs d’asile soient respectés. Pour ne prendre que cet exemple, il y a un an, lorsque plusieurs millions d’Ukrainiens ont fui l’invasion russe, « la France a su mettre en place en quelques jours un dispositif à la hauteur de cette situation imprévue », souligne Claire Rodier, membre du Groupe d’information et de soutien des immigré·es (Gisti) et du réseau Migreurop, dans une tribune à Libération. Et de rappeler les déclarations du ministre de l’intérieur lui-même assurant alors que « nous pouvons aujourd’hui accueillir jusqu’à 100 000 personnes réfugiées sur le territoire national ».

      Précédent également notable, la France, en 2018, avait refusé d’accueillir l’Aquarius, soumis au même sort que l’Ocean Viking. À l’époque, Emmanuel Macron n’avait pas voulu céder et le navire avait fait route vers Valence, en Espagne, suscitant la honte d’une partie des soutiens du président de la République. L’accueil alors réservé aux exilés par les autorités et la société civile espagnole avait été d’une tout autre teneur. Le pays s’était largement mobilisé, dans un grand élan de solidarité, pour que les rescapés trouvent le repos et le réconfort nécessaires après les épreuves de l’exil.

      Il faut se souvenir enfin de l’émoi national légitimement suscité, il n’y a pas si longtemps, par les propos racistes du député RN Grégoire de Fournas, en réponse à une intervention de l’élu LFI Carlos Martens Bilongo concernant… l’Ocean Viking. « Qu’il(s) retourne(nt) en Afrique », avait-il déclaré (lire notre article), sans que l’on sache trop s’il s’adressait à l’élu noir ou aux exilés en perdition. Alors qu’il est désormais établi qu’au moins quarante-quatre d’entre eux seront renvoyés dans leur pays d’origine, vraisemblablement, pour certains, sur le continent africain, il sera intéressant de constater à quel niveau notre pays, et plus seulement nos gouvernants, placera son curseur d’indignation.

      https://www.mediapart.fr/journal/international/161122/ocean-viking-les-fourberies-de-darmanin

    • Ocean Viking : 123 « #refus_d'entrée » en France et une grande confusion

      Une semaine après leur débarquement à Toulon, une soixantaine de migrants de l’Ocean Viking a été autorisée à demander l’asile. En parallèle de la procédure d’asile aux frontière, des décisions judiciaires ont conduit à la libération d’une centaine de rescapés retenus dans la « zone d’attente », désormais libres d’entrer sur le sol français. Une vingtaine de mineurs, ont quant à eux, pris la fuite vers d’autres pays.

      Sur les 234 rescapés du navire humanitaire Ocean Viking débarqués à Toulon il y a une semaine, 123 migrants se sont vu opposer un refus à leur demande d’asile, soit plus de la moitié, a indiqué vendredi 18 novembre le ministère de l’Intérieur. Ils font donc « l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire » français, soit plus de la moitié, a ajouté le ministère de l’Intérieur.

      Hormis les 44 passagers reconnus mineurs et placés dès les premiers jours sous la protection de l’Aide sociale à l’enfance, les 189 adultes restant avaient été retenus dans une « zone d’attente » fermée, qui n’est pas considérée comme appartenant au territoire français. Un espace créé dans le cadre de la procédure d’asile à la frontière, pour l’occasion, dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens, à proximité de Toulon.

      Ils sont tous passés cette semaine entre les mains de la police et des agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), pour des contrôles de sécurité et de premiers entretiens effectués depuis cette « zone d’attente », afin d’évaluer si leur demande d’asile était fondée.

      Au terme de ces entretiens, l’Ofpra a émis « 66 avis favorables » a précisé Charles-Edouard Minet, sous-directeur du conseil juridique et du contentieux du ministère de l’Intérieur. Cette soixantaine de migrants a donc été autorisée à déposer des demandes d’asile, et autorisée à entrer sur le territoire français. Ils ont été conduits vers des centres d’hébergement du Var, dont des #Centres_d'accueil_et_d'évaluation_des_situations (#CAES).

      Parmi eux, certains seront « relocalisés » vers les onze pays européens (dont l’Allemagne, la Finlande ou le Portugal) qui s’étaient portés volontaires pour se répartir les efforts et les accueillir après leur débarquement en France.

      Des avis défavorables mais pas d’expulsions massives et immédiates

      Les « 123 avis défavorables », quant à eux, ne sont pas pour autant immédiatement expulsables. Le gouvernement français veut aller vite, le ministre de l’Intérieur Gerald Darmanina ayant affirmé dès le 15 novembre que ces personnes « seront reconduites [vers leur pays d’origine] dès que leur état de santé » le permettra. Mais les refoulements pourraient prendre un temps plus long, car ces procédures nécessitent que « la personne soit détentrice d’un passeport et d’un laissez-passer consulaire ». Or ce document doit être délivré par le pays d’origine et cela prend du temps car certains pays tardent à l’octroyer, avait expliqué l’Anafé, association de défense des étrangers aux frontières, à InfoMigrants il y a quelques jours.

      D’autre part, des décisions de justice sont venues chambouler le calendrier annoncé par l’Etat. La cour d’appel d’Aix-en-Provence a annoncé vendredi 18 novembre avoir validé la remise en liberté de la « quasi-totalité, voire la totalité » des 108 rescapés qui réclamaient de ne plus être enfermés dans la « zone d’attente ».

      En cause, des vices de procédure dans les dossiers montés dans l’urgence et de juges dépassés par la centaine de cas à traiter. Les juges des libertés et de la détention (JLD) qui doivent en France, se prononcer pour ou contre un maintien en « zone d’attente » après 4 jours d’enfermement, ont estimé dans une majorité de cas que les migrants devaient être libérés. Le parquet a fait appel de ces décisions, mais la cour d’appel a donné raison au JLD pour une non-prolongation du maintien dans la « zone d’attente » dans la plupart des cas.

      Certains des migrants libérés avaient reçu ces fameux avis défavorables de l’Ofpra, notifiés par le ministère de l’Intérieur. D’après l’Anafé, ils devraient néamoins pouvoir désormais « faire une demande d’asile une fois entrés sur le territoire ».

      Douze migrants en « zone d’attente »

      Après ces annonces de libération, le gouvernement a estimé dans l’après-midi, vendredi, que seuls douze migrants se trouvaient toujours dans ce centre fermé vendredi après-midi. A ce flou s’ajoutent « les personnes libérées mais revenues volontairement » sur le site « pour bénéficier » de l’hébergement, a reconnu, désabusé, le représentant du ministère.

      Ces complications judiciaires et administratives ont perturbé nombre des rescapés, parmi lesquels se trouvent des personnes fragiles, dont la santé nécessite des soins psychologiques après les 20 jours d’errance en mer sur l’Ocean Viking qui ont précédé cette arrivée chaotique en France. Et ce d’autant que les autorités et les associations présentes dans la « zone d’attente » ont été confrontés à une pénurie de traducteurs dès les premiers jours.

      A tel point que le préfet du Var, Evence Richard, a alerté le 16 novembre sur le manque d’interprètes, estimant qu’il s’agissait d’"un vrai handicap" pour s’occuper des migrants. « Dès lors, les personnes ne sont pas en mesure de comprendre la procédure de maintien en zone d’attente, leurs droits, la procédure spécifique d’asile à la frontière et ses tenants et aboutissants », avait aussi fait savoir l’Anafé dans un communiqué publié mardi.

      Des scènes de grande confusion

      En effet, la presse locale du Var et d’autres journaux français ont rapporté des scènes de grande confusion lors des audiences devant le tribunal de Toulon et la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avec des « interprètes anglais pour des Pakistanais, une femme de ménage du commissariat de Toulon réquisitionnée comme interprète de langue arabe, des entretiens confidentiels tenus dans les couloirs », comme en atteste dans les colonnes du Monde, la bâtonnière du barreau varois, Sophie Caïs, présente le 15 novembre au tribunal.

      Dans une autre audience, décrite par un journaliste du quotidien français ce même jour, une mère Malienne « fond en larmes lorsque la juge lui demande ce qu’elle a à ajouter aux débats. Sa petite fille de 6 ans, qui, depuis le début de la matinée ne la quitte pas d’un pouce, ouvre de grands yeux ».

      Des mineurs en fugue

      En parallèle, parmi les 44 rescapés mineurs logés hors de la « zone d’attente », dans un hôtel où ils étaient pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance, 26 ont quitté les lieux de leur propre chef, a-t-on appris le 17 novembre dans un communiqué du Conseil départemental du Var.

      Les mineurs qui ont fugué « ont eu un comportement exemplaire, ils sont partis en nous remerciant », a insisté Christophe Paquette, directeur général adjoint en charge des solidarités au conseil départemental du Var. D’après lui, ces jeunes, dont une majorité d’Erythréens, « ont des objectifs précis dans des pays d’Europe du nord » tels que les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Allemagne, où ils souhaitent rejoindre de la famille ou des proches.

      Les services sociaux ont « essayé de les en dissuader », mais « notre mission est de les protéger et pas de les retenir », a ajouté M. Paquette.

      http://www.infomigrants.net/fr/post/44849/ocean-viking--123-refus-dentree-en-france-et-une-grande-confusion

    • Ocean Viking : le #Conseil_d’État rejette l’#appel demandant qu’il soit mis fin à la zone temporaire d’attente où certains passagers ont été maintenus

      Le juge des référés du Conseil d’État rejette aujourd’hui la demande de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) de mettre fin à la zone d’attente temporaire dans laquelle ont été placés certains passagers de l’Ocean Viking. L’association requérante, avec le soutien d’autres associations, contestait les conditions de création de la zone d’attente et estimait que les personnes qui y avaient été placées n’avaient pas accès à leurs droits. Le juge relève les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé. Il observe également que les demandes d’asile à la frontière ont pu être examinées, 66 personnes étant finalement autorisées à entrer sur le territoire pour déposer leur demande d’asile, et que les procédures judiciaires ont suivi leur cours, la prolongation du maintien de la détention n’ayant d’ailleurs pas été autorisée pour la très grande majorité des intéressés. Enfin, il constate qu’à la date de son intervention, les associations et les avocats peuvent accéder à la zone d’attente et y exercer leurs missions dans des conditions n’appelant pas, en l’état de l’instruction, que soient prises des mesures en urgence.

      Pour des raisons humanitaires, le navire « Ocean Viking » qui transportait 234 personnes provenant de différents pays, a été autorisé par les autorités françaises à accoster au port de la base militaire navale de Toulon. Le préfet a alors créé une zone d’attente temporaire incluant cette base militaire et un village vacances à Hyères, où ont été transférées, dès le 11 novembre dernier au soir, les 189 personnes placées en zone d’attente.

      L’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (ANAFE) a saisi en urgence le juge des référés du tribunal administratif de Toulon pour demander la suspension de l’exécution de l’arrêté préfectoral créant la zone d’attente temporaire, estimant que les personnes placées en zone d’attente se trouvaient illégalement privées de liberté et n’avaient pas un accès effectif à leurs droits. Après le rejet de son recours mercredi 16 novembre, l’association a saisi le juge des référé-liberté du Conseil d’État, qui peut, en appel, ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale en cas d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Ce dernier confirme aujourd’hui la décision du tribunal administratif et rejette l’appel de l’association.

      Le juge relève les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé (nombre important de personnes, nécessité d’une prise en charge médicale urgente, considérations d’ordre public), ce qui a conduit à la création par le préfet d’une zone d’attente temporaire sur le fondement des dispositions issues d’une loi du 16 juin 20111, en cas d’arrivée d’un groupe de personnes en dehors d’une « zone de passage frontalier ». Il observe également que les droits de ces étrangers n’ont pas, de ce seul fait, été entravés de façon grave et manifestement illégale. L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a pu mener les entretiens légalement prévus, ce qui a conduit à ce que 66 personnes soient autorisées à entrer sur le territoire pour présenter une demande d’asile, et le juge des libertés et de la détention puis la cour d’appel d’Aix-en-Provence se sont prononcés sur la prolongation des mesures de détention, qui a d’ailleurs été refusée dans la grande majorité d’entre eux.

      S’agissant de l’exercice des droits au sein même de la zone, le juge des référés, qui se prononce en fonction de la situation de fait à la date à laquelle son ordonnance est rendue, note qu’à l’exception des quelques heures durant lesquelles les personnes étaient présentes sur la base militaire, l’association requérante a pu accéder au village vacances sans entrave. Si la persistance de difficultés a pu être signalée à l’audience, elles ne sont pas d’une gravité telle qu’elles rendraient nécessaires une intervention du juge des référés. Le ministère de l’intérieur a par ailleurs transmis à l’association, une liste actualisée des 16 personnes encore maintenues, afin de lui faciliter l’exercice de sa mission d’assistance, comme il s’y était engagé lors de l’audience au Conseil d’État qui a eu lieu hier.

      Les avocats ont également accès au village vacances. Là encore, des insuffisances ont pu être constatées dans les premiers jours de mise en place de la zone d’attente. Mais des mesures ont été progressivement mises en œuvre pour tenter d’y répondre, notamment la mise à disposition de deux locaux dédiés et un renforcement de l’accès aux réseaux téléphoniques et internet.

      A la date de l’ordonnance et en l’absence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, il n’y avait donc pas lieu pour le juge des référés de prononcer des mesures en urgence.

      1 Loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

      https://www.conseil-etat.fr/actualites/ocean-viking-le-conseil-d-etat-rejette-l-appel-demandant-qu-il-soit-mis
      #justice

    • Le Conseil d’État valide l’accueil au rabais des rescapés de l’Ocean Viking

      Des associations contestaient la création de la zone d’attente dans laquelle ont été enfermés les exilés après leur débarquement dans le port militaire de Toulon. Bien qu’elle ait reconnu « des insuffisances », la plus haute juridiction administrative a donné raison au ministère de l’intérieur, invoquant des « circonstances exceptionnelles ».

      LeLe Conseil d’État a donné son blanc-seing à la manière dont le ministère de l’intérieur a géré l’arrivée en France des rescapés de l’Ocean Viking. Débarqués le 11 novembre à Toulon après vingt jours d’errance en mer, à la suite du refus de l’Italie de les faire accoster sur ses côtes, les migrants avaient immédiatement été placés dans une zone d’attente temporaire à Hyères (Var), sur la presqu’île de Giens. Gerald Darmanin avait en effet décidé de secourir, sans accueillir. 

      Ce lieu d’enfermement, créé spécialement pour y maintenir les exilés avant qu’ils ne soient autorisés à demander l’asile, est-il légal ? L’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers) posait cette fois la question au Conseil d’État, après avoir été déboutée une première fois par le tribunal administratif de Toulon. 

      La plus haute juridiction administrative du pays a rejeté samedi 19 novembre la demande de l’association qui souhaitait la fermeture de la zone d’attente au motif que les droits des exilés n’étaient pas respectés. Le Conseil d’État reconnaît que « des insuffisances ont pu être constatées dans les premiers jours de mise en place de la zone d’attente ». Mais il invoque « les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé ». 

      L’audience s’est déroulée vendredi matin, sous les moulures et lustres recouverts d’or du Conseil d’État. Si 189 personnes étaient initialement maintenues dans la zone d’attente le 11 novembre, elles étaient de moins en moins nombreuses au fil de la journée, assurait d’entrée de jeu le représentant du ministère de l’intérieur, Charles-Édouard Minet. « Vous êtes en train de me dire qu’à la fin de la journée, il peut n’y avoir plus personne en zone d’attente », s’était étonnée la magistrate qui présidait l’audience. « Absolument, oui », confirmait Charles-Édouard Minet. Rires dans la salle.

