• La Libye, dernière escale avant l’Europe pour les migrants du Bangladesh
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    La Libye, dernière escale avant l’Europe pour les migrants du Bangladesh
    Par Mustapha Kessous
    Bangladesh-Libye-Italie. Ce trajet, long de près de 8 000 km, est aujourd’hui l’itinéraire le plus emprunté par les migrants bangladais souhaitant rallier l’Europe. Du 1er janvier au 9 juin, sur les 57 222 exilés arrivés sur le Vieux Continent – principalement par voie maritime (bassin méditerranéen et océan Atlantique) –, 5 840 personnes sont originaires de ce pays d’Asie du Sud, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), faisant d’elles le premier contingent de migrants clandestins à entrer en Europe.
    Ces ressortissants bangladais débarquent sur les côtes italiennes, à Lampedusa ou à Naples, après avoir transité par la Libye. Au premier semestre 2025, ils représentent 37 % des 22 734 migrants partis de ce pays d’Afrique du Nord, loin devant les Erythréens (1 748) et les Pakistanais (1 705). Comme en 2024 : sur les 66 617 arrivées en Italie, 14 284 personnes, soit environ 21 %, venaient de ce pays lointain.« Il ne s’agit pas d’un flux [migratoire] nouveau, mais il prend de l’importance d’année en année », précise Flavio Di Giacomo, un porte-parole de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Les Bangladais représentaient 14,5 % des arrivées en Italie en 2022, autour de 12 % en 2020 et en 2021, seulement 3,3 % en 2015.
    La raison de ce périple compliqué est simple : si les conditions de vie imposées aux migrants en Libye sont souvent inhumaines, « il est très facile de se rendre là-bas. Un visa touriste ou un permis de travail suffit », relate Shahanur Islam, président de The Justice Makers Bangladesh in France, une association basée en banlieue parisienne qui documente les violations des droits de migrants bangladais et les accompagne dans leurs démarches juridiques et administratives.
    « Dans les faits, la Libye est facilement accessible. Ce ne sont pas des visas mais des papiers ou des passeurs qu’on achète. Rien ne semble dissuader d’aller en Libye », ajoute Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII). « Les gens partent aussi à cause de la misère et de la récente crise politique », explique par ailleurs Shahanur Islam.
    En août 2024, le régime de la première ministre Sheikh Hasina – critiquée pour sa dérive autocratique – a été renversé, après quinze ans passés au pouvoir, par un mouvement d’étudiants, confrontés au chômage de masse. Dix-huit millions de Bangladais âgés de 15 à 24 ans sont sans emploi. « Partir est donc une solution et tout un système existe pour quitter le pays », souligne le juriste.
    Les autorités du Bangladesh encouragent depuis des années la migration de sa main-d’œuvre pour soutenir la croissance de ce pays de 171 millions d’habitants. Selon l’OIM, chaque année, quelque 500 000 personnes partent travailler à l’étranger, notamment dans le golfe Persique. Plus de 11 millions de Bangladais résident hors de leurs frontières et les fonds envoyés par cette diaspora sont conséquents pour l’économie nationale. En 2023, les transferts d’argent s’élevaient à près de 22 milliards de dollars (19 milliards d’euros), soit 5 % du PIB national, selon la Banque mondiale.
    Ce « système » s’appuie sur un réseau d’agences de recrutement, dont plus de 1 700 opèrent au Bangladesh, certaines de manière officieuse. « C’est alors que tout commence », indique Shahanur Islam. Des intermédiaires, appelés dalals – courtiers en bengali –, recrutent des candidats au départ pour ces agences. « Ils promettent un bon travail dans le bâtiment ou dans le nettoyage et de s’occuper des démarches administratives », précise-t-il. « Un réseau de passeurs sophistiqué les aide à obtenir des visas et des billets d’avion », ajoute Chris Borowski, porte-parole de l’agence européenne des frontières, Frontex.
    Il en coûtera entre 3 000 et 4 500 euros aux candidats au voyage pour se rendre en Libye, qui pour financer leur départ « doivent vendre leurs biens ou contracter des prêts qui deviennent excessifs, les menant à une situation de servitude pour dettes [une forme de travail forcé assimilée à de l’esclavage] », notait Felipe Gonzalez Morales, alors rapporteur spécial des Nations unies sur les droits humains des migrants, après sa visite effectuée au Bangladesh en janvier 2023.
    C’est donc par avion, souvent avec une escale en Turquie ou aux Emirats arabes unis, que ceux-ci rejoignent la Libye, où les réseaux de passeurs prospèrent notamment du fait de la rivalité entre deux autorités concurrentes. L’une basée à Tripoli, reconnue par l’ONU, et l’autre à Benghazi, dans l’est du pays, sous l’égide du maréchal Khalifa Haftar. Dans un rapport publié le 3 juin, Frontex s’inquiète ainsi que « la Libye orientale demeure un carrefour essentiel pour les migrants » et que « l’aéroport Benina de Benghazi y joue un rôle crucial ».
    Selon Adala for All, une ONG basée en France, qui promeut l’accès à la justice et les droits humains en Afrique du Nord, Berniq Airways, compagnie liée au clan Haftar, faciliterait l’entrée des migrants bangladais en Libye grâce à une liaison aérienne Dubaï- Benghazi, ouverte depuis avril 2024. « A leur arrivée, ces migrants se voient accorder des visas d’entrée », précise l’organisation.
    Mais une fois sur place, nombre d’entre eux ne trouvent pas le travail qu’ils attendaient. Certains migrants sont enlevés, torturés puis rançonnés par des policiers, des militaires ou des groupes armés, et contraints d’appeler leurs proches pour leur demander de l’argent en échange de leur libération, comme a pu le rapporter l’ONG Human Rights Watch (HRW). Une fois relâchés, il faut trouver un travail, de l’argent pour payer la traversée de la Méditerranée qui peut coûter jusqu’à 4 000 euros. Selon l’OIM, en 2024, un peu plus de 21 000 Bangladais, âgés de 20 à 39 ans, sur les quelque 800 000 migrants, vivaient en Libye.
    « Il y a une particularité complexe avec les migrants bangladais : tous ne veulent pas venir en Europe, soutient Flavio Di Giacomo. Beaucoup auraient préféré rester travailler en Libye, mais la façon dont ils sont traités les pousse à traverser la Méditerranée. » Ce constat rejoint celui de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) qui, après une mission au Bangladesh en 2023, notait : « La frontière entre migration légale et illégale est floue et, du fait de la prévalence de la corruption et de la vulnérabilité des candidats au départ, un parcours migratoire à l’origine légal peut facilement basculer dans l’illégal, voire dans l’exploitation. »
    A leur arrivée en Italie, les Bangladais cherchent à s’y établir ou se dirigent en France pour obtenir l’asile, constituant ainsi la deuxième nationalité la plus représentée parmi les demandeurs. En 2023, sur les 8 568 dossiers présentés à l’Ofpra, 520 ont obtenu le statut de réfugié. « Malgré les dangers, ils continueront à partir », répète le juriste Shahanur Islam. Par la Libye ou ailleurs. « On commence à voir des Bangladais traverser l’Atlantique, rien de massif, quelques centaines, relate Chris Borowski, de Frontex. Les réseaux sont capables d’organiser des voyages jusqu’aux Canaries. »

    #Covid-19#migrant#migration#libye#bangladesh#routemigratoire#migrationirreguliere#trafic#sante#asile

  • Quarante-huit heures pour quitter la France : une Franco-Algérienne sous le coup d’une OQTF incompréhensible
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    Quarante-huit heures pour quitter la France : une Franco-Algérienne sous le coup d’une OQTF incompréhensible
    Par Simon Roger
    Dans la file d’attente du poste de douane de l’aéroport Roissy - Charles-de-Gaulle, le 2 juin vers 9 heures, Soraya (le prénom a été modifié à sa demande) pensait déjà aux retrouvailles avec ses parents, quelques heures plus tard à Alger, la ville où elle a grandi et où elle retourne fréquemment. Mais c’est à un tout autre scénario que cette femme de 58 ans, qui possède la double nationalité algérienne et française, a été confrontée, jusqu’à la notification, le 2 juin au soir, d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF) assortie d’une interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) d’un an.
    Elle n’a pas bénéficié du délai de départ volontaire, généralement fixé à trente jours, et est sommée de quitter la France sous quarante-huit heures. Pour étayer cette mesure d’OQTF, la Préfecture de police de Paris indique dans le courrier remis à Soraya – dont Le Monde a pris connaissance – qu’elle ne « justifie pas d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ». L’intéressée vit pourtant en France depuis 1993, elle y a obtenu son certificat de nationalité française quatre ans plus tard, y a fondé une famille et jouit d’une situation professionnelle stable.
    Contactée par Le Monde, la Préfecture de police n’a pas donné suite à nos questions. « Elle se contente de cocher des cases, de reproduire des phrases stéréotypées, alors que ses services ont à leur disposition les informations nécessaires pour vérifier les éléments qui semblent poser problème », déplore Samy Djemaoun, l’avocat de Soraya. Cette dernière aurait également, d’après la préfecture, « contrefait, falsifié ou établi sous un autre nom que le sien un titre de séjour ou un document d’identité et de voyage ».
    « Ces mots sont forts, mais surtout ils ne correspondent pas à la réalité des faits », réagit Me Djemaoun. La « contrefaçon » dénoncée renvoie à une erreur d’état civil et non à un acte intentionnel : « Je suis française par ma mère, qui elle-même avait obtenu la nationalité par son père, car elle était mineure au moment où il avait engagé la démarche. L’administration s’est rendu compte, bien plus tard, que ma mère était majeure, à un mois près, quand la nationalité française lui a été accordée, détaille Soraya. Par conséquent, ma mère aurait dû engager elle-même la demande pour que je puisse bénéficier, à mon tour, de la naturalisation. »
    Une procédure est diligentée contre Soraya et aboutit en 2001 à une décision de justice constatant l’extranéité. La mère de famille la conteste par voie d’avocat. Dès lors, elle n’aura plus aucune nouvelle de ce dossier. Elle poursuit sa vie normalement, jusqu’à cette journée du 2 juin où elle est retenue tout l’après-midi dans une cellule de la direction de la police aux frontières (PAF) de Roissy, avant que son mari ne soit autorisé à venir la chercher à 19 heures.
    « Dans ces locaux, on m’appelle par mon nom de jeune fille, on me demande de retirer mes bagues, mon soutien-gorge et mes chaussures, et je rejoins la cellule n° 3 dans l’attente de mon audition par un officier de police judiciaire », témoigne Soraya, qui vit depuis dans l’angoisse d’un contrôle d’identité, alors que sa carte d’identité et ses passeports français et algérien lui ont été confisqués.
    Dans la matinée du 2 juin, elle a déjà dû faire face aux questions et remarques d’une fonctionnaire qui lui répète qu’elle est en situation irrégulière, qu’elle risque d’être placée en centre de rétention administrative et que la seule option qui lui reste est de prendre l’avion pour Alger car elle dispose d’un billet d’avion et d’un passeport algérien en règle. « Mais ma vie est ici, se justifie Soraya. J’y ai un mari, deux grands garçons et une fille qui est encore petite. »En près de vingt-cinq ans d’existence de ce côté-ci de la Méditerrannée, elle a obtenu à trois reprises le renouvellement de son passeport, et a vu aussi sa carte d’identité renouvelée. Elle a toujours circulé sans entrave hors de France. Et a donc été considérée comme une citoyenne française de bonne foi… jusqu’au 2 juin.
    L’avocat de Soraya va déposer un recours devant le tribunal administratif compétent afin de contester l’OQTF et l’IRTF qui lui ont été notifiées. L’exécution de l’OQTF sera dans ce cas-là suspendue jusqu’à ce que le juge statue sur le recours. Il a six mois pour le faire. Pour Me Djemaoun, sa cliente ne peut être éloignée puisqu’elle est éligible à un titre de séjour : elle démontre une présence continue sur le sol français depuis dix ans, est parent d’enfant français et son conjoint est un Français. « Ce que fait Bruno Retailleau, cette façon de lâcher la bride aux forces de police, peut expliquer certaines décisions et certains comportements », avance le mari de Soraya. « Le contexte est particulier en ce moment, reconnaît cette dernière. Mais j’ai connu un autre contexte, particulier lui aussi, lorsque nous sommes arrivés en France en 1993. L’Algérie basculait dans une guerre civile terrible. La France, à l’époque, nous a offert la possibilité de construire notre vie. »

    #Covid-19#migrant#migration#france#algerie#OQTF#politiquemigratoire#sante#droit

  • Irlande du Nord : nouvelle nuit de violences anti-immigrés, des actes « racistes », selon la police
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    Irlande du Nord : nouvelle nuit de violences anti-immigrés, des actes « racistes », selon la police
    Le Monde avec AFP
    Neuf policiers ont été blessés et six personnes ont été arrêtées, dont trois adolescents, à l’issue d’une troisième nuit de violences anti-immigration en Irlande du Nord, a annoncé, jeudi 12 juin, la police.
    Les heurts se sont principalement produits dans la ville de Ballymena, où des individus s’en sont pris à nouveau aux forces de l’ordre, en jetant vers elles cocktails Molotov, feux d’artifice et autres projectiles, ainsi qu’une hachette, selon la police, qui a de nouveau eu recours à un canon à eau pour disperser la foule.Un centre de loisirs, où des familles déplacées par les émeutes à Ballymena avaient été logées temporairement, a été incendié à Larne, à une trentaine de kilomètres de là, sans qu’aucun blessé soit à déplorer.
    Ballymena est l’épicentre de ces émeutes, provoquées par l’inculpation de deux adolescents pour la tentative de viol d’une jeune fille dans cette ville située à une cinquantaine de kilomètres au nord de Belfast.
    La police, qui a qualifié ces violences de « racistes », n’a pas communiqué sur l’origine des deux jeunes. Selon les médias britanniques, ils se sont exprimés par l’intermédiaire d’un interprète roumain lors de leur comparution lundi au tribunal. Les violences, au cours desquelles des habitations ont été incendiées, se sont produites dans un quartier où vit une importante population immigrée. Des incidents ont aussi eu lieu mercredi soir à Carrickfergus et Newtownabbey, non loin de Belfast, ainsi qu’à Coleraine, dans le nord de la province britannique, où le trafic des trains et des bus a dû être interrompu. Des rassemblements ont eu lieu à Belfast, mais se sont déroulés « majoritairement dans le calme », selon la police.
    Six personnes ont été arrêtées pendant la nuit – deux hommes d’une vingtaine d’années, un trentenaire, et trois adolescents – et « d’autres arrestations suivront », a déclaré la police, se disant déterminée à « identifier tous les responsables de ces désordres criminels ». Six personnes avaient déjà été arrêtées lors des nuits précédentes. Neuf policiers ont été légèrement blessés, ont ajouté les forces de l’ordre. Trente-deux autres avaient été blessés précédemment. Ryan Henderson, responsable de la police d’Irlande du Nord, a de nouveau condamné un « comportement criminel complètement inacceptable ». « Ce que nous avons vu hier soir a provoqué de la peur et d’énormes perturbations pour les populations, notamment dans notre réseau de transport », a-t-il souligné.

