• Bernard Friot ou la stratégie de l’incantation Par Michel Husson

    À propos de : Vaincre Macron de Bernard Friot, Paris, La Dispute, 2017.
    https://alencontre.org/societe/debat-bernard-friot-ou-la-strategie-de-lincantation.html

    Le projet de « salaire à vie » de Bernard Friot peut aujourd’hui apparaître à certains comme le nec plus ultra du radicalisme. En réalité, il ne saurait dépasser le stade de l’incantation, non seulement parce que ce projet est incomplet, mais surtout parce qu’il est intrinsèquement dépourvu de toute stratégie de transformation sociale.

    Une histoire de déjà-là
    Près de la moitié du dernier livre de Bernard Friot, Vaincre Macron[1] , est consacrée à un récit qui lui permet d’inscrire son projet dans la continuité de la « révolution communiste du travail » opérée par les fondateurs de la Sécurité sociale[2]. Il faut s’appuyer sur cet existant, ce « déjà-là » anticapitaliste, qui a été en partie vidé de son contenu par les contre-réformes successives. Le salaire à vie existerait déjà pour les fonctionnaires, pour les retraités et même pour un certain nombre de salariés qualifiés de l’industrie. Il suffirait d’étendre cette logique et de renouer ainsi avec la dynamique initiale.

    Mais cette lecture, où l’œuvre des ministres communistes est longuement soulignée, est difficilement généralisable à d’autres pays voisins qui disposent eux aussi d’un État social, par ailleurs grignoté par les « réformes » comme en France. C’est souvent à l’initiative des sociaux-démocrates que les systèmes de protection sociale ont été mis en place et, horreur, certains sont financés par l’impôt plutôt que par la cotisation vertueuse. Il est difficile d’en faire des implants anti-capitalistes plutôt que les produits d’un compromis entre capital et travail, sous la pression des luttes sociales, dans une conjoncture historique sans doute révolue. Mais cette lecture a une fonction : elle sert à fonder l’idée que le passage au modèle de société que promeut Friot pourrait se faire par simple extension du « déjà là », moyennant une prise de conscience des travailleurs. La mise en avant des spécificités de l’histoire sociale de la France conduit à une absence de toute réflexion sur la situation dans les autres pays européens : le projet de Friot reste contenu dans les frontières nationales.

    La fable des retraités créateurs de richesse
    Dans son livre L’enjeu des retraites, publié en 2010, Friot explique que le doublement du PIB d’ici à 2040 permettra de financer facilement les pensions, malgré l’augmentation prévisible du nombre de retraités. Il reprend le même argumentaire trois ans plus tard :

    « On oublie toujours, quand on raisonne sur l’avenir des retraites, que le PIB progresse d’environ 1,6 % par an en volume, et donc qu’il double, à monnaie constante, en 40 ans. C’est pourquoi nous avons pu multiplier par 4,5 les dépenses de pensions depuis 1960 tout en doublant presque le revenu disponible pour les actifs ou l’investissement. Nous pourrons évidemment plus que tripler les dépenses de pensions d’ici 2040 sans que cela empêche le reste du PIB d’être multiplié par 1,8[3] ».

    Quelques années plus tard, dans sa réponse à une chronique où Jean Gadrey lui reprochait de tout attendre de la croissance[4], Friot proteste en affirmant que cette critique repose sur une « totale méprise ». Il se serait borné à prendre au mot les projections du COR (Conseil d’orientation des retraites)
    « pour dire qu’il sera plus facile de consacrer aux retraites 18 % d’un PIB de 4000 milliards d’euros qu’il ne l’est aujourd’hui d’y consacrer 13 % d’un PIB de 2000 ».

    La réalité est que Friot est passé d’une position à une autre. La première consistait à rappeler une évidence :
    « Nous finançons les pensions par un partage immédiat de la valeur ajoutée (une fraction de celle-ci, à hauteur de 25% du salaire brut, va à une cotisation sociale immédiatement transformée en pensions) ».

    La seconde constitue la découverte théorique de Friot :

    « Ce sont les retraités qui produisent les biens et services correspondant à la valeur attribuée à leur travail à travers leur salaire continué : leur pension n’est pas prise sur la valeur attribuée au travail des actifs ».

    Il devrait être clair que ces deux assertions sont contradictoires : la première dit que les pensions sont une fraction du PIB qui est immédiatement transmise aux retraités ; la seconde affirme que les pensions ne sont pas « prises » sur la valeur créée par les actifs. Et pourtant ces deux propositions figurent dans un même entretien[5] où Friot exposait les principales thèses de son livre.

    Friot a ainsi poussé jusqu’à l’absurde[6] son programme de recherche sur la cotisation parce qu’il en avait besoin pour construire son concept de salaire à vie. Cette dérive « théoriciste » le conduit finalement à abjurer son analyse initiale pour se rabattre sur la théorie de la pension comme rémunération de l’activité du retraité :

    « la monnaie distribuée aux retraités correspond non pas à une part de la richesse créée par les actifs, mais à la richesse créée par les retraités eux-mêmes[7] ».

    Même Jean-Marie Harribey qui insiste par ailleurs sur la création de valeur par les fonctionnaires ne peut suivre Friot sur ce terrain[8].

    Un modèle de socialisme inachevé
    Bernard Friot renoue avec le débat sur les « modèles de socialisme » dont il faut bien reconnaître qu’il a perdu de son actualité et qu’il est au point mort depuis au moins deux décennies. C’est assurément à mettre à son crédit mais Friot ne fait aucune référence aux débats passés sur ce sujet[9] et présente un projet incomplet, voire incohérent.

    Friot se borne souvent à construire un lexique spécifique pour désigner des notions déjà largement travaillées. Il parle par exemple de propriété « lucrative » au lieu de propriété privée des moyens de production. De telles élégances de langage ne changent rien au concept mais permettent de poser Friot en innovateur théorique. Friot utilise une notion de « valeur économique » censée prolonger l’appareil théorique marxiste sans rien lui apporter sinon un certain obscurcissement[10]. Il parle de « convention capitaliste du travail » plutôt que de rapports capitalistes de production. La « cotisation investissement » ne fait que recycler la vieille idée de « fonds d’accumulation » qui est un enjeu important des débats ignorés par Friot.

    Cette dernière remarque conduit à une deuxième critique qui va plus au fond : le modèle de Friot ne dit rien de l’articulation entre plan et marché ou plutôt entre la socialisation de l’investissement et les décisions individuelles des entreprises. Friot se borne à couper la poire en deux :

    « on peut envisager que les entreprises conservent 15 % de leur valeur ajoutée pour de l’autofinancement et qu’une cotisation progressivement portée à 15 % aille à des caisses d’investissement[11] ».

    Friot pense-t-il réellement que cette règle – qui évoque irrésistiblement Saint-Martin coupant son manteau en deux pour le partager – répond à la question-clé de la socialisation de l’investissement ? Quel est le moyen de rendre compatible les choix de la société avec la moitié du profit qui reste à la disposition des entreprises ? Comment éviter l’« égoïsme d’entreprise ? Et quid de l’autogestion ?

    Dans les débats sur les modèles de socialisme, une autre question-clé porte sur le calcul économique et en particulier sur la formation des prix. Dans une économie planifiée, il peut s’agir de « quasi-prix », de « pseudo-prix », de « prix administrés », ou encore d’« évaluations objectivement déterminées », pour reprendre le terme de Kantorovitch. Quel que soit le nom qu’on leur donne, leur fonction est de permettre un calcul économique qui prenne en compte les priorités de la société qui sont déterminées autrement que selon des mécanismes de marché. Du coup la distorsion par rapport aux prix de marché est l’instrument
    des choix politiques.
    Sur ce point, la proposition de Friot est pour le moins déroutante :

    « on pourrait décider que tout prix soit la multiplication par 1,25 du prix des consommations intermédiaires[12] ».

    Ce « on pourrait décider » souligne les imprécisions du modèle. Pourquoi 25 % ? Mais surtout comment sont fixés les prix des consommations intermédiaires, autrement dit le prix des marchandises achetées par une entreprise à d’autres ? Cette bourde montre que Friot n’a pas travaillé des questions qui ont pourtant occupé les théoriciens du socialisme depuis Marx et Engels. Plus grave, peut-être, elle révèle en creux l’absolue indifférence de Friot à la question écologique.

    Beaucoup d’autres questions restent sans réponse dans la construction de Friot, et notamment l’insertion dans l’économie mondiale. Sur ce point pourtant crucial et actuel pour tout projet de transformation sociale, Friot botte en touche :

    « Bien des questions demeurent, dont celle de l’exportation d’une telle organisation économique dans d’autres pays, ainsi que de sa compatibilité avec le libre-échange et les contraintes européennes[13] ».

    Le document du réseau salariat est encore plus évasif :

    « Concernant les échanges purement marchands, ils continueraient à se faire comme aujourd’hui au « prix du marché », avec les mêmes conséquences ou risques en termes de balance commerciale[14] ».

    Enfin le droit à l’emploi n’est pas affirmé, et Friot, même s’il récuse un tel rapprochement, se heurte aux mêmes objections que les projets de revenu universel : et si un grand nombre de personnes décide de ne rien faire du tout ? A cette question qui lui est posée dans un entretien excellemment mené[15], Friot répond :

    « les personnes qui décident de ne rien faire, moi je n’y crois pas. Parce que notre humanisation dépend de notre contribution à la production de valeur économique ».

    Mais c’est vrai aussi dans la société d’aujourd’hui, avec ses 10% de chômeurs, et cette réponse est contradictoire avec l’idée que le salaire à vie rémunère une activité autovalidée (comme celle des retraités).

    L’interrogation doit donc aller plus loin : y aura-t-il des emplois pour tout le monde et comment se réalisera la correspondance entre postes de travail et candidats à l’emploi ? Il y a là un des éléments les plus problématiques de tous les projets de société post-capitaliste. Friot répond ainsi :

    « Soit vous voulez monter une boîte et on vous dit « eh bien écoutez non, cela existe déjà, on ne subventionne pas », soit vous entrez dans une entreprise et là ça n’est pas vous qui allez décider tout seul de ce que vous allez faire, vous entrez dans un collectif qui va partager les tâches avec vous. Donc vous allez toujours vous inscrire dans des besoins exprimés par la société. Et s’il y avait pénurie sur des tâches de nuit par exemple, qui seraient indispensables dans des industries de process ou dans les hôpitaux, on pourvoirait ces postes en assurant une promotion plus rapide de ceux qui les accepteraient pour un temps limité ».

    Cette réponse est insatisfaisante parce qu’on ne sait pas qui décide aux différentes étapes décrites par Friot. Qui par exemple jouerait le rôle d’une sorte de « marché du travail » permettant d’attirer des salariés par la perspective d’une promotion plus rapide, par ailleurs contradictoire avec le principe d’un salaire uniquement lié à la qualification ?

    L’incantation comme stratégie
    Comment articuler les luttes sociales actuelles avec le projet fondé sur le « salaire à vie » ? C’est là que Friot dérape en raison de ce que l’on pourrait appeler la compacité de son projet qui le conduit à des formules provocatrices comme celle-ci :

    « Se battre pour l’emploi, c’est se tirer une balle dans le pied[16] ».

    La lutte pour un meilleur partage de la valeur équivaut pour lui à « éviter la lutte de classes » alors qu’il faudrait « changer la valeur ». Bref, Friot dénonce tous les axes actuels de mobilisation sociale comme autant de « conduites d’évitement » parce qu’ils ont le tort de ne pas reprendre son projet. C’est ce que montre ce passage assez hallucinant qui mérite d’être cité in extenso :

    « Parmi les conduites d’évitement, je viens d’évoquer la revendication d’un meilleur partage de la valeur, mais il y en a bien d’autres qui vont faire l’objet de cet entretien. Si on n’assume pas le conflit sur la valeur, on se bat non pas pour la suppression du marché du travail, mais pour le plein-emploi. Non pas pour la fonction publique, mais pour le service public. Non pas pour le salaire à vie et la copropriété d’usage des entreprises, mais pour le revenu de base, la sécurité emploi-formation ou l’allocation d’autonomie pour la jeunesse. Non pas pour une autre mesure de la valeur que le temps de travail et le refus de la productivité capitaliste, mais pour la réduction du temps de travail. Non pas pour la suppression du crédit par cotisation économique subventionnant l’investissement, mais pour un pôle public bancaire, pour un financement des emprunts publics par la Banque centrale. Non pas pour une généralisation de la cotisation à tout le PIB, mais pour une révolution fiscale. Non pas pour une pratique salariale de la valeur, mais pour la suppression du travail et de la monnaie dans une illusoire société de l’activité vouée à la seule valeur d’usage. Non pas pour la révolution tout court, mais pour la révolution informationnelle. Non pas pour l’émancipation du travail de la folie capitaliste, mais pour un développement durable. Face à la détermination offensive de la classe dirigeante depuis quarante ans, toutes ces conduites d’évitement sont autant d’erreurs stratégiques qui mènent le mouvement populaire à la défaite[17] ».