      Symbole de la grande improvisation ministérielle, la situation évoluait d’heure en heure, à mesure que la justice mettait fin au maintien prolongé des exilés en zone d’attente. Au moment de l’audience, entre 12 et 16 personnes étaient encore enfermées. Deux heures plus tard, la cour d’appel d’Aix-en-Provence décidait de remettre en liberté la « quasi-totalité voire la totalité » des personnes retenues dans la zone d’attente d’Hyères. Moins de dix personnes y seraient encore retenues. 

      Devant le Conseil d’État, s’est tenue une passe d’armes entre les avocats défendant les droits des étrangers et le ministère de l’intérieur. Son représentant a assuré que l’accès aux droits des personnes retenues était garanti. Ce qu’a fermement contesté le camp adverse : « Il existe un vrai hiatus entre ce que dit l’administration et ce qu’ont constaté les associations : les avocats ne peuvent pas accéder comme il le devrait à la zone d’attente », a affirmé Cédric Uzan-Sarano, conseil du Groupe d’information et de soutien des immigrés (GISTI). 

      En creux, les représentants des associations dénoncent les choix très politiques de Gerald Darmanin. Plutôt que de soumettre les rescapés de l’Ocean Viking à la procédure classique de demande d’asile, la décision a été prise de les priver de leurs libertés dès leur débarquement sur le port militaire de Toulon. « Tous les dysfonctionnements constatés trouvent leur source dans l’idée de l’administration de créer cette zone d’urgence, exceptionnelle et dérogatoire », tance Patrice Spinosi, avocat de l’Anafé. 

      Les associations reprochent aux autorités le choix de « s’être placées toutes seules dans une situation d’urgence » en créant la zone d’attente temporaire. La procédure étant « exceptionnelle » et « mise en œuvre dans la précipitation », « il ne peut en découler que des atteintes aux droits des étrangers », ont attaqué leurs avocats.

      Dans sa décision, le Conseil d’État considère toutefois que la création de la zone d’attente est conforme à la loi. Il met en avant « le nombre important de personnes, la nécessité d’une prise en charge médicale urgente et des considérations d’ordre public ». L’autorité administrative note par ailleurs qu’au moment où elle statue, « à l’exception des quelques heures durant lesquelles les personnes étaient présentes sur la base militaire, [l’Anafé] a pu accéder au village vacances sans entrave ».

      À écouter les arguments de l’Anafé, les dysfonctionnements sont pourtant nombreux et persistants. À peine remis d’un périple éprouvant, les exilés ont dû sitôt expliquer les persécutions qu’ils ont fuies aux agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra).

      « Puisque les entretiens avec l’Ofpra sont devenus l’alpha et l’oméga des procédures d’asile, il est indispensable que les personnes soient préparées par des avocats », juge Gérard Sadik, représentant de La Cimade, une association qui vient en aide aux réfugiés. 
      Plus de la moitié des rescapés interdits d’entrée sur le territoire

      L’Anafé estime que les conditions sur la zone d’attente d’Hyères ne permettent pas aux associations et aux avocats d’accomplir leur mission d’accompagnement. Si les autorités ont mis à disposition deux locaux, ceux-ci « ne sont équipés ni d’ordinateur, ni de fax, ni d’Internet pour transmettre les recours », indique l’Anafé. Par ailleurs, ces pièces, très vite remplacées par des tentes, empêchent la confidentialité des échanges, pourtant imposée par la loi. 

      Laure Palun, directrice de l’Anafé, est la seule personne présente ce jour-là à l’audience à avoir visité la zone d’attente. « Quand on passait à côté des tentes, on pouvait entendre et voir tout ce qui se passait à l’intérieur, décrit-t-elle. Un moment, on a même vu un exilé quasiment couché sur une table pour comprendre ce que l’interprète lui disait au téléphone. »

      Le Conseil d’État a préféré relever les efforts réalisés par les autorités pour corriger les « insuffisances constatées dans les premiers jours » : « Des mesures ont été progressivement mises en œuvre [...], notamment la mise à disposition de deux locaux dédiés et un renforcement de l’accès aux réseaux téléphoniques et Internet. »

      Conséquence de cette procédure d’asile au rabais et des obstacles rencontrés par les exilés dans l’exercice de leurs droits ? Charles-Édouard Minet a annoncé que plus de la moitié des rescapés du navire de SOS Méditerranée, soit cent vingt-trois personnes, ont fait « l’objet d’un refus d’entrée sur le territoire » français, à la suite de leur entretien individuel avec l’Ofpra. Pour l’heure, le ministère de l’intérieur n’a pas précisé s’ils allaient être expulsés. 

      D’un ton solennel, Patrice Spinosi avait résumé l’enjeu de l’audience : « La décision que vous allez rendre sera la première sur les zones d’attente exceptionnelles. Il existe un risque évident que cette situation se reproduise, [...] l’ordonnance que vous rendrez définira une grille de lecture sur ce que peut faire ou pas l’administration. » L’administration n’aura donc pas à modifier ses procédures.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/191122/le-conseil-d-etat-valide-l-accueil-au-rabais-des-rescapes-de-l-ocean-vikin

    • Ocean Viking : « On vient d’assister à un #fiasco »

      Laure Palun, directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) énumère les multiples entraves aux droits des personnes recueillies par l’Ocean Viking et déplore que le choix de l’enfermement l’ait emporté sur celui de l’accueil.

      La France avait annoncé vouloir faire vite. Se prononcer « très rapidement » sur le sort des passager·ères de l’Ocean Viking tout juste débarqué·es sur la base navale de Toulon (Var), après que le gouvernement italien d’extrême droite avait refusé (en toute illégalité) que le navire accoste sur son territoire. Ces personnes étaient maintenues dans une zone d’attente temporaire créée dans un centre de vacances de la presqu’île de Giens.

      Un lieu de privation de liberté qui, juridiquement, n’est pas considéré comme étant sur le sol français. Dans les quarante-huit heures, avaient estimé les autorités, l’ensemble des rescapé·es auraient vu examiner la pertinence de leur demande d’asile par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). Une procédure accélérée qui n’a pas vocation à attribuer une protection internationale, mais à examiner si la demande d’entrée sur le territoire au titre de l’asile est manifestement fondée ou pas.

      Rien, toutefois, ne s’est passé comme prévu puisque la quasi-totalité des rescapé·es, à l’heure où nous écrivons ces lignes, ont pu être libéré·es au terme de différentes décisions judiciaires (1). Pour Laure Palun, directrice de l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étranger·ères (Anafé) – la principale association autorisée à intervenir en zone d’attente –, « on vient d’assister à un fiasco ». Tant pour l’administration que pour les demandeur·ses d’asile.

      En créant une zone d’attente temporaire, les autorités ont choisi d’accueillir les passager·ères de l’Ocean Viking sous le régime de la privation de liberté. Que dit la méthode ?

      Laure Palun : Que nous aurions pu faire le choix de l’accueil, plutôt que celui de l’enfermement ! La zone d’attente est un lieu privatif de liberté où la procédure d’asile « classique » ne s’applique pas. La procédure d’asile à la frontière permet de procéder à une sorte de tri en amont et de dire si, oui ou non, la personne peut entrer sur le territoire pour y demander la protection internationale. Mais l’expérience nous le montre : le tri, les opérations de filtrage et les procédures d’asile à la frontière, ça ne fonctionne pas si on veut être en conformité avec le respect des droits.

      La situation des personnes sauvées par l’Ocean Viking et enfermées dans la zone d’attente de Toulon nous a donné raison puisque la plupart d’entre elles ont été libérées et prises en charge pour entrer dans le dispositif national d’accueil (DNA). Soit parce qu’elles avaient été admises sur le territoire au titre de l’asile, soit parce qu’elles avaient fait l’objet d’une décision judiciaire allant dans le sens d’une libération.

      Lire aussi > Ocean Viking, un naufrage diplomatique

      On vient d’assister à un fiasco. Non seulement du côté des autorités – considérant l’échec de leur stratégie politique –, mais aussi pour les personnes maintenues, qui auraient pu se reposer et entrer dans le processus d’asile classique sur le territoire une semaine plus tôt si elles n’avaient pas été privées de liberté. Au lieu de ça, elles ont été fichées, fouillées et interrogées à de multiples reprises.

      Le point positif, c’est que les mineur·es non accompagné·es – qui ont bien été placé·es quelques heures en zone d’attente, contrairement à ce qu’a déclaré le ministère de l’Intérieur – ont été libéré·es le premier jour pour être pris·es en charge. Le Ceseda [code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile] prévoit en effet que les mineur·es non accompagné·es qui souhaitent demander l’asile ne peuvent être maintenu·es en zone d’attente « sauf exception ». Mais c’est généralement le cas.

      Le 16 novembre, devant l’Assemblée nationale, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait pourtant annoncé l’expulsion de 44 personnes d’ici à la fin de la période de maintien en zone d’attente.

      Une telle déclaration pose de vraies questions sur le non-respect de la convention de Genève, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, et du droit national : il n’est pas possible de dire une chose pareille, alors même que les personnes sont en cours de procédure d’asile. Même si les demandes de ces personnes ont été rejetées, il existe des recours, et ça fait partie de la procédure !

      Le droit à un recours effectif est inscrit dans la Convention européenne des droits de l’homme et a même été consacré concernant la procédure d’asile à la frontière en 2007 (2). Mais Gérald Darmanin a aussi dit qu’il avait pris contact, la veille [le 15 novembre, NDLR], avec les autorités des pays d’origine.

      Non seulement les décisions de l’Ofpra n’avaient pas encore été notifiées aux demandeur·ses d’asile à ce moment-là – et quand bien même ça aurait été le cas, elles étaient encore susceptibles de recours –, mais il s’agit encore d’une atteinte grave et manifeste à la convention de Genève. Contacter les pays d’origine de personnes en cours de demande d’asile, a fortiori pour envisager leur expulsion, ajoute des risques de persécutions en cas de retour dans le pays.

      Dans un communiqué, vous avez dénoncé de « nombreuses violations des droits » au sein de la zone d’attente, notamment dans le cadre des procédures d’asile. Lesquelles ?

      À leur arrivée, les personnes ont été prises en charge d’un point de vue humanitaire. À ce sujet, l’Anafé n’a pas de commentaire à faire. En revanche, elles n’ont reçu quasiment aucune information sur la procédure, sur leurs droits, et elles ne comprenaient souvent pas ce qui se passait. En dehors de la procédure d’asile, il n’y avait pratiquement aucun interprétariat.

      Cela a représenté une immense difficulté sur le terrain, où les conditions n’étaient globalement pas réunies pour permettre l’exercice effectif des droits. Notamment le droit de contacter un·e avocat·e, une association de défense des droits, ou un·e médecin. Et ni les associations ni les avocat·es n’ont pu accéder à un local pour s’entretenir en toute confidentialité avec les demandeur·ses d’asile.

      Concernant les demandes d’asile, ça a été très compliqué. Déjà, à l’ordinaire, les procédures à la frontière se tiennent dans des délais très courts. Mais, ici, l’Ofpra a dû mener environ 80 entretiens par jour. Pour les officier·ères de protection, cela paraît très lourd. Et ça signifie aussi que les personnes ont dû passer à la chaîne, moins de 48 heures après leur débarquement, pour répondre à des questions portant sur les risques de persécution dans leurs pays.

      Les entretiens ont été organisés sans confidentialité, dans des bungalows ou des tentes au travers desquels on entendait ce qui se disait, avec des interprètes par téléphone – ce que nous dénonçons mais qui est classique en zone d’attente. Ces entretiens déterminants devraient être menés dans des conditions sereines et nécessitent de pouvoir se préparer. Cela n’a pas été le cas, et on le constate : 123 dossiers de demande d’entrée sur le territoire ont été rejetés.

      Le Conseil d’État a pourtant estimé que, malgré « les circonstances exceptionnelles dans lesquelles l’accueil de ces personnes a dû être organisé », les droits des personnes placées en zone d’attente n’avaient pas été « entravés de façon grave et manifestement illégale ».

      Nous avons déposé une requête devant le tribunal administratif de Toulon pour demander la suspension de l’arrêt de création de la zone d’attente, mais cela n’a pas abouti. L’Anafé a fait appel et porté l’affaire devant le Conseil d’État. Ce dernier n’a pas fait droit à notre demande, constatant que des améliorations avaient été apportées par l’administration avant la clôture de l’instruction, tout en reconnaissant que des manquements avaient été commis.

      Le Conseil d’État a néanmoins rappelé que les droits des personnes devaient être respectés, et notamment l’accès à un avocat, à une association de défense des droits et à la communication avec l’extérieur. Par exemple, ce n’est qu’après l’audience que l’administration a consenti à transmettre à l’Anafé le nom des personnes encore enfermées (16 au moment de l’audience) pour qu’elle puisse exercer sa mission de défense des droits.

      Il faut se rappeler que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui ont été enfermés après avoir vécu l’enfer.

      Ces entraves affectent notre liberté d’aider autrui à titre humanitaire découlant du principe de fraternité, consacré en 2018 par le Conseil constitutionnel, mais surtout les droits fondamentaux des personnes que l’Anafé accompagne.

      Il est à déplorer que les autorités ne respectent pas les droits des personnes qu’elle enferme et qu’il faille, à chaque fois, passer par la voie contentieuse pour que des petites améliorations, au cas par cas, soient apportées. Le respect des droits fondamentaux n’est pas une option, et l’Anafé continuera d’y veiller.

      Avec le projet de réforme européenne sur la migration et l’asile, qui prévoit notamment de systématiser la privation de liberté aux frontières européennes le temps de procéder aux opérations de « filtrage », faut-il s’attendre à ce que de telles situations se reproduisent et, en l’absence de condamnation du Conseil d’État, à des expulsions qui seraient, cette fois, effectives ?

      La situation vécue ces derniers jours démontre une nouvelle fois que la procédure d’asile à la frontière et la zone d’attente ne permettent pas de respecter les droits des personnes qui se présentent aux frontières européennes. C’est ce que l’Anafé dénonce depuis de nombreuses années et c’est ce qu’elle a mis en avant dans le cadre de sa campagne « Fermons les zones d’attente ».

      La perspective d’étendre cette pratique au niveau européen dans le cadre du pacte sur la migration et l’asile est un fiasco politique annoncé. Surtout, cela aura pour conséquence des violations des droits fondamentaux des personnes exilées. Au-delà du camouflet pour le gouvernement français, il faut se rappeler que ce sont des hommes, des femmes et des enfants qui ont été enfermés, et pour certains qui le sont encore, dans la zone d’attente de Toulon, après avoir vécu l’enfer – camps libyens, traversée de la Méditerranée…

      Le filtrage, le tri et l’enfermement ne peuvent pas être la réponse européenne à de telles situations de détresse, sauf à ajouter de la souffrance et de la violence pour ces personnes.

      En représailles de l’action de l’Italie, le gouvernement a annoncé le déploiement de 500 policiers et gendarmes supplémentaires à la frontière franco-italienne, où l’Anafé constate quotidiennement des atteintes aux droits. À quoi vous attendez-vous dans les prochains jours, sur le terrain ?

      Nous sommes évidemment très mobilisés. Actuellement, nous constatons toujours la même situation que celle que nous dénonçons depuis de nombreuses années. Conséquence de ces contrôles, les personnes prennent de plus en plus de risques et, pour certaines, mettent leur vie en péril… Preuve en est l’accident qui a eu lieu ce week-end à la frontière franco-italienne haute (3).

      Il me paraît surtout important de rappeler que ces effectifs sont mobilisés dans le cadre du rétablissement du contrôle aux frontières intérieures, mesure ininterrompue depuis sept ans par les autorités françaises. Or ces renouvellements [tous les six mois, NDLR] sont contraires au droit européen et au code frontières Schengen. Il est temps que ça s’arrête.