    #Covid-19#migrant#migration#irlandedunord#immigration#violence#sante

  • « Si on n’était pas là, les exilés seraient dans les rues » : à la frontière franco-italienne, les refuges débordés par un nouvel afflux de migrants - InfoMigrants
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    « Si on n’était pas là, les exilés seraient dans les rues » : à la frontière franco-italienne, les refuges débordés par un nouvel afflux de migrants
    Par Louis Chahuneau Publié le : 12/06/2025
    À Oulx, en Italie, comme à Briançon, côté français, les refuges qui accueillent les migrants de part et d’autre des Alpes ont enregistré une forte hausse des arrivées au mois de mai, principalement des Érythréens et Éthiopiens. La préfecture des Hautes-Alpes confirme elle aussi cette augmentation. Les associations qui gèrent les lieux d’accueil dans la région redoutent une saturation cet été.
    L’été s’annonce chargé du côté de la frontière franco-italienne des Hautes-Alpes. D’Oulx, ville frontalière italienne, à Briançon, côté français, les refuges pour migrants ont observé une forte hausse du nombre de passages au mois de mai, là où les pics sont traditionnellement attendus plus tard dans l’été. Quelque 1 687 passages ont été recensés par le refuge Fraternita Massi d’Oulx au mois de mai, contre 369 en 2024 soit une augmentation de 357 % sur un an. En 2023, le refuge avait enregistré 876 arrivées à la même période.
    "Le nombre de passages a augmenté à partir d’avril jusqu’à devenir énorme au mois de mai, lors duquel on a accueilli jusqu’à 130 nouveaux migrants en une journée, contre une trentaine d’habitude. Depuis une semaine, on observe une décrue, mais on sait bien que ces fluctuations dépendent des débarquements à Lampedusa, explique Silvia Massara, bénévole au refuge Fraternita Massi, contactée par la rédaction. Fin avril, l’agence de gardes-côtes européenne Frontex avait en effet enregistré une forte hausse des débarquements sur l’île italienne due à de bonnes conditions météorologiques pour traverser la Méditerranée centrale.
    1 000 interpellations au mois de mai 2025, contre 291 en mai 2024
    Contactée par InfoMigrants, la préfecture des Hautes-Alpes confirme elle aussi une hausse importante des passages de la frontière franco-italienne sur le mois de mai : « 1004 ESI [étrangers en situation irrégulière, ndlr] dont 425 majeurs et 579 MNA ont été interpellés » à la frontière, contre 291, l’année dernière à la même période.
    De manière plus large, les autorités affirment que depuis le début de l’année, 1437 majeurs et 1197 « individus se déclarant mineurs non accompagnés (MNA) » ont été interpellés à la frontière soit, au total, 2 634 interceptions. À Briançon, première ville française après le franchissement de la montagne, les Terrasses solidaires se disent elles aussi débordées depuis plusieurs semaines : « On a accueilli deux fois plus de personnes au premier trimestre 2025 qu’à la même période l’année dernière », détaille Émile Rabreau, chargé de communication à l’association Refuges Solidaires qui gère l’accueil des exilés. Parmi les nouveaux arrivants du mois de mai, 82 % sont des Érythréens et des Éthiopiens, et 33 % sont des mineurs non accompagnés, selon les statistiques du refuge d’Oulx consultées par InfoMigrants. « On accueille beaucoup de femmes et d’enfants par rapport aux mois précédents, et beaucoup de mineurs non accompagnés, parfois jusqu’à 30 par jour », constate Silvia Massara.
    Pour faire face à cet afflux, le refuge, qui peut accueillir jusqu’à 80 migrants pour quelques nuits, a dû disposer des matelas à même le sol, tandis que les Terrasses solidaires ont installé des tentes humanitaires sur leur toit. Mais ce n’est pas le seul problème : « Comme ils arrivent en tongs, notre principale préoccupation est de leur trouver des chaussures », ajoute la bénévole.
    Le plus fréquemment, ces migrants arrivent de Libye jusqu’à l’île de Lampedusa avant de remonter l’Italie jusqu’aux Alpes. Une fois arrivés à Oulx, ils tentent de traverser les montagnes à pied, en passant par le col de Montgenèvre, situé à 1 850 mètres de hauteur, ou plus rarement celui de l’Échelle. « Ce sont des profils particulièrement marqués psychologiquement, quand ce ne sont pas des personnes blessées physiquement, qui plus est après une traversée en haute montagne », explique Émile Rabreau de Refuges Solidaires.
    Face à la militarisation de la frontière et à la multiplication des forces de l’ordre constatées ces dernières années, les exilés prennent de plus en plus de risque : « Les migrants réussissent à passer d’une manière ou d’une autre, mais la crainte des jeunes de croiser les militaires les amènent à traverser la montagne par des endroits périlleux. On a des jeunes qui ont mis jusqu’à 12 heures pour atteindre Briançon », rapporte Silvia Massara. Ces dernières années, plusieurs migrants ont d’ailleurs trouvé la mort en tentant de passer la chaîne montagneuse, comme la Nigériane Blessing Matthew en 2018, dont les circonstances du décès demeurent floues.
    L’hiver, les températures glaciales, le brouillard et le sol glacé rendent la traversée très dangereuse, mais des accidents peuvent aussi intervenir en plein été. En août 2023, un corps de migrant avec des écorchures au niveau des genoux avait été découvert sur la route militaire des Gondrans, entre Briançon et Montgenèvre.
    C’est justement pour éviter ce genre d’incidents que les associations d’aide aux migrants tentent de faire de la prévention des risques, au lieu d’encourager le passage de la frontière. « L’enjeu pour nous est de savoir qu’on peut les accueillir dignement, leur fournir une alimentation saine, un accès aux soins, et une mise à l’abri, même si c’est normalement le devoir de l’État », explique Émile Rabreau.
    Mais à Briançon comme à Oulx, les refuges sont confrontés depuis quelques mois à des pertes de financements qui compliquent encore plus la situation. « On a traversé l’année 2024 en grande difficulté, et ça s’est aggravé depuis. Les frais continuent, et les aides n’arrivent pas. Depuis que la mairie d’Oulx est passée à droite, elle met un point d’honneur à fermer notre refuge », souligne Silivia Massara. Le refuge soutenu par le curé de Bussolin, Don Luigi Chiampo, survit grâce aux financements de la ville de Bardonnèche, de la région et des dons privés.
    À Briançon, la donne n’est pas tellement différente. « Depuis deux mois, l’association est victime d’une grave crise de financement. Les fondations dont on dépend ont subi des coupes budgétaires. On se demande comment on va continuer à travailler dans de bonnes conditions », s’inquiète Émile Rabreau. Refuges Solidaires a divisé par deux le nombre de ses salariés et compte sur la solidarité des bénévoles (plus de 600 en 2024) et la générosité de la population pour palier le manque d’argent. Et Émile Rabreau de conculre : « Si on n’était pas là, les exilés seraient dans les rues ».

    #Covid-19#migrant#migration#france#alpes#briancon#routemigratoire#humanitaire#frontiere#sante

  • Tunisie : des « dizaines de corps » de migrants retrouvés sur des plages de Mahdia et Sfax - InfoMigrants
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    Tunisie : des « dizaines de corps » de migrants retrouvés sur des plages de Mahdia et Sfax
    Par La rédaction Publié le : 11/06/2025
    Selon le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), une association qui vient en aide aux migrants en Tunisie, des « dizaines de corps » ont été retrouvés depuis dimanche sur des plages de Mahdia et Sfax, dans le centre-est de la Tunisie. L’organisation regrette que les autorités n’aient pas communiqué sur ce sujet et demande plus de « transparence ».
    Nouvelles découvertes macabres sur les côtes tunisiennes. Depuis dimanche 8 juin, « des dizaines de corps » ont été retrouvés sur des plages de Mahdia et Sfax, dans le centre-est de la Tunisie, a indiqué mardi 10 juin dans un communiqué le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), une association qui vient en aide aux exilés dans le pays. Ces cadavres sont « probablement ceux de migrants en situation irrégulière » morts lors de naufrages au large de la Tunisie, ajoute l’organisation.
    Le FTDES regrette que les « autorités publient rarement des données détaillées sur les noyades survenues le long des côtes tunisiennes depuis juin 2024 », allant jusqu’à parler de « morts dissimulés ». Ainsi, l’association « exige davantage de transparence dans le dossier migratoire ». La Tunisie, dont le littoral se trouve à certains endroits à moins de 150 km de l’île italienne de Lampedusa, est devenue ces dernières années l’un des principaux points de départ en Afrique du Nord des exilés cherchant à gagner l’Europe.
    Mais la route maritime vers les côtes européennes est quasiment bloquée, Tunis ayant conclu à l’été 2023, sous l’impulsion de l’Italie toute proche, un partenariat avec l’Union européenne (UE) contre l’immigration irrégulière. Depuis cette date, C’est la double peine pour les exilés présents en Tunisie : ils sont non seulement régulièrement violemment interceptés en mer quelques minutes après leur départ mais aussi victimes d’une véritable « chasse à l’homme ». Ils sont arrêtés dans les rues, les commerces, en mer, dans leur maison ou sur leur lieu de travail et expulsés dans le désert, vers les zones frontalières de la Libye et de l’Algérie.
    Après leur interpellation, les exilés risquent aussi de finir en centre de détention pour « séjour irrégulier » aux côtés de prisonniers de droit commun.Les lieux de vie sont également ciblés par les autorités. Les campements de migrants disséminés dans les champs d’oliviers à El-Amra, en périphérie de Sfax, sont régulièrement détruits par les policiers, laissant les exilés dans le plus grand dénuement.
    Une politique dénoncée depuis des années par les associations et les instances internationales. « Les scènes de mort sur les côtes, les expulsions vers la frontière, les incendies et la destruction des camps, ainsi que les témoignages de personnes en déplacement et de réfugiés, contredisent le discours officiel sur les leçons humanitaires à tirer de la gestion des migrants », signale le FTDES.
    Dans ce contexte, le président tunisien a demandé, en mars, à l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) à intensifier ses efforts pour assurer les « retours volontaires » des migrants irréguliers vers leurs pays. En 2024, un nombre record d’exilés étaient retournés chez eux via l’OIM : 7 250 personnes contre 2 250 en 2023, ce qui représentait déjà une hausse de 45 % par rapport à 2022."Il faut que les organisations responsables fassent leur travail dans les plus brefs délais et que les pays de l’UE contribuent au financement du retour des personnes dans leurs pays. Cela nécessite plus que les 20 millions d’euros répartis entre trois pays maghrébins", a aussi exhorté fin avril le député de Sfax Tarak Mahdi, joint par InfoMigrants.

    #Covid-19#migrant#migration#tunisie#migrationirreguliere#mortalite#sante#routemigratoire

  • Manifestation à New York contre la politique migratoire de Trump
    https://www.dakaractu.com/Manifestation-a-New-York-contre-la-politique-migratoire-de-Trump_a262249.

    Manifestation à New York contre la politique migratoire de Trump
    « Pas de haine, pas de peur, les immigrants sont les bienvenus ». Quelques milliers de personnes ont marché mardi en début de soirée dans les rues de New York pour protester contre la politique migratoire de Donald Trump, selon une équipe de l’AFP sur place.
    Les manifestants, incluant de nombreux jeunes, se sont réunis au Foley Square, une place près de tribunaux d’où des migrants ont été arrêtés vendredi dernier par les forces de l’ordre, pour marcher dans le sud de Manhattan. « ICE, hors de New York », pouvait-on lire sur de nombreuses affiches en référence à la police fédérale de l’immigration qui multiplie les arrestations de migrants ou demandeurs d’asile ces dernières semaines aux Etats-Unis, prélude par ailleurs à des heurts musclés à Los Angeles.
    « Je suis ici pour défendre ceux qui ne peuvent pas faire entendre leur voix ici », a expliqué à l’AFP une femme dans la vingtaine née aux Etats-Unis d’une mère mexicaine sans statut officiel. « Franchement, ce pays ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui sans les immigrés. Je suis ici pour eux », a-t-elle ajouté en requérant l’anonymat.
    « La peur est là au quotidien, dès le premier jour où ils sont venus ici et ont traversé la frontière. Chaque jour, quand ils vont travailler, ils ont peur d’être arrêtés et que la moindre petite chose puisse entraîner leur expulsion », a-t-elle poursuivi.
    Plusieurs manifestants avaient le visage couvert afin de ne pas être identifiés et subir de possibles représailles, tandis que d’autres affichaient des drapeaux palestiniens. « Je suis ici pour défendre l’immigration, m’opposer au ICE et soutenir la Palestine libre. Toutes ces luttes sont liées entre elles », a dit à ce propos Cara, 23 ans.
    « J’ai peur pour les miens. Je ne veux pas vivre dans une société où j’ai peur pour la santé de ma famille ou d’autres familles », a raconté Jacqueline, une Américaine de 23 ans d’origine mexicaine.
    La situation dans la première ville américaine est jusqu’à présent plus calme qu’à Los Angeles où ont lieu depuis vendredi des affrontements entre forces de l’ordre et des manifestants opposés aux expulsions musclées de sans-papiers.
    Le président américain Donald Trump a déployé à Los Angeles des milliers de soldats, dont 700 Marines, des militaires d’active, contre l’avis des autorités californiennes qui estiment que la situation est sous contrôle. « New York sera toujours un lieu de manifestation pacifique, mais nous n’allons pas tolérer la violence et l’anarchie », a déclaré mardi le maire de la ville, Eric Adams qui a dit compter non pas sur l’armée mais la police locale, le NYPD, qui est « parée à toute éventualité ».

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#politiquemigratoire#newyork#expulsion#droit#sante#ICE

  • A Los Angeles, les habitants sans papiers terrifiés par les rafles : « Je pensais qu’ils cherchaient les criminels »
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/11/a-los-angeles-la-peur-des-rafles-je-pensais-qu-ils-cherchaient-les-criminels

    A Los Angeles, les habitants sans papiers terrifiés par les rafles : « Je pensais qu’ils cherchaient les criminels »
    Par Corine Lesnes (Los Angeles, envoyée spéciale)
    Elle est prostrée, sur un banc de Grand Park, à l’écart de la manifestation. Noemi Ciau est sans nouvelles de son mari depuis déjà plus de vingt-quatre heures. Jesus Cruz a été arrêté, dimanche 8 juin, à la station de lavage auto de Westchester, près de l’aéroport de Los Angeles, où il travaillait depuis dix ans. Elle n’a pas encore prévenu le dernier de leurs quatre enfants. Sur la pancarte que quelqu’un a donnée à la mère de famille, il est écrit que la police de l’immigration (ICE) n’est pas la bienvenue à Los Angeles, ville de près de 4 millions d’habitants, dont une moitié de Latino-Américains, et que « nul être humain n’est illégal ». Elle porte le panneau, à l’envers, mécaniquement, tête baissée. « Je voudrais juste savoir où ils l’ont emmené », murmure-t-elle.
    Jesus Cruz, 51 ans, vivait à Los Angeles depuis trente ans. Il était environ 15 heures, dimanche, quand un véhicule banalisé a déposé les agents de l’immigration à la station de lavage. Sept employés ont été emmenés. Noemi Ciau n’ignorait pas que le gouvernement de Donald Trump avait décidé de s’en prendre aux sans-papiers. Elle n’avait jamais vraiment eu de craintes pour son mari, malgré son absence de papiers en règle. Elle pensait que la police « cherchait les criminels ». Ce même dimanche, Arturo Vasquez, 48 ans, faisait laver sa voiture dans un autre car wash, à Culver City. Il n’y travaillait pas, il n’était qu’un client. Il a été arrêté devant ses enfants. Avant d’être menotté, il a demandé à l’un de ses fils, Brian, 16 ans, de lui promettre de s’occuper de son frère et de leur mère. Deux jours plus tard, la famille ne savait toujours pas où il était détenu.
    Au cinquième jour des raids de la police de l’immigration dans l’agglomération de Los Angeles, le scénario est devenu familier. Des habitants, établis de longue date dans une ville qui se fait une fierté de sa diversité, sont brusquement séparés de leur famille, victimes d’un système qui a toléré leur présence pendant des décennies sans parvenir à une régularisation de leur situation, faute de consensus des responsables politiques.
    Sans prévenir, l’ICE débarque à l’endroit ciblé, parfois dans des véhiculés banalisés, pour éviter que sa présence soit immédiatement relayée sur les réseaux sociaux. Ces derniers jours, elle s’est attaquée aux stations de lavage de voitures, confirme Flor Rodriguez, du Clean Car Wash Worker Center, une association qui lutte contre l’exploitation des quelque 10 000 carwasheros de Los Angeles.
    La police de l’immigration est aussi intervenue dans une bibliothèque à Whittier, dans le sud-est de la ville, et dans des entreprises. La chaîne de magasins de bricolage Home Depot est l’une de ses cibles. Les journaliers ont l’habitude de s’y regrouper pour trouver du travail. Selon The Wall Street Journal, c’est Stephen Miller, architecte de la politique d’expulsion de Donald Trump, qui leur a conseillé de viser cet établissement populaire parmi les ouvriers de la construction.
    La Coalition for Humane Immigrant Rights a recensé des opérations dans une maison de retraite, une boutique de donuts ou la fabrique de vêtements Ambiance. A l’école élémentaire Gratts Learning Academy, dans le quartier de Westlake du centre de Los Angeles, la rumeur a couru d’une rafle imminente, des véhicules de police ayant été aperçus sur un parking voisin. Les parents se sont dispersés, les enfants sont restés désemparés. La population est terrifiée, s’est désolée Karen Bass, la maire démocrate de Los Angeles : « Les gens ne savent pas s’ils doivent aller travailler, aller à l’école. » Le gouverneur démocrate de Californie, Gavin Newsom, a dénoncé, lui aussi, la cruauté des rafles. « Ils ont arrêté des cuisiniers, des couturières, des laveurs de vaisselle. Ils traumatisent nos communautés, s’est-il indigné. Cela semble être [leur] but. »
    La maire de Los Angeles, Karen Bass, lors d’un rassemblement organisé contre les raids de la police de l’immigration à Grand Park, Los Angeles, le 10 juin 2025.
    La police a annoncé que 45 personnes avaient été arrêtées dans la journée de dimanche. Lundi, cinq raids ont eu lieu. Les ONG de défense des migrants estiment à une centaine le nombre d’interpellations depuis le 6 juin. Un bilan plutôt maigre, compte tenu des moyens déployés. Lundi, le Pentagone a chiffré à 134 millions de dollars (117 millions d’euros) le coût du déploiement des 700 marines dépêchés de la base de Twentynine Palms, dans le désert californien.
    La Californie a été le premier Etat à se déclarer en totalité « sanctuaire » pour les migrants, un terme correspondant à une politique de protection codifiée par la loi sur les valeurs californiennes de 2017. Elle limite la coopération entre forces locales et agences fédérales pour les expulsions, sauf pour crimes graves. Les migrants en situation irrégulière se sont habitués à une réelle impunité concernant leur situation administrative. Ils paient des impôts, leurs enfants sont, pour la plupart, américains.
    Les descentes de police ont créé un choc encore plus important qu’ailleurs, comme en témoigne l’ampleur de la mobilisation pour faire reculer la police. Lundi, la municipalité de Glendale, au nord de Los Angeles, a préféré résilier un contrat qui la liait depuis dix-huit ans avec l’ICE pour héberger des migrants en attente d’expulsion. Les responsables scolaires ont, eux, annoncé qu’ils allaient protéger les écoles à l’approche des cérémonies de fin d’année.
    Grâce aux réseaux sociaux, les images circulent ; choquantes, comme celle d’une future mère bousculée par un policier ; déchirantes, comme celles montrant des mères de famille refusant de toutes leurs forces de monter dans les véhicules policiers. A chaque fois, le contraste est saisissant entre les migrants, désarmés, en tee-shirt, robe, sandales, et les agents de l’ICE en tenue de combat. La mission a changé, a dénoncé Karen Bass. « Au début, il était question de criminels violents, de trafiquants de drogue. Je ne sais pas comment ça peut coller avec ces images que l’on voit maintenant de gens courant sur les parkings de Home Depot. »
    Au début de sa campagne d’expulsion, la Maison Blanche estimait avoir marqué des points dans l’opinion en montrant des « criminels » menottés par-delà leurs tatouages, accusés d’être membres de gangs vénézuéliens. Aujourd’hui, elle risque d’en perdre avec ses rafles organisées devant les établissements scolaires et les magasins de bricolage.

