#rupture_métabolique

  • Succès écologique ou géo-ingénierie un peu foireuse ?

    https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-billet-vert/au-kazakhstan-la-hausse-du-volume-d-eau-de-la-partie-nord-de-la-mer-d-a

    Cette nouvelle, annoncée lundi, redonne un peu d’espoir dans cette région d’Asie centrale particulièrement menacée par le réchauffement climatique. Le désastre dans ce qui était encore il y a 60 ans le quatrième plus grand lac du monde reste néanmoins irréversible.

    #Mer_d'Aral #Kazakhstan #géoingénierie #désastre_écologique #écocide

  • Marx, prophète de la décroissance ? · Michael Löwy
    https://www.terrestres.org/2024/12/21/marx-prophete-de-la-decroissance

    Cela m’amène à mon principal désaccord avec Saito : dans plusieurs passages du livre, il affirme que pour #Marx « la non-durabilité environnementale du capitalisme est la contradiction du système » (p.142, souligné par Saito) ; ou qu’à la fin de sa vie, il en est venu à considérer la rupture métabolique comme « le problème le plus grave du capitalisme » ; ou que le conflit avec les limites naturelles est, pour Marx, « la principale contradiction du mode de production capitaliste ».

    Je me demande où Saito a trouvé, dans les écrits de Marx, les livres publiés, les manuscrits ou les carnets, de telles déclarations… Elles sont introuvables, et pour une bonne raison : l’insoutenabilité écologique du système capitaliste n’était pas une question décisive au 19e siècle, comme elle l’est devenue aujourd’hui, avec l’entrée de la planète dans une nouvelle ère géologique, l’Anthropocène, depuis 1945.

    De plus, je crois que la rupture métabolique, ou le conflit avec les limites naturelles, n’est pas « un problème du capitalisme » ou une « contradiction du système » : c’est bien plus que cela ! C’est une contradiction entre le système et « les conditions naturelles éternelles » (Marx), et donc avec les conditions naturelles de la vie humaine sur la planète. En fait, comme l’affirme Paul Burkett (cité par Saito), le #capital peut continuer à s’accumuler dans n’importe quelles conditions naturelles, même dégradées, tant qu’il n’y a pas d’extinction complète de la vie humaine : la civilisation humaine peut disparaître avant que l’accumulation du capital ne devienne impossible.

    #rupture_métabolique #écosocialisme

  • Kohei Saito, le philosophe communiste de la décroissance – Libération
    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/kohei-saito-le-philosophe-communiste-de-la-decroissance-20240929_NLJ7GDAG

    Adepte de Karl Marx, sa relecture moderne du « Capital » a explosé les ventes dans l’archipel japonais. Un succès plébiscité par la jeune génération qui met dos à dos partisans de la décroissance et éco-modernistes. Il vient d’être traduit en français.

    #paywall

    • Profil
      [...]

      https://www.liberation.fr/resizer/uyB-vK9Z7chRPXsCXGQFSPHnPDE=/1600x0/filters:format(jpg):quality(70):focal(2152x1060:2162x1070)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/PEYUBBEQK5CO5H4ECEGQNSDYNM.jpg

      Kohei Saito, professeur agrégé de philosophie à l’université de Tokyo, ici, dans une « forêt commune » à Hachioji, près de la capitale japonaise.. (Philip Fong/AFP)
      par Nicolas Celnik
      publié le 29 septembre 2024

      Ça commence par une paire d’yeux qui s’écarquillent dans un restaurant chic niché sous un pont à Tokyo : « Comment ? Vous avez rencontré Kohei Saito ? » Le décor est planté : dans l’archipel nippon, le jeune philosophe marxiste a l’aura d’une #rock_star. Lui-même s’amuse de cette popularité si soudaine, qu’il décrit comme un « non-sens ». Hitoshinsei no « Shihonron » (« le capital dans l’anthropocène »), dont la version française vient de paraître aux éditions du Seuil sous le titre Moins ! La décroissance est une philosophie, est devenu un petit phénomène de masse au Japon lors de sa sortie en 2020.

      En moins d’un an, le livre s’est vendu à plus de 500 000 exemplaires, si bien que la chaîne de librairies Maruzen, dans le quartier de Marunouchi, à Tokyo, a ouvert une section intitulée « Redécouvrir #Marx ». Le livre a depuis été publié dans douze pays, et Saito est reçu en invité de marque. En France, c’est l’Institut La Boétie, le think tank de La France insoumise (LFI), qui lui avait offert le micro lors de sa venue à l’automne 2023, avant d’investir le centre Pompidou le 20 septembre dernier. La « hype » autour de Kohei Saito frôle le paradoxe : son succès est devenu un argument de vente en soi, au-delà des apports du livre en lui-même.