      (1) Soit parce qu’elles ont reçu une autorisation d’entrée sur le territoire au titre de l’asile, soit parce que les juges des libertés et de la détention (JLD) ont refusé la prolongation du maintien en zone d’attente, soit parce que les JLD se sont dessaisis par manque de temps pour traiter les dossiers dans le délai imparti, soit en cour d’appel.

      (2) À la suite d’une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme, la France a modifié sa législation (Gebremedhin contre France, req n° 25389/05, 26 avril 2007).

      (3) Un jeune Guinéen est tombé dans un ravin dans les environs de Montgenèvre (Hautes-Alpes), ce dimanche 20 novembre.

      https://www.politis.fr/articles/2022/11/ocean-viking-on-vient-dassister-a-un-fiasco-45077

    • « Ocean Viking », autopsie d’un « accueil » à la française

      La sagesse, comme la simple humanité, aurait dû conduire à offrir aux rescapés de l’Ocean Viking des conditions d’accueil propres à leur permettre de se reposer de leurs épreuves et d’envisager dans le calme leur avenir. Au contraire, outre qu’elle a prolongé les souffrances qu’ils avaient subies, la précipitation des autorités à mettre en place un dispositif exceptionnel de détention a été la source d’une multitude de dysfonctionnements, d’illégalités et de violations des droits : un résultat dont personne ne sort gagnant.
      Dix jours après le débarquement à Toulon des 234 rescapés de l’Ocean Viking – et malgré les annonces du ministre de l’Intérieur affirmant que tous ceux qui ne seraient pas admis à demander l’asile en France seraient expulsés et les deux tiers des autres « relocalisés » dans d’autres pays de l’Union européenne – 230 étaient présents et libres de circuler sur le territoire français, y compris ceux qui n’avaient pas été autorisés à y accéder. Ce bilan, qui constitue à l’évidence un camouflet pour le gouvernement, met en évidence une autre réalité : le sinistre système des « zones d’attente », consistant à enfermer toutes les personnes qui se présentent aux frontières en demandant protection à la France, est intrinsèquement porteur de violations des droits humains. Principale association pouvant accéder aux zones d’attente, l’Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) le rappelle depuis 2016 : « Il est illusoire de penser pouvoir [y] enfermer des personnes dans le respect de leurs droits et de leur dignité. » Ce qui s’est passé dans la zone d’attente créée à Toulon en est la démonstration implacable.

      Une gestion calamiteuse

      Pour évaluer a posteriori la gestion calamiteuse du débarquement de ces naufragés, il faut rembobiner le film : poussé dans ses ultimes retranchements mais y voyant aussi l’occasion de se poser en donneur de leçon à l’Italie, le gouvernement annonce le 10 novembre sa décision d’autoriser « à titre tout à fait exceptionnel » l’Ocean Viking à rejoindre un port français pour y débarquer les hommes, femmes et enfants qui, ayant échappé à l’enfer libyen, puis à une mort certaine, ont passé trois semaines d’errance à son bord. « Il fallait que nous prenions une décision. Et on l’a fait en toute humanité », a conclu le ministre de l’Intérieur.

      Preuve que les considérations humanitaires avancées n’ont rien à voir avec une décision prise à contrecœur, le ministre l’assortit aussitôt de la suspension « à effet immédiat » de la relocalisation promise en France de 3 500 exilés actuellement sur le sol italien : sous couvert de solidarité européenne, c’est bien le marchandage du non-accueil qui constitue l’unique boussole de cette politique du mistigri.

      Preuve, encore, que la situation de ces naufragé·e·s pèse de peu de poids dans « l’accueil » qui leur est réservé, une zone d’attente temporaire est créée, incluant la base navale de Toulon, où leur débarquement, le 11 novembre, est caché, militarisé, « sécurisé ». Alors même qu’ils ont tous expressément demandé l’asile, ils sont ensuite enfermés dans un « village vacances », à l’exception de 44 mineurs isolés, sous la garde de 300 policiers et gendarmes, le ministre prenant soin de préciser que, pour autant « ils ne sont pas légalement sur le territoire national ».

      La suspicion tenant lieu de compassion pour ces rescapés, débutent dès le 12 novembre, dans des conditions indignes et avec un interprétariat déficient, des auditions à la chaîne leur imposant de répéter inlassablement, aux policiers, puis aux agents de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), les récits des épreuves jalonnant leur parcours d’exil, récits sur la base desquels doivent être triés ceux dont la demande d’asile pourra d’emblée apparaître « manifestement infondée », les empêchant de fouler le sol de cette République qui prétendait, quelques heures auparavant, faire la preuve de son humanité.

      Seuls 66 de ces demandeurs d’asile échappent à ce couperet, si bien que les juges des libertés et de la détention du tribunal de Toulon sont alors chargés d’examiner la question du maintien dans la zone d’attente, au-delà du délai initial de quatre jours, de plus de 130 d’entre eux. La juridiction se révélant rapidement embolisée par cet afflux de dossiers, les juges se trouvent dans l’impossibilité de statuer dans les vingt-quatre heures de leur saisine comme l’impose la loi et ils n’ont d’autre solution que d’ordonner la mise en liberté de la plupart.

      En deux jours 124 dossiers examinés au pas de charge

      Le calvaire pourrait s’arrêter là pour ces exilé·e·s perdu·e·s dans les arcanes de procédures incompréhensibles, mais le procureur de la République de Toulon fait immédiatement appel de toutes les ordonnances de mise en liberté, sans doute soucieux que les annonces du ministre ne soient pas contredites par des libérations en masse. C’est alors la cour d’appel d’Aix-en-Provence – qui est soumise au train d’enfer imposé par la gestion de l’accueil à la française : entre le 16 et le 17 novembre 124 dossiers sont examinés au pas de charge pendant que les personnes concernées sont parquées dans un hall de la cour d’appel jusque tard dans la nuit. Mais les faits étant têtus et la loi sans ambiguïté, les juges d’appel confirment que leurs collègues de Toulon n’avaient pas d’autres choix que de prononcer les mises en liberté contestées. A l’issue de ce marathon, il ne reste, le 21 novembre, que quatre personnes en zone d’attente.

      « Tout ça pour ça » : ayant choisi la posture du gardien implacable des frontières qu’un instant de faiblesse humanitaire ne détourne pas de son cap, le gouvernement doit maintenant assumer d’avoir attenté à la dignité de ceux qu’il prétendait sauver et aggravé encore le sort qu’ils avaient subi. Il faudra bien qu’il tire les leçons de ce fiasco : la gestion policière et judiciaire de l’accueil qu’implique le placement en zone d’attente se révélant radicalement incompatible avec le respect des obligations internationales de la France, il n’y a pas d’autre solution – sauf à rejeter à la mer les prochains contingents d’hommes, de femmes et d’enfants en quête de protection – que de renoncer à toute forme d’enfermement à la frontière.

      Signataires : Avocats pour la défense des droits des étrangers (Adde) Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers (Anafé) Association pour la reconnaissance des droits des personnes homosexuelles et trans à l’immigration et au séjour (Ardhis) La Cimade, groupe d’information et de soutien des immigré·e·s (Gisti) La Ligue des Droits de l’homme (LDH) Syndicat des avocats de France (SAF) Syndicat de la magistrature (SM).

      https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/ocean-viking-autopsie-dun-accueil-a-la-francaise-20221127_B53JAB6K7BDGFKV

    • #Mineurs_non_accompagnés de l’« Ocean Viking » : « Un #hôtel, ça ne correspond pas aux besoins d’un gamin »

      Pour Violaine Husson, de la Cimade, la France, signataire de la convention des droits de l’enfant, contrevient à ses engagements en plaçant des mineurs dans des situations loin d’être adéquates.
      L’information a fuité par voie de presse jeudi : 26 des 44 mineurs arrivés en France à bord du bateau humanitaire Ocean Viking ont fugué de l’hôtel où ils étaient logés à Toulon. « Le département a vocation à mettre les mineurs en sécurité mais pas dans des geôles, on ne peut pas les maintenir de force dans un foyer. Ils peuvent fuguer et c’est ce que certains on fait. On ne peut pas les contraindre, il n’y a pas de mesures coercitives à leur égard », a assuré Jean-Louis Masson, le président du conseil départemental du Var. Parmi ces 26 mineurs se trouvaient une majorité d’Erythréens qui, selon Christophe Paquette, directeur général adjoint en charge des solidarités au conseil départemental du Var, « ne restent jamais » car « ils ont des objectifs précis dans des pays d’Europe du Nord » comme les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse ou encore l’Allemagne, où ils souhaitent rejoindre de la famille ou des proches. Les associations et les ONG, elles, pointent du doigt les conditions d’accueil et de prise en charge de ces jeunes, souvent inadaptées. Violaine Husson, responsable nationale Genre et Protections à la Cimade, répond à nos questions.

      Quelles sont les conditions de vie des mineurs étrangers non accompagnés, comme ceux de l’Ocean Viking, pris en charge dans des hôtels en France ?

      Il faut d’abord préciser une chose : la loi Taquet de février 2022 interdit le placement des mineurs non accompagnés dans des établissements hôteliers. Cela dit, il y a une exception : dans leur phase de mise à l’abri, en attendant l’entretien d’évaluation de leur minorité, il y a une possibilité de les placer à l’hôtel jusqu’à deux mois. C’est le cas pour cette quarantaine d’enfants, ça l’est aussi pour des centaines d’autres chaque année.

      Un hôtel, ça ne correspond pas aux besoins d’un gamin. Ils sont placés dans des chambres à plusieurs – en fonction des établissements, ils peuvent se retrouver à une deux ou trois personnes dans une chambre, voire plus –, ils ne parlent pas la même langue, ils n’ont pas la même religion… Il n’y a rien qui les relie vraiment. Par ailleurs, il n’y a pas de suivi social, personne ne vient les voir dans la journée pour leur demander si ça va ou ce qu’ils font. Il n’y a pas de jeux prévus, ils sont indépendants. Ce sont aussi souvent des hôtels miteux, pas chers, avec des toilettes et des salles de bains communes. C’est un quotidien qui est loin de l’idée que l’on se fait des mesures de protection de l’enfance en France.

      Ça peut expliquer pourquoi certains décident de quitter ces établissements ?

      Oui, il y a des enfants qui partent parce que les conditions ne vont pas du tout, elles ne sont pas adéquates. Certains ont dû tomber des nues. Dans certains hôtels, il n’y a pas que des mineurs, parfois ils peuvent être placés avec d’autres publics, des majeurs notamment. Ça les rend particulièrement vulnérables : ils sont des enfants étrangers isolés qui viennent d’arriver d’une traversée éprouvante et des personnes peuvent leur mettre la main dessus.

      La question des mineurs non accompagnés est souvent débattue, certaines personnalités politiques estiment qu’ils coûtent énormément d’argent, qu’ils seraient des délinquants. Qu’en est-il réellement selon vous ?

      En effet, on a parlé des mineurs non accompagnés de manière très négative : il y a la délinquance mais aussi le fait qu’ils mentiraient et qu’ils frauderaient, qu’ils coûteraient beaucoup à l’Aide sociale à l’enfance… Certains politiques ont même affirmé que 80 000 mineurs non accompagnés arriveraient en France chaque année. La réalité est toute autre : il y en a eu un peu plus de 9 000 en 2021. On est quand même loin du fantasme véhiculé.

      La protection de l’enfance est problématique aujourd’hui, il y a un véritable manque de moyen et de compétences, y compris pour les enfants français. Mais c’est bien plus simple de dire que c’est la faute des étrangers, même si leur proportion dans la prise en charge est dérisoire. Il y a cette injonction des politiques politiciennes de dire : le problème de l’Aide sociale à l’enfance, c’est les étrangers. Selon eux, ils mentent, ils fraudent, ils fuguent, ils ne sont pas mineurs ou ne sont pas vraiment isolés. Alors que le système de protection ne fait pas la différence entre les enfants français et étrangers.

      La France, comme d’autres pays, a signé la convention internationale des droits de l’enfant. Les démarches doivent donc être faites en fonction de l’intérêt supérieur de l’enfant. On voit bien que quand on les place à l’hôtel ou qu’on les suspecte de mentir sur leur âge parce qu’ils sont étrangers, ce n’est pas le cas.

      https://www.liberation.fr/societe/mineurs-non-accompagnes-de-locean-viking-un-hotel-ca-ne-correspond-pas-au
      #MNA #enfants #enfance

  • De l’incertitude scientifique à l’ignorance stratégique
    https://metropolitiques.eu/De-l-incertitude-scientifique-a-l-ignorance-strategique.html

    En l’absence de données, les incertitudes sur les risques sanitaires des pollutions industrielles restent fortes et sont utilisées par les firmes privées pour affirmer que leurs activités ne sont pas nocives. Gwenola Le Naour et Valentin Thomas analysent ici comment se maintient cette « ignorance scientifique » dans la vallée de la chimie lyonnaise. Le 10 mai 2022, une réunion publique est organisée à #Lyon pour présenter les résultats d’une enquête menée par des journalistes de France Télévisions sur #Terrains

    / Lyon, #pollution, #industrie, #Rhône-Alpes, santé, #risque

    #santé
    https://metropolitiques.eu/IMG/pdf/met_lenaour-thomas.pdf

  • Coronavirus : le régulateur européen approuve l’utilisation de vaccins anti-Covid pour les bébés dès six mois RTBF Belga - Théa Jacquet

    Le régulateur européen a annoncé mercredi avoir donné son feu vert à l’utilisation à partir de l’âge de six mois des vaccins anti-Covid de Pfizer et Moderna, les premiers sérums anti-Covid à être autorisés pour les moins de cinq ans dans l’UE.

    L’Agence européenne des médicaments (EMA) a en parallèle également recommandé d’autoriser un vaccin adapté de Moderna ciblant les sous-variants Omicron BA.4 et BA.5 en plus de la souche originale de SARS-CoV-2.

    L’EMA a « recommandé d’inclure l’utilisation chez les enfants âgés de 6 mois à 4 ans pour Comirnaty », de Pfizer, et « l’utilisation chez les enfants âgés de 6 mois à 5 ans pour Spikevax » , de Moderna, a déclaré le régulateur européen dans un communiqué. Les doses des deux vaccins dans ces nouvelles tranches d’âge plus jeunes seront plus faibles, a expliqué l’EMA.

    Chez les enfants de 6 mois à 4 ans, Comirnaty peut être administré en primo-vaccination en trois doses. Chez les enfants de 6 mois à 5 ans, Spikevax peut être administré en primo-vaccination en deux doses.

    Le comité des médicaments à usage humain (CHMP) a conclu que « les bénéfices de Comirnaty et de Spikevax chez les enfants âgés de 6 mois à 4 et 5 ans, respectivement, l’emportent sur les risques » , soulignant que les effets secondaires sont généralement légers ou modérés et améliorés quelques jours après la vaccination.

    Le vaccin adapté de Moderna ciblant les sous-variants Omicron BA.4 et BA.5 est quant à lui recommandé pour les adultes et les enfants à partir de 12 ans ayant déjà eu une primo-vaccination contre le Covid-19. Un vaccin Spikevax adapté ciblant Omicron BA.1 et la souche originale avait été autorisé en septembre.

    Omicron et ses sous-variants ont été dominants tout au long de 2022, prenant rapidement la place des variants précédents Alpha et Delta.

    #bénéfices #risques #bébés de véritables #cinglés #L'argent , le #fric #l'artiche , le #flouz le #jonc #la #fraiche #pharma #big_pharma #covid-19 #coronavirus #santé #pandémie #confinement #sante #covid #en_vedette #sars-cov-2 #vaccination

    Source : https://www.rtbf.be/article/coronavirus-le-regulateur-europeen-approuve-lutilisation-de-vaccins-anti-covid-

    • Enfin une bonne décision de l’#ue, l’#union_européenne !