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#politiquemigratoire#ICE#expulsion#californie#etatsanctuaire#doit#sante

  • Au procès d’un maraîcher jugé pour avoir fait travailler des sans-papiers dans des conditions indignes : « Qui c’est qui va ramasser mes tomates ? J’ai pas le choix ! »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/06/11/au-proces-d-un-maraicher-juge-pour-travail-dissimule-qui-c-est-qui-va-ramass

    Au procès d’un maraîcher jugé pour avoir fait travailler des sans-papiers dans des conditions indignes : « Qui c’est qui va ramasser mes tomates ? J’ai pas le choix ! »
    Par Pascale Robert-Diard (Le Mans, envoyée spéciale)
    A Saint-Paterne-Le Chevain (Sarthe), bourg de 2 000 habitants près d’Alençon, Jean-Luc Pottier cultive les tomates, les herbes aromatiques et les poursuites judiciaires. Le maraîcher de 64 ans qui s’avance, mardi 10 juin, à la barre du tribunal correctionnel du Mans a le corps sec, la peau tannée, les cheveux très blancs, les yeux très bleus. Il porte bermuda, tee-shirt et chaussettes mi-basses dans des mocassins fatigués. La liste des faits qui lui sont reprochés est longue comme le bras : travail dissimulé, rétribution inexistante ou insuffisante de plusieurs personnes vulnérables, traite d’êtres humains, blanchiment, fraude fiscale aggravée, violation délibérée d’obligation de sécurité ou de prudence.
    Les parties civiles à son procès se prénomment Enkbold, Abdoulaye, Soulimane, Moufida, Mohamed, Mamoudou, Mahdi, Mamar, Armen, Tamaz, Anvar, Wahid, Mate, Anis, Aliou. Ils viennent d’Algérie, d’Arménie, de Russie, du Sénégal, de Georgie ou de Mongolie. Tous sont sans papiers. Non déclarés, payés entre 6,50 et 8 euros de l’heure en espèces, ils ont travaillé plusieurs mois, certains plusieurs années, dans la serre de Jean-Luc Pottier. Quinze heures par jour. Six, voire sept, jours sur sept en période de récolte. Le montant de la fraude au préjudice de la Mutuelle sociale agricole est estimé à 520 000 euros.
    C’est la deuxième fois que Jean-Luc Pottier est jugé pour travail dissimulé. « Dissimulé, c’est pas un mot pour moi. Moi, je suis un homme de la vérité », dit-il. Il est d’ailleurs « content d’être là » pour s’expliquer. Alors, oui, il ne déclarait pas ses salariés. « Je trouve personne pour travailler dans mon entreprise. La régularisation, j’ai essayé une fois, j’y suis pas arrivé. J’ai convoqué France Travail, impossible de trouver des salariés. Qui c’est qui va ramasser mes tomates ? J’ai pas le choix. » L’emploi d’un mineur ? Il reconnaît aussi. « Il était mineur mais costaud. » Et, non, ça ne lui a pas posé de problème. « Ben, mon fils, il a travaillé quand il était mineur. Moi, j’ai travaillé à 11 ans. » La traite d’être humains ? Alors, là, Jean-Luc Pottier ne comprend vraiment pas. « J’ai jamais été cherché personne. Ce sont eux qui viennent me voir. Ils se connaissent tous, ils font venir les copains. C’est du bouche-à-oreille. »
    Aux gendarmes qui l’interrogeaient pendant l’enquête, il avait déclaré : « Je suis comme l’abbé Pierre. Des gens frappent à ma porte et je leur donne du travail. » « Bon, l’abbé Pierre, avec ce qu’il a fait, on n’aurait pas cru, c’est plus un bon exemple, concède-t-il. Mais, chez moi, c’est un peu la maison du bon Dieu. Je prends ceux qui se présentent. Pour eux, c’était une chance. Moi, j’ai pas eu cette chance-là. » Les journées à rallonge, la pression, les cris, les insultes dénoncées par ses employés ? Même incompréhension. Au contraire, assure-t-il, « il y a une bonne ambiance dans mon entreprise. » Des exclamations et des rires fusent sur les bancs des parties civiles. Jean-Luc Pottier se retourne, furieux. « Si vous êtes pas contents aujourd’hui… » La présidente le rappelle à l’ordre, il poursuit : « Oui, ils font des heures, mais c’est parce qu’ils n’avancent pas ! Moi, je ne les force pas. C’est eux qui me disent : “On veut des heures, on veut de l’argent.” Vous savez, les personnes non déclarées me coûtent très très cher, parce qu’elles avancent doucement. La victime, c’est moi ! Je travaille énormément. C’est sûr qu’au prix où on m’achète mes tomates, je peux pas en vivre. »
    Depuis un an, son contrôle judiciaire lui interdit de gérer son entreprise. Un administrateur a remis de l’ordre dans la comptabilité et, officiellement, c’est désormais son jeune fils qui dirige l’exploitation. Les nouveaux employés, trouvés par l’intermédiaire des sœurs bénédictines – un « miracle », dit-il – sont « dûment déclarés, avec des fiches horaires ». « Tout a changé, on est sur les rails », affirme le maraîcher. « Moi, je fais des tomates extraordinaires. Sur les marchés, tout le monde se déchire pour les avoir. Si on me ferme l’entreprise, je m’élimine direct. Je mets tout mon argent dans mes tomates. Ça fait sept générations qu’on est maraîchers. J’adore mon travail, je me contente de peu. » Le 20 mai, Jean-Luc Pottier a été contrôlé sur un marché à Versailles. Celui qui l’aidait à décharger le camion était un de ses anciens employés, en situation illégale, revenu dans l’exploitation après le passage de l’inspection du travail. « Je voudrais le déclarer, parce que c’est un ami. Vous pourriez m’aider ? », demande-t-il tout à trac au tribunal.
    Contre le maraîcher récidiviste, le procureur a requis deux ans d’emprisonnement ferme. Jugement le 7 juillet.

    #Covid-19#migrant#migration#france#agriculture#traite#economie#travailleurmigrant#droit#sante

  • A Los Angeles, les syndicats en première ligne pour défendre les migrants
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/10/a-los-angeles-les-syndicats-en-premiere-ligne-pour-defendre-les-migrants_661

    A Los Angeles, les syndicats en première ligne pour défendre les migrants
    Par Corine Lesnes (Los Angeles, envoyée spéciale)
    Dans le centre de Los Angeles, la mobilisation semble chaque jour monter davantage contre les raids de la police de l’immigration et le déploiement de la garde nationale. « C’est notre ville, ce sont nos rues, explique Elizabeth Strater, vice-présidente du syndicat des ouvriers agricoles United Farm Workers. On ne va pas laisser faire sans réagir. » Les syndicalistes manifestaient, lundi 9 juin, aux pieds de la mairie de Los Angeles, sous les jacarandas de Grand Park. Ils étaient plus d’un millier, aux couleurs de leurs organisations respectives. Violet pour les membres de l’Union internationale des employés des services (SEIU), le puissant syndicat des services. Jaune pour celui des travailleurs de l’alimentation et du commerce. Dans la foule, les panneaux hostiles au « dictateur qui kidnappe les papas et les mamans » ou à la United States Immigration and Customs Enforcement (ICE), la police de l’immigration. « Arrêtez les raids ! », « Nous sommes tous des migrants ».
    Principale revendication : obtenir la libération de David Huerta, le chef du SEIU pour la Californie, une figure importante de la scène californienne. Agé de 58 ans, ancien agent d’entretien, le syndicaliste a été arrêté, vendredi, devant l’entrepôt d’une entreprise de vêtements soupçonnée d’employer des immigrés en situation irrégulière, où la police était venue perquisitionner. La justice lui reproche d’avoir fait obstruction à l’opération. Une vidéo le montre poussé à terre par un agent. Il a été légèrement blessé.
    L’administration Trump ignorait-elle qui il était ? A-t-elle voulu montrer, une nouvelle fois, que « nul n’est au-dessus de la loi fédérale » ? L’incarcération de M. Huerta a contribué au déclenchement des protestations désormais quotidiennes devant le centre de détention, dans Downtown LA. Elle a aussi suscité l’émotion des élus nationaux. En même temps qu’à Los Angeles, des manifestations ont eu lieu, lundi, à Washington, à Boston et à San Francisco pour réclamer sa libération.
    En début d’après-midi, David Huerta a été remis en liberté sous caution, mais il reste poursuivi pour complot empêchant l’action de la police fédérale. Un agent en civil a affirmé l’avoir vu consulter son téléphone et envoyer des messages, alors que des manifestants essayaient de tourner en rond devant la grille pour perturber les entrées. Pour Elizabeth Strater, il n’est pas surprenant que la mobilisation soit importante. « En Californie, on ne s’attaque pas au mouvement ouvrier », dit-elle. Les syndicats sont un facteur important d’intégration pour les Latinos. Ils offrent des bourses d’études aux enfants, des aides judiciaires, voire des possibilités de régularisation aux sans-papiers. « Est-ce que Trump se rend compte que les membres de la garde nationale qu’il a mobilisés sont, eux aussi, les enfants d’agents d’entretien ou d’ouvriers agricoles ? », interroge la responsable.
    Le Golden State est aussi l’Etat qui compte le plus grand nombre de personnes en situation irrégulière, notamment dans la Vallée centrale, où plus de la moitié des travailleurs agricoles sont sans statut légal. Mme Strater se moque des propos des partisans du président, qui prétendent « libérer » la Californie de ses « criminels » sans papiers. « Un Américain sur trente-cinq habite dans le comté de Los Angeles, souligne-t-elle. Et ils veulent nous libérer ? Mais l’Amérique, c’est nous ! »

    #Covid-19#migration#migrant#etatsunis#californie#politiquemigratoire#travailleurmigrant#syndicat#sante#migrationirreguliere#integration

  • Après les opérations contre les migrants à Los Angeles, le Mexique s’inquiète du sort de ses ressortissants
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/10/politique-migratoire-de-donald-trump-le-mexique-s-inquiete-du-sort-de-ses-re

    Après les opérations contre les migrants à Los Angeles, le Mexique s’inquiète du sort de ses ressortissants
    Par Anne Vigna (Mexico, correspondante)
    Lundi 9 juin, la conférence de presse quotidienne de la présidente mexicaine a exceptionnellement commencé par la lecture d’un communiqué sur les « événements de Los Angeles », comme les a qualifiés Claudia Sheinbaum : « Les Mexicains qui vivent aux Etats-Unis sont des travailleurs honnêtes ; la majorité a la citoyenneté américaine ou une résidence légale. Nous lançons donc un appel respectueux mais très ferme aux autorités américaines pour qu’ils soient traités dignement. »
    Le ministre des affaires étrangères, Juan Ramon de la Fuente, a ensuite pris la parole pour donner des chiffres : 42 Mexicains ont été arrêtés depuis le 6 juin à Los Angeles. « Sur les 40 millions de Mexicains qui vivent aux Etats-Unis, seuls 4,9 millions sont illégaux et 95 % de ces clandestins vivent dans ce pays depuis plus de cinq ans. » En rappelant ces données, le gouvernement mexicain entend d’abord répondre au président américain, Donald Trump, qui évoque sans cesse « une invasion par des criminels venus de l’étranger ».
    Il cherche aussi à rassurer la population, inquiète face aux images violentes de Los Angeles, présentée au Mexique comme « la deuxième plus grande ville mexicaine au monde après Mexico » en raison de ses 3,8 millions de descendants. Tout le week-end, les photos des manifestants détenus et les opérations de la police migratoire américaine ont alimenté les commentaires sur le racisme dont font l’objet les Latinos aux Etats-Unis.
    Le Mexique avait préparé depuis février des installations à la frontière pour recevoir des migrants refoulés par les Etats-Unis, jusqu’à présent bien peu utilisées. Depuis les manifestations à Los Angeles, les Mexicains ont désormais le sentiment que les expulsions de masse vont commencer. « Nous sommes à un tournant, le plus difficile, le plus complexe, le plus violent. Pas à cause des manifestations mais de l’appareil d’Etat, qui (…) cherche à réaliser l’un des rêves de Trump : celui de la déportation massive », a déclaré Tonatiuh Guillén, ancien commissaire de l’Institut national de migration, au site Aristegui noticias. Comme de nombreux éditorialistes, ce sociologue de l’Université nationale autonome du Mexique (UNAM) craint l’adoption du prochain budget aux Etats-Unis : « Donald Trump veut donner à la police migratoire les moyens d’intervenir partout : aller chercher les personnes chez elles, sur les lieux de travail, dans les écoles, les églises. Il n’y a pas de limite. »
    Si elles deviennent massives, ces expulsions auront des conséquences économiques quasi immédiates au Mexique : les « remesas », les envois de devises des migrants, ont atteint un nouveau record en 2024 : 64,5 milliards de dollars (56,5 milliards d’euros) en 2024, soit 4 % du produit intérieur brut, selon la Banque du Mexique. Cet argent est souvent indispensable pour les familles les plus démunies : les dix Etats les plus pauvres du pays en reçoivent plus de la moitié.Le gouvernement mexicain a condamné les violences des manifestations du week-end, mais le parti au pouvoir, Morena, avait organisé un rassemblement mardi, devant l’ambassade des Etats-Unis à Mexico. Dans la soirée de lundi, celle-ci a finalement été repoussée « à une date ultérieure ». Plus tôt dans la journée, des manifestants ont brûlé des drapeaux américains et une effigie de Donald Trump devant les grilles de l’ambassade. Le rassemblement avait été convoqué par le slogan « Personne n’est illégal sur une terre volée ». Une allusion au fait que la Californie faisait partie du territoire mexicain jusqu’en 1846 et que nombre de Mexicains la considèrent toujours comme leur terre.

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#mexique#politiquemigratoiore#expulsion#californie#sante

  • En Italie, les référendums sur la naturalisation et le droit du travail, voulus par l’opposition, échouent
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/09/en-italie-les-referendums-sur-la-naturalisation-et-le-droit-du-travail-voulu

    En Italie, les référendums sur la naturalisation et le droit du travail, voulus par l’opposition, échouent
    Par Allan Kaval (Rome, correspondant)
    L’Italie progressiste avait une occasion de se compter. L’échec est patent. Alors que la législature qui a vu arriver à la présidence du conseil la figure d’extrême droite Giorgia Meloni est entrée dans sa seconde moitié, sans que le socle électoral de la coalition se soit érodé, les principales forces d’opposition ont perdu leur pari. Lundi 9 juin, à la fermeture des bureaux de vote ouverts la veille, les référendums d’initiative populaire sur le droit du travail et l’accès à la citoyenneté, voulus par l’opposition, n’ont pas réuni suffisamment de votants pour que leurs résultats soient validés, le taux de participation étant resté bien inférieur au quorum, fixé à 50 % des inscrits plus une voix. A la sortie des urnes, la participation pour l’ensemble des scrutins plafonnait à moins de 30,6 %.
    Les Italiens étaient invités à s’exprimer sur cinq questions distinctes. Trois d’entre elles visaient à revenir sur des mesures législatives ayant retiré des garanties aux employés en cas de licenciement ou ayant facilité, pour les employeurs, l’usage des contrats à durée déterminée. Un autre référendum renforçait les responsabilités des entreprises donneuses d’ordre en cas d’accident du travail dans le cadre de sous-traitance, une problématique récurrente en Italie et très présente dans les médias.
    Le oui l’a très largement emporté sur ces questions liées au monde du travail, avec des résultats qui, bien qu’oscillant entre 87,1 % et 88,8 % des voix, resteront sans effets faute de participation. En revanche, le référendum le plus attendu et le plus débattu a donné lieu à un score beaucoup plus modeste. Portant sur les modalités d’accès à la citoyenneté, il devait ouvrir la voie au passage à cinq années de séjour régulier nécessaires pour effectuer une demande de naturalisation, contre dix aujourd’hui. Seuls 60 % des votants se sont prononcés en faveur de cette évolution.
    « Il s’agit d’une défaite claire pour l’opposition qui, en plus d’échouer à rassembler les électeurs, s’est montrée divisée », analyse Lorenzo Pregliasco, fondateur de l’institut de sondages YouTrend. De fait, si le front était large, il s’est avéré confus. Ainsi, le Parti démocrate (centre gauche) défendait le oui aux cinq questions mais comptait en interne des voix centristes dissidentes concernant celles liées au droit du travail, sur lesquelles s’est en revanche singulièrement impliquée la Confédération générale italienne du travail, le principal syndicat (gauche) du pays. Les antisystèmes du Mouvement 5 étoiles, qui ont gouverné avec la Ligue (droite radicale) en 2018-2019, n’avaient, pour leur part, pas donné de consigne à leurs électeurs sur la question portant sur la citoyenneté.
    Ce thème, récurrent lui aussi, avait surgi de nouveau au lendemain des Jeux olympiques de Paris 2024. L’Italie se découvrait une nouvelle fois, à travers les histoires familiales de ses champions, un pays divers où des communautés d’origine étrangère étaient désormais inséparables du corps national, malgré des conditions d’accès à la nationalité restrictives. Les résultats de lundi ont de quoi congeler ces débats à moyen terme, confortant la droite nationaliste. « L’écart entre les scores du oui sur les questions sociales et sur la citoyenneté montre que, quand les thèmes identitaires sont en jeu, même l’électorat de gauche se montre prudent », explique Lorenzo Pregliasco, qui souligne que le poids de l’abstention aux référendums est le corollaire d’une crise profonde, la participation n’ayant été que de 64 % aux élections législatives de 2022. Exception faite d’un scrutin de 2011, aucun référendum d’initiative populaire organisé en Italie n’a jamais atteint le quorum.
    Le scrutin sans lendemain de dimanche et lundi a fourni un succès à peu de frais aux forces d’extrême droite et de droite qui composent le gouvernement Meloni. Pour célébrer cette issue, Fratelli d’Italia, le parti de la présidente du conseil, qui avait déclaré qu’elle se rendrait dans son bureau de vote mais ne placerait pas de bulletin dans l’urne, a choisi un message élémentaire. Sur son compte Instagram, la formation d’extrême droite a fait publier une photographie des principaux leaders de l’opposition, accompagnée de cette mention : « Vous avez perdu. » En lettres capitales.