      Dans les carnets personnels de Marx

      Il faut reconnaître que la thèse du livre a de quoi intriguer : d’après Kohei Saito, Karl Marx se serait intéressé, sur la fin de sa vie, aux limites de la croissance et aurait développé une pensée écologique qui mérite d’être redécouverte à l’heure de l’anthropocène. Pour justifier ce scoop, Saito propose de relire Marx à l’aune d’un matériau nouveau : les carnets personnels du philosophe allemand, qu’il a étudiés lors de sa thèse à Berlin. C’est à partir de ces écrits que Saito a compris pourquoi « Marx a tant tardé avant de publier les volumes II et III du Capital, alors qu’Engels le harcelait presque pour qu’il le fasse », racontait-il, lors d’une rencontre à Tokyo à l’été 2023. Selon lui, deux découvertes ont bouleversé Marx.

      D’abord, il découvre les #sociétés_précapitalistes, où il est tout particulièrement fasciné par la manière de distribuer les #terres selon un système de tirage au sort renouvelé régulièrement, qu’il considère comme une clé pour minimiser la concentration des richesses. Ensuite, il se passionne pour les #sciences_naturelles, et se documente sur l’appauvrissement des sols en Irlande et l’épuisement du charbon en Angleterre : il en déduit que l’industrialisation crée une « rupture métabolique », c’est-à-dire une situation où les humains consomment plus de ressources que ce que la nature est capable de fournir.

      Fort de ces enseignements, Saito, qui se présente comme ayant longtemps été « un marxiste très classique, occupé uniquement par la lutte des classes », et qui raconte avoir eu une prise de conscience des enjeux environnementaux suite à la catastrophe de Fukushima, en vient à se demander comment Marx analyserait-il les centrales nucléaires ?

      Organiser la production de manière soutenable

      Alors que l’économiste allemand est généralement présenté comme l’un des pères de l’industrialisme, clamant qu’il faut reconquérir et développer les forces productives pour libérer le prolétariat, voilà Kohei Saito qui oppose : « Sur la fin de sa vie, Karl Marx en vient à penser qu’il faut changer le système, mais pas en développant la production, nous exposait-il. Il propose plutôt de revenir à d’anciennes formes de production, tout en utilisant certaines des technologies les plus récentes – celles qui nous permettent d’atteindre l’objectif d’organiser la production de manière soutenable. » Kohei Saito donne un nom à ce type d’organisation : la « société de #communisme décroissant ».

      Il suffisait peut-être de réunir deux des mots les plus controversés en une même formule pour faire exploser les ventes. C’était, en tout cas, assez pour que toutes les obédiences (des ultralibéraux aux primitivistes) s’écharpent sur l’ouvrage pour en faire leur livre de chevet ou un autodafé. Kohei Saito se voit offrir l’occasion de développer ses théories sur la radio nationale japonaise, la NHK, lors d’un long programme dans lequel il décortique la pensée de Marx ; dans la foulée, son éditeur, qui venait de publier une version simplifiée des écrits de Marx, croule sous les demandes de jeunes lecteurs.

      Les préconisations formulées par Kohei Saito

      Pour saisir cet engouement, il faut comprendre que le livre de Saito arrive dans un Japon prêt à entendre de nouvelles voix sur l’#économie. D’abord, le Covid-19 a « mis en évidence les inégalités économiques » et « montré que le capitalisme peut être mis en pause », veut croire Saito. Ensuite, toute une génération, née dans les années 90, n’a connu qu’une économie stagnante, voire en récession, ballottée par la crise de 2008 et la catastrophe de Fukushima en 2011. Une certaine désillusion règne quant aux mesures libérales proposées par le gouvernement pour se tirer du marasme, et de nombreux jeunes japonais préfèrent s’exiler à la campagne plutôt que de s’enfermer dans des bureaux. Un certain nombre était donc désireux de s’entendre dire qu’il faut se débarrasser du capitalisme une bonne fois pour toutes, et preneur de quelques recettes pour le faire.