      L’action des laboratoires pharmaceutiques va permettre aux locataires des Ephad, (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes), de ne plus se faire contaminer par leurs petits enfants.

      Enfin, ça, c’est la théorie, parce que ça n’a pas été testé.

      Au fait, les essais cliniques, ils ont été réalisé où ? En Afrique ?

      A lire, RTBF : Non, les essais cliniques du vaccin anti-Covid de Pfizer ne portaient pas sur la transmission du virus  : https://www.rtbf.be/article/non-les-essais-cliniques-du-vaccin-anti-covid-de-pfizer-ne-portaient-pas-sur-la

      #cobayes

    • Labos pharmaceutiques : Merck mis en examen pour « tromperie aggravée » dans le dossier Levothyrox Suisse - RTS - afp/sjaq
      médicaments, vaccins un marché captif comme un autre

      C’est un nouveau volet dans l’affaire du Levothyrox : la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck a été mise en examen pour « tromperie aggravée » dans le volet pénal du dossier du changement de formule de ce médicament conçu contre les problèmes de thyroïde.

      « Le président de Merck en France a été entendu » mardi au pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille, a annoncé le groupe dans un communiqué mercredi. A l’issue de cette audition, « la juge d’instruction a décidé de mettre la société Merck en examen pour tromperie aggravée ».


      Cette décision est liée aux « modalités d’information mises en place au moment de la transition de l’ancienne à la nouvelle formule en 2017 », pour ce médicament prescrit contre l’hypothyroïdie, ajoute l’entreprise. C’est une étape supplémentaire dans le feuilleton judiciaire opposant le laboratoire à de nombreux patients et patientes.

      Nombreux effets secondaires
      Au cœur de cette affaire : la nouvelle composition du Levothyrox, arrivée sur le marché français fin mars 2017. Cette nouvelle formule utilise toujours le même principe actif, la lévothyroxine, mais avec de nouveaux excipients, pour rendre sa composition plus stable.

      Or, des malades se sont plaints rapidement de nombreux effets secondaires : crampes, maux de tête, vertiges ou perte de cheveux. Au point qu’une pétition pour réclamer le retour de l’ancienne formule avait alors recueilli plus de 170’000 signatures (elle en compte même plus de 300’000 aujourd’hui).

      Une enquête pénale pour tromperie aggravée, homicide et blessures involontaires et mise en danger de la vie d’autrui avait été ouverte à Marseille en mars 2018, aboutissant à la mise en examen rendue publique mercredi.

      #confiance #tromperie #pharma #big_pharma #effets_indésirables #tromperie #charlatanisme #fric #excipients #effets_secondaires #médicaments

      La suite : https://www.rts.ch/info/sciences-tech/medecine/13476407-merck-mis-en-examen-pour-tromperie-aggravee-dans-le-dossier-levothyrox.

    • We Were Lied To About Vaccines ADMITS Pfizer!

      Soon after the COVID vaccines were made available to the public, we were told by the likes of Joe Biden, CDC Director Rochelle Walensky and Rachel Maddow that the vaccines prevented infection and stopped transmission. Yet recently, during a recent hearing in front of the European Parliament, Pfizer’s President of International Developed Markets Janine Small admitted that the company never tested the company’s vaccine for transmission. Her excuse? The company had to move at the “speed of science” to get the vaccine to market.

      https://www.youtube.com/watch?v=QeyHfwCshPk

  • La farsa del confine

    In Alta Val Susa, là dove molti percorrono le piste da sci di Claviere o d’estate passeggiano tra i boschi, altre persone aspettano il favore della notte per passare il confine che divide l’Italia dalla Francia. Qualcuno sfida la luce e si camuffa tra i turisti. Ma tutti rischiano la vita nel tentativo di scappare dagli occhi attenti della polizia francese. Per i pochi fortunati che riescono a passare, tanti altri, almeno una volta, vengono respinti indietro, verso l’Italia. Il limbo della frontiera è fatto di attesa e paura per chi vuole raggiungere parenti e amici in altri Paesi europei, oppure scappa ancora in cerca di diritti. È nel muro invisibile tra Italia e Francia che si ripete da anni la farsa del confine. “Limbo - Le vite sospese di chi si fa migrante” è un podcast scritto da Silvia Baldetti e Luca Rondi. È prodotto da Engim Internazionale in collaborazione con Altreconomia nell’ambito di SEMI - Storie, Educazione, Migrazioni e Impegno, finanziato dall’Unione Europea, attraverso la regione Piemonte nel contesto del progetto Mindchangers – Regions and Youth for Planet and People. I contenuti non riflettono necessariamente le posizioni dell’Unione Europea e di chi è intervenuto nel podcast come ospite. Hanno collaborato Francesca Prandi e Daniela Pizzuto. Il montaggio è a cura di Border Radio con la collaborazione di Silvia Baldetti. Mix, master e composizione colonna di Raja Scudella.La sigla è di Federico Sgarzi.

    https://open.spotify.com/episode/25UgHDMVRJU9EeUZyWKWDA?si=259a80a8603c42bf

    #Val_de_Suse #Italie #France #migrations #asile #réfugiés #frontière_sud-alpine #frontières #Claviere #Montgenèvre #Oulx #Diaconia_Valdese #rifugio_Massi #PAF #gardes-frontière #Briançon #Hautes-Alpes #refoulements #Fréjus #refus_d'entrée #push-backs
    #podcast #audio #militarisation_des_frontières #farce #risques #décès #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #contrôles_systématiques_aux_frontières

    Min. 23’18 : on cite la base de données sur les mort·es aux frontières alpines que Sarah Bachellerie et moi-même avons compilé à l’occasion de la contre-enquête pour Blessing :
    https://www.borderforensics.org/fr/investigations/la-mort-de-blessing-matthew-une-contre-enquete-sur-la-violence-aux-

  • Nous, les exilés (sur Briançon et la situation dans les #Hautes-Alpes)

    –-> série : Là où se cristallisent les questions d’aujourd’hui

    #Didier_Fassin (interviewé aux Terrasses solidaires, où il exerce bénévolement en tant que médecin et est présent en tant que chercheur) :
    (à retranscrire :-))

    –-

    Didier Fassin :

    « Des visages fatigués, épuisés. Des regards qui contiennent presque toujours au moins une lueur d’espoir. Malgré les épreuves déjà traversées. Elles et ils … sont environ 80 millions. 80 millions, soit un peu plus d’1% de la population mondiale. Eux, ce sont les exilés d’aujourd’hui. Dans un monde sous haute tension, personne n’est à l’abri. Vous, moi, nous serons peut-être les exilés de demain. En attendant, là maintenant : comment accueillir ces personnes qui arrivent dans nos régions ? Quelle hospitalité sommes-nous prêts à leur réserver ? Quels dispositifs établir aux frontières ? Et faut-il craindre le fameux appel d’air ? Ces questions, nous allons les déplier en altitude, du côté de Briançon, là où des exilés traversent la montagne au péril de leur vie. »

    Avec Isabelle Lorre (la coordinatrice du programme « migrations frontière transalpine » à Médecins du Monde sur Briançon), Sylvain Eymard (gestionnaire de l’association « Les Terrasses solidaires »), Didier Fassin (anthropologue, sociologue et médecin français. Il est professeur à l’Institute for Advanced Study de Princeton et directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales à Paris), Jean Gaboriau (l’un des responsables de « Refuges solidaires »), Stéphanie Besson (cofondatrice du mouvement citoyens « Tous migrants » et autrice de « Trouver refuge : histoires vécues par-delà les frontières » chez Glénat), Agnès Antoine ( membre de “Tous migrants”), deux gendarmes et quelques exilés.

    https://www.rtbf.be/auvio/detail_passe-montagne-la-ou-se-cristallisent-les-questions-d-aujourd-hui?id=291

    #podcast #audio #asile #migrations #réfugiés #montagne #Alpes #Briançon #hospitalité #Briançonnais #Hautes-Alpes #Terrasses_solidaires #militarisation_de_la_frontière #risques #chasse_à_l'homme #chutes #traque #tiers-lieu #santé #blessures #efficacité #non-efficacité #spectacle #Didier_Fassin #spectacularisation #performance #inhumanité #inhumanité_institutionnalisée #inhumanité_d'Etat

    ping @_kg_

  • Human Impacts
    https://camilo-mora.github.io/Diseases

    Carte interactive des répercussions des conséquences du changement climatique (feux, inondation, etc…) sur les #maladies_infectieuses.

    #climat #santé

    Via :
    58 % des maladies infectieuses humaines sont à risque d’aggravation en raison du changement climatique ; #cartographie des risques basée sur l’examen de 77 000 études - Citizen4Science
    https://citizen4science.org/58-des-maladies-infectieuses-humaines-sont-a-risque-daggravation-en

  • « Tant qu’on sera dans un système capitaliste, il y aura du #patriarcat » – Entretien avec #Haude_Rivoal

    Haude Rivoal est l’autrice d’une enquête sociologique publiée en 2021 aux éditions La Dispute, La fabrique des masculinités au travail. Par un travail de terrain de plusieurs années au sein d’une entreprise de distribution de produits frais de 15 000 salariés, la sociologue cherche à comprendre comment se forgent les identités masculines au travail, dans un milieu professionnel qui se précarise (vite) et se féminise (lentement). Les travailleurs, majoritairement ouvriers, sont soumis comme dans tous les secteurs à l’intensification, à la rationalisation et à la flexibilisation du travail. Leur réponse aux injonctions du capitalisme et à la précarisation de leur statut, c’est entre autres un renforcement des pratiques viriles : solidarité accrue entre hommes, exclusion subtile (ou non) des femmes, déni de la souffrance… Pour s’adapter pleinement aux exigences du capitalisme et du patriarcat, il leur faut non seulement être de bons travailleurs, productifs, engagés et disciplinés, mais aussi des “hommes virils mais pas machos”. Pour éviter la mise à l’écart, adopter de nouveaux codes de masculinité est donc nécessaire – mais laborieux. Dans cette étude passionnante, Haude Rivoal met en lumière les mécanismes de la fabrique des masculinités au travail, au croisement des facteurs de genre, de classe et de race.

    Entretien par Eugénie P.

    Ton hypothèse de départ est originale, elle va à rebours des postulats féministes habituels : au lieu d’étudier ce qui freine les femmes au travail, tu préfères analyser comment les hommes gardent leur hégémonie au travail « malgré la déstabilisation des identités masculines au et par le travail ». Pourquoi as-tu choisi ce point de départ ?

    J’étais en contrat Cifre [contrat de thèse où le ou la doctorant.e est embauché.e par une entreprise qui bénéficie également de ses recherches, ndlr] dans l’entreprise où j’ai fait cette enquête. J’avais commencé à étudier les femmes, je voulais voir comment elles s’intégraient, trouvaient des stratégies pour s’adapter dans un univers masculin à 80%. Ce que je découvrais sur le terrain était assez similaire à toutes les enquêtes que j’avais pu lire : c’était les mêmes stratégies d’adaptation ou d’autocensure. J’ai été embauchée pour travailler sur l’égalité professionnelle, mais je n’arrivais pas à faire mon métier correctement, parce que je rencontrais beaucoup de résistances de la part de l’entreprise et de la part des hommes. Et comme je ne comprenais pas pourquoi on m’avait embauchée, je me suis dit que ça serait intéressant de poser la question des résistances des hommes, sachant que ce n’est pas beaucoup étudié par la littérature sociologique. J’ai changé un peu de sujet après le début de ma thèse, et c’est au moment où est sortie la traduction française des travaux de Raewyn Connell [Masculinités. Enjeux sociaux de l’hégémonie, Paris, Éditions Amsterdam, 2014, ndlr] : cet ouvrage m’a ouvert un espace intellectuel complètement fou ! Ça m’a beaucoup intéressée et je me suis engouffrée dans la question des masculinités.

    C’est donc la difficulté à faire ton travail qui a renversé ton point de vue, en fait ?

    Oui, la difficulté à faire le travail pour lequel j’ai été embauchée, qui consistait à mettre en place des politiques d’égalité professionnelle : je me rendais compte que non seulement je n’avais pas les moyens de les mettre en place, mais qu’en plus, tout le monde s’en foutait. Et je me suis rendue compte aussi que l’homme qui m’avait embauchée pour ce projet était lui-même extrêmement sexiste, et ne voyait pas l’existence des inégalités hommes-femmes, donc je n’arrivais pas à comprendre pourquoi il m’avait embauchée. J’ai compris plus tard que les raisons de mon embauche était une défense de ses propres intérêts professionnels, j’y reviendrai. Ce n’est pas qu’il était aveugle face aux inégalités – il travaillait dans le transport routier depuis 40 ans, évidemment que les choses avaient changé -, mais j’avais beau lui expliquer que les discriminations étaient plus pernicieuses, il était persuadé qu’il ne restait plus grand-chose à faire sur l’égalité hommes-femmes.

    Comment se manifeste cette “déstabilisation des identités masculines au et par le travail”, cette supposée « crise de la virilité », que tu évoques au début de ton livre ?

    Je me suis rendue compte en interviewant les anciens et les nouveaux que rien qu’en l’espace d’une génération, il y avait beaucoup moins d’attachement à l’entreprise. Les jeunes générations avaient très vite compris que pour monter dans la hiérarchie, pour être mieux payé ou pour avoir plus de responsabilités, il ne suffisait pas juste d’être loyal à l’entreprise : il fallait la quitter et changer de boulot, tout simplement. Ce n’est pas du tout l’état d’esprit des anciens, dont beaucoup étaient des autodidactes qui avaient eu des carrières ascensionnelles. Il y avait énormément de turnover, et ça créait un sentiment d’instabilité permanent. Il n’y avait plus d’esprit de solidarité ; ils n’arrêtaient pas de dire “on est une grande famille” mais au final, l’esprit de famille ne parlait pas vraiment aux jeunes. Par ailleurs, dans les années 2010, une nouvelle activité a été introduite : la logistique. Il y a eu beaucoup d’enquêtes sur le sujet ! Beaucoup de médias ont parlé de l’activité logistique avec les préparateurs de commandes par exemple, une population majoritairement intérimaire, très précaire, qui ne reste pas longtemps… et du coup, beaucoup d’ouvriers qui avaient un espoir d’ascension sociale se sont retrouvés contrariés. Ce n’est pas exactement du déclassement, mais beaucoup se sont sentis coincés dans une précarité, et d’autant plus face à moi qui suis sociologue, ça faisait un peu violence parfois. Donc c’est à la fois le fait qu’il y ait beaucoup de turnover, et le fait qu’il n’y ait plus le même sentiment de famille et de protection que pouvait apporter l’entreprise, qui font qu’il y a une instabilité permanente pour ces hommes-là. Et comme on sait que l’identité des hommes se construit en grande partie par le travail, cette identité masculine était mise à mal : si elle ne se construit pas par le travail, par quoi elle se construit ?

    Ça interroge beaucoup le lien que tu évoques entre le capitalisme et le patriarcat : la précarisation et la flexibilisation du travail entraînent donc un renforcement des résistances des hommes ?

    Oui, carrément. Il y a beaucoup d’hommes, surtout dans les métiers ouvriers, qui tirent une certaine fierté du fait de faire un “métier d’hommes ». Et donc, face à la précarisation du travail, c’est un peu tout ce qu’il leur reste. Si on introduit des femmes dans ces métiers-là, qui peuvent faire le boulot dont ils étaient si fiers parce que précisément c’est un “métier d’hommes”, forcément ça crée des résistances très fortes. Quand l’identité des hommes est déstabilisée (soit par la précarisation du travail, soit par l’entrée des femmes), ça crée des résistances très fortes.