    #Covid-19#migrant#migration#italie#regularisation#referendum#immigration#citoyennete#sante

  • Comment Donald Trump exploite les heurts à Los Angeles pour durcir sa politique migratoire
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/09/comment-donald-trump-exploite-les-tensions-a-los-angeles-pour-durcir-sa-poli

    Comment Donald Trump exploite les heurts à Los Angeles pour durcir sa politique migratoire
    Piotr Smolar
    Une surréaction calculée et préméditée, juridiquement contestable, aux conséquences imprévisibles : ainsi se résume le recours à la garde nationale par Donald Trump, dans la soirée du 7 juin, face à des scènes de violences urbaines très localisées, apparues dans deux villes de l’agglomération de Los Angeles (Californie). Cette décision controversée, qui permet au président de court-circuiter le gouverneur démocrate, Gavin Newsom, a entraîné, dès dimanche, le déploiement sur place de 300 premiers soldats pour protéger de façon préventive des bâtiments fédéraux.
    Plusieurs rassemblements, d’abord pacifiques, puis émaillés de quelques heurts, ont eu lieu en ville et sur l’autoroute 101 dans une atmosphère de tension accrue. Le récit recherché par la Maison Blanche était posé : l’ordre fédéral contre le chaos, la traque des clandestins étant contrariée par des élus démocrates laxistes et des émeutiers extrémistes. « Ils crachent, on frappe », a résumé Donald Trump. La formule lapidaire voulait marquer une sévérité. Elle disait aussi, en creux, à quel point la menace réelle était grossie, dans la chambre d’écho des réseaux sociaux, malgré les images spectaculaires de taxis Waymo sans chauffeur incendiés et couverts de graffitis.
    La veille, des affrontements avaient eu lieu dans deux villes situées en périphérie de Los Angeles, Paramount et Compton, en raison de la multiplication des opérations coup de poing menées par les policiers de l’ICE, l’agence chargée du contrôle des frontières et de l’immigration. Une loi de 1878, le Posse Comitatus Act, interdit, en principe, l’utilisation de soldats sur le plan intérieur, pour des missions dévolues à la police. Mais une exception antérieure existe, l’Insurrection Act (1807). Si la loi fédérale ne peut plus être appliquée dans la pratique, en raison d’un défi sécuritaire et politique grave lancé à l’autorité du gouvernement, alors l’intervention de l’armée peut se justifier. Or rien, dans les événements de ces derniers jours à Los Angeles, ne relève de ce cadre d’exception.
    Pour l’heure, Donald Trump s’est gardé d’invoquer ce texte de 1807. Mais il n’excluait pas de faire appel aux marines, dont un bataillon de 700 hommes était mobilisé lundi. Quelle serait la barre qualificative ? « La barre sera ce que j’en pense, a répondu le président. Si nous voyons un danger pour notre pays et nos citoyens, nous serons très, très forts en termes de loi et d’ordre. »
    La préméditation de Donald Trump et de ses conseillers ne fait aucun doute. Dès avril 2024, dans un entretien au magazine Time, le candidat républicain de l’époque justifiait la mobilisation de la garde nationale contre l’immigration illégale, aux frontières comme à l’intérieur du pays. Ce serait illégal en vertu du Posse Comitatus Act, rétorquaient les journalistes. « Eh bien, ce ne sont pas des civils, lâchait Donald Trump, au sujet des clandestins. Ce sont des gens qui ne sont pas légalement dans notre pays. Une invasion comme aucun pays n’en a probablement vu un jour. » Dimanche, le président ne disait pas autre chose du déploiement ordonné, dans un message sur Truth Social. L’objectif : « Libérer Los Angeles de l’invasion des migrants. »
    Le milliardaire n’a pas toujours manifesté le même entrain pour défendre l’intégrité du pays et ses institutions. Le 6 janvier 2021, alors que des milliers de manifestants donnaient l’assaut au bâtiment du Capitole pour empêcher la certification de l’élection présidentielle, Donald Trump, assis devant la télévision à la Maison Blanche, n’avait pas demandé l’intervention de la garde nationale. Il en avait ensuite tenu pour responsable la speaker démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, élue de Californie. En revanche, l’ancien secrétaire à la défense, Mark Esper, avait raconté dans ses mémoires que Donald Trump, en 2020, s’était enquis auprès de l’état-major s’il était possible de tirer dans les jambes des manifestants, lors des protestations ayant suivi la mort de George Floyd.
    Depuis des jours, à Los Angeles, la pression de la police fédérale ne cessait de monter, avec des interpellations de clandestins en plein jour. Paramount est une cité ouvrière essentiellement peuplée de migrants hispaniques, employés notamment dans l’industrie hôtelière et la restauration. Samedi matin, en face d’un magasin de bricolage Home Depot, des agents de l’ICE ont été signalés, provoquant assez vite un rassemblement. Les réseaux sociaux ont diffusé la nouvelle à grande vitesse, tandis que les incidents débutaient : grenades assourdissantes et gaz lacrymogène du côté de la police, jets de pierre et d’autres objets du côté des manifestants. Une voiture a été incendiée et du matériel urbain détérioré.
    Le décret présidentiel de Donald Trump prévoit le déploiement de 2 000 membres de la garde nationale de Californie pendant au moins soixante jours. Les juristes s’interrogent sur la marge de manœuvre des effectifs rassemblés à Los Angeles. Ont-ils le droit de répondre à des émeutiers ? De les interpeller ? Le message est clair : les autorités passent à une nouvelle phase dans la confrontation avec les villes dites « sanctuaires », gouvernées par des démocrates, accusées de faire obstruction aux interpellations fédérales. Fin avril, Donald Trump a demandé à son administration de préparer la liste des Etats ou des villes se mettant en travers de son chemin répressif. Renouant avec une très ancienne thématique de son premier mandat, il a promis que les fonds alloués à ces supposés « sanctuaires » – un terme ne correspondant à aucune réalité objective en droit – seraient coupés, ouvrant ainsi un nouveau front en justice.
    Publié ce week-end, un sondage CBS News/YouGov révélait que 54 % de la population américaine soutient la campagne d’expulsion menée par l’administration. Mais le périmètre de cette campagne n’est jamais clairement défini par les autorités. Il fut d’abord question des criminels clandestins endurcis, cible prioritaire. Mais il semble à présent ne plus y avoir de graduation, pour remplir l’objectif de 3 000 expulsés par jour, fixé par l’administration américaine. Dès lors, cette question est devenue particulièrement polarisée. Selon ce même sondage, 82 % des démocrates et 51 % des indépendants désapprouvent la ligne suivie, applaudie, en revanche, par 93 % des républicains.
    Dans un message sur son réseau Truth Social, dans la nuit de samedi à dimanche, Donald Trump félicitait déjà les soldats de la garde nationale pour leur intervention, alors même qu’ils n’étaient pas encore déployés. « Ces manifestations d’extrême gauche, par des instigateurs et des fauteurs de troubles souvent payés, ne seront pas tolérées, écrivait le président. Par ailleurs, à partir de maintenant, on ne sera plus autorisé à porter des masques lors de manifestations. »
    Cette escalade tombe particulièrement bien sur un plan politique pour Donald Trump, qui a subi l’onde de choc de sa séparation avec Elon Musk. Cette crise sécuritaire attisée permet aussi de mettre la pression sur les sénateurs républicains qui traînent les pieds, au sujet du « Big Beautiful Bill ». Ce train de dépenses essentiel pour la Maison Blanche, renforçant, entre autres, les moyens de la sécurité intérieure, a passé l’épreuve de la Chambre des représentants. Mais un nombre menaçant de sénateurs conservateurs pensent, comme Elon Musk, que ce projet de loi est bien trop dépensier. A la lumière des événements de Los Angeles, l’exécutif leur demandera de choisir : être du côté de l’ordre ou du côté des émeutiers. Du président ou des élus extrémistes et laxistes.
    L’appel à l’armée pour une mission de maintien de l’ordre n’a guère de sens, sauf si l’on tient compte de la logique choisie par l’administration Trump en matière migratoire, le cœur de cette crise. Cette logique repose sur une militarisation partielle de cette politique, pour organiser la plus vaste campagne d’expulsion de clandestins de l’histoire américaine, conformément à la promesse de campagne de Donald Trump, qui parle, sans justification, de 21 millions de clandestins dans le pays.
    Pour cela, la Maison Blanche a d’abord privilégié des symboles, comme l’utilisation très onéreuse d’appareils militaires pour mener des vols de reconduite. Elle a aussi annoncé l’utilisation – très limitée à ce jour – de la base de Guantanamo (Cuba), symbole funeste de la lutte antiterroriste sans fin, comme centre de rétention. Elle a également appuyé sa campagne sur un texte très poussiéreux, l’Alien Enemies Act (1798). Celui-ci donne au gouvernement le droit d’expulser, sans recours aucun, les ressortissants d’un pays en guerre avec les Etats-Unis ou fomentant une invasion dans ce pays. Sa dernière utilisation remonte à la seconde guerre mondiale, lorsque des dizaines de milliers de Japonais avaient été emprisonnés sans procès.
    La maire Karen Bass a promis que Los Angeles continuerait de se tenir aux côtés de tous ceux qui « appellent notre ville leur maison ». Elle a dénoncé une « escalade chaotique », décidée par la Maison Blanche, diffusant la « peur » au sein de la population. Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a, pour sa part, mis en cause la « fabrication d’une crise », en estimant que Donald Trump « espère plus de chaos pour pouvoir justifier plus de répression, plus de peur et plus de contrôle ». Le gouverneur a appelé les citoyens en colère à ne pas employer la violence et à s’exprimer pacifiquement.
    Mais l’administration Trump n’a pas fini d’exploiter ces événements, à la fois pour punir les élus démocrates et la Californie en général, et pour l’exemple. Dans le Wisconsin, la juge Hannah Dugan, du comté de Milwaukee, a été arrêtée et poursuivie pour avoir permis à un sans-papiers de se dérober à son interpellation par des agents de l’immigration, à l’intérieur même de l’enceinte du tribunal. Le 9 mai, c’est le maire de Newark (New Jersey), Ras Baraka, qui avait été interpellé devant le centre de rétention de Delaney Hall, alors qu’il demandait à connaître les conditions de détention de migrants arrêtés. Le piège est classique dans le trumpisme comme dans tout mouvement autoritaire. La contestation de la ligne suivie est, par définition, illégitime. Et répréhensible.

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#politiquemigratoire#californie#detention#ICE#expulsion#droit#sante

  • A Porto Rico, « territoire sanctuaire » pour les immigrés, la politique répressive de Donald Trump met à mal la coexistence
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/09/a-porto-rico-territoire-sanctuaire-pour-les-immigres-la-politique-repressive

    A Porto Rico, « territoire sanctuaire » pour les immigrés, la politique répressive de Donald Trump met à mal la coexistence
    Par Jean-Michel Hauteville (San Juan (Porto Rico), envoyé spécial)
    Depuis le début du mandat de Donald Trump, plus de 500 migrants ont été arrêtés dans cette île des Caraïbes sous souveraineté américaine. Une situation inédite sur ce territoire hispanophone, traditionnellement bienveillant envers les sans-papiers venus d’Amérique latine.
    Malgré la quiétude apparente, les habitués ne s’y trompent pas : depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche, la peur rôde autour de cette petite esplanade triangulaire, agrémentée d’arbres et de sculptures, située au cœur du Barrio Obrero (« quartier ouvrier ») de la capitale portoricaine. Ce secteur populaire du district de Santurce est emblématique de la longue tradition d’immigration en provenance des pays voisins des Caraïbes et d’Amérique latine sur cette île hispanophone. Peuplée de 3,2 millions d’habitants, cette dernière se trouve sous souveraineté américaine, avec le statut ambigu d’« Etat libre associé ». Et ici plus qu’ailleurs, sur ce territoire grand comme la Corse, le durcissement de la politique migratoire de Washington s’est brutalement fait ressentir.
    « La vie a changé ici. Il n’y a plus d’ambiance », grimace Filès, un demandeur d’asile haïtien de 40 ans, attablé avec son ami Eriel, 37 ans. Originaires de Jacmel, ville du sud d’Haïti, les deux hommes n’ont pas souhaité révéler leur identité complète. Arrivés à Porto Rico début 2024, au terme d’une périlleuse traversée d’une journée en yole depuis les rivages de la République dominicaine, où ils ont laissé leur compagne et leurs enfants, ils travaillent désormais sur les chantiers de San Juan, à l’instar d’un grand nombre d’immigrés. Eriel acquiesce en désignant les tables vides autour de lui. « Avant, il y avait beaucoup plus d’animation, des stands de nourriture, de la musique », se remémore le trentenaire.
    Moins d’une semaine après l’investiture de Donald Trump, et la signature, dans la foulée, par le président américain, d’un décret anti-immigration, les premières arrestations ont bouleversé le quotidien paisible du Barrio Obrero. Le 26 janvier, en pleine journée, des agents fédéraux américains en uniforme ont effectué une descente aux abords de la placita (« petite place ») Barcelo. « C’était choquant : ils sont venus près d’ici avec des véhicules militaires », témoigne José Rodriguez, résident bien connu dans le quartier et président du Comité dominicain des droits humains, une organisation de défense des droits des migrants à San Juan. « Ils ont défoncé les portes des appartements des familles d’immigrés dominicains. Sans mandat d’un juge », s’afflige l’athlétique militant de 62 ans, rencontré sur l’esplanade.
    Lors de cette première opération, quelque 47 personnes ont été arrêtées, selon un bilan des autorités fédérales américaines communiqué par les médias locaux. Ces immigrés, placés en détention à la prison fédérale de Guaynabo, en banlieue de San Juan, « n’avaient pas de statut migratoire [régularisé] sur le territoire des Etats-Unis » et « avaient commis des délits à Porto Rico », avait assuré le soir même, lors d’une interview télévisée, Rebecca
    Pourtant, les jours suivants, les sites d’information ont relayé plusieurs témoignages contredisant ces affirmations : deux frères haïtiens en situation régulière et sans histoires, libérés de prison au bout de trois jours de calvaire ; un quinquagénaire dominicain, titulaire d’un titre de résident permanent, arrêté avant d’avoir eu le temps de montrer ses papiers ; une mère de famille dominicaine en cours de naturalisation, dont les proches sont restés sans nouvelles pendant plusieurs semaines…« La majorité des personnes détenues n’ont pas de casier judiciaire, ni de procédure en cours devant les tribunaux », dénonce Alvaro Nuñez, avocat spécialiste des questions migratoires, venu saluer son ami José Rodriguez. Les autorités ont « agi de manière indiscriminée, avec des conséquences sur des personnes qui travaillent, qui ont toute leur vie ici », s’offusque l’avocat.
    Depuis janvier, les redadas (« coups de filet ») menées par les agences fédérales américaines à Porto Rico, dont celle chargée de la surveillance des frontières et de l’immigration (ICE), se sont multipliées sur l’île des Grandes Antilles. Quelque 552 personnes ont d’ores et déjà été arrêtées depuis le début de l’année, selon le décompte officiel arrêté au 5 juin, révélé par le média en ligne Centro de Periodismo Investigativo. C’est cinq fois plus que durant toute l’année 2024. Ces immigrés sont « majoritairement de nationalité dominicaine et haïtienne, mais aussi mexicaine et vénézuélienne », avait précisé Rebecca Gonzalez-Ramos fin mai. Le 30 mars, une intervention d’ICE dans la localité de Toa Baja a tourné au drame : un ressortissant dominicain de 52 ans est tombé du toit d’un immeuble où il s’était caché. Hospitalisé, le malheureux a fini par succomber à ses blessures, le 4 mai.
    Lors de la plus récente opération de grande envergure, le 8 mai, pas moins de 53 ouvriers, parmi lesquels sept femmes, tous de nationalité dominicaine, étaient arrêtés sur le chantier de l’hôtel La Concha Renaissance, établissement quatre étoiles situé aux abords de la célèbre plage de Condado. A cette date, les autorités fédérales américaines indiquaient avoir arrêté 67 immigrés accusés de délits « graves », soit moins de 20 % du total des sans-papiers détenus.
    La prison de Guaynabo étant désormais saturée, les services de lutte contre l’immigration « ont renvoyé en République dominicaine 28 ouvriers de La Concha. Il y en a vingt à Miami, d’autres à San Antonio, au Texas, et d’autres ont été relâchés », énumère José Rodriguez. « On les met où on trouve de la place. Du coup, il y a des familles qui ont été séparées », s’émeut le militant des droits des personnes immigrées. « La pratique habituelle du gouvernement des Etats-Unis, c’est de transférer hors de Porto Rico quasiment tous les migrants arrêtés », confirme Annette Martinez-Orabona, directrice exécutive de l’ACLU Porto Rico, la branche locale de l’Union américaine pour les libertés civiles, organisation non gouvernementale (ONG) de défense des droits humains. « Après leur arrestation, ils peuvent rester sur l’île entre vingt-quatre et soixante-dix-huit heures, puis sont transférés » sur le continent, poursuit cette avocate.
    Ce brusque tour de vis migratoire va à l’encontre de la tradition de bienveillance envers les immigrés clandestins – en particulier les hispanophones d’Amérique latine – qui a longtemps prévalu sur cette terre métissée, ancienne colonie espagnole annexée par les Etats-Unis en 1898. « Porto Rico était perçu comme un territoire sanctuaire », assure Fermin Arraiza Navas, le directeur juridique d’ACLU Porto Rico. « Notre politique, c’est de traiter [les étrangers] comme nos semblables, quelle que soit leur nationalité », poursuit l’affable avocat. « A plus forte raison quand on a un fort lien linguistique et culturel, comme avec nos frères de la République dominicaine. »
    Ainsi, le gouvernement portoricain a créé un permis de conduire spécial pour les étrangers en situation irrégulière. Ceux-ci seraient, selon l’ONG, « entre 150 000 et 200 000 sur toute l’île ». Au bout d’une année de présence sur le territoire, les sans-papiers peuvent faire la demande de cette précieuse licencia, qui leur permet d’acquérir un véhicule ou d’ouvrir un compte en banque. Mais ce dispositif généreux s’est retourné contre ses bénéficiaires. « Ça a permis de ficher les gens », déplore M. Arraiza : dans plusieurs cas, les agents fédéraux ont utilisé ces permis pour retrouver leurs détenteurs. Ce spécialiste des droits civiques fustige la passivité de la gouverneure de Porto Rico, Jenniffer Gonzalez Colon, arrivée au pouvoir début janvier et ouvertement favorable au nouveau président. « Elle fait tout ce que lui demande le gouvernement des Etats-Unis, ce que lui dit le président Trump, pour éviter de perdre des financements fédéraux, regrette M. Arraiza. Cela met en situation de grande précarité la communauté dominicaine et les personnes migrantes. »
    En effet, de nombreux sans-papiers, terrorisés, se cloîtrent chez eux, selon les organisations locales. L’absentéisme est monté en flèche dans les écoles, mais aussi au travail, dans les secteurs qui recourent à la main-d’œuvre immigrée. « Le bâtiment est l’un des secteurs les plus touchés, tout comme la restauration », constate Luis Pizarro Otero, le président de la chambre de commerce de Porto Rico, qui plaide auprès du gouvernement fédéral pour des « solutions migratoires pour les emplois saisonniers ». Face à cette vague de répression inédite, au Barrio Obrero, la solidarité s’organise. Comme chaque lundi midi, plusieurs dizaines de personnes défavorisées – portoricaines ou étrangères – reçoivent un repas gratuit au sous-sol, chaleureusement décoré, de l’église méthodiste Saint-Paul, tout près de la place Barcelo. Une enceinte diffuse des hymnes évangéliques enjoués. « Cette église est un lieu sûr, un sanctuaire, et le restera », dit, sur un air d’évidence, la pasteure Nilka Marrero Garcia, qui dénonce sans ambages les méthodes de « profilage racial » des agents fédéraux. « Lorsqu’il y a des descentes de la “migra”, on s’enferme, ici, avec dix, douze personnes, pendant des heures », confie la révérende de 72 ans. Son regard bleu gris s’emplit d’une infinie compassion. « On a de la nourriture, de l’eau. On éteint les lumières, et on attend. »
    Grâce à la participation d’une douzaine de bénévoles, la paroisse apporte un soutien précieux aux immigrés en détresse. « Dans le domaine de l’assistance juridique, on a suivi 48 dossiers depuis janvier », souligne la pasteure. La congrégation a également fourni « 350 sacs de courses et 2 500 repas chauds » aux personnes qui n’osent plus sortir.D’autres acteurs locaux ont mis l’accent sur l’information des habitants du quartier quant à leurs droits. « On a expliqué aux gens la différence entre les types de mandat : pour entrer chez vous, les agents de l’ICE doivent avoir un mandat bien précis », relate la journaliste et poétesse Ana Castillo Muñoz, dans un bar branché du district voisin de Rio Piedras. « Après la première descente, on a fait tout un travail de terrain », poursuit cette fille d’immigrés dominicains de 35 ans, originaire du Barrio Obrero, ses longs rajouts noués en un chignon à la mode.
    Aux yeux de l’autrice du recueil Corona de flores (EDP University, 2021, non traduit), la situation des migrants à Porto Rico n’est pas près de s’améliorer. « Je pense que les politiques migratoires de Trump resteront tout aussi agressives. Donc nous devons nous organiser, éduquer les gens, nous soutenir les uns les autres », exhorte Ana Castillo Muñoz, qui conclut avec défiance : « L’Etat ne fera rien pour préserver le “sanctuaire” à Porto Rico, étant donné notre statut colonial. Le sanctuaire portoricain, c’est au peuple de le défendre. »

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#portorico#politiquemigratoire#ICE#expulsion#caraibes#sante#droit

  • #Droit_de_l’environnement : entre espoirs et reculs

    Alors que le débat autour de l’autorisation du chantier de l’A69 bat son plein, des chercheuses expliquent en quoi le droit de l’environnement motive de plus en plus d’actions citoyennes en justice et comment il peut constituer l’une des réponses à l’urgence écologique.

