Extraits
Rapport MIVILUDES 2021
216 Pages
J’incite vivement à la lecture complète du rapport...
Ces extraits sont une série de copiés-collés donc une décontextualisation des paragraphes. Avant toute polémique ou commentaire merci de se reporter au texte ou au chapitre concerné (la numérotation des pages est faite à cet objet...)
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Page20 Intro
La MIVILUDES observe un phénomène sectaire « à l’état gazeux » : le groupe est bien là, mais il est mobile, changeant et impalpable.
Ses membres y adhèrent ou se désolidarisent facilement en créant d’autres groupes, selon la lecture qu’ils font du contenu doctrinal. Certains pourront alors sans mal l’essaimer à l’identique ou avec des variantes.
La rhétorique utilisée par ces groupes et individus se veut en opposition à l’ordre établi : les institutions étatiques seraient corrompues, la société serait décadente, la médecine conventionnelle inefficace, etc. Ces discours, caractéristiques des théories complotistes, se nourrissent les uns des autres et se renforcent mutuellement, rendant la mission de la MIVILUDES toujours plus difficile. Les liens de plus en plus complexes tissés et entretenus par ces communautés contribuent au développement d’une véritable « toile » sectaire.
Page 22 Thérapeutique
Si la maladie est un point d’entrée facile pour les mouvements à caractère sectaire, toute dérive thérapeutique n’est pas forcément sectaire. Un médecin peut croire fortement à une thérapie non éprouvée, complémentaire ou alternative, mais qui ne porte pas de danger en soi. Les pratiques non conventionnelles deviennent sectaires lorsqu’elles essaient de faire adhérer le patient à une croyance, à un nouveau mode de pensée visant à l’exclure de toute forme de rationalité et à créer les conditions de son isolement. Prétextant l’inutilité des traitements conventionnels, le pseudo-praticien va demander au patient d’avoir toute confiance en lui car il affirme être le seul à détenir la « méthode miracle » apte à le guérir.
Page 23-24. L’invisibilisation des victimes
Si la MIVILUDES observe une hausse de ses saisines, il faut néanmoins garder à l’esprit que de nombreuses victimes demeurent totalement indécelables. Plongées dans un état de dépendance et de perte d’autonomie psychique, elles n’ont pas conscience de faire l’objet d’une manipulation et ne peuvent se prévaloir du statut de victime pour entamer les démarches nécessaires à la reconnaissance et à la protection de leurs droits.
Ces personnes sont intimement convaincues d’avoir été triées sur le volet par un meneur quasi-messianique et d’appartenir à une communauté unique et sélective. Elles seraient des privilégiées. Pour obtenir une guérison, un bien- être, voire un simple sentiment d’acceptation, elles taisent peu à peu leur individualité pour se fondre dans une relation de soumission absolue. Puisque le groupe se construit en opposition à l’ordre établi, sur la base de vérités alternatives, il est en rupture avec le reste du monde. L’isolement, qui ne sert concrètement qu’à accentuer l’emprise sur les victimes, est légitimé par un besoin de se préserver d’une société considérée comme immorale et impure
À cet égard, il convient de préciser que les ter-minologies fréquemment utilisées pour se référer à ces individus traduisent un certain folklore, une curiosité presque sympathique envers eux,
tels que les « gourous » , « gourelles » , « leaders charismatiques » , « maître à penser » , etc. Pour autant, ce ne sont là que des personnalités prédatrices, qui abusent, escroquent, manipulent et violentent des victimes de la manière la plus pernicieuse qui soit, en leur donnant de faux espoirs. Une fois condamnées, ces personnes ne peuvent être qualifiées autrement que comme des délinquants et des criminels.
En 2021, les condamnations observées vont dans le sens du constat effectué par la Mission interministérielle, à savoir que des pseudo-thérapeutes , pseudo-professeurs , pseudo-coachs et pseudo-médecins sont mis en cause pour de graves infractions pénales. Les victimes sont souvent des personnes vulnérables, parfois atteintes de graves pathologies.
Par exemple, un ancien « professeur » de yoga a été condamné en 2021 par le tribunal correctionnel de Poitiers pour abus de faiblesse à 4 ans de prison ferme. Un appel a été interjeté par le mis en cause. Il a en outre été condamné à payer 600 000 euros de dommages et intérêts à ses victimes et a vu l’ensemble de ses biens confisqués.
Dans un but prétendument thérapeutique, l’homme de 73 ans s’était livré à des brimades physiques, psychologiques et sexuelles sur une douzaine de personnes. Il les avait également exploitées financièrement, l’une des victimes ayant été contrainte à l’achat de plusieurs propriétés pour un préjudice estimé à plusieurs centaines de milliers d’euros.
Similairement, un « naturopathe », qui se présentait comme « médecin moléculaire » titulaire d’un doctorat et d’un post-doctorat, a été condamné 2021 par le tribunal correctionnel de Paris à deux ans d’emprisonnement avec sursis pour exercice illégal de la médecine. L’intéressé a interjeté appel de la décision. Plusieurs de ses « patients », qu’il recevait dans un simulacre de cabinet, avaient décidé de s’en remettre entièrement à lui pour qu’il les aide à guérir grâce à des remèdes naturels tels que des cocktails d’huiles essentielles, une alimentation centrée sur des jus de fruits et de légumes, des jeûnes sévères et prolongés. Même lorsque ses victimes présentaient des états de faiblesse très avancés, le mis en cause les incitait à jeûner. Au moins deux personnes souffrant d’un cancer sont ainsi décédées.