    Tu explores justement les différentes formes de résistance, qui mènent à des identités masculines diversifiées. L’injonction principale est difficile : il faut être un homme « masculin mais pas macho ». Ceux qui sont trop machos, un peu trop à l’ancienne, sont disqualifiés, et ceux qui sont pas assez masculins, pareil. C’est un équilibre très fin à tenir ! Quelles sont les incidences concrètes de ces disqualifications dans le travail, comment se retrouvent ces personnes-là dans le collectif ?

    Effectivement, il y a plein de manières d’être homme et il ne suffit pas d’être un homme pour être dominant, encore faut-il l’être “correctement”. Et ce “correctement” est presque impossible à atteindre, c’est vraiment un idéal assez difficile. Par exemple, on peut avoir des propos sexistes, mais quand c’est trop vulgaire, que ça va trop loin, là ça va être disqualifié, ça va être qualifié de “beauf”, et pire, ça va qualifier la personne de pas très sérieuse, de quelqu’un à qui on ne pourra pas trop faire confiance. L’incidence de cette disqualification, c’est que non seulement la personne sera un peu mise à l’écart, mais en plus, ce sera potentiellement quelqu’un à qui on ne donnera pas de responsabilités. Parce qu’un responsable doit être un meneur d’hommes, il faut qu’il soit une figure exemplaire, il doit pouvoir aller sur le terrain mais aussi avoir des qualités d’encadrement et des qualités intellectuelles. Donc un homme trop vulgaire, il va avoir une carrière qui ne va pas décoller, ou des promotions qui ne vont pas se faire.

    Quant à ceux qui ne sont “pas assez masculins », je n’en ai pas beaucoup rencontrés, ce qui est déjà une réponse en soi !

    Peut-on dire qu’il y a une “mise à l’écart” des travailleurs les moins qualifiés, qui n’ont pas intégré les nouveaux codes de la masculinité, au profit des cadres ?

    Non, c’est un phénomène que j’ai retrouvé aussi chez les cadres. Mais chez les cadres, le conflit est plutôt générationnel : il y avait les vieux autodidactes et les jeunes loups, et c’est la course à qui s’adapte le mieux aux transformations du monde du travail, qui vont extrêmement vite, en particulier dans la grande distribution. C’est une des raisons pour laquelle le directeur des RH m’a embauchée : il avait peur de ne pas être dans le coup ! L’égalité professionnelle était un sujet, non seulement parce qu’il y avait des obligations légales mais aussi parce que dans la société, ça commençait à bouger un peu à ce moment-là. Donc il s’est dit que c’est un sujet porteur et que potentiellement pour sa carrière à lui, ça pouvait être très bon. Ça explique qu’il y ait des cadres qui adhèrent à des projets d’entreprise avec lesquels ils ne sont pas forcément d’accord, mais juste parce qu’il y a un intérêt final un peu égoïste en termes d’évolution de carrière.

    On dit toujours que les jeunes générations sont plus ouvertes à l’égalité que les aînés, je pense que ce n’est pas tout à fait vrai ; les aînés ont à cœur de s’adapter, ils ont tellement peur d’être dépassés que parfois ils peuvent en faire plus que les jeunes. Et par ailleurs, les jeunes sont ouverts, par exemple sur l’équilibre vie pro et vie perso, mais il y a quand même des injonctions (qui, pour le coup, sont propres au travail) de présentéisme, de présentation de soi, d’un ethos viril à performer… qui font qu’ils sont dans des positions où ils n’ont pas d’autres choix que d’adopter certains comportements virilistes. Donc certes, ils sont plus pour l’égalité hommes-femmes, mais ils ne peuvent pas complètement l’incarner.

    L’une de tes hypothèses fortes, c’est que le patriarcat ingurgite et adapte à son avantage toutes les revendications sur la fin des discriminations pour se consolider. Est-ce qu’on peut progresser sur l’égalité professionnelle, et plus globalement les questions de genre, sans que le patriarcat s’en empare à son avantage ?

    Très clairement, tant qu’on sera dans un système capitaliste, on aura toujours du patriarcat, à mon sens. C’était une hypothèse, maintenant c’est une certitude ! J’ai fait une analogie avec l’ouvrage de Luc Boltanski et Ève Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, pour dire que la domination masculine est pareille que le capitalisme, elle trouve toujours des moyens de se renouveler. En particulier, elle est tellement bien imbriquée dans le système capitaliste qui fonctionne avec les mêmes valeurs virilistes (on associe encore majoritairement la virilité aux hommes), que les hommes partent avec des avantages compétitifs par rapport aux femmes. Donc quand les femmes arrivent dans des positions de pouvoir, est-ce que c’est une bonne nouvelle qu’elles deviennent “des hommes comme les autres”, c’est-à-dire avec des pratiques de pouvoir et de domination ? Je ne suis pas sûre. C’est “l’égalité élitiste” : des femmes arrivent à des positions de dirigeantes, mais ça ne change rien en dessous, ça ne change pas le système sur lequel ça fonctionne, à savoir : un système de domination, de hiérarchies et de jeux de pouvoir.

    Donc selon toi, l’imbrication entre patriarcat et capitalisme est indissociable ?

    Absolument, pour une simple et bonne raison : le capitalisme fonctionne sur une partie du travail gratuit qui est assuré par les femmes à la maison. Sans ce travail gratuit, le système capitaliste ne tiendrait pas. [à ce sujet, voir par exemple les travaux de Silvia Federici, Le capitalisme patriarcal, ndlr]

    Ça pose la question des politiques d’égalité professionnelle en entreprise : sans remise en question du système capitaliste, elles sont destinées à être seulement du vernis marketing ? On ne peut pas faire de vrais progrès ?

    Je pense que non. D’ailleurs, beaucoup de gens m’ont dit que mon livre était déprimant pour ça. Je pense que les politiques d’égalité professionnelle ne marchent pas car elles ne font pas sens sur le terrain. Les gens ne voient pas l’intérêt, parce qu’ils fonctionnent essentiellement d’un point de vue rationnel et économique (donc le but est de faire du profit, que l’entreprise tourne et qu’éventuellement des emplois se créent, etc), et ils ne voient pas l’intérêt d’investir sur ce sujet, surtout dans les milieux masculins car il n’y a pas suffisamment de femmes pour investir sur le sujet. J’ai beau leur dire que justement, s’il n’y a pas de femmes c’est que ça veut dire quelque chose, ils ont toujours des contre-arguments très “logiques” : par exemple la force physique. Ils ne vont pas permettre aux femmes de trouver une place égale sur les postes qui requièrent de la force physique. Quand les femmes sont intégrées et qu’elles trouvent une place valorisante, ce qui est le cas dans certains endroits, c’est parce qu’elles sont valorisées pour leurs qualités dites “féminines”, d’écoute, d’empathie, mais elles n’atteindront jamais l’égalité car précisément, elles sont valorisées pour leur différence. Le problème n’est pas la différence, ce sont les inégalités qui en résultent. On peut se dire que c’est super que tout le monde soit différent, mais on vit dans un monde où il y a une hiérarchie de ces différences. Ces qualités (écoute, empathie) sont moins valorisées dans le monde du travail que le leadership, l’endurance…

    Ça ne nous rassure pas sur les politiques d’égalité professionnelle…

    Si les politiques d’égalité professionnelle marchaient vraiment, on ne parlerait peut-être plus de ce sujet ! Je pense que les entreprises n’ont pas intérêt à ce qu’elles marchent, parce que ça fonctionne bien comme ça pour elles. Ca peut prendre des formes très concrètes, par exemple les RH disaient clairement en amont des recrutements : ”on prend pas de femmes parce que physiquement elles ne tiennent pas”, “les environnement d’hommes sont plus dangereux pour elles”, “la nuit c’est pas un environnement propice au travail des femmes”… Tu as beau répondre que les femmes travaillent la nuit aussi, les infirmières par exemple… Il y a un tas d’arguments qui montrent la construction sociale qui s’est faite autour de certains métiers, de certaines qualités professionnelles attendues, qu’il faudrait déconstruire – même si c’est très difficile à déconstruire. Ça montre toute une rhétorique capitaliste, mais aussi sexiste, qui explique une mise à l’écart des femmes.

    On a l’impression d’une progression linéaire des femmes dans le monde du travail, que ça avance doucement mais lentement, mais je constate que certains secteurs et certains métiers se déféminisent. On observe des retours en arrière dans certains endroits, ce qui légitime encore plus le fait de faire des enquêtes. Ce n’est pas juste un retour de bâton des vieux mormons qui veulent interdire l’avortement, il y aussi des choses plus insidieuses, des résistances diverses et variées.

    En plus, l’intensification du travail est un risque à long terme pour les femmes. Par exemple, il y a plus de femmes qui font des burnout. Ce n’est pas parce qu’elles sont plus fragiles psychologiquement, contrairement à ce qu’on dit, mais c’est parce qu’elles assurent des doubles journées, donc elles sont plus sujettes au burnout. Les transformations du monde du travail sont donc un risque avéré pour l’emploi des femmes, ne serait-ce que parce que par exemple, les agences d’intérim trient en amont les candidats en fonction de la cadence. Il faut redoubler de vigilance là-dessus.

    Tu analyses les types de masculinité qui se façonnent en fonction des facteurs de classe et de race. On voit que ce ne sont pas les mêmes types d’identités masculines, certaines sont dévalorisées. Quelles en sont les grandes différences ?

    Je ne vais pas faire de généralités car ça dépend beaucoup des milieux. Ce que Raewyn Connell appelle la “masculinité hégémonique”, au sens culturel et non quantitatif (assez peu d’hommes l’incarnent), qui prendrait les traits d’un homme blanc, d’âge moyen, hétérosexuel, de classe moyenne supérieure. Par rapport à ce modèle, il y a des masculinités “non-hégémoniques”, “subalternes”, qui forment une hiérarchie entre elles. Malgré le fait que ces masculinités soient plurielles, il y a une solidarité au sein du groupe des hommes par rapport au groupe des femmes, et à l’intérieur du groupe des hommes, il y a une hiérarchie entre eux. Les masculinités qu’on appelle subalternes sont plutôt les masculinités racisées ou homosexuelles. Elles s’expriment sous le contrôle de la masculinité hégémonique. Elles sont appréciées pour certaines qualités qu’elles peuvent avoir : j’ai pu voir que les ouvriers racisés étaient appréciés pour leur endurance, mais qu’ils étaient aussi assez craints pour leur “indiscipline” supposée. En fait, les personnes “dévalorisées” par rapport à la masculinité hégémonique sont appréciées pour leurs différences, mais on va craindre des défauts qui reposent sur des stéréotypes qu’on leur prête. Par exemple, les personnes racisées pour leur supposée indiscipline, les personnes des classes populaires pour leur supposé mode de vie tourné vers l’excès, les femmes pour leurs supposés crêpages de chignon entre elles…. C’est à double tranchant. Les qualités pour lesquelles elles sont valorisées sont précisément ce qui rend l’égalité impossible. Ces qualités qu’on valorise chez elles renforcent les stéréotypes féminins.

    Tu montres que le rapport au corps est central dans le travail des hommes : il faut s’entretenir mais aussi s’engager physiquement dans le travail, quitte à prendre des risques. Il y a une stratégie de déni de la souffrance, de sous-déclaration du stress chez les travailleurs : pour diminuer la souffrance physique et psychologique au travail, il faut changer les conditions de travail mais aussi changer le rapport des hommes à leur corps ?

    Je pensais que oui, mais je suis un peu revenue sur cette idée. Effectivement, il y plein d’études qui montrent que les hommes prennent plus de risques. C’est par exemple ce que décrit Christophe Dejours [psychiatre français spécialisé dans la santé au travail, ndlr] sur le “collectif de défense virile”, qui consiste à se jeter à corps perdu dans le travail pour anesthésier la peur ou la souffrance. Ce n’est pas forcément ce que j’ai observé dans mes enquêtes : en tout cas auprès des ouvriers (qui, pour le coup, avaient engagé leur corps assez fortement dans le travail), non seulement parce qu’ils ont bien conscience que toute une vie de travail ne pourra pas supporter les prises de risque inconsidérées, mais aussi parce qu’aujourd’hui la souffrance est beaucoup plus médiatisée. Cette médiatisation agit comme si elle donnait une autorisation d’exprimer sa souffrance, et c’est souvent un moyen d’entrée pour les syndicats pour l’amélioration des conditions de travail et de la santé au travail. Donc il y a un rapport beaucoup moins manichéen que ce qu’on prête aux hommes sur la prise de risques et le rapport au corps.

    En termes d’émotions, là c’est moins évident : on parle de plus en plus de burnout, mais à la force physique s’est substituée une injonction à la force mentale, à prendre sur soi. Et si ça ne va pas, on va faire en sorte que les individus s’adaptent au monde du travail, mais on ne va jamais faire en sorte que le monde du travail s’adapte au corps et à l’esprit des individus. On va donner des sièges ergonomiques, des ergosquelettes, on va créer des formations gestes et postures, on va embaucher des psychologues pour que les gens tiennent au travail, sans s’interroger sur ce qui initialement a causé ces souffrances.

    D’ailleurs, ce qui est paradoxal, c’est que l’entreprise va mettre en place tous ces outils, mais qu’elle va presque encourager les prises de risque, parce qu’il y a des primes de productivité ! Plus on va vite (donc plus on prend des risques), plus on gagne d’argent. C’est d’ailleurs les intérimaires qui ont le plus d’accidents du travail, déjà parce qu’ils sont moins formés, mais aussi parce qu’ils ont envie de se faire un max d’argent car ils savent très bien qu’ils ne vont pas rester longtemps.

    Donc ce sont les valeurs du capitalisme et ses incidences économiques (les primes par exemple) qui forgent ce rapport masculin au travail ?

    Oui, mais aussi parce qu’il y a une émulation collective. La masculinité est une pratique collective. Il y a une volonté de prouver qu’on est capable par rapport à son voisin, qu’on va dépasser la souffrance même si on est fatigué, et qu’on peut compter sur lui, etc. J’ai pu observer ça à la fois chez les cadres dans ce qu’on appelle les “boys clubs”, et sur le terrain dans des pratiques de renforcement viril.

    Tu n’as pas observé de solidarité entre les femmes ?

    Assez peu, et c’est particulièrement vrai dans les milieux masculins : la sororité est une solidarité entre femmes qui est très difficile à obtenir. J’en ai fait l’expérience en tant que chercheuse mais aussi en tant que femme. Je me suis dit que j’allais trouver une solidarité de genre qui m’aiderait à aller sur le terrain, mais en fait pas du tout. C’est parce que les femmes ont elles-mêmes intériorisé tout un tas de stéréotypes féminins. C’est ce que Danièle Kergoat appelle “le syllogisme des femmes”, qui dit : “toutes les femmes sont jalouses. Moi je ne suis pas jalouse. Donc je ne suis pas une femme.” Il y a alors une impossibilité de création de la solidarité féminine, parce qu’elles ne veulent pas rentrer dans ces stéréotypes dégradants de chieuses, de nunuches, de cuculs… Les femmes sont assez peu nombreuses et assez vites jugées, en particulier sur leurs tenues : les jugements de valeur sont assez sévères ! Par exemple si une femme arrive avec un haut un peu décolleté, les autres femmes vont être plutôt dures envers elle, beaucoup plus que les hommes d’ailleurs. Elles mettent tellement d’efforts à se créer une crédibilité professionnelle que tout à coup, si une femme arrive en décolleté, on ne va parler que de ça.

