Misère de nos vies "numériques" :
Pourquoi le mot “viol” est devenu “vi*l” sur TikTok et autres réseaux sociaux
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« On m’interviewe sur le déni du viol dans la société française et je découvre dans la vidéo publiée sur Instagram que le terme “viol” a été bipé et que le mot complet n’apparaît pas en sous-titre. C’est très violent. » Le 20 novembre, la journaliste Alice Géraud, coauteure de la série Sambre, sur Dino Scala, violeur qui a fait plus de quarante victimes, découvre sur les réseaux sociaux le montage de son entretien donné quelques jours plus tôt au média Télé 7 jours. Dans les sous-titres, il est écrit « vi*l ». Alice Géraud confie à Télérama : « C’est une mise en abyme assez étonnante du déni du viol. » Jérémy Parayre, rédacteur en chef de Télé 7 jours, revient sur ce choix : « La question s’est posée dans l’équipe et j’ai moi-même été choqué par ce bipage. Mais comme nous voulions que son discours soit audible par notre communauté tout en évitant le déréférencement de notre vidéo par les plateformes… C’était la solution. Oui, c’est contradictoire, je comprends sa réaction. »
Télé 7 jours n’est pas le seul média à utiliser cette pratique. Il suffit de faire un tour sur Instagram, TikTok et YouTube pour constater la disparition du mot viol. À la place, on peut lire « vi*l » ou « vi0l » sur les réseaux sociaux de médias comme Brut, Hugo Décrypte, Urbania ou Le Parisien. Certains vont jusqu’à camoufler les termes « sexe », « attentat » ou « prostituée ».
En cause ? La peur du « shadowban ». Sur les réseaux du groupe Meta ou sur TikTok, ce « bannissement de l’ombre » toucherait les profils publics. Un compte peut être banni temporairement par la modération de ces entreprises s’il utilise certains termes ou images. Parfois, le nom de l’utilisateur n’apparaît plus dans la barre de recherche alors que son compte est toujours en ligne. D’autres fois, sa story n’est plus visible ou ses posts ne sont plus mis en avant dans l’onglet « discover » ou dans les « feeds » de ses abonnés. La plateforme ne prévient jamais l’internaute. Il prend connaissance de son invisibilisation grâce aux statistiques de son compte : un nombre de vues qui flanche, moins de partages des publications, etc.