    L’A69 verra-t-elle le jour ? On ne sait pas encore comment se terminera ce feuilleton juridico-politique autour du projet d’autoroute de 50 km destiné à relier Toulouse à Castres. Il illustre en tout cas la difficulté du droit de l’environnement, pourtant en plein essor, à s’imposer.

    Le 27 février 2025, sept ans après la déclaration d’utilité publique, le tribunal administratif de Toulouse (à la demande des associations de défense de l’environnement qui dénonçaient la destruction illégale de 169 espèces protégées animales et végétales) a ordonné l’arrêt immédiat des travaux de l’A691. Le tribunal a jugé infondée « la raison impérative d’intérêt public majeur » ayant motivé une autorisation préfectorale de déroger au droit de l’environnement, alors même que le juge des référés avait à plusieurs reprises rejeté la demande de suspension des travaux en cours.

    Saluée comme « historique » par les défenseurs de l’environnement, la victoire des opposants à l’A69 devait marquer un tournant. Mais, le 24 mars, le ministre en charge des Transports, Philippe Tabarot, soutenu par une large partie des élus des départements concernés, faisait appel de la décision. Et, le 3 juin, la cour administrative de Toulouse autorisait la reprise du chantier2… en attendant que le Conseil d’État donne son avis, en 2026 !

    Sans se soucier de ce calendrier judiciaire, une proposition de loi dite « de validation3 » a été déposée à l’initiative de Jean Terlier, député Ensemble pour la République du Tarn, qui reviendrait à légaliser de fait cette autoroute…

    Le débat autour de l’A69 est un exemple parmi d’autres. Car il ne se passe plus un mois sans qu’un nouveau contentieux en justice lié à la dégradation accélérée de l’environnement ne surgisse dans l’actualité – internationale ou locale.
    L’espoir d’une jurisprudence

    En mars 2025 encore, tandis que les associations Bloom et Foodwatch assignaient le groupe Carrefour devant le tribunal de Paris pour « manquement au devoir de vigilance » dans sa filière thonière4, s’est ouvert en Allemagne le procès intenté par un agriculteur péruvien, soutenu par l’ONG Germanwatch, à l’un des plus gros producteurs d’énergie du pays, RWE. Le conglomérat, pourtant, n’opère pas au Pérou. Mais il compte parmi les plus gros émetteurs européens de gaz à effet de serre (GES). Saúl Luciano Lliuya lui réclame 17 000 €, soit 0,47 % (la contribution de RWE aux émissions mondiales de GES) du coût des aménagements nécessaires pour préserver sa maison, et des dizaines de milliers d’euros en plus pour les conséquences de la fonte des glaciers andins.

    Au bout de 10 ans et après enquête sur place, un tribunal allemand a certes rejeté la demande du paysan péruvien, mais, dans le même temps, a reconnu la responsabilité civile des entreprises pour des dommages climatiques résultant de leurs émissions passées de gaz à effet de serre, quel que soit le lieu de leur survenance. Les émetteurs de GES pourraient être obligés de prendre des mesures pour prévenir les dégradations et, en cas de refus, être condamnés à les réparer proportionnellement à leur part dans les émissions.

    Cette décision fera sans doute jurisprudence, ouvrant la voie à cette justice climatique mondiale que les ONG et les pays du Sud réclament aux entreprises, mais aussi aux États les plus riches et les plus polluants.
    De la marginalité à la maturité

    Discipline en plein essor que les jeunes générations sont de plus en plus nombreuses à vouloir étudier, le droit de l’environnement, seul, s’est jusqu’à présent révélé assez impuissant à enrayer la dégradation accélérée de la nature. Même s’il se diffuse au sein d’autres branches du droit (tel le droit commercial), il doit composer avec les intérêts protégés par ces dernières, dont les activités sont largement susceptibles de porter atteinte à l’environnement.

    Chercheuse en droit international de l’environnement et du climat, Marion Lemoine-Schonne5 reconnaît que son efficacité demeure donc en deçà des urgences. Elle ne l’estime pas moins fondamental : « D’abord, sans le droit international de l’environnement, la situation serait encore pire. Il joue un rôle référentiel et incitatif très important pour les décideurs. Ensuite, la force du droit, c’est de dire ce qui doit être. Quand bien même il est insuffisamment respecté, cela ne grève en rien son effet levier sur les plans sociopolitiques. » Selon elle, la multiplication des contentieux, de plus en plus souvent tranchés en faveur des défenseurs de la nature, fait fonction d’« accélérateur » d’un droit de l’environnement passé depuis les années 1980 « de la marginalité à la maturité ».

    Comme la chercheuse l’a résumé dans un livre collectif6, les premiers textes destinés à protéger la santé humaine des effets de la pollution sont adoptés au XIXe siècle. Le droit de l’environnement se construit d’abord à l’échelle internationale, avec les premières conventions multinationales de protection de grands espaces naturels, dans les années 1930, puis les accords multilatéraux cherchant deux décennies plus tard à prévenir les ravages dus à l’intensification de l’activité industrielle.

    En 1972, la déclaration onusienne de Stockholm7 fait de l’environnement une priorité mondiale indissociable des droits humains, à penser en articulation avec le développement économique et le bien-être des populations. Elle pose ainsi les fondations du droit de l’environnement. Vingt ans plus tard, lors du sommet de Rio, en 1992, la prise de conscience des changements globaux qui menacent directement la survie de l’humanité débouche sur trois conventions-cadres8 majeures concernant les changements climatiques, la désertification et la biodiversité.
    Obliger les États à coopérer

    « Depuis, précise Marion Lemoine-Schonne, le droit de l’environnement se construit tous azimuts, en lien étroit avec les évolutions des connaissances scientifiques. Nous savons que les processus de dégradation sont profondément connectés et interdépendants (climat, biodiversité, océans, pollution chimique, etc.) et qu’il est vain de lutter en silo contre les sources de pollution. Au nombre de neuf, les ”limites planétaires“ à ne pas dépasser sans compromettre gravement la stabilité de la biosphère9 sont désormais intégrées dans le droit de l’environnement. Les États sont obligés de les prendre en compte. Et cela permet à un nombre croissant de citoyens de saisir la justice sur une grande diversité de sujets. »

    En outre, le débat sur la reconnaissance de certains droits aux éléments naturels (rivières, forêts ou sols) a vu émerger dans un petit nombre de pays un véritable droit de la nature, qui reste marginal, mais n’en influence pas moins tout le champ juridique.
    La justice européenne à l’œuvre

    Une vitalité attestée aussi par Alexandra Langlais10 et Magali Dreyfus11, chercheuses au CNRS, spécialistes respectivement des droits européen et français. Ces derniers temps, à l’échelle de l’Europe, précise Alexandra Langlais, c’est plutôt devant la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) que ces plaintes citoyennes sont déposées, au nom notamment du « droit à la vie ». Ont ainsi eu gain de cause, en janvier 2025, des habitants des environs de Naples qui dénonçaient l’inaction de l’État italien face à la multiplication des cancers causés par les dépôts mafieux de déchets toxiques, et qui avaient été déboutés par toutes les juridictions de leur pays12.

    Alexandra Langlais cite également une décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui a pris de court différents États membres, dont la France, en annulant une dérogation qu’ils tenaient pour acquise autorisant l’usage en plein champ de produits néonicotinoïdes. « Alors que la Commission avait elle-même laissé passer ces manquements répétés à son propre règlement d’exécution, la décision de la CJUE est venue rappeler que le droit européen prime sur celui des États membres », commente la juriste.

    En France aussi, la réglementation environnementale, largement issue du droit européen, n’a cessé de s’étoffer pour pénétrer d’autres branches du droit, et notamment celui de l’aménagement et de l’urbanisme. « Les acteurs publics ou privés ne peuvent plus ignorer son existence, précise Magali Dreyfus. Tenter de passer outre comporte un réel risque financier, comme l’atteste la réaction des acteurs économiques à la suite de l’arrêt du chantier de l’A69. De même, quand le Conseil d’État ou une autre juridiction rend un arrêt, le gouvernement doit s’y conformer. Mais le rapport de force global continue de favoriser l’économie au détriment de l’environnement. D’autant plus qu’aller en justice exige des ressources importantes. »
    Le contre-pouvoir des juges

    Les actions en justice intentées contre des États ou de grands groupes privés en raison de l’insuffisance de leur effort contre le changement climatique dans le respect de l’Accord de Paris sont en constante augmentation. Et sont les plus emblématiques de l’évolution du droit de l’environnement, estiment les trois chercheuses. On ne compte plus le nombre de contentieux devant des juridictions nationales ou internationales.

    Par exemple, en France, à la suite d’une requête de la commune de Grande-Synthe (Nord), le Conseil d’État (la plus haute juridiction administrative) a enjoint en 2024 au gouvernement de prendre toutes les mesures permettant d’atteindre l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre13. En 2021, L’Affaire du siècle, une coalition d’ONG14, voit reconnaître la « responsabilité pour carence fautive de l’État français du fait du non-respect de la trajectoire de lutte contre le changement climatique qu’il s’était fixé »15. Considérant que la condamnation n’a pas été exécutée, elle relance même une action fin 2024.

    Autre jurisprudence, celle rendue par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) à la suite d’une plainte de l’association suisse Aînées pour la protection du climat. Parce que les conséquences du réchauffement touchent davantage les personnes âgées, en particulier les femmes, la requête introduite porte sur le fait que la Suisse ne remplit pas son devoir de protection qui découle du « droit à la vie » et du « droit au respect de la vie privée et familiale ». En avril 2024, la CEDH a reconnu la responsabilité particulière de la Suisse dans l’aggravation du préjudice causé aux membres de cette association en matière de droits humains et a rappelé le « droit à un environnement sain »16.
    « On ouvre des brèches »

    « Parfois, on perd pour des questions de procédure, mais le fait que le procès ait lieu constitue déjà une forme de victoire, commente Alexandra Langlais. Notamment parce qu’on ouvre des brèches pour ceux qui suivront, et qui connaîtront les failles à éviter, les ouvertures possibles. »

    Dans un récent rapport17, le Grantham Institute on Climate Change and the Environment, à Londres, qui recense plus de 200 contentieux climatiques à travers le monde pour la seule année 2023, prévoyait que les « grands-mères suisses » ouvriraient la voie à de nouveaux litiges. Avec raison, puisqu’en avril 2025, 14 citoyens français, soutenus par 3 ONG, ont demandé à l’État français de renforcer sa politique d’adaptation au changement climatique.

    « En estimant que l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme s’applique au climat et que les citoyens sont donc en droit d’agir en justice, les juges européens ont franchi un pas très important, analyse Marion Lemoine-Schonne. Très attendu, l’avis que la Cour interaméricaine des droits de l’Homme, saisie par la Colombie pour statuer sur l’effet irréversible et systémique du changement climatique quant au devenir de l’espèce humaine comme espèce vivant parmi les autres espèces, peut aussi à l’avenir influencer fortement le droit. »
    Dialogue entre juges

    Surtout, rappelle Marion Lemoine-Schonne, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye doit rendre courant 2025 un avis consultatif précisant le contenu des obligations juridiques internationales étatiques en matière de protection climatique et les sanctions que peuvent encourir les États.

    De façon générale, conclut-elle, « on constate un dialogue entre juges des différents pays, mais aussi une influence certaine entre les juges internationaux, européens et nationaux, notamment parce qu’ils se fondent tous sur les mêmes documents scientifiques, comme les rapports du Giec et l’Accord de Paris. Les États-Unis ont été les premiers à montrer le recours démocratique qu’offrait le recours en justice. Aujourd’hui, les juges européens sont devenus des contre-pouvoirs prépondérants pour rappeler les États à leurs obligations. Le droit international garde une portée limitée, puisqu’il est négocié et mis en œuvre par les États eux-mêmes – et donc conditionné à leur volonté. Le contexte politique américain, entre autres, constitue un cas d’école en termes de dérégulation climatique. »

    Magali Dreyfus, elle, pointe une autre limite : « Toute victoire arrive toujours un peu trop tard, puisque le mal est déjà fait. L’A69 constitue un cas exemplaire, la décision étant intervenue alors que les destructions d’habitats, d’arbres et de terres agricoles étaient déjà accomplies, et les GES pour la construction, émis. »
    Les États-Unis se retirent à nouveau de l’Accord de Paris

    Comme promis, le président Trump a engagé pour la deuxième fois le retrait américain de l’Accord de Paris sur le climat, conclu en 2015. Peu après, Lee Zeldin, représentant de New York climatosceptique nommé à la tête de l’Agence pour la protection de l’environnement (EPA), annonçait l’abrogation imminente des « entraves » limitant la croissance économique, à commencer par des mesures destinées à réduire drastiquement les émissions de CO2.

    Il est néanmoins trop tôt pour préjuger des conséquences à long terme des coups de force et intimidations de la nouvelle administration, estime Marion Lemoine-Schonne, car « l’édifice du droit du climat, qui avait déjà bien résisté au premier retrait américain de l’Accord de Paris, n’a cessé de se solidifier depuis ».

    Ce nouveau retrait entraîne par exemple l’arrêt de toutes les subventions états-uniennes aux instances des Nations unies œuvrant pour l’environnement – soit un quart de budget en moins pour le climat, concède la chercheuse. « Mais il n’y aura pas forcément d’effet d’entraînement sur les autres États. L’Accord de Paris, qu’on dénonçait comme peu contraignant, a tenu bon autour d’une logique de progressivité des engagements. On peut imaginer que les tensions géopolitiques actuelles conduisent certains États, comme les grands pays émergents que sont la Chine, l’Inde, le Brésil ou le Mexique, à réaffirmer leurs engagements climatiques pour renforcer leur position dans d’autres enceintes diplomatiques. »
    « Vents politiques contraires »

    Certes, l’objectif le plus ambitieux de l’Accord, celui de maintenir l’augmentation globale de la température terrestre au-dessous de +1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, a d’ores et déjà été dépassé. Mais, affirme la chercheuse, la « « flexibilité » du texte lui permet pour l’instant de résister aux chocs. Reste que des « vents politiques contraires » soufflent aussi en Europe. Et, comme ses consœurs, Marion Lemoine-Schonne reconnaît que « la menace de détricoter ce que l’on pouvait croire acquis n’a jamais été aussi forte ».

    Ce « détricotage » a largement débuté pour le Pacte vert européen, le plan présenté en 2019 par la Commission européenne pour décarboner l’économie de l’Union européenne d’ici à 2050, déplore Alexandra Langlais : « Il s’agissait d’une avancée extraordinaire. Outre cette promesse de neutralité carbone, le plan englobait les enjeux de pollution et de biodiversité, dans une perspective de transition équitable qui devait se traduire rapidement dans des textes juridiques. Et c’est là que ça a déraillé. »

    Par exemple, détaille-t-elle, un projet de règlement européen sur l’utilisation durable des pesticides est devenu encore moins contraignant que la directive européenne préexistante. Les députés qui le soutenaient ont dû ainsi se résigner à voter contre, fin 2023. « Quant au règlement européen censé mettre en place un système d’alimentation durable, il n’a même pas vu le jour… »
    Reculs en série sur la Politique agricole commune

    Cet affaiblissement du Pacte vert, conséquence aussi de la colère des agriculteurs qui a secoué l’Europe entre 2022 et 2024, inverse une tendance de fond, poursuit la chercheuse : « Depuis que la Politique agricole commune (Pac) a été adoptée, en 1962, cette politique s’est construite en prenant de plus en plus en compte la nécessité de préserver l’environnement. C’est la première fois qu’elle recule, et c’est complètement fou quand on connaît le prix à payer – y compris pour le secteur agricole – si l’on n’agit pas. »

    En France, le principe de non-régression, introduit dans le Code de l’environnement par la loi Biodiversité de 2016, interdit théoriquement tout retour en arrière, précise Magali Dreyfus. Mais elle rappelle que le modèle d’agriculture intensive continue de faire obstacle à tout progrès décisif en la matière : « Alors que les agriculteurs sont les premières victimes de ce système, et qu’en changer représente un défi immense, le syndicat majoritaire, sous couvert d’un besoin de simplification, continue de désigner le droit de l’environnement comme la source de leurs problèmes. Il y a là quelque chose d’irrationnel. »
    Glyphosate : nouvelle action en justice

    Emblématique de ces tensions, l’autorisation du glyphosate (herbicide reconnu comme « cancérogène probable », dont Emmanuel Macron s’était engagé en 2017 à proscrire l’usage « au plus tard dans trois ans ») a été renouvelée pour 10 ans, fin 2023, par la Commission européenne, à l’issue d’un vote crucial des Vingt-Sept lors duquel la France a choisi de s’abstenir.