      C’est d’ailleurs sur les préconisations qu’il formule que Kohei Saito est le plus souvent attaqué : au-delà de certains marxistes qui lui reprochent de n’avoir rien compris à leur icône, Saito est ciblé par les libéraux qui préfèrent miser sur l’économie sociale et solidaire plutôt que faire la peau au marché. A gauche, Kohei Saito s’inscrit, malgré lui, dans un clivage entre deux tendances irréconciliables. D’un côté, les adeptes de la décroissance, dont il reprend les principaux auteurs – il s’appuie régulièrement sur les travaux de Jason Hickel et de Giorgos Kallis. De l’autre, les éco-modernistes, qui, à l’instar du magazine américain Jacobin, pensent que la décroissance de Saito va écraser le prolétariat, et préfèrent s’en remettre au progrès technologique.

      Une autre ligne de critique semble plus pertinente : là où Marx dessinait des perspectives révolutionnaires concrètes pour le prolétariat, Saito se contente d’affirmations péremptoires mais peu crédibles – « toutes les entreprises doivent devenir coopératives [dans la lutte contre le changement climatique] ou arrêter de commercer », écrit-il par exemple, sans que l’on comprenne bien comment faire coopérer lesdites entreprises. Sans être un intellectuel engagé, Saito s’investit depuis plusieurs années dans une ferme coopérative gérée avec des amis, sur des terres communes, et s’en inspire parfois pour illustrer ce à quoi pourrait ressembler une société de #communisme_décroissant. Une manière de montrer, peut-être, que contrairement à ce que dit l’adage, ce qui unit l’#écologie et la lutte des classes, c’est aussi le jardinage.

      Moins ! La décroissance est une philosophie, Seuil, 2024

      #rupture_métabolique

    • L’ayant entendu sur FC à défaut de l’avoir lu je confirme que si il souligne l’importance chez Marx de la rupture métabolique opérée par la production capitaliste (déjà soulignée par d’autres, qui surent aussi être attentifs à l’apologie présente chez Marx du Mir russe, de la propriété et de la gestion collective des terres, loin du « progressisme » usuel, des théories de l’arriération, ou de toute promotion du « rôle révolutionnaire de la bourgeoisie ») il parait, outre quelque mots clés déjà usés dans nos contrées -depuis Dardot et Laval il doit bien y avoir des coincetaux de la très républicaine LFI pour évoquer les « communs »- n’avoir à peu près rien à dire (il faudra que je prenne le livre en main pour le parcourir pour infirmer cet avis).

      Par ailleurs, il n’échappera à personne que concevoir un projet politique en terme de « décroissance » c’est en rester à des catégories qui n’ont pas d’existence en dehors d’une économie qu’il s’agit précisément de détruire, si il est question de sortir du cercle de la production pour la production.

      Et pour finir, on persiste partout à confondre le marxisme avec Marx. Or, par exemple, le « développement des forces productives » n’est jamais entendu que dans son action industrialiste et productiviste alors que chez Marx, la force productive primordiale, c’est non seulement le prolétariat mais l’humanité, comme labeur et comme intelligence collective, et que la condition du développement de cette force productive là c’est qu’advienne une humanité s’affranchie des rapports sociaux qui l’entravent.
      On voit depuis quelques années déjà l’opposition travail vivant / travail mort gagner en profondeur et en extension (selon des modalités dont certaines interrogent...) à l’occasion des nombreux travaux centrés sur le travail du vivant et de la nature.

      J’ai déjà vu des rock star à la puissance d’évocation plus affirmée. J’en conclus que son succès répond à un besoin politique de nombreux japonais et bien que je soupçonne un brin d’esthétisme dans leur démarche (une belle vie plutôt que la belle vie capitaliste et sa destructivité) je me demande d’une part ce qu’il en est de la circulation au Japon d’oeuvres de langue anglaise ou en français (dont bon nombre ont été signalés ici, de Jason Moore à Chopot et Balaud, par exemple) qui s’attachent à ces enjeux sans bazarder Marx en raison du marxisme, et, d’autre part, à quel moment ces gens sauront se confronter à l’alternative effective que l’on peut résumer, pour paraphraser Trotsky à « notre destructivité contre la leur ».

      #capitalisme #travail_vivant #mise_au_travail_du_vivant

  • Marx écologiste - A propos du livre de John Bellamy Foster, Michaël Löwy
    https://www.contretemps.eu/wp-content/uploads/2-CT-22-121-56-59.pdf

    (...) il existe une contradiction inhérente entre le système capitaliste, fondé sur le besoin d’expansion, d’accumulation et de croissance illimitée, et les écosystèmes de la planète. Un facteur particulièrement important dans ce conflit est le poids décisif, dans les économies capitalistes avancées, des intérêts liés aux énergies fossiles et au complexe automobile-industriel, avec tout ce qui en découle (le réseau routier, l’urbanisme, etc).