    Dans Vaincre Macron, Friot enfonce le clou en décrétant que

    « travailler moins pour travailler tous est un mot d’ordre réactionnaire qui naturalise la pratique capitaliste du travail et sa réduction aux seules activités valorisant le capital ».

    Et il va encore plus loin quand il écrit que ce serait

    « admettre que le travail est par nature en quantité limitée, et qu’il ne faut pas trop d’étrangers pour le partager ».

    Il reprend ainsi à son compte l’amalgame (injurieux et ignorant) du prix « Nobel » Jean Tirole :

    « paradoxalement, l’hypothèse sous-jacente à la fixité de l’emploi et donc à la politique de réduction du temps de travail afin de permettre un partage de l’emploi est la même que celle qui sous-tend le discours des partis d’extrême droite quand ils soutiennent que les immigrants « prendraient » le travail des résidents nationaux au motif que cet emploi serait en quantité fixe[18] ».

    Bref, militer pour la réduction du temps de travail, défendre les services publics, etc. sont autant d’« erreurs stratégiques ». Au-delà des règlements de compte avec les économistes du PCF (sécurité emploi formation, révolution informationnelle) ces insultes adressées aux revendications et aux luttes réellement existantes fonctionnent comme une injonction : soit vous basculez intégralement et immédiatement dans mon système, soit vous êtes condamnés à la défaite.

    Plus récemment, Friot s’est prêté pour l’Humanité à un exercice programmatique a priori plus immédiat. Voilà ce qu’il propose et qui mérite aussi d’être cité longuement :

    « J’évoque à la suite de la CGT le maintien du salaire entre deux emplois jusqu’à ce qu’on retrouve un emploi à salaire au moins égal ou la titularisation de tous les agents contractuels des services publics. J’évoque aussi l’abaissement de l’âge de la retraite à 50 ans à 100 % du salaire net des six meilleurs mois, et cela indépendamment de la durée de cotisation (ces travailleurs ainsi payés par la caisse de retraite pouvant mettre leur savoir-faire au service d’entreprises marchandes, propriété de leurs salariés), le paiement par l’Unedic pendant trois ans des salaires des salariés reprenant leur entreprise en Scop, l’attribution aux 10 cohortes suivant la majorité (les 18-27 ans) du premier niveau de qualification et donc de salaire à vie (par exemple, 1500 euros par mois). Amorcer ainsi la pompe de la généralisation du salaire suppose que les entreprises versent à la caisse des salaires (l’Unedic, transformée et gérée par les seuls travailleurs) une cotisation nouvelle de l’ordre de 15 % de leur valeur ajoutée, étant entendu qu’elles n’auraient plus à payer, elles, les travailleurs payés par la caisse. Cette cotisation nouvelle serait compensée en totalité par le non-versement de dividendes et le non-remboursement de dettes contractées pour investir dans l’outil de travail : les dettes privées pour financer l’investissement sont aussi illégitimes que la dette publique, et les dividendes doivent disparaître[19] ». _

    Évidemment, ça décoiffe ! Friot pense pourtant qu’il ne fait que prolonger les implications du « déjà-là » hérité de l’action des ministres communistes dans l’immédiat après-guerre. Mais un tel programme équivaut à socialiser une grande partie de l’économie : le système financier d’abord puisqu’on annule toutes les actions (plus de dividendes) et une bonne partie de l’actif des banques (plus de dettes), les entreprises ensuite, avec 15 % de leur valeur ajoutée qui passent à l’Unedic, sans parler de l’augmentation de cotisation pour financer la retraite à 50 ans à 100 % du salaire net. Cette surenchère ne peut convaincre qu’une frange de disciples et elle ne dessine pas une trajectoire crédible de transformation sociale.

    La démarche de Friot est en réalité un obstacle à l’élaboration d’un projet alternatif doté d’une logique de transition ou de bifurcation vers un autre modèle. Une bonne partie de son activité (ainsi que celle de ses disciples du Réseau salariat) consiste d’ailleurs à déconsidérer – voire insulter comme on l’a vu – tout projet qui n’a pas le salaire à vie comme objectif.

    En appelant à se projeter dans un futur indistinct, Friot ignore toute mesure d’urgence comme l’augmentation du salaire minimum et des minima sociaux. Il s’oppose violemment à la réduction de la durée de travail comme instrument de lutte contre le chômage au profit d’une « autre mesure de la valeur que le temps de travail et le refus de la productivité capitaliste » ce qui n’a rien à voir, à moins d’assimiler de manière malhonnête le projet de travailler tou(te)s pour travailler moins avec l’intensification capitaliste du travail.

    En faisant miroiter un salaire à vie le projet de Friot contourne toute élaboration d’une version radicale de la sécurité sociale professionnelle[20]. La renonciation ou en tout cas l’absence de priorité accordée au plein-emploi empêche d’envisager une logique d’Etat « employeur en dernier ressort ». Quant à la nécessité de faire face au défi climatique, elle est totalement absente du modèle.

    L’unique chemin
    Dans le dernier chapitre de Vaincre Macron, Bernard Friot propose de « poursuivre le geste de création du régime général en 1946 » et rappelle sans rien y ajouter les grandes lignes de son programme. Le livre se termine par cette interrogation légitime : « Que répondre au lecteur qui trouve le projet enthousiasmant et le chemin impossible ? ». La réponse de Friot est que « le projet est le chemin » et que c’est le seul :
    « l’alternative communiste ne viendra que par l’alternative communiste, et l’affermissement des prémices de cette alternative est l’unique chemin ».

    Cette idée d’un chemin unique en dit long sur la fermeture du système-Friot. Le salariat est confronté à un choix binaire : soit se rallier à son programme, par exemple en refusant « le remboursement des dettes d’investissement et le versement des dividendes », en organisant « la hausse des cotisations et [la création] des caisses d’investissement », soit, encore une fois, se condamner à de nouvelles défaites. Bref, c’est tout ou rien :

    « tout atermoiement dans la poursuite du déjà-là laisse du champ à la bourgeoisie et désarme le salariat ».

    Cette stupéfiante prétention à tracer « l’unique chemin » dans un vide stratégique abyssal conduit à reprendre en conclusion ce commentaire sévère de Mateo Alaluf :

     « En ce qui concerne l’engagement politique, un tel système théorique désincarné se traduit par des pratiques sectaires. Le droit politique au salaire, revendiqué par ses disciples, ne revêt en conséquence qu’une portée incantatoire[21] ». (17 janvier 2018)

    Notes
    [1] Bernard Friot, Vaincre Macron, La Dispute, 2017.
    [2] Pour une critique de ce récit, voir Jean-Claude Mamet, « Autour du dernier livre de Bernard Friot : Vaincre Macron », Entre les lignes entre les mots, 24 décembre 2017,
    [3] Bernard Friot, « Financement des retraites : l’enjeu des cotisations patronales », Autisme-economie.org, 16 mai 2003.
    [4] Jean Gadrey, « Retraites : les curieuses thèses de Bernard Friot » (1), 28 août 2013 ; Bernard Friot, « Premier commentaire », 30 août 2013.
    [5] Bernard Friot, « La retraite ? un salaire continué », Alternative libertaire, mai 2010.
    [6] L’auteur de ces lignes (un retraité) crée assurément une richesse considérable en écrivant cet article, mais en serait-il de même s’il se consacrait à l’audition de l’intégrale des Chaussettes noires ?
    [7] Bernard Friot, L’enjeu des retraites, La Dispute, 2010.
    [8] Jean-Marie Harribey, « Les retraités créent-ils la valeur monétaire qu’ils perçoivent ? », Revue française de socio-économie, n° 6, 2010. Voir aussi Henri Sterdyniak, « A propos de Bernard Friot, quelques remarques », blog Mediapart, 3 juin 2016 ; Pierre Khalfa, « Des théorisations fragiles aux implications politiques hasardeuses », Les Possibles n° 11, automne 2016.
    [9] Voir par exemple : Thomas Coutrot, « Socialisme, marchés, autogestion : un état du débat », séminaire Matisse « Hétérodoxies », 18 octobre 2002, et les textes réunis sur le site du défunt « Groupe d’études un socialisme pour demain ».
    [10] Alain Bihr, « Universaliser le salaire ou supprimer le salariat ? », A l’encontre, 13 juin 2013.
    [11] Bernard Friot, « La cotisation, levier d’émancipation », Monde diplomatique, février 2012.
    [12] Bernard Friot, Emanciper le travail, La dispute, 2014.
    [13] Bernard Friot, « En finir avec les luttes défensives », Le Monde diplomatique, novembre 2017.
    [14] Réseau salariat, Caisses d’investissement et monnaie, août 2016.
    [15] Bernard Friot, « Nous pouvons organiser nous-mêmes le travail, sans employeurs, ni prêteurs », Le Comptoir, 6 octobre 2017. Propos recueillis par Luc Toupense.
    [16] Bernard Friot, Emanciper le travail, La dispute, 2014, pp.105-106.
    [17] Bernard Friot, idem, pp.100-101.
    [18] Jean Tirole, Economie du bien commun, 2016. Pour une critique, voir Michel Husson, « Les anti-RTT : arrogance et gros sabots », Alternatives économiques, 25 mai 2016.
    [19] Bernard Friot, « Le salaire universel, droit politique », L’Humanité, 20 Juin 2016.
    [20] Laurent Garrouste, Michel Husson, Claude Jacquin, Henri Wilno, Supprimer les licenciements, Syllepse, 2006.
    [21] Mateo Alaluf, « La solidarité est-elle contre révolutionnaire ? », Ensemble ! n° 88, septembre 2015.

    #Bernard_Friot #incantations #retraite #travail #social #salaire #Sécurité_sociale #capitalisme #économie #Socialisme #incantations #salaire_à_vie #Jean_Tirole 
     #revenu_universel #salaire_à_vie #revenu_de_base #revenu_garanti #emmanuel_macron #croyance #religion

  • RTBF Test PCR gratuit côté Français : beaucoup de Belges passent la frontière pour le réaliser

    Si vous partez à l’étranger cet été, vous n’y couperez pas, vous devrez passer par la case « Test PCR » . En Belgique, ce test s’élève à presque 50 euros. Un chiffre à multiplier par le nombre de membres de la famille. De quoi faire réfléchir nombre de nos compatriotes qui n’hésitent pas à faire quelques kilomètres pour se faire tester en France où c’est entièrement gratuit.

    Dans ce centre de testing, situé à Leers au cœur du centre commercial, on teste sept jours sur sept sans rendez-vous. Un argument déterminant est affiché en sept grandes lettres pour inciter le patient à franchir la porte « GRATUIT ».


    Le bouche-à-oreille efficace
    Isabelle est Française, même si elle habite en Belgique. Elle n’a pas hésité bien longtemps avant de choisir de quel côté de la frontière elle allait se faire tester. Les Belges sont de plus en plus nombreux à faire comme elle. À la grande surprise de Delphine Laloux, l’infirmière responsable de centre de testing  : « Le bouche-à-oreille fonctionne dans des proportions étonnantes, puisqu’on a déjà reçu des personnes de Bruxelles ! ».

    Il faut dire que le déplacement vaut la peine étant donné qu’ici tous les tests sont entièrement pris en charge par la sécurité sociale française… même pour les étrangers qui partent en voyages.  "Ils (les Belges ndlr) doivent simplement remplir les papiers comme tous les Français" , précise Delphine.

    « Nous prenons les gens avec ou sans rendez-vous et avec ou sans ordonnance. Les Belges qui viennent ici c’est souvent dans la perspective de voyages mais également pour les cas contacts, surtout pour les enfants. Les règles belges sont très strictes. Pour les Belges concernés, quand il faut un test, venir ici en France leur facilite la tâche vu la proximité. Et ceux qui viennent nous confient que c’est rare de trouver des pays où le test est gratuit », poursuit Delphine qui précise que cette gratuité « a des répercussions sur la sécurité sociale française ».

    En Belgique, c’est presque 50 euros 
    La France fera peut-être de cette gratuité un argument touristique pour l’été. Car si, nous l’avons dit, le test PCR pour les voyageurs s’élève à environ 50 euros en Belgique, il n’en est pas de même dans d’autres pays européens où la facture peut monter jusqu’à 300 euros.

    Et en Belgique, le magazine de défense des consommateurs Test-Achats réclame aussi la gratuité des tests pour les voyageurs.