    Toi en tant que femme dans l’entreprise, tu dis que tu as souvent été renvoyée à ton genre. Il y a une forme de rappel à l’ordre.

    Oui, quand on est peu nombreuses dans un univers masculin, la féminité fait irruption ! Quels que soient tes attributs, que tu sois féminine ou pas tant que ça, tu vas avoir une pression, une injonction tacite à contrôler tous les paramètres de ta féminité. Ce ne sont pas les hommes qui doivent contrôler leurs désirs ou leurs remarques, mais c’est aux femmes de contrôler ce qu’elles provoquent chez les hommes, et la perturbation qu’elles vont provoquer dans cet univers masculin, parce qu’elles y font irruption.

    Toujours rappeler les femmes à l’ordre, c’est une obsession sociale. Les polémiques sur les tenues des filles à l’école, sur les tenues des femmes musulmanes en sont des exemples… Cette volonté de contrôle des corps féminins est-elle aussi forte que les avancées féministes récentes ?

    C’est difficile à mesurer mais ce n’est pas impossible. S’il y a des mouvements masculinistes aussi forts au Canada par exemple, c’est peut-être que le mouvement féministe y est hyper fort. Ce n’est pas impossible de se dire qu’à chaque fois qu’il y a eu une vague d’avancées féministes, quelques années plus tard, il y a forcément un retour de bâton. Avec ce qui s’est passé avec #metoo, on dirait que le retour de bâton a commencé avec le verdict du procès Johnny Depp – Amber Heard, puis il y a eu la la décision de la Cour Constitutionnelle contre l’avortement aux Etats-Unis… On n’est pas sorties de l’auberge, on est en train de voir se réveiller un mouvement de fond qui était peut-être un peu dormant, mais qui est bien présent. L’article sur les masculinistes qui vient de sortir dans Le Monde est flippant, c’est vraiment des jeunes. En plus, ils sont bien organisés, et ils ont une rhétorique convaincante quand tu ne t’y connais pas trop.

    Les milieux de travail très féminisés sont-ils aussi sujets à l’absence de sororité et à la solidarité masculine dont tu fais état dans ton enquête ?

    En général, les hommes qui accèdent à ces milieux ont un ”ascenseur de verre” (contrairement aux femmes qui ont le “plafond de verre”) : c’est un accès plus rapide et plus facile à des postes à responsabilité, des postes de direction. C’est le cas par exemple du milieu de l’édition : il y a énormément de femmes qui y travaillent mais les hommes sont aux manettes. Le lien avec capitalisme et virilité se retrouve partout – les hommes partent avec un avantage dans le monde du travail capitaliste, souvent du simple fait qu’ils sont des hommes et qu’on leur prête plus volontiers d’hypothétiques qualités de leader.

    Dans quelle mesure peut-on étendre tes conclusions à d’autres milieux de travail ou d’autres secteurs d’activité ? Est-ce que tes conclusions sont spécifiques à la population majoritairement ouvrière et masculine, et au travail en proie à l’intensification, étudiés dans ta thèse ?

    J’ai pensé mon travail pour que ce soit généralisable à plein d’entreprises. J’ai pensé cette enquête comme étant symptomatique, ou en tout cas assez représentative de plein de tendances du monde du travail : l’intensification, l’informatisation à outrance… Ces tendances se retrouvent dans de nombreux secteurs. Je dis dans l’intro : “depuis l’entrepôt, on comprend tout.” Comme partout, il y a de la rationalisation, de l’intensification, et de la production flexible. A partir de là, on peut réfléchir aux liens entre masculinités et capitalisme. Les problématiques de violence, de harcèlement sortent dans tous les milieux, aucun milieu social n’est épargné, précisément parce qu’elles ont des racines communes.

    Comment peut-on abolir le capitalisme, le patriarcat et le colonialisme ?

    Je vois une piste de sortie, une perspective politique majeure qui est de miser sur la sororité. La sororité fonctionne différemment des boys clubs, c’est beaucoup plus horizontal et beaucoup moins hiérarchique. Il y a cette même notion d’entraide, mais elle est beaucoup plus inclusive. Ce sont des dominées qui se rassemblent et qui refusent d’être dominées parce qu’elles refusent de dominer. Il faut prendre exemple sur les hommes qui savent très bien se donner des coups de main quand il le faut, mais faisons-le à bon escient. C’est une solution hyper puissante.

    Ne pas dominer, quand on est dominante sur d’autres plans (quand on est blanche par exemple), ça revient à enrayer les différents systèmes de domination.

    Tout à fait. Les Pinçon-Charlot, on leur a beaucoup reproché d’avoir travaillé sur les dominants, et c’est le cas aussi pour les masculinités ! Il y a plusieurs types de critique : d’abord, il y a un soupçon de complaisance avec ses sujets d’étude, alors qu’il y a suffisamment de critique à l’égard de nos travaux pour éviter ce biais. Ensuite, on est souvent accusé.e.s de s’intéresser à des vestiges ou à des pratiques dépassés, parce que les groupes (hommes, ou bourgeois) sont en transformation ; en fait, les pratiques de domination se transforment, mais pas la domination ! Enfin, on peut nous reprocher de mettre en lumière des catégories “superflues”, alors qu’on devrait s’intéresser aux dominé.e.s… mais on a besoin de comprendre le fonctionnement des dominant.e.s pour déconstruire leur moyen de domination, et donner des armes à la sororité.

    https://www.frustrationmagazine.fr/entretien-rivoal
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  • Quand les algorithmes de la CAF ouvrent la chasse aux pauvres ~ SILO
    https://silogora.org/quand-les-algorithmes-de-la-caf-ouvrent-la-chasse-aux-pauvres


    #chasse_aux_pauvres

    Première observation générale, le « monde merveilleux de la dématérialisation », qui s’accompagne d’une baisse considérable des moyens en termes d’accueil physique et téléphonique, génère des inégalités d’accès aux droits. Les raisons en sont d’une part les fractures numériques (territoriales, économiques pour la détention d’équipements, ergonomiques pour les personnes souffrant d’un handicap), d’autre part l’illectronisme (17% des Français) et la méconnaissance de l’outil numérique. En 2021 selon l’INSEE, 31% des Français ont renoncé à effectuer une démarche administrative.

    Deuxième observation, le traitement informatique des dossiers nécessite évidemment des algorithmes de calculs des droits, mais il entraine aussi le développement de techniques de ciblage via le datamining, c’est-à-dire la récolte et le croisement de données de différents fichiers administratifs. Officiellement, ces techniques visent à rendre la branche famille de la sécurité sociale plus efficiente, à appliquer le « juste droit », à repérer les personnes en situation de non recours et à punir justement les fraudeurs.

    Dans les faits, le ciblage des allocataires s’apparente à un véritable contrôle social. Plus de 1000 données sont collectées sur chacun d’entre eux, et la CNAF (Caisse nationale d’allocation familiale) l’écrivait elle-même dès 2017 dans son rapport « La politique de contrôle et de prévention des CAF » : « Ce traitement informatique permet de calculer la probabilité qu’une erreur se produise, en donnant un score de risque prédictif. Généralisé à tout le réseau des CAF, ce dispositif permet de repérer ainsi plus précisément les dossiers à risques ». Sur quels critères et selon quelles variables (décidés humainement) sont effectuées ces prédictions ? Mystère. Mais on peut aisément en imaginer quelques-uns… Maman solo, revenus irréguliers, lieu de naissance, par exemple.

    Les dossiers aux scores de risques élevés sont plus étroitement surveillés, y compris par les logiciels informatiques. Sur les quelque 37 millions de contrôles réalisés en 2020, touchant la moitié des allocataires, 32,25 millions étaient automatisés. Et 75% des contrôles effectués par des agents en chair et en os ont été déclenchés par le dispositif de ciblage. Pour schématiser, un logiciel repère des incohérences dans un dossier, tire la sonnette d’alarme, effectue les calculs débouchant sur un indu…

  • La vérité commence à sortir...., Les gens ont été vaccinés pour RIEN (sauf peut êre un motif plus sombre....)
    https://www.crashdebug.fr/la-verite-commence-a-sortir-les-gens-ont-ete-vaccines-pour-rien-sauf-peut

    Le covid épargnait 99,965% des GENS ! et depuis le DEPART les traitements FONCTIONNAIENT, mais les études on été SABORDE Que penserons tous ces gens qui ont été vaccinés avec un produit expérimental possiblement mortel (qui en ’apparence’ ne fonctionne pas) pour RIEN, , et toutes ces personnes handicapées à vie, on l’avait dit, on a tout supporté et on a tenu bon, et voyez le résultat.

    S’il n’avait pas banni l’hydroxychloroquine, il n’y aurait pas eu de souci, mais maintenant en ayant vacciné tous ces gens il y a un phénomène ’d’échappée immunitaire’ TOUT les scientifiques savent qu’il ne faut PAS vacciner en période de pandémie, on avait été prévenu, ils n’ont écouté personne pour nous ENFERMER en ENFER avec des variants sans fin pour vendre ENCORE PLUS de (...)

    #En_vedette #Actualités_françaises

    • Un débat Truss-Sunak interrompu par la perte de connaissance de la présentatrice ce Mardi 26 Juillet Par Belga, édité par Maud Wilquin RTBF
      https://www.rtbf.be/article/crise-au-sein-du-gouvernement-britannique-un-debat-truss-sunak-interrompu-par-l

      Un débat télévisé opposant les deux candidats au 10 Downing Street a connu une fin précipitée mardi soir, la présentatrice ayant perdu connaissance en direct.

      Liz Truss et Rishi Sunak débattaient mardi soir en plateau sur TalkTV, lors d’un évènement organisé en collaboration avec le journal The Sun. La veille, les deux candidats au poste de chef du parti conservateur, et donc à la succession du démissionnaire Boris Johnson comme Premier ministre du Royaume-Uni, avaient déjà débattu à la BBC.

      Durant le débat sur TalkTV, alors que Liz Truss répondait à une question sur l’agression russe en Ukraine, l’expression de la candidate, sur laquelle la caméra était braquée à ce moment-là, change brutalement alors qu’un bruit de chute se fait entendre, hors-champ. Elle quitte ensuite son pupitre et l’émission est interrompue.

      Peu de temps après, la chaîne a indiqué sur Twitter que Kate McCann, la présentatrice, avec perdu connaissance. « Elle va bien mais la recommandation médicale est qu’elle ne continue pas le débat » , ajoute la chaîne, qui s’excuse auprès de son public.
      BBC News reporting that it was Kate McCann who fainted and collapsed. If true, I hope she’s OK. #TalkTV #TheSunShowdown pic.twitter.com/66q4H1Lxqr
      -- Elliot Gonzalez (@elliot_gonzalez) July 26, 2022

      Les #complotistes vont encore nous parler des effets pas trés secondaires du soit disant #vaccin. #Liz_Truss #Rishi_Sunak

  • Prédire les flux migratoires grâce à l’intelligence artificielle, le pari risqué de l’Union européenne
    https://disclose.ngo/fr/article/union-europeenne-veut-predire-les-flux-migratoires-grace-a-lintelligence-a

    Depuis plusieurs mois, l’Union européenne développe une intelligence artificielle censée prédire les flux migratoires afin d’améliorer l’accueil des migrants sur son sol. Or, selon plusieurs documents obtenus par Disclose, l’outil baptisé Itflows pourrait vite se transformer en une arme redoutable pour contrôler, discriminer et harceler les personnes cherchant refuge en Europe. Lire l’article

    • C’est un logiciel qui pourrait sa place dans une dystopie. Une intelligence artificielle capable de compiler des milliers de données afin de prédire des flux migratoires et identifier les risques de tensions liées à l’arrivée de réfugiés aux frontières de l’Europe. Son nom : Itflows, pour « outils et méthodes informatiques de gestion des flux migratoires ». Financé à hauteur de 5 millions d’euros par l’Union européenne et développé par un consortium composé d’instituts de recherche, d’une société privée (Terracom) et d’organisations caritatives, Itflows qui est en phase de test devrait rentrer en service à partir d’août 2023. Et ce, malgré des alertes répétées quant aux risques de détournement de ses capacités prédictives à des fins de contrôle et de restrictions des droits des réfugiés sur le sol européen.

      Encore méconnu, ce programme doit venir compléter un dispositif technologique destiné à la surveillance des frontières, notamment espagnoles, italiennes et grecques. Financé sur le budget d’« Horizon 2020 », le programme de recherche et d’innovation de l’Union européenne, Itflows s’ajoutera alors aux drones de surveillance autonome, aux détecteurs de mensonges dans les zones de passages ou à l’utilisation de logiciels d’extraction de données cellulaires.

      D’après notre enquête, les deux ONG contribuent à nourrir l’intelligence artificielle de Itflows en lui fournissant des informations précieuses. Des données directement issues d’entretiens réalisés dans des camps de réfugiés, auprès de Nigérians, de Maliens, d’Érythréens ou encore de Soudanais. Il pourra s’agir d’éléments liés à l’origine ethnique, l’orientation sexuelle ou encore la religion des personnes interrogées. Pour leur contribution, les branches italiennes de la Croix-Rouge et d’Oxfam ont respectivement reçu 167 000 euros et 116 000 euros de fonds publics européens.

      « Nous avons contribué à réaliser trente entretiens de migrants arrivés en Italie au cours des six dernières années », confirme la Croix rouge Italie, sollicitée par Disclose. Une fois analysées, puis rendues accessibles via une application baptisée EUMigraTool, ces informations serviront aux autorités italiennes dans leur analyse « des routes migratoires et des raisons qui poussent les gens à faire le voyage », ajoute l’association. Même son de cloche du côté de Oxfam Italie, qui salue l’intérêt pour « les responsables politiques des pays les plus exposés aux flux migratoires. » Les dirigeants pourront également s’appuyer sur l’analyse des risques politiques liés à l’arrivée de migrants sur leur sol. Le projet inclut en effet la possibilité d’étudier l’opinion publique dans certains pays européens vis-à-vis des migrants à travers une veille sur le réseau social Twitter.
      Des rapports internes alarmants

      En réalité, les risques de détournement du programme existent bel et bien. C’est ce que révèlent des rapports internes (https://www.documentcloud.org/projects/logiciel-itflows-208987) au consortium que Disclose a obtenu à la suite d’une demande d’accès à des documents administratifs. Lesdits rapports, datés de janvier et juin 2021, ont été rédigés par les membres du comité éthique du projet Itflows. Leurs conclusions sont alarmantes. Le premier document, une somme de 225 pages, révèle que « le consortium Itflows est pleinement conscient des risques et des impacts potentiels en matière de droits de l’homme, que les activités de recherche empirique sur les migrations (…) et les développements technologiques prévus dans le projet peuvent poser ». Plus loin, les auteurs enfoncent le clou. Selon eux, les informations fournies par l’algorithme pourraient servir, si elles devaient être utilisées « à mauvais escient », à « stigmatiser, discriminer, harceler ou intimider des personnes, en particulier celles qui sont vulnérables comme les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile ».