    La justice viendra-t-elle une fois encore au secours de ceux qui dénoncent les ravages du glyphosate sur l’environnement ? Fin 2024, plusieurs associations ont déposé une plainte devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) contre ce renouvellement.

    La recrudescence des actions en justice est proportionnelle à la montée des « vents contraires ». Raison de plus pour travailler à renforcer le droit de l’environnement à toutes les échelles. « Il reste absolument indispensable, a fortiori aujourd’hui, à l’heure où une désinformation croissante travaille à brouiller la prise en compte des connaissances scientifiques sur les enjeux de transition socio-écologique et climatique, conclut Marion Lemoine. La gravité des changements à l’œuvre, dont nous avons maintenant toutes les preuves scientifiques, ainsi que le coût de l’inaction nous obligent à nous emparer de tous les moyens juridiques disponibles pour conserver les acquis du droit de l’environnement et continuer à le protéger, pour la santé et le bien-être humain des générations actuelles et futures. »

    https://lejournal.cnrs.fr/articles/droit-de-lenvironnement-entre-espoirs-et-reculs

    #environnement #justice #A69 #France #jurisprudence #Saúl_Luciano_Lliuya #Allemagne #Cour_européenne_des_droits_de_l’Homme (#CEDH) #droit_à_la_vie #Cour_de_justice_de_l’Union_européenne (#CJUE) #aménagement #urbanisme #contre-pouvoir #Accord_de_Paris #climat #changement_climatique #pollution
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    • Un monde commun. Les savoirs des sciences humaines et sociales

      Philosophie, sociologie, anthropologie, études littéraires, linguistique, histoire, géographie, psychologie, musicologie, esthétique, histoire de l’art, économie, sciences politiques, droit, archéologie… : les disciplines couvertes par les #sciences_humaines_et_sociales sont vastes et variées. À toutes incombent d’analyser, comprendre, décrire le monde et la façon dont les hommes, les femmes et plus largement le vivant l’ont habité, l’habitent et l’habiteront. Toutes partagent une réflexion sur un sujet rendu majeur par la crise environnementale, les bouleversements numériques, les inégalités sociales et les conflits : comment faire « #monde_commun », pour reprendre la formule de Hannah Arendt ?

      L’ouvrage propose une centaine de contributions portant sur des questions contemporaines, qui font écho aux objectifs de développement durable identifiés par l’Organisation des Nations unies (la réduction de la pauvreté, des inégalités éducatives, la protection de la planète, etc.) et explorent la manière dont la recherche actuelle en sciences humaines et sociales y répond. Méthodes, hypothèses et théorisations, mesures et approches ethnographiques, analyses et exégèses constituent autant d’outils permettant aux lecteurs de penser, d’habiter, de réparer ou de transformer nos univers communs.
      Un ouvrage richement illustré qui incarne une communauté de recherche dans toute sa diversité.

      https://www.cnrseditions.fr/catalogue/sciences-politiques-et-sociologie/un-monde-commun
      #livre

  • Italie : un référendum sur l’accès à la citoyenneté divise le pays - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/65031/italie--un-referendum-sur-lacces-a-la-citoyennete-divise-le-pays

    Italie : un référendum sur l’accès à la citoyenneté divise le pays
    Par La rédaction Publié le : 09/06/2025
    Les Italiens votent depuis dimanche, et jusqu’à ce lundi soir, pour dire « oui » ou "non à une mesure visant à faciliter l’obtention de la nationalité, en réduisant le délai nécessaire de présence en Italie de dix à cinq ans. La gauche soutient la réforme et s’oppose au gouvernement de la Première ministre d’extrême droite Giorgia Meloni, qui a fait de la lutte contre l’immigration sa priorité.
    Depuis dimanche 8 juin, et jusqu’à lundi soir, les citoyens italiens sont appelés aux urnes pour un référendum autour de cinq questions regroupées en deux thèmes : l’assouplissement des règles d’obtention de la nationalité italienne et l’abolition de lois libéralisant le marché du travail. Et c’est le premier sujet qui divise le plus le pays.
    Actuellement, selon une loi de 1992, un résident non-européen sans lien de mariage ni de sang avec l’Italie doit y vivre pendant dix ans avant de pouvoir demander la naturalisation, processus qui peut ensuite prendre des années. La proposition soumise à référendum propose de réduire ce délai à cinq ans, ce qui alignerait l’Italie sur l’Allemagne et la France. Outre la condition de durée de résidence, la loi italienne exige actuellement que le demandeur prouve qu’il est intégré dans la société, qu’il dispose d’un revenu minimum, qu’il n’a pas de casier judiciaire et qu’il a une maîtrise suffisante de la langue italienne. Autant de critères que le référendum ne propose pas de toucher.
    La citoyenneté peut aussi être acquise par le mariage avec un citoyen italien, ou sur le principe du « ius sanguinis » (droit du sang), selon lequel un enfant né d’un père italien ou d’une mère italienne, même à l’étranger, devient automatiquement un citoyen italien. Mais contrairement à d’autres États européens, le fait d’être né de parents étrangers en Italie ne garantit pas automatiquement la citoyenneté : un mineur ne peut la demander qu’à l’âge de 18 ans, à condition d’avoir vécu légalement et sans interruption en Italie depuis sa naissance.
    Cette loi a créé une zone d’ombre pour des centaines de milliers de personnes nées en Italie de parents étrangers - ou arrivées dans le pays alors qu’elles étaient enfants - qui, après des années, n’ont toujours pas obtenu la citoyenneté. Ainsi, si cette réforme est adoptée, elle pourrait bénéficier jusqu’à 2,5 millions de personnes, estiment les partisans du « oui », soutenus par le Parti démocrate (PD, centre-gauche), principale forte d’opposition en Italie.
    C’est cette opposition qui est à l’origine du référendum. En septembre dernier, l’initiative avait recueilli plus de 500 000 signatures, forçant ainsi le gouvernement de la Première ministre d’extrême droite Giorgia Meloni à l’organiser, comme le stipule la loi.
    Selon Riccardo Magi, secrétaire de +Europa (centre-gauche) cité par Euronews, le référendum permettrait de modifier une loi « ancienne et injuste » qu’aucun gouvernement des 30 dernières années « n’a eu la volonté politique de modifier ». La législation actuelle oblige, d’après lui, des centaines de milliers de filles et de garçons nés ou élevés en Italie à vivre comme des étrangers dans ce qui est aussi leur pays".
    La cheffe du parti Fratelli d’Italia, arrivée au pouvoir en 2022 sur un programme anti-migrants, s’est déclarée « absolument contre » cette mesure. Selon Giorgia Meloni, la loi actuelle sur la nationalité est « excellente » et « très ouverte ». « Nous sommes l’une des nations européennes avec le plus grand nombre de naturalisations », a-t-elle souligné cette semaine. Selon Eurostat, Rome a accordé en 2023 la nationalité italienne à 213 500 personnes, soit un cinquième des naturalisations dans l’Union européenne (UE). Plus de 90% d’entre elles étaient originaires de pays hors de l’UE, principalement d’Albanie et du Maroc, ainsi que d’Argentine et du Brésil. En mars, le gouvernement avait publié un décret afin de limiter l’accès à la naturalisation par lien de sang, ne rendant éligibles que les étrangers ayant des grands-parents ou des parents italiens, alors qu’auparavant, l’ascendance pouvait remonter jusqu’aux arrière-arrière-grands-parents. Ce décret est devenu loi en mai après approbation du Parlement italien.
    Pour montrer son opposition, le gouvernement demande de boycotter le référendum, afin d’invalider le résultat du vote. Des membres de la droite italienne ont même appelé les citoyens à se rendre à la plage plutôt que d’aller voter, indique la correspondante de France 24 à Rome. Car pour être valide, le référendum doit franchir le seuil de 50 % de votants. À la mi-journée dimanche, la participation s’élevait à 7,41%, selon le ministère de l’Intérieur.
    Ce scrutin est un véritable test pour l’opposition de gauche. Un victoire du « oui » serait un camouflet pour Giorgia Meloni qui a fait de la lutte contre l’immigration sa priorité. Giovanni Puccini, 18 ans, a voté dimanche pour la première fois de sa vie, dans un bureau à Rome. Il estime que l’appel à l’abstention de la Première ministre est « irrespectueux » : « Il faut voter parce que tellement de gens se sont battus, sont même morts, pour ce droit ». Son ami, Pierre Donadio, 21 ans, est convaincu qu’il faut assouplir les lois sur la naturalisation pour « éviter que le pays ne soit trop fermé sur lui-même ». Très populaire dans le pays, le rappeur Ghali, né à Milan de parents tunisiens, a aussi exhorté ses fans à aller voter. « Certains sont nés ici, ont vécu ici pendant des années, (...) se sentent Italiens à tous les égards, mais ne sont pas reconnus comme citoyens », a-t-il dénoncé sur Instagram.

    #Covid-19#migrant#migration#italie#referendum#citoyennete#naturalisation#sante

  • Une cinquantaine de migrants, dont une femme venant d’accoucher, secourus sur une plateforme pétrolière au large de la Tunisie - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/65027/une-cinquantaine-de-migrants-dont-une-femme-venant-daccoucher-secourus

    Une cinquantaine de migrants, dont une femme venant d’accoucher, secourus sur une plateforme pétrolière au large de la Tunisie
    Par La rédaction Publié le : 09/06/2025
    Cinquante-quatre migrants ont été secourus dans la nuit de samedi à dimanche sur une plateforme pétrolière au large de la Tunisie, en Méditerranée centrale. Selon l’ONG Open Arms qui a porté secours au exilés, une femme qui venait d’accoucher et plusieurs enfants faisaient partie du groupe. Ils sont restés bloqués trois jours sur la plateforme après le naufrage de leur embarcation.
    Cinquante-quatre migrants, dont plusieurs enfants et une femme qui venait d’accoucher, ont été secourus dans la nuit de samedi 7 à dimanche 8 juin, par le voilier Astral de l’ONG espagnole Open Arms, sur une plateforme pétrolière au large de la Tunisie, en Méditerranée centrale.Le groupe d’exilés se trouvait là depuis trois jours, à la suite du naufrage de leur canot pneumatique parti mardi de Libye, a expliqué Open Arms dans un communiqué.
    Vendredi, l’une des femmes a donné naissance à un garçon, tandis qu’une autre avait accouché deux semaines auparavant. Sur une vidéo transmise par l’ONG à InfoMigrants, on distingue les sauveteurs récupérer un nouveau-né emmitouflé dans plusieurs couvertures. Deux autres jeunes enfants font partie de ce groupe, a précisé l’ONG. Open Arms a annoncé que l’Astral avait plus tard retrouvé 109 autres migrants, dont quatre étaient à l’eau. Ils avaient également pris la mer en Libye et il y avait dix enfants parmi eux.
    Mais le voilier étant trop petit pour prendre en charge autant de personnes, l’équipage de l’Astral a fourni des gilets de sauvetage aux naufragés, qui ont ensuite été secourus par un autre bateau humanitaire, le Louise Michel. Ce dernier les emmenait dimanche vers un port sûr en Sicile. Vendredi soir, un autre sauvetage a eu lieu en Méditerranée centrale. Le navire humanitaire Sea Eye 5 de l’ONG allemande éponyme, a secouru 50 migrants en difficulté dans leur canot pneumatique, sans donner de précisions sur le lieu du sauvetage.
    Il n’est pas rare que des migrants fassent naufrage et se retrouvent sur des plateformes pétrolières, en Méditerranée centrale. En mars dernier, 32 migrants étaient restés bloqués pendant quatre jours sur une plateforme gazière au large de la Tunisie avaient été secourus par l’ONG Sea-Watch. Ni Malte ni l’Italie n’avaient répondu aux demandes de sauvetage. En mars 2024, l’ONG Emergency avait été prévenue par un avion de Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières, de la présence d’une quarantaine de migrants sur cette même structure flottante.
    Malgré la multiplication des mesures prises par le gouvernement italien pour tenter de freiner les traversées de la Méditerranée, les migrants continuent de prendre la mer à la recherche d’une vie meilleure en Europe. Depuis le début de l’année, quelque 24 000 exilés ont atteint l’Italie, selon les autorités. Un chiffre stable par rapport à l’an dernier à la même période. Ces derniers mois, les passeurs utilisent également un nouvel itinéraire méditerranéen : ils rallient la Crête depuis l’est de la Libye. Sur les quatre premiers mois de l’année, la Grèce a constaté une augmentation de ce flux de 174 %. La Méditerranée centrale, deuxième route maritime la plus empruntée par les migrants pour atteindre l’Europe après l’océan Atlantique, reste extrêmement meurtrière. Depuis 2014, un peu plus de 25 000 migrants, dont des femmes et des enfants, y sont morts noyés.

    #Covid-19#migrant#migration#frontex#tunisie#mediterranee#routemigratoire#migrationirreguliere#sante

  • Manche : la France envisage de mener des interceptions en mer - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/65023/manche--la-france-envisage-de-mener-des-interceptions-en-mer

    Manche : la France envisage de mener des interceptions en mer
    Par Romain Philips Publié le : 06/06/2025 Dernière modification : 09/06/2025
    Pour faire face à la hausse des traversées de la Manche, la France envisage de changer de doctrine et de mener des interceptions en mer. Des opérations impossibles aujourd’hui car le droit de la mer interdit à la police française d’agir en mer, sauf pour mener des opérations de secours.
    Pour lutter contre l’immigration irrégulière au départ des côtes françaises vers le Royaume-Uni, la France va présenter un plan pour intercepter les migrants en mer. Elle veut ainsi contrer le phénomène des « taxis-boats », cette technique consistant à mettre le bateau à l’eau en amont de l’embarquement pour éviter les interceptions terrestres par la police. Cette manœuvre des passeurs rend l’interception des traversées difficiles pour les forces de l’ordre car le droit de la mer interdit à la police française d’intervenir en mer, sauf pour mener des opérations de secours.
    « Malgré l’action menée sans relâche sur le territoire français pour réduire le nombre de traversées transmanche, force est de constater l’augmentation de 42 % du nombre d’individus arrivés au Royaume-Uni par rapport à 2024 », a déclaré une source au ministère de l’Intérieur quelques jours après le débarquement au Royaume-Uni de 1 195 migrants à bord de 19 embarcations. Il s’agit d’un record d’arrivées en une seule journée jamais atteint depuis 2022.
    « Nous sommes conscients du fort enjeu que représentent les interventions en mer et d’une nécessaire adaptation de notre doctrine d’action », a déclaré cette même source. Ainsi, la France va « faire évoluer » le dispositif actuel « afin de pouvoir agir dans les eaux peu profondes, jusqu’à 300 mètres des côtes, et ainsi intercepter les ’taxi-boats’, tout en respectant les principes de la convention des Nations unies sur le droit de la mer ». Le Comité interministériel de contrôle de l’immigration (CiCI) a donc mandaté le secrétariat général de la mer (SGMer), qui coordonne l’action de l’État en mer, pour formuler une proposition visant à faire évoluer la doctrine.
    Cette pratique est interdite par le droit de la mer parce qu’elle peut être dangereuse. Interrogé par InfoMigrants en décembre 2023, le procureur de la République de Saint-Omer avait émis des réserves au sujet des aux interceptions maritimes. « Le préfet a donné des consignes extrêmement claires aux forces de l’ordre sur le fait de ne jamais mettre en péril la vie des migrants », avait-il dit.
    En 2021, Priti Patel, alors ministre de l’Intérieur britannique, avait déjà évoqué la mise en place d’opérations en mer. Mais ce projet avait été rapidement abandonné suite au refus de la France de mener des pratiques contraires au droit de la mer. À l’époque, le projet avait aussi été décrié par les ONG, estimant que cela pousserait les migrants à emprunter des voix encore plus dangereuses.
    Mais la volonté des gouvernements français et britannique de renforcer le contrôle de la frontière pourrait bien avoir raison de cette règle en place depuis plusieurs années. En février dernier, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau - qui avait annoncé des effectifs de police supplémentaires et la construction du CRA de Dunkerque - avait déjà évoqué ce changement de doctrine.
    « Dans la bande côtière, dans les premiers 300m, il faut que l’on puisse revoir notre organisation, pour que l’on puisse arraisonner ces bateaux lorsqu’ils arrivent pour prendre les migrants. Il faudrait sans doute prévoir que la gendarmerie nationale, qui a des forces maritimes, puisse intervenir », avait-il évoqué.
    De son côté, la ministre de l’Intérieur britannique Yvette Cooper n’a pas caché son exaspération après l’arrivée record de lundi. Les photographies montrant des policiers français assister au départ de migrants depuis la plage sans intervenir ont aussi fait largement réagir côté britannique. Elle a donc réclamé davantage de mobilisation de la part des Français et souhaite que la France intercepte les embarcations non seulement dans les eaux peu profondes lorsqu’ils quittent les plages, mais dans les rivières et les voies navigables intérieures, où sont déployés les « small-boats ».
    Ce nouveau plan est attendu « d’ici l’été », précise-t-on au ministère de l’Intérieur. Notamment car un sommet franco-britannique doit avoir lieu en juillet. Le président français est attendu du 8 au 10 juillet au Royaume-Uni pour une visite d’État.Malgré les mesures dissuasives et répressives mises en place par Londres et Paris pour enrayer l’immigration irrégulière, 14 808 personnes sont arrivées dans le pays depuis janvier 2025, en traversant la Manche. Un niveau inédit. Ces traversées illégales ont aussi connu un net rebond l’an dernier avec 36 800 personnes débarquées, soit 23 % de plus qu’en 2023, année qui avait noté une baisse notable.
    Et elles sont de plus en plus mortelles. Depuis le début de l’année, au moins 15 personnes sont mortes. L’année dernière, ce sont 78 migrants qui ont perdu la vie sur cette route migratoire, un record.