    #sécurité_sociale #tourisme #pcr #frontière #test #cadeaux #covid-19 #sante #coronavirus #santé #france #belgique #confinement #frontiere #pandémie

  • La crise sanitaire n’a pas eu lieu 2/2
    https://www.pardem.org/la-crise-sanitaire-na-pas-eu-lieu-22

    https://www.youtube.com/watch?v=KNV19wz3GXg

    Tout est sujet à caution dans le récit officiel et médiatique de la crise « sanitaire ». Les choix du gouvernement d’interdire aux médecins de ville de prescrire et donc de traiter les malades, de tout miser sur de nouvelles molécules plutôt que de chercher un remède parmi les molécules connues, de confiner pour ne pas « saturer » les hôpitaux publics dont les gouvernements successifs ont réduit les capacités d’accueil et de soin depuis des décennies, de favoriser et de pré-acheter des vaccins vis-à-vis desquels la communauté scientifique est très divisée mais qui rapportent gros aux grands groupes pharmaceutiques démontrent le mépris du pouvoir envers le service public et la santé publique.
    Les interdits imposés (confinement, couvre-feu, fermetures administratives, attestations de déplacement, application de traçage « TousAntiCovid ») montrent que le souci du gouvernement Macron et de l’Union européenne n’est pas la santé publique mais bien de museler la population, favoriser l’accroissement des profits des multinationales, la paupérisation des services publics pour mieux les décrédibiliser et les privatiser.

    #covid-19 #coronavirus #santé #santé_publique #france #confinement #bigdata #sante abandon de #soins #hôpital #demondialisation #Sécurité_Sociale #destruction #protection #Démocratie

    • Les différents facteurs démographiques pesant sur la « surmortalité » imputée à la Covid.

      Alors évidemment c’est complexe et nécessite de l’attention mais c’est cependant éclairant. Car ne l’oublions pas le gouvernement fait dire aux chiffres ce qui l’arrange tandis que les éléments de l’Insee et ceux d’autres pays de l’Union européenne ne mettent pas en avant les mêmes causes. Cette vidéo ne conteste pas la réalité du virus mais le discours pseudo scientifique délivré pour conforter les décisions politiques de Macron et les conséquences qu’elles engendrent pour chacun, pour la nation et pour les libertés publiques.

      https://www.youtube.com/watch?v=_ijmxx0Rd-E

      #conseil_scientifique

  • La #Cour_des_comptes favorable au remboursement des psychologues par la #Sécurité_sociale
    https://www.francetvinfo.fr/sante/la-cour-des-comptes-favorable-au-remboursement-des-psychologues-par-la-

    Le remboursement des #psychologues_libéraux par l’#Assurance_maladie doit être « généralisé dès que possible », estime la Cour des comptes. Dans un rapport publié mardi 16 février, elle préconise, pour les cas les moins graves, « des #psychothérapies assurées par des psychologues libéraux » prises en charge par la Sécu, « sur prescription du médecin traitant », conformément au schéma expérimenté depuis deux ans dans les Bouches-du-Rhône, la Haute-Garonne, les Landes et le Morbihan.

    #psychiatrie

    La note de synthèse du rapport : https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2021-02/20210216-synthese-parcours-organisation-soins-psychiatrie.pdf
    Le rapport : https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2021-02/20210216-rapport-parcours-organisation-soins-psychiatrie.pdf

    • Alerte sur l’organisation de l’offre de soins en psychiatrie, Rachel Rodrigues
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2021/02/16/alerte-sur-l-organisation-de-l-offre-de-soins-en-psychiatrie_6070103_3224.ht

      La Cour des comptes publie ce mardi son rapport sur les parcours dans l’organisation des soins en psychiatrie, dressant le bilan d’un système désorganisé et déficient.

      Elle ne s’était pas penchée dessus depuis 2011. Mardi 16 février, la Cour des comptes a publié un rapport dressant un bilan des dysfonctionnements actuels en psychiatrie et dessinant d’éventuelles pistes pour une prise en charge plus adaptée des patients selon les besoins. Le rapport intitulé « Les parcours dans l’organisation des soins en psychiatrie » revient sur les enjeux majeurs propres au système de soins psychiatriques français, avec, au cœur des préoccupations, un manque de « gradation de l’offre » de soins, qui aboutit à une perte cruelle d’efficacité auprès des patients.

      Les besoins en psychiatrie sont multiples. Ils vont des troubles dits « légers » ou « modérés », qui comprennent la plupart des troubles dépressifs et anxieux, aux troubles « sévères », regroupant, entre autres, les troubles psychotiques et bipolaires. Ces derniers demandant évidemment des parcours de soins plus complexes. Dans l’état actuel des choses, ce manque d’organisation par niveaux de spécialisation est délétère pour la qualité des soins prodigués. Ainsi, dans son rapport, la Cour des comptes pointe du doigt l’existence de déficiences multiples concernant la prise en charge des patients aux troubles dits « sévères ».

      Lire aussi l’enquête : La très grande souffrance de la psychiatrie française
      https://seenthis.net/messages/663509

      En premier lieu, des hospitalisations trop longues, et un recours excessif à la re-hospitalisation sous contrainte. Mais également un manque accru de suivi des patients après l’hospitalisation, que déplore Dominique Monchablon, psychiatre à Paris : « Quand les patients sortent de l’hôpital, beaucoup arrêtent leur traitement. Il serait légitime de faire ce mouvement d’aller-vers pour continuer cet accompagnement. »

      Alors qu’elles étaient très fréquentes dans les années 1970, au début de la politique de #sectorisation des systèmes de #soins psychiatriques, les visites à domicile deviennent rares, voire inexistantes, pour assurer un suivi auprès des patients. « Finalement, dès qu’ils rentrent chez eux, s’ils sont en refus de soins, ils sont très vite abandonnés à leur maladie » , ajoute-t-elle. Un constat confirmé par le rapport de la Cour des comptes, qui souligne que seulement « 4,5 % des patients adultes [ont] bénéficié en 2018 d’actes à domicile » .

      Les médecins généralistes en première ligne

      A la sortie de l’hôpital, les patients sont redirigés vers les centres médico-psychologiques (CMP) pour un suivi ambulatoire, quand celui-ci n’est pas entravé par un manque de places [ça alors ! ndc]. « La psychiatrie libérale nous aide beaucoup, mais encore une fois, cela ne s’adresse qu’aux patients qui ont les moyens », ajoute Dominique Monchablon.

      En outre, les systèmes de soins spécialisés et CMP, déjà engorgés, se retrouvent submergés par des patients aux troubles dits « légers », qui pourraient être pris en charge ailleurs. Pour les auteurs du rapport, le diagnostic est clair : « Les moyens spécialisés sont souvent “asphyxiés”, faute d’être centrés sur les publics prioritaires. » Au niveau national, il serait donc impératif de mieux structurer cette prise en charge des patients, en orientant les cas de troubles dits « légers » vers d’autres structures. En d’autres termes, opérer un filtrage d’accès aux CMP grâce à une consultation préalable auprès d’un médecin généraliste ou traitant, dit professionnel de « première ligne ».

      A ce titre, un dispositif « autorisant la prise en charge par la Caisse nationale d’Assurance-maladie de psychothérapies faites par des psychologues libéraux, sur prescription des médecins traitants » est en expérimentation dans quatre territoires de la métropole (Landes, Haute-Garonne, Bouches-du-Rhône et Morbihan) et contribue à faciliter ce filtrage d’accès aux CMP. Ce parcours de soins pris en charge par l’Assurance-maladie, fonctionne de telle manière que le médecin traitant peut, en accord avec le patient, lui prescrire d’une à dix séances de psychothérapies, sous ordonnance. (..., ndc)

      Plusieurs réformes

      Un dispositif concluant, qui, pour l’heure, a remboursé 200 000 séances, et dont la Cour des comptes recommande la généralisation, sur l’ensemble du territoire, en appui à une disposition déjà présente dans le Ségur de la santé (mesure 31) concernant précisément « le développement de consultations par des psychologues, prises en charge par l’Assurance- maladie dans un cadre structuré » . La mesure en question prévoit également le recrutement de 160 psychologues supplémentaires dans les CMP.

      Ce rapport est publié alors que plusieurs réformes doivent faire évoluer le système de soins en psychiatrie. A l’instar des PTSM, ou projets territoriaux en santé mentale, qui ont pour objectif de réorganiser cette dernière à l’échelle d’un territoire pour plus d’égalité d’accès aux soins, et qui mériteraient, selon le rapport, d’être renforcés. Enfin, la réforme tarifaire des soins en psychiatrie, énoncée à l’article 25 du budget 2020 de la Sécurité sociale et initialement prévue pour 2021, a, quant à elle, été reportée au 1er janvier 2022. En 2018, en France, plus de 2 millions de patients ont reçu des soins dits ambulatoires, en #CMP.

      #hospitalisation_sous_contrainte

    • extraits de la note de synthèse du rapport de la CC

      Entre 1981 et 1991, en France, le nombre de patients hospitalisés à temps complet en psychiatrie, chaque année, dans un établissement sanitaire, est passé de 475 000 (soit 8,8 pour 1 000 habitants) à 250 000 (soit un taux de 4,3/1 000), ce qui traduit le résultat d’une politique de « désinstitutionalisation » . Or il était remonté en 2018 à 340 000 patients (pour) des durées d’en moyenne 55 jours. Parmi eux, 82 000 patients ont été hospitalisés sans consentement.

      [...]

      Lorsque l’on prend en considération l’ensemble des coûts, en incluant les prestations en espèces, comme le fait la Cnam dans ses études périodiques par pathologies publiées dans le rapport Charges et produits, les dépenses en soins de santé mentale et de psychiatrie apparaissent comme le premier poste de dépenses, avec 25 Md€ par an environ . Si l’on ajoute en outre le coût des prestations servies dans les situations chronicisées (en particulier l’allocation aux adultes handicapés ou AAH), on mesure l’impact potentiel de mesures destinées à prévenir le risque de chronicisation et à organiser des parcours incluant une réhabilitation . Or, le déploiement de soins plus précoces et gradués présente l’intérêt de réduire les prescriptions d’arrêts de travail (ainsi que de psychotropes) et surtout les séjours hospitaliers évitables .

      [...] le taux d’hospitalisation et les durées moyennes en nombre de jours d’hospitalisation en psychiatrie avaient baissé rapidement de 1960 à 1990, ces paramètres ont augmenté à nouveau, traduisant une sorte de « panne » dans le mouvement de « désinstitutionalisation » et plus généralement un accueil et un suivi peu efficaces . Une politique cohérente de gradation et de coordination des soins constitue ainsi un levier indispensable pour renouer avec la politique de soins inclusifs, dessinée dès 1960 .

      Il faudrait une lecture plus détaillée mais je ne vois dans ce rapport que l’essai de prolonger le renversement d’un « désaliénisme » émancipateur que la sectorisation des soins des années 60 a traduit en norme, rentable et peu soucieuse du soin. La « sortie de l’asile » au profit d’une politique de « responsabilisation » des fous et de modalités de prise en charge sur le territoire s’est faite à bas couts, et ce qui inquiète la cour des comptes c’est que la doctrine des courts séjours et de l’ambulatoire (au nom du bien des patients, évidemment), ne marche pas, et encore le nombre de fous à la rue ou en prison n’est-il pas évoqué dans ce document de la technocratie française.
      On forme plus d’infirmiers psy (spécialité supprimée durant les années 80), très peu de psychiatres, il va falloir filer du taff au psychologues au chômage sous forme de prescriptions de séances (à la quantité contingentée) par des toubibs (mèdecine générale) qui ont tendance à déconner dans leur prise en charge de la souffrance psychique (surprescription de psychotropes, histoire de « répondre » à la demande), eux qui délivrent des consultations tayloriennes de 20 minutes à une patientèle en surnombre, sans plus pouvoir accepter de faire fonction de « médecin référent sécu ».

      Le jeu de massacre continue.

      Mot manquant dans la note de synthèse du rapport CD : #lits (supprimés par dizaines milliers sur 40 ans)

      #psychiatres est présent trois fois, ce qui est une façon comme une autre d’en dire le manque, dont il n’est par ailleurs pas question ( mais après tout c’est devenu un métier féminin, c’est dire à quel point ça vaut pas grand chose).

    • Santé mentale : « Qui soigner quand il n’y a pas la possibilité de le faire pour tout le monde ? » -
      Oriane Bentata-Wiener, Psychiatre, responsable du centre médico-psychologique (CMP) de Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine).
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/11/24/sante-mentale-qui-soigner-quand-il-n-y-a-pas-la-possibilite-de-le-faire-pour

      Dans une tribune au « Monde », la psychiatre Oriane Bentata-Wiener tire la sonnette d’alarme sur les conséquences de l’absence de moyens financiers et humains accordés à la pédopsychiatrie en France.