Page 26 Emprise mentale
Le point commun à toutes les dérives sectaires est l’emprise mentale. Toutefois, elle ne saurait suffire au motif que cette dernière est présente dans d’autres situations comme cela peut être le cas dans le cadre des violences conjugales. En revanche, pour caractériser une dérive sectaire, il est indispensable de constater la présence d’autres critères cités ci-dessus. L’appréciation se fait in concreto. Dans certains cas, un seul de ces autres critères permettra de caractériser la dérive sectaire.
Page 27 Processus d’aliénation.
Ce processus d’aliénation se décline en plusieurs étapes successives exercées sur la victime : la séduction, la déconstruction, la reconstruction et la consolidation.
Lors de l’étape de la séduction, une attention particulière est portée à l’individu, tant à ses aspirations qu’à ses difficultés. Des promesses exceptionnelles et l’appartenance à un groupe lui sont offertes.
Une fois cette étape achevée, l’auteur des faits va alors pouvoir s’atteler à une deuxième étape essentielle à sa domination : la déconstruction de la victime. Un processus « initiatique » est alors engagé et un investissement toujours plus important de l’individu est requis par le groupe. Son isolement progressif est mis en place, induit en partie par sa rupture avec ses références antérieures.
C’est seulement à cette condition que pourra survenir une troisième phase au cours de laquelle l’individu va véritablement devenir adepte : la reconstruction. Une nouvelle éthique est proposée à la victime et son histoire personnelle est réinvestie voire réécrite. Une servitude volontaire se met en place, entraînant une perte progressive d’autonomie sur des choix importants.
Enfin, viendront la consolidation et le renforcement. La victime est alors soumise à l’affirmation de vérités absolues soutenues par une rhétorique fallacieuse et empreinte de nombreux sophismes. Le doute et la contre-argumentation sont de moins en moins tolérés et peuvent amener à des sanctions. La vénération d’un individu ou du groupe est développée, entraînant la soumission et la disponibilité sans réserve.
La personne sous emprise aura alors du mal à s’émanciper de sa condition de victime, puisqu’elle n’aura même pas conscience d’avoir fait l’objet d’un tel processus.
L’ingéniosité du mis en cause est ainsi de convaincre la victime qu’elle a adhéré seule à ces croyances et à cet état d’emprise.
Page 28. Le complotisme
Le complotisme est un mode de pensée antisystème qui s’appuie sur des arguments non falsifiables, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent être ni prouvés ni récusés, ou sur une vérité partielle, soumise à une interprétation rationnelle mais erronée.
Si les théories du complot ne sont pas nouvelles et ont toujours fasciné, il est possible de constater de nos jours qu’elles ne sont plus l’apanage d’une minorité marginalisée. Portées par Internet et les réseaux sociaux, elles s’imposent désormais comme un logiciel d’explication du monde sous la forme d’une immense opération de manipulation de la population, et cela ne peut qu’inquiéter les services de l’État.
Les mécanismes conduisant à adhérer aux théories du complot reposent en grande partie sur les biais cognitifs du cerveau humain. Il réside en effet une volonté de réduire l’incertitude et de reprendre le contrôle de la situation en identifiant à qui attribuer les torts. Ce dessein est accentué par le biais de confirmation – consistant à privilégier des informations qui confortent ses idées préconçues, ses préjugés ou ses hypothèses – et par le biais de proportionnalité selon lequel une explication trop simple, même vraie, n’est pas satisfaisante lorsqu’il s’agit de justifier quelque chose de grave.
À ces biais cognitifs, une explication sociologique peut également être avancée. En effet, d’un point de vue sociopolitique, les théories complotistes constituent un discours de revanche contre les élites et contre le système socio-économique dans lequel l’individu vit. Plus celui-ci est indigné de sa situation, plus il trouvera un écho à sa colère dans le complotisme. Si le système est perçu comme injuste, la théorie venant le discréditer sera accueillie positivement. Plus généralement, le manque de confiance dans les élites dirigeantes et le sentiment d’une prétendue opacité de la vie publique ébranlent fortement la confiance de l’individu envers les institutions. Celles-ci sont alors considérées comme immorales et illégitimes.
En tant que telles, ces doctrines conspirationnistes ne sont donc pas illégales ou répréhensibles pour elles-mêmes, sauf si elles incitent à la haine raciale, à la violence contre les personnes ou si elles poussent à la commission d’infractions, crimes ou délits. Il en est de même pour celles qui pousseraient à la réalisation de violation des lois, des règlements et des principes constitutionnels reconnus par la République française.
Page 29. Crise sanitaire etc...
L’adhésion aux thèses complotistes relève donc d’abord de la croyance. La MIVILUDES ne les juge aucunement et n’a pas compétence pour les valider ou les certifier. Ce sont donc uniquement les conséquences préjudiciables sur les individus que ces croyances peuvent engendrer qui sont seules répréhensibles et sanctionnables en droit, et sur lesquelles la MIVILUDES a autorité pour révéler leur dangerosité.
etc...