    (...) le point le plus fort de l’argumentation de Foster au sujet de Marx est sa mise en évidence de la critique par l’auteur du Capital du caractère destructeur du #capitalisme. Pour Marx, la dynamique de ce mode de production irrationnel produit une « rupture irréparable » de l’« interaction métabolique » (Stoffwechsel) des humains avec la #terre – « un métabolisme exigé par les lois naturelles de la vie elle-même » – avec des conséquences dramatiques : perte de fertilité des sols, désertification, déforestation, pollution des villes.

    Lecteur attentif des travaux du chimiste allemand Justus von Liebig, Marx lui rend hommage dans les pages du Capital : son mérite immortel fut d’avoir développé, du point de vue de la science de la nature, « le côté négatif, c’est-à-dire destructeur, de l’agriculture moderne ». Loin d’être « productiviste », comme prétendent certains écologistes hostiles au marxisme, Marx pensait que « tout l’esprit de la production capitaliste est en contradiction... avec les conditions permanentes de la vie exigées par la chaîne des générations successives » (Capital, vol. 3). Cette analyse de la « #rupture_métabolique » suscitée par le capital est une des contributions les plus importantes de Foster à une nouvelle lecture, d’inspiration écologique, des écrits de #Marx.

    #capital #écologie #écosocialisme #John_Bellamy_Foster

    • La Guerre de 14 avait confirmé en grand la destructivité inhérente au capitalisme, déjà pointée pour ce qui est de l’ordinaire des jours par Engels depuis la situation des classes laborieuses en Angleterre.
      La nuée et l’orage de cette première guerre « mondiale » fut très précisément un orage de feu où tout le capital fixe et tout le travail vivant furent orientés et réglés par et pour la « guerre totale ». De cet évènement, des révolutionnaires (et les surréalistes) firent quelque chose.

      On sait depuis plus de 5 décennies que la destructivité du capital relève aussi d’un autre rythme, ce qu’on nomme depuis peu capitalocène.

      Et c’est assez marrant que les écolos comme les appelos voient mis en cause leur anti-marxisme.

      (LM rappele le Libération d’avant 1978 : on publie tout ce qui fait exister l’organe. quant à la ligne générale, la question ne sera pas posée)

  • #nature et écologie de #Marx à Engels
    https://laviedesidees.fr/Nature-et-ecologie-de-Marx-a-Engels

    John Bellamy Foster présente une approche marxiste de la crise écologique fondée sur le matérialisme écologique, l’hypothèse de la « rupture métabolique » et la dialectique de la nature.

    #Philosophie #écologie #marxisme
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240727_marxecologiste.pdf

  • Les inégalité climatiques matérialisent la rupture métabolique du capitalisme.
    https://blogs.mediapart.fr/jlmfi/blog/120823/les-inegalite-climatiques-materialisent-la-rupture-metabolique-du-ca

    Mickaël Correia, Donatien Huet et Cédric Rossi ont produit collectivement un très bel article sur la "captation" des espaces verts aux alentours ou dans les centre-villes. L’occasion d’un prolongement, sur cette matérialisation de la rupture métabolique sociale et climatique du capitalisme. https://www.mediapart.fr/journal/ecologie/120823/inegalites-climatiques-comment-les-riches-accaparent-les-espaces-verts

    La ville comme Braudel l’a montré, est le cœur des échanges économiques, et non de la production, c’est le cœur du "métabolisme capitaliste", et c’est en son sein, à ses périphéries souvent que ce métabolisme digère les droits individuels, prive, impacte les conditions de vie de ceux qui produisent, en première ligne. L’article de Mickaël Correia, Donatien Huet et Cédric Rossi est très beau, d’abord, car il met des images sous une réalité : le capitalisme ne fait pas qu’affronter la nature comme il affronte les travailleurs dans sa rupture métabolique climatique et sociale.

    La banlieue et l’habitat des travailleur, des producteurs, montrent ce métabolisme arachnéen, qui met les hommes en cage, détruit la nature où la "naturalise", en l’emprisonnant, en supprimant massivement ceux qui savaient ce qu’était la nature d’avant le capitalisme. On l’ignore souvent, mais le concept de nature apparaît à l’âge moderne, à la renaissance, dans son acception actuelle, dominante.