      Tribune. Il serait temps de soumettre aux politiques et aux citoyens les choix impossibles et douloureux des médecins. Qui soigner quand il n’y a pas la possibilité de le faire pour tout le monde ? La question est brûlante et rendue visible par la situation sanitaire actuelle, avec des services de réanimation qui pourraient avoir à faire le tri et « choisir » des patients en cas de surcharge des lits.
      Quels patients souffrant du Covid-19, à gravité égale, faudra-t-il choisir, à l’entrée du service de réanimation ? La mère, la jeune grand-mère, la fille ? Le policier, le cadre, l’artiste, le sans-abri ? Celui qui a une vie bien rangée, celui qui a une vie mouvementée… ?

      Mais cette question du « choix des malades » est à mon sens bien plus ancienne, déjà trop ancienne, depuis que les moyens ont été nettement réduits dans le monde du soin, notamment en psychiatrie où l’on ne peut déjà plus… soigner tout le monde.

      En tant que responsable d’un centre médico-psychologique (CMP) pour enfants et adolescents dans le nord des Hauts-de-Seine, il s’agit d’une question quotidienne, tant les listes d’attente pour être reçu par des professionnels de santé mentale se sont allongées ces dernières années (souvent plus de six mois après une première demande). Les plages de consultation sont saturées.

      Où tracer la ligne de partage ?

      D’une part, les financements ne se sont pas accrus voire ont été réduits et, d’autre part, il existe une augmentation des demandes de soins psychiatriques ou psychologiques d’une population qui, de plus, s’accroît. Par ailleurs, nos partenaires (protection de l’enfance, écoles, établissements de soins, etc.) souffrent du même manque de moyens. Le CMP devient alors le réceptacle des enfants et des familles pour lesquels les soins qui seraient nécessaires et adéquats ne sont pas disponibles.

      La mission première d’un CMP est d’accueillir toute personne en état de souffrance psychique. Et la question est alors de déterminer qui soigner en priorité, quand on ne peut pas recevoir tout le monde. Avec mon équipe, nous étudions la liste d’attente… Où tracer la ligne de partage entre ceux qu’il faut soigner d’abord et ceux qui peuvent encore attendre ? Qui choisir ?

      C’est alors le domaine de l’éthique qui s’impose. En effet, les choix à faire sont tous des dilemmes pénibles et relèvent plus de l’éthique que de la connaissance médicale ou psychologique. Ce terme, employé à tort et à travers, apparaît le plus souvent vidé de son sens. Mais, dans notre travail quotidien, il s’agit d’un mot « chaud », dans le sens qu’il implique de résoudre des équations insolubles, car leur cause première est le manque d’argent…

      Il s’agit ici de la délibération insupportable avant de choisir quels patients – en l’occurrence, ici, quels enfants et leurs familles – accueillir en priorité. Nous retournons alors dans tous les sens les choix possibles et tentons d’établir des critères, dont nous prenons tout de suite conscience des aberrations.

      Des choix lourds à assumer

      Faut-il respecter l’ordre chronologique de la liste d’attente et accueillir progressivement les patients, sans prendre en compte le possible degré d’urgence ? Accueillir les plus nécessiteux financièrement, sachant qu’ils ne peuvent accéder au libéral ? Mais comment prétendre être un service « public » si les classes moyennes, voire les plus riches, ne peuvent y accéder, alors qu’elles peuvent être tout aussi malades ?

      Faut-il recevoir les patients ayant les pathologies les plus lourdes, par exemple les personnes ayant des troubles graves du spectre de l’autisme, alors que nous n’avons pas toujours les ressources pour les accueillir décemment ? Ou, à l’opposé, choisir ceux qui souffrent de symptômes aigus, en lien avec un événement de vie difficile (divorce, décès…), pouvant nécessiter une intervention plus ponctuelle ?

      Faut-il accueillir une tranche d’âge en priorité ? La période fragile et mutante de l’adolescence, durant laquelle les jeunes peuvent avoir des troubles du comportement majeurs ou des idées suicidaires ? Ou bien la petite enfance, quand tout semble encore amendable ? Les choix peuvent être multiples mais sont toujours lourds à assumer, car impliquant de laisser certains enfants sans soins alors que d’autres sont pris en charge.

      Conditions sociétales

      On peut se réjouir que le Covid-19, dans la plupart des cas, n’atteigne pas gravement les enfants. En pédopsychiatrie, il n’est certes pas question de risque vital. Néanmoins il est à questionner quelle considération on donne à la vie psychique. Alors qu’en réanimation se pose la question de vie ou de mort, il est aussi important de ne pas négliger ce qu’est la vie psychique d’un enfant et la valeur de cette vie. Qui est en fait l’avenir de toute la nation. D’où l’importance de pouvoir accueillir tout enfant en souffrance psychique.

      On peut assumer un choix quand on peut assumer les conditions dans lesquelles il s’exerce. Or, je ne peux pas répondre de certaines conditions sociétales, notamment le manque de financement qu’on nous impose, alors que nous sommes définis comme des unités d’accueil « mises à la disposition de la population ». Autant que les réanimateurs n’ont pas à endosser le manque de lits, les restrictions budgétaires, la politique délétère de l’hôpital-entreprise ou une certaine négligence citoyenne par rapport à la transmission du Covid…

      C’est trop lourd de faire peser les choix sur les seuls médecins et soignants, alors qu’ils résultent d’années de politiques de restrictions budgétaires et de désengagement envers l’hôpital. Ils devraient être mis dans les mains des citoyens et des politiques. Il serait temps de leur soumettre les choix impossibles des médecins et professionnels du soin. Car ces choix sont tellement douloureux et intenables qu’en prendre connaissance permettrait, sûrement, de faire en sorte qu’on n’y arrive plus jamais.

  • PÉTITION. Ambroise Croizat mérite d’entrer au Panthéon
    https://www.humanite.fr/ambroise-croizat-au-pantheon

    À l’initiative de l’Humanité, élus, syndicalistes et intellectuels interpellent le président de la République afin que le bâtisseur de la Sécurité sociale et ministre du Travail à la Libération, #Ambroise_Croizat, entre au Panthéon.

    Il y a cent vingt ans ans, le 28 janvier 1901, naissait Ambroise Croizat. La France lui doit l’une de ses plus belles créations collectives : la Sécurité sociale. Il en fut la cheville ouvrière et le principal bâtisseur, en tant que ministre du Travail au sortir de la Seconde Guerre mondiale, dans le respect du programme du Conseil national de la Résistance. ­Depuis lors, des générations de citoyens ont eu la chance de bénéficier d’une ­couverture sociale ­exceptionnelle. Il faut bien mesurer l’œuvre ­civilisatrice d’Ambroise Croizat pour ce qu’elle est : une étape fondamentale, révo­lu­tionnaire, dans la ­recherche d’une vie meilleure qui a toujours animé l’humanité.

    L’objectif d’Ambroise Croizat était de briser l’angoisse du lendemain, de la maladie ou de l’accident de travail. Sa volonté, sa vision étaient de ne plus faire de la retraite l’antichambre de la mort, mais bien une nouvelle étape de la vie. Notre pays doit à ce militant communiste la générali­sation des retraites, les comités d’entreprise, la médecine du travail, la reconnaissance des maladies professionnelles, la prime prénatale… En tant que député du Front populaire, dès 1936, il avait déjà pris une part considérable dans l’instauration des congés payés, des conventions ­collectives et de la ­semaine de quarante heures.

    Tous les Français, aujourd’hui, bénéficient d’une carte vitale, sésame qui leur permet si souvent d’être soignés selon leurs besoins, sans distinction de leurs moyens, grâce à la socialisation des richesses créées. Certes, de nombreux coups ont été assénés à la Sécurité sociale et au Code du travail depuis que Croizat n’est plus. Certes, la #Sécurité_sociale est avant tout une #œuvre_collective, comme Croizat, syndicaliste à la CGT, le rappelait. Mais qui peut dire que cet homme d’État n’a pas joué le premier rôle, en tant que ministre, pour apporter à la France l’une de ses plus belles réformes ? Qui peut dire que cette réalisation ne constitue pas un pilier indispensable à notre République sociale ?

    La Sécurité sociale fait partie du #patrimoine_vivant de tous les Français. Un patrimoine qui n’est ni à muséifier ni à vernir, mais à entretenir et développer toujours plus, dans le respect de sa philosophie initiale, en tant que bien commun, comme le montre la crise du Covid-19. Le XIXe siècle aura été marqué dans notre pays par l’accès de tous à l’éducation. Le XXe retiendra à n’en pas douter, avec le recul, la fondation du système de santé public créé par Croizat comme l’une de ses plus grandes conquêtes.

    Tous s’en réclament aujourd’hui, même si tous n’en sont pas dignes. Reste qu’Ambroise Croizat est définitivement digne du Panthéon, qui s’honorerait à l’accueillir, avec son épouse Denise, comme le souhaite sa famille.

    • PREMIEReS SIGNATAIRES

      Éliane Assassi , présidente du groupe CRCE au Sénat, Yves Audvard , président de l’Association Ambroise-Croizat, Julien Bayou , secrétaire national d’EELV, Pierre Caillaud-Croizat , petit-fils d’Ambroise Croizat, André Chassaigne , président du groupe GDR à l’Assemblée nationale, Michel Étiévent , écrivain et biographe de Croizat, Olivier Faure , premier secrétaire du PS, Bernard Friot, sociologue et économiste, Bernard Lamirand , président du comité d’honneur Ambroise Croizat, Pierre Laurent , sénateur et président du Conseil national du PCF, Marie-Noëlle Lienemann , sénatrice GRS, ancienne ministre, Patrick Le Hyaric , directeur de l’Humanité, Philippe Martinez , secrétaire général de la CGT, Jean-Luc Mélenchon , président du groupe FI à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot , vice-présidente du groupe FI à l’Assemblée nationale, Gilles Perret , réalisateur du film la Sociale, Fabien Roussel , secrétaire national du PCF, Frédéric Sanchez , secrétaire général de la CGT métallurgie, Simon Duteil , codélégué général de Solidaires. Pascal Savoldelli , sénateur PCF. Céline Brulin , sénatrice PCF. Stéphane Peu , député PCF. Sébastien Jumel , député PCF. Alain Bruneel , député PCF. Fabien Gay , sénateur PCF Michelle Gréaume , sénatrice PCF. Gérard Lahellec , sénateur PCF Jérémie Bacchi , sénateur PCF. Cécile Cukierman , sénatrice PCF. Karine Lebon , députée GDR.

  • Mervin sur touiteur
    https://twitter.com/solatges2/status/1352332407412846594

    Voulez-vous connaitre la meilleure pour l’@IHU_Marseille ? Ils facturent pour 2 heures de visite (1 ECG (pour leur chloroquine !!) // 1 test pcr // 1 ordonnance HCQ/Azithromycine)) le tarif d’une journée d’hospitalisation ambulatoire : plus de 1200€.(avec 200€ de reste à charge)

    Le patient m’a présenté sa facture et était Covid positif. Il n’a même pas été prévenu pour le reste à charge (il n’a pas de mutuelle) et tout cela pour un médicament délivré hors AMM.. (car l’ECG n’est réalisé que pour la délivrance de l’HCQ)

    #IHU #Sécurité_sociale #hôpital

    • Je n’avais pas vu la facture, publiée ensuite.

      Ces deux mois avant l’acte facturé peuvent correspondre à un rdv antérieur à celui-ci (une inclusion dans une « étude » ? n’imp ?), une entrée dans la file d’attente, dans la patientèle pour une raison z.

      D’autres réponses au post parle de fake, car l’IHU n’est pas mentionné, en raison des deux dates éloignés (mais l’acte facturé est bien sur un jour), en raison du manque de détails de l’acte facturé (pas de PCRmentionné etc.). Je n’en sais rien.

      Ce que je sais c’est qu’IHU ou pas, malgré une bureaucratie tatillonne et une logique comptable hystérisée qui affecte diverses fonctions matérielles de manière tout à fait sensible, il y une grande liberté de facturation de ce qui est imputé à la sécu par les entreprises de toutes tailles, les divers « libéraux » qui émargent à cette caisse, les institutions de soins, en même temps que des obstacles à la prise en charge et d’invraisemblables sous-évaluations de divers actes (séance de kiné que sa cotation tend à tayloriser, par ex.).

      Avec la télémédecine, on a de nouveaux (?) cas, comme ces médecins traitants qui appellent un patient pour donner en deux minutes un résultat de test et facturent pour cela une consultation (oui, les consultations de médecine g sont sous côté et taylorisent elles-aussi les soins) alors qu’il ne se passe rien, qu’ils ont pas eu besoin par exemple de démêler une question clinique quelconque avec des spécialistes.