    #Covid-19#migrant#migration#france#routemigratoire#manchee#smallboat#taxiboat#CiCI#SGMer#droitdelamer#sante#migrationirreguliere

  • Manifestations anti-expulsions : Trump déploie les militaires à Los Angeles
    https://www.dakaractu.com/Manifestations-anti-expulsions-Trump-deploie-les-militaires-a-Los-Angeles

    Manifestations anti-expulsions : Trump déploie les militaires à Los Angeles
    Donald Trump a ordonné l’envoi des militaires de la Garde nationale à Los Angeles après deux jours de manifestations parfois violentes contre les expulsions d’immigrés, un déploiement rare, attendu dimanche contre l’avis du gouverneur démocrate de Californie.
    Le gouvernement de Washington dénonce « l’anarchie » à Los Angeles, tandis que les autorités locales parlent d’une décision « incendiaire » de Donald Trump. Elle intervient après deux jours de manifestations et d’incidents provoqués par des manifestants opposés aux expulsions de migrants, principalement latino-américains, dans cette ville où vit une forte population de même origine. « Nous devons défendre notre peuple » a déclaré à l’AFP une femme, refusant de donner son nom, dont les parents sont des immigrés.
    Un photographe de l’AFP a vu des incendies, des tirs de feux d’artifice lors d’affrontements, ou encore un manifestant tenant un drapeau mexicain devant une voiture calcinée sur laquelle avait été inscrit un slogan contre l’agence fédérale Immigration and Customs Enforcement (ICE). Samedi, le président américain républicain, dont un des principaux objectifs politiques est de réduire fortement l’importante immigration aux Etats-Unis, a décidé « le déploiement de 2.000 gardes nationaux pour remédier à l’anarchie qu’on a laissé prospérer », a annoncé la porte-parole de la Maison Blanche Karoline Leavitt, traitant les dirigeants californiens démocrates d’"incapables".
    Le gouverneur régional Gavin Newsom, a pour sa part dénoncé une initiative « délibérément incendiaire » qui « ne fera qu’aggraver les tensions ».Le président Trump a salué dimanche sur Truth Social le « fantastique travail » de la Garde, même si le déploiement effectif de cette force de réserve n’a pas encore été constaté sur place par l’AFP.
    La maire de Los Angeles a par ailleurs dit sur X que la Garde n’était pas encore déployée."Tout le monde a le droit de manifester pacifiquement, mais soyons clairs : la violence et la destruction sont inacceptables, et les responsables devront rendre des comptes", a-t-elle par ailleurs prévenu sur X.
    Une telle décision de déploiement de la Garde nationale est très rare. Force armée de réserve, elle a été récemment principalement mobilisée lors de catastrophes naturelles, comme lors des mégafeux à Los Angeles début 2025. Elle est aussi occasionnellement déployée en cas de troubles civils, mais presque toujours avec l’accord des autorités locales. Sa dernière intervention en Californie pour des troubles civils remonte à 2020, à la suite des violentes émeutes provoquées par la mort de George Floyd, un Afro-Américain tué par un policier à Los Angeles.
    Donald Trump avait prévenu dès samedi que « si le gouverneur de Californie (...) et la maire de Los Angeles (...) ne peuvent pas faire leur travail, ce que tout le monde sait, alors le gouvernement fédéral interviendra et résoudra le problème », dont le foyer est le quartier de Paramount. Les raids de la police sont « une injustice », et les personnes arrêtées « des êtres humains comme des autres », a dénoncé auprès de l’AFP Fernando Delgado, 24 ans, un habitant.
    Les manifestations ont commencé après que des membres de l’ICE s’étaient rassemblés samedi près d’un grand magasin de bricolage, où des travailleurs viennent traditionnellement proposer leurs services pour la journée. Des manifestants ont jeté des objets sur les forces de l’ordre et tenté d’empêcher un autocar de quitter les lieux. Les agents les ont repoussés à l’aide de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes. Des manifestants s’en sont également pris à un car de l’US Marshals Service qui sortait d’une autoroute voisine, conduisant les autorités à fermer les bretelles d’accès.
    « Nous épluchons les vidéos pour identifier les auteurs. Vous amenez le chaos, on apporte les menottes », a répliqué sur X le directeur adjoint de la police fédérale (FBI), Dan Bongino. « L’administration Trump applique une politique de tolérance zéro à l’égard des comportements criminels et de la violence, en particulier lorsque cette violence vise des agents des forces de l’ordre qui tentent de faire leur travail », a également martelé Mme Leavitt. Le ministre de la Défense, Pete Hegseth, a menacé de faire aussi appel à l’armée régulière basée non loin. Si nécessaire, les « Marines de Camp Pendleton seront également mobilisés. Ils sont déjà en état d’alerte », a-t-il déclaré sur les médias sociaux.
    Une déclaration à portée symbolique, selon la professeure de droit Jessica Levinson, relevant que l’engagement de militaires américain à des fins domestiques est restreint légalement en absence d’insurrection. « Quant à la Garde nationale, elle ne pourra rien faire de plus que de fournir un soutien logistique et en personnel ».

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#politiquemigratoire#ICE#expulsion#gardenationale#losangeles#sante

  • Coopération militaire : Le patrouilleur espagnol « Relámpago » en escale à Dakar pour renforcer la sécurité maritime
    https://www.dakaractu.com/Cooperation-militaire-Le-patrouilleur-espagnol-Relampago-en-escale-a-Daka

    Coopération militaire : Le patrouilleur espagnol "Relámpago" en escale à Dakar pour renforcer la sécurité maritime
    Le navire "RELÁMPAGO" de la marine espagnole est accosté au port de Dakar depuis le 29 mai 2025 et y restera jusqu’au 5 juin. Cette escale s’inscrit dans le cadre de l’initiative de présence maritime coordonnée de l’Union européenne, visant à renforcer la sécurité le long des côtes ouest-africaines, notamment dans le golfe de Guinée, une zone stratégique.
    Commandé par le capitaine de corvette Víctor Mejueiro Morado, le "RELÁMPAGO" est en déploiement depuis le 3 février 2025, avec huit escales prévues. « Le golfe de Guinée est une zone stratégique pour l’Espagne, où nous avons de nombreux intérêts. Le Sénégal, avec lequel nous partageons des liens étroits, est un partenaire essentiel », a souligné le commandant.
    En plus des opérations de surveillance maritime, le navire mène des activités de formation conjointes avec la marine nationale sénégalaise. Selon le commandant Mejueiro, « la sécurité maritime passe par la lutte contre la piraterie, la pêche illégale, la pollution et l’immigration clandestine », des objectifs partagés avec les autorités sénégalaises.
    Présent lors de cette escale, le colonel Fernando Lechuga, conseiller de défense à l’ambassade d’Espagne, a rappelé l’importance stratégique du Sénégal pour la coopération bilatérale. « Nous menons de nombreuses activités bilatérales dans le domaine de la défense, en impliquant la marine, l’armée de l’air et l’armée de terre », a-t-il précisé. Esther Martín, première conseillère à l’ambassade, a quant à elle salué les efforts des autorités sénégalaises dans la lutte contre l’immigration irrégulière. « Nous remercions sincèrement les autorités pour leur engagement, car ce drame humain doit être combattu ensemble », a-t-elle affirmé. Alain Bonang

    #Covid-19#migration#migrant#senegal#espagne#marinenationale#routemigratoire#atlantique#migrationirreuguliere#sante

  • En Iran, plusieurs millions d’Afghans menacés d’expulsion
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/05/en-iran-plusieurs-millions-d-afghans-menaces-d-expulsion_6610666_3210.html

    En Iran, plusieurs millions d’Afghans menacés d’expulsion
    Par Ghazal Golshiri
    Le gouvernement iranien mène actuellement l’une de ses plus vastes campagnes d’expulsion de réfugiés, visant en premier lieu les ressortissants afghans, qui constituent la grande majorité des migrants présents sur son sol. Sur environ 6 millions d’Afghans installés en Iran – ayant fui les guerres, l’instabilité politique et les crises économiques – 2 millions d’entre eux, en possession du document provisoire leur accordant une autorisation de résidence temporaire, sont désormais menacés d’expulsion, au même titre que les migrants sans papiers. Au total, près de 4 millions d’Afghans risquent aujourd’hui d’être renvoyés du pays.
    Ces 2 millions de personnes sont titulaires d’une « fiche de recensement », un document délivré par les autorités iraniennes aux migrants en situation irrégulière, en attendant une éventuelle régularisation. Jusqu’en mars, leur présence sur le territoire était tolérée. Depuis, après une annonce du ministère les déclarant privés d’accès aux services de base (éducation, soins, logement), l’étau se resserre. Les expulsions, elles, ont bel et bien commencé. Fin mai, le ministère de l’intérieur a sommé ces migrants de prendre rendez-vous avant le 7 juin pour ouvrir une procédure de régularisation. Passé ce délai, ils seront considérés en situation illégale. Sur les 2 millions de titulaires de ce document, seules six catégories de personnes pourront rester légalement dans le pays – parmi elles, les anciens militaires du régime afghan précédent, avant l’arrivée des talibans, en août 2021. Pour tous les autres, la date limite de départ est fixée au 6 juillet.
    La peur est palpable au sein de la communauté afghane d’Iran, où chacun connaît au moins une personne récemment expulsée. Soheil (le prénom a été modifié, comme celui d’autres Afghans), 21 ans, est arrivé en Iran six mois après le retour des talibans au pouvoir. « Dès ce moment, la situation économique s’est encore dégradée [à cause des sanctions internationales]. Je n’ai pas trouvé de travail en Afghanistan, alors je suis venu en Iran », raconte-t-il par téléphone. Depuis 2021, le nombre de migrants afghans dans ce pays voisin a presque doublé. Soheil a profité de la dernière campagne de recensement en 2022 pour s’enregistrer et obtenir une fiche de recensement. A Téhéran, il a enchaîné les petits boulots : serveur, livreur, mécanicien. Fin avril, il a été arrêté dans le garage où il travaillait. Après deux jours passés au commissariat, il a été transféré dans un camp en périphérie de la capitale.
    « On était environ 800 personnes. Certains ont été battus, on nous insultait, les propos racistes étaient fréquents. Il n’y avait qu’une dizaine de toilettes pour tout le monde, dans un état déplorable. Ensuite, on a été obligés de payer chacun 1,5 million de tomans [environ 15 euros] pour pouvoir monter dans un bus vers l’Afghanistan », témoigne-t-il depuis Kaboul. « Le système migratoire iranien repose officiellement sur le passeport et le visa, explique par téléphone Arash Nasr, chercheur spécialisé dans la situation des réfugiés en Iran, depuis Téhéran. Mais, en réalité, depuis des décennies, l’Iran a accueilli des vagues successives de réfugiés d’Afghanistan et d’Irak, souvent sans papiers. Pour encadrer leur présence, l’Etat a mis en place plusieurs campagnes de recensement, donnant lieu à la délivrance de documents temporaires, sans base légale claire. Cette politique visait notamment à éviter tout engagement découlant de la Convention de Genève sur les réfugiés, que l’Iran n’a jamais pleinement appliquée. Le pays considère tous les Afghans comme des “invités temporaires”, sans volonté d’intégration durable. »
    Depuis août 2021, l’augmentation rapide de la population afghane est particulièrement visible autour de Téhéran, où de nombreux migrants se sont installés. « Cela a entraîné une montée du sentiment anti-afghan dans la société », poursuit le chercheur. Cette hostilité ne s’explique pas seulement par l’évolution démographique, mais aussi par la diffusion massive de fausses informations antimigrants dans les médias officiels et sur les réseaux sociaux, ce qui a profondément influencé l’opinion publique. Alors que la situation économique iranienne se dégrade à grande vitesse, un discours xénophobe s’est développé, proche de celui de l’extrême droite dans d’autres parties du monde. Des vidéos, partagées sur la Toile, montrant des violences à l’encontre de migrants circulent : l’une d’elles montre un jeune garçon à vélo pourchassé par une voiture, dont un des passagers crie : « Cet Afghan essaie de s’enfuir, il faut l’écraser. »
    « De plus en plus d’Iraniens perçoivent la présence des Afghans comme la cause de tous les problèmes du pays : chômage, inflation, insécurité, analyse Arash Nasr. Leur présence alimente aussi des théories du complot : certains prétendent que le pouvoir iranien cherche à modifier la démographie en sa faveur, du fait du profil conservateur et religieux des Afghans. » Ce rejet diffus, enraciné dans une vision hiérarchique de la société, a favorisé l’émergence d’un consensus rare dans la vie politique iranienne : de la droite conservatrice aux opposants au régime, beaucoup soutiennent désormais ouvertement l’expulsion des réfugiés afghans pour des raisons différentes. « C’est ce climat qui a permis la mise en œuvre d’un plan d’expulsion massif, sans véritable débat public », conclut le chercheur.
    Selon l’Organisation internationale pour les migrations, le nombre de familles afghanes expulsées d’Iran a explosé en mai, atteignant 15 675 – soit 2,3 fois plus qu’en avril, et plus de trois fois le chiffre de mai 2024. Ce pic marque une évolution dans le profil des expulsés : alors que les campagnes précédentes concernaient surtout des hommes seuls (26 % en mai), la part des femmes (28 %) et des enfants (46 %) a fortement augmenté.Interdits de séjour dans la moitié des provinces, les migrants afghans en Iran vivaient déjà dans une extrême précarité : leurs emplois sont limités à des tâches ingrates et mal payées. Née en Iran, Najiyah, 40 ans, travaille dans une entreprise d’import-export en banlieue de Téhéran de manière clandestine. Possédant une fiche de recensement devenue aujourd’hui obsolète, elle a rendez-vous, fin juin, dans l’espoir de régulariser sa situation, mais elle n’y croit guère : « Autour de moi, beaucoup dans le même cas ont déjà reçu un ordre d’expulsion. Etre née ici ne change rien », témoigne cette mère de deux enfants. Le droit du sol n’existe pas en Iran.
    Ses proches expulsés récemment n’ont eu qu’un mois pour quitter le pays. Au-delà du délai accordé par les autorités, les migrants doivent payer une amende et risquent d’être inscrits sur liste noire et interdits de visa iranien. « Parmi mes proches expulsés, les enfants n’ont même pas pu terminer leur année scolaire. Les écoles ont dit aux parents : “Vos enfants passeront leurs examens en Afghanistan”. » Najiyah connaît une famille de cinq personnes qui, avant son expulsion, a dû verser 17 millions de tomans pour vingt jours de retard (l’équivalent de 180 euros, soit deux fois le salaire de base d’un ouvrier). « C’est un budget énorme », souffle Najiyah. Depuis le début de la nouvelle vague d’expulsions, les enfants ne vont plus seuls à l’école. Son mari les accompagne, de peur qu’ils soient arrêtés en chemin. En Afghanistan, sa fille de 14 ans ne pourra plus aller à l’école : les talibans interdisent toujours l’éducation des filles au-delà de 12 ans.

    #Covid-19#migrant#migration#iran#afghanistan#expulsion#politiquemigratoire#refugie#droit#retour#sante#OIM

  • « Tunisie, l’enfer des exilés », sur Arte : paroles de migrants traqués par les autorités
    https://www.lemonde.fr/culture/article/2025/06/07/tunisie-l-enfer-des-exiles-sur-arte-paroles-de-migrants-traques-par-les-auto

    « Tunisie, l’enfer des exilés », sur Arte : paroles de migrants traqués par les autorités
    Par Mustapha Kessous
    Le reportage ouvre sur un camp de fortune, posé sur un champ d’oliviers quelque part dans le sud-est de la Tunisie, à une quarantaine de kilomètres de la grande ville portuaire de Sfax. Ibrahim, un Sierra Léonais de 25 ans, qui a étudié la médecine dans son pays, va se charger d’un événement particulier : un accouchement. La future maman a choisi de donner naissance à l’intérieur d’une tente recouverte de plastique, préférant s’allonger sur des tapis rudimentaires plutôt que de profiter du confort et de l’équipement d’une maternité. Se rendre à l’hôpital, c’était, selon elle, prendre le risque de se faire arrêter par les forces de l’ordre. « Les policiers nous chassent comme des animaux », dit-elle. Cette crainte s’inscrit dans un climat de répression accrue envers les migrants en Tunisie.
    Selon les autorités, quelque 20 000 exilés survivent dans les champs d’oliviers, non loin de Sfax. De là, ils espèrent prendre un jour la mer et rejoindre en bateau l’île italienne de Lampedusa. Mais ce voyage est devenu quasi impossible. Entre le 1er janvier et le 1er juin, seules 1 241 personnes ont atteint les côtes européennes, contre plus de 26 000 sur la même période il y a deux ans, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). L’accord conclu à l’été 2023 entre la Tunisie et l’Union européenne vise à freiner les migrations, mais à quel coût humain ?
    Depuis, la violence à l’encontre des migrants a décuplé. Le documentaire Tunisie, l’enfer des exilés s’attache à la montrer, sans filtre. Les journalistes donnent la parole à ces « voyageurs » rencontrés tout au long du tournage. A visage découvert, ils racontent les arrestations, les vols qu’ils subissent, la brutalité policière – qui irait jusqu’au viol –, leurs expulsions vers le désert près de la frontière algérienne… Les reporters ont même filmé certains d’entre eux errant dans cette zone, épuisés après plusieurs jours de marche sans eau. Ils seront par la suite aidés par des ouvriers tunisiens.
    Des scènes filmées par des migrants viennent appuyer les témoignages. Parmi les images choquantes : un gendarme frappant à l’aide d’un bâton des migrants en pleine mer, ou des bateaux de la garde nationale tunisienne semblant chercher à faire chavirer leurs embarcations. Le format court du reportage (vingt-quatre minutes) et les contraintes liées à un tournage clandestin ne permettent malheureusement pas de s’attacher aux personnages : il n’a pas été possible de les suivre sur la durée. Pour certains, on ignore même le pays d’origine, le parcours migratoire ou la durée de présence en Tunisie. Malgré ces limites, ce reportage reste un instantané qui expose le quotidien cauchemardesque des migrants, et dénonce les exactions des autorités tunisiennes. Aucun officiel tunisien n’intervient ; seule Dubravka Suica, la commissaire européenne pour la Méditerranée, répond à quelques questions, mais ses propos, trop évasifs, ne permettent pas de comprendre les enjeux. Tunisie, l’enfer des exilés, de Julien Goudichaud, Davide Mattei et Anne Thillet (Fr, 2025, 24 min).