    Istvan Mészáros en 2014, nous dit un certain nombre de choses de ce métabolisme du capital qui condamne les travailleurs, à cette quadruple peine dont l’article parle. ( Beyond Capital : Toward a Theory of Transition, Istsvan Mészáros ).

    Ainsi, nous dit-il quelque chose de l’effondrement dans sa description de l’acharnement du Capital et de son métabolisme à subordonner, parquer, surveiller, en broyant et les hommes et la nature, ce qu’Engels cité dans l’article avait fort justement décrit, et ce que Marx dans le livre 1 du Capital disait déjà, ce qu’il approfondira dans ses carnets longtemps oubliés, consacrés aux Sciences Naturelles.

    Meszaveros nous dit en 2014 :

    La contradiction fondamentale du système capitaliste de contrôle tient à ce qu’il ne peut séparer l’« avancée » de la destruction, ni le « progrès » du gaspillage – même si les résultats sont catastrophiques. Plus il libère les pouvoirs de la productivité, plus il doit libérer les pouvoirs de la destruction. et plus il étend le volume de la production, plus il doit enterrer chaque chose sous des montagnes de déchets étouffants. (Mészáros, 2014, p. 49-50)

    Il poursuit ensuite en démontrant la dérive vers une néo-religion, un fétichisme de l’accumulation capitaliste, qui le conduit à tout transformer, à tout subordonner à la cause de l’accumulation. Il décrit ce métabolisme sur la voie du déclin.

    le système du capital, en tant que mode de reproduction social métabolisant, se trouve dans sa phase descendante de développement historique et peut donc être dit avancé sur le plan capitaliste, mais dans aucun autre sens, et par conséquent, il n’est capable de se maintenir que d’une manière toujours plus destructive et donc, en fin de compte, autodestructrice.

    Ces superbes photos de l’article sont celles du sacrifice des travailleurs par le système capitaliste voué à la croyance, à une religion nouvelle, non séparée de l’État qui lui dévoue son action.

    Kohei Saito dans "La nature contre le capital" cite Marx

    [La production capitaliste] perturbe d’un autre côté le métabolisme entre l’homme et la terre, c’est-à-dire le retour au sol des composantes de celui-ci usées par l’homme sous forme de nourriture et de vêtements, donc l’éternelle condition naturelle d’une fertilité durable du sol. Elle détruit par là même à la fois la santé physique des ouvriers des villes et la vie intellectuelle des ouvriers agricoles. (Marx, 1993, p. 565-566)

    Les travailleurs sont donc "externalisés" de la ville, comme de la nature, comme la production capitaliste en pleine crise écologique (à la suite du rapport Meadows). Le capitalisme a systématisé et reproduit l’externalisation vers le sud de sa production ensevelissant peu à peu la planète sous les déchets.

    Là où la chaleur tape, là où la nature a été chassée et préemptée, là où l’air est viciée et mortelle, là où les déchets se mèlent à des infrastructutes obsolescentes en lambeaux, vivent les travailleurs et les "petites mains", qui produisent le nécessaire et le superflu (les déchets) qui conditionnent l’accumulation du capital divinisé par l’Etat bourgeois, et cette forme démocratique qui fait que celui qui n’a rien pratique une démocratie "dématérialisée" pour le seul intérêt des bourgeois et des actionnaires, une démocratie intéressée, dont la matérialisation ne concerne que les bourgeois...

    https://seenthis.net/messages/1013256

    • Dans l’article d’origine, une explication toute bête, pour Paris au moins :

      « Actuellement, la question de l’entretien est fondamentale dans les aménagements urbains et les projets de rénovation, car cela a un coût, encore plus quand des villes sont sous pression austéritaire – comme beaucoup de communes de Seine-Saint-Denis, poursuit Matthieu Adam. Embaucher des jardiniers formés pour entretenir les arbres est plus cher que d’avoir un agent qui vient nettoyer une dalle au jet d’eau. Ce qui fait qu’en banlieue la végétation est moins présente. »

      Par ailleurs, nombre de projets de rénovation proposent encore des aménagements très minéralisés, en partie pour réaliser de la prévention situationnelle. « En somme, ne pas planter des arbres est plus pratique pour laisser l’espace urbain ouvert afin de contrôler la population via des caméras de vidéosurveillance, des drones ou la simple vue des patrouilles de police », précise le chargé de recherche CNRS.