La crise sanitaire, en déstabilisant de nombreux individus, a accentué les doutes et les peurs créant en réaction une intolérance à l’incertitude. Chacun veut détenir, non plus la vérité, mais sa vérité. C’est une manière de se réaffirmer comme individu dans un système globalisé.
Pour autant, il est à préciser que la MIVILUDES ne reconnaît pas, à ce jour, les éléments consti- tutifs de la dérive sectaire, à savoir une emprise mentale volontairement induite par un individu ou un groupement, entraînant des préjudices pour les personnes ainsi assujetties. En effet, bien souvent, c’est l’individu lui-même qui se « cultive » à ces théories, au travers d’articles, de blogs, de vidéos, etc. Il développe son propre corpus de contre-vérités et ne rejoint pas nécessairement une organisation structurée.
En revanche, il existe de nombreux groupes sectaires qui s’appuient sur des théories du complot pour exercer leur emprise. La frontière entre dérive sectaire et complotisme est donc ténue et il apparait parfois difficile de distinguer ces deux mouvances pour des personnes non aguerries
etc...
Page 30. COVID 19
Christian TAL SCHALLER accuse les gouvernements sans distinction et le « lobby pharmaceutique » d’entretenir la crédulité des masses au nom du profit. Durant la crise sanitaire, il déclarait sur sa chaine YouTube, récemment censurée, où il comptait 90 000 abonnés, qu’« ils ont fabriqué un virus dans le but de tuer des millions de gens » et que « le but du vaccin n’a jamais été de les protéger, mais c’est de les empoisonner. Les vaccins sont des poisons calculés ». Son discours anti-vaccin n’est pas nouveau puisque qu’il publiait en 2014 Les vaccins sont des poisons et dès 2009, Vaccin, un génocide planétaire. Christian TAL SHALLER est en contact avec de nombreux autres individus et collectifs tenant le même discours, tels que Jean-Jacques CRÈVECŒUR ou encore Silvano TROTTA et son association BonSens .
S’appuyant sur ces théories complotistes, Christian TAL SCHALLER a développé certaines pratiques s’inscrivant dans des dérives thérapeutiques afin de faire adhérer le patient à une croyance, à un nouveau mode de pensée.
Page 30 Survivalisme et collapsologie.
Le nombre de saisines traitées par la MIVILUDES concernant le survivalisme reste marginal.
Le mode de vie des survivalistes est le suivant : ils se préparent en modifiant leurs habitations, en apprenant des techniques de survie et des rudiments de notions médicales, en stockant de la nourriture et des armes, en construisant des abris antiatomiques ou en apprenant certaines techniques pour se réchauffer, avoir de l’eau potable et se nourrir en milieu sauvage ou hostile.
Les thèses des survivalistes trouvent très généralement leur origine soit dans le complotisme, en considérant que les élites dirigeantes cacheraient une fin du monde imminente, soit dans la collapsologie.
La collapsologie est un courant de pensée trans-disciplinaire théorisé dans les années 2010 qui envisage les risques d’un effondrement de la civilisation industrielle et ses conséquences. Elle s’inscrit dans l’idée que l’homme altère son environnement durablement. L’urgence écologique, liée notamment au réchauffement climatique et à l’extinction de la biodiversité, entraînerait un effondrement de notre société.
Comme pour le complotisme, adhérer aux thèses survivalistes relève de la liberté de pensée. La plupart des survivalistes ne présente pas un caractère de dangerosité et s’inscrit dans une réaction assez instinctive face aux incertitudes du monde de demain et à un climat anxiogène.
Page 31. Survivalistes extremistes
Toutefois, à côté de ces groupes inoffensifs, il existe d’autres nébuleuses potentiellement violentes liées à des groupuscules politiques extrémistes qui présentent un risque de passage à l’acte. Dans ce contexte, l’acquisition d’armes, l’organisation de stages et la consti- tution de petites communautés dans des lieux isolés doivent faire l’objet d’une vigilance accrue de la part des institutions de l’État.
Page 32 Séparatisme et radicalisation
Page 33 Recommandations
Face à une personne tenant de manière récurrente des discours à caractère complotiste, survivaliste, il est conseillé de :
→ Maintenir les liens d’affection et de confiance, même si le dialogue est très difficile à conserver.
→ Adapter son langage et sa communication en adoptant la même approche empathique et bienveillante que l’individu à l’influence néfaste.
→ Ne pas tenir de discours trop rationnel au risque de la braquer en entrant en confrontation avec ses positions et ses propos.
→ Inciter la personne à multiplier ses sources d’informations afin de l’encourager à développer son esprit critique.
Page 35. Saisines
Par rapport aux années précédentes, la MIVILUDES continue de traiter des saisines sur des mouvements identifiés : 99 saisines sur les Témoins de Jéhovah, 33 sur l’ Église de Scientologie , 31 saisines sur l’ anthroposophie . La Mission interministérielle a également traité 293 saisines concernant la mouvance chrétienne au sens large, dont 106 sur le catholicisme et 168 sur le protestantisme dont 153 sur la mouvance évangélique.
La santé reste un sujet de préoccupation majeure avec 744 saisines traitées au total dont près de 70 % concernent les pratiques de soins non conventionnelles telles que la naturopathie , le reiki , la nouvelle médecine germanique , etc.