  • BALLAST | Mutiler les gilets jaunes : le combat d’une famille
    https://www.revue-ballast.fr/mutiler-les-gilets-jaunes-le-combat-dune-famille

    À Pompidou, il faut le dire, ça a été com­pli­qué. Cet hôpi­tal est une véri­table usine, il y a 300 ou 400 chambres. C’est inhu­main. Arrivé depuis déjà trois jours, Gabriel n’avait tou­jours pas été opé­ré du visage, il était ter­ri­ble­ment gon­flé. Passe le pro­fes­seur Lantieri, spé­cia­liste des greffes de visage en France. Quand il a vu l’état de Gabriel, il était outré. « Une situa­tion inad­mis­sible », il a dit. Gabriel a dû subir une inter­ven­tion du visage dans son lit car il n’y avait pas de bloc opé­ra­toire libre. C’est assez éton­nant comme pra­tique, pour un hôpi­tal qui a une renom­mée euro­péenne. Un bout de plas­tique et de fer issu de la gre­nade, gros comme une pièce de mon­naie, était incrus­té au milieu de son front. Son visage était com­plè­te­ment tumé­fié, il gon­flait de jour en jour. Cette inter­ven­tion a été réa­li­sée sans anes­thé­sie par­ti­cu­lière — même s’il était sous mor­phine, il a souf­fert. Gabriel s’est sen­ti tout de suite mieux et son visage a dégon­flé. Au sein de l’hô­pi­tal, il y a eu une sorte de bataille entre les ser­vices. Gabriel avait été pris en charge pour sa main, donc par l’orthopédie : du coup, ils n’ont pas pris sa jambe ni son visage en compte. C’était un va-et-vient per­ma­nent entre les blocs. Et comme l’hôpital manque de place, on ne savait jamais quand il devait se faire opé­rer. Alors Gabriel ne man­geait plus, ne buvait plus. Plus d’une fois, on ne lui a pas appor­té de quoi man­ger, et sinon, le plus sou­vent, c’était froid. Il fal­lait que je des­cende au rez-de-chaus­sée pour faire chauf­fer sa nour­ri­ture. Dans ces moments, il faut apprendre à se taire, sinon la prise en charge de Gabriel aurait pu en pâtir.

  • Avec les brigades sanitaires du Covid-19 : « Les gens ont de plus en plus de mal à accepter les consignes »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/12/14/les-gens-ont-de-plus-en-plus-de-mal-a-accepter-les-consignes-avec-les-brigad

    Au printemps, la Sécurité sociale a mis en place des centres d’appels où des conseillers sont chargés du suivi des malades de l’épidémie et du traçage des cas contacts. A Villeneuve-d’Ascq, dans le Nord, ils jouent un rôle sanitaire et social déterminant.

    Sullyvan Massy Notebaert jette un coup d’œil rapide à l’écran de son ordinateur. Les noms des malades à appeler en priorité apparaissent. Son casque sur les oreilles, le jeune homme compose un numéro. Il adopte le ton aimable d’un vendeur de parfums. Sauf que c’est du #Covid-19 qu’il doit parler, avec une sexagénaire dont le test s’est révélé positif. La dame s’applique à répondre aux questions de Sullyvan.

    Son histoire avec la maladie est simple, presque banale. Elle s’était confinée chez sa fille et son gendre. Le gendre a été atteint le premier, puis sa fille quelques jours plus tard. Comme elle « regarde les informations à la télévision » , la dame a fait sa valise pour rentrer rapidement chez elle. Après avoir consulté son médecin traitant, elle s’est fait tester le lendemain. C’était son tour. Ça ne l’a pas étonnée, elle commençait à tousser, à se sentir fiévreuse.

    A Sullyvan, elle jure n’avoir « pas vu un chat » depuis son retour dans son appartement. Pas de cas contact à prévenir, donc. Pour faire ses courses, le conseiller l’incite à utiliser le drive ; elle y avait déjà pensé. De toute façon, ses placards sont pleins, « comme si j’avais anticipé le truc », s’amuse-t-elle. La conversation dure encore une dizaine de minutes, la malade fait traîner. A plusieurs reprises, elle glisse qu’à son âge ce n’est pas facile le célibat et la solitude. « Au moins, vous pouvez vous isoler plus facilement ! », plaisante Sullyvan.

    Elle en rit volontiers, mais quelque chose la chiffonne : « On faisait tous très attention, les distances, le masque, le gel, nous sommes des personnes responsables, je ne comprends pas comment on l’a attrapé. » « Vous n’avez pas à vous en vouloir, répond Sullyvan, soucieux de la déculpabiliser, il n’y a pas de risque zéro. » Le jeune homme finit par raccrocher en répétant : « Ça va bien se passer, ne vous inquiétez pas. » Il sourit. L’entretien s’est déroulé de façon idéale : une malade coopérative, informée, aimable. « La plupart des gens sont comme ça », tient-il à préciser.

    Rôle à multiples facettes

    Sullyvan Massy Notebaert, 25 ans, est l’un des 10 000 agents formés par la #Sécurité_sociale au suivi des malades et au suivi de #cas_contacts pour éviter la propagation du virus. Ici, à Villeneuve-d’Ascq, l’un des quatre centres que compte le département du Nord (2,6 millions d’habitants), ils sont plus d’une centaine à se relayer ainsi, sept jours sur sept, derrière les téléphones ; trente de plus travaillent de chez eux.

    Leur mission : convaincre les malades de s’isoler, prévenir les cas contacts et les inciter à faire de même. Mais aussi informer, orienter les précaires et les fragiles, ceux pour lesquels le virus entraîne des souffrances en cascade (perte d’emploi, dépression, violence, isolement…). Rassurer également, lutter contre les « fake news », jouer tout à la fois le rôle de conseiller médical, d’assistant social et de psychologue.

    L’ancien premier ministre Edouard Philippe les avait surnommés les « brigadiers ». Ici, le terme ne plaît guère. « Trop militaire, trop anxiogène, juge Karine Brillault, la responsable de la plate-forme. Nous sommes là pour aider, on veut être sympathiques. » Elle préfère le terme de « conseiller » ou le neutre « collaborateur », très en vogue dans le monde du travail.

    « Ne pas trop se faire balader »

    Quand le gouvernement a demandé à l’Assurance-maladie de se mettre au #traçage des cas contacts, au moment du déconfinement de mai, [pffff..., ndc] l’institution a dû s’adapter à toute vitesse et monter des centres d’appels à travers le pays. « Nous avons eu dix jours pour faire face dans l’urgence et créer de nouveaux services, se souvient Hélène Saumitou Laprade, directrice adjointe de la Caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) du Nord. On a dû mettre en place un système qui permette d’aller plus vite que la diffusion du virus pour briser la chaîne de contamination. Ce n’est pas dans notre ADN premier de gérer une crise sanitaire, on a dû innover. » En plus de l’appel au volontariat en interne, il a fallu recruter. « On cherchait des têtes bien faites, des jeunes qui savent s’exprimer correctement, qui maîtrisent l’informatique et ont le sens du contact », explique Mme Brillault.

    M. Notebaert, diplômé en master de sciences politiques – au chômage depuis que le magasin de vêtements dans lequel il travaillait a fermé avec le confinement –, avait le profil idéal, le genre à pouvoir gérer des situations complexes après une seule petite journée de formation. A quelques mètres de lui, Adam Delory, 25 ans, col roulé sombre et sourire lumineux, a également vite compris ce que l’on attendait de lui : « Il ne faut pas trop se faire balader par le patient, ne pas le laisser prendre la main sur la discussion, car on a des messages essentiels à faire passer, et savoir s’adapter aux situations. Si on entend un enfant en bas âge pleurer derrière, par exemple, il faut aller à l’essentiel. »

    Au début de l’été, les équipes étaient prêtes, mais le virus, lui, se faisait tout discret. « C’était la drôle de guerre, on attendait, mais il ne se passait rien, raconte Baptiste Marchand, directeur santé de la CPAM du Nord. Quand la deuxième vague a éclaté, au moins, nous étions prêts. » Après des semaines exténuantes, les agents commencent enfin à souffler avec le ralentissement de l’épidémie.

    L’outil informatique s’est perfectionné, eux-mêmes se sont rodés. « Au début il y avait des bugs, certaines personnes étaient appelées plusieurs fois, d’autres pas », reconnaît Mme Brillault. Aujourd’hui, alors que l’ensemble du processus – la fameuse stratégie « tester, tracer, isoler », mise en place au printemps – s’est amélioré (mise à disposition des #tests, réduction des délais d’attente des résultats, meilleure transmission des données par les labos), l’Assurance-maladie peut se targuer de contacter 94 % des #malades entre quatre et vingt-quatre heures après leur résultat.

    La confusion règne

    Ici, à Villeneuve-d’Asq, nous ne sommes pas dans un #centre_d’appels comme ceux des produits commerciaux. « On n’est pas là pour vendre des doubles vitrages », résume Adam Delory. Chaque conseiller a devant lui un calendrier en carton, pour calculer les dates de période d’isolement et de contagiosité en fonction des contaminations, des premiers symptômes, du résultat des tests. Il dispose aussi d’un épais script de sujets à aborder, qui évolue au gré des consignes venues d’en haut. Dernière en date : « Faire la promotion de l’application TousAntiCovid ».

    Autre particularité, ils peuvent consacrer le temps qu’ils veulent à un appel. « J’ai eu une dame furieuse au téléphone, car son fils avait reçu un résultat positif six jours après avoir fait le test, se souvient Kevin Quelquejeu, 28 ans, vêtu d’une salopette et d’un peu discret pull de Noël. Elle était très angoissée, car il avait subi une lourde opération l’année précédente. Elle pleurait beaucoup, je suis restée avec elle une heure et quart au bout du fil, à la fin ça allait mieux. »

    Les questions les plus fréquentes tournent autour de la durée de l’#isolement, de la contagiosité, des personnes asymptomatiques, des tests, de l’immunité. « Pour beaucoup, ce n’est pas clair, poursuit sa collègue Céline Turpin, élégante infirmière de 40 ans. Entre ce qu’ils entendent dans les médias, chez leur médecin, à la pharmacie ou chez leurs voisins, ils sont un peu perdus. » Il faut dire que, depuis des mois, tout et son contraire, ou presque, a été dit au sujet de la pandémie. Sur la période d’isolement, entre les quatorze jours annoncés au départ, puis les sept jours, beaucoup de patients n’y comprennent plus rien. Mais plutôt que de parler d’ « informations contradictoires », ici on préfère évoquer « l’évolution des directives ».

    « On sent le ras-le-bol qui monte »

    Le plus difficile : convaincre les gens de rester à l’isolement. Les cas contacts ont du mal à se plier aux règles, surtout lorsqu’ils en sont à leur deuxième ou troisième fois. La veille de notre arrivée à Villeneuve-d’Asq, Emmanuel Macron a évoqué la possibilité de rendre obligatoire l’isolement, une hypothèse évacuée depuis. Le vaste open space, avec ses bureaux disposés en marguerite, bruisse de cette déclaration. Contraindre les gens à rester chez eux, ici, personne n’y croit. « Impossible à mettre en œuvre », estime-t-on. Evidemment, tous savent que certains malades mentent et continuent à sortir.

    L’isolement pose de nombreux problèmes, économiques, sociaux et psychologiques. « Certains entrepreneurs testés positifs nous disent : “Je dois retourner travailler, je ne peux pas laisser mes salariés seuls, je connais les gestes barrières, je porterai un masque et je resterai dans mon bureau”, explique Céline Turpin, l’infirmière qui a intégré la plate-forme après s’être portée volontaire dans une structure hospitalière, lors de la première vague. Il faut essayer de les convaincre. Et quand on repère des problèmes sociaux qui empêchent l’isolement, on oriente sur des numéros d’aide. »

    A quelques bureaux du sien, Nathalie Ruszczynski, infirmière également, gère une situation complexe au téléphone. Une patiente explique avoir bénéficié d’un #arrêt_maladie en tant que cas contact. Entre-temps, elle a été dignostiquée positive et a donc de trois #jours_de_carence pour son arrêt. Une double peine, selon elle. « Je comprends », assure son interlocutrice tout en lui rappelant que c’est la règle : les cas contacts ne perdent pas de salaire, les « covidés » si…

    « Il faut toujours rester calme, tout en étant ferme, dit la conseillère. Ils doivent sentir que ce qu’on dit est la consigne officielle, sinon la confiance n’est pas là. Les gens ont de plus en plus de mal à accepter les consignes, ça dure depuis si longtemps… Ils sont angoissés aussi, quel que soit leur âge ou leur situation sociale. » « Ils saturent, renchérit Kevin Quelquejeu, qui a atterri ici après la fermeture de Disneyland Paris, où il enchaînait les CDD depuis quatre ans. On sent le ras le bol qui monte à l’approche de Noël. » Chacun des conseillers s’est fait raccrocher au nez au moins une ou deux fois – rien de bien grave sur des milliers d’appels. De l’avis de tous, les malades sont plutôt avides de discussion. Les plus hostiles aux mesures gouvernementales, eux, ne répondent pas au téléphone.