      Cinq mois plus tard, le comité éthique rend un second rapport. Il détaille un peu plus le danger : « Les États membres pourraient utiliser les données fournies pour créer des ghettos de migrants » ; « risque d’identification physique des migrants » ; « discrimination sur la base de la race, du genre, de la religion, de l’orientation sexuelle, d’un handicap ou de l’âge » ; « risque que les migrants puissent être identifiés et sanctionnés pour irrégularités ». Et le régulateur d’alerter sur un autre péril : la poussée des « discours de haine » que pourrait induire une éventuelle diffusion des prédictions du logiciel dans « les zones où les habitants sont informés de déplacements » de populations.
      L’Europe fait la sourde oreille

      Des alertes qui ne semblent pas avoir été entendues. Comme en atteste un bilan dressé lors d’une réunion (https://www.documentcloud.org/documents/22120596-emt-symposium-agenda-16-sep-2021?responsive=1&title=1) en ligne le 16 septembre 2021 par la coordinatrice du comité éthique de Itflows, #Alexandra_Xanthaki, devant des responsables européens, dont #Zsuzsanna_Felkai_Janssen, rattachée à la direction générale des affaires intérieures de la Commission. « Nous avons passé six mois à travailler jour et nuit pour rédiger un rapport instaurant un cadre qui intègre les droits de l’homme », débute la responsable du comité éthique, selon un enregistrement que Disclose s’est procuré. Elle poursuit : « Il me semble pourtant que ce que disent les techniciens de l’équipe aujourd’hui c’est : nous n’en tenons pas compte ». Un manque de précaution qui inquiète jusqu’au sein du conseil d’administration d’Itflows. Joint par Disclose, Alexander Kjærum, analyste pour le conseil danois pour les réfugiés et membre du conseil de surveillance estime en effet qu’il existe « un risque important que des informations se retrouvent entre les mains d’États ou de gouvernements qui les utiliseront pour implanter davantage de barbelés le long des frontières. »

      Sollicitée, la coordinatrice du programme, #Cristina_Blasi_Casagran, assure que le logiciel « ne sera pas utilisé à mauvais escient ». Selon elle, Itflows « devrait même faciliter l’entrée des migrants [dans l’Union européenne] en permettant une meilleure affectation des ressources engagées dans l’#accueil ».

      #Frontex inquiète

      Un dernier point vient renforcer le risque d’un détournement du logiciel : l’intérêt de Frontex pour Iflows. D’après des documents internes, l’agence en charge de la surveillance des frontières de l’UE suit étroitement les avancées du programme. Jusqu’à y contribuer activement via la fourniture de données récoltées dans le cadre de ses missions. Or, depuis plusieurs années, l’agence européenne est régulièrement accusée d’expulsions illégales et de violations des droits de l’homme. Interrogée sur ce point, l’ONG Oxfam considère qu’il n’y a pas de risque de détournement du logiciel au profit de l’agence. La branche italienne de la Croix rouge déclare quant à elle que « la convention de subvention régissant la mise en œuvre du projet Itflows ne désigne pas Frontex comme utilisateur de l’outil, mais simplement comme source de données ouvertes ». En 2021, Frontex a élu l’interface Itflows parmi les projets d’Horizon 2020 au « potentiel opérationnel et innovant » le plus élevé.

      #AI #IA #intelligence_artificielle #complexe_militaro-industriel #asile #migrations #frontières #EU #UE #Union_européenne #prédiction #Itflows #contrôle #logiciel #risques #Terracom #surveillance #Espagne #Italie #Grèce #horizon_2020 #camps_de_réfugiés #Croix-Rouge #Oxfam #religion #origine_ethnique #ethnie #orientation_sexuelle #données #EUMigraTool #risques #risques_politiques #twitter #réseaux_sociaux #opinion_publique #technologie #algorithme #discrimination #identification #Croix_Rouge

      ping @reka @isskein @karine4 @_kg_

  • « Le #burn-out est le signal d’un dysfonctionnement collectif »

    Un burn-out n’est pas le signe d’une défaillance individuelle ! Mais celui d’un collectif en panne, soumis à des facteurs de #stress, des #risques_professionnels, qui ont fait tomber l’un de ses membres, estime Adrien Chignard, psychologue du travail, fondateur de Sens et Cohérence. Des #dysfonctionnements à travailler en équipe, pendant l’arrêt de la personne en burn-out. L’enjeu ? Protéger l’équipe, le travail et permettre à celui qui s’est effondré de revenir.

    Une idée reçue entoure bien souvent le burn-out : il s’agirait du fait d’un individu, peut-être plus faible ou plus fragile que les autres, qui tomberait…

    Adrien Chignard : On regarde celui qui tombe à cause du bruit de la chute. Le burn-out est quelque chose de beaucoup plus large. Il faut changer de raisonnement, de représentation de ce qu’est l’#épuisement_professionnel : si la personne est tombée, c’est parce que le plancher est en mauvais état, pas parce qu’elle marchait mal. Qu’il y ait des #souffrances individuelles n’occulte pas l’insécurité du collectif de travail. Lorsqu’une personne sombre en situation de travail et qu’elle fait un burn-out, ça veut dire qu’elle a été durablement exposée à des facteurs de stress professionnels. Donc tous ses collègues, toute son équipe, ont aussi été durablement exposés. Certes tous ne sont pas tombés car il y a des différences interindividuelles qui font que, lorsqu’en plus de problèmes professionnels, on est en train de divorcer, que son enfant est malade, qu’on a un huissier qui nous court après, forcément les situations de stress sont accrues. Mais le burn-out est le signal d’un dysfonctionnement collectif, pas d’une caractéristique défaillante de l’individu.

    Quel risque à se focaliser ainsi sur la personne qui est tombée ?

    Adrien Chignard : On oublie alors de protéger tout le collectif de travail derrière, de créer un climat de #sécurité_psychologique. L’enjeu est bien sûr de soigner, traiter, prendre en considération celui qui est tombé, mais surtout de protéger les autres de l’#effondrement. Cela va avoir plusieurs vertus. D’abord, #déculpabiliser la personne en burn-out. Très souvent, les gens en burn-out se sentent excessivement coupables de ne pas être à la hauteur, de ne pas réussir le défi, de laisser tomber leur équipe. Il y a une vision très honteuse du burn-out. Le fait de protéger tout le collectif de travail permet à celui ou celle qui est arrêté.e d’entendre qu’on réfléchit aux facteurs, aux conditions de travail qui l’ont fait tomber. A ce qui a précipité cette chute. Pour la personne, ce ne sont plus ses qualités intrinsèques – tu es fort ou pas – que l’on va questionner, c’est la dimension environnementale de son travail et ça, c’est central dans le burn-out. On tombe car on est confronté à un environnement particulier. Or nos collègues font partie du même environnement donc il faut les protèger. On va passer d’un regard collectif sur celui qu’il faut réparer à un regard préventif.
    Quel effet cette démarche va-t-elle avoir sur le reste de l’équipe ?

    Adrien Chignard : Ils vont se sentir rassurés. En psychologie, il y a ce qu’on appelle un impact émotionnel par personnes interposées. J’ai vu mon collègue partir en burn-out, je ne suis pas une pierre, cela me fait quelque chose, j’ai peur pour lui, je suis triste, et j’ai peur pour moi : si lui sombre, suis-je le prochain ? Le fait de permettre aux collègues rescapés, survivants, de s’exprimer - il ne s’agit pas uniquement de payer un coach ou un psy à la personne en arrêt de travail -, permet de mettre en mots les facteurs de risque les plus explicatifs et les situations de tensions au travail. Travailler dessus pendant que le collègue est en arrêt va permettre de sécuriser les membres de l’équipe, et de protéger le travail. Et cela va permettre tout doucement de préparer le retour post burn-out de celui ou celle qui a craqué. On peut tomber seul mais se relever à plusieurs.
    Le saviez-vous ?

    « Un burn-out fait du bruit : il y a un petit ronron quotidien dans une équipe et à un moment, quelqu’un s’effondre. Le fracas de la chute capte l’attention. Sur cette base, on va se dire que le burn-out est quelque chose d’individuel puisqu’une personne est tombée », analyse Adrien Chignard. En cause : l’heuristique de disponibilité, un biais cognitif, qui nous pousse à formuler des réflexions en fonction d’informations récentes et rapidement accessibles par notre cerveau. Le problème, c’est que celles-ci sont souvent assez limitées et ne permettent pas de comprendre le phénomène plurifactoriel et complexe qu’est le burn-out. « L’heuristique de disponibilité nous permet de simplifier la compréhension d’un monde complexe, comme les stéréotypes, mais ce n’est pas pour cela que c’est vrai. Quand quelqu’un tombe, ce n’est jamais juste une personne qui tombe, il y a tout un système derrière qu’il faut penser, reconstruire et il s’agit de protéger les autres personnes qui seraient en difficulté ».
    Ce qui peut sembler compliqué au sein de l’équipe, notamment pour le manager, c’est qu’on ne sait jamais quand la personne revient. Son absence peut être longue, voire très longue. Comment organiser ces temps de parole ?

    Adrien Chignard : C’est justement là qu’il faut changer le regard. On ne met pas en place un groupe de travail avec une équipe dans le seul but de permettre à celui qui est tombé de revenir. L’objectif, c’est de donner à ce collectif de travail des conditions qui font que plus personne ne tombera. De ne plus être dans une logique de réparation systématique de celles et ceux que le système a cassés. Aujourd’hui, on fait face à une situation de pensée magique qui consiste à dire qu’on peut toujours faire plus avec moins : plus de qualité avec moins d’argent, se réorganiser sans avoir les ressources pour le faire, aller plus vite mais avec un projet qui reste identique… C’est de la pensée magique car la réalisation de la demande relève de l’absurde, de l’injonction contradictoire : fais plus vite, en faisant mieux. Fais mieux, moins cher. Tout ceci à grand renfort d’artifices managériaux que cela soit de la prime, du renforcement narcissique : « t’es le meilleur, on y croit, tu es l’employé du mois »… La pensée magique, c’est le côté « ça va le faire », c’est ne pas se confronter avec lucidité à la réalité. Cela met le salarié dans une situation très difficile, puisqu’elle est impossible en tant que telle. La variable d’ajustement dans l’histoire, celle qui dysfonctionne, devient la sérénité et la vie personnelle des gens. Comment faire rentrer un pied taille 36 dans une chaussure taille 32 ? C’est impossible. C’est pareil quand on demande de faire rentrer une semaine de 60 heures dans une semaine de travail. Comment va-t-on faire ? Ce sont nos temps personnels qui vont devenir la variable d’ajustement de ce système qui dysfonctionne et cela engendre encore plus de burn-out car cela crée une augmentation de la charge de travail et une raréfaction de notre histoire d’amour, de nos voyages, de nos temps de lecture, de repos.
    Comment lutter contre cette pensée magique ?

    Adrien Chignard : Au travail, on peut dire à son manager qu’on ne réussit pas à faire ce qu’il nous demande, ce niveau de qualité avec ce budget-là, par exemple. On peut lui dire : « J’aimerais bien que tu me montres comment c’est possible et alors, je saurai le faire et je n’aurai plus à t’embêter sur le sujet ». Deux choses l’une : soit c’était effectivement possible et vous aurez appris quelque chose, vous serez monté en compétences, vous aurez des ressources en plus et serez moins stressé, et vous aurez renforcé le lien avec votre manager, ce qui protège du burn-out. Soit c’est impossible et votre manager va se confronter lui aussi à l’impossibilité de sa demande et sera bien obligé d’en modifier une partie pour rendre l’équation réaliste. Pour cela, plutôt que de dire ‘c’est pas possible, c’est pas possible’, dites à votre manager : « j’ai besoin d’aide, est-ce que tu peux me montrer comment tu ferais ? ». L’idée est de le mettre lui dans la situation pour que de façon expérientielle, il soit confronté au caractère magique de sa demande.
    Se dire qu’on a peut-être participé à ce dysfonctionnement collectif, à cette pensée magique, et qu’on y participe peut-être tous les jours, consciemment ou inconsciemment, bon gré, mal gré, qu’on soit le manager de la personne tombée en burn-out ou un collègue, suppose une vraie remise en question… Ces temps d’échange peuvent-ils d’ailleurs se faire à l’initiative de tout le monde ?

    Adrien Chignard : Cela peut se déclencher au travers de la demande de tous ceux qui ont été impactés, qui en ont souffert. Révéler ce qu’on ressent en situation de travail n’est pas honteux, les émotions font partie de notre vie et ont toute leur place au travail. D’un point de contractuel de subordination, c’est bien sûr au manager de lancer ce débat-là. Mais aussi d’avoir le courage d’affronter la réalité : c’est qu’il y a eu un problème dans son équipe. Ce n’est pas honteux. Ce qui le serait, ce serait de ne pas pouvoir le regarder en face. Que ce soit les collaborateurs qui le remontent ou le manager qui mette le sujet sur la table, le processus est déjà soignant en tant que tel et il est quasiment aussi important que le résultat. C’est le fait de se poser, de mettre en lumière ce qui dysfonctionne pour ensuite déterminer ensemble les actions à mettre en place qui compte. L’adversité n’est pas toujours fédératrice. Lorsque quelqu’un tombe dans une équipe, la grande crainte de tous est : qui va se récupérer son travail ? S’il est tombé, c’est qu’il était charrette et tout le monde est déjà charrette. Or, un des six facteurs qui précipite le burn-out, c’est le collectif clivé, des relations tendues. C’est la raison pour laquelle c’est avant tout au management de prendre ce signal comme celui d’un collectif en panne qu’il est nécessaire de pouvoir réparer en générant un échange avec les collaborateurs sur les facteurs de stress, les risques psychosociaux. Et le bénéfice collatéral, c’est que cela permet de faire passer deux messages à celui qui reviendra. D’abord, que ce n’est pas sa faute, qu’il y a une responsabilité organisationnelle et pas une faute morale individuelle. C’est déculpabilisant. Et quand il reviendra, il constatera que les conditions de travail ont changé, qu’elles sont plus propices à de la santé. C’est la meilleure façon de revenir : il reprendra le travail en ayant l’impression que son arrêt n’aura pas été vain...
    Les mêmes causes produisant les mêmes conséquences, si rien ne change, la personne risque de repartir en arrêt maladie…

    Adrien Chignard : C’est exactement ça. Lorsqu’une équipe est confrontée à une situation de burn-out, c’est le collectif de travail restant qui permet à la santé et à la sérénité de tout le monde de revenir : à la fois des collègues, et puis de celui qui est parti. C’est pour cela que le regard individualisant sur le burn-out est culpabilisant : une personne tombe, on l’accompagne surtout à l’extérieur de l’entreprise, celui qui part a l’impression qu’il est nul, qu’il doit cacher cette maladie honteuse qu’on ne saurait voir. Et c’est aussi terrorisant pour celles et ceux qui restent : les messages ne sont pas entendus, il y a une forme de cécité, de surdité managériale, comme s’il ne s’était rien passé. On ne remet jamais en question le système et on considère qu’il vaut mieux réparer ceux que le système a cassés plutôt que penser que l’organisation du travail actuelle est à modifier un peu. On oublie que celle-ci n’est qu’un outil au service de la performance. Un organigramme, ça se change !

    https://www.psychologies.com/Travail/Souffrance-au-travail/Burn-out/Interviews/Le-burn-out-est-le-signal-d-un-dysfonctionnement-collectif

    #collectif #individuel #dysfonctionnement_collectif #honte #déculpabilisation #environnement #pensée_magique #absurdité #injonctions_contradictoires #management #primes #pensée_magique #renforcement_narcissique #travail #adversité #responsabilité #organisation_du_travail

    –—

    Mais, notamment à l’Université Grenoble Alpes, on continue d’offrir des cours de sophrologie ou d’efficacité professionnelle :
    https://seenthis.net/messages/817228

  • #métaliste sur la mise en place de l’#externalisation des #procédures_d'asile au #Rwanda par l’#Angleterre
    –-> 2022

    #UK #Royaume-Uni

    –---

    voir aussi la métaliste sur les tentatives de différentes pays européens d’#externalisation non seulement des contrôles frontaliers (https://seenthis.net/messages/731749), mais aussi de la #procédure_d'asile dans des #pays_tiers :
    https://seenthis.net/messages/900122

    #procédure_d'asile #externalisation_de_la_procédure #modèle_australien

  • Un nouveau délit à la #frontière : le claquement de portières !