Parmi les saisines traitées par le pôle Économique et Financier en 2021, 173 saisines concernent le développement personnel dont 54 % sur le coaching spécifiquement. 86 saisines concernent la vente multi-niveaux, un sujet d’attention de la MIVILUDES depuis quelques années et qui touche principalement les jeunes de 16-25 ans.
La Mission interministérielle continue de traiter des saisines sur des individus et mouvements diffus qui relèvent de croyances diverses : 59 saisines sur le chamanisme, 22 sur la médiumnité et le channelling ont été traitées en 2021.
La MIVILUDES a traité 148 saisines en rapport avec le complotisme et le mouvement anti-vax dont la majorité est constituée de signalements, bien que ces sujets en tant que tels ne relèvent pas de sa compétence.
Page 38 Tableau des Principaux thèmes des saisines traitées en 2021
Page 40 Désertification médicale
La place des pratiques de soins non conventionnelles devient un enjeu de santé publique. La désertification médicale des campagnes françaises n’est pas étrangère à ce phénomène qui prend des proportions inquiétantes et contribue à créer une insécurité sanitaire.
Page 43. Communautés néos.
Parmi les thématiques traitées par le pôle Sécurité, figurent entre autres le néo-chamanisme, le masculinisme et le féminin sacré, le bouddhisme, etc.
Ainsi, s’agissant des églises dites « évangéliques », les témoignages reçus par la MIVILUDES font état, dans certains cas, d’éléments particulièrement préoccupants tels que l’exigence de dons parfois très importants, la tenue en interne de « discours très sexualisés sur la femme et la condition féminine » et d’« une nécessaire soumission à leur mari ». De plus, les fidèles seraient soumis à l’obligation de rester au sein de la communauté car s’ils décident de quitter le groupe, « ils sont dans l’illusion et l’aveuglement, avec impossibilité ensuite de revenir dans la repentance car ils auraient fait le choix clair entre la vie (dans la communauté) et la mort (en dehors) ».
Page 47-48. Personnes agêes.
La maltraitance financière et l’emprise à l’égard du sujet âgé fait notamment partie des sujets d’inquiétude de la MIVILUDES. La maltraitance financière peut être définie comme « tout acte commis sciemment en vue de l’utilisation ou de l’appropriation de ressources financières d’une personne à son détriment, sans son consentement ou en abusant de sa confiance ou de son état de faiblesse physique ou psychologique ».
Selon le rapport du Département des Affaires Économiques et Sociales des Nations Unies, le nombre de personnes de 60 ans et plus devrait plus que doubler d’ici 2050 et plus que tripler d’ici 2100, passant de 901 millions en 2015 à 2,1 milliards en 2050 et 3,2 milliards en 2100. Selon un rapport de l’Organisation mondiale de la santé, une personne âgée sur six serait victime de maltraitance dans son environnement au cours de l’année passée.
Page 50. Information
En effet, les dérives sectaires sont un sujet com- plexe et en constante évolution : sa compré- hension par les citoyens est indispensable et ce d’autant plus qu’il n’existe pas de définition juridique de la « secte ».
Page 58-59. L’Église de Scientologie : une stratégie de reconquête à grande échelle
En 2021, dans un contexte de perte de repères sociaux engendré par la crise sanitaire, le groupe a intensifié ses actions de prosélytisme. Des « ministres volontaires » se sont multipliés dans plusieurs villes pour distribuer des « carnets du bonheur », parfois en installant des stands sur la voie publique sous le slogan « On peut y faire quelque chose ». Similairement, le groupe a assuré la diffusion de tracts dans les boîtes aux lettres de particuliers mais également au sein de certaines résidences étudiantes comme au campus de Bordeaux-Talence où les prospectus scientologues proposaient des « cours en ligne gratuits » permettant de faire face à la « déprime », aux « angoisses », à la « précarité », et au « sentiment d’échec ».
S’il se présente sous des termes bienveillants en adoptante une posture avenante et empathique, la MIVILUDES s’inquiète du manque de transparence du groupe qui semble cibler des personnes fragiles, en souffrance, confrontées à des drames personnels ou à des questions existentielles. La Scientologie se fonde sur des causes en apparence tout à fait nobles et des structures au nom attractif pour recruter de nouveaux adeptes.
Ce phénomène a été particulièrement visible en 2021 au regard de ce qui pourrait être considéré comme des opérations de déstabilisation menées par la Scientologie contre les hôpitaux psychiatriques français. Pour ce faire, le groupe a recours à un organisme distinct de l’Église de Scientologie mais entièrement contrôlé par cette dernière : la Commission des citoyens pour les droits de l’homme (CCDH).
Page 60. Drogue et Internet.
Ce n’est pas un cas isolé puisque l’Église de Scientologie dispose également d’autres antennes, d’apparence à vocation humanitaire, comme son association « Non à la drogue, oui à la vie » qui a également assuré des opérations de communication et de tractage ou encore son programme Narconon de réhabilitation des personnes souffrant d’addiction.
Par ailleurs, l’Église de Scientologie se fait connaître sur Internet. Elle a ainsi été active sur les réseaux sociaux, notamment par son compte Facebook Celebrity Centre Paris pour proposer un atelier gratuit visant à repérer une personne toxique et à s’en libérer. Le groupe a aussi misé sur des sites spécialisés pouvant atti-rer des personnes en souffrance, comme le site atypikoo.com , se définissant comme « le réseau social pour atypiques : Hypersensibles, surdoués, HPI, HPE, Zèbres, Aspies, Empathes ... ».