    Stratégies de communication

    Pour convaincre leurs interlocuteurs de s’isoler, les agents misent sur la persuasion, voire la culpabilisation. Des éléments de langage leur ont été donnés. Le mot « protection » fait ainsi figure de formule magique. « Ce sont des techniques de communication, assume Karine Brillault. Celle de l’écoute active désamorce beaucoup de colères. »

    L’apparente connivence aussi. « Je les caresse dans le sens du poil, confie en souriant Adam Delory. Si quelqu’un me dit qu’il veut retourner travailler, je lui réponds que je le comprends, que je ne l’oblige à rien. Comme ça, il baisse la garde et je peux le convaincre plus facilement en faisant appel à son sens des responsabilités. Une alliance doit se créer entre eux et nous. Ce job, c’est à 70 % de la psychologie. »

    Pour Kevin, le jeune homme si optimiste qu’il porte des pulls de Noël dès novembre, « il ne faut surtout ne pas être dans le jugement, ne pas faire de reproches ». Lui aussi a sa technique pour calmer les énervés ou les récalcitrants : « Je leur dis : “Je suis là pour vous faire des recommandations, pas pour vous fliquer. On est tous dans la même situation, moi aussi, j’en ai marre de ce confinement”. » « Même si on ne déplace pas des montagnes, j’ai l’impression de servir à quelque chose », ajoute-t-il, satisfait de « l’expérience humaine » qu’il vit depuis septembre. Mais, quand on l’interroge sur son avenir, il n’hésite pas une seconde : dès que la situation sanitaire le permettra, il retournera travailler à Disneyland.

    Toujours aucun article d’ensemble à ma connaissance sur les #agents_de_santé de terrain, et pas de plateforme, à l’exception de quelques papiers sur #covisan à Paris et un peu en IDF. Or, à part la Nouvelle Zélande et l’Australie où je ne sais quelle a pu être leur rôle, je vois pas un seul pays qui ai réussi quelque chose contre le covid qui n’en ai pas employé/utilisé un grand nombre (y compris sous la forme des "comités de quartier" de la dictature chinoise). Et ce dans un pays champion des CDD où on nous bassine depuis 40 ans avec l’exigence de flexibilité. L’âne gouvernemental n’a pas soif de #santé_publique.

  • Permettre à chacun de manger à sa faim : l’idée d’une « Sécurité sociale de l’alimentation » - Basta !
    https://www.bastamag.net/Securite-sociale-de-l-alimentation-universalite-democratie-cotisation-cais

    Imaginez un budget de 150 euros dédiés à l’alimentation, alloué chaque mois à tout le monde. Imaginez ensuite que vous décidiez collectivement, en fonction de critères débattus, des types d’aliments qui pourront être achetés avec ce budget. Une sécurité sociale de l’alimentation pourrait fonctionner ainsi, et transformer le système alimentaire.

    Garantir un droit à l’alimentation pour tous, financé par la solidarité nationale : c’est le projet d’un collectif qui imagine une « sécurité sociale de l’alimentation ». À l’image de la « sécu », qui garantit un accès aux soins pour tous, la « sécurité sociale de l’alimentation » serait éminemment solidaire : chacun cotiserait selon ses moyens pour permettre aux familles les plus pauvres de subvenir a minima à leurs besoins. La gestion serait démocratique, avec des caisses locales au sein desquelles se retrouveraient des consommateurs, des producteurs, des travailleurs ou des élus. Un budget mensuel dédié de 150 euros par mois et par personne – cette somme serait versée aux parents pour les mineur.es – serait sanctuarisé, et intégré dans le régime général de sécurité sociale.

    De la même façon que tout le monde a accès aux soins avec une carte Vitale, il s’agit de garantir à chacun.e l’accès à une alimentation choisie. Un collectif d’organisations, réunissant ingénieurs, agriculteurs, militants associatifs [1], travaille sur le sujet depuis trois ans. Il estime que ce système permettrait à toutes et tous d’avoir accès à une alimentation de qualité, respectant l’environnement et les travailleurs, de la production comme de la distribution.

    #alimentation #sécurité_sociale

  • Les journalistes pigistes auront enfin droit à un congé maternité digne de ce nom
    https://www.20minutes.fr/arts-stars/medias/2879843-20201007-journalistes-pigistes-enfin-droit-conge-maternite-digne-n

    Jusqu’ici, les #journalistes #pigistes devaient prouver avoir perçu 20.000 euros brut sur les 12 derniers mois pour ouvrir des droits aux indemnités journalières de la #Sécurité_sociale. Une somme trois fois plus élevée que pour les permanentes et permanents des #rédactions, voire n’importe quel assuré social rémunéré à l’heure. Une fois la réforme instituée, les pigistes n’auront plus besoin que d’accumuler qu’environ 6.000 euros brut cotisés de salaires sur cette période.

    #congé_maternité #droits_sociaux

  • Les laboratoires remportent leur bras de fer avec l’#Etat sur les #dépenses d’immunothérapie contre le #cancer | Les Echos
    https://www.lesechos.fr/economie-france/social/le-gouvernement-veut-eviter-une-envolee-des-depenses-dimmunotherapie-contre

    Le #budget de la #Sécurité_sociale pour 2021 prévoyait que tout chiffre d’affaires supérieur à 850 millions d’euros dans cette classe de médicaments innovants serait surtaxé.

    [...]

    Mais les industriels furieux contre cette mesure du gouvernement ont, selon nos informations, obtenu in extremis la suppression de cette disposition, qui ne figurera pas dans le projet de loi finalement présenté en Conseil des ministres ce mercredi.

    #who_is_the_fucking_boss” ? #pharma

  • #Résistance, mais où sont passés les jours heureux ?

    Les jours heureux, du nom du programme du #Conseil_national_de_la_Résistance. Qui étaient les résistants ? Comment se sont-ils unis malgré leur désaccords ? Nous évoquerons l’esprit de résistance avec un grand témoin, #Annette_Beaumanoir, ainsi que la figure d’#Ambroise_Croizat, père de la #Sécurité_sociale. Quand un monde nouveau est à reconstruire, c’est toute cette semaine dans Le Cours de l’histoire.

    Épisode 1 : 1940-1943 : unir la lutte
    Comment unir ce qui est désuni ? Qui étaient ces résistants français devenus la Résistance française en 1943, en parvenant à unifier au sein du Conseil national de la Résistance les différents mouvements résistants, en dépit de leurs profondes divergences politiques ?

    Épisode 2 : Grand témoin : Annette Beaumanoir
    A travers le portrait d’une femme engagée au destin hors norme, résistante de 17 ans, en Bretagne, à Paris et à Lyon, dans les réseaux de #Jean_Moulin, c’est l’esprit de la résistance qui se dessine. Ce matin, dans Le Cour de l’histoire, la Résistance arbore un visage, celui d’Annette Beaumanoir.

    Épisode 3 : « Les jours heureux », le programme du Conseil National de la Résistance
    Comment le programme du #CNR, symbolisant la démarche transpartisane de la résistance, a-t-il façonné les réformes économiques et sociales mises en place après la Libération ?

    Épisode 4 : Sécurité sociale, la croisade d’Ambroise Croizat
    Ce matin dans #Le_Cours_de_l'histoire, nous nous intéressons à l’histoire de la Sécurité Sociale, à ceux qui l’ont construite et l’ont faite perdurer. Car aujourd’hui encore, nous bénéficions de cette mesure phare du programme du Conseil National de la Résistance.

    https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/resistance-mais-ou-sont-passes-les-jours-heureux

    En lien avec la création récente du #Conseil_National_de_la_Nouvelle_Résistance
    https://reporterre.net/Naissance-du-Conseil-national-de-la-Nouvelle-Resistance

    #CNNR #france_culture #podcast #histoire #Xavier_Mauduit

  • Sécurité sociale, la croisade d’Ambroise Croizat - Ép. 4/4 - Résistance, mais où sont passés les « jours heureux » ?
    https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/resistance-mais-ou-sont-passes-les-jours-heureux-44-securite-sociale-l


    Ce matin dans Le Cours de l’histoire, nous nous intéressons à l’histoire de la #Sécurité_Sociale, à ceux qui l’ont construite et l’ont faite perdurer. Car aujourd’hui encore, nous bénéficions de cette mesure phare du programme du Conseil National de la Résistance.

    Pour en parler nous sommes en compagnie de Gilles Perret, réalisateur documentariste. Il s’est notamment intéressé à l’histoire du Conseil national de la Résistance et à ses héritages, dans des films comme “Les Jours heureux” en 2013 et “La sociale” en 2016, qui retrace l’histoire de la sécurité sociale.

  • Bernard Friot : “Nous avons des intellectuels de gauche qui se pensent anticapitalistes, qui le sont au sens de leur militance, mais qui écrivent le récit dont la bourgeoisie a besoin“ Première partie - FRUSTRATION

    Partie 1
    https://www.frustrationmagazine.fr/nous-avons-des-intellectuels-de-gauche-qui-se-pensent-anticapita

    Partie 2
    https://www.frustrationmagazine.fr/si-la-bourgeoisie-est-la-classe-dirigeante-cest-parce-quelle-dir

    On a tous quelque chose en nous de communiste. Et même que ce quelque chose réside dans des institutions que nous connaissons très bien, dont la plupart du temps nous nous félicitons de leur existence. Lesquelles ? Le statut de la fonction publique et le régime général de la sécurité sociale, bien sûr ! C’est ce que nous explique de manière évidente non sans une certaine pugnacité l’économiste et sociologue du travail Bernard Friot, que nous avons rencontré. En plein mouvement social historique contre la réforme des retraites et de débats parlementaires cette semaine, il nous semblait plus que nécessaire de dialoguer avec lui, qu’il nous insuffle ce “Désir de communisme” face au “rouleau compresseur du capitalisme néolibéral”, concrétisé dans son dernier livre co-écrit avec Judith Bernard. L’occasion de se demander pourquoi la question du travail, si centrale pourtant, est si peu ou mal abordée à gauche et même au sein de la gauche dite “radicale”, comment retrouver un second souffle de mobilisation face à la régression des retraites, et qu’est-ce qu’apporte le mouvement des Gilets jaunes au combat social ?

    #Bernard_Friot #interview #travail #capitalisme #communisme #retraite #sécurité_sociale #salaire #qualification_personnelle #auto-organisation #autogestion

  • Corona Chroniques, #Jour53 - davduf.net
    http://www.davduf.net/corona-chroniques-jour53

    Branle-bas de combat au gouvernement, mais en tenue camouflage. Matignon dépose en catimini un amendement pour démolir un autre amendement, pourtant proposé et voté hier par son propre camp. Le péché originel, venu d’un député #LREM, ancien patron du #RAID : autoriser les « gardes particuliers » à pouvoir contrôler et verbaliser les promeneurs mal attestés. La logique à l’œuvre porte un nom, fumeux et malfamant : « le continuum de sécurité, enjeu du futur, entre sécurité publique et sécurité privée », dit un préposé à l’argumentaire. En clair : les députés en marche veulent déborder leurs chefs et donner pouvoir de police aux vigiles, en plus des nouveaux venus auxquels Castaner aimerait confier ces nouvelles missions (apprentis-policiers, retraités gendarmes, et robo(pastoutàfait)cops du métro, cf. Corona Chroniques, jour 48). Dit plus clairement encore : légaliser les #milices (euphémisées en commission des lois par « gardes assermentés de propriété de grande superficie »). D’où le gouvernement qui toussote, qui trouve que ça fait un peu beaucoup, ce débordement sur l’extrême droite, que ça risque de se voir un tantinet trop, cette tentation d’un sécuritaire total — et qui dépose son amendement (Saint Muddy Waters, héros du peuple et du Chicago Blues, que ces choses sont délicatement dites : « L’octroi d’un tel pouvoir de police judiciaire aux gardes particuliers pour participer à l’accomplissement d’une mission de police sanitaire n’est pas envisageable en opportunité et par ailleurs présente des fragilités constitutionnelles »). Au passage, avec le #Confinement, jamais vu une telle remontée de vidéos terrifiantes de policiers municipaux en roue libre. Après se teste Pendant.