    • Pour Marseille, un peu différent, les riches privatisent les quartiers végétalisés :

      « En réalité, Marseille reste une ville très minérale où la végétation est plutôt absente, et la saisonnalité invisible. Les espaces verts urbains représentent seulement 4,6 m² par habitant. C’est moins que Paris (14 m2), indique le géographe Allan Popelard, qui dirige la collection « L’ordinaire du capital » aux éditions Amsterdam. Marseille compte environ dix fois moins d’arbres d’alignement par habitant que les autres grandes villes européennes étudiées. »

      Par ailleurs, le nombre d’arbres y est en nette régression : en 75 ans, le cœur historique de Marseille a perdu la moitié de son patrimoine arboré. Professeure à Aix-Marseille Université et chercheuse au Laboratoire Population Environnement Développement, Élisabeth Dorier précise pour Mediapart : « Dans le centre-ville de Marseille, il existe encore quelques rares cours intérieures avec des arbres. C’est une adaptation ancienne aux chaleurs des quartiers historiques qu’il faut à tout prix préserver. »
      [...]
      Allan Popelard : « Cette division socio-environnementale Nord-Sud résulte des choix d’aménagement opérés notamment sous les mandatures de Gaston Defferre (1953-1986) et Jean-Claude Gaudin (1995-2020). Une politique de classe qui a concentré les externalités négatives dans les quartiers nord. »
      [...]
      Les cartographies de la végétalisation et des revenus des ménages font apparaître au sud de la métropole les quartiers chics du Roucas-Blanc et de la colline Périer (7e et 8e arrondissements) où se trouvent des résidences fermées et végétalisées sous vidéosurveillance.

      Depuis 2007, Élisabeth Dorier se penche avec son équipe de recherche sur l’essor de ces résidences sécurisées. « Dans ces quartiers réservés aux privilégiés, les espaces verts sont progressivement privatisés. La colline Périer est devenue un écrin de verdure privé et bien gardé avec murs, patrouilles de gardiennage et vidéosurveillance, détaille la chercheuse. La fermeture résidentielle est ici un outil de valorisation foncière et d’exclusivité sociale. »

  • Une économie des communs négatifs
    par Alexandre Monnin- AOC media
    https://aoc.media/opinion/2022/11/28/une-economie-des-communs-negatifs

    L’écologie ne peut se penser comme un retour à la nature (ou à une époque antérieure, post industrielle, post-civilisationnelle, etc.) sous peine de porter avec elle un arrière-plan malthusien ou exterminisme.

    Son défi est désormais d’être une écologie des milieux impurs dans lesquels une part grandissante de l’humanité évolue qui cherche à négocier un passage étroit entre deux écueils : l’abandon brutal et immédiat des infrastructures, technologies et modèles – ce que j’appelle des communs négatifs – dont cette part croissante de l’humanité dépend un peu plus chaque jour, ce qui ne saurait se faire à très court terme, et le maintien de ces mêmes réalités à moyen terme.
    [...]
    La tentation est grande en effet, au-delà même des cosmologies, de puiser dans les savoirs du Sud générés en réponses à des situations de crises, situations dès lors valorisées au-titre d’une anticipation d’événements dramatiques à venir au Nord (hausse du niveau de l’eau, des températures, tropicalisation du climat, etc.).

    Les peuples autochtones ou les habitants d’Haïti seraient ainsi les éclaireurs des peuples du Nord, prenant les risques dont ces derniers entendent se préserver en observant la capacité d’adaptation des premiers.
    [...]
    Ceux qui pointent la responsabilité des pays du Nord ont tendance à rejeter le mot « Anthropocène » et à lui en substituer d’autres : Capitalocène, Anglocène, Androcène, etc. Il en existe mille et une variantes. On peut accepter cette responsabilité historique sans céder à l’ensemble des arguments des promoteur-ices de la notion de Capitalocène. Un point nous semble pourtant décisif : loin d’être une avant-garde, il faut penser le Nord Global comme le porteur et le témoin des futurs obsolètes, qui n’ont d’ailleurs, comme le souligne l’écrivain Amitav Ghosh[6], jamais eu vocation à advenir à l’échelle du Globe. L’échange écologique inégal, ainsi nommé par l’anthropologue Alf Hornborg[7], a vocation à le rester.