Page 67 Les Témoins de Jéhovah
« Le monde extérieur à leur organisation serait peuplé de méchants, dangereux, vicieux dont l’unique but est de détourner les gentils Témoins de Jéhovah du droit chemin ».
Pour diffuser ces idées auprès des enfants, les Témoins de Jéhovah ont recours à une littérature abondante. Ils ont conçu et édité leurs propres livres regorgeant de « descriptions et d’illustrations des armées sataniques : dragons à plusieurs tête cornues, grenouilles griffues aux yeux rouges... ». Il s’agit d’images très violentes comme en témoigne le Recueil d’histoires bibliques. Nous y trouvons la Mort et la Maladie de Job, Abraham qui attache Isaac sur l’autel et lève le couteau pour le tuer, des nourrissons qui sont attaqués avec un couteau, un homme mort qui baigne dans son sang et un autre qui est étranglé. Lapidation, étranglement, bains de sang, noyade de personnes, toutes ces vio- lences peuvent être trouvées dans la littérature destinée aux enfants de cette communauté. Les récits de morts atroces couplés à la peur d’une apocalypse imminente sont de nature à soumettre les mineurs à une anxiété et un stress particulièrement difficiles.
Page 75 L’Anthroposophie.
De même, la MIVILUDES a pu constater la prolifération de propos de la part de médecins anthroposophes particulièrement virulents durant la crise sanitaire. Opposés à toute cam- pagne de vaccination, des médecins anthroposophes se sont effectivement illustrés pendant cette crise en expliquant que la COVID-19 était le résultat, non pas d’un virus, mais d’une « électrification de la Terre » causée par le déploiement de la 5G. Dans certaines cliniques allemandes, des médecins anthroposophes ont prescrit de la poussière de météorite pour guérir de la COVID-19.
Page 86-87 Les Eco-villages et éco-spiritualité.
Ces éco-villages semblent se multiplier aussi bien en France qu’à l’étranger, la MIVILUDES ayant par exemple été interrogée au sujet de structures créées au Brésil et au Mexique. Des Français, parfois expatriés, tentent ainsi d’attirer de nouveaux adhérents pour les accueillir sur place, avec leurs proches et leur patrimoine. Leur stratégie de recrutement s’opère via les réseaux sociaux et des sites internet dédiés. Les fondateurs de ces structures s’appuient sur un contexte sanitaire et économique difficile pour proposer un nouveau mode de vie prétendument détaché des difficultés du monde extérieur : une « utopie ».
La MIVILUDES observe également, au sein de ces structures, le développement d’une doctrine qualifiée d’« éco-spiritualité ».
De manière très schématique, selon la chercheuse Aurélie CHONÉ, « il y aurait une parenté entre écologie et spiritualité. Il y aurait ainsi du spirituel dans l’écologie et de l’écologie dans la spiritualité ». Depuis les années 1980, certaines mouvances font ainsi état d’une « Nature » élevée au rang de quasi-divinité, formant un tout harmonieux et dans lequel l’humanité ne formerait qu’une infime partie. Il s’agirait alors de lui reconnaitre une valeur intrinsèque et de la rendre sujet de droit. Ces théories mettent en avant des notions comme « Gaïa », « Terre Mère » ou « Terre Nourricière » et traduisent une spiritualisation de l’écologie. Elles pourraient être en lien, selon certains chercheurs, avec des formes de « néo- paganisme » dont l’une des caractéristiques serait le « panthéisme », à savoir l’idée d’une communion totale avec la nature. La Terre constituerait alors une entité spirituelle.
L’autarcie prônée par ces mouvements, mêlée à un mysticisme accessible uniquement à une élite, constituent des éléments favorisant un possible endoctrinement. La MIVILUDES demeure donc vigilante quant au développement de ces structures.
Page 88. Médecines douces.
Page 93. Le jeûne.
La MIVILUDES observe une diversification des pratiques et des offres de jeûne, une pratique consistant en une privation totale ou partielle de l’alimentation. Les groupes ou individus à l’origine de dérives sectaires sont nombreux à y recourir. Ils organisent des stages de jeûne particulièrement onéreux, généralement d’une semaine et se déroulant en milieu rural.
Les jeûnes à vocation thérapeutique sont d’abord conduits dans une recherche de bien- être. Ils prennent généralement place durant des séjours d’une semaine, en milieu rural autour de la pratique du jeûne et de la marche, associées à des prestations diverses, notamment du yoga , du shiatsu , de la kinésiologie , de la programmation neurolinguistique ( PNL ), de l’ hypnose , de la sophrologie , des élixirs floraux , du rebirth , du chamanisme , de la bio-respiration , du bio-magnétisme , etc. Les organisateurs font état de formation à la naturopathie .
Le respirianisme , promu en France par une Australienne surnommée Jasmuheen , de son véritable nom Ellen GREVE , repose ainsi sur la pratique du « jeûne total ». Ce type de jeûne constitue un « processus sacré » de 21 jours au-delà duquel il est envisageable de se nourrir uniquement d’air et de lumière.
Cette pratique serait responsable de 7 décès à l’étranger à ce jour. En France, l’activité de Jasmuheen et de ses affidés fait l’objet d’une surveillance étroite lorsque des colloques et stages sont programmés sur le territoire national.
