• 25 ans de participation des hommes et des femmes au travail domestique : quels facteurs d’évolutions ? | INED

    http://www.ined.fr/fichier/t_publication/1673/publi_pdf1_doc_travail_2014_203_travail_domestique_genre.pdf

    Constat : une égalisation (toute relative) du partage des tâches domestiques et parentales.

    Au cours des 25 dernières années, on constate que les hommes se sont davantage impliqués dans l’éducation des enfants, tandis que leur participation dans les autres tâches domestiques est restée stable. Les femmes ont également consacré davantage de temps aux activités parentales mais sensiblement moins à l’entretien domestique. Elles délaissent ainsi progressivement leur rôle de ménagère pour celui de mère éducatrice.

    Les tâches demeurent cependant fortement sexuées.

    (…) Au sein du travail domestique, les tâches demeurent très sexuées : les tâches plus répétitives comme le ménage, le linge et la cuisine pour les femmes, les tâches plus occasionnelles comme le bricolage et le jardinage pour les hommes (Segalen, 2013 ; Pfefferkorn, 2011). On observe cependant dans la dernière décennie une réduction de cette spécialisation des tâches (Ricroch, 2012). Elle tient principalement de la baisse du temps consacré par les femmes à la cuisine, à la couture et au linge. (…)
    Les tâches parentales sont tout aussi sexuées (De Saint Pol et Bouchardon, 2013). Près des trois- quarts des soins aux enfants, de leur suivi scolaire ou de trajet d’accompagnement sont ainsi réalisés par les mères. Seules les activités de jeux et de socialisation des enfants sont également partagées entre hommes et femmes.

    Cette évolution résulte moins d’un effet de structure que d’une transformation des normes : relâchement des exigences en matière d’entretien domestique, accroissement des exigences éducatives.

    Afin d’analyser les facteurs à l’origine des évolutions des temps domestiques et parentaux au fil du temps, et de dégager ce qui tient des changements de comortements et ce qui tient des évolutions structurelles, nous décomposons les évolutions moyennes observées entre deux dates selon la méthode d’Oaxaca. La première composante rend compte de l’évolution des caractéristiques de la population : différences de structure d’âge, de composition familiale, d’activité professionnelle, de niveau d’instruction, d’équipement domestique, de niveau d’externalisation des tâches ou de type de logement. La deuxième composante correspond à l’évolution des comportements ou pratiques, à caractéristiques observables de la population fixées.
    La majorité des évolutions du temps domestique tiennent plus aux changements des comportements qu’aux effets de composition. Ainsi, à situation familiale donnée, les pratiques ont changé : par exemple, entre 1999 et 2010, la charge domestique des femmes en union libre s’est rapprochée de celle des femmes mariées. Cela peut s’expliquer par un moindre effet de sélection des femmes vivant en union libre au fil du temps. Quand la cohabitation en était à ses débuts, ces femmes pouvaient avoir des valeurs plus modernes que les femmes mariées. Avec la diffusion de la cohabitation, ces femmes sont moins sélectionnées. Cela s’explique aussi par la diffusion des comportements plus modernes quelle que soit la situation familiale. Finalement, la majeure partie des changements n’est pas due à des évolutions de comportements au sein d’une catégorie particulière de population, mais concerne l’ensemble des femmes. Cela peut refléter un changement de normes –ou un affaiblissement des injonctions– en matière de propreté, sur ce qui est « convenable » ou « présentable ». Porter un vêtement un peu froissé, faire réchauffer un plat tout prêt, ne pas avoir un intérieur impeccablement propre et rangé, est sans doute aujourd’hui plus toléré que dans le passé. Apparaître comme libérée des contingences ménagères peut même être valorisé dans les classes supérieures. (…)
    Comme pour le temps domestique, ce sont surtout les changements de comportements qui expliquent les variations du temps parental sur le long terme. Ces changements importants de pratique montrent que pour hommes, comme pour les femmes, le temps avec les enfants est devenu un temps dans lequel on investit, qu’on souhaite conserver quitte à passer moins de temps aux tâches domestiques. Ce plus grand engagement paternel et maternel traduit la volonté des couples contemporains de s’investir dans la relation affective avec leurs enfants (Bergonnier-Dupuy et Robin, 2007). Il traduit aussi l’accroissement des devoirs parentaux et l’essor des exigences éducatives, comme en témoignent les nouvelles normes sur l’allaitement des nouveaux nés et l’implication des enfants dès leur plus jeune âge dans des activités de développement, tant physique, social qu’artistique.

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