    #Covid-19#migration#migrant#tunisie#subsahariens#routemigratoire#migrationirreguliere#sante#droit

  • A Los Angeles, de nouvelles manifestations émaillées de heurts après le déploiement de la garde nationale par Donald Trump
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/08/a-los-angeles-la-garde-nationale-arrive-au-troisieme-jour-de-manifestations-

    A Los Angeles, de nouvelles manifestations émaillées de heurts après le déploiement de la garde nationale par Donald Trump
    Le Monde avec AP et AFP
    Des affrontements ont opposé, dimanche 8 juin, à Los Angeles les forces de sécurité aux manifestants contre la politique migratoire de Donald Trump. Plusieurs dizaines de protestataires bloquaient, dimanche après-midi, une autoroute de la mégapole californienne dans un face-à-face tendu avec les forces de l’ordre, qui ont procédé à quelques arrestations et fait usage de gaz lacrymogènes, y compris contre des journalistes. Au moins trois voitures ont été incendiées et deux autres vandalisées.
    La garde nationale avait commencé, dimanche, à se déployer dans la deuxième plus grande ville américaine, après deux jours de manifestations contre les opérations menées par la police de l’immigration (ICE). Le président américain avait ordonné l’envoi de troupes fédérales, samedi, sans avoir été sollicité sur ce point par le gouverneur démocrate de l’Etat, Gavin Newsom – une initiative extrêmement rare.
    Dimanche en fin d’après-midi, l’essentiel de la manifestation était terminé, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse, mais des affrontements étaient encore en cours entre quelques dizaines de protestataires et les forces de sécurité. A l’exception de heurts au niveau d’un centre de détention entre protestataires et agents fédéraux du ministère de la sécurité intérieure, les affrontements ont tous impliqué les forces de l’ordre locales.
    La police de Los Angeles a annoncé, dans la nuit, que le centre-ville avait été déclaré zone de rassemblement interdit. Une zone du quartier d’affaires, Civic Center, a aussi été déclarée zone interdite de rassemblement. « Vous avez des gens violents et nous n’allons pas les laisser s’en sortir », a déclaré le président américain à des journalistes, dimanche. « Nous aurons un retour à l’ordre », a-t-il promis, disant, en outre, envisager l’envoi de troupes ailleurs. « Nous n’allons pas laisser ce genre de choses arriver à notre pays. » « Ç’a l’air d’aller vraiment mal à L. A. ENVOYEZ LA TROUPE !!! », a posté Donald Trump, lundi matin, sur son réseau, Truth Social, lançant aussi : « ARRETEZ LES GENS MASQUÉS, MAINTENANT. »
    Dénonçant la prétendue « anarchie » en cours à Los Angeles, Donald Trump avait ordonné, samedi, le déploiement de 2 000 membres de cette force armée de réserve, principalement mobilisée lors de catastrophes naturelles. Une décision qualifiée de « délibérément incendiaire » par M. Newsom, qui a prévenu qu’elle ne ferait « qu’aggraver les tensions ».
    Le gouverneur démocrate a annoncé, dimanche sur X, avoir « officiellement demandé à l’administration Trump d’annuler son déploiement illégal de troupes dans le comté de Los Angeles et de les remettre sous [son] commandement ». « Nous n’avions aucun problème avant l’intervention de Trump. Il s’agit d’une grave atteinte à la souveraineté de l’Etat […]. Annulez cet ordre. Restituez le contrôle à la Californie », a-t-il ajouté. Environ 300 gardes nationaux ont été positionnés dans la ville, a annoncé, dimanche matin, le commandement militaire.
    Ce déploiement survient après deux journées de manifestations marquées par des heurts et des violences dans la mégapole californienne, où réside une importante communauté hispanique, alors que des habitants tentaient de s’interposer face aux arrestations musclées de travailleurs immigrés menées par la police fédérale de l’immigration. Un important leader syndical, qui protestait contre les agissements de l’ICE, a été arrêté vendredi, et blessé lors de son interpellation, suscitant l’indignation.De son côté, la police de San Francisco a annoncé avoir interpellé, dimanche en fin de journée, une soixantaine de personnes lors de heurts avec des manifestants opposés à la politique américaine de lutte contre l’immigration.
    Trente-cinq ressortissants mexicains ont été arrêtés au cours des récentes opérations, a annoncé, dimanche, la présidente du Mexique, Claudia Sheinbaum, appelant les Etats-Unis à les traiter avec dignité. Ce sont « des hommes et des femmes honnêtes qui sont allés chercher une vie meilleure […] Ce ne sont pas des criminels », a-t-elle insisté, lors d’un discours public.E voquant une « invasion » des Etats-Unis par des « criminels venus de l’étranger », Donald Trump a érigé la lutte contre l’immigration clandestine en priorité absolue et communique abondamment sur les arrestations et les expulsions d’immigrés. Menées jusque dans des tribunaux du pays, ces dernières ont plongé dans la terreur des millions d’immigrés sans statut légal.
    A Los Angeles, d’importantes opérations, vendredi et samedi, des agents de l’ICE, parfois en civil, ont donné lieu à des heurts entre manifestants et forces de l’ordre. A Paramount, dans le sud de l’agglomération, les affrontements ont été violents, samedi. Selon le directeur adjoint de la police fédérale, Dan Bongino, plusieurs personnes ont été arrêtées, ainsi qu’à New York, lors de manifestations similaires.Interrogée, dimanche matin, par une télévision locale, la maire de Los Angeles, Karen Bass, a fait état d’« actes de vandalisme » dans la nuit, mais a assuré que la situation était sous contrôle. Tout en condamnant les violences, elle a regretté la décision de Donald Trump d’envoyer la garde nationale. « Pour moi, ce n’est que de la politique », a-t-elle fustigé.
    Les gouverneurs démocrates américains ont dénoncé, dimanche, le déploiement des soldats de la garde nationale à Los Angeles. « La décision du président Trump est un abus de pouvoir alarmant », ont-ils déclaré, dans un communiqué commun. « Il est important que nous respections l’autorité exécutive des gouverneurs de notre pays pour gérer leurs gardes nationaux », ont-ils ajouté, insistant sur leur soutien à Gavin Newsom.Le gouvernement fédéral est engagé dans un bras de fer avec la Californie, bastion de l’opposition progressiste et « Etat sanctuaire » protégeant les migrants. Ce mouvement consiste, notamment, à limiter les informations que les autorités locales partagent avec les autorités fédérales. Dans certains cas, les polices locales ont pour interdiction d’interpeller un immigré en situation irrégulière sur la seule base de son statut migratoire. Los Angeles a adopté ce statut en novembre 2024, dans la foulée de l’élection de Donald Trump, s’engageant à ne pas utiliser les ressources de la municipalité contre les personnes immigrées. Une politique dénoncée par l’administration Trump, qui souhaite priver de subventions fédérales les villes sanctuaires – décision invalidée en justice. Donald Trump « espère du chaos pour pouvoir justifier plus de répression, plus de peur, plus de contrôle », a accusé, dimanche sur X, Gavin Newsom, appelant au calme.

    #Covid-19#migration#migrant#etatsunis#ICE#politiquemigratoire#etatsancuaire#villesanctuaire#droit#sante

  • En Afrique, le « travel ban » à géométrie variable de Donald Trump
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2025/06/06/en-afrique-le-travel-ban-a-geometrie-variable-de-donald-trump_6610817_3212.h

    En Afrique, le « travel ban » à géométrie variable de Donald Trump
    Par Christophe Châtelot
    A Kinshasa et Brazzaville, les capitales des deux Congos qui se font face sur les rives opposées du fleuve éponyme, on doit se demander à partir de quels critères Donald Trump a établi sa liste de 12 pays – dont sept en Afrique – soumis à son nouveau travel ban, principe interdisant l’accès au territoire américain.
    La République démocratique du Congo (RDC) échappe à cette fermeture alors que son voisin, le Congo-Brazzaville, est frappé d’interdiction. A compter du 9 juin, plus aucun visa ne sera délivré aux ressortissants de ce pays, comme à ceux des autres Etats bannis : Afghanistan, Birmanie, Haïti, Iran, Yémen, Tchad, Guinée équatoriale, Erythrée, Libye, Somalie et Soudan. Le Burundi, la Sierra Leone et le Togo figurent sur une deuxième liste de « suspension partielle ».
    Dans un communiqué publié mercredi 4 juin, la Maison Blanche justifie sa décision en termes réglementaires. Elle se base sur la proportion de visa overstay, autrement dit les détenteurs de visas de type B1/B2 (affaires ou tourisme) ou F, M, J (études, échanges scolaires…) arrivés par avion ou bateau et qui sont demeurés sur le territoire américain après l’échéance du délai légal de leur séjour. Le Congo-Brazzaville affiche des taux de 29,63 % et de 35,14 %, respectivement, pour le premier et le deuxième groupe de visas. Des proportions « inacceptables » pour Washington.
    La RDC, quant à elle, échappe au couperet de l’administration américaine. Pourtant, plus d’un étudiant sur deux (les visas F, M, J) prolonge illégalement son séjour aux Etats-Unis, selon les données contenues dans le rapport daté du 5 août 2024 du Service des douanes et de la protection des frontières des Etats-Unis (CBP), chargé notamment de la lutte contre l’immigration illégale. La note « explicative » de la Maison Blanche ne précise pas, évidemment, si les négociations actuelles menées avec Kinshasa pour accéder aux minerais stratégiques rares dont le pays regorge expliquent cette mansuétude.
    La lecture du rapport des douanes, qui a servi de base de référence, montre que la décision américaine s’applique quasiment mécaniquement aux pays qui affichent le plus haut taux de visa overstay – sans tenir compte des valeurs absolues. Le Burundi se retrouve ainsi inscrit sur la deuxième liste à cause de 24 étudiants restés trop longtemps sur le sol américain après y être entrés légalement. Dans cette même situation, il y a 7 081 étudiants indiens, plus 12 882 touristes ou hommes d’affaires originaires du même pays. Mais compte tenu du nombre total d’Indiens entrés aux Etats-Unis, la proportion est moindre que pour le Burundi. Ce n’est qu’un exemple parmi d’autres.
    Ce travel ban n’est pas une surprise. Lorsqu’il a pris ses fonctions, le 20 janvier, Donald Trump a publié un décret demandant au département d’Etat d’identifier les pays pour lesquels « les informations relatives à l’examen et au filtrage sont si insuffisantes qu’elles justifient une suspension partielle ou totale de l’admission des ressortissants de ces pays ». Durant sa campagne, il avait également promis de « restaurer » le travel ban qu’il avait imposé à plusieurs pays – la plupart musulmans – durant son premier mandat (2017-2021).
    Le président américain estime que les cas de visa overstay constituent un « danger extrême ». Mais les chiffres contenus dans le rapport des douanes soulèvent des questions sur les cibles touchées. Les sept pays africains sanctionnés ne représentent ainsi que 0,5 % des quelque 314 110 cas enregistrés sur douze mois de mai 2023 à mai 2024. Sur une vidéo mise en ligne sur le réseau social X, Donald Trump a également évoqué l’attaque à Boulder (Colorado), survenue dimanche, pour justifier sa décision. Ce jour-là, un Egyptien entré légalement en 2022, mais dont le visa avait expiré depuis des mois, a lancé des engins incendiaires sur des participants à une marche hebdomadaire en soutien aux otages israéliens retenus depuis le 7 octobre 2023 par le Hamas dans la bande de Gaza. L’attentat a fait au moins 12 blessés.
    Quelque 2 700 Egyptiens sont en visa overstay. « Nous ne laisserons pas entrer dans notre pays les gens qui veulent nous faire du mal », a averti Donald Trump. L’Egypte échappe toutefois au travel ban, destiné également à « combattre le terrorisme par des normes de sécurité fondées sur le bon sens ». La Libye et la Somalie – ainsi que Cuba – sont en revanche épinglées comme des Etats soutenant le terrorisme.
    Amnesty International ne partage pas les mêmes valeurs normatives de « bon sens ». L’organisation de défense des droits humains juge que « la nouvelle interdiction de voyager est discriminatoire, raciste et carrément cruelle ». Tous les pays africains listés sont, à l’exception de la Sierra Leone, sous le joug de pouvoirs autoritaires, voire dictatoriaux. Certains sont ravagés, tel le Soudan, par la guerre. Mais ce n’est pas au nom de la défense des valeurs démocratiques ou humanistes que les Etats sont sanctionnés.
    En termes mesurés, l’Union africaine (UA) s’est dite « préoccupée par le possible impact négatif de telles mesures sur les relations interpersonnelles, les échanges éducatifs, les échanges commerciaux et plus largement les relations diplomatiques soigneusement entretenues depuis des décennies ».
    Parmi les pays « bannis », le Tchad, accusé de « mépris flagrant des lois américaines sur l’immigration », a été le plus prompt à réagir. Le président, Mahamat Idriss Deby, a averti sur sa page Facebook avoir « instruit le gouvernement à agir conformément aux principes de réciprocité et suspendre l’octroi de visas aux citoyens américains ». « Le Tchad n’a ni avion à offrir, ni des milliards de dollars à donner, mais le Tchad a sa dignité et sa fierté », a-t-il ajouté, en référence aux cadeaux donnés par certains Etats à Donald Trump pour le convaincre d’abaisser les nouveaux taux de douane exorbitants.
    Le président américain a quant à lui averti que « de nouveaux pays peuvent être ajoutés [à la liste des travel ban”] au fur et à mesure que des menaces émergent dans le monde ».

    #Covid-19#migrant#migration#etatsunis#politiquemigratoire#travelban#visas#afrique#droit#sante

  • Kilmar Abrego Garcia, immigré salvadorien au cœur d’une bataille entre la justice fédérale et l’administration Trump, est rentré aux Etats-Unis
    https://www.lemonde.fr/international/article/2025/06/06/kilmar-abrego-garcia-immigre-salvadorien-au-c-ur-d-une-bataille-entre-la-jus

    Kilmar Abrego Garcia, immigré salvadorien au cœur d’une bataille entre la justice fédérale et l’administration Trump, est rentré aux Etats-Unis
    Le Monde avec AFP
    Un immigré salvadorien expulsé « par erreur », mais que l’administration Trump se disait dans l’incapacité de ramener, a été reconduit, vendredi 6 juin, du Salvador aux Etats-Unis, où il est désormais inculpé de trafic de migrants, a annoncé la ministre de la justice, Pam Bondi.
    Le cas de Kilmar Abrego Garcia, habitant de l’Etat du Maryland marié à une Américaine, cristallise depuis près de trois mois l’opposition entre la justice fédérale, dont la Cour suprême, et l’exécutif, accusé d’obstruction vis-à-vis des tribunaux qui contrarient sa politique d’expulsions massives.
    Il fait partie des plus de 250 hommes expulsés le 15 mars vers le Salvador, la plupart pour appartenance présumée au gang vénézuélien Tren de Aragua, déclaré « organisation terroriste » par Washington. Ils ont été incarcérés dans une prison de haute sécurité connue pour la dureté de ses conditions de détention.
    L’administration Trump a ensuite reconnu en justice une « erreur administrative » concernant Kilmar Abrego Garcia puisqu’un arrêté d’expulsion à son encontre vers le Salvador avait été définitivement annulé en 2019. Elle l’accuse cependant, malgré son absence de casier judiciaire, d’appartenir au gang salvadorien MS-13, également classé « terroriste » par les Etats-Unis en février.
    Mme Bondi a remercié le président salvadorien, Nayib Bukele. « Notre gouvernement a soumis au Salvador un mandat d’arrêt et ils ont accepté de le renvoyer dans notre pays », a-t-elle ajouté. S’il est reconnu coupable, Kilmar Abrego Garcia purgera sa peine aux Etats-Unis avant d’être expulsé vers le Salvador, a expliqué la ministre.
    Lors d’une rencontre à la Maison Blanche en avril, le président, Donald Trump, et son homologue salvadorien s’étaient pourtant déclarés dans l’incapacité de remédier à cette situation. M. Bukele a assuré vendredi sur X qu’il n’avait pas changé de position. « Mais nous travaillons avec l’administration Trump et s’ils demandent le retour d’un membre de gang pour faire face à la justice, bien sûr, nous n’allons pas refuser », a-t-il fait valoir.
    La Maison Blanche, après avoir juré depuis des mois que Kilmar Abrego Garcia ne remettrait jamais les pieds aux Etats-Unis, soutenait vendredi que son retour n’avait rien à voir avec son expulsion, niant qu’il se soit agi à l’origine d’une « erreur ».
    « Le gouvernement a fait disparaître Kilmar dans une prison étrangère en violation d’une décision de justice. Maintenant, après des mois de temporisation et de secret, il le ramène non pas pour corriger son erreur mais pour le poursuivre pénalement », a déploré lors d’une conférence de presse l’un de ses avocats, Simon Sandoval-Moshenberg. « Il se défendra vigoureusement des accusations portées contre lui », a déclaré l’avocat, disant vouloir rencontrer son client « dès que possible ».
    « Ce dossier concerne plus qu’un seul homme », a insisté Ama Frimpong, directrice juridique de l’organisation de défense des immigrés CASA. « Il s’agit de savoir si le gouvernement peut nous faire disparaître et nous réduire au silence, nous le peuple, braver des décisions de justice et utiliser des processus secrets pour ne pas avoir à rendre de comptes », a-t-elle expliqué.
    « Pendant des mois, l’administration Trump a bafoué l’autorité de la Cour suprême et notre Constitution », a pour sa part réagi dans un communiqué le sénateur démocrate Chris Van Hollen, qui avait pu rencontrer brièvement Kilmar Abrego Garcia en avril au Salvador. « Aujourd’hui, il semble qu’elle se soit enfin rendue à nos exigences de respecter les décisions de justice et les droits de se défendre accordés à quiconque aux Etats-Unis », s’est-il félicité. Donald Trump a érigé la lutte contre l’immigration clandestine en priorité absolue, évoquant une « invasion » des Etats-Unis par des « criminels venus de l’étranger » et communiquant abondamment sur les expulsions d’immigrés. Mais son programme d’expulsions massives a été contrecarré ou freiné par de multiples décisions de justice, notamment au motif que les personnes visées devaient pouvoir faire valoir leurs droits.

    #covid-19#migrant#migration#etatsunis#salvador#expulsion#politiquemigratoire#droit#sante

  • Face à la pénurie de psychotropes, des patients atteints de troubles psychiques confient leur désarroi | Blanche Ribault
    https://www.streetpress.com/sujet/1748954819-penurie-psychotropes-patients-maladies-mentales-temoignages-

    Depuis janvier, des milliers de patients atteints de maladies psychiques sont en rupture de traitement forcée. Entre crise de panique et trouble de l’anxiété, ils racontent les conséquences de ces pénuries et le manque d’alternatives. Source : StreetPress