En 2021, la Mission interministérielle a traité 54 saisines relatives à Thierry CASASNOVAS . La majorité des internautes qui se sont manifestés auprès de la Mission interministérielle l’ont fait en raison des propos qu’il a tenus, notamment dans ses vidéos portant sur la prise en charge des personnes atteintes de cancer ou bien encore atteintes de maladies chroniques (diabète, hypertension artérielle, etc.) et sur la politique vaccinale. Il incite les personnes à remettre en cause les pratiques thérapeutiques médicales, expliquant par exemple que la chimiothérapie est toxique et inefficace.
Thierry CASASNOVAS se présente comme un naturopathe, adepte du jeûne et du régime ali- mentaire cru. Il possède une chaîne YouTube rassemblant 558 000 abonnés et comptant plus de 80 millions de vues. À travers ses vidéos, il propose des « conseils génériques en alimentation, et plus largement en hygiène de vie, des- tinés aux personnes souhaitant adopter une approche plus naturelle ». Il est également présent sur Facebook et Instagram .
Page 100-101. Le développement personnel et coaching
Atteindre la « meilleure version de soi-même », exploiter son « plein potentiel », devenir son « propre leader », autant de promesses que vantent des entrepreneurs aux titres et diplômes variés, souvent sans reconnaissance d’un organisme officiel, et qui rencontrent un succès grandissant. Il ne s’agit plus de vénérer une divinité, un chaman ou un guérisseur, mais un idéal de soi. Cet idéal ne serait accessible qu’au travers de l’enseignement d’un « guide », détenteur d’une méthode miracle pour s’affranchir de ses défauts, de ses regrets, de ses contraintes, etc.
Selon Santé Publique France, 3 millions de Français souffrent actuellement de troubles psychiques sévères. La crise sanitaire a sensiblement impacté la santé mentale des individus, tant dans leur vie professionnelle que personnelle.
Les techniques de manipulation utilisées peuvent conduire les individus à dépenser leur épargne, leurs économies, à vendre leurs biens, à quitter le domicile familial, leur conjoint(e) en contre-partie de la promesse d’une vie de rêve. Le leit-motiv semble immuable et urgent : chacun a en lui/soi les ressources illimitées pour devenir un « être idéal ».
La phase de séduction s’accompagne d’une attention particulière portée par le meneur et les membres du groupe au nouveau participant. Bienveillance, écoute et empathie de façade lui sont offertes à un moment de doute et de questionnement existentiels.
• Deuxième phase : la déconstruction par un processus initiatique
• Un engagement exclusif
Le meneur se pose comme un modèle à suivre, une référence unique et exclusive car il aurait lui-même expérimenté diverses entraves à son développement. Il aurait surmonté les obstacles et il serait aujourd’hui habilité à montrer aux autres la voie. La condition essentielle à la réussite du processus est de suivre à la lettre ses consignes, principes et stages pour approfondir sa connaissance de soi.
Très souvent, il est fait un usage abondant d’une terminologie pseudo-scientifique avec l’usage de termes empruntés : à la médecine tels que « neurotransmetteur », « neuromusculaire », « symptômes », « connexions synaptiques », « cerveau »,
« neurones », « réencodage de l’ADN » (...) ;
à la psychologie tels que « neuro-émotionnel », « intelligence émotionnelle », « hypnose conversationnelle », (...) ;
à la spiritualité tels que « circulation d’énergies », « chakras », « mandala » ;
néologismes tels que « harmonisation bioénergétique », « reprogrammation du subconscient », « collapsus neuro-émotionnel », « communication quantique », etc.
Page 105.Vente multi-niveaux et cryptomonnaies, des formations en ligne très tendance à destination des jeunes hommes
Les systèmes de vente multi-niveaux (VMN) ne sont pas nouveaux. Ce qui change aujourd’hui, c’est la cible constituée de jeunes gens de 16 à 25 ans. Ils sont séduits par l’idée de devenir « trader » pour leur propre compte et de s’enrichir en toute autonomie, notamment par les crypto monnaies . Ces réseaux proposent des « formations en ligne » présentées comme « éducation financière ». Ils encouragent ces jeunes adultes à rompre avec leur cadre fami- lial et à quitter leurs études au profit d’une entreprise présentant un haut risque de perte financière. Ces systèmes de VMN utilisent les ressorts de la manipulation mentale et de l’addiction au jeu.
L’isolement social et le temps disponible ont incité les sociétés de vente multi-niveaux à être particulièrement présentes sur les réseaux sociaux pendant la crise sanitaire. Leur communication est extrêmement soignée avec une maîtrise du marketing digital.
Guidés dans leur navigation par des mots-clés liés à la performance, à la richesse et au bonheur, les internautes qui ont l’illusion d’être libres dans leurs choix de navigation ont été en réalité « ciblés » à leur insu.
Ces systèmes ciblent des publics différents : l’éducation financière et le trading pour les jeunes hommes, les compléments alimentaires pour les personnes souhaitant perdre du poids ou les sportifs, les produits de beauté pour les femmes, etc.
Cependant, dans certains systèmes de vente multi-niveaux, la vente de produits ou prestations n’est qu’un prétexte pour déguiser un système pyramidal . L’essentiel des revenus des membres, leur permettant de vivre convenablement, ne provient pas tant de la vente de produits ou de prestations en ligne mais plutôt du développement de leur réseau. Leur source principale de collecte d’argent semble ainsi se faire par le biais de la récolte des droit d’entrée, des abonnements mensuels etc.