    Depuis plus de cinq ans, femmes et hommes du #Briançonnais portent #secours de jour comme de nuit aux personnes étrangères en provenance du Moyen-Orient et d’Afrique. Aux #frontières, les #contrôles_d’identités auprès de ces « #maraudeurs » se multiplient jusqu’au surréalisme.

    par Didier Fassin, anthropologue et médecin, Anthropologue et médecin, Marion Lauer, Psychologue, Chloé Ménard, Interne en médecine, Anne Michel, Employée de commerce et Jean-Luc Para, Médecin généraliste

    Depuis plusieurs années, malgré la convention de Schengen, la frontière entre la #France et l’#Italie a été rétablie entre #Vintimille et #Menton et entre #Oulx et #Briançon. Il s’agit d’empêcher l’entrée sur le territoire français de personnes étrangères en provenance du Moyen-Orient et d’Afrique, généralement par la route des Balkans. Au col de #Montgenèvre, point de passage dans les #Hautes-Alpes en raison de sa faible altitude et de son accès facile, les effectifs de la #police_aux_frontières ont été renforcés. Un escadron de #gendarmes_mobiles est venu en appui, puis un second.

    Au total, ce sont plus de deux cents agents des #forces_de_l’ordre qui interviennent, de jour comme de nuit, pour interpeller et renvoyer en Italie les quelque trois mille personnes qui, chaque année, tentent de passer en France, parfois pour y demander l’asile, souvent pour continuer leur voyage. La plupart de ces exilés fuient leur pays en raison des dangers pesant sur eux et leur famille, tels des Afghans menacés par la répression des talibans ou des Nigérians victimes des attaques de Boko Haram.

    L’ironie de cette #militarisation de la #zone_frontalière tient toutefois à l’importance du déploiement de forces de l’ordre au regard de la dizaine de personnes en moyenne s’efforçant de franchir quotidiennement la frontière et à l’#inefficacité de ce dispositif puisque, de l’aveu même des policiers et des gendarmes, toutes finissent par passer. Il ne saurait en être autrement quand on sait qu’elles voyagent depuis plusieurs années, affrontant au péril de leur vie les risques naturels, les rigueurs des camps de détention et les brutalités des forces de l’ordre de l’est de l’Europe. Dans ces conditions, les policiers et les gendarmes amassés entre l’Italie et la France ne peuvent les dissuader de poursuivre leur périple. En revanche, cette présence les conduit à s’exposer de plus en plus en empruntant, souvent de nuit, des chemins de plus en plus dangereux où certains souffrent de gelures graves en hiver, se blessent lors de chutes en été, et même trouvent la mort de froid ou par noyade.

    Au nom du principe de #fraternité

    C’est la raison pour laquelle, depuis un peu plus de cinq ans, des femmes et des hommes du Briançonnais et bien au-delà partent dans la #montagne, de jour comme de nuit, pour leur porter secours ou les empêcher de s’engager dans des voies périlleuses. L’action des « maraudeurs », comme on les appelle, s’avère particulièrement importante pour épargner ces #risques à des personnes épuisées et malades ou des femmes parvenues au terme de leur grossesse. Strictement respectueux de la loi, les maraudeurs agissent ainsi sur le territoire français au nom du principe de fraternité inscrit dans la devise de la République et reconnu par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 juillet 2018.

    Les exilés assistés sont conduits à Briançon, soit à l’hôpital, soit au refuge dit solidaire, en fonction de leur état de santé. Mais au-delà de sa dimension humanitaire, représentée notamment par la présence de bénévoles de Médecins du monde, l’action des maraudeurs a aussi une signification politique. Elle rappelle à l’Etat son obligation de respect du #droit français. Une brochure établie par l’association Tous migrants et distribuée aux forces de l’ordre lors d’interactions avec elles dans la montagne procède de cette pédagogie citoyenne.

    Bien que légale, l’action des maraudeurs fait pourtant l’objet d’une #répression qui peut prendre plusieurs formes. Ce sont des vérifications de véhicules à la recherche de détails pouvant faire l’objet d’une verbalisation, tel un feu cassé. Ce sont également des accusations infondées d’#aide_à_l’entrée_irrégulière d’étrangers sur le territoire français donnant lieu à des auditions par la police, voire à des poursuites. Les contrôles d’identité peuvent être suivis de #contraventions pour des faits inventés, comme la circulation sur une voie forestière interdite d’accès. Ces #falsifications, dont plusieurs d’entre nous ont été les victimes, sont cependant difficiles à contester dans la mesure où les agents qui les produisent sont assermentés et donc réputés dire le vrai. D’une manière générale, ce #harcèlement et ces #sanctions ont une fonction d’#intimidation et de #dissuasion. Ils ne sont d’ailleurs pas sans effet compte tenu de leurs conséquences financières et parfois judiciaires.

    Signe de cette inflation répressive poussée jusqu’au surréalisme, à la suite d’une récente maraude en montagne, cinq personnes ont été contrôlées par des agents de la police aux frontières rapidement rejoints par une dizaine de gendarmes à pied. Après une longue vérification de leur identité, ils ont été accusés de « #tapage_nocturne »… à cause du bruit provoqué par la fermeture des portières lorsqu’ils sont entrés dans leurs deux véhicules. Nul ne sait si la contraventionalisation du #claquement_de_portières la nuit fera jurisprudence sur l’ensemble du territoire français, mais son utilisation à la frontière suggère, comme l’écrivait le poète François Ponsard, repris par Gustave Flaubert dans Bouvard et Pécuchet : « Quand la borne est franchie, il n’y a plus de limite. » De cet épisode, il y a, certes, matière à rire. Mais on ne peut manquer de s’en inquiéter.

    Didier Fassin, Marion Lauer, Chloé Ménard, Anne Michel et Jean-Luc Para participent aux activités de prévention des risques conduites à la frontière entre l’Italie et la France dans le cadre d’une collaboration entre Médecins du monde et Tous migrants.

    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/un-nouveau-delit-a-la-frontiere-le-claquement-de-portieres-20220623_EDLCO

    #maraudes #frontière_sud-alpine #dissuasion

    ping @karine4 @isskein

  • L’humanité à l’ère d’une spirale d’#autodestruction, prévient l’ONU | ONU Info
    https://news.un.org/fr/story/2022/04/1118902

    L’UNDRR attribue la forte augmentation des catastrophes dans le monde à une « perception brisée du risque basée sur l’optimisme, la sous-estimation et l’invincibilité ». Une perception qui conduit naturellement à « des décisions politiques, financières et de développement qui exacerbent les vulnérabilités existantes et mettent les gens en danger ».

    • La #perception erronée des risques par l’humanité renverse les progrès mondiaux dans une « #spirale_d'autodestruction », selon un nouveau rapport de l’ONU

      Le monde pourrait défaire les progrès sociaux et économiques et faire face à 1,5 catastrophe quotidienne d’ici 2030, selon le Bilan mondial phare de l’ONU.

      26 avril 2022, NEW YORK/GENÈVE – Les activités et comportements humains contribuent à l’augmentation du nombre de catastrophes à travers le monde, mettant en danger des millions de vies ainsi que l’ensemble des acquis sociaux et économiques, avertit un nouveau rapport de l’ONU.

      Publié par le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe (UNDRR), en amont de la Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe qui se déroulera en mai, le Bilan mondial 2022 (GAR 2022) révèle qu’entre 350 et 500 catastrophes de moyenne à grande ampleur ont été enregistrées chaque année au cours des deux dernières décennies. Ce chiffre devrait atteindre 560 catastrophes par an, soit 1,5 par jour, d’ici 2030.

      Le Bilan mondial 2022 attribue ces catastrophes à une perception erronée des risques guidée par « l’optimisme, la sous-estimation et l’invincibilité », conduisant à des décisions politiques, financières et de développement qui exacerbent les vulnérabilités et mettent des vies en danger.

      Le monde doit redoubler d’efforts pour intégrer les risques de catastrophe dans notre façon de vivre, de construire et d’investir, qui entraîne actuellement l’humanité dans une spirale d’autodestruction », a déclaré Amina J. Mohammed, Vice-Secrétaire générale des Nations Unies, qui a présenté le rapport au siège de l’ONU à New York.

      « Nous devons transformer notre complaisance collective en action. Ensemble, nous pouvons ralentir le rythme des catastrophes évitables tout en nous efforçant d’atteindre les objectifs de développement durable pour tous, partout. »

      Le rapport, intitulé « Notre monde en danger : transformer la gouvernance pour un avenir résilient », constate que la mise en œuvre des stratégies de réduction des risques de catastrophe préconisées par le Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030 a réduit le nombre de personnes touchées et tuées par des catastrophes au cours de la dernière décennie.

      Malgré cela, l’ampleur et l’intensité des catastrophes augmentent, et plus de personnes ont été tuées ou touchées par des catastrophes au cours des cinq dernières années qu’au cours des cinq précédentes.

      Les catastrophes ont un impact disproportionné sur les pays en développement, qui perdent en moyenne 1% de leur PIB par an sous l’effet de catastrophes, contre 0,1 à 0,3% dans les pays développés. C’est la région Asie-Pacifique qui supporte le coût le plus élevé, avec une perte de PIB imputable aux catastrophes de 1,6% en moyenne chaque année. Dans les pays en développement, ce sont aussi les personnes les plus pauvres qui souffrent le plus.

      Aux effets à long terme des catastrophes s’ajoute l’absence d’assurance soutenant les efforts pour reconstruire des bâtiments sûrs. Depuis 1980, seulement 40% des pertes liées aux catastrophes étaient couvertes par une assurance, les taux de couverture dans les pays en développement étant souvent inférieurs à 10%, et parfois proches de zéro, selon le rapport.

      « Les catastrophes peuvent être évitées, mais seulement si les pays investissent du temps et des ressources pour comprendre les risques et les réduire », a déclaré Mami Mizutori, Représentante spéciale du Secrétaire général pour la réduction des risques de catastrophe et chef de l’UNDRR.

      « Ignorer délibérément les risques, sans les intégrer dans la prise de décision, revient pour le monde à financer sa propre destruction. Les secteurs essentiels, des gouvernements au développement, en passant par les services financiers, doivent de toute urgence repenser la façon dont ils perçoivent et gèrent les risques de catastrophe. »

      Les phénomènes météorologiques de plus en plus extrêmes qui résultent du changement climatique font partie des risques les plus menaçants. Le Bilan mondial 2022 réitère les appels à accélérer les efforts d’adaptation lancés lors de la COP26 en démontrant comment les responsables politiques peuvent prendre en compte la résilience climatique dans leurs décisions de développement et d’investissements. Ces initiatives comprennent la réforme de la planification budgétaire nationale pour tenir compte des risques et de l’incertitude, tout en reconfigurant les systèmes juridiques et financiers pour inciter à la réduction des risques. Elles offrent également des exemples dont les pays peuvent s’inspirer, comme l’innovante taxe carbone sur les carburants introduite par le Costa Rica en 1997, qui a contribué à inverser la déforestation, facteur majeur de risques de catastrophe, tout en stimulant l’économie. En 2018, 98% de l’électricité au Costa Rica provenait de sources d’énergie renouvelables.

      Rédigé par un groupe d’experts issus du monde entier, le Bilan mondial est une synthèse des domaines d’expertise indispensables pour comprendre les risques complexes et les réduire. Ses conclusions alimenteront l’examen à mi-parcours de la mise en œuvre du Cadre de Sendai, occasion de recenser les défis et de passer en revue les progrès de chaque pays par rapport à l’objectif, aux cibles et aux priorités d’action dudit cadre.

      « À l’heure de l’examen à mi-parcours du Cadre de Sendai, ce rapport doit être entendu comme un signal d’alarme pour accélérer l’action sur les quatre priorités du Cadre et arrêter la spirale ascendante des catastrophes », a déclaré Mami Mizutori.

      « La bonne nouvelle est que les décisions humaines sont les principaux catalyseurs des risques de catastrophe ; nous avons donc le pouvoir de réduire considérablement les menaces qui pèsent sur l’humanité, et en particulier sur les plus vulnérables. »

      https://www.undrr.org/fr/news/la-perception-erronee-des-risques-par-lhumanite-renverse-les-progres-mondiaux

      pour télécharger le rapport : "Global Assessment Report on Disaster Risk Reduction 2022"
      https://www.undrr.org/publication/global-assessment-report-disaster-risk-reduction-2022

      #rapport #ONU #risques #UNDRR #optimisme #sous-estimation #invincibilité #climat #changement_climatique #catastrophes #effondrement #collapsologie

  • Chou au riz
    https://www.cuisine-libre.org/chou-au-riz

    Coupez votre choux en lamelles de 1 cm par 5 cm et le dur en cubes de 2 cm max ; le poireau, en rondelles de 1 cm et le vert en paillettes carrées de 1 cm. Envoyez ça dans l’autocuiseur — je ne sais pas le temps, j’attends que ça fasse tuuuut et je laisse encore 10 min — sinon 20 à 30 minutes dans un faitout à feu doux. Pendant ce temps émincez vos oignons. Faites chauffer votre huile/beurre dans un faitout. Faites revenir les oignons. Ne cramez pas tout, laissez reposer le temps que chou/poireaux soit… #Chou_blanc, #Risottos, #Riz_rond / #Sans œuf, #Sans gluten, #Sans lactose

    https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9action_de_Maillard#Applications_de_la_r%C3%A9action_%C3%A0_l'al

  • Les forçats des déchets | Santé & travail
    https://www.sante-et-travail.fr/forcats-dechets

    Ce sont les soutiers des temps modernes, occupés dans l’ombre à faire disparaître promptement les rebuts de la #société_de_consommation, dont nous ne saurions tolérer la vue. Environ 100 000 personnes sont employées dans le secteur des déchets, dont la moitié au traitement des ordures ménagères. Parmi elles, de nombreux salariés en insertion ou des travailleurs handicapés. Tous exposés à de multiples risques connus – pénibilité physique et mentale, horaires décalés, manipulation de #produits_toxiques, manque de reconnaissance, etc. – ou moins documentés, comme la contamination par bactéries et moisissures, lors des manutentions en centre de tri ou de compostage.
    Car les politiques publiques environnementales, aussi vertueuses et nécessaires soient-elles, ont laissé le travail dans un angle mort. Qui sait que les piles et batteries équipant nos objets du quotidien sont recyclées, à cause de leur dangerosité, dans des usines classées Seveso, où les équipes d’ouvriers se relaient en 3 x 8, y compris les jours fériés ? Il est temps pour l’économie circulaire de penser aux enjeux de santé au #travail. Des pistes se dessinent : intégrer l’ergonomie du recyclage dès la conception des produits. Ou faire coopérer les professionnels de l’ensemble d’une filière sur les conditions de travail. Et surtout valoriser enfin des métiers et des travailleurs essentiels à la préservation de l’environnement.

    https://basta.media/Recycler-trieur-de-dechets-sytcom-conditions-de-travail-Ecosystem-emplois-v

  • via @BouillonColine

    Avec @raphkempf
    nous sommes toujours très inquiets de l’état de #Libre_Flot. Aujourd’hui, 36ème jour de grève de la faim, la famille m’informe que l’hôpital de Fresnes ne s’estime plus en mesure de le soigner. Les médecins vont demander son transfert à la Pitié Salpêtrière.

    https://reporterre.net/Antiterrorisme-en-greve-de-la-faim-il-demande-a-se-defendre-dans-la-dign

    Riseup4Rojava ( Riseup4Rojava4) / Twitter
    https://twitter.com/Riseup4Rojava4

    Some pictures from today’s actions for the liberation of #LibreFlot #riseup4rojava