    Nul artifice ne permettra une généralisation à la population entière du mode de vie californien sans doute l’un des plus marketé à l’échelle du globe en dépit de sa nocivité fondamentale – pour prendre un exemple hélas aussi archétypal que caricatural. Si ces futurs sont obsolètes, il s’agit alors d’hériter à la fois de leurs matérialisations passées et des projets qui adviennent encore chaque jour en leur nom, les « ruines ruineuses » du présent et de l’avenir, à démonétiser symboliquement de toute urgence. Hériter du passé comme de l’avenir, dans un même geste.
    [...]
    Partant du principe qu’aucune transition ne pourra s’accomplir simplement en verdissant l’existant et que tout ne pourra être maintenu en garantissant les conditions d’habitabilité sur Terre, la redirection écologique pose la nécessité de procéder à des arbitrages démocratiques. Qui ne seront pas les mêmes partout et pour tout le monde car nous héritons collectivement des infrastructures de ce que le philosophe Olúfẹmi O. Táíwò[8] appelle the Global Racial Empire, qui opère une distribution des richesses, des biens de première nécessité ou des opportunités, tout à fait inégale.
    [...]
    comment faire changer la trajectoire de modèles (économiques, distributifs, juridiques, managériaux, etc.), d’infrastructures, de technologies non seulement vectrices d’inégalités mais qui détruisent l’habitabilité du monde ? Pour ce faire, il s’agit de les reconnaître pour ce qu’ils sont, de véritables communs négatifs ouvrant sur une nécessaire réappropriation collective à de multiples échelles. Surtout, il convient d’éviter un écueil majeur : les populations attachées, volontairement ou involontairement à ces réalités sont de plus en plus nombreuses, au Nord mais aussi dans le Sud Global, en dépit de l’immense hétérogénéité des situations, ne peuvent s’en extraire et s’en départir du jour en lendemain. En même temps, le business as usual est exclu à moyen terme. Tout l’enjeu consiste donc à emprunter une ligne deux crêtes entre ces deux écueils, qui sont aussi deux positions implicitement exterministes.
    C’est ici que doit s’affirmer le devoir historique des nations et peuples du Nord. Car il s’agit bien de prolonger le fil ouvert par les révolutions industriels et le régime métabolique minier[9] qui a consisté à tirer du sol de nouvelles sources d’énergie qui sont devenues à leur tour la matrice de nouvelles technologies, de nouvelles infrastructures et d’une nouvelle civilisation marquée par des modalités de subsistance impossible à congédier ou à prolonger.

    Des modalités de subsistance qui n’appellent pas nécessairement à passer uniformément sous les fourches caudines des limites planétaires mais à négocier précisément ce à quoi il faut renoncer et qu’il faut tâcher de maintenir pour que la recherche de capacités nouvelles de subsistance ne soit pas un eugénisme masqué des corps sains, enfin libérés des entraves de la Technosphère et rendu à une Nature accueillante.
    [...]
    Face à la dégradation de l’habitabilité, il s’agit d’opérer les nécessaires fermetures pour libérer des espaces où des milieux désormais impurs, comportant des poches de technicités mises par exemple à profits pour perpétuer des soins aux corps le nécessitant, pourront subsister.
    [...]
    Tirer le fil, donc, pour se positionner en arrière-garde d’un monde à venir, composant avec de multiples milieux interlopes.

    Ce rôle d’arrière-garde est généralement échu aux populations indigènes ou aux Nations en passe d’être engloutis par les flots ou sacrifiées pour le maintien du statu quo extractiviste. Têtes de ponts des changements induits par l’Anthropocène, privées d’avenir, et en même temps, avant-garde résiliente, malgré elles, au service des nations du Nord avides de mettre à profit les leçons ainsi glanées. Le statut d’arrière-garde doit être assumé. Prises dans un passé, un héritage, auquel elles se confrontent, les nations du Nord ont vocation à permettre à d’autres pays de représenter l’avant-garde de demain et de négocier avec cette modernité impossible selon leurs propres termes, en s’inspirant à leur guise des savoirs et des arts de la fermeture qu’il est impératif d’expérimenter aux Nord.

    Pour ne pas demander à d’autres d’être nos poissons-pilotes, pour ne pas attendre mais susciter ces bascules, à la fois politique et techniques, pour qu’un premier exemple, coupé de l’attente d’un retour sur investissement ou d’un avantage concurrentiel, ouvre la brèche nécessaire.
    [...]
    Au Nord, désormais, la vie bonne est celle qui prendra en charge les communs négatifs, qui travaillera à les démanteler proprement, avec soin. Premier exercice concret et constructif de réparation[10]. Manière d’assumer une responsabilité historique.