Page 107. « Domination By Love » (DBL)
Jean-Marie CORDA se présente sur les réseaux sociaux sous plusieurs identités : vidéaste, acteur pornographique, coach sexuel et artiste de rue. Aujourd’hui, il critique le système occidental : selon lui, la France va « brûler » et il faut quitter ce pays avant qu’il ne devienne « Franquistan », c’est-à-dire un pays sous la coupe des talibans. En réponse, Jean-Marie CORDA prône un mode de vie nomade capitaliste dans des paradis fiscaux. Il fait l’apologie du proxénétisme et de la prostitution. Pour diffuser ses thèses, il poste des vidéos sur YouTube de quelques minutes pour attirer les internautes et les développe ensuite sur d’autres serveurs pour éviter « la censure de YouTube ».
Les jeunes recrues sont invitées à rejoindre sa communauté sur les réseaux sociaux en vue d’une expatriation vers les pays de l’Est – en particulier vers la Russie, la Biélorussie, l’Estonie, l’Ukraine ou bien encore la Bulgarie – avec à la clé la promesse de devenir riche et d’être réellement libre.
Il recruterait principalement sur le site jeuxvideo.com , média de référence des joueurs en ligne. Ce site s’adresse officiellement aux 18-25 ans mais attire également un public à la fois plus jeune et plus âgé. Il embrigaderait aussi par le biais de conférences sur YouTube articulées autour des thèmes de l’argent, de la puissance financière, du sexe, de la compétence et du savoir ( skills ), de la manipulation et l’influence, de la force physique (combat, musculature), de la force émotionnelle (contrôler ses émotions) et de l’identité.
Jean-Marie CORDA a conçu un programme de développement personnel nommé « Domination By Love » (DBL) dans lequel il enseigne aux internautes des techniques de manipulation en vue d’une réussite sociale. DBL est en réalité pensé comme une communauté dont le but est d’être « à son service car il est le gourou » et d’inciter les gens à s’expatrier (« le but, c’est l’expatriation »).
Il développe également une activité de vente multi-niveaux. Etc...
Page 108. Tisseuses de rêves.
En 2021, la MIVILUDES a traité 11 signalements relatifs aux « tisseuses de rêve », « mandalas de femmes », « cercle d’abondance », ou bien encore « alquimia », « telar » pour les réseaux espagnols et « dreamweaver » pour les réseaux anglo-saxons. Même si les mandalas de femmes sont les plus fréquents, il existe également des groupes mixtes comme le « mandala de la magie de l’amour ». Ces réseaux peuvent opérer de l’étranger.
Ils renvoient à un système pyramidal c’est- à-dire une technique de vente fondée sur le recrutement de vendeurs dont la rémunération est liée aux commandes réalisées par les nouveaux vendeurs.
Afin de séduire un public, majoritairement de femmes, en quête de spiritualité et de bien-être, les échanges au sein du groupe sont présentés comme des « expériences magiques et merveilleuses » au travers d’activités de méditation, de yoga et de discussions sur les énergies. Le but annoncé est d’être « connectée à son cœur », « d’être moins seule car reliée aux autres », « de brûler ses peurs pour s’empuissancer ».
Page 118. Le féminin sacré : une appropriation du féminisme par les dérives sectaires
La MIVILUDES observe que la théorie du féminin sacré est en pleine expansion et trouve un véritable succès sous couvert de l’émancipation des femmes, alors même que l’objectif premier semble être purement financier. Il est alors apparu essentiel pour la Mission interministérielle d’évoquer le sujet afin de sensibiliser le plus grand nombre aux potentiels dangers de cette doctrine.
Le féminin sacré est présenté comme un travail « de reconnexion du corps et de l’esprit ». Il est souvent « enseigné » lors de stages à destination des femmes durant lesquels une grande place est accordée au rituel et à l’ésotérisme. Par exemple, les femmes sont incitées « à faire appel au karma et autre énergie quantique ». Des figures mystiques sont également utilisées comme celle de la sorcière, notamment au travers du mouvement WICCA.
Page 120. Masculinisme, virilisme et anti-féminisme : un endoctrinement violent et sexiste
Les thématiques associées au masculinisme, au virilisme ou à l’anti-féminisme relèvent a priori davantage d’un radicalisme idéologique, voire politique, que de thématiques d’ordre sectaire. Toutefois, l’attention de la MIVILUDES a été attirée sur certains groupes et individus suscep- tibles, par leurs discours et méthodes, d’induire un lourd endoctrinement.
Le « masculinisme » désigne dans la sphère francophone un « mouvement social ultra-conser- vateur qui prétend que les hommes souffrent d’une crise identitaire parce que les femmes en général, et les féministes en particulier, dominent la société et ses institutions ».
Les masculinistes considèrent que les femmes seraient désormais dominantes et favorisées. Les adeptes de ces théories militeraient ainsi activement pour la défense des hommes dont les droits seraient bafoués de toutes parts. Ils pointent du doigt ce qu’ils considèrent comme des inégalités systémiques subies par les hommes, étouffées selon eux par la « sur-attention » accordée aux inégalités subies par les femmes.