    (Penser à écrire aux députés pour leur rappeler qu’en matière de continuum de sécurité, les reportages de M6 n’y pourront rien : ceci est achevé depuis des décennies, jamais la société n’a été aussi « sûre » et contrôlée qu’aujourd’hui ; 2020 n’est rien comparé à 1920, ni même à 1970. Leur demander également si, des fois, l’insécurité véritable ne règnerait pas ailleurs, quelque part du côté de la #sûreté_sanitaire, à défaut de #sécurité_sociale, régulièrement défoncée ?).

  • #Dette_publique : #austérité avec #intérêts - #DATAGUEULE 96 - DataGueule
    https://peertube.datagueule.tv/videos/watch/a57b0b52-3bda-49b2-ae5c-365f0dc600c1


    /static/previews/a57b0b52-3bda-49b2-ae5c-365f0dc600c1.jpg

    #Transition_écologique, lutte contre la #pauvreté, réforme des #retraites : il est une data qui permet de justifier toutes les inactions et les rigueurs... Mais c’est le chiffre de la dette publique, bien sûr ! Et parce que nous vivons soit disant au dessus de nos moyens, il nous faudrait nous soumettre aux créanciers et au chantage à l’austérité. Bien sûr. Pourtant, à bien y regarder c’est moins les dépenses publiques que les cadeaux fiscaux qui creusent notre dû. Alors, au fait, à qui profite la dette ?

    #traité_de_Maastricht #carmen_reinhart #kenneth_rogoff #isf #impôt #trésor_public #banque_centrale #Grèce #sécurité_sociale #fiscalité #pression_fiscale #propriété_privée #philosophie #expropriation #révolution_française #défaut_sur_la_dette #audit_de_la_dette #lutte_des_classes #flat_tax #dépenses_fiscales #niches_fiscales #inflation #responsabilité_politique

    Invité : Arthur Jatteau, MCF en économie et sociologie à l’université de Lille, membre des #économistes_atterrés

  • #Fiscalité_économique : les associations d’élus montent au créneau
    https://www.banquedesterritoires.fr/fiscalite-economique-les-associations-delus-montent-au-creneau

    Huit associations d’élus ont écrit au chef de l’État pour lui demander de « ne pas écorner la territorialisation de la fiscalité économique locale ni grever le #budget de l’État d’une nouvelle charge de compensation ». Une réponse à l’intense #lobbying mené par les organisations patronales sur le front de la fiscalité économique.

    […] Le chantier de la fiscalité de production - qui selon les industriels plombe la #compétitivité des entreprises hexagonales par rapport à leurs homologues allemandes, notamment (on parle d’un rapport de un à sept) - avait été lancé fin 2017 avant d’être mis en sourdine.

    […] Pour l’heure, seule semble faire consensus la suppression de ce qui reste de la #C3S. Et pour cause, il ne s’agit pas d’un impôt local. Mais son montant, 3,8 milliards d’euros, versé à la #Sécurité_sociale (qu’il faudra bien compenser), n’est pas à la hauteur du « choc de compétitivité » de 20 milliards sur cinq ans demandé par France #industrie.

    #fiscalité_locale

  • Retraites : défendre l’héritage d’#Ambroise_Croizat

    Plébiscitant la réforme des retraites, un élu LREM a repris, à tort, les mots du ministre communiste Ambroise Croizat, père de la Sécurité sociale. La journaliste Lucie Chopin procède à quelques rappels historiques utiles.

    Le 28 décembre dernier, en pleine grève des cheminots contre la réforme des retraites, Julien Bargeton, sénateur de la majorité, annonce sur Twitter sa venue sur une chaîne d’info continue en citant Ambroise Croizat : « L’unité de la Sécurité sociale est la condition de son efficacité. » Sortie de son contexte, la phrase ne dit rien du conflit en cours, l’« unité de la Sécurité sociale » désignant la prise en charge au sein d’un même organisme de plusieurs risques sociaux, comme la maladie, les accidents du travail ou la vieillesse. Mais cette intervention fait affleurer dans le débat public le nom d’Ambroise Croizat, maître d’œuvre, après la Seconde Guerre mondiale, de la Sécurité sociale et du système de retraite par répartition.

    Choqué de ce qu’il appelle une « imposture », Pierre Caillaud-Croizat, petit-fils d’Ambroise, se fend d’une lettre ouverte à l’attention du sénateur, dans laquelle il lui refuse le droit de revendiquer l’héritage de son aïeul, communiste de la première heure. Rappelant « l’engagement viscéral » pour la « défense des plus démunis » de Croizat, il accuse le gouvernement de se livrer à des « turpitudes de démantèlement du système » et précise : « Une originalité du système Croizat, c’était justement de mettre les cotisations à l’abri des appétits de la finance en général et de l’assurance privée en particulier. »
    La Sécu fondée par un communiste

    Mais qui était Ambroise Croizat ? Il y a soixante-neuf ans, au moment où on porte en terre son corps vaincu par l’épuisement et la maladie, il est loin d’être ce quasi-inconnu que l’on peut aujourd’hui convoquer sans rappeler ses engagements : une foule reconnaissante d’un million de personnes est alors dans la rue pour l’accompagner au Père-Lachaise.

    C’est que, ministre du Travail de novembre 1945 à mai 1947, l’homme est à l’origine de toute une série de mesures entrées dans l’histoire sociale : la Sécurité sociale (souvent attribuée exclusivement au haut fonctionnaire gaulliste Pierre Laroque), le système de retraite par répartition, les comités d’entreprise, la médecine du travail…

    De nos jours, sa mémoire n’est plus guère entretenue que par des responsables cégétistes et des militants communistes, même si cela est peut-être en train de changer1. Son nom n’est associé communément à aucune loi. Une explication possible : un certain fétichisme du progrès qui, en se détournant de l’idée de « bien commun », fait mauvais ménage avec ce que Croizat appelait les « conquis » – dénué de connotation de lutte des classes, le mot « acquis » lui paraissait trop faible. « Le patronat ne désarme jamais », disait-il. Pourquoi nommer ce qu’on souhaite voir disparaître ?

    Une fenêtre historique

    Pierre Caillaud-Croizat, né bien après sa disparition, raconte avec admiration et affection un homme qui, malgré ses responsabilités, est resté « un prolo toute sa vie », rémunéré comme un ouvrier spécialisé par le Parti, auquel il reversait l’intégralité de son salaire (cette règle vaut toujours, même si le salaire de référence n’est plus celui d’un ouvrier, mais celui de l’élu avant le début de son mandat). Apprenant qu’elle allait déménager au ministère, sa femme, Denise, s’était exclamée : « C’est beaucoup trop grand ! », inquiète à l’idée de toutes les heures de ménage qui, pensait-elle, l’attendaient. Sur les photos d’époque, on le découvre un peu austère, souvent coiffé d’un chapeau de feutre. Son regard clair semble voilé d’une mélancolie qu’on devine causée par le spectacle de ce qu’il appelait la « désespérance ouvrière ».

    La courte vie de Croizat, mort à 50 ans d’un cancer du poumon, est jalonnée d’épreuves et de luttes. Militant, ce fils d’un manœuvre en ferblanterie savoyard, qui a commencé à travailler à 13 ans, devient secrétaire général de la Fédération CGTU des Métaux en 1928. En 1936, il fait partie des 72 députés communistes élus au sein du Front populaire, à l’origine des congés payés, de la semaine de 40 heures, mais aussi des conventions collectives, du libre exercice du droit syndical… – des avancées sur lesquelles Edouard Daladier s’empressera de revenir avec ses « décrets misère ». En 1939, un mois et demi après la signature du pacte germano-soviétique, Ambroise Croizat est arrêté comme d’autres députés communistes. Condamné pour « trahison », il est déporté au bagne d’Alger. A sa sortie, en 1943, il lui reste à peine huit ans à vivre.

    Après la guerre, il est nommé ministre du Travail du général de Gaulle. Il parvient à bâtir, en quelques mois, la Sécurité sociale telle qu’elle a été rêvée par le Conseil national de la Résistance (CNR) : « Un plan complet de Sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d’existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail », inscrit au programme « Les Jours heureux », du 15 mars 1944. Pour y parvenir, il s’adresse à ses relais syndicaux dans les départements français. La Sécurité sociale « réclame vos mains », leur dit-il. De simples travailleurs, sur leurs heures de repos, construisent des bureaux, rédigent des fiches au nom des assurés sociaux.

    Le gaulliste Pierre Laroque le reconnaissait, rien n’eût été possible sans Croizat, ni sans l’enthousiasme qu’il sut transmettre sur le terrain. Rien non plus sans un rapport de force favorable : la CGT fait alors le plein d’adhérents, et les communistes, qui sont arrivés premiers aux élections constituantes de 1945, brillent de leur participation à la Résistance et de leur sacrifice – parmi les compagnons de route et de déportation de Croizat, on trouve Prosper Môquet, le père de Guy. « Ce qui se joue en 1946, c’est la démonstration de la capacité de pouvoir du mouvement ouvrier », résume l’économiste Bernard Friot, adhérent au Parti communiste, dans La Sociale (2016), le documentaire de Gilles Perret sur la « Sécu ».

    « Ministre des travailleurs »

    L’antienne qui veut que nos existences, parce qu’elles n’auraient pas grand-chose à voir avec ces vies de labeur des contemporains de Croizat, nés à l’aube du XXe siècle, n’ont pas besoin de tant de compensations est contestée par de nombreux opposants à la réforme, qui rappellent que l’espérance de vie des ouvriers est inférieure à la moyenne générale (de 17 ans pour les égoutiers). Une crainte s’exprime souvent, avec le système de retraite universel par points, celle de « crever au boulot ». Pierre Caillaud-Croizat en est certain, son grand-père aurait désavoué une réforme qui nivelle par le bas le niveau des pensions. La « solidarité » et la « dignité » ont toujours été ses mots d’ordre. Avec la Sécurité sociale, il voulait « libérer les Français de l’angoisse du lendemain ». La retraite devait cesser d’être « l’antichambre de la mort » pour devenir « une nouvelle étape de la vie ».

    Le système par points, en indexant les pensions sur des indicateurs économiques (par définition, sujets à des variations), avec un impératif d’équilibre financier, rompt avec cette résolution. La rentabilité de la Sécu n’était pas un objectif pour Croizat. Afin de la préserver des convoitises qu’attirerait immanquablement un budget supérieur à celui de l’Etat, la gestion en avait été confiée aux assurés eux-mêmes. « Faire appel au budget des contribuables […] serait subordonner l’efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières. Ce que nous refusons », disait-il. Financé par des cotisations, et non par l’impôt, le dispositif se distingue, par exemple, du modèle britannique, né un peu plus tôt.

    Bien sûr, cet héritage a déjà subi de nombreuses charges de la part des gouvernements successifs : dès 1967, le général de Gaulle instituait le régime du paritarisme, donnant le dernier mot au patronat dans les décisions, quand la Sécu de 1946 confiait, elle, le pouvoir aux travailleurs. Ambroise Croizat n’aura pas assisté au démantèlement de son œuvre. En octobre 1950, quatre mois avant sa mort, devant l’Assemblée nationale, il prévenait : « Jamais nous ne tolérerons que soit renié un seul des avantages de la Sécurité sociale. Nous défendrons à en mourir, et avec la dernière énergie, cette loi humaine et de progrès. »

    C’est là le sens du rappel à l’ordre de Julien Bargeton par Pierre Caillaud-Croizat. A la décharge du sénateur, l’histoire de Croizat n’est pas enseignée à l’école, il n’a fait son apparition dans le Petit Larousse qu’en 2011. Et même l’Ecole nationale supérieure de la Sécurité sociale (EN3S), à Saint-Etienne, n’a pas de salle Ambroise-Croizat2. Peut-être la cause de cette occultation est-elle à chercher du côté de l’engagement communiste et cégétiste de Croizat. Peut-être aussi, comme nous le suggère son petit-fils, faut-il y voir une forme de complexe du gouvernant : en quinze mois, un ouvrier métallurgiste qui n’avait pas fait d’études aura obtenu davantage, en termes de progrès social, que la quarantaine de ministres du Travail qui lui ont succédé. De quoi mériter son beau surnom de « ministre des travailleurs ».

    https://www.alternatives-economiques.fr/retraites-defendre-lheritage-dambroise-croizat/00091939
    #histoire #sécu #sécurité_sociale #héritage #retraites #retraite

  • "Une #ligne_rouge a été franchie" : la #lettre_ouverte à Macron des 1.300 #médecins hospitaliers démissionnaires

    Le 4 février 2020,

    Monsieur le président de la République,

    Nous sommes 1.300 #médecins_hospitaliers à avoir collectivement décidé de démissionner de nos fonctions administratives de chef de service ou d’unités de soins parce que, depuis des années, nous assistons à une #dégradation continue des #conditions_de_travail des équipes hospitalières. Une ligne rouge a été franchie : la qualité des #soins se dégrade, la #sécurité n’est plus assurée.