    #décroissance #post-croissance #anthropocène #effondrement

  • Au-delà de « l’écosocialisme » : une théorie des crises dans l’écologie-monde capitaliste
    http://revueperiode.net/au-dela-de-lecosocialisme-une-theorie-des-crises-dans-lecologie-monde-

    Wall Street produit et organise la nature. Si la théorie sociale cherche aujourd’hui à s’amender en tenant compte des enjeux environnementaux, elle dépasse rarement le dualisme typiquement moderne de la Nature et de la Société. Dialoguant avec les théoriciens de l’écosocialisme d’une part et des penseurs critiques tels que Harvey et Arrighi d’autre part, Jason W. Moore formule ici l’hypothèse que le capitalisme n’est pas seulement une économie-monde mais également une écologie-monde.

    #Uncategorized #échange_métabolique_société-nature #théorie_du_système-monde

    • (...) la perspective de la rupture métabolique n’est pas qu’elle aille trop loin, mais qu’elle n’aille pas assez loin. Dégager les implications de la rupture métabolique pour une théorie de la valeur – où la contradiction la plus importante du #capitalisme devient la tension irrémédiable entre « l’équivalence économique » et la « particularité naturelle » de la marchandise3 – me permet d’envisager la possibilité d’une théorie unifiée du développement et de la crise capitalistes dans la longue durée. La théorie du capitalisme comme écologie-monde est donc une perspective qui rassemble l’accumulation du capital et la production de la nature dans une unité dialectique. Cette perspective commence avec la prémisse que le capitalisme n’agit pas tant sur la nature, mais plutôt qu’il se développe à travers les rapports nature-société. (Moore 2000a, 2000b, 2003a, 2003b, 2003c, 2007, 2008, 2009q, 2009b, 2010a, 2010b, 2010c, 2010d). Le capitalisme n’a pas de régime écologique ; il est un régime écologique. La théorie du capitalisme comme écologie-monde est d’abord construite à travers un dialogue avec la théorie de la valeur de Marx, réhabilitant ainsi sa théorie de la crise, qui se base sur la dialectique de la sousproduction et de la surproduction. Ces deux moments s’originent dans la tendance à une augmentation de la composition organique du capital. Cette tendance fondamentale vers la crise – la « loi la plus importante4 » de Marx – a été contenue tout au long de l’histoire du capitalisme par la capacité du système à s’approprier les « dons gratuits » (free gifts) de la nature plus vite qu’il n’a capitalisé leur reproduction. Cet antagonisme dialectique de l’accumulation par appropriation et de l’accumulation par capitalisation est fondamental pour comprendre les conditions de la relance de l’accumulation dans la conjoncture actuelle.

      #Jason_Moore #rupture_métabolique #écologie_capitaliste #mise_au_travail_du vivant

  • L’écologie de Jean-Luc Mélenchon - Alain Lipietz
    http://blogs.mediapart.fr/blog/alainlipietznet/110412/lecologie-de-jean-luc-melenchon

    Or on peut être classe des producteurs en étant classe du productivisme. La reconquête de la fierté du producteur est un défi incontournable pour la gauche, mais ce producteur se doit être producteur d’un intérêt général pour jouer un rôle historique. Ce qui m’a amené à une définition plus subjective de la « classe porteuse de l’intérêt historique de toute l’humanité », les "artisans et ingénieurs du bonheur", " les "hussards verts de l’écologie" : les militants de l’économie sociale et solidaire, les syndicalistes autogestionnaires, les personnels de la santé et de l’éducation conscients de la dimension "universaliste" de leurs métiers… Mais le débat théorique avec Jean-Luc Mélenchon ne fait que commencer.

    Pour la petite histoire : dans le cadre de l’équipe projet d’Europe-Écologie, j’avais été chargé de rédiger le chapitre « planification ». Mais le groupe dirigeant, qui cherche avec succès à brider la campagne d’Eva Joly pour ne pas nuire au candidat socialiste (ce qui est de moins en moins justifiable, au fur et à mesure que l’ombre du 21 avril 2002 s’efface des sondages), a fait sauter au dernier moment ce chapitre du programme de EELV, sans doute afin d’en dimineur la portée opérationnelle (et , on le voit au succès du discours de Mélenchon, la charge émotive et symbolique).

    Cf. Débat autour du scénario Négawatt 2011 http://www.lateledegauche.fr/index.php?pge=video&id_rubrique=9&id_departement=29&id_video=512&tag=