Le Mankind Project (ou MKP ) est un groupe réalisant chaque mois des « stages d’initiation à la masculinité ». La MIVILUDES a déjà été saisie 3 fois en 2020 et 10 fois en 2021. Le MKP organise notamment des week-end en forêt devant permettre « de changer le monde, un homme à la fois » comme l’indique leur slogan. Il a été fait mention à 5 reprises de changements de comportement radicaux et de violences commises par un mari, un conjoint ou un beau-fils suite à leur participation à ces stages.
Témoignage (extraits) :
Cette déstabilisation s’opère en plusieurs étapes. Tout d’abord, les participants au nombre d’une cinquantaine, réunis dans un lieu identifié, sont coupés du monde du vendredi au dimanche soir, sans pouvoir appeler leurs proches ni interrompre le séjour, leurs papiers, argent et clés de voiture leur ayant été d’emblée confisqués. Leur nom leur est également retiré et remplacé par un numéro. Les plages accordées au sommeil sont très largement insuffisantes (environ quatre à cinq heures par nuit même si difficile à évaluer car montres et portables retirés). Pour ma part, je n’ai pas réussi à dormir, vu l’état de tension dans lequel j’étais plongé. Quant à la nourriture, elle se réduit à quelques bols de raisins secs et d’amandes pendant plus de 40 heures. Enfin, il est fréquemment demandé aux participants d’évoluer nu durant plusieurs heures, y compris dehors, par des températures proches de 5°C. ‘L’initié’ se trouve donc plongé dans une sorte d’état second qui le rend ainsi perméable à toutes les demandes et suggestions. Un des points d’orgue de ces week-ends est l’évènement qui a lieu le samedi après-midi, étape que je qualifierais de confessions publiques forcées devant tout le monde.
L’objectif affiché par l’équipe du MKP est de ‘réactiver les anciennes blessures’ de ‘l’initié’ pour l’aider à les dépasser et, ainsi, devenir un ‘homme nouveau’. A cette fin, l’équipe encadrante a étudié des question- naires de personnalité distribués aux participants quelques semaines en amont du week-end et interroge sans ménagement les participants sur leur enfance, leurs relations avec leurs parents, les femmes etc. en ayant parfois recours à la culpabilisation et l’intimidation. Or, ces séances, d’une vingtaine de minutes par participant, sont particulièrement éprouvantes sur le plan émotionnel, y compris pour les témoins, puisque certaines blessures psychiques sont brutalement réactivées, sans égard pour l’éventuelle fragilité des participants. La plupart se sont retrouvés en pleurs en quelques minutes. Je n’ai pas été surpris d’apprendre que des cas de décompensation psychotiques vous avaient été signalés.
Page 123. Le néo-chamanisme : l’altération de la conscience et ses dangers
Emprunté aux Tongouses de Sibérie , le mot chamanisme s’est répandu en Occident au XVIIe siècle pour désigner diverses sociétés religieuses traditionnelles qui s’inscrivent dans une conception holistique et animiste du monde. Pour le chamanisme, l’être humain fait partie intégrante de la nature et du cosmos et il n’existe pas de frontière étanche entre le monde visible et le monde invisible peuplé de dieux et d’esprits.
Si ce courant a été un temps affaibli par l’expansion des grandes religions monothéistes, le « néo-chamanisme » traduit, quant à lui, un regain d’intérêt pour ces pratiques généré par le développement du New Age dans les années 1960. Un nombre important des saisines reçues par la MIVILUDES fait état d’inquiétude pour des proches suivant rigoureusement les pratiques de « maîtres et guides chamans ».
Ces témoignages abordent une difficulté commune : une impossibilité à échanger avec celui ou celle qui a adhéré à cette mouvance en raison d’une « adhésion inconditionnelle » aux propos du chaman et ainsi d’une réduction, voire d’une perte de l’esprit critique. Progressivement, ces personnes rompent avec leur environnement familial, amical ou professionnel et changent radicalement leur comportement.
La technique des faux souvenirs induits consiste à créer de faux souvenirs traumatiques, notamment d’agressions sexuelles, mettant en cause des proches et ce afin d’isoler la personne de son entourage susceptible de pouvoir la sortir de ce piège.
S’agissant de l’utilisation de produits classés stupéfiants – tels que l’ ayahuasca ou l’ iboga , voire même de produits vénéneux toxiques comme le venin de crapaud appelé kambo ou bufotérine – ils ont pour point commun d’être des substances hallucinogènes très puissantes qui peuvent être combinées avec du tabac ou du cannabis pour en augmenter les effets.
L’individu, sous l’emprise de ces produits, n’aura alors plus pleinement conscience de ce qui l’en- toure et pourra avoir des visions particulièrement violentes, voire traumatisantes
Il est à noter que l’utilisation de ces substances lors de rituels chamaniques a pu entraîner des lésions neurologiques et psychiques voire provoquer la mort par overdose ou par arrêt cardiaque. Par ailleurs, la consommation de certains de ces produits peut conduire à développer une dépendance physique et psychologique qui augmentera la vulnérabilité des adeptes.
Quant à la pratique des « huttes de sudation » , il est à préciser qu’elle plonge également l’individu dans un état second et peut même causer sa mort.
Pages 184 à 189 Contribution de Michel WIEVIORKA sur les sectes, les dérives sectaires
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