    Lors de votre élection à la présidence de la République, nous avons espéré un changement, la « fin d’un système à bout de souffle », comme le déclarait justement la ministre de la Santé. En effet, il n’est plus possible de continuer à faire fonctionner l’hôpital comme une entreprise commerciale, tout en lui imposant en moyenne 800 millions d’euros d’économies chaque année.

    Au cours des dix dernières années, la fameuse « #tarification_à_l’activité » a contraint les hôpitaux à augmenter toujours plus leur activité, alors que les gouvernements décidaient de baisser les #tarifs de paiement des séjours par la #Sécurité_sociale. Ainsi de 2005 à 2015, l’activité a augmenté de près de 15%, sans augmentation de personnel au lit des malades.

    Aujourd’hui, l’hôpital est à #bout_de_souffle, il n’est plus attractif ni pour les divers professionnels paramédicaux, en particulier les #infirmiers, ni pour les médecins. Bon nombre d’entre eux fuient les hôpitaux publics.

    Par conséquent, des lits ferment, l’activité baisse, les patients attendent des heures aux #urgences couchés sur des brancards.

    Votre #promesse d’un changement de financement n’a pas, à ce jour, été tenue.

    Le mouvement de #protestation des #personnels_hospitaliers a conduit le gouvernement à proposer, en urgence, une rallonge de 200 millions d’euros (plus 100 millions pour les EHPAD) en 2020, puis de 200 millions de plus en 2021 et en 2022. Mais on demande encore, pour cette année, une économie de 600 millions d’euros à l’hôpital public.

    Malgré l’attribution de #primes à moins du tiers des personnels, la France continuera à occuper la place honteuse de 28ème sur 32 dans le classement OCDE des #rémunérations infirmières.

    Certes le #plan_Ma_santé_2022 devrait permettre de mieux coordonner le travail des hôpitaux avec la médecine de ville ; certes l’accès aux #études_médicales va s’améliorer en mettant fin au #concours guillotine de première année, mais ces mesures vont mettre des années avant de produire leurs effets. D’ici là, que restera-t-il de l’#hôpital_public ?

    C’est maintenant qu’il faut agir. Il y a #urgence, urgence pour les Urgences, urgence pour la Psychiatrie, urgence pour la Pédiatrie, urgence pour tous les hôpitaux publics universitaires et non universitaires.

    Vous l’avez vous-même affirmé, l’hôpital public est un trésor de la République et il doit être sauvé. La prochaine élection présidentielle de 2022 ne doit pas donner lieu à un grand débat sur l’#effondrement de l’hôpital public.

    Monsieur le président de la République, nous vous demandons de sauver l’hôpital public, en prenant au moins deux décisions :

    - supprimer toute demande d’économie à l’hôpital public d’ici la fin du quinquennat (la reprise seulement partielle et échelonnée de la dette par l’État ne suffira pas). L’hôpital doit pouvoir embaucher le personnel nécessaire pour assurer des soins de qualité et garantir la sécurité des patients.
    – ouvrir des négociations avec les organisations syndicales représentatives des personnels hospitaliers pour engager un plan de rattrapage des #salaires, avec comme objectif la moyenne des pays de l’OCDE, et permettre ainsi de restaurer l’#attractivité de l’hôpital public.

    Nous vous prions de croire, Monsieur le Président, en notre profond respect et en notre dévouement à l’hôpital public.

    https://www.marianne.net/debattons/tribunes/une-ligne-rouge-ete-franchie-la-lettre-ouverte-macron-des-1300-medecins
    #hôpital #hôpitaux #France #démissions #Ma_santé_2022

  • #Retraites : le #Conseil_d'Etat étrille le #gouvernement

    Manque de « précision », projections économiques « lacunaires »... Dans son #avis rendu public ce vendredi, la plus haute juridiction administrative estime en outre ne pas avoir eu « les délais de réflexion nécessaires pour garantir au mieux la #sécurité_juridique ».

    Voilà qui ne va pas arranger les affaires du gouvernement. A peine a-t-il fait adopter ce vendredi en Conseil des ministres ses deux projets de loi destinés à créer un régime universel de retraite par points que le Conseil d’Etat, dans son avis (https://www.conseil-etat.fr/ressources/avis-aux-pouvoirs-publics/derniers-avis-publies/avis-sur-un-projet-de-loi-organique-et-un-projet-de-loi-instituant-un-s) publié ce même jour dézingue la manière dont l’exécutif a bouclé ces deux textes qui doivent être examinés à partir du 3 février à l’Assemblée nationale. La majorité comptait dans les prochains jours s’appuyer sur l’imposante étude d’impact (plus de 1000 pages : https://www.liberation.fr/france/2020/01/24/travailler-plus-le-credo-social-douteux-du-gouvernement_1775134) pour enfin apporter des chiffres et convaincre du caractère « massivement redistributif » de cette réforme, elle va devoir, ces prochains jours, répondre aux mises en garde de la plus haute instance administrative française, pourtant peu connue pour sa rébellion…

    Cette fameuse « #étude_d’impact » ? Elle est jugée « insuffisante » pour « certaines dispositions », ne répondant pas « aux exigences générales d’#objectivité et de #sincérité » et manquant de « précision », pour notamment – et ce n’est pas rien – « vérifier que cette réforme est financièrement soutenable ». « Le Conseil d’Etat constate que les #projections_financières ainsi transmises restent lacunaires et que, dans certains cas, cette étude reste en deçà de ce qu’elle devrait être », peut-on lire dès les premières pages de l’avis. Et les conseillers de poursuivre : « Il incombe au gouvernement de l’améliorer encore avant le dépôt du #projet_de_loi au Parlement, poursuivent les magistrats, en particulier sur les différences qu’entraînent les changements législatifs sur la situation individuelle des assurés et des employeurs, l’impact de l’âge moyen plus avancé de départ à la retraite […] sur le taux d’emploi des seniors, les dépenses d’assurance-chômage et celles liées aux minima sociaux ». Rien que ça.

    Soufflante

    Par ailleurs, si les juristes se félicitent des longues « concertations » menées depuis le printemps 2018, ils regrettent l’« #urgence » des avis demandés aux différents organismes compétents en la matière et se couvrent en cas d’#inconstitutionnalité du texte. Selon eux, l’empressement du gouvernement à vouloir leur avis en trois semaines pour présenter ces projets de loi en Conseil des ministres cette semaine, ainsi que les nombreux ajouts en cours de route n’ont « pas mis à même (le Conseil d’Etat) de mener sa mission avec la sérénité et les délais de réflexion nécessaires pour garantir au mieux la sécurité juridique de l’examen auquel il a procédé ». « Cette situation est d’autant plus regrettable, poursuivent-ils, que les projets de loi procèdent à une réforme du système de retraite inédite depuis 1945 et destinée à transformer pour les décennies à venir un système social qui constitue l’une des composantes majeures du #contrat_social ». En langage juridique, c’est bel et bien une soufflante.

    Le Conseil d’Etat torpille au passage le #slogan_présidentiel (« chaque euro cotisé ouvre les mêmes droits pour tous ») : cet « objectif […] reflète imparfaitement la complexité et la diversité des #règles_de_cotisation ou d’ouverture de #droits définies par le projet de loi ». Il doute également de la « #lisibilité » revendiquée par le gouvernement puisque « le choix d’une détermination annuelle de chacun des paramètres du système […] aura pour conséquence de limiter la #visibilité des assurés proches de la retraite sur les règles qui leur seront applicables ». Enfin, il raye carrément l’engagement que comptait prendre le gouvernement dans ce texte d’une promesse de #revalorisations des #enseignants et des #chercheurs pour qu’ils ne figurent pas dans le camp des perdants de cette réforme. « Sauf à être regardées, par leur imprécision, comme dépourvues de toute valeur normative, ces dispositions (sont) contraires à la #Constitution ». Au revoir…

    « Le projet de loi ne crée pas un régime universel »

    Autre risque constitutionnel : le trop-plein d’#ordonnances (29 en tout). « S’en remettre » à un tel instrument pour définir des « éléments structurants du nouveau système de retraite fait perdre la visibilité d’ensemble qui est nécessaire à l’appréciation des conséquences de la réforme », disent les juges. Plus embêtant encore pour le gouvernement, l’institution bat en brèche l’idée d’un grand soir de l’#universalité : « Le projet de loi ne crée pas un "#régime_universel de retraite" qui serait caractérisé, comme tout régime de #sécurité_sociale, par un ensemble constitué d’une population éligible unique, de règles uniformes et d’une caisse unique ». Aïe… Si le gouvernement crée bien le même système pour les salariés du public et du privé, il maintient à l’intérieur « cinq #régimes » (salariés ; fonctionnaires, magistrats et militaires ; salariés agricoles ; non-salariés agricoles ; marins) et « à l’intérieur de chacun de ces régimes créés ou maintenus », il met en place des « #règles_dérogatoires à celles du système universel ».

    L’exécutif va donc devoir bien mieux « justifier » pourquoi il garde ces « #différences_de_traitement […] entre assurés relevant du système universel de retraite et rattachés, le cas échéant, à des régimes distincts ». En tout cas, les navigants aériens qui pensaient avoir sauvé leur caisse complémentaire pour financer des départs anticipés sont rattrapés par le #principe_d’égalité : elle « serait ainsi la seule à bénéficier d’une compensation apportée par les ressources du système universel afin de financer à l’avenir des avantages de retraites propres », fait remarquer le Conseil pour qui « aucune différence de situation ni aucun motif d’#intérêt_général ne justifi(e) une telle #différence_de_traitement ». Conclusion : « Elle ne peut être maintenue dans le projet de loi. »

    Le gouvernement pourra néanmoins se rassurer en se disant que le nouvel « #âge_d’équilibre » qu’il compte instituer, le fonctionnement « en #points » proposé, les durées de transitions définies, la fin des régimes spéciaux, les droits familiaux, les mécanismes de réversion ou encore les compétences offertes à la future « gouvernance » dirigée par les partenaires sociaux devraient – sauf surprises – passer sans problème le cut du #Conseil_constitutionnel. A condition de résister aux oppositions parlementaires qui, elles, vont se nourrir des arguments du Conseil d’Etat pour réclamer un report ou l’abandon de cette réforme.

    https://www.liberation.fr/france/2020/01/25/retraites-le-conseil-d-etat-etrille-le-gouvernement_1775182
    #retraite #constitutionnalité #justice

  • Suisse : Entreprises « sanctionnées » pour avoir embauché trop de femmes enceintes
    https://www.rts.ch/info/suisse/11029792-entreprises-sanctionnees-pour-avoir-embauche-trop-de-femmes-enceintes.h

    En Suisse, des entreprises se retrouvent pénalisées par leur assureur après de multiples grossesses. Elles dénoncent un frein à l’embauche des femmes.

    C’est le cas notamment d’une petite société genevoise active dans la nutrition. Elle a recruté une majorité de femmes, qui sont toutes tombées enceintes au cours des trois dernières années et se sont absentées avant le terme.

    Résultat : retour de balancier de l’assurance perte de gain (APG) en cas de maladie. L’entreprise a vu la totalité de ses primes augmenter de 50% en ce début d’année, raconte son administrateur Renaud Langel.
    « Cette accumulation de cas fait que nous devenons une société entre guillemets à risque. Puis finalement, les primes augmentent de manière assez exorbitante », déplore-t-il.

    « Pas de distinction »
    Le patron genevois paie déjà des primes plus élevées pour les femmes qu’il engage (comparé aux hommes). Il découvre désormais cette nouvelle « sanction », comme il le dit.

    C’est un frein supplémentaire à l’embauche des femmes, dénonce-t-il, alors qu’il milite pour plus d’égalité dans le monde du travail. Les assureurs ne font pas de distinction entre les types d’arrêts. Ils ne regardent que le ratio des sinistres, mais ne tiennent pas compte des diagnostics.

    « C’est ça que je trouvais choquant : il n’y a pas de distinction entre une vraie maladie et une grossesse. Quand on parle de grossesse, ce ne sont pas des problèmes récurrents liés à une mauvaise gestion ou à une activité à risque », explique Renaud Langel.

    Négocier avec les assureurs
    Contactés par la RTS, les assureurs renvoient la balle aux politiques. Finalement, c’est le législateur, en Suisse, qui n’a pas voulu d’assurance sociale (d’allocation de maternité) avant la naissance de l’enfant. Contrairement à nos pays voisins.

    Pourtant, la majorité des femmes s’arrêtent avant le terme. Plus de 80% des femmes s’absentent avant leur accouchement et cette absence dure en moyenne six semaines, selon les autorités fédérales.
    . . . . . .

    #Femmes #sexisme #discrimination #assurances #Sécurité_Sociale #Mutuelles #travail #Santé #inégalités